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« Du gouvernement représentatif en Belgique (1831-1848) », par E. VANDENPEEREBOOM

Bruxelles, Librairie polytechnique d’Aug. Decq, 1856, 2 tomes

 

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TOME 1

 

SIXIEME SESSION (1835-1836) (gouvernement de Theux)

 

1. L’absence de discours du Trône

 

(page 223) Le premier renouvellement, par moitié, de la Chambre et du Sénat, avait eu lieu le 9 juin 1835. Vingt nouveaux membres étaient entrés dans la première de ces assemblées. La sixième session s'ouvrit le 4 août suivant : elle fut close le 17 juin 1836. Sa durée fut de dix mois, mais en réalité de huit mois seulement, puisque la Chambre suspendit ses travaux pendant deux mois, du 14 septembre au 11 novembre 1835.

Une circonstance fâcheuse marqua l'ouverture de cette session, ce fut l'absence d'un discours du Trône. Le ministère n'indiqua pas le motif de cette innovation. M. Dumortier se plaignit vivement, et avec raison, que les représentants de la nation fussent privés du plaisir d'entendre le Roi, et du droit de lui porter les vœux du pays. Très anciennement, les rois présidaient, en personne, les assemblées des Etats ou Parlements, pour conférer, avec ceux qui avaient droit d'y siéger, des affaires et des intérêts de la nation (Rex tenetur omni modo personnaliter interesse parliamento, nisi per corporalem œgritudinem detineatur... Causa est quod solebat clamor et murmur esse in parliamento pro absentia regis, quia res damnosa et peri- culosa est toti communitati parliamenti, et etiam regni, cum rex a parliamento absens fuerit... (STATUTA ANTIQUA, in quibus Angliœ totius regni comitia ordinantur. DOM D'ACHERI, Spicilegium, t. III, p. 394)). Dans les assemblées constitutionnelles modernes, les souverains ouvrent les sessions, en prononçant ce qu'on est convenu d'appeler le discours (page 224) discours du Trône, généralement eux-mêmes, quelquefois par l'organe de leurs ministres, parlant alors au nom du souverain. C'est un antique et utile usage, que celui qui met le chef de l'Etat en contact officiel avec les élus de son peuple : c'est une heureuse rencontre que celle de la royauté et de la nation, dans le temple des lois. En effet, cette réunion est comme un appel indirect à la conciliation et à la sage modération de tous, puisque, dans les Gouvernements représentatifs, les lois ne peuvent se produire que par le concours de tous les pouvoirs constitutionnels, et que, pour cela, l'accord est nécessaire. Un ministère a donc tort de conseiller une telle infraction aux usages, sans motifs graves, et surtout s'il n'a eu en vue que le seul bénéfice d'éviter une discussion, à propos de l'adresse.

Afin de racheter par l'annonce d'un dégrèvement de contribution l'oubli, ou plutôt le mépris de cette importante pratique parlementaire, M. le Ministre des Finances s'empressa de déposer un projet, tendant à la suppression de la perception ultérieure et même au remboursement de la partie payée des 10 p. c. additionnels pour subvention de guerre. Le retrait d'une contribution consentie est chose assez rare, dans les Gouvernements constitutionnels, pour qu'on le signale comme curiosité. Il va sans dire qu'il n'y eut pas d'opposition à cette loi exceptionnelle (Loi du 9 août 1835. Ce fut l'assemblée de 1789, en France, qui substitua le terme de contribution à celui d'impôt. Le premier suppose un consentement libre ; aussi, dans le langage de cette époque, disait-on : « Un peuple libre n'acquitte que des contributions, un peuple esclave paye des impôts ! »).

 

2. La réorganisation de l’enseignement universitaire

 

Nous avons vu que le ministère du 20 octobre 1832 avait, peu avant sa retraite, déposé un projet complet sur les trois branches de l'instruction publique à donner aux frais de l'État. Dans la précédente session, la Chambre avait décidé, sur la proposition de M. Dechamps, rapporteur de la section centrale, (page 225) qu'elle s'occuperait d'abord du titre III, « Enseignement universitaire. » C'est-à-dire qu'on allait construire ce vaste édifice, en commençant par le faîte. Peut-être aussi espérait-on en rester là. Si l'on veut une preuve des difficultés opposées à l'exécution des prescriptions de l'art. 17 de la Constitution, on la trouve dans cette circonstance, que c'est après quinze ans de lutte que notre législation a été complétée sur ce point. Il a fallu procéder par longues étapes, les dates sont là pour le constater : l'organisation de l'enseignement universitaire est de 1835 ; celle de l'enseignement primaire de 1842 ; celle de l'enseignement moyen de 1850. Et dès les débuts même, le Gouvernement avait été devancé par l'association privée, usant de la liberté que lui donne ce même art. 17. Dans le cours de l'année 1834, on avait fondé, à Malines, l'université catholique ; à Bruxelles, l’université libre (L’ Université catholique fut fondée le 10 juin 1834. Voir l’acte de fondation, signé par tous les évêques de Belgique et publié par le Moniteur de 1841, n°48, à la suite de la proposition Brabant-Dubus, ayant pour but de conférer la personnification civile à cette université. Voir décret du corps épiscopal du 11 juin 1834, arrêtant les statuts de l'université catholique, et décret du 15 octobre 1835, transférant ladite université de Malines à Louvain. L'Université libre fut fondée en 1834. Voir décision du conseil d'administration du 29 octobre 1834, arrêtant les statuts de l'université libre de Bruxelles. Voir, Exposé de la situation du royaume, 1841-1850, t. III, pp. 150 et suiv., des détails sur l'organisation de ces deux universités.). Après avoir ainsi cédé le pas à la libre association, et pour l'organisation et, ce qui était pire, pour le choix du personnel, le Gouvernement ne pouvait plus rester inactif, du moins à l'égard de l'enseignement universitaire. Car il existait deux universités, dont il fallait bien régler le sort. Peut-être, sans cette circonstance, le projet sur le haut enseignement serait resté dans les cartons ministériels, où l'on laissait dormir, paisiblement et pour si longtemps, les projets sur l’enseignement (page 226) primaire et moyen. En semblant se presser, M. le Ministre de l'Intérieur n'avait pas moins laissé aux établissements privés l'occasion d'accaparer les meilleurs professeurs, soit qu'ils fussent attirés par des offres lucratives, soit qu'ils fussent inquiets de la position incertaine que leur faisait le Gouvernement. Quoi qu'il en soit, dans la séance du 4 août 1835, M. de Theux vint proposer quelques modifications aux dispositions arrêtées par la section centrale et appeler la discussion immédiate sur cette question.

Un principe devait, avant tout, être décidé. Y aura-t-il une seule université de l'Etat, ou bien, y en aura-t-il deux, comme le proposaient le projet ministériel et la section centrale? Considérée en elle-même, cette question ne pouvait présenter le moindre doute. En présence des deux universités libres, que l'on venait de créer ; afin de concentrer tous les efforts du Gouvernement sur un établissement unique, dont on aurait fait ainsi un foyer de sciences et une source d'enseignement hors ligne ; pour profiter de l'heureuse réunion d'immenses richesses scientifiques, de vastes locaux et de nombreuses bourses d'études fondées, c'était à Louvain qu'on devait établir une seule université de l'Etat. Mais pour cela, il aurait fallu que Liège et Gand n'eussent pas eu d'université, ou eussent eu le patriotisme de faire le sacrifice de cet avantage ; il aurait fallu surtout que les habiles fondateurs de l'université catholique, provisoirement établie à Malines, n'eussent pas convoité le rétablissement de l’Alma mater, dans son ancien siège ! Toutes ces préoccupations d'intérêt privé ou local, secondées par le Gouvernement, amenèrent le résultat prévu, on pourrait dire combiné. Les ministres n'ouvrirent pas la bouche sur cette question si importante pour l'enseignement supérieur à donner aux frais de l'État : ils mirent une sourdine à la discussion. M. Rogier, faisant ce que le Gouvernement aurait dû faire, proposa l'amendement suivant : « Il y aura pour toute la Belgique une (page 227) seule université aux frais de l'État : elle sera établie à Louvain. » 32 membres l'admirent ; 37 le rejetèrent ; 2 s'abstinrent. Le plus faible effort du Gouvernement amenait une solution affirmative. La même proposition fut faite et soutenue avec autant d'énergie que de talent, au Sénat ; mais là aussi elle devait succomber devant un parti pris. Elle fut repoussée par 23 voix contre 11 et 2 abstentions. Ainsi se trouva tranchée cette question capitale pour l'enseignement, à laquelle, aujourd'hui même encore, tous ceux qui l'envisagent sans préoccupation d'intérêt local ou de parti auraient voulu voir donner une autre solution (S'il fallait une preuve, que ce n'était pas par amour de l'enseignement donné par l'Etat que l'on demandait deux universités, nous la trouverions dans cet aveu, fait lors de la discussion de l'Ecole militaire par M. Dechamps : « Je le dirai franchement, s'il avait dépendu de moi d'organiser l'enseignement universitaire, comme je le désirais, je n'aurais pas voulu qu'il y eût d'université de l'Etat ; j'aurais voulu qu'il n'y eût que des universités indépendantes du pouvoir sous le rapport de la science, comme cela existe en Angleterre et aux Etats-Unis, je les aurais fait rétribuer par le Gouvernement, parce que son devoir est d'aider tous les établissements utiles. » « Je pense que, puisqu'il y a deux universités organisées d'après les idées qui divisent la nation, il eût été beaucoup plus libéral que le gouvernement n'en fondât pas pour son compte ; qu'il se bornât à les aider comme il doit aider tout établissement qui peut contribuer au bonheur « public. » (Moniteur de 1837, n" 330.)

