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Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du samedi 21 novembre 1835
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment demande de naturalisation de de Garcia de la Vega, pétition relative au paiement d’une pension (Dubus)
2) Renvoi de pétitions à la commission chargée d’examiner les modalités d’exécution et de financement de plusieurs voies de communications publiques (d’Hoffschmidt, Fallon, Jadot, Eloy de Burdinne, d’Huart, de Puydt, Pirson, d’Hoffschmidt, Eloy de Burdinne)
3) Situation générale du trésor public (d’Huart)
4) Projet de loi portant le budget des voies et moyens pour l’exercice 1836 (Gendebien, d’Huart, (+ règlement des comptes de l’Etat) Desmet, Gendebien, Rogier, d’Huart, Rogier)
5) Commission chargée d’examiner les demandes en naturalisation. Règlement de la chambre (Lejeune, Dubus)
6) Projet de loi relatif aux los-renten (Jadot, Zoude, Verdussen, Dubus, Fallon, Zoude)
7) Projet de loi portant un crédit supplémentaire au
budget du département de l’intérieur pour l’imputation de créances arriérées.
Equilibre général des budgets et/ou règlement des comptes de l’Etat (Jadot, d’Huart, Rogier,
Jadot, Fallon, d’Huart,
Jadot, Verdussen, Rogier, d’Huart, Jadot),
culte anglican et jeux de Spa (de Theux, Lejeune, Demonceau, Jadot, de Theux), conseil de milice
(Demonceau), culte protestant (de
Theux, de Theux), musée des arts et métiers (Dumortier, de Theux), archives
du royaume (Desmet, de Theux, Jadot), secours aux légionnaires nécessiteux (de Theux, Gendebien, Dubus, Fallon, de
Theux), construction de bâtiments pour l’organisation de manifestations
publiques à Bruxelles, notamment pour la célébration des fêtes nationales
(local des Augustins) (Dubus, de
Theux, Desmet, Dubus, Lejeune, Dubus, de
Theux, Lejeune, Gendebien,
de Theux), idem (construction nouvelle au Sablon) ((+cour
des comptes) Dumortier, (+archives et expositions) Rogier, Gendebien, de Theux, Dumortier)
(Moniteur belge n°326, du 22 novembre 1835
et Moniteur belge n°327, du 23 novembre 1835)
(Présidence
de M. Raikem.)
(Moniteur belge n°326, du 22 novembre 1835)
M. Dechamps fait l’appel nominal à une heure.
M. Schaetzen donne lecture du procès-verbal
de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. Dechamps donne connaissance des pièces
suivantes adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Le
sieur F. D.-J. de Garcia de
_______________
« La
régence de la ville de Wiltz demande la construction d’une route de Bastogne à Diekirk par Wiltz. »
_______________
« Le sieur baron de
_______________
« Plusieurs exploitants des minières de
fer d’alluvion demandent la libre sortie du minerai de fer. »
_______________
« L’administration communale de Médernach (Luxembourg) réclame contre la démarche faite
auprès de Sa Majesté par les maîtres de forges de la province pour obtenir la
prohibition à la sortie, vers
_______________
« L’administration de la commune d’Ermsdorff fait la même réclamation. »
COMMISSION
CHARGEE D’EXAMINER LES MODALITES D’EXECUTION ET DE FINANCEMENT DE CERTAINS
TRAVAUX PUBLICS
M. d'Hoffschmidt. - Au nombre des pétitions
dont on vient de présenter l’analyse, il s’en trouve une de la régence de Willz qui réclame des fonds pour la construction d’une
route ; je demande que cette pétition soit renvoyée à la commission des travaux
publics instituée par la chambre l’année dernière : il y a beaucoup de demandes
du même genre que la chambre lui a déjà renvoyées ; il serait utile qu’elle fût
convoquée pour aviser à ce qu’elle doit faire pour remplir le but de son
institution.
M. Fallon. - Je prierai l’honorable M.
d’Hoffschmidt d’attendre quelques moments. M. de Puydt, secrétaire de la
commission des travaux publics, ne tardera pas à venir et il pourra donner des
renseignements. La commission dont je suis membre à chargé M. de Puydt de
correspondre avec le ministre de l’intérieur pour avoir les documents
nécessaires à son travail, et notamment les plans des grandes communications ;
de plus la commission avait arrêté qu’elle ne se réunirait que quand ces
documents lui seraient parvenus ; elle n’a encore rien reçu.
-
En ce moment M. de Puydt entre.
M. d'Hoffschmidt. - En l’absence de
l’honorable M. de Puydt, secrétaire de la commission des travaux publics, j’ai
demandé que la pétition fût renvoyée à cette commission avec l’invitation de se
réunir et de statuer sur tous les mémoires qui lui ont été soumis. A la veille
de discuter le budget de l’intérieur, nous devons connaître nos besoins
relativement à nos communications.
M. Jadot. - Dernièrement les habitants d’une autre
commune ont aussi envoyé une pétition pour réclamer une route ; je demanderai
que cette pétition, qui est de la même catégorie que celle dont vient de parler
M. d’Hoffschmidt, soit aussi renvoyée à la commission des travaux publics.
M. Eloy de Burdinne. - Il y a
quelque temps que j’ai demandé qu’une pétition adressée à la chambre, et pour
le même sujet, fût renvoyée au ministre de l’intérieur ou à la commission des
travaux publics ; on m’a fait observer qu’il fallait que la pétition fût
renvoyée à la commission des pétitions, qu’elle devait suivre la filière
ordinaire ; que tout ce que je pouvais faire, c’était de demander un rapport
d’urgence. J’ai demandé ce rapport, il est encore à venir depuis six mois.
Aujourd’hui je demanderai que la pétition dont je parle soit envoyée avec les
autres à la commission des travaux publics, et que cette commission soit
invitée à faire son rapport.
M. Fallon. - Je réitère ce que j’ai déjà dit, que
la commission s’est réunie, qu’elle a chargé son secrétaire de demander
communication de documents indispensables à son travail, et qu’il n’a encore
rien reçu.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Quels
sont ces documents ?
M. Fallon. - Les plans !
M. le ministre des
finances (M. d'Huart). - Mon collègue au département de l’intérieur
m’avait soumis un projet relatif à l’achèvement des communications déjà
commencées et à l’entreprise de nouvelles, appuyant une demande de crédit nécessaire
pour ces travaux. Je lui ai renvoyé son projet depuis quelques jours. Il
faudrait ouvrir au ministre de l’intérieur un crédit de deux millions par année
pour l’exécution de tels projets. Ce crédit serait fourni par l’excédant du
produit des barrières et par les bons du trésor, en attendant qu’un emprunt
soit fait pour couvrir ces dépenses, ainsi que d’autres. J’espère que d’ici à
peu de temps le ministre de l’intérieur sera à même de terminer ce qui concerne
les objets dont parle le préopinant.
M. de Puydt. - L’honorable M. Fallon vous a fait
connaître les véritables obstacles qui s’opposent à ce que votre commission des
travaux publics vous fasse un rapport ; mais je crois que ces obstacles seront
bientôt levés.
M. Pirson. - Je
crois qu’on devrait renvoyer au ministre de l’intérieur ou à la commission des
travaux publics les pétitions dont il s’agit. Ou peut même, je pense, les
renvoyer toutes ensemble au ministre, puisqu’il n’a pas donné à la commission
les documents qui lui sont indispensables pour son travail : car, si vous
renvoyez ces mémoires à la commission des pétitions, qu’en fera-t-elle ? Nous
avons deux feuilletons arriérés, et ces feuilletons sont à la date de cinq à
six mois. Le renvoi à la commission des pétitions n’est d’ailleurs que de pure
forme ; il vaut mieux prendre le droit chemin et renvoyer le tout au ministre
de l’intérieur.
M. Gendebien. - C’est à la commission
qu’il faut renvoyer !
M. d'Hoffschmidt. - Je demande, comme
l’honorable M. Gendebien, le renvoi de la pétition dont il s’agit à la
commission des travaux publics, parce que déjà il lui en a été renvoyé du même
genre dont elle doit faire un rapport ; d’ailleurs vous aurez à déterminer,
lorsque vous sera soumise la demande de crédit de deux millions, dont M. le
ministre des finances vient de vous entretenir, à quels genres de travaux ces
fonds devront être employés ; et, pour pouvoir le faire, il serait à désirer
que la commission fît, sur les demandes qui lui ont été renvoyées, un rapport
avant la discussion de cette demande de crédit dont l’emploi devra être
spécifié. Je désirerais donc que cette commission, dont j’ai l’honneur de faire
partie, s’assemblât de nouveau et qu’elle renouvelât, au besoin, la demande de
documents qu’elle a adressée, il y a 7 à 8 mois, à M. le ministre de
l’intérieur.
M. Eloy de Burdinne. - J’appuie
l’opinion de l’honorable M. d’Hoffschmidt. Il faut connaître les communications
qu’on veut établir pour savoir si elles méritent qu’on ouvre un crédit. Il y a
six mois que j’ai demandé des renseignements au ministre de l’intérieur ; il
m’a répondu que bientôt il serait prêt à fournir à la chambre tous les
documents qu’elle désirerait ; le moment est venu de s’éclairer.
- Les pétitions concernant les routes sont renvoyées à la commission des
travaux publics.
________________
M. Dubus. - Au nombre des pétitions analysées,
il s’en trouve une d’un titulaire de pension qui n’est pas payé, au moins en
totalité : il demande que la pension à laquelle il croit avoir droit lui soit
payée intégralement. Je ne sais si sa réclamation est fondée ; nais si elle
l’est, il y a urgence de payer ; je demande que cette pétition soit renvoyée à
la section centrale chargée de l’examen de la dette publique.
-
Le renvoi à la section centrale chargée de l’examen de la dette publique est
ordonné.
Les
autres pétitions sont renvoyées la commission des pétitions.
SITUATION GENERALE DU TRESOR PUBLIC
M. le ministre des finances (M. d'Huart) monte à
la tribune et dépose sur le bureau de la chambre, comme document propre à
éclairer la discussion des budgets de 1836, la situation générale du trésor
public au 1er novembre dernier. - Messieurs, dit-il, dans la communication que
j’ai l’honneur de faire à la chambre, j’entre dans un grand détail de chiffres
; je vous en épargnerai la lecture, parce que vous les apprécierez mieux
lorsqu’ils vous seront remis imprimés. Je ferai une seule observation sur le
résultat du travail que je vous soumets : c’est qu’il restait au 1er novembre
dernier un excédant de 6,937,695 francs des recettes
sur les dépenses. Dans ces recettes nous comprenons tous les bons du trésor qui
ont été mis à la disposition du gouvernement et la subvention de guerre dont il
reste maintenant encore disponible une somme d’environ trois millions, après
avoir défalqué 1,460,000 francs affectés au département de la guerre.
Vous
remarquerez, en rapprochant les différents chiffres, que, malgré les dépenses
extraordinaires qui ont été faites pendant les exercices 1834 et 1835, les
dépenses et les recettes se sont balancées, et que pour ces deux exercices la
situation financière ne s’est pas empirée.
M. Gendebien (pour une motion
d’ordre.) - Le ministre des finances nous avait annoncé qu’il nous remettrait
le budget des voies et moyens ; il est important que la chambre connaisse ce
budget avant de délibérer sur celui des dépenses. Il devient urgent d’avoir
tous ces projets de lois de finances, car sans cela nous n’aurons pas les
moyens d’évaluer les dépenses, si nous ne savons pas jusqu’à quel point il nous
est permis d’en faire. Je prie le ministre de nous dire par quelle cause il n’a
pas tenu sa promesse.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je
serai en mesure de présenter le projet dans quelques jours. Il n’y a pas encore
de retard ni de préjudice causé par la non-présentation de ce budget. On
conçoit aisément qu’il importe de ne pas présenter trop tôt le budget des voies
et moyens, parce que les évaluations qu’il comprend sont basées sur les
recettes de l’exercice courant ; en effet, il est évident que, supputant les
recettes probables de l’exercice de 1836 sur celles déjà effectuées de
l’exercice de 1835, on arrivera à des évaluations plus approximatives si elles
reposent sur les données de la plus grande partie possible de cette dernière
année.
M. Desmet (pour une
motion d’ordre). - Il y a quelques jours M. le ministre des finances nous avait
promis de nous présenter les lois concernant le règlement des comptes de l’Etat
: aussi longtemps que vos comptes ne seront pas arrêtés, vous ne connaîtrez pas
la situation exacte de vos finances. Je demande pourquoi ces lois ne sont pas
présentées.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Ainsi
que je l’avais annoncé à la chambre, la cour des comptes vous a envoyé ses
observations sur les comptes de l’exercice 1832 ; et elle vous a promis de vous
remettre bientôt ses observations sur les comptes des exercices 1830 et 1831.
Il ne dépend pas de moi de hâter davantage l’envoi de ces documents, dont la
chambre sera au reste saisie très incessamment.
