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Chambre des représentants de Belgique
Séance du vendredi 30
décembre 1831
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Interpellation relative à la négociation de
l’emprunt (Brabant, Coghen)
3) Projet de loi fixant le contingent de l’armée
pour l’année 1832
4) Interpellation relative à la passation d’un
marché militaire (marché Hambrouck) (Jullien)
5) Ajournement de la chambre. Principe d’une
réunion anticipée en cas de reprise des hostilités (ratification du traité des
24 articles) (Dumortier, Destouvelles,
Gendebien, de Muelenaere,
Lebeau, Dumortier, Gendebien, Van Meenen)
6) Communication d’un arrêté royal nommant M. de
Theux ministre de l’intérieur
7) Réponse du ministre à une pétition relative à
une demande de destitution d’un secrétaire communal (de
Theux, Osy, de Theux, Milcamps, Ch. Vilain XIIII, Osy)
8) Nomination d’une délégation chargée d’aller
complimenter le Roi pour le Nouvel-An (Ullens)
(Moniteur
belge n°200, du 1er janvier 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est ouverte à une heure.
M. Jacques fait l’appel nominal.
M. Dellafaille lit le procès-verbal ; il est
adopté.
PIECES ADRESSEES A LA
CHAMBRE
M. Jacques fait l’analyse de quelques pétitions, qui sont renvoyée à la commission.
INTERPELLATION RELATIVE
A LA NEGOCIATION DE L’EMPRUNT
M. Brabant. - M. le président, M.
le ministre des finances étant présent et désirant se retirer immédiatement, je
vous prie de m’accorder la parole pour que je lui adresse les interpellations
que j’ai annoncées dans la séance d’hier.
M. le président. - Vous
avez la parole. En place ! messieurs. (En place ! en place !)
M. Brabant. - Je prie M. le ministre des finances de nous dire quelles sont les
personnes qui oui été chargées par le gouvernement de la négociation de
l’emprunt, et si ces personnes ont reçu un salaire pour prix de leurs soins.
M.
le ministre des finances (M. Coghen). - Messieurs, le gouvernement a demandé un acte de dévouement
à la chose publique à M. Osy, qui s’est rendu une première fois à Londres, dans
le mois d’octobre, pour voir s’il ne nous serait pas possible de négocier un
emprunt. Ce premier voyage n’eut aucun succès. Il s’y rendit plus tard une
seconde fois avec M. Rittweger et ces deux messieurs ont enfin accompagné M. le
ministre de la guerre à Calais, et à ces personnes-là nous n’aurions jamais osé
offrir un sou.
M. Brabant. - Je me déclare satisfait de la réponse de M. le ministre des finances.
PROJET DE LOI FIXANT LE
CONTINGENT DE L’ARMEE POUR L’ANNEE 1832
L’ordre du jour appelle le vote sur le projet de
loi relatif au contingent de l’armée.
M. Dellafaille donne lecture du projet, et M. Jacques fait l’appel nominal, dont voici
le résultat :
Membres présents, 67. Oui, 63 ; non, 1, Trois membres s’abstiennent ; ce sont
: MM. Coghen, Jonet et Lardinois.
M.
le ministre des finances (M. Coghen) dit qu’il s’est abstenu parce qu’il ne savait
pas sur quoi on votait.
M. Jonet et M. Lardinois se sont abstenus parce qu’ils étaient absents lors de la discussion,
C’est M. Goethals qui a donné son vote négatif.
INTERPELLATION RELATIVE
A LA PASSATION D’UN MARCE MILITAIRE (MARCHE HAMBROUCK)
M.
Jullien. - Je demande la parole. Messieurs, dans une des dernières
séances, à propos du budget de la guerre, mon honorable ami M. Delehaye vous a
parlé du marché Hambrouck et vous a rappelé la demande que j’avais faite pour
que ce marché fût déposé sur le bureau ; comme mon intention n’était pas, en
faisant cette proposition, d’obtenir une vaine formalité, j’aurai l’honneur de
déposer sur le bureau une proposition ainsi conçue :
Plusieurs voix. - Vous ne pouvez pas la lire, c’est contraire
au règlement.
M.
Jullien. - Il faut bien que la proposition soit lue.