Il fallait pourvoir aussi au sort des jeunes gens qui auraient suivi les cours des universités non dirigées par l'État. La loi comprenait des dispositions relatives à un jury d'examen, qui conférerait des diplômes, d'après les connaissances des récipiendaires, quelle que fût la source à laquelle ils les avaient puisées. Mesure sage et libérale, parfaitement en harmonie avec l'esprit de nos institutions ! Mais à qui serait confiée la formation de ce jury ? Ici encore vinrent se manifester toutes les jalousies et toutes les préventions des partis. La discussion fut longue et vive à l'extrême. Il fallait procéder par questions (page 228) de principes. Les Chambres interviendront-elles dans la formation du jury ? 42 membres répondirent oui ; 41 non ; quatre ministres s'abstinrent. Le Gouvernement interviendrait- il aussi ? 80 membres furent pour l'affirmative ; 8 pour la négative. Ces questions ne furent ainsi résolues qu'après qu'on eut décidé que ces dispositions ne seraient que provisoires. (Loi du 27 septembre 1835, adoptée, à la Chambre, par 54 voix contre 39 et une abstention ; au Sénat ; par 24 voix contre 10. Moniteur de 1835, n°218 à 239, 264 à 272).

Cette partie de la loi fut souvent remaniée. Elle ne sera, pensons-nous, convenablement fixée, en ce qui concerne le jury d'examen, qu'à deux conditions essentielles. La première, c'est qu'il n'y ait qu'un seul jury central ; la seconde, c'est que ce jury soit nommé directement par le Gouvernement sous sa responsabilité et sauf, bien entendu, le contrôle des Chambres.

 

3. La loi sur les étrangers et la loi sur la naturalisation

 

M. Guizot a dit : « Tel est le vice naturel de toute révolution que la plus nécessaire, la plus légitime, la plus forte, jette dans de grands troubles la société qu'elle sauve, et reste longtemps elle-même menacée et précaire. » (Discours sur l'histoire de la Révolution d'Angleterre, p. 109). Tels furent les résultats de la nôtre ; car elle fut, tout à la fois, menacée par des étrangers turbulents et forcée de porter contre eux des lois exceptionnelles, qui sont toujours un grand trouble dans le Code des nations. Dès le 1er août 1831, un projet de loi concernant, en partie, les étrangers avait été présenté, puis retiré par le ministère, à cause des modifications qu'il avait subies. Le 12 août 1835, un nouveau projet fut déposé et discuté peu après. La difficulté consistait à donner au Gouvernement le droit d'expulsion, en certains cas, sans blesser les dispositions de l'art. 128 de la Constitution, qui donne aux étrangers, quant à leurs personnes et à leurs biens, la même protection qu'aux régnicoles, sauf les exceptions (page 229) établies par la loi. Il y fut pourvu, en ne donnant à la loi qu'une durée de trois ans, et aussi en exceptant de son application certaines catégories d'étrangers, appartenant à une nation en paix avec la Belgique : - l'étranger autorisé à établir son domicile en Belgique ; celui qui est marié à une femme belge, dont il a des enfants nés en Belgique, pendant sa résidence ; - l'étranger décoré de la Croix de Fer. Malgré tous ces tempéraments, cette loi ne fut admise qu'après la plus vive opposition . (Loi du 22 septembre 1835, adoptée, à la Chambre, par 64 voix contre 10 ; au Sénat, à l'unanimité. Moniteur de 1835, n°240 à 249, 264 à 267).

Dans un pays où l'hospitalité est proverbiale, parce qu'elle est dans les mœurs et dans les traditions, les soins minutieux que l'on prend pour adoucir de telles lois, même quand elles sont nécessaires, sont un devoir et un titre d'honneur pour les assemblées constitutionnelles auxquelles elles sont soumises. Comme si on voulait s'excuser de cette dure nécessité, l'on fit suivre la loi d'expulsion de celle de naturalisation : ainsi, si d'une part des étrangers, ennemis de notre nationalité, étaient repoussés de notre sol, en revanche, les étrangers paisibles, qui voulaient partager notre sort, trouvaient une place ouverte dans notre indigénat. Un premier projet, présenté en 1831, fut admis par la Chambre en 1833 : ayant été amendé par le Sénat, il n'y fut pas donné de suite. Un second projet, déposé en 1833, fut adopté, cette fois, sans grandes difficultés. (Loi du 27 septembre 1835, adoptée, à la Chambre, à l'unanimité ; au Sénat, par 26 voix contre 5. Moniteur de 1835, n°242 à 249, 263 à 267.)

L'art. 5 de la Constitution prescrit : « La naturalisation est accordée par le pouvoir législatif. La grande naturalisation « seule assimile l'étranger au Belge, pour l'exercice des droits politiques. » La loi ne détermine pas seulement le (page  230) mode d'après lequel les naturalisations seraient accordées, mais elle stipule aussi, plus précisément, les droits qu'elles confèrent et elle désigne ceux qui pourront être naturalisés. Ainsi, la naturalisation ordinaire donne tous les droits politiques, pour lesquels la grande naturalisation n'est pas exigée par la Constitution ou par la loi. C'est-à-dire que celui qui a reçu la petite naturalisation ne peut être élu, ni à la Chambre ni au Sénat, et qu'il ne peut devenir ministre (Constitution, art. 50, 56, 86) ; il ne peut concourir aux élections ni pour les Chambres, ni pour le conseil provincial (loi électorale, art. 1er, provinciale, art. 5). La grande naturalisation ne peut être donnée que pour services éminents rendus à l'Etat. Les enfants sont admis, dans certains cas et à certaines conditions, à jouir de la naturalisation accordée à leur père. Dans la pratique, les Chambres ne se sont pas toujours montrées assez rigoureuses, en conférant la grande naturalisation. (Voici le nombre des naturalisations accordées, en vertu de cette loi, de 1837 à 1850: Grandes naturalisations 23, petites naturalisations 851, naturalisations non acceptées 127 Total 1,001 Voir, Exposé de la situation, 1841-1850, t. II, pp. 42-43, les détails.)

 

4. La mise en place du service postal

 

Après avoir voté ces lois, la Chambre s'occupa du projet relatif à la taxe des lettres et à la poste rurale. La législation existante était l'arrêté du Gouvernement hollandais du 18 janvier 1818, qui modifiait la loi du 27 frimaire an VIII. Cet arrêté était doublement illégal ; d'abord, la question n'avait pas été soumise à la Législature ; ensuite, l'arrêté lui-même n'avait pas été publié. Le projet nouveau redressait, quelque peu, certaines anomalies de perception, eu égard aux distances parcourues ; mais il n'en arrivait pas encore à cet abaissement de la taxe des lettres et des journaux, auquel on est  (page 231) descendu depuis. Les dispositions les meilleures étaient celles qui donnaient naissance au service rural, dans des proportions restreintes, il est vrai, mais qui devaient nous conduire à ce vaste service général existant aujourd'hui. Chose étrange ! ce fut précisément cette amélioration qui rencontra la plus vive opposition. On prétendit qu'il était inconstitutionnel de demander aux provinces et aux communes de verser au Trésor les sommes qu'elles consacraient à un simulacre de service : on pleura sur le sort des messagers piétons et des messagistes : on vit des gendarmes fouillant toutes les poches pour y trouver des lettres transportées en fraude. On rirait bien de toutes ces doléances, aujourd'hui que le service rural s'est étendu partout, au grand avantage du commerce et des relations privées. Le progrès a parmi ses autres mérites celui d'être le prix d'une lutte et le fruit d'une victoire. (Loi du 29 décembre 1835, adoptée, à la Chambre, par 51 voix contre 18 ; au Sénat, par 33 voix contre 2. Moniteur de 1835, n°317 à 321, 364, 366).

Qu'on ne nous accuse pas d'employer le mot progrès, à propos d'une loi sur la poste aux lettres. Voici ce que M. Matter dit, avec raison, de ce service : « L'établissement des postes est l'une des plus simples de nos institutions publiques : c'est à peine si c'en est une dans la pensée du vulgaire. Et, en effet, au premier .aspect, elle est purement matérielle, commerciale. Cependant, au fond, elle touche, par tous les côtés, aux principales questions de la politique et de la morale. Eh bien ! elle était impossible avant Louis XI, avant la royauté à peu près toute-puissante, absolue, et ce monarque lui-même ne put songer à l'établir pour d'autres services que le sien et celui du pape.