M. Gendebien. - Je ne puis accepter
les raisons données par le ministre des finances, relativement à la
présentation du budget des voies et moyens. En effet, s’il faut attendre, pour
évaluer les recettes, qu’on connaisse celles de l’exercice courant, pourquoi ne
pas attendre jusqu’au commencement de l’année 1836 ? Quoi qu’il en soit, je
dirai qu’il est de bonne administration de présenter les deux budgets des
dépenses et des recettes en même temps. Il faut mettre les dépenses au niveau
des recettes. J’insiste donc pour que le ministre nous remette instantanément,
ou du moins le plus tôt possible, la loi de finances concernant les voies et
moyens.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je
crois pouvoir prendre l’engagement que la chambre sera saisie du budget des
voies et moyens avant l’ouverture de la discussion sur le budget des dépenses.
Vous allez vous occuper de la loi communale, et le budget des recettes vous
sera distribué pendant ce temps ; dans dix jours la loi des recettes sera
imprimée et distribuée.
M. Rogier. - Je demanderai au ministre des
finances s’il peut nous dire comment le budget des voies et moyens sera
présenté. Jusqu’ici on nous a présenté en masse le tableau des évaluations des
recettes ; l’année dernière on a manifesté le désir d’avoir une loi de finances
sur les recettes, formulée de la même manière que la loi de finances sur les
dépenses. Le budget des dépenses est accompagné de développements qui
justifient tous les articles ; il serait utile pour la chambre que le budget
des voies et moyens fût accompagné aussi de développements qui justifiassent
chaque évaluation.
Il est des recettes qu’on présente en bloc, pour 8, 10, 12 millions, et
il ne nous en est donné aucun détail. Je sais bien que dans les lois relatives
aux comptes on entre dans quelques détails ; mais ces détails ne me semblent
pas encore suffisants. Aujourd’hui, par exemple, les recettes que donnent les
douanes, figurent in globo pour une somme de 8
millions. Il serait fort utile de savoir pour combien l’importation figure dans
ces 8 millions, pour combien l’exportation et le transit ; je voudrais même
qu’on indiquât, si non tous, au moins les principaux articles du tarif et
combien ils rapportent.
Pour
la loi qui va bientôt nous occuper, il serait utile de savoir combien le bétail
a rapporté à l’importation, combien par le transit et par provinces. Je ne
parlerai pas du revenu à la sortie, puisque depuis deux ans on a supprimé tout
droit à la sortie du bétail, de manière qu’il serait difficile d’apprécier nos
exportations.
Voilà
pourquoi il nous faudrait avoir des détails sur tons les objets compris dans la
loi de recettes. Ces détails sont au département des finances, et je demanderai
au ministre s’il ne voit pas de difficultés à nous les faire connaître dans les
tableaux qu’il nous présentera.
Nos
discussions sur les voies et moyens, qui devraient être approfondies, se
passent en débats très vagues. Il est des recettes qui, par leur faible
importance, pourraient être supprimées au grand soulagement des contribuables,
et qui passent inaperçues. Il est beaucoup d’autres renseignements utiles qu’on
peut retirer des développements que je réclame.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Il y a une raison fort simple pour ne pas donner au budget des voies et moyens
les mêmes détails qu’au budget des dépenses. La première de ces lois de
finances est basée sur les lois établissant les impôts, et l’on ne peut pas
trouver de meilleures pièces justificatives que ces lois elles-mêmes ;
autrement on finirait par tomber dans un véritable dédale, si l’on subdivisait
tous les articles actuels du budget des voies et moyens. Je m’aperçois que
l’honorable préopinant confond pour la douane des états de balance des
différents produits à l’importation, à l’exportation et au transit en Belgique,
avec l’état général de nos recettes, tel qu’il faut les envisager dans une loi
des voies et moyens. Les documents que l’honorable membre désire spécialement
sur ce point seront prochainement publiés par les soins du département de l’intérieur
dans les tableaux du mouvement de notre commerce.
Quoi
qu’il en soit, je ne comprends pas l’utilité de subdiviser à l’infini le budget
des voies et moyens. Les lois déterminent, ainsi que je l’ai déjà dit, tous les
impôts, et de quelle manière ils seront perçus : ce sont donc les lois
elles-mêmes qui donnent les renseignements nécessaires pour apprécier les
choses.
Je
conçois, par exemple, que pour la contribution foncière, au lieu de porter en
bloc le montant de la recette, on pourrait porter cette recette pour chaque
province ; c’est inévitablement ce qui arrivera pour l’année 1836, si la loi
sur la péréquation cadastrale, ou une mesure analogue, est adoptée.
Cependant,
messieurs, s’il est des développements possibles à ajouter au budget des
recettes, et qui puissent être utiles à la discussion de cette loi, je les
ajouterai très volontiers.
M. Rogier. - Bien que les recettes soient prévues
par les lois il ne s’en suit pas que la chambre puisse connaître les effets de
ces lois sur telle ou telle recette ; et comment voulez-vous que nous
corrigions les résultats d’une loi inutile ou vexatoire si nous ne les
connaissons pas ? Les détails que nous demandons sont, je le répète, compris en
partie dans les comptes généraux quoiqu’ils ne soient pas assez divisés ; plus
divisés ces états pourraient fournir des éclaircissements importants dont nous
manquons aujourd’hui.
J’ai
cité les tableaux des importations et des exportations ; j’aurais pu citer
d’autres exemples, la contribution personnelle entre autres : il serait
intéressant de savoir combien elle rapporte par portes et fenêtres, par
domestiques, par chevaux, puis par province ; ce qu’elle donne pour les villes,
pour les campagnes. Je vois que M. le ministre a parfaitement compris ma
proposition. Je l’ai faite parce qu’en la faisant plus tard on ne serait
peut-être plus à même de nous donner les documents qui peuvent nous être fort
utiles.
________________
M. Duvivier, nommé membre de la chambre des
représentants, est admis à prêter le serment voulu par la constitution.
M. Lejeune monte la tribune. L’orateur donne
lecture d’une disposition réglementaire à l’effet de déterminer le mode de
nomination de la commission instituée par la loi de naturalisation.
-
La prise en considération de la proposition de M. Lejeune est mise aux voix et
adoptée.
M.
Lejeune donne lecture des développements à l’appui de sa proposition.
Le
renvoi de la proposition de M. Lejeune à une commission spéciale est mis aux
voix et adopté.
Cette
commission sera sommée par le bureau.
M. Dubus. - La chambre a fixé à l’ordre du
jour de lundi la nomination de la commission des naturalisations, La décision
qu’elle vient de prendre à l’égard de la proposition de M. Lejeune nécessite le
changement de cet ordre du jour.
J’ai
l’honneur de proposer à l’assemblée de fixer la nomination de la commission des
naturalisations après le jour où la commission présentera son rapport sur la
proposition de M. Lejeune.
-
La proposition de M. Dubus est mise aux voix et adoptée.
Discussion des articles
Article premier
M. Jadot. - Le but que je m’étais proposé en
présentant mon amendement, était d’éviter au trésor un surcroît de charges
qu’il ne doit pas supporter. Du moment que vous avez adopté l’article qui élève
à 5 p. c. l’intérêt des los-renten dénonces à Bruxelles, mon amendement devient
sans objet. En conséquence je déclare le retirer.
M. Zoude. - En proposant d’autoriser les acquéreurs
à se libérer en numéraire, à raison de 98 p. c., je
n’ai nullement entendu invoquer une faveur à leur égard ; j’ai seulement voulu
empêcher l’injustice que l’on commettrait en les privant de la faculté de payer
en los-renten dont le taux n’est guère que de 98, comme M. le ministre des
finances l’a reconnu lui-même.
L’injustice
d’une pareille mesure, si elle n’était pas réparée au moins de la manière que
j’indique, vous a été démontrée hier par l’honorable M. Verdussen : je n’aurai
rien à y ajouter ; mais ce que j’ai dit et répète, c’est que la position des
acquéreurs a été aggravée lorsque l’intérêt des bons du syndicat a été porté,
en Hollande, de 2 1/2 à 5 p. c., et cependant j’ai voté pour qu’il fut
également alloué pour les bons dénoncés à Bruxelles, parce que j’ai cru qu’il
aurait été inique de refuser à des Belges une faveur dont jouissaient les
Hollandais ; j’ai donc regardé le vote de la chambre comme un acte de justice,
et je m’y suis associé volontiers.
Mais
je ne persiste pas moins à soutenir que les acquéreurs ont souffert de
l’élévation de l’intérêt, et c’est depuis lors, en effet, que les los-renten se
sont élevés à un taux si rapproché du pair ; et pourquoi cet intérêt a-t-il été
doublé ? C’est parce que la révolution est survenue. Sera-t-il donc équitable
d’en faite supporter le poids par les acquéreurs ? Si nous avons été justes
envers les détenteurs des bois, soyons-le de même envers ceux qui doivent en
faire usage, et à cet égard je suis si loin d’avoir dit ce que m’a prêté un
orateur, que les acquéreurs avaient calculé sur le taux de 98 au moment des
ventes, que je doute si, avant la révolution, aucun d’eux a acheté à un prix
aussi élevé ; ce que je puis affirmer, c’est qu’avant cette époque je n’ai
guère dépassé 96.
Aussi
mon intention avait été d’abord de proposer ce taux, ou bien celui du cours au
jour de chaque adjudication partielle, ou bien, ce qui me paraissait au moins
aussi équitable, celui du jour où l’intérêt avait été élevé de 2 1/2 à 5 p. c.
; mais, prévoyant beaucoup de difficultés dans l’admission de ou de l’autre de
ces amendements, je me suis arrêté à celui que j’ai eu l’honneur de vous
proposer, quoique le plus préjudiciable aux acquéreurs ; je l’ai fait parce
qu’il m’a été assuré que c’était le cours de ces valeurs à la bourse
d’Amsterdam, lorsqu’ils y ont été cotés pour la première fois, et que c’était
aussi celui du jour où j’ai fait ma proposition.
Quant à ce qui a été dit que les los-renten, sous
Guillaume, se seraient élevés au-delà du pair, je répondrai que les acquéreurs
n’ont jamais eu la moindre crainte à cet égard, d’abord parce que l’emprunt
était de 100 millions, tandis que les biens à vendre atteignant à peine 70
millions de valeur, ils devaient s’attendre à la baisse plutôt qu’à la hausse :
aussi le syndicat, pour faciliter l’écoulement du surplus, les avait admis dans
l’emprunt de 30 millions du 30 juin 1830, et vous voyez encore que lorsqu’il en
a autorisé l’échange contre numéraire, il y a mis une condition, celle d’en
faire la demande 6 mois auparavant ; il regardait donc cet échange comme une
quasi-faveur ; s’il l’eût considéré comme de stricte justice, l’échange en eût
été fait à bureau ouvert, comme cela a lieu pour les billets de banque.
Vouloir
supposer qu’on nous aurait livrés comme une pâture à l’avidité des agioteurs,
prétendre aussi qu’on aurait tendu un piège aux acquéreurs dans le but de les
spolier un jour, ce serait prêter à un gouvernement, quelque dépravé qu’on
puisse le supposer, des vues tellement immorales que l’idée seule nous répugne.
Je
réitère donc que les acquéreurs ont toujours été dans la confiance qu’ils se
libéreraient en dessous du pair, et je maintiens comme très modéré le chiffre
que j’ai proposé, et je prie la chambre de l’accueillir par son vote.
M. Verdussen. - Trois membres de cette
assemblée avaient demandé de pouvoir acquitter en écus les domaines vendus, et
cela au taux de 98 p. c. C’est contre cette proposition que je m’élève. On
pourrait s’étonner de me voir repousser cette proposition, après les paroles
que vient de prononcer l’honorable préopinant. Mais l’orateur a détaché une
phrase que j’ai prononcée dans la séance d’hier, au lieu de chercher dans
l’ensemble de mon discours mon opinion qui est tout à fait contraire à la
sienne.
Je
ne conçois pas en effet la sollicitude que l’on veut attirer sur les acquéreurs
des domaines, aux dépens des détenteurs des los-renten. Déjà, dans la séance
d’hier, je vous ai fait sentir qu’il était impossible de favoriser les uns sans
faire du tort aux autres. J’ai traité cette question en envisageant également
les intérêts des acquéreurs et ceux des détenteurs. Je vous ai montré le
désavantage qu’il y aurait pour les acquéreurs si les détenteurs pouvaient
faire monter leurs obligations jusqu’à 130, et je vous ai fait voir aussi les
pertes que ceux-ci éprouveraient si elles descendaient à 70.
