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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 21 décembre 1838

(Moniteur belge du 22 décembre 1838, n°357)

(Présidence de M. Raikem)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Scheyven fait l’appel nominal à midi et demi.

M. Lejeune lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Scheyven présente l’analyse des pièces adressées à la chambre :

« Le sieur J.-P. Dion, ancien soldat, ouvrier au chemin de fer de Tirlemont, demande une indemnité ou une place, pour cause de blessures. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« La chambre de commerce et des fabriques de Gand adresse des observations sur le projet de loi relatif au traité de navigation avec la France. »

- Renvoi à la commission chargée de l’examen des projets de loi relatifs aux traités de commerce.


Par message du 20 décembre, le sénat informe la chambre qu’il a adopté le budget des voies et moyens pour l’exercice de 1839.

- Pris pour notification.


M. le ministre de la justice (M. Ernst) renvoie à la chambre, accompagnées de renseignements relatifs à chacune d’elles, cinq demandes en naturalisation.

- Renvoi la commission des naturalisations.

Projet de loi portant le budget du ministère de l'intérieur de l'exercice 1839

Discussion du tableau des crédits

Chapitre V. Cultes

Article premier

M. le président – La discussion continue sur l’article 1er du chapitre V : « Culte catholique, 4,016,150 fr » et sur les deux amendements présentés à cet article par M. Verhaegen.

La parole est à M. Verhaegen.

M. Verhaegen – Messieurs, je viens répondre à six orateurs qui ont combattu mes amendements. Mais, dans le désir d’être aussi court que possible, j’ai résumé, pour ce qui concerne la légalité des arrêtes et de leur source, toutes les objections dans le discours prononcés par l’honorable M. Dubus (aîné), puisque c’est à lui qu’on s’adresse comme à une planche de salut.

Toutefois cependant je répondrai à quelques considérations morales qu’ont fait valoir d’autres orateurs.

L’honorable rapporteur de la section centrale a regretté que dans le moment de crise politique où nous nous trouvons, une question irritante se soit soulevée dans cette enceinte. Moi-même et le premier, j’ai regretté cet état de choses, et je crois avoir démontré que ce n’est pas à notre banc que cette discussion est due, mais à ceux qui nous combattent. S’il suffisait d’un moment de crise pour déchirer la constitution, et pour faire passer des propositions qui en d’autres temps ne passeraient pas, il n’y aurait rien de plus commode pour nos adversaires que de se rejeter sur des considérations de cette nature.

Nous, nous sommes sur la défensive ; car nous venons combattre des empiétements, des violations de la constitution ; et si ces questions ont été soulevées, ce n’est pas notre faute. On aurait mieux fait de renvoyer à d’autres temps ce qu’on a jugé opportun dans les circonstances actuelles.

Quoi qu’il en soit (et qu’il me soit permis ici de dire un mot en réponse à une insinuation), dans la crise actuelle nous avons fait ce que notre devoir nous imposait. Les sympathies de ceux qui nous combattent ont été nos sympathies, et de bonne foi nous avons suivi la route qu’eux-mêmes nous ont tracée. « On devrait (nous a-t-on dit) faire trêve à toute espèce de parti ! » Oui, l’esprit de parti ne convient pas dans les circonstances actuelles, et nous-mêmes avons dit qu’il fallait une alliance étroite entre tous les Belges ; cette alliance nous la voulons ; et nous engageons ceux qui ne partagent pas notre opinion, à renvoyer à un autre temps des questions telles que celles qui nous agitent.

L’honorable député de Soignies a fait un appel aux catholiques ; il a eu l’ait de suspecter nos intentions ; et il a soumis au jugement du clergé paroissial les amendements que nous avons eu l’honneur de formuler. Ce gant jeté, nous le ramassons ; et puisqu’on vous parle de catholiques, puisqu’on vous présente des observations qui paraissent destinées à nous atteindre personnellement, il importe une fois pour toutes que notre position soit bien dessinée dans cette chambre. Je n’ai pas l’habitude de parler de moi ; mais, puisqu’on suspecte mes intentions, il importe qu’on sache ce que je veux.

Je suis peut-être plus catholique que ceux que je combats. Mais je suis catholique dans la véritable acception du mot. Ce que je ne veux pas, ce sont les exagérations ; ce que je ne veux pas, ce sont les empiétements. Ce que je veux, c’est la liberté en tout et pour tous ; c’est cette liberté qu’on ne cesse d’invoquer, et qu’on veut en définitive rétorquer contre nous. En 1817, j’ai défendu le haut clergé contre les empiétements du pouvoir d’alors. Je l’ai défendu courageusement ; et, à cette époque, il a su mettre justice. Depuis des événements se sont succédé. Je me suis convaincu que d’opprimés qu’étaient les princes de l’église, ils étaient sur le point de devenir oppresseurs. Mon rôle a dû être différent.

La ligne de conduite que je me suis tracée est toujours la même. Si un jour les circonstances changeaient ; s’il arrivait (à ce que Dieu ne plaise !) que nous revinssions à l’état de choses de 1817, ce même clergé que j’ai défendu alors, trouverait encore en moi un zélé défenseur. En attendant, il me permettra de ne pas soutenir les principes qu’il émet maintenant. S’il voulait rester dans les bornes, il ne rencontrerait de notre part aucune objection ; mais puisqu’il en sort, nous devons le combattre.

Ce que nous venons, je le répète, c’est la liberté en tout et pour tous ; c’est empêcher les empiétements.

Faut-il une suprématie du spirituel sur le temporel ? Voilà la question. Si l’on pouvait faire une nouvelle proposition ; s’il pouvait surgir de la discussion un amendement de nature à faire cesser cette suprématie que je crains, je n’hésiterais pas à m’y rallier. Ainsi ce n’est pas une question de parti, c’est une question de principe que je soutiens.

La nomination d’un cardinal, vous a-t-on dit, est dans l’intérêt du culte catholique. Vous voulez rendre (c’est au moins ce qu’on nous impose) la nomination illusoire, puisque vous voulez refuser le traitement et que vous n’accordez aucun frais d’installation. Qui veut la fin veut les moyens. On a parlé de la discussion française : on a invoqué l’opinion d’Isambert ; on vous a dit que celui-là au moins était franc ; et ainsi on a insinué que moi je ne le serais pas. Isambert, a-t-on ajouté, ne voulait pas de cardinaux ; si vous n’en voulez pas, dites-le.

Ces insinuations sont plus ou moins perfides. Je n’en admets nullement les conséquences.

Notre position, comme l’a établi hier l’honorable M. Gendebien, n’est pas celle de la France. La France nomme (et c’est le cas de le dire, dans toute la force du terme) ses cardinaux, et a le moyen de rendre illusoires les nominations que pourrait faire par exemple la cour de Rome, sans avoir consulté le gouvernement français. Isambert pouvait donc ne pas vouloir de cardinaux. Mais notre position est différente. Quant à moi, je n’ai point à m’expliquer sur ce point. A chacun liberté d’opinion. Les cultes sont libres ; cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Les catholiques peuvent désirer des cardinaux ; il n’y a pas d’objections à cet égard. Mais si les catholiques veulent faire de ces cardinaux des fonctionnaires publics et leur faire accorder des traitements et des avantages. Il n’y a plus liberté en tout en pour tous. Il y a une suprématie. Vous accordez aux uns tout ce que vous pouvez accorder aux autres. Mais, dit-on, où trouver les ressources nécessaires pour subvenir au traitement du cardinal ? Messieurs, en d’autres circonstances on a prouvé que les ressources ne manquaient pas. Pourquoi donc, lorsqu’il s’agit de l’intérêt d’une certaine classe d’individus, est-ce dans les caisses de l’état qu’on vient puiser ?

Mais, en définitive, est-ce là que gît le catholicisme ? Déjà on a soulevé la question ; et je partage à cet égard l’opinion de mes honorables amis. Est-ce à l’exercice du culte que tendent les fonctions de cardinal ? est-ce dans l’intérêt du pays, ou plutôt n’est-ce pas à l’extérieur que ces fonctions ses remplissent ? par conséquent ce n’est pas au pays à en supporter les conséquences. Est-ce que par hasard la Belgique aurait été moins catholique depuis Granvelle et Philippe de Boussut ? Faut-il, pour être catholique, suivre les errements de ces cardinaux ? faut-il, pour être à l’abri du soupçon, donner les mains au système entier ? je ne le pense pas, et, beaucoup de mes honorables collègues partagent mon opinion.

On vous a dit que le clergé n’était pas assez rétribué, et on vous a insinué que nous voulions encore réduire ses traitements. Cette objection émane de l’honorable M. A Rodenbach, car à chacun ses paroles. Eh bien, il est loin de notre pensée de vouloir réduire ses traitements. Nous pensions, au contraire, que le clergé n’est pas assez rétribué. Nous partageons à cet égard l’opinion de l’honorable M. Gendebien. Mais s’agit-il de cette question ? nullement ; nous voulons au contraire soutenir les droits du petit clergé, les droits des faibles contre les forts.