« Pour apprécier tous les obstacles qu'offrait une institution si simple, voyez ce qu'elle demeura si longtemps après « Louis XI, dans d'autres empires ; voyez ce qu'elle était  (page 232) naguère encore, dans un pays très civilisé, en Allemagne, où, pour l'établir, il a fallu créer une sorte de dynastie. (Latour et Taxis), qui eût le privilège dans les divers Etats « de l'Empire. » (Histoire des doctrines, t. I, p. 103)

 

5. Le remboursement des los-renten

 

Les discussions sur les « Domein-los-renten » fournissent une preuve des soins que toutes nos législatures ont pris de conformer leurs actes à notre ancienne réputation de loyauté. La liquidation que nous avons faite, en 1843, avec la Hollande, a définitivement réglé ce point. Revues en ce moment, les discussions de 1835 ne nous apparaissent que comme un souvenir historique, une lumière jetée sur les ténébreuses opérations du syndicat d'amortissement. Ceux qui voudraient y revenir peuvent consulter le Mémoire de M. le Ministre des Finances du 30 janvier 1833, le rapport lumineux de M. Fallon et les discussions. Il est fâcheux qu'à cette époque, on n'ait pas songé à suspendre le payement des domaines en los-renten. Les porteurs de ces billets étaient désintéressés dans la question, puisque, par une résolution du syndicat d'amortissement, en date du 28 septembre 1830, ils avaient la faculté de faire produire à leurs effets un intérêt de 5 p. c. On aurait pu aussi stipuler le payement des domaines acquis en numéraire, en bonifiant la légère différence de 5 à 6 p. c. entre le cours des los-renten, cotés aux environs de 95. Il n'y avait qu'à défalquer le montant de cet écart sur chaque payement en espèces. Cette mesure eût rendu plus facile et moins onéreuse notre liquidation de 1843. (Loi du 28 décembre 1835, adoptée, à la Chambre, par 42 voix contre 13 ; au Sénat, par 21 voix contre 7. Moniteur de 1835, n°139-140, Rapport de M. Fallon, n°322-366, Discussions.)

 

6. Les tentatives protectionnistes

 

C'était l'erreur de cette époque, - elle n'a pas encore totalement disparu aujourd'hui, - de rechercher le développement de l'industrie et de l'agriculture dans la protection (page 233) plutôt que dans le progrès. Vingt-quatre représentants des Flandres avaient proposé de protéger l'industrie cotonnière, à l'aide de la prohibition, de l'estampille, des visites domiciliaires et à l’intérieur. Ce ne fut pas sans peine que les signataires amenèrent la Chambre à l'examen de ce déplorable système, qui n'eut pas de succès et qui en méritait si peu. L'opposition ne vint pas seulement de l'intérieur, mais la diplomatie étrangère éleva aussi vivement la voix ; la France et la Prusse adressèrent des réclamations très formelles, qui furent communiquées à la Chambre. Cette circonstance, comme l'excès des demandes déposées, en amena l'avortement. La prohibition avait été écartée par la section centrale : M. Rogier voulut reprendre, pour la faire condamner, cette proposition ; il invoquait les termes de l'art. 46 du règlement, il en fut empêché. Les visites domiciliaires furent repoussées par 65 voix contre 5, et 11 abstentions ; l’estampille et la recherche à l'intérieur le furent, par 57 voix contre 19, et 3 abstentions. L'ajournement de la discussion fut prononcé. (Voir, livre II, p. 93, ce que nous disons de cette question. Moniteur de 1835, n°252-256).

Cet échec des protectionnistes ne découragea pas le Gouvernement, car il vint lui-même préconiser leur système, cette fois en faveur de l'agriculture. En effet, il proposa un projet sur l'entrée et le transit du bétail. Le motif avoué de la loi était l'énorme quantité de bétail hollandais introduit. Or, voici ces quantités, d'après les chiffres présentés par le Gouvernement : En 1834, il était entré de l'étranger, pour la consommation intérieure : Bœufs, taureaux et vaches 5,706, Génisses 4,231, Moutons 7,415 Agneaux 3,989 (page 234) Le ministère estimait la valeur de cette importation à un chiffre minimum de 2,375,834 francs. A cette époque, l'Annuaire de l'Observatoire de Bruxelles, constatait qu'en 1828 la Belgique possédait : En bœufs, taureaux et vaches 882,000 têtes, en moutons et agneaux 774,000 têtes. Quelle influence considérable pouvait avoir une importation de 21,341 animaux, sur une existence intérieure de 1,656,000? Ce n'était pas 1 1/2 p. c. Les opposants à la loi, M. Rogier principalement, mirent en relief ce chiffre insignifiant. Pour permettre de juger la portée de la loi, nous donnons ici le tarif adopté (ce tarif n’est pas repris dans la présente version numérisée).

(page 235) Le projet du Gouvernement était bien plus outré encore ; il proposait par tête : pour les chevaux, 50 francs ; pour les poulains, 15 francs ; pour les bœufs, taureaux et vaches, 50 francs ; pour génisses, etc., 25 francs ; veaux de 60 à 120 kilogrammes, 15 francs ; veaux de moins de 60 kilogrammes, 15 francs ; pour les moutons, 5 francs ; pour les agneaux, 1 franc. La perception au poids a été reconnue, partout, comme la plus juste, au point de vue fiscal ; comme la plus avantageuse à l'industrie agricole, puisqu'elle permet l'introduction du bétail maigre pour l'élève et pour l'engraissement. Mais tout adoucie qu'elle fut, la loi nous parait mauvaise à plus d'un point de vue. Les mesures rigoureuses déjà existantes pour le bétail possédé par les habitants du rayon de douane étaient encore renforcées. Le transit était prohibé. Le prix d'une denrée alimentaire utile était exposé à s'élever, sans grande nécessité. Les discussions occupèrent la Chambre pendant douze séances (Loi du 31 décembre 1835, adoptée, à la Chambre, par 49 voix contre 20 et trois abstentions ; au Sénat, par 25 voix contre 4 et 3 abstentions. Moniteur de 1835, n°328 à 364).

 

7. La mise en œuvre de la péréquation cadastrale

 

Les Chambres furent saisies d'une réclamation élevée depuis longtemps ; de la plus juste répartition de la contribution foncière, d'après les opérations partiellement terminées du cadastre. Dans nos anciennes provinces, le fait d'asseoir l'impôt sur le territoire cadastré, du moins à l'état rudimentaire, paraît être ancien (« Ce n'est qu'en 1347 qu'a été fait le premier cadastre ou matricule pour la Flandre, vulgairement nommé transport ; il fut changé à Oudenbourg, en 1408 ; Charles-Quint en fit faire un nouveau, en 1517, qui fut changé en 1631, et qui était encore en pleine vigueur à l'entrée des Français, en 1794 ; on suivait pour leur confection une marche différente de celle que l'on suit aujourd'hui... Le cadastre du Brabant n'a été arrêté qu'en 1421. » L'auteur ajoute : « et il renferme une clause qui nous conduit plus avant dans le développement de cette maxime constitutionnelle, suivant laquelle chaque lieu n'accordait le subside que pour soi ; car il y est statué « que les biens des Flamands et de ceux du Hainaut et d'autres pays étrangers, situés en Brabant, ne seront compris dans la répartition des aides et subsides, que lorsque les biens des Brabançons, situés dans ces provinces y seront pareillement imposés. »» (RAEPSAET, Histoire des états généraux, etc. Gand, 1819, pp. 156 et 157.)). Le cadastre actuel a son origine (page 236) dans la suppression de la dîme et dans son remplacement par une contribution foncière. L'assemblée nationale de France ayant aboli toutes les taxes inégales sur les produits du sol, établit l'impôt foncier, en 1791. Elle fut bientôt amenée à décréter le cadastre, parce qu'elle s'aperçut que l'assiette de l'impôt était fort irrégulière : elle conçut ce travail sur la plus vaste échelle et tel qu'il devait être exécuté plus tard. Mais les malheurs de cette époque et, par-dessus tout, le délabrement des finances empêchèrent d'y mettre immédiatement la main. En 1801, on révisa les matrices des rôles, toutefois ce ne fut que par la loi du 17 septembre 1807 que le cadastre parcellaire fut ordonné. On pourra se faire une idée de ce gigantesque travail, quand on saura que, d'après les documents officiels, il devait s'opérer dans les conditions suivantes, qui sont les mêmes pour le cadastre de Belgique, sauf l'étendue du territoire et la quantité des parcelles : « Mesurer, sur une étendue de 160,000 kilomètres carrés, plus de cent millions de parcelles ou de propriétés séparées (Voici ces nombres respectifs, pour la Belgique. D'après le relevé total du cadastre, pour 1830, notre territoire a une étendue de 1,178 lieues carrées de 5,000 mètres, soit 5,890 kilomètres carrés : cette superficie était divisée en 5,872,023 parcelles. (Voir l'Exposé de la situation du royaume, 1840-1850, titre I, p. 48, et l'annuaire de l'Observatoire royal de Bruxelles, 1850, pp. 156-157.) La Belgique aurait donc à peu près 997 parcelles par kilomètre carré : tandis que la France, d'après les indications de M. Th. Coquelin, n'en aurait qu'environ 626, pour la même superficie.) ; confectionner, pour chaque commune, un plan en feuilles d'atlas où sont rapportées ces cent millions de parcelles ; les classer toutes d'après la fertilité du sol ; évaluer le produit imposable de chacune d'elles ; réunir ensuite, sous le nom de chaque propriétaire, les parcelles éparses (page 237) qui lui appartiennent ; déterminer, par la réunion de leurs produits, son revenu total, et faire de ce revenu un alivrement qui sera la base immuable de son imposition, ce qui doit l'affranchir de toutes les influences dont il avait eu si longtemps à se plaindre : tel est l'objet du cadastre. » (Voir CH. COQUELIN, au mot Cadastre du Dictionnaire de l'économie politique, p. 264. Voir aussi Ch. DE BROUCKERE et F. TIELEMANS, Répertoire de l'administration, au mot Cadastre, t. IV, p. 15. L'Angleterre ne possède pas de cadastre. L'Etat y perçoit un impôt foncier, qui ne varie pas, d'après un chiffre déterminé d'ancienne date. L'income-tax, établi depuis peu d'années, a augmenté considérablement cette nature de contribution).