Plusieurs voix. - Non ! non ! Mais il faut d’abord le renvoi en
sections pour en autoriser la lecture.
M.
Jullien. - Je ne peux pas lire ma proposition ? (Non !) Eh bien ! messieurs, c’est fini !... (Hilarité.) Je la dépose.
- Un huissier prend la proposition des mains de
l’honorable membre, et la remet à M. le président.
Une voix. - Le renvoi immédiat en sections !
M. le président. - La chambre veut-elle se réunir immédiatement
dans les sections ? (Oui ! oui !)
On va en faire six copies, et les sections se réuniront.
La séance est suspendue pour une demi-heure.
La séance est reprise à deux heures.
M. le président. - Toutes les sections ayant autorisé la lecture
de la proposition, je vais vous en faire connaître la teneur : « J’ai l’honneur
de proposer à la chambre qu’il soit nommé une commission chargée d’examiner :
1° si, et jusqu’à quel point, le marché Hambrouck est onéreux au pays ;
« 2° Si on serait fondé à en provoquer la
résiliation par les voies légales, pour, sur le rapport de la commission, en
être décidé par la chambre comme elle avisera. »
- La chambre décide qu’elle entendra le développement
de cette proposition le 16 janvier prochain.
M. Dumortier. - Quelle que soit la durée de l’ajournement de la chambre,
je demande qu’en cas de guerre nous nous réunissions immédiatement. (Hilarité générale.)
M. Jacques donne lecture d’un arrêté du Roi qui nomme M. de Theux ministre de
l’intérieur.
M. Destouvelles. - Je demande la parole. Messieurs, l’observation
que vient de nous faire le très honorable M. Dumortier me donne lieu de croire
qu’il a des renseignements particuliers, qui le déterminent à faire une
semblable proposition. (Hilarité). Si
ma présomption est fondée, comme ces renseignements seraient de nature à nous
intéresser très vivement, je le prierai de les faire connaître à la chambre. (Nouvelle hilarité.)
M. Dumortier. - Je n’ai aucune espèce de donnée là-dessus mais,
dans l’état actuel des choses, il ne serait pas impossible que les hostilités
fussent reprises. Dans tous les cas, mon vif désir est que le gouvernement les
reprenne, si le roi Guillaume persiste dans son refus d’accepter les 24
articles.
Et je désire, soit que la Hollande recommence la
guerre, soit que nous la recommencions nous-mêmes, que la chambre soit réunie
des les premières hostilités.
M. Gendebien. - Je ne sais si la proposition de M. Dumortier peut
avoir un côté plaisant, mais elle pourrait bien avoir aussi son côté sérieux,
surtout s’il est vrai, car le bruit en court, qu’un courrier est arrivé hier,
portant au gouvernement de nouvelles propositions de la conférence,
propositions qui seraient de nature à imposer à la Belgique de nouveaux
sacrifices, comme de renoncer à la navigation des eaux intérieures de la
Hollande, et de remettre la dette en discussion. Dans ce cas, je suis certain
que la chambre ne serait pas plus disposée que la nation à accepter cette
humiliation nouvelle, et dès lors la guerre serait inévitable ; c’est, au
surplus, un résultat que j’appelle de tous mes vœux. Je demande donc à M. le
ministre des affaires étrangères si le bruit dont on vient de parler est fondé.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Non. Le gouvernement n’a reçu aucune
proposition semblable et il n’est pas vrai qu’un courrier soit arrivé hier au
soir.
M.
Gendebien. - Ni avant-hier ?
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Ni avant-hier.
M.
Gendebien. - Ce qui me faisait croire que ce bruit pouvait bien avoir quelque
fondement, ce sont les nouvelles de la Russie qui montrent l’empereur Nicolas
peu dispose à ratifier le traité.
M. Lebeau. - Je crois que, s’il y avait reprise des
hostilités, chacun des membres de la chambre connaît trop bien ses devoirs pour
avoir besoin qu’on insère dans la proposition d’ajournement une clause qui
pourrait semer de l’inquiétude dans la nation.
M.