Dans
la proposition qui vous est soumise je distingue deux choses : d’abord la perte
du trésor qui est évidente ; car on a opéré la vente à 100 p. c. et non à un
taux inférieur. L’honorable préopinant a dit que les sommes émises par le
syndicat étaient supérieures aux sommes qui devaient provenir de la vente des
domaines. Dans une séance précédente, je vous ai déjà fait connaître quel avait
été le manège du syndicat, de quelle manière il aurait diminué la masse de
papier-monnaie tout en en tenant en réserve dans ses coffres pour une somme de
18 millions, afin de les faire payer bien cher par les acquéreurs obligés de
payer en los-renten. Si les 100 millions émis d’abord par le syndicat eussent
été les seuls et fussent restés en circulation, l’argumentation de l’orateur
serait parfaite. Il n’en est rien du tout. Les opérations du syndicat
montraient qu’il voulait anéantir le papier-monnaie avant que les acquéreurs
eussent pu s’en procurer pour payer les domaines.
Dans
toutes les levées qui ont eu lieu en Hollande, le papier-monnaie a été reçu en
paiement. Le syndicat a alléché les détenteurs des los-renten par l’espoir du
remboursement à cent p. c. Le papier-monnaie ne portant qu’un intérêt de 2 1/2
p. c., il était facile de prévoir que les personnes
qui avaient acheté 85, 87, se trouveraient fort heureuses d’obtenir 100 francs
de leurs obligations après une dénonciation de six mois à l’avance. Le
papier-monnaie devait devenir rare. Il fallait dès lors s’adresser au syndicat
pour s’en procurer. Vous voyez que loin d’être assurés d’acquérir ce
papier-monnaie au-dessous du cours 100, les acquéreurs des domaines pouvaient
être exposés à acheter les obligations dont ils avaient besoin bien au-dessus
du pair. Je ne sais pas pourquoi vous les favoriseriez d’une remise de 2 p. c., tandis qu’ils pouvaient être obligés de payer les
domaines beaucoup plus cher que le prix d’achat.
Tout
ce que vous feriez en faveur des acquéreurs tournerait au détriment des
détenteurs de los-renten dénoncés à Bruxelles en faveur desquels l’article a
été voté par la chambre. L’intention de l’assemblée a été sans doute que les
porteurs de ces obligations fussent remboursés au taux de 100 p. c. Il est
cependant facile de prévoir qu’aussitôt qu’il dépendra de la volonté de ces
acquéreurs de payer en écus au taux de 98, ils mettront le marché à la main aux
porteurs des los-renten et leur diront. Si vous ne voulez pas me céder vos
obligations à 95, par exemple, je m’en passerai et je solderai le prix de ma
vente en numéraire.
La faculté de payer en numéraire n’était pas donnée aux acquéreurs par
le contrat de vente. Il fallait que le paiement s’effectuât en papier-monnaie.
Si vous accordez cette faculté aux acquéreurs des domaines, vous les favorisez
aux dépens des los-renten. Plus vous accorderez d’escompte aux acquéreurs, plus
le cours des los-renten baissera, cela est facile à concevoir.
Je
me permettrai une observation sur ce qu’a dit l’honorable M. Dumortier dans la
séance d’hier, en combattant mon opinion. Il vous a fait entrevoir la
possibilité qu’un jour le gouvernement dût payer les intérêts des los-renten
dénoncés à Bruxelles qui n’auraient pas été versés en acquit des domaines. Cet
argument tombait à faux. Mais c’est à l’occasion de la proposition actuelle
qu’il acquiert quelque valeur. En effet, il serait possible que les détenteurs
des los-renten, refusant de les céder à vil pris aux acquéreurs des domaines,
les conservassent en portefeuilles après que ceux-ci auraient acquitté la
totalité du prix de la vente des domaines ; que ferez-vous alors de ces
obligations restées sans moyen d’écoulement ? Il n’y a pas dans la loi un seul
article qui prévoie ce cas et qui règle la marche à suivre par le gouvernement
dans ce cas. Vous n’avez pas forcé les détenteurs des los-renten de placer
nécessairement à l’acquit des domaines leur papier-monnaie. Vous auriez agi peu
sagement si vous l’aviez fait, car vous auriez mis les détenteurs du
papier-monnaie encore plus à la merci des acquéreurs des domaines. Ici je
soumettrai une observation à la chambre.
Je
crois que le projet de loi tel que vous allez le voter est incomplet sous ce
rapport, qu’il devrait prévoir ce que l’on fera dans le cas où les los-renten
dénoncés à Bruxelles ne seraient pas affectés au paiement du prix de la vente
des domaines.
Je
me prononcerai contre l’amendement de l’honorable M. Zoude.
M. Dubus. - Que l’oppression vienne du
syndical ou des détenteurs des los-renten, vous ne devez pas souffrir que les
acquéreurs des domaines y soient exposés. Les domaines ont été achetés dans
l’espoir de les payer à 96 ou à 98. Les détenteurs du papier-monnaie l’on
acheté à 65 pour le revendre bien cher à ceux-ci. La chambre doit-elle
favoriser l’oppresseur ou l’opprimé ? Son choix ne peut pas être douteux.
M. Verdussen. - J’oubliais de dire que le
projet de loi accorde un avantage aux acquéreurs des domaines par l’art. 2.
Vous allez donner un supplément aux acquéreurs qui se sont procuré des
los-renten pour acquitter une partie du prix de leur achat. En élevant de 2 1/2
p. c. l’intérêt de leur papier-monnaie, c’est un don gratuit que vous leur avez
fait, J’ai soumis cette observation à la commission spéciale dont j’avais
l’honneur de faire partie. Il est certain que les acquéreurs ne rendront pas
aux détenteurs des los-renten le bénéfice de 2 1/2 p. c. qu’ils feront par la
loi actuelle. C’est cependant aux détenteurs que ce bénéfice devait revenir,
puisque, en achetant des los-renten à un taux inférieur, les acquéreurs de
domaines qui se sont procuré du papier-monnaie ont déjà joui de cette faveur.
Vous
voyez donc que loin de pouvoir admettre la proposition de l’honorable M. Zoude,
pour rendre aux porteurs des los-renten le bénéfice dont jouiront les
acquéreurs à leur détriment, il faudrait pour ainsi dire que la vente en
numéraire eût lieu à 102 1/2 p. c. Les obligations dénoncées à Bruxelles seront
toujours au-dessous du pair. Sans quoi les acquéreurs ne prendraient pas de
papier-monnaie. Ils menaceraient les détenteurs de ne pas s’en procurer et
forceraient la main à ceux-ci.
M. Dubus. - Je partage l’opinion de
l’honorable préopinant. Je crois comme lui qu’il n’y a pas lieu d’accueillir la
disposition qui accorde sans motif suffisant, selon moi, une indemnité aux
acquéreurs des domaines qui se libéreraient en numéraire.
Ce
n’est pas une faveur que l’on réclame, dit l’auteur de la proposition, c’est de
la justice puisque la mesure que la chambre vient de prendre à leur égard est
une mesure d’oppression. Ils souffriront du la disposition qui élève l’intérêt
des obligations dénoncées à Bruxelles de 2 1/2 p. c. à 5 ; ce qui en soutiendra
la valeur, puisque l’on a écarté la concurrence des obligations qui nous
viendraient de Hollande. Nous avons fait tort aux acquéreurs ; nous avons
changé les chances qu’ils avaient au moment du contrat.
En
réponse à ce langage, nous disons que les acquéreurs considéraient évidemment
comme un avantage au moment du contrat de pouvoir payer en los-renten, jusqu’à
l’époque à laquelle le remboursement de ces obligations devenait exigible.
C’était un papier à terme portant un intérêt de 2 1/2 p. c. seulement, qui ne
pouvait dépasser le pair. Tout ce qu’il perdait jusqu’à l’époque du
remboursement tournait au profit de l’acquéreur des domaines. Voilà la chance
favorable qui se présentait devant eux. Il, devaient bien s’attendre, puisque
ce papier à terme devait perdre jusqu’au remboursement, à voir des porteurs se
hâter d’en exiger le remboursement six mois après le 1er avril 1830. En effet,
il y eut à cette époque en Hollande des demandes énormes de remboursement. Il y
avait donc la chance que presque tout le papier-monnaie serait remboursé, et qu’en
1831, 1832, il n’en serait resté en circulation que dans les mains d’un très
petit nombre de spéculateurs, et que la boutique où ce papier se fabriquait, le
syndicat, en serait restée presque seule en possession.
Quelle
devait en être la conséquence ? L’honorable M. Verdussen l’a dit. C’est que le
papier étant devenu très rare, les demandes des acquéreurs l’auraient élevé
fort au-dessus du pair. Mais il y avait pour les acquéreurs chance de perte
pour tous les paiements postérieurs à 1831. Ils auraient été forcés d’acheter
ce papier, fût-il au-dessus du pair, pour leurs derniers paiements.
Il
est des acquéreurs qui ont si bien prévu qu’il en serait ainsi, qu’ils se sont
empressés de se procurer tout le papier nécessaire pour le total du prix
d’achat dont les termes de paiement étaient postérieurs à 1830.
Ainsi,
si nous nous reportons à l’époque où les contrats d’adjudication ont eu lieu,
il est certain que les adjudicataires n’iront pas à se plaindre d’une
disposition qui les admet à se libérer en numéraire au pair. Ils y gagneront
toute la différence qu’ils auraient dû payer pour les derniers termes exigibles
d’achat, si la révolution n’était pas arrivée.
Abordons
maintenant les conséquences de la révolution en elle-même pour les acquéreurs
des domaines. L’auteur de la proposition ne nous en a signalé qu’une. C’est
l’élévation de l’intérêt des obligations à 5 p. c. de 2 1/2 qu’il était
primitivement. Il laisse de côté les conséquences plus graves et plus
immédiates, c’est que le remboursement des los-renten, qui devait avoir lieu
six mois après le 1er avril 1830 n’a pas eu lieu. Je lui demanderai quelles
auraient été les conséquences de ce remboursement. Il est résulté de la
révolution que le syndicat a refusé de faire honneur à ses engagements. Toutes les
demandes en remboursement sont demeurées sans résultat. Mais les porteurs des
los-renten ont eu droit dés lors à un intérêt de 5 p. c. Ce n’était qu’une
indemnité partielle du préjudice qui aurait été causé aux acquéreurs par le
remboursement, s’il avait eu lieu. Cela ne faisait aucun tort aux acquéreurs,
puisque si le contrat avait été exécuté, il n’y aurait pas eu à payer un
intérêt de 5 p. c. Le capital même aurait été remboursé, il en serait résulté
que le papier serait devenu extrêmement rare, qu’il aurait fallu payer plus
cher que le pair pour s’en procurer.
L’événement
de la révolution, même en prenant en considération cet intérêt de 5 p. c., n’a pas été défavorable aux acquéreurs. Il leur a été
tout favorable puisque le papier-monnaie n’a pu s’élever au-dessus du pair.
L’auteur de la proposition convient que ce papier n’a jamais été jusqu’au pair,
qu’il n’y est pas arrivé maintenant ; c’est un fait que je ne puis reconnaître.
L’on m’a assuré qu’il s’est élevé au-dessus, et cela est facile à concevoir.
Les fonds publics à l’intérêt de 5 p. c. ne peuvent en Hollande ni en Belgique
descendre au-dessous du pair.
Quoi
qu’il en soit, les acquéreurs des domaines ne sont jamais fondés à se plaindre.
Ils ne peuvent se plaindre de l’amendement adopté dans la séance d’hier. Est-ce
parce que par cette disposition vous avez écarté les los-renten qui venaient de
Hollande ? Vous avez par ce moyen coupé court aux conséquences du manège du
syndicat qui aurait pu être funeste à
Vous
avez fait un acte de justice, et si le papier-monnaie vient à manquer par suite
de cette mesure, vous permettrez aux acquéreurs de se libérer en numéraire,
parce que ce sera au pair. Cette dernière disposition leur est favorable en ce
qu’elle change en leur faveur les chances qu’ils couraient par suite de
l’obligation de se procurer des los-renten pour se libérer.
Le
papier-monnaie que vous avez écarté par votre loi était un papier dont les
acquéreurs n’avaient pas le droit de se servir pour se libérer. Par conséquent
vous ne leur avez fait aucun préjudice dont ils puissent se plaindre, en leur
ôtant la faculté de se libérer avec ce papier.
Je
crois que sous aucun rapport il n’y a lieu d’admettre la proposition qui vous
est faite.
Puisque j’ai la parole, je dirai quelques mots en réponse à une question
faite par un honorable préopinant. Il a dit que la loi était inapplicable,
parce que la loi ne dit pas ce qui sera fait des obligations restées sans usage
après le parfait paiement des domaines.
Vous
n’avez pas à vous occuper de cela. Par le contrat passe par le syndicat, vous
vous êtes obligés à recevoir en paiement du prix des domaines les los-renten,
capital et intérêts. Cette condition une fois observée, vous ne devez plus
rien. Il en résulte que les détenteurs des los-renten n’auront rien à exiger de
vous. Vous n’avez pas à examiner ce qu’ils feront du papier qui leur restera
dans les mains. Ils en feront ce qu’ils voudront. Ils l’enverront au syndicat
en Hollande, s’ils le jugent à propos. Une chose certaine, c’est que vous
n’aurez à rembourser ni le capital ni les intérêts des los-renten.