Les premières opérations du cadastre furent commencées, sur notre territoire occupé par la France, en 1808. Le Gouvernement des Pays-Bas les poursuivit très lentement dans le principe. Ce ne fut, qu'en 1826, qu'il leur donna une forte impulsion, en y affectant un personnel spécial et les fonds nécessaires. Depuis 1830, elles ont été continuées, de manière à amener l'achèvement du travail, pour les provinces de Liège et de Namur, en 1835 ; pour les provinces d'Anvers, de Brabant, de la Flandre occidentale et de Hainaut, en 1834 ; pour la Flandre orientale, en 1835. L'administration du cadastre n'avait pu continuer d'opérer dans le Limbourg et le Luxembourg belges, parce que les pièces cadastrales de ces deux provinces étaient retenues dans les forteresses de Luxembourg et de Maestricht, et que le Gouvernement hollandais ne voulait pas s'en dessaisir. Le nivellement complet était donc impossible, à cette époque ; mais du moins l'on marchait vers une plus juste répartition. Ce fut, en 1844, que les opérations cadastrales furent achevées pour toutes les parties du royaume. La loi du 9 mars 1848 a fixé définitivement la péréquation cadastrale entre chaque province.

C'est dans cet état que la question se présentait devant la (page 238) Législature. Il ne s'agissait que d'appliquer les résultats acquis, dans le but de redresser des irrégularités d'impôt choquantes. L'exposé des motifs (Moniteur de 1835, n°1835, n°229-230 et 233) en signale quelques-unes. Ainsi la proportion de l'ancien contingent de la contribution foncière ou revenu était, dans le Hainaut, pour la commune la plus imposée de 13 1/3 p. c. et pour la commune la moins imposée de 2 1/2 p. c. ; dans la province de Liège, pour la commune la plus imposée de 16 1/4 p. c. et pour la moins imposée de 2 5/6 p. c. Pour l'ensemble du pays, il y avait des écarts plus grands encore, puisque dans certaines localités on payait 25 p. c. du revenu cadastral et dans d'autres seulement 2 1/2 p. c. De se criantes injustices ne pouvaient se perpétuer, en présence d'un redressement possible. Et, cependant, il y eut de longues discussions sur le terme dans lequel ce dégrèvement devait s'opérer ; non pas que l'on en niât la justice, mais parce que l'on savait qu'il devait se faire aux dépens des localités qui avaient été favorisées pendant trente ans. On oublie trop souvent, au sein du Parlement, l'art. 32 de la Constitution, ainsi conçu : « Les membres des deux Chambres représentent la nation et non uniquement la province ou la subdivision de province qui les a nommés. » On y fait trop peu aussi le sacrifice de ses intérêts personnels. Deux preuves s'en trouvent dans cette discussion. La première, ce fut le discours monstre de M. Eloy de Burdinne : il absorba trois séances. Nous pourrions joindre nos sarcasmes à ceux dont cet honorable membre fut alors poursuivi sur tous les bancs de la Chambre. Nous nous en abstiendrons, par ce principe : De mortuis non nisi bene. (Nous ne pouvons omettre, toutefois, de signaler le complément drolatique de cet incident, puisqu'il est officiel. M. Eloy se plaignit de ce que son interminable discours avait été mal rendu par le Moniteur. Cette réclamation était écrite. Les sténographes et un des questeurs, dit-on, la firent insérer au journal officiel en prenant soin d'ajouter : « d'une manière conforme au manuscrit. Ce curieux document d'orthographe primitive et de style fantaisiste se trouve au n°350 du Moniteur de 1835. Nous engageons nos lecteurs à se donner le plaisir de lire ce curieux spécimen d'une littérature extraparlementaire. Le Moniteur ne donne que le commencement du factum : il promet le reste pour le lendemain. Il n'a pas poussé la cruauté jusque-là : il avait raison, sa première vengeance était plus que suffisante). La seconde, ce fut la vive (page 239) opposition du Sénat, où la loi eût échoué, sans l'habile défense de M. le Ministre des Finances, baron d'Huart, qui déploya, dans les deux enceintes, un remarquable talent de discussion. Nos sénateurs firent des discours, dignes, par leur ardeur du moins, de l’Oratio pro domo sua de l'immortel orateur romain. Après neuf jours de débats (y compris les trois séances monopolisées par M. Eloy), la Chambre admit la loi par 79 voix contre 9. Le Sénat ne l'adopta que par 19 voix seulement contre 15. Deux voix de déplacées, et ce redressement d'une injustice y faisait naufrage. (Loi du 31 décembre 1835. Moniteur de 1835. Rapport de M. Liedts, n°318. Discussions, n°345 à 366. Moniteur de 1836, n°1 à 5. Voir Pasinomie de 1845, p. 123, l'arrêté royal du 22 mars 1845 qui établit un nouveau règlement pour la conservation du cadastre).

 

8. Les lois budgétaires et le rejet des concessions privées de chemin de fer

 

Le ministère habile et bien soutenu, en présence, d'ailleurs, d'une opposition plus vive que compacte, obtint ses budgets en un temps relativement court et sans difficultés considérables. Au budget des voies et moyens, il y eut quelque débat sur la transaction du 8 novembre 1833 avec la Société Générale ; mais la question fut réservée. Dès la rentrée après les vacances de la nouvelle année vint le budget de la guerre : ce fut celui dont la discussion fut la plus longue et la plus féconde en incidents. Trois points principaux en furent l'objet. Le premier fut l'affaire des recherches inquisitoriales faites parmi les officiers du régiment de cuirassiers, pour découvrir les auteurs de certains articles injurieux pour le corps et pour son chef. Cet incident s'évanouit sans solution (page 240) et après des débats fort aigres de part et d'autre. Le second était relatif au marché des lits de fer. Une commission de sept membres de la Chambre fut nommée pour examiner ce marché : le Ministre de la Guerre n'y fit point d'opposition. La troisième fut l'affaire dite de la charpie. Il résulta des débats qu'une certaine quantité de charpie, après avoir été refusée comme n'étant pas de qualité suffisante, avait été finalement reçue, à la condition que le fournisseur prit en payement un fond de magasin de sel, dont on n'avait pas l'emploi. L'inspecteur du service de santé ayant intenté une action en calomnie contre l'auteur d'un article, qui l'accusait de tripotage, la Chambre n'insista pas à cet égard. La question ne fut pas vidée, mais personne ne put, au point de vue de la comptabilité, contester l'irrégularité de l'espèce de troc qui avait eu lieu. M. Brabant avait fait une proposition tendante à mettre un terme, jusqu'à l'organisation définitive, aux excès des promotions d'officiers généraux et supérieurs : elle fut repoussée par 52 voix contre 26. Le crédit pour ériger, à l'Ecole militaire, un hôpital militaire d'instruction fut rejeté. Malgré ces incidents, le budget, s'élevant à 37,341,000 francs, fut admis à la presque unanimité à la Chambre et au Sénat . (Moniteur, de 1836, n°14 à 25, 28, 44). Il en fut de même des budgets de la justice, des affaires étrangères et de la dette publique, qui ne soulevèrent pas de discussions importantes.

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La loi de prolongation de la concession des péages puisa un caractère sérieux dans cette circonstance, que la Société Générale faisait, avec le concours des ingénieurs de l'État, étudier le projet qu'elle avait conçu de construire un chemin de fer de Bruxelles à Paris, par Gand et Lille. A la Chambre, on avait repoussé un amendement de M. Du Bus aîné, exigeant le concours de la Législature, pour accorder cette concession. La loi revint du Sénat avec un amendement à peu près identique (page 241) : le Gouvernement n'y fit plus une opposition directe, et la loi ainsi amendée fut adoptée (Moniteur de 1836, n°27). Ce fut un vote heureux pour le pays, car, puisqu'on avait résolu que de grandes lignes de chemins de fer seraient construites et exploitées par l'Etat, il ne fallait pas abandonner à la spéculation privée un embranchement important et des plus productifs. Le Gouvernement et les Chambres n'ont pas toujours eu des idées bien nettes, ni des plans bien arrêtés, en fait de concessions. Ainsi, sous le prétexte de la pénurie du Trésor, en face d'une grande dépense, on a abandonné à l'industrie privée des lignes qui, à cause de leur importance ou de leur direction, auraient dû être rattachées au grand réseau national. Peut-être un jour l'Etat rachètera-t-il à un prix élevé ce qu'on pouvait facilement lui conserver.