Ici, je répondrai à l’objection de M. Dechamps. Cet honorable membre a dit qu’il abandonnerai volontiers l’appréciation de la question au petit clergé. Qu’on soumette, a-t-il dit, les amendements déposés au jugement du petit clergé, vous verrez qu’il ne les condamne pas. Je veux bien me soumettre au jugement du petit clergé ; j’en accepte les conséquences quelles qu’elles puissent être, car je ne suis homme à caresser aucun parti. Mais si l’on faisait au clergé paroissial l’appel dont a parlé M. Dechamps, il faudrait aussi lui dire que les 54,000 francs sont pris sur les fonds qui devaient être distribués en secours aux infirmes et aux malheureux d’entre-eux : alors leur réponse ne sera pas douteuse, car ils préfèreront voir alléger les misères du bas clergé dont il font partie, que de voir augmenter l’opulence des princes de l’église.

Qu’on fasse un appel surtout aux clergés des deux Flandres et du pays de Liége, qu’on leur demande s’ils veulent sacrifier les intérêts du petit clergé au profit de l’aristocratie cléricale dont ils subissent depuis longtemps le joug, et leur réponse ne sera pas douteuse.

En voilà assez sur les considérations morales, et je vais entrer dans la question qui domine toute la discussion. Je vais répondre de front aux observations présentées par l’honorable M. Dubus (aîné), quoiqu’on m’ait défié, dans la séance d’hier, d’y faire une réponse.

L’honorable M. Dubus a commencé par dire que nous raisonnions dans une fausse supposition. « Vous avez supposé, s’est-il écrié, que l’arrêté de l’an XI avait été invoqué comme ayant force de loi ; ce n’est pas du tout cela : on n’a invoqué cet arrêté que comme un simple arrêté. » Qu’il me soit permis de faire remarquer que c’est déjà changer la question et que l’on recule devant les conséquences d’une première assertion. Comme ceux que nous combattons savent fort bien sur quel terrain ils se trouvent, et apprécient fort bien la conséquence qui doit découler des prémisses, ils ont, avec le talent que nous leur reconnaissons, tourné la question. D’abord on nous a présenté l’arrêté de l’an XI comme un arrêté-loi ; aujourd’hui, on vire de bord, ce n’est plus qu’un simple arrêté.

J’ai ici les arrêtés royaux du 20 août 1838 sous les yeux, et j’y vois : « Il est accordé une somme de 45,000 francs pour frais d’installation dans la dignité de cardinal, conformément à l’arrêté du 7 ventôse an XI. » Il en est de même pour le traitement. Si c’était un simple arrêté, dans l’acception du mot, on ne l’aurait pas invoqué dans l’arrêté d’août 1838 ; car l’arrêté d’août 1838 aurait été tout aussi fort que celui de l’an XI.

On ne peut supposer que le gouvernement ait fait une chose ridicule ; un arrêté s’appuie sur une loi. Ainsi le gouvernement a dit : Je vais porter un arrêté en conséquence de ce que je considère comme loi (l’arrêté du 7 ventôse an XI) ; le gouvernement l’a envisagé de cette manière, et la question a été placée sur ce terrain.

On convient aujourd’hui que l’arrêté n’a pas force de loi. Je prends acte de l’aveu fait par mes adversaires ; mais j’avais intérêt à vous démontrer que ceux qui avaient pris cette base pour leur système ont rejeté ensuite cette base.

Eh bien, si l’arrêté de l’an XI n’a pas force de loi, peut-il avoir force comme arrêté, et peut-il déterminer le chiffre d’un traitement ? A-t-il force comme arrêté sauf à apprécier les conséquences d’un arrêté tel quel ?

Le ministre de l’intérieur a dit hier que ce n’était pas un arrêté d’intérêt général, mais une simple mesure d’administration, se rattachant à des intérêts particuliers, d’où il a tiré la conséquence qu’il ne devait pas être publié. M. Dubus n’est pas allé jusque là, mais il a soutenu la non-nécessité de la publication ; j’ai peine à concilier les deux opinions ; aussi je combattrai ce double système.

C’est un arrêté d’ordre intérieur concernant des intérêts particuliers, a dit le ministre. S’il en est ainsi, cet arrêté fait pour la France d’alors, comment peut-on l’appliquer à la Belgique, qui est dans une position tout autre que celle où était la France en l’an XI ?

Le système nouveau que l’on présente n’est pas plus fondé que le premier que l’on veut abandonner.

M. Dubus (aîné) a dit : « Cet arrêté ne devra pas être publié ; ce n’est pas un arrêté de mesure générale ; » mais il n’a pas dit à quel intérêt cet arrêté se rattachait.

Entendons-nous, messieurs, et nous serons bientôt d’accord en posant nettement la question.

Je vous ai cité un article de la constitution, l’article 139, je crois, d’après lequel aucune loi, aucun arrêté d’intérêt général, communal ou provincial, n’est obligatoire que par la publication qui en a été faite de la manière voulue.

Quand un arrêté sera-t-il d’intérêt général ? Il sera d’intérêt général lorsqu’il traitera d’intérêts concernant une certaine classe d’individus, et non quand il traite exclusivement d’intérêts concernant un individu désigné. Un arrêté qui porte que tout cardinal qui sera nommé par la suite aura un traitement de … est un arrêté d’intérêt général pour cette classe d’individus ; mais un arrêté par lequel on dira que telle personne nommée cardinal aura tel traitement… en exécution de tel loi ou de tel arrêté, est u arrêté d’intérêt particulier. La question est là.

L’arrêté du 20 août 1838 donne à un cardinal qu’il désigne des appointements de … conformément à l’arrêté du 7 ventôse de l’an XI ; c’est là un arrêté d’intérêt particulier.

Mais l’arrêté du 7 ventôse de l’an XI est un arrêté d’intérêt général pour une certaine classe d’individus ; car il dit que tout cardinal qui sera nommé aura les appointements de …, plus les frais d’installation de ….

Ainsi l’arrêté de l’an XI tombe dans la catégorie indiquée par la constitution. S’il avait force en Belgique, les cardinaux futurs pourraient l’invoquer pour revendiquer les appointements et avantages qu’il détermine ; il lierait la législature, et la législature pourrait le révoquer comme la législature française l’a révoqué en 1830. C’est un arrêté d’intérêt général dans toute la force du terme ; et il ne devient obligatoire, comme le dit la constitution, que du jour de la publication.

Cette observation simple détruit toute la base du système de M. Dubus (aîné).

Ainsi, cet arrêté, faute de publication, n’a pas force en Belgique, et l’arrêté du 20 août, qui en est la conséquence, tombe avec lui.

Mais, nous, nous allons beaucoup plus loin, et ici nous rencontrons un autre moyen présenté par l’honorable M. Dubus, et qui est dénué de tout fondement.

Nous avons dit, et nous avons cité à l’appui de notre opinion plusieurs articles de la constitution, que les traitements ne peuvent être fixés que par la loi. Et comme l’honorable M. Dubus, dans la discussion sur la demande de majoration de traitements relative à la cour des comptes, avait dit que l’on ne pouvait admettre dans un budget que les chiffres de traitement fixés par la loi, nous en avons tiré la conséquence que pour les ministres du culte il devait en être de même.

On m’avait fait le reproche d’avoir changé le sens du discours de l’honorable membre ; mais, le Moniteur à la main, j’ai prouvé que je discutais conformément au sens de M. Dubus. Quoi qu’il en soit, est-il vrai que les traitements des ministres du culte n’ont été fixés que par des arrêtés ? Si cela n’est pas vrai, l’argument est sans fondement.

Eh bien, messieurs, je vais vous démontrer que les traitements des ministres du culte sont établis par la loi. Hier l’honorable M. Gendebien vous a cité la loi organique de l’an X, et l’on ne soutiendra certes pas que cette loi soit abrogée à tous égards ; elle n’est abrogée qu’en ce qu’elle a de contraire à la constitution ; ainsi tout ce qui regarde les libertés que la constitution a consacrées, est abrogé, et loin de nous de vouloir rien déroger à ces libertés ; nous en sommes les premiers partisans, mais non les voulons pour nous comme pour les autres. Je dis que toutes les dispositions de la loi organique qui sont contraires à la constitution, sont abrogées, mais que cette loi organique conserve toute sa force dans tous les points auxquels la constitution n’a pas dérogé. La loi organique, messieurs, fixe les traitements des membres du clergé, et sur ce point la constitution n’a en aucune façon dérogé à cette loi ; bien au contraire : la constitution, dans les différentes dispositions que j’ai citées, a confirmé le principe que tout traitement doit résulter d’une loi, que c’est au législateur seul à fixer les traitements, et, loin de faire une exception pour le clergé, elle ne fait que confirmer, en ce qui le concerne, ce principe fondamental.