Vous
pouvez vous en rapporter aux détenteurs eux-mêmes, qui se déferont de leur
papier-monnaie de manière à ne pas le laisser sans usage. Ce qu’il y a de
los-renten dénoncés en circulation trouvera sa place dans les 20 millions qui
restent encore à payer sur les domaines, tandis que ces los-renten ne
représentent qu’une somme de 8 millions.
Non
seulement ils ne peuvent toucher leur capital qu’en l’employant de cette
manière ; mais ils ne peuvent percevoir les intérêts échus depuis 1830 que par
ce moyen. Il ne faut pas mettre en doute que toutes les obligations en
circulation ne soient affectées au paiement des domaines.
M. Fallon, rapporteur. - Dans la séance
précédente, j’ai déjà combattu l’amendement proposé par l’honorable M. Zoude. J’ai peu de mots à ajouter à
ce que vient de dire l’honorable M. Dubus, pour vous convaincre de
l’inadmissibilité de cet amendement. La révolution, dit M. Zoude, a été préjudiciable
aux acquéreurs des domaines. C’est une erreur. Il est incontestable que les
acquéreurs n’ont pu compter sur la révolution. Mais que la révolution leur ait
été préjudiciable, c’est ce que je ne puis admettre. Loin de là ; les
acquéreurs ont dû calculer dès l’origine de leur acquisition la position où ils
seraient à dater du premier octobre 1830, époque à laquelle le remboursement
des los-renten devait avoir lieu. Si la révolution n’était pas survenue, les
détenteurs de ces obligations qui s’étaient empressés d’en demander le
remboursement, l’auraient obtenu, et les acquéreurs n’auraient pu se procurer
de los-renten. Ils auraient été très heureux d’être autorisés à payer en
numéraire au taux de cent pour cent. C’est ce que nous faisons aujourd’hui. Ils
peuvent même faire un bénéfice d’un pour cent en se procurant des los-renten
qui sont à 99. Les acquéreurs ne peuvent donc se plaindre de la révolution.
Je
répondrai à l’honorable M. Verdussen qui trouve la loi incomplète que nous ne
devons pas nous occuper de l’éventualité qu’il a citée. S’il arrivait que les
los-renten restassent entre les mains des détenteurs, c’est alors seulement que
la législature devrait prendre leur position en considération.
M. Zoude. - Dès l’instant que le syndicat ou le roi
Guillaume a pu concevoir la pensée inique de spolier les acquéreurs, je vous
demande s’il y aurait eu de sa part moins d’hésitation à spolier les détenteurs
que les acquéreurs. Bénéfice pour bénéfice il aurait préféré ce premier moyen.
Je
lis dans le rapport de M. Fallon :
« En
ce qui touche l’admission de ces certificats en paiement du prix des domaines,
aucun autre engagement n’a été contracté envers eux ; et, sans doute, s’engager
à recevoir ces certificats en paiement du prix des domaines, ce n’était pas
s’engager à n’admettre aucun autre mode de paiement
«
L’engagement de recevoir ces certificats en paiement du prix des domaines
n’était pas d’une autre nature que celui de recevoir dans toutes les autres
opérations que le syndicat jugerait convenable de faire, et par conséquent l’on
n’est pas plus exclusif que l’autre de la faculté d’admettre concurremment en
paiement du prix des domaines tout autre mode de libération. Cette faculté de
faire concourir tout autre mode de paiement qui serait trouvé convenable, est
encore d’ailleurs la conséquence de la réserve formelle que faisait le syndicat
du droit de rembourser en tous temps ces certificats en argent comptant. »
Ainsi
le syndicat avait la faculté d’ordonner un autre moyen de libération. Le
syndicat voulait gagner partie sur les détenteurs, partie sur les acquéreurs.
Je persiste donc à dire que nous sommes dans une position d’oppression. Nous
devons nous libérer à un taux supérieur au pair. La chambre qui s’est montrée juste
envers les détenteurs ne peut se garder de l’être envers les acquéreurs. Elle
ne peut avoir deux poids et deux mesures.
Je
persiste dans mon amendement.
-
L’amendement de M. Zoude est mis aux voix. Il n’est pas adopté.
L’art. 3 est mis aux voix et adopté.
Le
vote définitif de la loi est fixé à lundi.
PROJET DE LOI PORTANT UN CREDIT
SUPPLEMENTAIRE AU BUDGET DU DEPARTEMENT DE L’INTERIEUR POUR L’IMPUTATION DE
CREANCES ARRIEREES
Discussion générale
(Moniteur belge n°327, du 23
novembre 1835) M. le président. - M. le
ministre de l’intérieur demande par le projet de loi primitif un crédit
supplémentaire de 463,627 fr. 28 c.
Il
a présenté un amendement tendant à obtenir une allocation supplémentaire de
13,143 fr. 36 c.
Total,
476,170 fr. 64 c.
La
commission propose d’allouer une somme de 439,820 fr. 64 c.
M. Jadot. - Je n’entends pas contredire la mesure
proposée par M. le ministre de l’intérieur. Je ferai seulement observer que
déjà les dépenses que vous avez votées excèdent le montant de notre budget des
voies et moyens. Je demanderai donc au ministre comment il sera fait face aux
dépenses pour lesquelles il est demandé un crédit supplémentaire.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- J’ai déjà répondu d’avance à cette observation, ce matin même, en déposant la
situation du trésor à l’époque du 1er novembre courant. Il résulte de cette
situation qu’une somme de près de 7 millions d’excédant sur les voies et moyens
est maintenant à la disposition du gouvernement. Cet excédant donne le moyen de
faire face aux dépenses montant à 463,000 fr., pour lesquelles un crédit vous
est demandé. Ces dépenses d’ailleurs ne sont pas nouvelles ; ce sont toutes
dépenses arriérées, et la plus grande partie des sommes demandées est même déjà
en quelque sorte engagée.
Les
bons du trésor sont à la vérité comptés dans la supputation de l’excédant
résultant de la situation du trésor ; mais il n’en est pas moins vrai qu’une
somme de près de 7 millions d’excédant sur les voies et moyens est à la
disposition du gouvernement. Ainsi il n’y a aucune inquiétude à avoir sur les
moyens d’appliquer la somme de 465,000 fr. dont il s’agit.
M. Rogier. - Je demanderai à M. le ministre
de l’intérieur si le budget de son département n’offre pas, comme je le crois,
des excédants sur lesquels on pourrait imputer les dépenses qui font l’objet du
crédit demandé. Ce serait alors un simple transfert comme la chambre en a fait
antérieurement, et cela ferait droit à l’observation de l’honorable M. Jadot.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Il a été reconnu que le moyen, qui vient d’être indiqué par l’honorable
préopinant, d’appliquer des dépenses sur des excédants, était contraire aux
bonnes règles de la comptabilité. La cour des comptes et le département des
finances ont reconnu la nécessité de clore les exercices, de stipuler que les
excédants seraient reportés à un exercice suivant et d’appliquer à un crédit à
ouvrir les dépenses relatives à un exercice clos.
Ainsi
que l’a dit l’honorable M. Rogier, cela revient absolument au même ; quant à la
dépense en elle-même, c’est tout simplement un moyen d’ordre différent.
D’honorables membres se rappelleront que plus d’une fois dans cette enceinte on
a émis le vœu de voir cesser les transferts, moyen irrégulier d’opérer en
comptabilité. Je crois donc qu’il vaut mieux ouvrir un crédit pour les dépenses
du ministère de l’intérieur. Quant aux moyens de faire face à ces dépenses, je
les ai déjà indiqués.
M. Jadot. - Je reconnais que la marche
indiquée par M. le ministre des finances est juste, et qu’il ne faut pas avoir
recours aux transferts, moyen de ne jamais s’y reconnaître en comptabilité.
Mais nous ne savons pas s’il y a une somme disponible, à moins que cela ne
résulte de la loi des comptes. On dit que sept millions sont disponibles, mais
il n’y a pas de compte arrêté ; et jusque-là nous ne savons rien. Mon
observation tend à faire sentir la nécessite de liquider les comptes antérieurs
; car nous n’avons rien tant que nous n’avons pas compté.
M. Fallon. - Je demanderai à M. le ministre des
finances si, cette année, nous trouverons dans le budget des voies et moyens un
article qui donne le chiffre de l’excédant d’un exercice précédent. Jusqu’à
présent on n’a pas reproduit l’excédant des exercices antérieurs ; il faut
cependant finir par faire une loi des comptes car tant que nous ne l’aurons
pas, il n’y a pas moyen de marcher régulièrement.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- L’observation des honorables MM. Jadot et Fallon tend à faire sentir la
nécessité de voter une bonne fois la loi des comptes. J’appelle aussi de tous
mes vœux le vote de cette loi. Mais il est facile d’expliquer sommairement
comment on n’a pas pu présenté encore la loi sur les comptes de 1830 et de
1831. Les finances n’étaient pas alors organisées, la cour des comptes
n’existait pas. Ces circonstances indiquent assez la cause du retard.
Ainsi
que l’a fait observer l’honorable M. Fallon, il est à désirer que le budget des
recettes puisse présenter un excédant sur les exercices antérieurs ; mais il
faut que préalablement ces excédants aient été établis dans la loi des comptes.
On doit, dit-on, ignorer quelle est la situation du
trésor, jusqu’à ce que la cour des comptes ait présenté ses observations sur
l’exactitude de celle situation. Ceci est exagéré, car on admettra certainement
que jusqu’à preuve contraire administrée par la cour des comptes, il y a indice
et probabilité que cette situation est exacte ; il y a présomption, comme je
l’ai dit, qu’il y a un excédant de 6 à 7 millions.
M. Jadot. - Je ne conteste pas l’exactitude de la situation
présentée par M. le ministre des finances. Je sais qu’elle présente exactement
tout ce qui a été alloué, tout ce qui a été reçu, tout ce qui a été dépensé.
Mais il s’agit de savoir si toutes les dépenses qui ont été faites, les
ministres ont eu le droit de les faire ; or, cela ne peut résulter que de
l’examen de la cour des comptes.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Cela est vrai.
M. Verdussen. - L’observation de
l’honorable M. Rogier est trop rationnelle pour que je ne la reproduise pas, en
y donnant quelques développements. On doit préférer le mode des transferts à
celui des crédits supplémentaires ; car il est essentiel que la nation connaisse
l’état de ses dettes et les balance avec la somme des recettes prévues ; et si
vous votez des budgets supplémentaires qui sont autant de petits budgets
ajoutés au budget général sans rien diminuer sur d’autres articles du budget
des dépenses, il en résulte que le budget des voies et moyens ne sera plus en
rapport avec le total des dépenses portées au budget.
Si,
au contraire, vous obtenez par un transfert la somme dont vous avez besoin, il
en résulte que vous jetez un grand jour sur la discussion du budget. S’il y a
nécessité de majorer une somme de la dépense, on reconnaît en même temps la
nécessité d’en diminuer une autre, puisqu’on reconnaît que la somme pétitionnée
était trop forte. Par le système des transferts au contraire, on ne connaît que
la somme sur laquelle il y a déficit.
En principe, quand on demande des crédits supplémentaires il faudrait
aussi demander des voies et moyens, sans cela il y aurait disproportion entre
les revenus et les dépenses : c’est une chose que j’ai déjà signalée dans une
autre circonstance ; mon observation vient d’autant plus à propos ici qu’on
vient demander des crédits supplémentaires pour des dépenses qu’on pourrait
couvrir par des transferts.
M. Jadot. - Je pense que la chambre devrait toujours
refuser les demandes de transfert, car avec ce système de transfert on ne peut
jamais connaître la véritable situation des choses. Quand on saura que vous
êtes décidés à ne plus accorder de transferts, les ministres ne viendront plus
vous demander au budget de somme supérieure à leurs besoins, certains qu’ils
seront de ne pas obtenir le transfert des excédants.
Jusqu’à
présent on avait toujours demandé pour certaines dépenses 100 ou 200 mille
francs de plus qu’on n’avait réellement besoin, et quand la dépense était faite
et se trouvait de 100 ou 200 mille francs au-dessous du crédit, on venait dire
: Je suis parvenu à faire une économie de cette somme, et on en demandait
l’application à une autre dépense. Alors la chambre considérant que le ministre
avait fait une économie sur la somme qui lui avait été allouée, se décidait à
accorder l’excédant pour l’objet demandé, objet qu’on n’aurait pas osé porter
au budget et qui aurait été rejeté, si on l’y avait proposé.
M. Rogier. - Je ne sais si c’est le moment
d’ouvrir une discussion générale sur la question des transferts. Je dois
cependant un mot de réponse à l’honorable préopinant.
Rien
ne me paraît plus simple que de couvrir des dépenses survenues dans le courant
d’un exercice avec les excédants des exercices précédents.