 

9. L’organisation communale

 

L'organisation communale était dans les vœux de tous : elle prit enfin place dans le code de nos lois administratives. Jamais projet ne subit de phases aussi diverses. Présenté le 2 avril 1833 par M. Rogier, il ne fut promulgué, comme loi, que le 30 mars 1836, sous M. de Theux. Fortement élaboré (la commission chargée de la rédaction du projet, se composait de MM. de Stassart, Beyts, Lebeau, Devaux, de Theux, Jullien et Barthélemy), il occupa la Chambre pendant quatre-vingt-douze séances, le Sénat pendant huit : il fut l'objet de trois rapports généraux, dans la première de ces assemblées ; de deux, dans la seconde : le Gouvernement le remania deux fois. Ces détails prouvent et l'intérêt que l'on portait à cette importante organisation et les difficultés de formule qu'elle souleva. Il s'agissait, en effet, de concilier la lettre et l'esprit de notre Constitution, c'est-à-dire le contrôle et le contrepoids appliqués à tous les pouvoirs (« Les libertés ne sont rien, tant qu'elles ne sont pas devenues des droits, des droits positifs, formellement reconnus et conservés. Les droits, même reconnus, ne sont rien, s'ils ne sont pas retranchés derrière des garanties. Enfin, les garanties ne sont rien, tant qu'elles ne sont pas maintenues par des forces indépendantes dans la limite de leurs « droits. » « Convertir les libertés en droits, entourer les droits de garanties, remettre ces garanties aux forces capables de les maintenir, telle est la marche progressive vers un gouvernement libre. « (GuizoT, Histoire des origines, t. II, sixième leçon.) avec l'indépendance du pouvoir (page 242) communal ancien, tel que l'histoire et la tradition nous le faisaient connaître. Dans les temps les plus reculés, ce pouvoir avait été le premier et même le seul berceau de la liberté, d'une liberté parfois un peu turbulente, il faut bien l'avouer  (La charte de la ville de Nieuport de 1336 renferme cette disposition : « Postquam aliquis factus fuerit oppidanus, nulli tenebitur esse servus. » Plac de Flandre, liv.. VI, p. 428. Même disposition dans l'ordonnance de la comtesse Marguerite de 1152. Plac. de Flandre, I" vol., p. 795.). Nous n'avons ni le temps, ni le dessein de commenter, en détail, cette importante loi ; nous nous contenterons d'en apprécier les caractères principaux. L'état des coutumes et de la législation anciennes, en cette matière, comme la portée de la loi nouvelle ont, d'ailleurs, été recueillis avec soin et savamment indiqués dans des ouvrages spéciaux, auxquels nous renvoyons le lecteur (Ch. FAIDER, Coup d'œil historique sur les institutions communales et provinciales en Belgique. Bruxelles, 1834. Il expose avec clarté et apprécie avec justesse l'état et la portée de la législation ancienne. Il émet des vues très pratiques sur les dispositions les plus appropriées aux besoins de notre époque. DUMORTIER, Rapport du 23 juin 1834, au MONITEUR de 1834, t. VII, in fine. Travail très consciencieux et très lucide ; vigoureux effort pour faire triompher les libertés communales. ISIDORE PLAISANT, Loi communale annotée, Pasinomie de 1836, n°754. Indication exacte de la portée des discussions. J.-B. BIVORT, Loi communale de Belgique, expliquée et interprétée In-8°. Bruxelles, 1841, et Supplément. Recueil utile, renfermant les instructions ministérielles, documents administratifs et la jurisprudence. F. TIELEMANS, Répertoire de l'administration. Passim. L'ouvrage inachevé n'a pas pu suivre toutes les mutations que la loi a subies.)

Deux grands points dominaient l'organisation et furent l'objet des plus vives et des plus longues discussions : le personnel et les attributions.

L'élection directe, n'eût-elle pas été une prescription constitutionnelle (art. 108), ne pouvait faire question. Tout pouvoir représentatif repose sur la confiance ; or, quelle confiance pourraient inspirer à leurs concitoyens des administrateurs qui n'auraient pas obtenu les suffrages du corps électoral, en d'autres termes, des plus intelligents et des plus intéressés de (page 243) la communauté. En revanche, on stipula que pour être éligible il fallait réunir les qualités requises pour être électeur, ce qui n'est pas nécessaire pour être éligible au conseil provincial ou à la Chambre. Mais ici, cette exigence était une garantie d'ordre, un remède contre l'influence d'une famille puissante, qui aurait pu, dans de petites localités, faire entrer au conseil ses créatures, indignes d'une telle position, soit par leur peu d'intelligence, soit par leur manque d'indépendance (L'art. 3 de la loi du 31 mars 1848, abolit cette condition d'éligibilité. Aujourd'hui on peut être conseiller communal sans être censitaire.)

La question de savoir par qui seraient nommés les bourgmestres et les échevins fut vivement débattue.

Quant au bourgmestre, cinq systèmes étaient en présence. D'après le projet primitif du Gouvernement, il était nommé dans le conseil ou en dehors ; dans ce dernier cas, il n'avait que voix consultative. D'après le rapport de la section centrale, il devait toujours être nommé dans le conseil. M. de Robaulx proposa l'élection directe par l'assemblée des électeurs. M. Doignon voulait la nomination par le Roi, sur la présentation d'une liste de candidats, formée par le conseil. Enfin, M. de Theux proposa, comme Ministre de l'Intérieur, (4 août 1835) la nomination par le Roi du bourgmestre, qui ne pouvait être, en même temps, membre du conseil : il en serait le président, avec voix consultative, et resterait seul chargé (page 244) de l'exécution des lois, des règlements d'administration générale et de tout ce qui concernait la police et la sûreté générale.

Les deux systèmes du Gouvernement avaient ce défaut capital de mettre à la tète de la commune un homme qui n'avait pas la première qualité requise pour faire le bien, la confiance ; un administrateur des intérêts communs qui n'avait pas de délégation. Le système de M. de Robaulx ne tenait pas compte de ce fait que le bourgmestre n'est pas seulement chargé de l'administration des intérêts locaux, mais aussi très souvent de l'application des mesures d'administration générale. Fallait-il la confier à une personne qui aurait pu être systématiquement hostile au pouvoir central, et négliger ou tourner contre lui l'exécution de ces mesures? Quelque séduisant que ce système puisse paraître, au point de vue des souvenirs historiques (Voir, pour l'élection, les attributions et le personnel du magistrat des villes, à diverses époques : RAEPSAET, Histoire de l'origine des états généraux, passim. Ch. STEUR (Mémoire couronné), Précis historique de l'administration générale des Pays-Bas sous le règne de Marie-Thérèse, p. 34. LENZ (Mémoire couronné à Gand), Tableau historique et politique. NOTHOMB, Discours à la Chambre, Moniteur de 1842, n°132. VERHAEGEN, Discours à la Chambre, Moniteur de 1842, n°149. WAUTERS et HENNE, Histoire de la ville de Bruxelles. Détails intéressants sur le mode d'élection des chefs du magistrat, t. 1, p. 156), nous ne saurions l'approuver, à une époque où il existe fréquemment une solidarité intime entre les intérêts de la commune et ceux de la généralité des citoyens. Le système mixte de M. Doignon avait le défaut de toutes les mesures bâtardes, il ne parait à aucun inconvénient, il ne satisfaisait à aucune exigence légitime. Le système de la section centrale présentait un double avantage, nettement exposé par M. Dechamps, dans la séance du 25 juillet 1834. « Le bourgmestre devient par l'élection le mandataire de la commune, et le choix du Roi le rend le représentant des intérêts nationaux... Le bourgmestre, dans ce système, (page 245) étant revêtu de la double confiance du Roi et de ses administrés, est censé réunir bien plus de chances de capacité et de moralité que celui qui serait choisi par le Gouvernement ou par le peuple exclusivement, et il acquiert par là une influence plus marquée et plus légitime dans la commune. » Ce système si sage fut adopté par 34 voix contre 31 (Moniteur de 1834, n°207 ; le compte-rendu de cet appel nominal prouve combien chaque parti était divisé d'opinion sur cette question.) ; mais il ne devait pas durer longtemps. Pour quelques inconvénients partiels, que l'application de la meilleure loi peut amener, on donna au Roi, par la loi du 30 juin 1842, le pouvoir de choisir le bourgmestre hors du conseil. Et telle fut l'inanité des motifs de ce changement que le Gouvernement n'osa presque pas faire usage du pouvoir qu'il avait demandé, ou bien que l'usage qu'il en avait fait fut presque toujours l'objet des plus vives critiques.

Quant aux échevins, le mode de leur nomination souleva une discussion constitutionnelle plus ardente que fondée. L'art. 108 de la Constitution dispose : « Les institutions provinciales et communales sont réglées par des lois. Ces lois « consacrent l'application des principes suivants : « 1° L'élection directe, sauf les exceptions que la loi peut établir à l'égard des chefs des administrations communales… »

En présence de cet article, les échevins doivent-ils être élus par les électeurs, par le conseil, ou par le Roi parmi les élus au conseil ? Nous penchons vers le système admis, le mode établi de la nomination par le Roi. Toute la question résidait dans le point de savoir quelles seraient les attributions des échevins. S'ils participaient, comme cela fut décidé, collectivement avec le bourgmestre à l'exécution des règlements locaux et des lois générales, ils devaient avoir une même origine que ce dernier. Cette position d'attributions collectives fut adoptée, en séance du 14 février 1856, par 49 voix contre (page 246) 31 (L'administration municipale, chez les Romains, était collégiale... sous le régime féodal, le système d'administration consistait... à confier graduellement chaque partie à un administrateur unique. (RAEPSAET, ouvrage cité, pp. 315 et 317). Ce système admis, leur nomination par le Roi était rationnelle, puisque les échevins, en cas d'absence, de maladie, de décès, remplaçaient le bourgmestre : elle n'offrait aucun danger pour les intérêts communs, puisque les échevins, devant être pris parmi les conseillers élus, restaient toujours par la réélection sous le contrôle des électeurs : enfin, elle était conforme à l'esprit et à la forme de toutes nos institutions, puisqu'à tous les degrés nous y trouvons le collège ; dans le pouvoir provincial, le collège de la députation ; dans le pouvoir exécutif, le collège des ministres ; dans le pouvoir législatif, lui-même, puisque les trois branches doivent faire collège pour que la loi soit produite. Toutefois, la nomination des échevins par le Roi dans le conseil ne fut admise que par 49 voix contre 42.