Voilà donc les traitements du clergé fixés par la loi organique, mais cette loi avait une lacune, et cette lacune vous l’avez appréciée, messieurs, vous l’avez comblée : les appointements de vicaires n’étaient pas fixés par la loi organique, on vous a présenté un projet de loi à cet égard et vous l’avez adopté ; maintenant la législation est complète, les traitements de tous les ministres du culte sont fixés par la loi organique et par la loi que vous avez portée sur le traitement des vicaires. Je dirai en passant que la discussion de cette loi a prouvé que ce n’est pas de notre côté que viennent les demandes de réduction sur le traitement des ministres des cultes ; bien au contraire : nous avons dans cette circonstance proposé des augmentations, et l’honorable M. Gendebien n’a fait que reproduire mon opinion à cet égard. Chaque fois qu’on nous donnera les moyens d’améliorer la position du petit clergé, nous nous empresserons de le faire car nous savons que le petit clergé n’est pas traité comme il devrait l’être, et nous voudrions que sa position fût mise en rapport avec les services qu’il rend. Voilà ce que nous voulons, et la discussion du projet de loi sur le traitement des vicaires l’a prouvé.

Ainsi, messieurs, la législation sur les traitements de ministres du culte est complète, elle se compose de la loi organique du concordat et de la loi que vous avez votée sur le traitement des vicaires. Mais on parle d’arrêtés, et d’abord de l’arrêté de l’an XI, qui permet aux conseils départementaux de donner des augmentations de traitements aux archevêques et aux évêques ; on parle ensuite de plusieurs arrêtés du roi Guillaume, et d’un arrêté du régent, de l’an 1831, et ‘on veut mettre tous ces arrêtés en opposition avec la loi organique, on prétend que ces arrêtés abrogent cette loi ; mais je le demande, messieurs, un arrêté a-t-il jamais pu abroger une loi ? Evidemment non. Si on a pris des arrêtés qu’on ne pouvait pas prendre, est-ce une raison pour que nous suivions le même système ? S’il y a eu des abus, est-ce une raison pour que nous maintenions ces abus ? Non sans doute : il faut bien en revenir aux véritables principales et, quant à moi, je ne recule devant aucune conséquence de ces principes ; on peut prendre acte de mes paroles, j’en accepte toutes les conséquences, et dans aucune circonstance on ne me verra prétendre qu’une loi puisse être abrogée par un arrêté.

Le premier des arrêtes qu’on invoque, c’est celui du 16 germinal an XI, qui autorise les conseils départementaux à voter des suppléments de traitement en faveur des archevêques et des évêques, si les circonstances l’exigent ; et, en effet, la loi organique avait posé le principe d’une semblable disposition ; mais, messieurs, que résulte-il de là ? Sans examiner maintenant quelle est la force de l’arrêté dont il s’agit, que résulte-t-il de ce que cet arrêté autorise les conseils départementaux à voter des suppléments de traitement ? résulte-t-il de là que le gouvernement peut accorder des augmentations sur les fonds de l’état ? mais, messieurs, je rétorque l’argument que nos adversaires veulent tirer de l’arrêté de l’an XI, et je dis que cet arrêté, par l’exception qu’il renferme dans son article 57, qui autorise les conseils généraux à voter des suppléments de traitement sur leurs propres fonds, prouve que la règle est invariable, que les traitements à la charge de l’état ne peuvent résulter que d’une loi.

J’arrive à un autre des arrêtés dont on a parlé, c’est celui du roi Guillaume, qui augmente les traitements de plusieurs fonctionnaires, et entre autres, des archevêques et évêques ; j’ai déjà dit que cet arrêté ne prouve rien, puisqu’un arrêté ne peut déroger à une loi ; on m’objecte que l’arrêté du roi Guillaume n’a donné lieu à aucune réclamation, je ne sais pas ce que cela prouve ; je conçois fort bien que ceux dont on augmentait les appointements n’aient pas été d’objections contre une semblable mesure ; je n’ai pas à m’en occuper ; d’ailleurs, des raisons pour lesquelles l’arrêté du roi Guillaume n’a pas été attaqué, il suffit que cet arrêté ne pouvait pas déroger à une loi.

Je parlerai maintenant de l’arrêté du régent, et cet arrêté que l’on invoque contre nous, je vais encore une fois le rétorquer contre nos adversaires. Qu’est-ce que le régent a fait en 1831 ? Le régent a vu qu’il y avait un abus, et que dans les circonstances où se trouvait le pays, il fallait revenir à une juste modération ; il s’est rapproché de la loi organique et il a eu parfaitement raison ; personne n’avait d’objections à lui faire, puisqu’il rentrait autant que possible dans la légalité.

Voyons maintenant quelles doivent être les conséquences de cet état de choses. Et ici la question de chiffre peut venir à propos, non pas comme chiffre simple, car je dirai comme ceux qui ont parlé avant moi que je ne veux pas m’occuper de cela ; j’ajouterai que si le trésor public était bien fourni, si nous avions le moyen de rétribuer tout le monde d’après son mérite, je ne disputerais pas sur le chiffren et je crois que dans d’autres occasions nous avons donné à cet égard des preuves suffisantes. Mais enfin il faut examiner le chiffre en rapport avec d’autres chiffres, il faut éviter une suprématie injuste ; le régent est revenu aux principes de justice consacrées par la législation ; il s’est occupé d’abord des fonctionnaires civils, et voici ce que porte l’arrêté qu’il a pris à leur égard :

(L’orateur donne lecture de cet arrêté.)

Voilà, messieurs, ce que le régent a fait en ce qui concernait les fonctionnaires civils ; il est juste de mettre tout le monde sur la même ligne ; les fonctionnaires civils ayant été réduits, il était juste de réduire les fonctionnaires ecclésiastiques dans la même proportion ; c’est aussi ce qu’on a fait. Cependant on était encore alors dans le flagrant de la révolution, et ces questions qu’on l’on dit aujourd’hui irritantes, auraient bien pu être considérées alors aussi comme irritantes, d’autant plus, il faut le dire, que le clergé avait rendu de grands services à la révolution ; on ne s’en est pas moins conformés en 1831 aux idées de justice, qui exigent qu’il n’y ait pas de suprématie pour personne ; on n’en a pas moins pris pour les fonctionnaires ecclésiastiques une mesure semblable à celle qu’on avait prise pour les fonctionnaires civils. Voici les termes de l’arrêté qui fut pris par le régent :

(L’orateur donne également lecture de cet arrêté.)

Eh bien, messieurs, que résulte-t-il de là ? C’est que dans l’opinion du régent, opinion qui a été admise et que les membres du haut clergé ont alors appréciée comme nous l’apprécions aujourd’hui, il importait, pour établir sur des bases solides la prospérité future de la Belgique, de mettre en harmonie les dépenses et les ressources de l’Etat. Le haut clergé comprenait que les circonstances exigeaient que chaque citoyen contribuât aux sacrifices dont le pays avait besoin ; le haut clergé ne réclamait pas de privilège à cette époque ; il consentait à la réduction qui avait été opérée sur ses traitements comme sur ceux des autres fonctionnaires. Serait-il donc aujourd’hui en dehors de la classe des citoyens ordinaires, lorsque les besoins de la Belgique sont peut-être tout aussi grands qu’alors, et que, dans la crise actuelle, l’état a besoin de toutes ses ressources ? est-ce que les membres du haut clergé auraient aujourd’hui d’autres opinions qu’à cette époque ? est-ce qu’ils ne seraient plus citoyens belges ? est-ce qu’ils ne voudraient plus faire les sacrifices qu’ils ont faits en 1831 ?

Je le demande, maintenant, messieurs, peut-on tirer des arrêtés du régent la conséquence que la loi organique a été abrogée ? Si le régent a opéré une réduction, non pas sur les traitements fixés par cette loi, mais sur les traitements fixés par des arrêtés illégaux ; s’il n’a fait que se rapprocher de la loi organique, est-ce un motif pou prétendre qu’il a abrogé cette loi ?

Il y a ici quelque chose qui me frappe, messieurs ; on invoque toujours l’arrêté de l’an XI comme base de celui du 20 août 1838 ; messieurs, on est même arrivé jusqu’à dire qu’en France on n’en avait plus voulu, qu’on l’y avait abrogé en 1830. Ce sera donc un arrêté qui a été rejeté en France, qu’on ira exhumer des cartons du ministère français, pour l’exécuter chez nous. Je vous le demande, messieurs, est-il possible d’en agir ainsi ?

Quand on vous a dit que les dignités sont partout les mêmes, quelle que soit la grandeur du pays ; qu’un cardinal belge, quoiqu’appartenant à un pays de 4 millions d’âmes, est sur la même ligne qu’un cardinal d’un pays de 35 millions, et que les appointements peuvent être les mêmes, j’ai d’avance combattu ce système. Mais je vais faire une réponse nouvelle qui prouvera derechef que les armes dont on s’est servis contre moi, peuvent être retournés avec avantage contre ceux qui les ont employées.