C’est
la marche qui a été suivie jusqu’à présent, et quand les chambres l’ont
approuvée, la cour des comptes n’a rien à voir. S’il convient à la chambre
d’imputer des dépenses imprévues sur des excédants que présentent les exercices
antérieurs, la cour des comptes n’a rien à dire, elle doit se borner à veiller
à ce que l’imputation soit faite comme la législature l’a ordonnée.
Cette
année, si nous arrêtons les dépenses de 1836 avant les voies et moyens et que vous
les portiez à 50 millions de francs, par exemple, on portera le budget des
voies et moyens à la même somme, pour qu’il y ait balance entre les deux
budgets.
Arrive,
en 1836, la nécessité d’une dépense supplémentaire d’un million, je suppose :
il est indispensable que le ministre vienne demander un crédit supplémentaire
d’un million. Le budget des dépenses étant arrêté à 80 millions, sur qui
imputerez-vous ce crédit ? Il faudra, dans votre système, créer des voies et
moyens jusqu’à concurrence du million de crédit que vous voulez ouvrir. Cette
marche pourra présenter des inconvénients et des irrégularités, tandis que je
n’en vois pas à imputer un excédant de dépense d’un exercice sur un excédant de
crédit du même exercice on même d’un exercice précèdent et c’est un moyen
d’engager un ministre à faire des économies.
Si vous déclarez qu’il sera interdit d’imputer des dépenses
extraordinaires de 1836 sur des excédants de crédit restés disponibles en 1834
et 1835, qu’arrivera-t-il ? C’est que sachant que vous n’accorderez pas de
transfert, les ministres ne chercheront pas à faire des économies et
dépenseront autant qu’ils pourront, certains qu’ils seront qu’une fois l’année
écoulée, ils ne pourront plus rien dépenser sur cet exercice.
M. Dubus. - Les ministres ne gagnent rien à
dépenser davantage.
M. Rogier. - Sans doute les ministres n’y gagnent
rien. Mais je voulais faire observer que M. Jadot s’est trompé quand il a dit
qu’avec le système des transferts, on apporterait moins d’économie dans les
dépenses ; c’est le contraire qui arrivera.
Quant
à moi, je n’insiste pas pour que le ministre demande l’imputation des crédits
dont il s’agit sur les excédants des exercices antérieurs. La question peut
présenter des doutes. Mais je pense qu’elle mériterait d’être mûrement examinée
et débattue, et qu’avant de condamner le système des transferts on devrait en
faire l’objet d’une discussion approfondie.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Je vais tâcher de démontrer qu’il est impossible, dans le cas présent,
d’admettre des transports, sans bouleverser toute la comptabilité déjà établie.
Veuillez
remarquer que les crédits demandés concernent l’exercice 1832, et notez que les
comptes de 1831, arrêtés par la cour des comptes, sont entre vos mains. Essayez
maintenant d’imputer la somme demandée sur un article quelconque du budget de
1832, où il y aurait excédant ; il faudrait renvoyer à la cour des comptes la
loi de transfert avec les comptes de 1832, et lui demander de changer tout son
travail, ainsi que celui du département des finances. Vous voyez qu’il ne peut
être question d’opérer un transfert semblable.
Voulez-vous
prendre l’exercice 1833 dont on ne vous a pas encore remis les comptes ? Là,
les mêmes inconvénients se présentent. Ils ne sont pas tout à fait aussi
graves, quoique à peu prés les mêmes. Le compte de 1833 est déjà établi d’une
manière provisoire. Si vous admettiez un transfert sur cet exercice, toute
cette comptabilité, qui n’est pas si facile à établir qu’on pourrait le croire,
devrait être changée.
L’honorable
M. Jadot a produit contre les transferts des observations qui sont d’une autre
nature. Il n’en voudrait pas pour obliger les ministres à ne demander que ce
qui leur est strictement nécessaire, en leur ôtant la faculté de venir dire,
après que les dépenses ont été effectuées : Vous m’avez alloué, par exemple, 12
millions, je n’ai dépensé que 11 millions 500 mille francs ; je vous demande
ces 500 mille fr. pour couvrir une autre dépense pour laquelle vous ne m’avez
pas donné assez ou pour laquelle rien n’a été alloué.
Je
pense, messieurs, qu’en dernière analyse, la chambre est toujours juge de ces
questions, et que, soit qu’on demande un transfert ou un crédit nouveau, la
chose reste la même.
M.
Rogier pense que les ministres sont plus intéressés à faire des économies avec
le système des transferts. Je ne suis pas de cet avis. Les ministres doivent
chercher à faire le plus d’économies possible, sans l’arrière-pensée qu’ils
pourront venir demander l’application de ces économies à telle ou telle
dépense.
M. Jadot. - Je demande la parole pour faire
observer que ce n’est pas seulement par le motif que j’ai indiqué que je
combats le système des transferts ; j’y ai été déterminé aussi par les motifs
énoncés par M. le ministre des finances, que les transferts jetaient la
confusion dans la comptabilité. C’est pour venir à l’appui de cette
considération que j’ai présenté mon observation.
M. le président. - Si personne ne demande plus la
parole, je déclare la discussion générale fermée.
Discussion des articles
M. le président. - Nous passons à la discussion du
tableau
Chapitre XIX. - Dépenses de 1835 et années
antérieures, restant à liquider.
Article premier
Littera A
« A.
Paiement de construction du canal de Gand à Terneuzen : fr. 61,899
-
Adopté.
« Traitement
du ministre du culte anglican à Spa, pour l’année 1832 : fr. 1,200. »
M. le président. - La commission rejette ce
littera.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - J’ai remarqué que la commission avait
retranché ce littera parce qu’en 1832 le ministre anglican n’avait pas reçu la
commission spéciale qu’il est d’usage de lui donner annuellement pour remplir
ses fonctions à Spa, pendant le temps des eaux. Ce refus serait une injustice à
l’égard de la veuve de ce pasteur.
En
effet, il y avait un arrêté en vertu duquel le ministre était autorisé à
déléguer un pasteur pour faire le service anglican à Spa. En 1831, il n’y eut
pas de service à faire, parce qu’il n’y avait pas d’Anglais. En 1832, les
Anglais revinrent à Spa et le ministre anglican revint à son poste, il notifia
son arrivée au gouverneur de la province. On ne connaissait pas cette
disposition d’après laquelle il était nécessaire de renouveler la commission du
ministre, on se borna à aviser le gouverneur qu’on trouverait moyen de pourvoir
au traitement du ministre anglican, on croyait, comme cela s’était fait
jusque-là, le prélever sur le produit des jeux. Mais il s’est élevé sur ce
produit des jeux un procès qui n’est pas encore décidé.
Le
gouvernement a pensé qu’ou ne pouvait pas laisser cette veuve attendre
indéfiniment, que ce procès soit terminé pour toucher la somme due à son mari,
et qu’il était plus régulier de la porter au budget. D’ailleurs, cette sera
amplement couverte par le bénéfice fait sur les jeux.
M. Lejeune, rapporteur.
- La commission a examiné attentivement la question qui nous occupe, et elle
n’a pas cru devoir admettre le crédit demandé, parce que, dans son opinion, le
ministre anglican n’avait pas le droit de réclamer la somme qui en fait
l’objet, attendu que la délégation finissant chaque année, comme il en est
convenu lui-même, le ministre du cuite a réclamé en temps utile le
renouvellement de sa délégation ; et sa demande étant restée sans réponse, la
délégation n’a pas été renouvelée.
En
cela, je pense que le ministre a bien fait, parce que je doute qu’il eût le
droit d’accorder une délégation entraînant pour l’Etat une dépense non prévue
par le budget. C’est par ce motif que la commission n’a pas alloué le crédit
demandé.
Mais
il s’agit de voir si le ministre anglican a réellement rempli ses fonctions de
bonne foi, et si le service anglican est utile à Spa. Or, il est clairement
établi que le service a eu lieu en 1832, année pour laquelle sont réclamés les
1,200 fr. Quant à l’utilité, je dirai que depuis la mort du pasteur anglican,
pour la veuve duquel on réclame une indemnité, beaucoup de requêtes ont été
faites pour solliciter son remplacement, J’en conclus qu’il n’était pas
inutile. Par cette considération, je déclare que, pour ce qui me regarde, je ne
m’opposerai pas à ce que le crédit soit alloué.
M. Demonceau. - Je demande la parole
pour donner quelques éclaircissements.
Depuis
quelque temps, (erratum inséré au
Moniteur belge n°329, du 25 novembre 1835 :) la société de la redoute
de Spa donnait des jeux pendant la saison des eaux. Comme ce sont
principalement des Anglais qui viennent habiter Spa et que leur séjour fait la
principale richesse de cette ville, on avait cru qu’il était nécessaire qu’un
ministre du culte anglican eût sa résidence à Spa, pour la saison des eaux. Ce
ministre du culte anglican, sous le gouvernement précédent, était payé sur la
part qui revenait au gouvernement du bénéfice des jeux. Je n’ai pas besoin de
vous dire comment se partageait le produit des jeux. Après avoir prélevé tous
les frais, le bénéfice net était partagé par moitié entre le gouvernement (erratum inséré au Moniteur belge n°329, du
25 novembre 1835 :) et la société des actionnaires de la redoute.
C’était ainsi que cela se passait sous l’ancien
gouvernement. Mais depuis que nous sommes régis par une constitution qui ne
permet pas de payer des appointements non portés au budget, le gouvernement a
cru devoir porter au budget de 1833 une somme pour l’exercice du culte anglican
à Spa, C’était de toute nécessité, car si on ne le faisait pas, la ville serait
déserte.
Je
crois qu’il y aurait injustice à ne pas allouer la somme demandée pour 1832,
parce qu’en réalité le pasteur y a rempli ses fonctions.
M. Jadot. - Il résulte de ce que viennent de dire
le préopinant et le ministre de l’intérieur, que les recettes provenant des
jeux sur lesquelles on prenait le traitement du pasteur, étaient supérieures à
la dépense ; cependant, je n’ai encore rien vu figurer dans les voies et moyens
provenant de ces jeux. Je pense que cela figurera an prochain budget, et qu’on
y fera figurer aussi les arriérés des années antérieures.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Jusqu’à présent il n’y a pas eu de recettes effectuées, parce qu’il y a
litige. Mais on pourra faire figurer ce produit au prochain budget des voies et
moyens ; j’espère qu’alors la rentrée aura eu lieu.
-
Le littera B est mis aux voix et adopté.
Litteras C à G
« C.
Récompense accordée pour 1832 à l’occasion du choléra : fr. 100. »
-
Adopté.
« D.
Subside accordé à la commission des hospices de Louvain, pour l’aider à payer
les dépenses faites à l’occasion du choléra en 1832 : fr. 1,500. »
-
Adopté.
« E.
Pension des Indes, des deux enfant mineurs de la dame de Jean, veuve Le Moine,
pendant l’année 1832 : fr. 253 96 c. »
-
Adopté.
« F.
Arriéré de la pension du sieur Raoux, ancien
conseiller d’Etat (1832) : fr. 1,500. »
-
Adopté.
« G.
Réparations d’armes de la garde civique et frais près les conseils de
discipline, en 1832 : fr. 5,678 51 c. »
-
Adopté.
« H.
Vacations aux conseils de milice, en 1832 : fr. 1,102 43 c. »
M. Demonceau. - Depuis longtemps la chambre est
saisie d’une réclamation qui lui fut adressée par un des membres du conseil de
milice, celui qui présida le conseil à Verviers en 1832, et d’une autre
réclamation faite par un autre membre, M. David, bourgmestre de Verviers. Le
gouvernement a reconnu que l’indemnité était due et que c’était faute de fonds
qu’elle n’était pas payée. Je demanderai à M. le ministre si l’indemnité
réclamée par ces deux personnes est comprise dans la somme qu’il demande.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ne me rappelle pas les personnes auxquelles des vacations sont dues, mais
je pense que le crédit demandé suffit pour les payer toutes.
-
Le littera H est adopté.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
J’avais demandé qu’on ajoutât au littera B de l’art. 1er qu’on vient de voter
une somme de 132-20 pour bourses des enfants du pasteur protestant, à Hodimont, pour l’année 1832. Cette somme n’a pas été payée
sur le budget de 1832, parce que l’instruction de l’affaire qui en fait l’objet
n’était pas terminée lorsque l’exercice
Il
n’a été fait sur cette réclamation qu’une seule observation sur la question de
savoir si la pension devait être payée jusqu’à la vingt-deuxième année ou y
compris cette vingt-deuxième année. J’ai vérifié les arrêtés, et je me suis
assuré que c’était y compris la vingt-deuxième année.
Je
propose de faire de ce crédit un nouveau littera.
M. Lejeune, rapporteur. - D’après la déclaration
de M. le ministre, je n’ai qu’à proposer l’adoption du crédit qu’il demande.