En ce qui concerne les attributions, elles furent fixées de la manière la plus large. Le conseil règle tout ce qui est d'intérêt communal (art. 75). Mais à ce droit sans limites il fallait un contrepoids. L'expérience du passé avait enseigné à quels abus et à quels désordres peut conduire une autorité locale sans frein et sans contrôle (Sous Marie-Thérèse, les provinces et les communes, par suite des guerres et plus encore par les abus provenant de leur omnipotence, avaient des finances délabrées et des taxes locales injustement réparties. Frappée de cette fâcheuse position, la grande impératrice institua, par son décret du 21 septembre 1764, un collège, nommé la « Jointe des administrations et des affaires des subsides, » chargé d'introduire l'ordre dans ce chaos. Cette institution, malgré ses défauts et en dépit des obstacles qu'elle rencontra, rendit les services les plus signalés. Mais nous croyons le contrôle de notre époque, celui de la députation, plus acceptable et plus à même d'opérer le bien.). Nous verrons, dans l'examen de la loi provinciale, combien ce contrôle est à la fois doux, efficace et populaire. Les actes et résolutions du conseil qui sortent (page 247) de ses attributions (L'affaire Dejaer-Bourdon, de Liége, peut, à elle seule, légitimer une pareille disposition), ou qui blessent l'intérêt général, peuvent être suspendus par le gouverneur, ou cassés par le Roi, mais la députation permanente intervient et des délais sont fixés. Le conseil ne peut être dissous. Le bourgmestre et les échevins peuvent, pour inconduite notoire ou négligence grave, être révoqués ou suspendus, le premier par le Roi, les autres par le gouverneur. Mais ils sont préalablement entendus et le gouverneur ne peut exercer ce pouvoir que sur l'avis conforme et motivé de la députation permanente (art. 56).

Un amendement introduit par M. de Theux souleva des discussions passionnées ; ce fut celui-ci : « Le conseil veille à ce qu'il ne soit donné aucune représentation contraire aux bonnes mœurs. » Admis, en 1834, par 45 voix contre 15, il donna lieu à une turbulente manifestation du public, pendant que l'on jouait avec intention le Tartufe. Ce n'est pas à Athènes seulement que le théâtre servit d'instrument à la politique : déjà, chez nous, une représentation de la Muette de Portici avait été comme l'étincelle de la révolution. Le 27 février 1836, l'amendement de M. de Theux est adopté, au premier vote, par 38 voix contre 34 ; mais il est rejeté au second vote par parité de voix, 45 contre 45 : MM. Dumortier et Dechamps s'abstiennent.

Il faut bien le dire, un tel devoir imposé à des autorités locales, toujours exposées à des influences diverses et très puissantes, c'était le rétablissement de la censure et l'occasion peut-être de graves et de fréquents désordres. Strictement appliqué, l'article rayait, dans les grandes villes, la moitié du répertoire. Rarement le théâtre est une école de bonnes mœurs. On était déjà bien loin de l'époque la plus pure et la plus morale, quand on criait à Rome : panem et circenses. (Dans nos grandes villes, les représentations théâtrales, même celles des pièces les moins gazées, ne rencontrent pas d'obstacles. Dans nos petites villes, dans celles des Flandres surtout, les spectacles les plus modestes sont l'objet des plus vives critiques du clergé. Plus d'un conflit s'est élevé à ce sujet.)

 (page 248) Après une longue lutte et de vifs débats, la loi fut adoptée, non sans avoir rencontré, dans la Chambre surtout, une forte et tenace opposition (Loi du 30 mars 1836, adoptée, à la Chambre, par 62 voix contre 22 et 4 abstentions ; au Sénat, par 30 voix contre 1 et une abstention. Moniteur de 1834, n°190 à 358. Ibid., de 1835, n°48 à 133 ; 248 à 338. Ibid., de 1836, n°37 à 125).

Etudiée dans toutes ses parties, la loi communale apparaît avec les caractères d'une organisation digne de notre passé, dont on vante l'indépendance ; digne aussi de notre époque, à laquelle il faut une liberté contenue. Mais pourquoi donc alors l'avoir changée si souvent? C'est que les partis politiques prennent les résultats de leurs fautes pour les conséquences de lois : c'est qu'ils cherchent dans le changement des institutions un appui et une force qu'ils ne trouvent plus dans l'opinion publique. Si ces partis n'étaient pas aveuglés par leur passion, ils devraient savoir qu'aux lois comme aux vins l'âge donne des qualités, auxquelles rien ne peut suppléer : il les mûrit. Hommes du pouvoir, si vous voulez que la nation respecte les lois, commencez par les respecter vous- mêmes !

Nous devrions nous regarder comme très heureux d'avoir cette bonne loi communale,, quand nous nous reportons à notre passé de 1810 à 1814, de 1826 à 1850 ; quand, surtout, nous contemplons ce qui nous entoure. Au nord, la commune n'est pas émancipée, elle est en tutelle et n'a qu'un simulacre de liberté. Au midi, en France, le pouvoir municipal, comparé au nôtre, paraît étriqué et mesquin, avec ses conseils dissolubles, ses assemblées par étapes et à durée fixe, ses attributions restreintes, ses chefs qui n'ont pas reçu le (page 249) baptême de l'élection ; sous le contrôle du préfet, autrement dur que celui de nos députations permanentes (En France, les restrictions mises au pouvoir communal l'ont tellement fait tomber en discrédit, que, en 1855, les élections municipales n'ont pu se faire, en beaucoup de localités, soit par défaut d'électeurs en nombre suffisant, soit par manque de candidats, consentant à entrer dans ces collèges frappés d'impuissance).

Ne nous plaignons donc pas du temps et des soins consacrés par nos Chambres à cette importante loi. L'exercice du pouvoir local est comme l'enseignement primaire de l'exercice du pouvoir politique ; le conseil communal est, pour ainsi dire, le satellite du Parlement. M. Matter l'indique fort bien, quand il dit : « L'élévation politique suit de près l'élévation civile. Siégeant aux assemblées de la commune, le bourgeois agrandit son horizon moral et politique ; il s'élève lui-même avec les fonctions qu'il exerce dans la cité, les charges de maire, d'échevin... De hautes attributions donnent d'ailleurs à ces agents populaires cette force morale que les hommes d'honneur puisent toujours dans l'exercice des fonctions publiques, quelque modestes qu'elles soient, et que d'autres n'acquièrent pas même en s'asseyant sur les degrés du trône. » (Histoire des doctrines, t. I, pp. 231 et 232). Et puis, le peuple lui-même, - administrés de toutes classes, -accoutumé à obéir aux règlements de l'hôtel de ville, est moins disposé aussi à se rebeller contre les lois du palais de la nation.

 

10. L’organisation provinciale

 

La loi provinciale fut adoptée par la Chambre, en 1834. Mais nous avons vu que le Sénat avait résolu de ne s'en occuper qu'après le vote de la loi communale ; ce qui n'eut lieu qu'en 1836 (Cette décision était rationnelle et logique, la commune devant être organisée avant la province, dont elle subit le contrôle : mais elle ne nous paraît pas parfaitement constitutionnelle. C'était un veto suspensif, qui n'appartient pas à la Chambre haute : elle pourrait en faire usage, tout au plus, par une abstention ; jamais le formuler par un vote.) (page 250) L’organisation du pouvoir provincial, très importante aussi, ne rencontra pas les mêmes obstacles que l'organisation du pouvoir communal. Elle fut admise par le Sénat sans amendements. C'est qu'en effet, elle se présentait avec un caractère d'urgence très prononcé, puisque les députations des Etats étaient sans mandat légal et que ce n'était que par des lois temporaires qu'on maintenait ces grandes branches de l'administration. Le rapport de M. de Theux (Moniteur de 1834, n°108 et passim). travail précis et clair, donne l'historique de la constitution et des attributions du pouvoir provincial, dans le passé: il apprécie, froidement et judicieusement, la portée de la loi nouvelle. La nécessité de ce pouvoir, qui n'est permanent que par sa députation, se comprend, quand on pense qu'il est l'intermédiaire entre le gouvernement et les communes : il est, tout à la fois, le frein du pouvoir communal, qui ne pouvait pas rester sans limites ; l'œil et la main du pouvoir central, incapable de tout voir avec justesse et de tout diriger avec convenance. La combinaison des attributions du gouverneur avec celles de la députation permanente est des plus heureuses. Pour rester fidèle à l'esprit de notre Constitution, il ne fallait faire du premier ni le missus dominicus, ni le missus discurrens (Charlemagne, frappé des inconvénients de la décentralisation, que quelques personnes semblent préconiser aujourd'hui, avait établi des missi-dominici et des missi-discurrentes, sortes d'inspecteurs généraux ou de préfets ambulants, chargés de recevoir les plaintes des administrés. Celte institution n'ayant pu porter de bons fruits, à cause du séjour temporaire de ces agents et de leur ignorance des besoins locaux, Louis le Débonnaire partagea son royaume en missatica territoriaux ou gouvernements de province. Sous le régime féodal, cette dernière institution fut maintenue. Mais toutes ces mesures furent incomplètes, parce qu'à côté de ces agents du pouvoir, il n'y avait pas de corps électifs, représentants de la volonté et des besoins du peuple. (Voir Capitulaires et aussi RAEPSAET, Histoire de l'origine, etc., pp. 326 à 327.)) des temps primitifs ; moins encore le préfet omnipotent de l'empire français : il fallait rendre la seconde moins puissante que les Etats provinciaux anciens, (page 251) lui donner plus d'autorité qu'aux conseils de préfecture.