La France, avec toute sa prospérité et ses ressources, n’accorde aujourd’hui qu’un traitement de 25,000 francs à un cardinal archevêque. Cela résulte de la discussion qui a eu lieu, à l’occasion de la demande de crédit pour M. de Cheverus. Un traitement de 15,000francs est accordé à un archevêque, et si l’archevêque est en même temps cardinal, il a en sus 10,000 francs et ce aux termes de la loi organique du concordat que je considère comme la base de mon système. Et qu’on ne vienne pas dire que les conseils départements sont là pour accorder des suppléments, car il n’en est plus ainsi aujourd’hui, la réaction de 1830 est venue enlever cette ressource au clergé, et j’ose avancer, sans crainte d’être démenti par personne, qu’un cardinal-archevêque français n’a que 25,000 francs et la Belgique en donnerait 30,000 ! Pourtant on a dit que les dignités étant les mêmes, les traitements devaient être les mêmes ; en demandant 30,000 francs, ne tombe-t-on pas dans une véritable contradiction ? Si les dignités sont les mêmes, vous commettez une injustice flagrante, puisque vous donnez au cardinal belge 5,000 francs de plus que le cardinal français ne reçoit en France.

Il faut donc revenir à des idées de justice ; si nous agissions autrement, si le désir de la majorité de faire quelque chose de plus en faveur du cardinal belge se réalisait, nous nous rendrions ridicules aux yeux de nos concitoyens et de l’Europe entière.

S’il y avait eu, messieurs, possibilité de traiter les princes de l’église en rapport avec certains fonctionnaires appartenant à l’ordre civil, la discussion dont on se plaint n’aurait pas eu lieu dans cette enceinte ; mais il y a vraiment ici une question de suprématie en jeu ; vous donnez 50,000 francs au cardinal lorsque les premiers dignitaires de l’état n’ont que 21,000 francs : c’est élever l’un pour abaisser les autres, c’est mettre le cardinal au haut de l’échelle, et les ministres au bas. La royauté elle-même, que nous devons entourer de tous nos prestiges, sera bientôt éclipsée par l’aristocratie cléricale.

Si, comme je l’ai prouvé, la loi que j’ai invoquée fixe le traitement, vous n’êtes plus reçus à en appeler à votre système d’arrêtés ; les arrêtés, quels qu’ils soient, celui de ventôse an XI, ceux de Guillaume, celui du régent, tous ces arrêtés, dis-je, n’ont aucune force.

En traitant la question de légalité, j’ai parlé aussi de la question de convenance ; j’ai combattu le chiffre, non pas comme chiffre simple, en rapport avec l’individu que la chose concerne, mais comme un chiffre en rapport avec les traitements d’autres fonctionnaires dont nous devons aussi apprécier la position. Je l’ai dit dans les premiers discours, et je dois revenir sur ce point, parce que M. Dubus (aîné) a parlé des traitements de l’ordre judiciaire. Ceux-là, dit-il, sont seuls fixés par la loi. Je lui ai prouvé que c’est une erreur. Et puisque nous parlons des magistrats de l’ordre judiciaire, moi, qui depuis longtemps vous ai présenté une proposition pour améliorer leur sort (proposition dont on n’a pas voulu s’occuper, soit à défaut de temps, soit parce que les circonstances ne le permettaient pas), j’ai été guidé par ce sentiment de justice : que tous les hommes qui rendent des services de l’état, doivent être rétribués en raison de ces services. J’ai surtout été guidé par la considération qu’en tout temps un conseiller, par exemple, avec un traitement de 5,000 francs, pouvait à peine payer le loyer d’une maison, et pourvoir à quelques faibles dépenses. Eh bien, malgré l’insuffisance évidente de leurs traitements, ces magistrats doivent rester dans la position où ils se trouvent maintenant. Moi-même, j’ai déclaré, lors de la discussion récente du budget de la justice, que, quel que fût mon désir d’améliorer cette position, de voir ma proposition livrée à la discussion, je consentais à l’ajourner à d’autres temps. Mais lorsqu’on tient la magistrature dans une véritable dépendance, je l’ai déjà dit et je le répète, convient-il d’accorder à d’autres individus, et sans raison, une augmentation de traitement ridicule et en même temps odieuse par ses conséquences ? Faut-il abaisser la magistrature au profit de l’autorité supérieure ecclésiastique ? faut-il négliger la première pour ne s’occuper que de la seconde ? faut-il, en un mot, établir la suprématie spirituelle aux dépens de l’autorité temporelle ? Voilà la question vitale que nous avons été obligés de vous soumettre, parce que ce sont nos adversaires qui nous ont attirés sur ce terrain.

Reste maintenant la question des frais d’installation. Ici on ne s’est pas, pour ainsi dire, donné la peine de me combattre. On m’a dit : Vous invoquez l’article 114 de la constitution, aux termes duquel une gratification ne peut être accordée que par une loi ; mais il n’est pas du tout question ici de gratification, c’est simplement une indemnité que l’on accorde à un fonctionnaire pour se faire installer. Comme la constitution ne le défend pas, il nous est permis de donner 45,000 francs sur le trésor public pour frais d’installation d’un cardinal ; nous accordons la somme sur les fonds du culte pour l’année 1838 ; il n’y a rien à dire à cela, puisque la loi porte qu’une telle somme est alloué au gouvernement pour les frais du culte ; nous sommes donc dans notre droit.

Je vais répondre à cette argumentation. C’est une indemnité que vous avez accordée, et vous vous croyez autorisés à allouer des indemnités de 45,000 francs, parce que la constitution ne le défend pas. Mais avec un pareil système il n’y a pas de raison pour que l’on n’accorde pas à Paul 100,000 francs, à Pierre 150,000 francs, comme une indemnité, qui, en définitive, sera une véritable gratification. Qu’est-ce qu’une gratification ? c’est une somme qu’on donne à un individu quelconque pour tel ou tel usage, alors qu’on ne la donne pas à titre d’appointement. Un fonctionnaire a droit, dit-on, à l’obtention d’une indemnité pour se faire installer ; c’est la première fois que j’apprends cela, et je voudrais bien que l’on me dit où on a trouvé ce système.

Mais enfin vous avez alloué 45,000 francs pour frais d’installation ; la constitution, selon vous, ne le défend pas, l’allocation étant, non une gratification, mais une indemnité. Eh bien plaçons la question sur ce terrain ; je dis que vous ne pouvez disposer des fonds de l’état que dans les limites posées par la constitution. Or, il existe une cour des comptes qui contrôle les dépenses publiques, et cette cour des comptes a jugé à propos de ne pas revêtit de son visa le mandat de 45,000 francs qui avait été imputé sur les fonds disponibles de 1838.

Messieurs, si le système du ministre sur ce point était admis par tous, il n’y aurait plus de contrôle possible ; la loi constitutionnelle serait violée tous les jours. Pour échapper à tout contrôle, il suffira de changer les mots ; on dira : Ce n’est pas un traitement, ce n’est pas une gratification qu’on accorde, c’est une indemnité pour subvenir à telle ou telle dépenses.

Le droit que le gouvernement s’attribue, doit lui être donné par une disposition quelconque, soit par la loi fondamentale, soit par une disposition législative. Au reste, et ici j’appelle, messieurs, toute votre attention, le gouvernement a-t-il pensé qu’il eût le droit qu’il s’est arrogé, dans le sens qu’il le prétend maintenant ? Non, messieurs, le gouvernement a pensé qu’il lui fallait une disposition législative, pour pouvoir agir de la manière dont il a agi. Croyez-vous que le gouvernement ait accordé les 45,000 francs, parce que, dans son opinion, il lui est permis d’accorder une indemnité pour frais d’installation ? Il n’en est rien, messieurs ; le gouvernement a accordé les 45,000 francs, conformément à l’arrêté du 7 ventôse an XI. Encore une fois, le gouvernement a invoqué dans son arrêté du 20 août l’arrêté du 7 ventôse, et il l’a invoqué nécessairement comme un arrêté-loi, parce qu’un arrêté n’invoque par un autre arrêté : un simple arrêté ne peut rappeler qu’une loi ou un arrêté-loi.

Mais ce que le gouvernement a fait, il n’a pas eu pouvoir de le faire, car nous avons établi d’abord que l’arrêté du 7 ventôse an XI n’avait pas force de loi ; et ensuite que, comme simple arrêté, il n’avait aucune force en Belgique.

Ainsi, il en est des frais d’installation comme du traitement ; non-seulement aucune disposition législative ne les autorise pas, mais même toutes les lois sur la matière, et la loi des lois, les défendent.