-
La somme de 132-20 pour les enfants du pasteur anglican à Hodimont
est allouée sous le littera J.
Article 2
Litteras A et B
«
A. Solde des frais de transport et du placement de l’équatorial : fr.
1,200. »
-
Adopté.
« B.
Remboursement de la retenue opérée sur la pension de la dame veuve Engelen, pensionnaire des Indes : fr. 2,885-49. »
-
Adopté.
«
C. Loyer du bâtiment servant à l’exercice du culte protestant à Spa : fr.
1,800. »
M. Demonceau. - Cette somme est demandée pour
trois années de loyer.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Les explications sont consignées dans l’exposé des motifs du projet de loi.
« Par
acte authentique en date du 2 février 1828, le sieur Damseau,
propriétaire demeurant à Spa, a fait bail et donné à louer pour le terme de six
années, et moyennant une somme annuelle de 600 francs, au gouvernement
précédent, un bâtiment destiné à servir à l’exercice du culte protestant à Spa.
Ce bail est expiré le 1er mai 1834, mais les trois dernières années sont encore
dues au propriétaire. Ses droits reposant sur un acte inattaquable, ne
paraissent pas susceptibles de contestation. »
-
Le littera C est adopté.
« D.
Frais relatifs au musée des arts et métiers : fr. 7,000. »
M. Dumortier. - Je demanderai des éclaircissements
sur cet objet. Ce musée n’a aucune espèce d’intérêt, c’est un établissement de
jouets. La science et l’industrie n’en retirent rien.
On
est fort sévère et fort avare pour des établissements utiles au pays ; pourquoi
être prodigue pour un établissement qui ne contient que des hochets ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- L’honorable préopinant est dans l’erreur s’il croit que l’établissement est
sans utilité ; je sais que l’on va fréquemment consulter les modèles qui sont
au musée des arts et métiers. Cette année il a fallu faire des dépenses plus
considérables que les autres années, parce qu’il y a eu des frais de
translation et de réparations à exécuter pour transformer un local qui avait
servi aux cholériques au musée. »
-
Le chiffre 7,000 fr. pour les arts et métiers, mis aux voix, est adopté.
Litteras E à H
« E.
Dépenses arriérées concernant le conservatoire de musique à Bruxelles : fr.
6,000. »
- La commission accorde ce chiffre. La chambre
adopte.
«
F. Solde et frais d’acquisition, transport et placement d’un cercle mural : fr.
2,600. »
-
Adopté sans discussion.
« G.
Dépenses relatives à l’agriculture : fr. 6,000. »
-
Adopté.
« H.
Complément de pension pour le sieur V. R., ancien commissaire de district : fr.
500. »
-
Adopté.
« I.
Solde des frais de routes et de séjour de l’archiviste général du royaume : fr.
177 80 c. »
M. Desmet. Mais cet archiviste n’a-t-il pas un
traitement de 6,000 francs et un logement ? pourquoi
lui donner encore 177 fr. ?
Il
inspecte les archives des provinces, et cela m’étonne qu’il soit chargé d’une
telle besogne : nos archives sont en flamand ou en latin, et, si je suis bien
informé, il ne sait ni l’une ni l’autre langue. (On rit.)
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Le chef archiviste n’a pas de traitement fixe ; seulement il a des frais de
route et de séjour, comme tous les autres fonctionnaires, quand il se déplace.
M. Jadot. - Indépendamment du traitement dont il
jouit, il trafique encore sur les documents commis à sa garde. Le gouvernement
devrait empêcher de trafiquer sur les archives appartenant à l’Etat.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- L’archiviste ne trafique nullement. Il s’est engagé à livrer au public par la
voie de l’impression plusieurs documents inédits ; mais comme les sommes qu’on
lui alloue pour cet objet sont insuffisantes pour couvrir les frais, on lui
accorde un certain nombre d’exemplaires qu’il peut livrer dans le commerce ;
mais tous cela se fait par suite d’un contrat.
-
La somme de 177 fr. est votée.
« J.
Supplément de crédit pour secourir les légionnaires nécessiteux : fr.
15,750. »
M. le président. - La commission n’alloue pas ce
chiffre.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je pense que le crédit doit être accordé, car tous les légionnaires du
royaume doivent se trouver dans la même position. La chambre, en votant le
budget, a entendu venir à leur secours ; elle a admis qu’il serait accordé à
chacun d’eux 250 fr. C’est sur la proposition du ministre que ce chiffre de
M. Gendebien. - Je demande la parole.
M. Lebeau. - Tout le monde est d’accord.
M. Gendebien. - Vous ne savez pas de quoi je
vais parler.
Messieurs,
je veux appuyer ce qu’a dit M. le ministre de l’intérieur, et vous demander le
retranchement d’un mot dans le libellé du paragraphe, du mot
« nécessiteux. »
Comment
un pays qui se dit libéral peut-il laisser dans le besoin des légionnaires ? Ce
mot est moins injurieux pour les légionnaires eux-mêmes que pour
M. le président. - Ce mot n’est pas dans
la loi, il est dans le tableau.
M. Gendebien. - Mais le tableau ne fait-il pas
partie de la loi ?
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Oui, car il sera imprimé avec la loi.
M. Dubus. - J’ai un renseignement à
demander. Il ne s’agit ici que d’un supplément de crédit ; je voudrais savoir
dans quels termes le crédit a été voté dans le budget, car le supplément doit
être conçu dans les mêmes termes.
Si
l’expression contre laquelle on réclame est consacrée par la loi de finances,
je ne vois aucun inconvénient à ce qu’elle figure dans la loi nouvelle.
M. Gendebien. -
Il me semble que j’ai donné des motifs suffisants pour ordonner la suppression
d’un mot au moins inconvenant. Ce mot, comme je l’ai dit, est plus injurieux à
M. Fallon. - Je crois que nous ne pouvons pas
retrancher un mot qui se trouve dans le budget, la chambre a décidé dans la loi
du budget qu’il ne serait accordé de secours qu’aux légionnaires nécessiteux ;
elle n’a pas voulu que la munificence nationale allât au-delà. Je crois que
nous devons nous conformer à ce qui a été décidé dans le budget.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je pense que le mot nécessiteux est inutile. En supprimant ce mot, alors même
qu’il est dans le budget, on ne changera rien à l’affectation de la somme. Car
par ce crédit supplémentaire vous ne faites qu’ajouter un supplément à un
crédit dont vous avez dans le budget réglé la destination.
-
La suppression du mot « nécessiteux » proposée par M. Gendebien est
mise aux voix et adoptée.
Le
litt. J de l’art. 2 est adopté en ces termes : « Supplément de crédit pour
secourir les légionnaires, 13,250 fr. »
Article 3
Littera A
« Litt.
A. Frais d’équipements de la garde civique : fr. 313,500. »
-
Adopté.
«
Litt. B. Acquisition de l’amphithéâtre et des estrades élevés en 1834 dans le
local des Augustins : fr. 13,380. »
M. Dubus. - Il
s’agit ici d’une dépense à faire. Je ne sais pas par quels motifs d’urgence
elle est comprise dans la loi qui nous occupe ; car puisque nous allons nous
occuper du budget de l’intérieur, on aurait pu y comprendre cet article de
dépense, qui ainsi eût été examiné avec maturité.
Le
résultat du vote sur la somme demandée serait de consacrer à perpétuité un
édifice de cette ville à des concerts-monstres ou autres cérémonies de cette
nature. Cela peut présenter une utilité pour la ville de Bruxelles. Mais il me
semble que vous ne devez voter cette dépense qu’après avoir examiné s’il y a
nécessité de la faire, ou si elle peut être utile à l’Etat.
Une
autre observation, c’est que l’édifice dont il s’agit est une église qui doit
être rendue à son ancienne destination, dès que cela peut être nécessaire pour
l’exercice du culte catholique. Or, il est incontestable que le nombre des
églises de Bruxelles n’est pas en rapport avec sa population. Car cette ville
qui a intra muros une population de plus de cent mille habitants, n’a pas plus
d’églises que telle ville de 50 mille âmes que je pourrais citer.
Il
m’a été dit que cette église avait été réclamée par le culte. Je crois que s’il
en est ainsi, s’il y a eu des réclamations à cet égard, cette église doit être
rendue à l’exercice du culte catholique, et dès lors nous ne devons pas la
consacrer à perpétuité à une autre destination. Les lois sont formelles sur ce
point.
M. le ministre de l'intérieur (M.
de Theux). - J’aurai l’honneur de donner des explications à cet égard.
L’édifice dont il s’agit a été consacré, pendant quelque temps, à l’exercice du
culte catholique ; il a servi ensuite au culte protestant. Depuis 1830 il
n’avait plus de destination ; on a trouvé qu’il pouvait, dans certaines
circonstances, être utile pour des réunions publiques. Ainsi, à différentes reprises
on y a fait une distribution de prix.
Il
est vrai de dire que cette église fut réclamée, il y a deux ans, pour
l’exercice du culte catholique ; on consulta le conseil de régence sur le
besoin qu’il pouvait y avoir d’affecter à cet édifice au culte. Le conseil de
régence fut d’avis qu’il n’était pas actuellement nécessaire de le rendre à
cette destination, attendu qu’il était placé à côté d’une autre église,
considérée comme suffisante au moins pour le moment.
Mais
de ce qu’on ferait aujourd’hui l’acquisition de cet édifice, il ne résulte pas
que jamais il ne serait restitué à l’exercice du culte catholique. Rien
n’empêcherait qu’il en fût ainsi, si le besoin s’en faisait sentir.
L’honorable
préopinant a demandé pourquoi l’on n’avait pas attendu la discussion du budget
de l’intérieur pour soumettre cette dépense à la chambre. Je répondrai que
c’est parce que le propriétaire a réclamé une prompte décision de la part du
gouvernement ; c’est là ce qui m’a décidé à comprendre cette proposition de dépense
dans la loi qui vous est soumise. Au surplus cette proposition a été examinée
par une commission. Ce qui suffit aux termes du règlement.
M. Desmet. - J’appuie les observations
de l’honorable M. Dubus.
M.
le ministre de l’intérieur dit que l’église des Augustins pourra être rendue au
culte catholique. Cependant on a abandonné les stalles de cette église à celle
de Molenbeek ; ce qui ne prouve pas qu’on veuille la
rendre à l’exercice du culte.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Ceci est facile à expliquer, On n’a abandonné ce mobilier à l’église de Molenbeek qu’à la condition qu’il serait restitué à celle
des Augustins si ultérieurement cet édifice était rendu à l’exercice du culte
catholique.
M. Dubus. - Il
est manifeste que la véritable question à décider n’a pas été examinée par la
commission. Pouvons-nous décider une aussi grave question sans qu’elle ait été
préalablement examinée comme elle aurait dû l’être ? Car il est certain que ni
le rapport de la commission, ni l’exposé des motifs du ministre, n’ont soulevé
la question.
Il
résulte des explications de M. le ministre de l’intérieur que j’étais bien
informé, et qu’il y a deux ans cette église a été réclamée pour le culte
catholique. C’est là un point qui mérite d’être examiné par la commission ; car
en votant la somme de 13,380 fr., demandée pour l’appropriation de cette église
à des usages profanes, vous tranchez la question, vous enlevez cette église à
l’exercice du culte catholique. Le roi Guillaume l’avait enlevée à cette
destination pour la consacrer à l’exercice du culte protestant. Aujourd’hui on
l’élève au culte pour célébrer ce qu’on appelle des fêtes nationales.
Il
résulte des lois en vigueur que les anciennes églises doivent demeurer
consacrées un culte catholique, jusqu’à la limite des besoins. Ainsi on ne peut
refuser à l’exercice du culte catholique l’église des Augustins, réclamée pour
cet usage.
Je
demande donc que l’article soit renvoyé à la commission qui examinera la
question et présentera des conclusions. S’il y a des motifs d’urgence, on fera
une loi spéciale pour cet article-là.
M. Lejeune, rapporteur. - Je désire
autant que l’honorable préopinant que l’église des Augustins soit rendue à
l’exercice du culte. Mais je crois que le renvoi à la commission, qu’il a
proposé, sera jugé inutile d’après les explications que je suis à même de lui
donner.
La
commission a proposé l’allocation du crédit demandé pour acquisition de
l’amphithéâtre et des estrades élevés en 1834 dans le local des Augustins,
parce qu’il s’agit d’une dépense qu’on ne peut se refuser à admettre
puisqu’elle est déjà faite.
Si
vous refusez le crédit demandé, le gouvernement sera obligé de demander un
autre crédit pour frais de construction des estrades et pour le loyer du bois.
Tout ce qu’il y a de plus dans la somme que la commission vous propose
d’admettre, c’est le prix du bois. De sorte que si ce chiffre était admis par
la chambre et que dans quelque temps cette église pût être rendue à l’exercice
du culte, le gouvernement vendrait le bois, et la différence serait couverte
par le prix de la vente.