Toutes les dispositions particulières de la loi sont conformes à ces principes. - L'art. 45 fixe la durée des sessions du conseil : mesure sage, puisque les attributions déterminées sont peu nombreuses et que rien ne pousse plus les corps délibérants à dépasser leur compétence que de ne pas être pressés par le temps. Dans certaines Constitutions une disposition analogue est appliquée aux Chambres législatives. Nos constituants ont bien fait de ne pas imposer ce maximum de la durée des sessions à notre Parlement : ils n'ont imposé qu'un minimum de durée, laissant le Roi juge de l'opportunité de la clôture. - Le conseil intervient, par présentation des candidats, dans la nomination des conseillers des cours d'appel, des présidents et vice-présidents des tribunaux de première instance (art. 64). Cette attribution n'est pas sans inconvénient dans la pratique : c'est le remède à de tristes précédents, puisqu'elle est due au souvenir encore vivace de certains abus de nominations judiciaires faites par le gouvernement précédent ; c'est un juste milieu entre la formule du pouvoir absolu qui laisse au Roi la nomination des magistrats et la formule républicaine qui rend la magistrature élective. - Les actes du conseil et de la députation peuvent, dans certains cas et certains délais déterminés, être annulés par le Roi : ceux du conseil peuvent l'être par le pouvoir législatif (art. 89 et 116) Telle a été la sagesse de nos conseils provinciaux que nous n’avons rencontré, de 1831 à 1848, aucune annulation par le pouvoir législatif ; très peu d'actes ont été annulés par le Roi.) - L'art. 91 prévient la coalition de plusieurs conseils provinciaux, dans un but politique. - Le rouage principal du pouvoir provincial, c'est la députation permanente. Elle est composée de six membres, dont quatre doivent être pris dans chaque arrondissement judiciaire. C'est une garantie pour que tous les intérêts de la province soient (page 252) directement représentés dans le collège. Le gouverneur la préside avec voix délibérative, mais non prépondérante. Ses membres jouissent d'un modeste traitement de 3,000 francs, moitié en traitement fixe, moitié en jetons de présence. (Que n'a-t-on adopté le même système pour la Chambre !) Ses attributions sont très étendues : elles l'étaient même trop, puisque la députation jugeait en dernier ressort les délicates questions de milice. La loi du 18 juin 1849 a corrigé cet excès.

Dans la pratique, rien de plus utile, de plus paternel, de mieux accepté que l'intervention de la députation permanente, dans les affaires communales. Que de conflits empêchés ; que de difficultés aplanies ; que de progrès introduits par ce collège ! Il faut en avoir fait partie, pour oser dire avec assurance que c'est un des meilleurs rouages de notre machine administrative. Ce sont aussi, pensons-nous, les fonctions dans lesquelles un citoyen peut rendre le plus de services. Elu par un double scrutin, juge administratif pour ainsi dire, le membre de la députation, s'il n'a pas l'importance, n'éprouve pas du moins les déboires du membre de la Chambre. Il voit les fruits de ses efforts personnels croître sous ses yeux, et s'il n'a pas de discours à prononcer, il peut s'en consoler en faisant de très bonne besogne administrative.

Les commissaires d'arrondissement peuvent donner une bonne direction et imprimer une marche rapide aux affaires communales. Il est fâcheux qu'on n'ait pas limité leur nombre à celui des arrondissements judiciaires (Grâce à l'intervention d'administrateurs intelligents, les provinces de Brabant et d'Anvers ont des circonscriptions administratives concordant avec les circonscriptions judiciaires. On pouvait alors et on pourrait encore à présent établir la même division dans les autres provinces). La réunion de plusieurs commissariats est un acheminement vers ce but. On a fait la proposition (quelle proposition ne fait-on pas?) : 1°  de supprimer les commissaires des chefs-lieux de provinces ; (page 253) 2° de supprimer tous les commissaires. La première suppression, pour une petite économie, porterait un grand trouble dans les bureaux provinciaux, où l'on prendrait, pour diriger ce service, un chef de division qui serait la moitié d'un commissaire, avec les trois quarts de son traitement. La suppression totale des commissaires causerait un énorme surcroît de besogne aux bureaux provinciaux ; plus de lenteur peut-être dans l'expédition des affaires et, sans aucun doute (ce qui serait le plus fâcheux), un accroissement considérable de frais de déplacement aux administrateurs et aux administrés des communes rurales. Qu'on essaye d'opérer la suppression totale et on verra bientôt à quel gâchis administratif l'on aboutira. L'honorable M. Ch. de Brouckere dit un jour à la Chambre : « Les commissariats sont des boîtes à lettres. » Le mot est vif, mais est-il juste? Nous qui avons vu aussi les choses de près, nous aimerions mieux leur appliquer, dans sa bonne acception, cet autre mot : « Tant vaut l'homme, tant vaut la place ! »

La loi provinciale (Loi du 30 avril 1836, adoptée, à la Chambre, par 53 voix contre 9 ; au Sénat, par 22 voix contre 9. Moniteur de 1834, n°108 à 169 ; de 1836. n°89 à 132) ne subit pas les mêmes mutilations que la loi communale. Les partis politiques n'y trouvaient pas le même intérêt : elle fut donc à l'abri de leurs imprudentes tentatives, parce qu'elle offrait moins de chances à leurs étroites et souvent stériles espérances.

 

12. L’envahissement du bureau du Libéral

 

Dans la journée du 21 février 1836, des soldats du régiment de guides avaient envahi le bureau du journal le Libéral, y avaient proféré des menaces et commis des actes de violence. Le sieur de Wallens, éditeur, signala par une pétition ces faits à la Chambre, en demandant une enquête. M. Dumortier, toujours sur le qui-vive, l'avait déjà devancé par une interpellation, qu'il fit suivre d'une proposition de loi (page 254) ainsi conçue : « Article unique. La poursuite et la connaissance de tous les crimes et délits commis par des militaires, autres que les crimes purement militaires ou commis entre militaires, sont exclusivement du ressort des cours et tribunaux ordinaires. » Le Ministre de la Justice ne s'opposa pas à sa prise en considération, tout en la trouvant incomplète. La Chambre se forma aussitôt en comité secret, qui dura deux heures. La pétition fut renvoyée à la commission des pétitions. Le rapport, présenté par M. Cornet de Grez, en séance du 29 février, s'exprimait ainsi : « Votre commission ne trouve pas de termes assez forts pour flétrir, comme elle le voudrait, la conduite des personnes qui ont instigué ou commis ce crime. Elle ne pense pas devoir donner suite à la demande d'enquête, les tribunaux compétents étant saisis. Elle émet le vœu que prompte et sévère justice soit rendue... et propose le renvoi à M. le Ministre de la Justice. » Ces conclusions furent adoptées. Ici encore, la Chambre se montra la fidèle gardienne d'une de nos plus précieuses libertés. Le pire de tous les despotismes, c'est celui du sabre. A moins qu'on ne la brise, la plume ne craint pas l'épée (Moniteur de 1835, n°54 à 64).

 

13. L’encouragement des lettres et des arts

 

Les budgets des finances et de l'intérieur furent admis sans grands débats ni incidents et à la presque unanimité (Lois du 31 mars 1836). A la discussion de ce dernier budget se rattachent deux particularités dignes d'être notées. M. Desmanet de Biesme fit remarquer que les attributions du département étaient trop nombreuses. M. de Theux le contesta, et cependant le développement des travaux publics et, en particulier, du chemin de fer fit une nécessité de la création d'un nouveau département, celui des travaux publies. La Chambre se montra très favorable, très généreuse même, lors de la discussion des crédits (page 255) pour les sciences, les lettres et les beaux-arts. Malheureusement, elle n'a pas toujours eu ces goûts athéniens. Bien souvent depuis, on a contesté la convenance de l'intervention de l'Etat pour l'encouragement de ces hommes d'élite, dont les travaux enrichissent un pays, tout en l'illustrant. Oubli de notre vieille renommée ; ignorance de nos intérêts actuels ! Est-ce dans la patrie de Vésale, de Juste Lipse, de Rubens, de Grétry et de tant d'autres, qu'il faut se montrer avare à l'égard des savants et des artistes? Une nation, faible par le nombre, ne doit-elle pas chercher à se montrer grande par l'intelligence? On ne sait ce qui a plus fait pour rendre immortel le nom du peuple grec, ou sa gloire militaire, ou sa gloire artistique ; - les Thermopyles, ou les Jeux Olympiques. Puisque nous avons peu de chances d'avoir des Thémistocles, des Périclès, des Léonidas, efforçons-nous du moins, de faciliter la voie à des Apelles, à des Phidias et à des Praxitèles, si c'est notre bonne fortune d'en voir s'élever.