Gendebien. - Je ne sais si la proposition de M. Dumortier a été faite sérieusement
mais, comme j’ai vu la chambre en joie, j’ai dû le croire ainsi, et en faire
voir le côté sérieux. Cependant, je crois, nous ferions bien de nous engager à
nous rendre ici si les hostilités recommençaient.
M. Dumortier. - Quand j’ai fait ma proposition, c’était dans la
préoccupation que donnent naturellement les nouvelles de la Hollande. Il ne
faut pas se le dissimuler, nous sommes en hostilité avec la Hollande, et, quand
j’ai proposé de nous réunir au premier signal, c’était un appel que je faisais
au zèle des membres de la chambre.
M. Lebeau. - Ce serait nous faire injure à nous-mêmes que de
prendre l’engagement de nous rendre ici dans le cas où la guerre recommencerait
: pour moi, je le déclare, je ne prendrais pas un tel engagement ; car c’est
laisser supposer que j’ai pu oublier un seul instant toute l’étendue de mes
devoirs. Messieurs, par l’espoir bien ou mal fondé de la paix, l’industrie
reprend chez nous un nouvel essor ; ce n’est pas dans un pareil moment que nous
devons l’arrêter dans sa marche, en jetant l’inquiétude dans les esprits. Il
n’y a aucun engagement à prendre, et pour moi, je le répète, je n’en prendrai
aucun.
M.
Gendebien. - Si c’est à M. Dumortier que M. Lebeau a entendu répondre, je n’ai rien à
dire. Si c’était à moi, je lui ferais observer que je n’ai pas proposé de faire
mention de l’engagement à prendre, dans le procès-verbal, ni de le constater de
toute autre manière.
M. Van Meenen fait observer que l’ajournement de la chambre
n’est qu’un ajournement de fait, mais non un ajournement de droit. Il en tire
les conséquences qu’elle n’est pas censée séparée. (Assez ! assez !)
REPONSE DU MINISTRE SUR
UNE PETITION
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux) a la parole pour faire le rapport suivant. - Par résolution du 23
décembre, vous m’avez renvoyé une pétition de quatre conseillers de la régence
de Berchem, province d’Anvers ; je viens
vous donner quelques explications sur cette question.
Dès le 22 septembre dernier, une plainte
pseudonyme, ayant pour objet de provoquer la destitution du secrétaire de la
régence de Berchem, fut adressée au département de l’intérieur.
Cette plainte, renvoyée au gouverneur de la
province, devint l’objet d’une information. Le résultat de cette information
fut tel, que M. le gouverneur ne put se dispenser de le communiquer à la
députation des états de la province : par
décision du 8 octobre, la députation des états suspendit le secrétaire de ses
fonctions.
Cette décision fut communiquée au conseil de
régence, le 9 novembre, en séance extraordinaire ; celui-ci nomma immédiatement
un secrétaire provisoire. Le 10 novembre, eut lieu l’élection du bourgmestre
actuel, qui obtint une grande majorité de voix.
Le conseil adressa une lettre au gouverneur de
la province, à l’effet de connaître les motifs de la suspension. Un ami du
secrétaire écrivit à un membre de cette chambre, pour qu’il employât ses bons
offices en faveur du secrétaire,
qui avait été favorable à la candidature de M. Werbroeck-Peeters, ancien membre
du congrès, lequel désirait être élu bourgmestre de la commune.
En suite des démarches de ce représentant, il
fut pris des informations sur cette affaire auprès de M. le gouverneur. Ce
fonctionnaire, dans une lettre du
28 novembre, exposa les motifs de la décision des états qui avait été précédée
de plaintes continuelles à charge du secrétaire depuis plus de six mois. Le
secrétaire provisoire, ayant donné sa démission, le conseil fut convoqué pour
le 20 novembre, à l’effet de « nommer un nouveau secrétaire ad interim, pièces n° 6 bis, et 6 ter
».
Les conseillers, convoqués, résolurent de
réintégrer dans ses fonctions le secrétaire suspendu ; mais M. le bourgmestre,
averti de la résolution ainsi concertée, prit le parti de ne pas assister à la
séance.
Le conseil, accomplissant cette résolution,
déclara réintégrer et nommer itérativement le secrétaire pour autant que de
besoin.