On a dit que la somme de 45,000 francs avait été prélevée sur les fonds disponibles du culte catholique pour l’année 1838, et c’est ici que l’honorable M. Dubus est encore entré dans de longs détails, et l’on m’a défié de faire une réponse à son argumentation. Voyons. L’honorable membre a dit que la loi du budget avait accordé, en 1838, 4 millions et autant de centaines de mille francs pour le culte catholique. Cette loi existe ; elle est obligatoire, vous ne pouvez rien y retrancher. Les développements du budget ne peuvent être d’aucune utilité pour expliquer la loi, quand la loi n’est pas douteuse, car alors il n’y a pas lieu d’y recourir.

Mais c’est là une pétition de principe ; la loi serait douteuse si vous pouviez l’interpréter comme vous le faites, il faudrait bien alors avoir recours aux développements du budget. Cette erreur provient de ce qu’on se fait une idée très fausse de la nature d’un budget. Je vous en ai donné la définition dans mon premier discours. Je ne vous répéterai pas tout ce que j’ai dit à cet égard.

Dans l’état normal du budget, vous arrivez du connu à l’inconnu, les dépenses d’une année deviennent les prévisions de l’année suivante : c’est ainsi que les chiffres des prévisions se changent en allocations, lorsque la législature les admet.

On a suivi, nous a-t-on dit, une marche contraire pour les universités. On avait accordé une somme pour cet objet ; lorsqu’on a en quelque sorte de trop pour le personnel, on n’a imputé sur le matériel et vice-versa. Le chiffre n’a pas été changé, la somme est restée la même. Il y a une différence du tout au tout.

Ici encore il y a à faire une distinction que je soumets à votre appréciation et qui est décisive. Lorsque des dépenses sont prévues, le chiffre peut varier d’après les besoins. Lorsque sur un article du chapitre il y a trop et sur un autre trop peu, on peut compenser l’un par l’autre. C’est dans ce sens que le ministre peut faire des imputations d’un article à l’autre, que la chambre des comptes admet sauf la responsabilité ministérielle et sous la réserve de faire approuver la conduite du ministre par les chambres.

Il n’en est pas ainsi dans l’occurrence. Il n’y a pas eu de chiffre porté au budget pour le cardinalat, on ne prévoyait pas qu’il y en aurait eu. Cette dépense était hors de toute prévoyance, par conséquent elle ne figurait pas et ne pouvait pas figurer au budget. Il ne pouvait entrer dans les prévisions d’aucun de ceux qui ont voté les budget de 1838, qu’un traitement de cardinal pourrait être payé dans le cours de cet exercice. Si un chiffre quelconque avait été voté pour le cardinalat et qu’il eût été trop faible, on aurait pu compenser le déficit par l’excédant d’un autre article, comme pour les universités, comparaison faite entre le personnel et le matériel. Mais ici telle n’était pas la question ; l’objet n’était pas prévu, et il ne devait pas l’être avec d’autant plus de raison que l’arrêté du 7 ventôse an XI n’avait aucune force de loi ni d’arrêté non plus en France qu’en Belgique. Comment alors aurait-il pu entrer dans la tête de qui que ce soit qu’en 1838 on devrait avoir à pourvoir au traitement et aux frais d’installation d’un cardinal ?

La question, messieurs, a une haute portée, elle est de la plus haute importance, elle concerne une masse d’individus. Les 4,000 francs, plus 9,000, ensemble 54,000, sont pris sur quoi ? sur les dépenses imprévues du budget de l’intérieur ? Non, car elles étaient absorbées ; mais ils ont été pris sur les dépenses prévues du culte catholique. Or, quelles étaient ces dépenses prévues ? Des pensions et des secours à des ecclésiastiques ; les 54,000 francs sont donc pris sur les pensions et secours destinés à des ecclésiastiques.

Si on me dit, comme M. A. Rodenbach, que le chiffre n’est pas augmenté, je réponds : C’est qu’on a pris les 55 mille francs sur les traitements de ceux qui y avaient droit. Il est impossible de sortir de ce dilemme : ou vous avez enlevé cette somme à ceux qui y avaient droit, ou vous n’avez enlevé quoique ce soit à personne. Si vous avez enlevé la somme à ceux qui y avaient droit, vous avez commis une injustice criante, car vous avez sacrifié les faibles au profit des forts. Si vous n’avez rien enlevé à qui que ce soit, vous aviez donc 54 mille francs de trop, et c’est pour cela que j’ai formulé mon amendement, ayant pour objet une diminution sur le budget de 1839. Il n’y a pas moyen de sortir de ce dilemme, et c’est à cela que je réduis la question. J’ai démontré que la somme dont il s’agit ne pouvait pas être prélevée sur le budget de 1838, et j’ai établi en même temps que l’arrêté considéré comme loi auquel se référait l’arrêté du 20 août 1838 péchait par sa base.

Et quand bien même vous décideriez aujourd’hui par votre vote, contrairement à mon opinion, que le traitement du cardinal-archevêque peut être fixé par arrêté, il n’en resterait pas moins vrai, comme l’a observé M. Vandenbossche, que cette dépense n’était point prévue au budget de 1838 ; que les fonds n’étaient point faits en 1838, ni pour l’indemnité des 45,000 francs ni pour le traitement. Vous seriez dans le même cas que la chambre française à l’occasion du crédit pour M. de Cheverus, qui a dû être demandé par la raison, a dit le ministre, que la dépense relative au troisième cardinal n’avait pas été comprise dans le budget voté, puisqu’alors sa nomination n’existait point encore quoiqu’elle fût pressentie par tout le monde à l’exception du prélat lui-même. La question d’imputation sur 1838 restera donc non résolue quoi que vous fassiez en 1839. Ce sera à la cour des comptes à la trancher, et si on croit qu’elle a erré, l’on aura la ressource de déférer sa décision à la cour de cassation.

Ici, messieurs, je dois vous demander s’il est bien parlementaire d’attaquer devant vous, par des insinuations, les décisions de la cour des comptes, comme l’a fait hier un honorable député de Tournai, alors que ses membres ne sont point ici pour se défendre. Quel corps de magistrature ne serait point déconsidéré si on pouvait ainsi l’attaquer ? Si la cour des comptes remplit mal son mandat, révoquez-la, vous en avez le droit, mais ne la tuez point moralement par des insinuations tout au moins déplacées. On conçoit maintenant pourquoi la proposition de majoration de traitement faite par le ministère a été si violemment combattue.

Je m’étonne au surplus que les ministres, qui tous les jours ont à traiter avec la cour des comptes, ne repoussent point cette imputation de facilité à liquider contrairement aux loi du budget, et puisqu’ils croient, eux et nos contradicteurs, qu’ils peuvent laisser sans réponse ces accusations injustes, outre qu’elles sont inconvenantes, j’y répondrai moi :

On a dit qu’une dépense rejetée par la chambre avait ensuite été liquidée ; le fait est vrai, mais il faut le rapporter en son entier pour l’apprécier à sa juste valeur : le ministre de la guerre avait demandé une somme pour frais de représentation à allouer à des officiers supérieures en cas d’entrée en campagne pendant l’année dont on votait le budget. Sa demande fut rejetée ; mais remarquons-le bien, messieurs, il ne fut point dit dans la loi du budget que cette nature de dépense ne pourrait être faite en aucun cas ; il n’en fut point question dans la loi, comme de mille autres « non prévues ». Dès lors, elle pouvait, comme toutes autres « non prévues », être imputée, le cas échéant, sur le chiffre destiné aux « dépenses imprévues, et ce, sous la responsabilité morale du ministre, qui, seul, devait compte de sa conduite à la législature. Quant à la cour des comptes, elle ne peut voir au budget que « ce qui y est » et non ce qui n’y est pas, comme le voudrait l’honorable M. Dubus. Le chiffre des dépenses « non prévues » accordé à un ministre, est à sa disposition sous sa seule responsabilité, pour toutes dépenses non indiquées au budget ; c’est la règle suivie. Or, si vous voulez qu’une dépense non catégorisée au budget ne puisse être payée par le chiffre des dépenses imprévues, il ne suffit point de la rejeter, il faut faire mentionner votre volonté dans la loi. Dans le cas cité par M. Dubus, le ministre ayant, dans le cours de l’exercice, réunit les troupes au camp, a jugé indispensable d’allouer des frais de représentation sous sa responsabilité, et il en a demandé l’imputation sur les dépenses imprévues de son budget ; la cour des comptes n’ayant point trouvé cette nature de dépense prévue au budget, ni vu défense de la liquider en aucun cas, n’a point dû refuser l’imputation sur l’article des dépenses non prévues, sauf toujours la responsabilité du ministre.

Elle a donc bien agi ; c’est à la législature à ne donner qu’un chiffre restreint pour les « dépenses non prévues », si elle craint les abus, ou au moins à indiquer nominativement les dépenses qu’elle entend ne pouvoir être faites en aucun cas sur l’article des dépenses imprévues.