Tout provoquait, d'ailleurs, à cette époque, le Ministre de l'Intérieur à prendre le rôle de Mécène. La paix était à peu près assurée et sous sa douce influence la sève artistique et littéraire s'épanouissait de toute part. Les beaux-arts, qui eux aussi ne grandissent qu'au soleil de la liberté, avaient langui, à peu d'exceptions près, et sous la domination glorieuse mais despotique du grand Empereur, et sous le régime calculateur et tracassier de Guillaume. Depuis 1830, nous semblions avoir hérité de nos ancêtres, avec leur amour des libres institutions, leur goût et leur aptitude pour les œuvres de l'intelligence. Les signes de ce réveil étaient éclatants et nombreux. Kessels et Geefs rappelaient Delvaux et Godecharle, et faisaient espérer les Simonis, les Fraikin, les Geerts et les Jacquet. Wappers et de Keyzer ouvraient la marche de cette forte et brillante phalange de peintres de l'école d'Anvers ; tandis que Navez travaillait à sa renommée, plus encore en formant d'excellents élèves qu'en produisant lui-même des (page 256) œuvres estimables: Portaels, Van Eycken grandissaient sous ses yeux. De Jonghe, le paysagiste si naturel, se perfectionnait à l'âge ou d'autres déclinent, et Robbe, en l'admirant, aspirait déjà à le dépasser (De Jonghe et les deux Robbe sont nés à Courtrai ; comme aussi le savant chroniqueur Goethals-Vercruysse). Madou multipliait ses dessins pleins d'observation et de finesse, en attendant qu'on l'engageât à devenir un grand peintre, trop modeste pour y songer lui-même. Calamatta poursuivait sa grande œuvre de gravure et formait des élèves, patiemment attachés à sa trace. Moke écrivait ses romans ; Stassart récitait ses fables, Goethals recueillait nos chroniques et Conscience préludait à sa grande renommée, en laissant tomber de sa plume chaste et féconde ces récits naïfs et frais qui ont tant fait pour le plaisir de nos populations flamandes, que l'Europe et l'Amérique jalouses nous les ont bientôt empruntés (C'est surtout en Allemagne, et cela se conçoit, que la vogue de H. Conscience fut immense. Nous avons eu sous les yeux un prospectus qui indiquait plusieurs éditeurs de ses romans, traduits par des plumes différentes. Quelques-unes de ces œuvres traduites avaient eu plusieurs éditions. Un tel succès peut presque se comparer à celui qu'obtint la magistrale Histoire d'Angleterre de Macaulay qui fut tirée à 30,000 exemplaires, à celui qui ne manqua jamais aux attachants romans de Boz (Charles Dickens), dont le tirage allait à 100,000). Les sociétés de rhétorique se réorganisaient partout : leurs travaux et leurs délassements s'épuraient ; elles établissaient des concours plus sérieux que ceux qui consistaient en la solution de questions bibliques (Bibel vraegen) ; elles donnaient des représentations qui n'étaient plus la reproduction des naïfs mystères ou de grossières arlequinades. Sous l'habile direction des maîtres de nos conservatoires de musique (Le Conservatoire de musique, réorganisé par arrêté royal du 13 février 1832), des artistes éminents se formaient ; - nouveaux Orphées, modernes sirènes, allant apaiser ou séduire, au loin, nos plus cruels ennemis. Des sociétés (page 257) instrumentales et chorales se multipliaient jusque dans les communes rurales, aidant à polir les mœurs, puisqu'elles remplaçaient, par de doux délassements, les cruels combats de coqs, les tortures du jeu de l'oie ; par des concours pacifiques, les luttes souvent sanglantes d'une localité contre l'autre. Nos nombreux et magnifiques édifices publics, en deuil pour ainsi dire, portaient la double trace des ravages du temps et d'une dévastation, commencée par les iconoclastes, achevée par les démolisseurs de 93. Une commission des monuments venait d'être instituée (Commission des monuments, créée par arrêté royal du 7 janvier 1835) : sous son habile contrôle, nous commencions cette intelligente restauration des monuments de la foi, du courage et de l'industrie de nos pères ; prouvant ainsi que nous comprenions cette vérité que, lorsque l'on n'a plus la force de produire de pareilles merveilles, il faut au moins avoir la sagesse de les conserver. - En un mot, une aurore de renaissance se levait, douce et bienfaisante pour la patrie ; brillante et radieuse aux yeux de l'étranger. Nos statisticiens peuvent compter ce que nos travailleurs du domaine de l'intelligence et de l'art ont apporté de richesses, mêmes matérielles, à notre communauté : nos diplomates sont heureux de dire que notre gloire artistique a beaucoup fait pour dissiper, chez nos voisins, les craintes et les préventions qu'avaient fait naître nos œuvres révolutionnaires. La Folle de Grisar (Heureux et éclatant début lyrique de notre maestro d'Anvers, dont les succès furent bientôt égalés par les œuvres éminentes de MM. de Limnander et Gevaert) nous a fait pardonner la Brabançonne de Campenhout !

 

13. La fin de la session parlementaire

 

Des crédits de 40,000 francs pour réparation des digues de la Meuse et de 6,000,000 de francs pour construction de routes pavées et ferrées firent l'objet d'assez longues discussions ; mais ils finirent par être adoptés à la presque unanimité (Lois du 2 mai 1836).

(page 258) Il en fut à peu près de même des trois lois (Lois du 16 juin 1836) qui fixent l'avancement des officiers, leur position et la perte de leur grade. Il faut bien le dire, ces lois se ressentent, dans plusieurs de leurs dispositions, de la précipitation qui règne ordinairement à l'approche d'une clôture. Dans la première, par exemple, il n'a rien été stipulé contre les abus qui, dans la pratique, se sont produits, quant à l'avancement au choix, dans une armée qui a constamment été sur le pied de paix. La troisième donna lieu à des récriminations des plus violentes (Moniteur de 1836, n°141 à 146, 148, 149) ; mais tout en étant sévère, elle stipule, cependant, des garanties pour l'officier inculpé.

Dans l'intérêt de notre chemin de fer, récemment décrété, et aussi dans l'intérêt de nos ports de mer, il importait d'attirer vers la Belgique un grand mouvement de transit. A cet effet, des mesures beaucoup plus libérales que celles qui existaient furent présentées et facilement admises (Loi du 18 juin 1836).

Dès 1833, M. Seron avait fait une proposition tendante à restituer aux poids et mesures leurs dénominations métriques. La loi adoptée (Loi du 18 juin 1836) améliora la proposition. Elle rendit l'emploi de ces dénominations obligatoire dans les actes publics, sans l'étendre, toutefois, aux poids médicaux, jusqu'à la rédaction de la Pharmacopée. La longue gestation de cette œuvre scientifique fit encore obstacle, en la session 1854-1855, à l'adoption d'un système uniforme des poids et mesures. Le Gouvernement fut autorisé, cette fois, à faire constater la conformité des étalons prototypes avec ceux qui sont déposés à l'Institut de France. Ce fut là un pas de plus fait vers l'adoption générale, mais si difficile, de l'excellent système décimal.

L'affaire du marché des lits militaires revint, après son examen par la commission, dont nous avons mentionné la nomination. (page 259) nation. La discussion n'en fut pas plus claire et n'amena pas de résultat bien décisif. Après des débats très aigres, il fut décidé, à une fort petite majorité, que l'on admettrait le chiffre demandé, sans approuver le marché. Le crédit ne fut adopté à la Chambre que par 38 voix contre 26 : il le fut à l'unanimité par le Sénat (Moniteur de 1836, n°154 à 169). Le Département de la Guerre n'était pas heureux dans ses contrats importants. Le couchage des troupes Félix Legrand ne rencontra guère meilleur accueil à la Chambre que la fourniture des vivres Hambrouck.

La Chambre, persistant dans ses tendances littéraires et artistiques, vota deux lois, qui s'élevaient presque à la hauteur d'actes de reconnaissance nationale. M. H. de Brouckere avait pris l'initiative d'une proposition de loi conférant une pension à la veuve de M. Isidore Plaisant, serviteur patriote de la révolution et créateur de la Pasinomie, savamment annotée par lui. Cette loi (Loi du 17 juin 1836) fut adoptée, non sans quelque opposition à la Chambre et au Sénat. Matthieu Kessels, sculpteur, fils de ses œuvres, puisque de simple menuisier il devint artiste éminent, était mort, à Rome, laissant une femme et des enfants sans fortune. M. le Ministre de l'Intérieur proposa de constituer à la veuve de l'artiste une rente annuelle de 2,000 francs, qui devait s'éteindre, après son décès, lorsque son plus jeune enfant aurait atteint l'âge de vingt-cinq ans. Cette constitution devait donner à l'Etat la propriété de toutes les œuvres d'art délaissées par Kessels. Cette proposition, à la fois généreuse et intelligente, fut admise à l'unanimité par les deux Chambres (Loi du 17 juin 1836. Voir Moniteur de 1836, n°141, l'inventaire de toutes les œuvres d'art cédées et faisant partie aujourd'hui du Musée de sculpture. En 1842, la pension de madame Kessels fut élevée à 3,500 francs).

Enfin, un emprunt de 30,000,000 de francs fut autorisé (Loi du 18 juin 1836). (page 260) Sa destination, loin d'ébranler le crédit public, ne pouvait que l'affermir, puisqu'il devait servir, soit à diminuer nos bons du Trésor émis pour la construction du chemin de fer et la rétrocession de la Sambre canalisée, soit à l'établissement de routes nouvelles, pavées ou ferrées. Le projet fut adopté sans opposition.

La Chambre vota aussi les dispositions relatives aux mines et au conseil des mines. Le Sénat les modifia : nous nous en occuperons, lors de leur adoption définitive. La loi sur la construction du canal de Zelzaete, admise par la Chambre, fut amendée par le Sénat et puis retirée par le Gouvernement.

Ainsi se termina cette sixième session (1835-1836). Elle fut longue, mais pleine aussi d'importants travaux. A ce titre, elle peut être considérée comme l'une des plus importantes de notre régime représentatif (Les lois votées, pendant cette sixième session (1835-1836), que nous n'avons pas mentionnées, sont les suivantes : 8 août 1835, exemptions de quelques droits de douane ; 8 août 1835, échange avec la ville de Thielt ; 22 septembre 1835, concernant les Belges servant à l'étranger ; 24 septembre 1835, légation en Italie ; 29 mars 1836, traité avec le Brésil ; 8 juin 1836, achat de terrains pour l'École vétérinaire.

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