M. Dubus. -
L’honorable rapporteur n’a pas compris le but du renvoi à la commission que
j’ai demandé ; et les explications qu’il a données ne sont nullement
satisfaisantes. Je crois qu’il est dans l’erreur lorsqu’il pense que si le
gouvernement n’achetait pas le bois, il devrait payer une indemnité à l’entrepreneur
pour l’appropriation du local. Je pense que l’appropriation du local a eu lieu
aux frais d’une société particulière, qui a indemnisé l’entrepreneur.
Maintenant l’entrepreneur veut disposer du bois qui doit lui revenir. Mais on
demande auparavant que le gouvernement ait donné une destination fixe à
l’édifice. C’est une question de nature à être examinée. Il est possible que la
chambre alloue le crédit demandé ; mais elle ne doit l’allouer qu’après examen.
Or, la question de la destination de l’édifice n’a pas été examinée par la
commission, qui ignorait qu’il eût été réclamé pour le culte. Ainsi les motifs
du renvoi à la commission subsistent, malgré les observations de l’honorable
rapporteur.
M. le ministre
de l'intérieur (M. de Theux). - J’ai déjà en l’honneur de donner des
explications sur la demande de restitution du local des Augustins à l’exercice
du culte catholique. Cette demande a eu lieu ; mais ensuite des observations du
conseil de régence et, je crois, de la députation des états, il fut décidé que
la nécessité de cette restitution n’était pas démontrée. De telle manière qu’on
a cru pouvoir se servir de cet édifice dans diverses circonstances solennelles,
notamment pour des distributions de prix.
Ce
local a également été réclamé pour qu’on pût y instituer une école dominicale.
Mais cette destination est compatible avec celle qu’il a maintenant. Ainsi,
rien n’empêche de voter le crédit demandé.
M. Lejeune, rapporteur. - Je me serai mal
expliqué, ou l’honorable M. Dubus ne m’aura pas bien compris. J’ai voulu faire
entendre qu’il ne serait rien préjugé par le vote de la chambre sur la
destination de l’église des Augustins. Les estrades élevées dans cette église
l’ont été pour les fêtes de septembre 1834. On a fait alors un accord avec un
charpentier pour la construction des estrades et le loyer du bois. Voilà deux
objets à payer. Maintenant le crédit demandé est pour ces deux objets, plus le
prix de la vente du bois. J’ai seulement fait observer que le gouvernement
pouvait acquérir les estrades ; les laisser pendant 2 ou 3 mois et les détruire
sans rien perdre, vous ne préjugez rien sur la destination à donner à l’église
des Augustins, puisqu’on pourra utiliser le bois acheté ou le vendre.
M. Gendebien. -
D’honorables membres désirent que l’on examine, avant de voter la somme
demandée, la question de la destination à donner au temple des Augustins.
Pourquoi donc alors cette obstination du ministre pour enlever son crédit,
alors surtout que, dans huit ou dix jours, nous devons nous occuper du budget
de l’intérieur dans lequel il pourrait très bien comprendre cette dépense ?
Pour moi, je pense que nous devons ajourner cette discussion au vote du budget
de l’intérieur. J’ai cependant un mot à dire au sujet du mobilier cédé à
l’église de Molenbeek. M. le ministre a dit qu’il
avait été cédé à condition de rétrocession, dans le cas où le temple des
Augustins serait rendu à sa destination première. Mais songez que ce mobilier
est un vieux bois orné de moulures fragiles. Je vous garantis qu’au deuxième
déplacement il n’en restera plus rien. Je prévois que si l’on rend le local des
Augustins à l’exercice du culte catholique, la ville ou les paroissiens de
cette nouvelle paroisse seront condamnés à faire de nouveaux fonds pour
remplacer le mobilier en déconfiture. On ne déplace pas un orgue sans de
grandes dépenses. Je suis convaincu que si le mobilier doit être ainsi déplacé,
ces déplacements coûteront autant qu’aurait coûté un mobilier nouveau.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Evidemment, si on avait prévu que l’on dût restituer immédiatement au culte
le local des Augustins, on n’aurait pas cédé le mobilier de cette église à
celle de Molenbeek ; on l’a cédé, parce que l’on a
pensé qu’il n’y avait pas nécessité à cette restitution immédiate.
Quant
au déplacement du mobilier, je pense qu’il a pu se faire sans dommages et sans
de grands frais.
A
l’égard de l’ajournement demandé par l’honorable préopinant, je déclare ne pas
m’y opposer. Mais je demande que la section centrale se considère comme saisie
de ma demande. (Adhésion.)
J’avais
demandé ce crédit, il y a quatre mois. Alors il y avait plus de motifs pour ne
pas attendre la discussion du budget de mon département. Mais aujourd’hui que
cette discussion est prochaine, je n’ai pas de motifs pour m’opposer à
l’ajournement demandé.
-
L’ajournement proposé par M. Gendebien, auquel consent M. le ministre de
l’intérieur et auquel se rallie M. Dubus, est adopté par la chambre.
« C.
Solde des constructions faites en 1834, sur l’emplacement de l’ancien hôtel du
ministère de la justice : fr. 13,011 16 c. »
M. Dumortier. - Dans ma carrière parlementaire,
j’ai souvent eu l’occasion d’attaquer le ministère ; mais j’ai toujours pensé
que quand un ministère était tombé, il était plus loyal de ne pas s’occuper de
lui. Toutefois il s’agit aujourd’hui d’une question tellement grave que,
quoiqu’il m’en coûte de parler, je ne crois pas pouvoir garder le silence.
Lors
de la discussion du budget de
Mais
ce fut tout le contraire. M. le ministre de l’intérieur d’alors se décida à
construire un palais qu’il destinait à la célébration des fêtes de septembre.
Mais remarquez que dès lors il a violé les articles 115 et 116 de la
constitution ; en effet l’art. 116 porte : « Chaque année, les chambres
arrêtent la loi des comptes et votent le budget. Toutes les recettes et
dépenses de l’Etat doivent être portées au budget et dans les comptes. »
Or ici le ministre a ordonnancé une dépense qui ne se trouvait pas au budget,
puisqu’elle avait été rejetée par la législature ; il a donc évidemment violé
l’art. 115 de la constitution.
Lorsque
M. le ministre de l’intérieur actuel arriva aux affaires, il eut la sagesse de
faire stater ces travaux entrepris contrairement à la constitution. On envoya à
la cour des comptes une demande de paiement ; la cour des comptes refusa
positivement son visa ; elle déclara qu’elle était investie par l’art. 116 de
la constitution du devoir de faire exécuter les votes de la chambre des représentants
dont elle émane, et qu’elle ne pouvait allouer une dépense faite sans
l’autorisation de la législature ; en effet, l’art. 116 de la constitution
impose à la cour des comtes le devoir de veiller « à ce qu’aucun article
des dépenses du budget ne soit dépassé, et qu’aucun transfert n’ait
lieu. » C’est là une des dispositions les plus salutaires de la
constitution ; car s’il était permis de ne pas avoir égard à la spécialité des
dépenses du budget, on verrait des allocations manifestement détournées de leur
objet. C’est ainsi qu’avec le produit d’un régiment on pourrait créer une
école.
Eh
bien, messieurs, ce que la cour des comptes a fait, nous devons lui en savoir
gré. Elle a refusé la liquidation, et c’est pour cela qu’on vous demande
aujourd’hui un supplément de crédit. Si l’honorable député qui était ministre
alors était encore aujourd’hui au ministère, nous aurions un devoir à remplir
vis à vis du pays ; je croirais que mon mandat de représentant m’oblige de
m’opposer à ce qu’on passe en compte la somme demandée aujourd’hui. C’est ainsi
que la chambre des députés de France a compris son mandat quand M. de Peyronnet
ayant fait une dépense pour laquelle on lui avait refusé un crédit, elle refusa
de lui en tenir compte et l’obligea de payer de ses propres deniers.
C’est ainsi que nous devrions agir pour faire respecter le vote de la
chambre ; nous devrions refuser d’allouer des dépenses faites indûment. Dans
les circonstances actuelles, je ne crois pas devoir faire une semblable
proposition, mais je crois que nous devons faire quelque chose pour mettre à
couvert la dignité de représentant et les prérogatives de la chambre.
Je
demande donc que la chambre, dans son procès-verbal déclare qu’accordant un
bill d’indemnité pour la dépense, elle alloue le crédit demandé.
Voilà
la proposition que je fais ; c’est une simple insertion au procès- verbal.
Dans
la circonstance actuelle j’alloue le crédit ; mais, comme je l’ai dit tout à
l’heure, dans une autre circonstance je n’aurais pas cru pouvoir le faire.
M. le président consulte la chambre sur la
question de savoir si la proposition de M. Dumortier est appuyée.
-
Elle est appuyée.
M. Rogier. - Messieurs, je commence par déclarer
que la grâce que veut m’accorder M. Dumortier, je n’en veux pas ; que le bill
d’indemnité qu’il propose, je n’en veux pas non plus. Je le remercie de la
bienveillance qu’il montre pour les ministres tombés ; mais je le prie de
croire que les ministres tombés ont encore assez de dignité pour refuser les
grâces qu’ils ne croient pas avoir méritées.
On
a articulé deux faits que je crois dénués d’exactitude. Pour appuyer l’acte
d’accusation a posteriori qui vient d’être lancé, on a dit qu’une dépense avait
été proposée au budget de 1833 pour
élever un hôtel sur l’emplacement de l’ancien ministère de la justice. Je crois
que c’est une erreur ; je ne crois pas avoir proposé une dépense avec
destination de construire un hôtel...
M. Dumortier. - Je vous demande pardon. Un
crédit a été demandé au budget de 1834 pour construite un hôtel où on placerait
les archives.
M. Rogier (après avoir consulté le budget de
1834). - Voici comment est conçu un lutera du budget pour l’exercice 1834 : «
Pour construction d’un bâtiment pour les archives de l’Etat, sur le terrain de
l’ancien ministère de la justice : fr. 150,000 fr. »
Je
ne crois pas que M. Dumortier ait parlé d’un bâtiment pour les archives.
M. Dumortier. - Je vous demande pardon.
M. Rogier. - Soit. Cette somme n’a pas été
accordée, parce qu’on a trouvé préférable de transporter les archives à la
porte de Hal. Au mois de juillet 1834, le gouvernement se trouvant dans la
nécessité de procéder d’une manière convenable à la célébration des fêtes de
septembre, il s’agissait de réunir dans un concert, qui se donnerait à
Bruxelles, toutes les villes du royaume qui ont des sociétés musicales. On
n’avait pas de local convenable. L’église des Augustins existait, mais le
gouvernement éprouvait quelques scrupules à faire exécuter un concert dans ce
lieu consacré à un autre usage. A cet égard les observations faites tout à
l’heure par l’honorable ami de M. Dumortier lui feront comprendre les scrupules
du ministère.
Ensuite,
le gouvernement trouvait le local trop petit. Il voulait donner à ce concert le
plus de publicité possible ; il voulait une salle qui pût contenir beaucoup
plus de monde que l’église des Augustins. Je fis venir l’architecte Suys ; je lui demandai s’il pourrait, dans les deux mois
qui nous restaient jusqu’aux fêtes de septembre, construire une salle
provisoire pour la grande réunion que le gouvernement se proposait. M. Suys, dont le talent et l’activité vous sont connus, me
répondit qu’il croyait pouvoir préparer les fondements d’une salle qui pourrait
devenir définitive par la suite, mais qui pour cette année pourrait servir à la
réunion projetée, au moyen d’une tente qui s’élèverait sur les fondements de
cette salle.
L’idée
d’avoir une grande salle destinée aux fêtes publiques fit venir une autre. Je
me suis demandé si nous n’avions pas encore besoin d’une salle pour quelque
autre destination que pour les fêtes publiques, et j’ai été frappé de la
pénurie où se trouve le gouvernement quant aux locaux publics. Il faut savoir
que le gouvernement n’a pas une place de six pieds carrés pour placer ses
collections ou faire les expositions qu’il décrète.
En
1833, j’avais eu l’honneur de proposer au Roi une exposition périodique des
objets d’art ; dans le même arrêté on établissait le principe d’une collection
d’objets d’art à réunir dans Bruxelles. Je sais que postérieurement cet arrêté
n’a pas été rappelé et qu’on a préféré remonter à un arrêté du roi Guillaume,
quoique celui de 1833 existât. Cet arrêté, dis-je, consacrait le principe d’une
exposition périodique et d’une collection, au musée national à établir à
Bruxelles. Plus tard, un autre arrêté décréta une exposition d’objets
d’industrie. Quelque temps auparavant, des offres avaient été faites au
gouvernement pour un cabinet d’estampes que le propriétaire proposait à des
conditions très avantageuses.