Dans l’espèce, s’il ne fallait q’un arrêté et non une loi, le ministre aurait pu imputer les 45, 000 francs et le traitement sur le chiffre des dépenses imprévues de son budget ; la cour des comptes l’aurait liquidé, comme il la fait pour le ministre de la guerre, sous sa responsabilité, mais le chiffre était absorbé ; et il a voulu le prendre sur les fonds disponibles du culte catholique au détriment du petit clergé.

Si l’on veut faire le procès aux décision de la cour des comptes, il faut suivre les prescriptions de la loi, et les déférer à la cour de cassation ; alors au moins les motifs et les raisons de ses actions seront pesés, tandis qu’ici ses accusateurs parlent seuls et en son absence. Ces attaques, sans défense instantanée, doivent ôter à ce corps toute considération et toute force morale, et ce résultat, je le sais, peut servir dans l’affaire du cardinal-archevêque, parce qu’alors l’opinion de la cour n’aura plus aucun poids ; mais est-il convenable d’en agir ainsi ? ce corps que nous avons créé n’a-t-il donc droit à aucun respect, ou bien la cause de mes contradicteurs est-elle si mauvaise qu’il faille tout sacrifier pour la faire triompher ?

(Pendant le discours de M. Verhaegen, M. Fallon a remplacé M. Raikem au fauteuil.)

M. le président – L’amendement suivant vient d’être déposé :

« Attendu que dans tout gouvernement constitutionnel représentatif bien organisé et surtout dans un gouvernement constitué comme le nôtre, personne depuis le chef de l’état jusqu’au fonctionnaire le plus infime n’a d’autres prérogatives et hiérarchie que ceux qu’il puise dans la constitution ;

« Attendu que si les ministres sont nommés par le Roi, ils sont justiciables des chambres qui représentent la nation, et par conséquent, ils sont à la fois les magistrats de la nation de qui émanent tous les pouvoirs, et du Roi qu’ils représentent, en administrant en son nom et sous leur responsabilité ;

« Attendu que les ministres, après le chef de l’état doivent donc occuper dans l’ordre hiérarchique de l’administration dévolue au pouvoir exécutif, la première place ;

« Attendu que la constitution proclame la liberté et l’indépendance des cultes ; qu’elle a accordé à tous le droit indéfini de se constituer et d’établir l’ordre hiérarchique que leur situation respective peut réclamer ;

« Attendu qu’en proclamant leur complète indépendance, et en leur permettant des rapports hiérarchiques avec leurs chefs médiats ou immédiats, indigènes ou étrangers, la constitution ne leur a accordé aucuns pouvoirs, prérogatives ou hiérarchies dans l’ordre constitutionnel, et que dès lors ils ne peuvent réclamer aucune suprématie dans l’ordre hiérarchique des magistratures du pays ;

« Attendu qu’ils sont même en dehors de toute comparaison, n’étant et ne pouvant être considérés que comme des associations libres de toutes entraves, mais n’ayant d’autres droits que celui d’exister et de réclamer la protection et les libertés consacrées par la constitution ;

« Attendu que les ministres en Belgique occupent un rang qui domine nécessairement celui des ministres de tous les cultes, puisque leurs fonctions se rattachent à la constitution qui domine tout ; que par conséquent leurs traitements doivent être supérieurs à tous ceux alloués par le budget de l’état, sans autre exception que celles consacrées par la liste civile ;

« Attendu que les circonstances graves, qui semblent menacer la Belgique, ne permettent pas à ses représentants d’augmenter, pour l’exercice 1839, les traitements de ces fonctionnaires.

« Je propose en conséquence à la chambre, sans rien préjuger sur le traitement des ministres, ni sur celui du cardinal-archevêque de Malines de décider que, pour l’exercice de 1839, tous les traitements aussi bien ceux des ministres des cultes, que ceux de tous les fonctionnaires de l’état, ne seront pas augmentés et resteront sur le pied établi au budget de 1838, à moins qu’il n’y soit dérogé par une loi spéciale.

« Signé. ALEX. GENDEBIEN. »

M. le président – M. Gendebien est-il dans l’intention de développer cet amendement ?

M. Gendebien – Les motifs qui précèdent mon amendement me dispensent quant à présent de donner d’autres développements ; si mon amendement est attaqué, je répondrai s’il y a lieu.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Je regrette que l’honorable préopinant ait cru devoir entraîner la chambre dans une discussion de trois jours à propos d’une question de si minime importance, alors que tant de graves intérêts occupent le pays.

Il n’est nullement dans mes intentions de suivre l’orateur dans tous les développements dans lesquels il est entré. La courte réponse que j’ai eu l’honneur de faire dans la séance d’hier à son premier discours et celle qu’y a faite l’honorable M. Dubus dans la même séance mises en regard des deux discours prononcés par M. Verhaegen, me semblent suffire pour éclaircir la question.

Je dis que la question est d’une très minime importance quelques efforts qu’on ait fait pour la grandir. En effet, de quoi s’agit-il ? d’une somme de 9,000 francs allouée à l’archevêque de Malines à titre de majoration de traitement à raison de sa nouvelle dignité de cardinal. Et veuillez bien le remarquer, ceux qui combattent cette allocation de 9,000 francs ont affiché les sentiments les plus généreux en faveur du bas clergé. Ils ont exprimé le désir de voir augmenter considérablement ces traitements, c’est-à-dire de charger l’état d’une dépense considérable. Je crois qu’ici il y a contradiction dans le système de nos adversaires.

On a cru faire impression sur vous en disant que les cardinaux ne recevaient en France que 25,000 francs, tandis que le cardinal de Malines en recevait 30,000. Mais on aurait dû s’arrêter à cette considération qu’en France les cardinaux reçoivent une majoration de 10,000 francs tandis qu’en Belgique le cardinal ne reçoit qu’une majoration de 9,000 francs. S’il y a un désavantage, il est donc pour l’archevêque de Malines. Il faut aussi tenir compte de ce que les cardinaux archevêques en France peuvent recevoir des subsides des conseils généraux de département de la même manière que les évêques peuvent en recevoir. C’est précisément parce qu’on a voulu que la dépense entière du clergé fût à la charge de l’état que le gouvernement précédent a cru nécessaire de majorer les traitements fixés par la loi organique invoquée dans cette discussion. Cela est tellement vrai que le régent, en diminuant les traitements, les a cependant fixés à un taux supérieur à celui déterminé par la loi, parce qu’en Belgique les provinces n’accordent aucun subside à l’archevêque ni aux évêques. Voilà l’exposé des faits.

Je ne conçois pas qu’on veuille soutenir le principe que ces traitements ne peuvent être alloués qu’en vertu d’une loi. Ainsi les traitements tels qu’ils ont été fixés par l’arrêté du régent seraient donc illégaux ; les traitements que le gouvernement a fixés en faveur des ministres du culte anglican et du culte israélite seraient donc illégaux ; mais non, vous avez mis des fonds à la disposition du gouvernement pour qu’il en fasse, sous sa responsabilité, un usage convenable. Voilà les vrais principes de cette matière.

C’est vainement que l’on a cherché à réfuter les arguments présentés pour faire sentir la différence existant entre les traitements de l’ordre judiciaire et les traitements ecclésiastiques. Pourquoi la constitution veut-elle impérativement que les traitements de l’ordre judiciaire soient fixés par la loi ? C’est pour empêcher que l’ordre judiciaire n’ait intérêt à capter la bienveillance du gouvernement, c’est pour mettre ses décisions à l’abri de toute suspicion. Voilà le principe constitutionnel. Mais la loi organique du culte en fixant un minimum de traitement pour les archevêques et évêques a invité les conseils-généraux de département à majorer ces traitements. Ainsi nous restons dans les véritables termes de la législation.

L’honorable M. Verhaegen a prétendu que l’honorable M. Dubus et moi étions en contradiction avec l’arrêté de ventôse, et que moi-même, je m’étais mis en contradiction avec les termes de l’arrêté royal, lorsque j’ai dit, dans la dernière séance, que je ne considérais pas l’arrêté de ventôse comme ayant force de loi, mais seulement comme ayant la force d’un acte administratif. Dans l’arrêté royal le caractère de loi n’est aucunement attribué à l’arrêté de ventôse. Lorsque j’ai invoqué cet arrêté, ce n’est pas que je l’aie cru indispensable ; car je reconnais avec l’honorable membre que j’aurais pu proposer au Roi un arrêté, abstraction faite de celui de ventôse ; mais j’ai mentionné cet arrêté comme précédent et parce que je le considère comme un arrêté de principe. Cet arrêté de principe exigeait en outre un arrêté d’application, parce que le nombre des cardinaux n’est pas déterminé et que du moment que la cour de Rome propose au gouvernement l’élévation d’un sujet belge à la dignité de cardinal, il y a lieu de la part du gouvernement, s’il le juge à propos de lui allouer un traitement ; ce traitement devait être celui déterminé par l’arrêté de ventôse, à moins que le roi n’eût jugé convenable de révoquer cet arrêté. Il n’a jugé convenable d’en révoquer qu’une partie, celle qui concerne le cumul.