Le bourgmestre, considérant cet acte comme nul
et illégal, crut devoir protester et ne plus pouvoir agir de concert, ni avec
le conseil qui s’était mis en opposition ouverte avec la décision de l’autorité
supérieure, ni avec le secrétaire réintégré auquel il ne reconnaissait aucun
caractère public.
Le bourgmestre porta cette circonstance à la
connaissance des états-députés ; les conseillers de régence en firent de même.
Dès le 25 novembre, deux pétitions, couvertes
chacune d’un grand nombre de signatures furent adressées à la députation des
états, à l’effet de demander de pouvoir procéder à une nouvelle élection de
conseillers municipaux.
Le 29 novembre, la députation des états, vu le
refus du conseil de nommer un secrétaire ad
interim , usant de l’attribution lui déférée par l’art. 93 du règlement
du plat pays, y pourvut elle-même.
D’autre part, les conseillers de régence
m’adressèrent deux pétitions , sous les dates des 2 et 7 de ce mois ; ils joignirent
à la dernière divers certificats en faveur du secrétaire, dont un signé par un
grand nombre d’habitants de Berchem.
Après avoir mûrement examiné les divers actes
ci-dessus mentionnés, je fis connaître à M. le gouverneur de la province que je
ne pouvais accueillir la pétition des conseillers, et que je n’avais aucun
motif d’annuler la décision prise par la députation des états.
Depuis lors, aucune nouvelle pièce ne m’a été
adressée relativement à cette affaire ; le temps de la suspension du secrétaire
étant expiré, je présume qu’il aura repris ses fonctions.
Je
ferai seulement remarquer, en terminant, que deux conseillers de régence,
signataires de la délibération en faveur du secrétaire suspendu, ayant donné
leur démission, il a été procédé à une nouvelle élection, dont le résultat a
été en faveur de deux habitants qui n’avaient point soutenu le parti du
secrétaire. Cette circonstance est signalée par M. le bourgmestre comme étant
propre à constater l’opinion de la commune, qui a ainsi ratifié, quant au fait,
la décision des états.
M. Osy. - D’après les explications de M. le ministre, il
paraît que les règlements du roi Guillaume sur le plat pays sont toujours en
vigueur , malgré la constitution qui , selon moi, les a abolis. Je demande que
cette question, à laquelle toutes les communes sont intéressées, soit mûrement
examinée. Un secrétaire de commune , élu par le peuple, a été suspendu de ses
fonctions sans qu’on lui ait dit aucune raison. Maintenant le délai de la
suspension est expiré, et les deux communes dont il est le secrétaire l’ont
réélu ; ainsi, vous voyez de quelle injustice il avait été victime. Je crois
que les états-députés ont été beaucoup trop loin, mais que cela ne se
reproduira plus.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je n’ai rien à ajouter sur la question de fait. Quant à la question de droit,
s’il était le moment de la discuter, j’établirais facilement que la députation des
états n’a fait que ce qu’elle était en droit de faire.
M. Milcamps donne
des explications sur la question, mais d’une voix si faible que les paroles de
l’honorable membre ne peuvent arriver jusqu’à nous.
M. Ch. Vilain XIIII fait remarquer que cette discussion ne peut
amener à rien, car la chambre n’est saisie de rien. Une pétition lui a été
adressée, elle a entendu le rapport de M. le ministre : il ne lui reste plus rien
à faire. Tout ce qu’il serait possible de faire, ce serait, ou de proposer une
loi pour que la difficulté ne se renouvelât pas, ou de proposer de mettre le
ministre en accusation.
M. Osy. - Je demande le dépôt du rapport au bureau des
renseignements.
- Le dépôt est ordonné.
NOMINATION D’UNE
DELEGATION POUR COMPLIMENTER LE ROI
Sur la proposition de M. Ullens, la chambre décide qu’une députation
de dix membres ira, avec M. le président de la chambre, complimenter le Roi à
l’occasion du nouvel an.
On tire la députation au sort, qui désigne MM.
l’abbé de Haerne, Lefèvre , Jacques, Rouppe, Bourgeois, Lebeau, Charles Vilain
XIIII, Vandenhove, Pirmez et Werner de Mérode.
La séance est levée à deux heures et demie.