Tandis
que je cherchais un local pour le placer, le propriétaire se dégoûta, et
l’affaire manqua faute d’un local convenable. Pour le musée des arts, il a
fallu supplier la régence de Bruxelles de vouloir bien accueillir nos
collections dans un de ses bâtiments ; et on n’y est parvenu qu’après deux mois
de correspondance. La baleine qui était venue échouer au port d’Ostende m’avait
été également offerte à certaines conditions à débattre ; il fallut encore
pendant très longtemps entretenir des correspondances avec la régence de
Bruxelles pour obtenir une place pour mettre cette baleine. Je n’en finirais
pas, si je voulais énumérer tous les embarras qui sont résultés de l’absence de
tout local à Bruxelles à la disposition du gouvernement.
Je
vis donc une grande utilité à la construction d’une telle salle. Voilà l’arrêté
qui fut pris. J’appelle l’attention de la chambre sur ses dispositions.
« Attendu
que l’Etat ne possède dans la capitale aucun local propre à la célébration des
fêtes et des solennités nationales, et dans lequel puissent avoir lieu les
expositions des produits de l’industrie nationale, d’objets d’art ou de tous
autres, ainsi que le dépôt des collections appartenant à l’Etat ;
« Attendu
que le manque d’un emplacement convenable paralyse la prompte organisation du
conservatoire royal de musique Bruxelles ;
«
Considérant que le besoin d’un local réunissant ces conditions se fait vivement
sentir, et qu’il est nécessaire de prévenir, pour l’avenir, le retour de
difficultés que l’administration n’est parvenue qu’imparfaitement à vaincre ;
« Arrête
:
« Art.
1er. Il sera construit, aux frais de l’Etat, sur le terrain de l’ancien hôtel
du ministère de la justice, place du Petit-Sablon, un local pour la célébration
des fêtes et solennités nationales, pour les expositions que le gouvernement
jugera utile d’instituer et pour le dépôt des collections appartenant à l’Etat.
Ce local devra contenir, en outre, une salle d’exercices pour le conservatoire
royal de musique.
« Art.
« Art.
3. Les frais d’acquisition de terrains qui pourraient être nécessaires et ceux
de la construction seront imputes pour l’exercice 1834, et pour les exercices
subséquents sur les fonds alloués au département de l’intérieur, pour les
diverses branches de service auxquelles le local à construire sera utile.
« Art.
4. Le présent arrêté sera communique, pour leur information, à la cour des
comptes, au ministre des finances et aux diverses autorités qu’il concerne.
« Bruxelles,
le 15 juillet 1834. Ch. Rogier. »
Voilà
donc ce que je demandais, d’appliquer les dépenses dont il s’agissait sur
chacun des chapitres auxquels cette salle pouvait être utile. Ainsi 10,000
francs chaque année sur le crédit alloué pour les fêtes nationales ; 2 ou 3,000
francs sur la conservation des objets d’art, 10.000 francs sur la somme allouée
pour l’industrie, enfin, sur chaque objet chaque année une somme proportionnée
à l’utilité qu’il retirait de la construction de cette salle.
D’après
le plan précédemment fourni par l’architecte, les dépenses devaient s’élever à
100,000 fr.
Je
sais que depuis les dépenses ont été évaluées beaucoup plus haut ; mais d’après
la lettre que j’ai reçu de l’architecte, ces dépenses devaient aller à deux
cent mille francs. Voilà quel était l’état des choses, quant j’ai quitté le
ministère, au commencement 1834. L’arrêté fut communiqué à la cour des comptes
; elle ne rejeta pas d’une manière si absolue l’allocation que je demandais ;
elle émit des doutes. En outre tout en ne croyant pas pouvoir liquider les
dépenses de la manière que je l’attendais elle reconnaissait au gouvernement le
droit d’imputer les dépenses sur des chapitres particuliers, et notamment sur
le chapitre des fêtes nationales. Et, en effet, le tiers des dépenses fut
imputée sur le crédit des fêtes. Les constructions avaient en pour origine
l’érection d’une salle qui eût servi pour nos fêtes ; on pouvait imputer le
restant des dépenses sur le chapitre des fêtes ; mais il paraît que le fonds a
été épuisé, et qu’on n’a pas pu continuer à solder sur ce fonds. Si mon
successeur trouvait sur ce chapitre de quoi payer, la cour des comptes
n’hésiterait pas à autoriser le paiement.
La cour des comptes en liquidant la somme demandée
sur le fonds des fêtes nationales a reconnu la régularité de l’arrêté.
J’ai
été attaqué à deux reprise, par le préopinant d’une manière assez violente pour
que vous me permettiez de me défendre. On vient de s’élever contre l’abus des
dépenses pour des objets, qui se détruisent promptement : eh bien ! chaque année, pour les fêtes nationales on exécute à grands
frais des travaux ; on élève des estrades, qui bientôt sont hors d’usage ; je
dis que l’esprit de prévoyance et d’économie exigeait que l’on construisît une
salle propre à servir tous les ans. Si, au lieu de faire une salle en pierres,
j’en avais fait une en bois, et l’idée nous en était venue, la chambre et la
cour des comptes n’auraient, peut- être, pas dit un seul mot ; cependant
j’aurais dépensé des fonds en pure perte, puisque la salle eût été détruite
quelques jours après. Messieurs, il m’est vraiment pénible d’avoir à me
défendre de nouveau dans cette enceinte contre une accusation qui, j’aime à le
croire pourtant, n’y aura pas d’écho ; il s’agit d’une dépense utile, la cour
des comptes, elle-même, a rendu hommage aux intentions qui l’ont créée ; que la
chambre suive son exemple, et qu’elle impute, si elle ne veut autrement, sur le
chapitre des fêtes nationales la dette dont il est question.
M. Gendebien. -
Mon intention n’est pas d’accuser le ministre ; l’affaire est consommée. Je
crois qu’il faut allouer la somme ; mais c’est pour l’honneur des principes
qu’il faut examiner la question ; c’est sous ce point de vue que M. Dumortier l’a
considérée ; je ne puis toutefois admettre les raisons alléguées par l’ancien
ministre de l’intérieur : elles ne justifient pas tous les actes qu’il s’est
permis par irréflexion ; car je suis complètement de son avis quand il dit
qu’il l’a fait consciencieusement et de bonne foi.
L’objet
est sans doute utile ; cependant il ne suffit pas qu’un objet soit utile pour
que M. le ministre en fasse la dépense ; il faut encore que cette dépense soit
inscrite au budget. Je ne puis pas non plus admettre qu’en deux mois on puisse
élever un édifice. Quoiqu’il en soit nous avons une précaution à prendre pour
l’avenir. Il ne faut pas que les ministres actuels se croient autorisés à
continuer la construction commencée ; et c’est dans ce sens que je vais
proposer un amendement. La demande du paragraphe en discussion est ainsi conçue
: « Solde des constructions faites en 1834 sur l’ancien emplacement du ministre
de la justice : fr. 13,000. »
« Il
est bien entendu que l’allocation n’autorise pas le ministre à continuer la
construction commencée sans le consentement ultérieur des chambres. »
Cet
amendement ne blessera personne et il est de nature à faire rentrer le
ministère dans les règles d’une bonne comptabilité.
M. le ministre de l'intérieur (M. de Theux).
- Je ne pense pas qu’en votant le crédit demandé pour solder une dépense de
1834, vous engagiez le gouvernement à continuer le bâtiment. J’ai reconnu
fondées les observations de la cour des comptes, et j’ai pensé qu’il y avait
lieu de stater les travaux commencés. Je pense que pour faire le bâtiment, il
faudrait demander un crédit spécial à la chambre ; je crois donc que
l’amendement proposé est inutile.
M. Dumortier. - Je dois répondre quelques mots
à l’ex-ministre de l’intérieur. Dans l’observation que j’ai faite, j’ai cherché
à parler sans acrimonie, à son égard, quoi qu’il ait pu dire ; et s’il lui a
été pénible d’avoir à répondre à l’accusation que j’avais le droit et qu’il était
de mon devoir de porter contre lui, soyez assurés qu’il ne m’a pas été moins
pénible de porter cette accusation. Mais, comme l’a dit l’honorable M.
Gendebien, il y a un principe qui est au-dessus de toutes les considérations
personnelles ; ce principe c’est que nous ne devons pas tolérer qu’un ministre
prenne un arrêté inconstitutionnel.
M. Rogier. - L’arrêté n’est pas inconstitutionnel.
M. Dumortier. - Il est inconstitutionnel,
puisque c’est un acte fait sans le concours de la législature, là où le
concours de la législature était indispensable. En effet, que porte l’arrêté ?
Il porte (dans l’art. 1er) qu’il sera construit aux frais de l’Etat un bâtiment
ayant telle destination. Or, je le demande, est-ce à un ministre seul qu’il
appartient de décider qu’il sera fait aux frais de l’Etat une construction
quelconque ? Le pouvoir législatif seul est compétent pour régler les dépenses
de l’Etat. Quand vous décrétez des dépenses aux frais de l’Etat, vous empiétez
sur le pouvoir de la législature, vous vous posez pouvoir législatif ; il y a
confusion de pouvoirs. Que diriez-vous si nous, branche du pouvoir législatif,
nous voulions nous constituer pouvoir exécutif ? Vous vous récrieriez. Eh bien
de même que vous voulez qu’on respecte les prérogatives du pouvoir exécutif, (erratum inséré au Moniteur belge n°329, du
25 novembre 1835 :) de même vous devez respecter les prérogatives du
pouvoir législatif. Vous ne pouvez manquer à ce respect, sans violer la constitution
; et j’en suis fâché pour M. Rogier, mais l’arrêté qu’il a pris est entaché
d’une inconstitutionnalité manifeste.
Maintenant
je crois avec l’honorable M. Gendebien que M. Rogier a agi de bonne foi ; mais
les raisons, qui l’ont porté à prendre cet arrêté, il devait les dire à la
législature en demandant l’allocation de la somme nécessaire pour la
construction dont il s’agit, construction qui du reste ne paraît guère avoir
d’autre but que d’encourager l’architecture.
M. Rogier. - Je pense aussi qu’il faut
l’encourager.
M. Dumortier. - Sans doute ; mais non pas
lorsque le trésor public est en souffrance, lorsqu’il faut recourir à des
émissions de bons du trésor et bientôt peut-être à des emprunts.
La
construction dont il s’agit a été vivement combattue dans cette enceinte ; et
je me rappelle que l’honorable député de Mons avait demandé que l’on vendît le
terrain et que l’on y perçât des rues, que cette demande avait été appuyée et
qu’en définitive la demande du ministre a été rejetée, malgré son insistance
pour la faire admettre. Je le demande, pouvez-vous admettre qu’un ministre,
quelque bien intentionné qu’il soit, après le rejet d’une dépense par vous,
pourra faire cette dépense malgré vous ? Réfléchissez-y, avant de prononcer sur
une question d’une telle importance.
Les
journaux se sont plaints vivement et avec grande raison selon moi de la
création par le ministre de la guerre d’une école de médecine à Louvain.
J’ai
ouï dire que la plupart des sections avaient proposé le rejet du crédit demande
à ce titre, et que la section centrale avait également conclu ce rejet. Eh
bien, si vous passez sous silence le crédit demandé, si vous l’accordez sans
faire voir que vous désirez empêcher que l’on viole les lois, votas aurez beau
rejeter dans le budget la demande du ministre de la guerre pour établir une
école de médecine à Louvain, le ministre de la guerre fera comme M. Rogier, Il
imputera la dépense sur d’autres crédits ; alors vous serez réduits au rôle
d’une machine à dire oui ou non, et l’on fera toutes les dépenses sans avoir
besoin de votre assentiment. Sans doute, la chambre ne veut pas qu’il en soit
ainsi.
Je
ne propose pas de faire une grâce à M. Rogier ; je sais bien qu’il n’a pas
besoin de grâce. Mais je demande que les principes soient saufs. Ma proposition
tend à ce qu’ils ne soient pas sacrifiés.
Au
reste, je m’aperçois que nous ne sommes plus en nombre. Je demande que la
discussion soit continuée à demain.
Plusieurs membres. - L’appel nominal !
Un membre. - Mais il est plus de 5 heures !
-
La chambre décide qu’il sera procédé à l’appel nominal pour constater le nombre
des membres présents. L’appel nominal constate la présence de 41 membres.
Ont
répondu à l’appel nominal : MM. Bekaert-Baeckelandt, Corbisier, Deschamps, de
Nef, de Roo, Desmet, Dequesne, Demonceau, de Muelenaere, Lebeau, Milcamps,
Hye-Hoys, Morel-Danheel, Nothomb, Lejeune, Manilius, Kervyn, Pirson, A.
Rodenbach, Thienpont, Rogier, Smits, Scheyven, Schaetzen, Raikem, Quirini,
Vandenhove, L. Vuylsteke, H. Vilain XIIII, Verdussen, Vandenbossche, Zoude, C.
Vuylsteke, Vanderbelen, Dubois, Devaux, de Theux, B. Dubus, Dumortier, Frison,
Gendebien.
-
La séance est levée à cinq heures et un quart.