Quant aux 30,000 francs, j’ai pensé et je pense encore (et je ne doute pas que ce ne soit l’opinion de la majorité de la chambre) qu’une majoration de 9,000 francs, n’avait rien d’exagéré pour la dignité de cardinal.

Je viens maintenant à la question de suprématie et de prééminence qu’à mon avis on a soulevée fort mal à propos, car le gouvernement n’a établi aucune suprématie, aucune prééminence, il n’a pas eu à s’en occuper dans cette circonstance. Ainsi, il serait alloué à un ministre un traitement double de celui du cardinal, qu’il ne résulterait de ce chef aucune prééminence. Par la même raison, on peut dans les circonstances actuelles, fixer à 30,000 francs le traitement du cardinal sans rien préjuger quant aux fonctionnaires de l’ordre civil.

En ce qui concerne les fonctionnaires de l’ordre civil, nous avons pensé que toute majoration de traitement devait être ajournée parce que, étant dues à plusieurs ordres de fonctionnaires, ces majorations auraient pu entraîner un surcroît de dépenses considérables ; mais il n’en est pas ainsi alors qu’il s’agit du traitement d’un seul cardinal. Et qu’on ne vienne pas dire que si de nouveaux cardinaux venaient à être nommés en Belgique, le gouvernement serait obligé de leur allouer 45,000 francs à titre de frais d’installation et 9,000 francs à titre de majorations de traitement ; je pense qu’on peut dire en toute sûreté que jamais la Belgique n’aura plus d’un cardinal à la fois. En second lieu, on peut être rassuré sur les dispositions du gouvernement qui n’a aucune envie de multiplier ces sortes de dépenses.

On a dit que sans doute le gouvernement avait laissé en souffrance un certain nombre d’ecclésiastiques ayant droit à des secours pour pouvoir accorder cette allocation au cardinal.

Si les limites du budget étaient tellement étroites qu’il n’eût pas été possible de prélever cette somme sur les fonds libres, nous aurions suspendu l’allocation, et nous aurions demandé la somme nécessaire pour faire face à la dépense. Il est inexact de dire que des dépenses sont restées en souffrance, ou que si des dépenses ne sont pas restées en souffrance, c’est une raison d’opérer une réduction : de ce qu’en 1838 on a pu économiser 54,000 francs, il n’est pas sûr qu’on puisse économiser la même somme en 1839. La dépense dépend du nombre de postes qui sont remplis.

Je ne dirai rien de l’amendement de M. Gendebien, ni des considérants dont il a cru devoir le faire précéder. J’applique à cet amendements les réflexions que je viens de faire. Le gouvernement n’a entendu, en aucune manière, établir de suprématie ; personne n’a pu concevoir que l’on eût cette pensée. Si le gouvernement n’a pas cru qu’il fût de la dignité du pays d’ajourner la promotion que la cour de Rome a offerte au pays, s’il a cru qu’il ne fût pas de la dignité du pays de reculer devant une dépense de 9,000 francs, ces considérations ne peuvent donner lieu aux observations faites par les préopinants.

Plusieurs membres – La clôture ! la clôture !

M. Gendebien – J’aurais désiré pouvoir répondre au ministre. C’est une question de principe ; je ne serai pas long. Le ministre vient de dire que si les cardinaux, en France, n’ont que 25,000 francs tandis que nous en accordons 30,000, la position des cardinaux français est cependant meilleure que celle des cardinaux belges, parce que les conseils-généraux des départements peuvent accorder un subside. Ceci est inexact.

M. le président – Vous ne pouvez parler que contre la clôture.

M. Gendebien – J’ai le droit de m’étonner que le président m’interrompe, alors que la chambre ne réclame pas. En me laissant continuer pendant deux minutes encore, j’aurai fini. Si l’on ne veut pas entendre la vérité, j’en suis fâche pour ceux qui m’interrompent.

M. Verdussen – Si M. Gendebien continue, je demanderai la parole.

- La clôture est mise aux voix et adoptée.

M. le président – Un amendement a été déposé. D’après les antécédents, je vais mettre aux voix le chiffre le plus élevé : c’est celui du gouvernement, 4,016,150 fr.

M. Gendebien – Je demande la parole pour la position de la question : mon amendement doit précéder le vote du chiffre, puisqu’il est en quelque façon une question préalable.

M. de Jaegher – On peut voter la somme sans que le gouvernement soit autorisé à en faire un emploi général.

M. Verhaegen – Je viens d’apprendre qu’à l’instant même que l’on consultait la chambre sur la clôture, un amendement nouveau avait été déposé. On ne peut mettre de côté une proposition qui doit être examinée ; il serait trop tard de procéder à cet examen quand on aura voté. Cet amendement peut entraîner une question préjudicielle. On ne peut pas escamoter cet amendement.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – L’épreuve sur la clôture était commencée quand l’amendement a été déposé. La lecture de cet amendement demanderait des développements, des répliques, et absorberait le reste de la séance. Les deux opinions se sont suffisamment expliquées, et il ne faut pas violer le règlement par cela seul qu’il s’agit du culte. Nous avons des questions plus importantes que celles-là à examiner ; et je voudrais que la chambre avançât la discussion du budget de l’intérieur, parce que je suis appelé au sénat pour le budget des affaires étrangères.

M. Gendebien – Il est un fait incontestable, c’est que quand le président a demandé si l’on appuyait la clôture, l’amendement avait été déposé ; ainsi il n’y avait qu’une demande de clôture et non une résolution de clôture lorsque l’amendent a été déposé. La clôture n’est prononcée que quand on s’est levé pour et contre. Vous ne pouvez donc invoquer une fin de non-recevoir, puisque le président a eu connaissance de l’amendement avant qu’elle fût prononcée. La rigueur qu’on montre pour la forme prouve que nous avons raison sur le fonds.

M. Dubus (aîné) – Messieurs, il me semble que la question est celle de savoir si vous posez un antécédent duquel il résulterait qu’il y aura moyen de rendre inutiles les décisions par lesquelles on prononce la clôture en envoyant un amendement au bureau dès qu’il y aura demande de clôture. Si la chambre a décidé que la discussion était close, eh bien, la discussion ne peut se rouvrir, et vous ne pouvez par conséquent vous occuper de l’amendement qui exigerait qu’on rentrât dans la discussion.

M. Pirmez – L’amendement n’est pas arrivé trop tard. Il a été préparé une heure avant l’ouverture de la séance, et je l’ai montré à plusieurs de nos honorables collègues. J’étais inscrit pour prendre part à la discussion, et je devais le présenter en parlant. J’en appelle au bureau.

M. le président – M. Pirmez était inscrit. Je vais consulter la chambre sur cet incident.

- La chambre consultée décide que l’amendement ne sera pas lu.

M. Gendebien – Je laisserai voter le chambre puisque ce vote ne préjugera rien à mon amendement.

- Le chiffre de 4,016,150 francs pour le culte catholique est mis en délibération.

On procède à l’appel nominal.

78 membres sont présents.

62 votent l’adoption du chiffre.

15 votent le rejet.

1 membre s’abstient.

En conséquence, le chiffre est adopté.

Ont voté l’adoption : MM. Andries, Beerenbroeck, Bekaert-Baeckelandt, Berger, Brabant, Coppieters, Corneli, Dechamps, de Florisone, de Longrée, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Nef, de Perceval, Dequesne, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmaisières, Desmanet de Biesme, Desmet, de Terbecq, de Theux, Devaux, Doignon, Dolez, Dubus (aîné), B. Dubus, Duvivier, Eloy de Burdinne, Fallon, Frison, Hye-Hoys, Keppenne, Kervyn, Lejeune, Maertens, Manilius, Mast de Vries, Morel-Danheel, Peeters, Polfvliet, Pollénus, Raikem, A Rodenbach, C. Rodenbach, Rogier, Scheyven, Simons, Smits, Stas de Volder, Thienpont, Trentesaux, Ullens, Vandenbossche, Vandenhove, Vanderbelen, Van Hoobrouck, Verdussen, Vergauwen, Wallaert.

Ont voté le rejet ; MM. de Behr, de Jaegher, de Langhe, de Puydt, d’Hoffschmidt, Dolez, Dumortier, Frison, Gendebien, Lardinois, Lecreps, Pirmez, Seron, Troye et Verhaegen.

M. Pirson, qui s’est abstenu, énonce en ces termes les motifs de son abstention – Messieurs, d’une part, je comprends parfaitement la nécessité de voter la somme nécessaire pour les dépenses du culte catholique, et je n’ai, par conséquent, pas pu voter contre l’allocation ; mais, d’un autre côté, on nous propose une nouvelle dépense sans demander de ce chef une augmentation de crédit, quoique, cependant le chiffre voté l’année dernière ne soit pas trop élevé pour couvrir les dépenses ordinaires : c’est ce qui m’a empêche de voter en faveur de l’article.

Je dis que la somme allouée l’année dernière n’est pas trop forte, et ce qui le prouve, c’est que plusieurs personnes ont demandé des subsides soit pour des presbytères, soit pour des églises, soit pour des vicaires, sans pouvoir rien obtenir quoique leur demande fût très fondée ; moi-même j’ai sollicité pour des communes de mon arrondissement, et je n’ai rien obtenu.

M. le président – Je vais maintenant mettre aux voix l’amendement de M. Gendebien.

Plusieurs voix – L’appel nominal !

- Il est procédé à l’appel nominal ; en voici le résultat :

76 membres prennent part au vote

60 rejettent.

16 adoptent.

En conséquence, l’amendement n’est pas adopté.

Ont voté l’adoption : MM. de Behr, de Jaegher, de Langhe, de Puydt, d’Hoffschmidt, Dolez, Dumortier, Frison, Gendebien, Lardinois, Lecreps, Pirmez, Pirson, Seron, Troye et Verhaegen.

Ont voté l’adoption: MM. Andries, Beerenbroeck, Bekaert-Baeckelandt, Berger, Brabant, Coppieters, Corneli, Dechamps, de Florisone, de Longrée, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Nef, de Perceval, Dequesne, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmaisières, Desmanet de Biesme, Desmet, de Terbecq, de Theux, Devaux, Doignon, Dolez, Dubus (aîné), B. Dubus, Duvivier, Eloy de Burdinne, Hye-Hoys, Keppenne, Kervyn, Lejeune, Maertens, Manilius, Mast de Vries, Morel-Danheel, Peeters, Polfvliet, Pollénus, Raikem, A Rodenbach, C. Rodenbach, Scheyven, Simons, Smits, Stas de Volder, Thienpont, Ullens, Vandenbossche, Vandenhove, Vanderbelen, Van Hoobrouck, Verdussen, Vergauwen, Wallaert et Fallon.

Articles 2 à 4

« Art. 2. Culte protestant : fr. 80,000 »

- Adopté


« Art. 3. Culte israélite : fr. 10,000. »

- Adopté


« Art. 4. Secours : fr. 80,000. »

- Adopté.

Chapitre VI. Industrie, commerce, agriculture

Articles 1 et 2

« Art. 1er. Encouragement à l’industrie et au commerce, frais de rédaction et de publication de la statistique industrielle et commerciale : fr. 220,000. »

- Adopté


« Art. 2. Service de sauvetage et primes pour construction de navires : fr. 85,000. »

- Adopté.

Article 3

« Art. 3. Pêche nationale : fr. 200,000. »

M. Eloy de Burdinne – Messieurs, on demande 150,000 francs pour l’encouragement de la pêche de la baleine. Le moment est-il bien opportun pour entreprendre une industrie de cette espèce ?

N’avons-nous pas besoin de toutes nos ressources pour nous défendre en cas d’attaque ? Sans entrer dans plus de développements sous le rapport de l’opportunité de ce genre d’industrie, je demanderai que la proposition d’encouragement de la pêche de la baleine soit ajournée. Il n’y a pas péril dans la demeure. L’huile ne nous manque pas pour le moment ; occupons-nous des moyens d’être en mesure de soutenir notre indépendance et de repousser l’ennemi s’il se présente sur notre territoire.

Si je n’étais pas convaincu que la grande majorité de la chambre pense comme moi, sous le rapport de la pêche de la baleine, j’entrerais dans la discussion du fond de cette question, qui, d’ailleurs, fut traitée il y a deux ans. La chambre alors a refusé le crédit ou en a ajourné l’examen d’une manière plus approfondie. Cependant alors nous n’étions pas à la veille d’une guerre. L’expérience de deux ans a produits ses fruits, et il serait bien plus facile actuellement de démontrer que la pêche de la baleine ne peut être le domaine de la Belgique ; en l’encourageant, le résultat ne peut être que de donner des primes aux navigateurs belges qui feraient entrer l’huile de poisson achetée des Américains ; en d’autres termes, ce serait un commencement et un acheminement vers le système de droits différentiels.

Par ces motifs, messieurs, je demande que le crédit ne soit pas adopté, ou que, du moins, il soit ajourné à une autre année.

M. Smits – Messieurs, le crédit demandé n’a pas seulement pour objet la pêche de la baleine, mais aussi la pêche du hareng et de la morue. Quant aux 150,000 francs, qui doivent s’appliquer à la pêche de la baleine, le moment est très opprtun pour les voter, car beaucoup de négociants n’attendent que cette allocation pour organiser et préparer leurs armements. Il est incontestable que la pêche de la baleine est une industrie extrêmement intéressante, car c’est une véritable pépinière de marins, dont la Belgique a besoin, et qu’elle ne possède pas en ce moment.

Aussi a-t-on vu cette pêche encouragée dans tous les pays, en Amérique, en Hollande, en Angleterre et en dernier lieu en France. Dans ce dernier pays la pêche ne possédait alors aucun navire baleinier. Depuis lors le Hâvre en a eu jusqu’à 48. Ces 48 navires entretiennent dans le moment actuel environ 1,500 marins, 1,000 travailleurs et plus de 3,000 familles. La France reçoit en outre de cette industrie 7 à 8 millions par an. Or, messieurs, ce sont là des richesses véritables, car elles sont acquises sur la mer. La Belgique peut aussi faire l’acquisition de cette richesse, et pour cela il faut accorder des encouragements. Il faut pousser nos négociants à préparer leurs navires et les pourvoir des ustensiles nécessaires. Au reste, messieurs, il ne sera fait emploi du crédit qu’on vous demande que par une loi qui vous sera soumise, que vous examinerez et que vous rejetterez si elle tendait à imposer au pays de trop grands sacrifices.

Je pourrais déjà, à cet égard, entrer dans quelques détails. Voici quel pourrait être le système d’encouragement de la pêche de la baleine. On pourrait accorder 50 fr. par tonneau à tous navires armées pour la pêche de la baleine.

Cette prime serait générale ; mais les navires qui doubleraient le cap Horn ou franchiraient le détroit de Magellan, et qui reviendraient en Belgique après 16 mois de navigation, recevraient encore une prime supplémentaire de 40 à 50 francs. La prime qui serait accordée aux navires allant à la pêche dans le nord, ou qui doubleraient le cas de Bonne-Espérance, ne serait pas aussi considérable.

La loi à intervenir n’aurait qu’une durée de 3 ans, et à la fin de la troisième année, les primes iraient en diminuant, jusqu’à extinction totale, de manière que les sacrifices que le pays s’imposera ne seront jamais très grands, et, dans tous les cas, temporaires.

M. Van Hoobrouck de Fiennes – Messieurs, je demanderai la division de l’article. Je suis disposé à voter le surplus de 50,000 francs pour la pêche de la morue et du hareng, parce que je crois que c’est là une industrie qui offre de avantages réels, et qu’elle peut opérer du bien, puisqu’elle sert à former des marins. Il n’en est pas de même de la pêche de la baleine, il ne m’est nullement démontré que cette pêche présente des avantages réels. Un rapport adressé en 1837 au ministre de la marine en France, par les préposés à la surveillance de cette pêche, déclare qu’elle est presque entièrement anéantie. Les pêcheurs américains exercent presque exclusivement le monopole dans les mers où l’on pêche la baleine ; dès lors il deviendra difficile aux pêcheurs européens de lutter avec les pêcheurs américains. Ce motif déjà doit vous faire voir qu’il est utile d’examiner cette matière à fond.

Il existe encore un autre motif sur lequel j’appelle toute votre attention. Le projet du gouvernement, en vous demandant un subside de 150,000 francs, est d’encourager l’établissement d’une société pour la pêche de la baleine. Je crois que c’est une voie très dangereuse dans laquelle on veut entrer ; surtout l’établissement d’une société qui compte sur ses primes peut prêter à de très graves abus, principalement si cette industrie est exposée à des chances aussi multipliées que celle de la pêche de la baleine. Que feriez-vous plus tard si la société que vous auriez encouragée par un subside, et qui viendrait à éprouver des pertes ; si cette société, dis-je, vous demandait de nouveaux subsides, de nouveaux avantages ? Réellement, vous ne savez, messieurs, où un premier vote peut vous entraîner.

La pêche de la baleine est une industrie qui peut se suffire à elle-même ; c’est une pêche qu’il faut abandonner à l’industrie privée. Si l’industrie privée ne peut l’entreprendre, l’industrie de l’association s’en occupera. En tout cas, le gouvernement ne peut pas permettre l’établissement d’une société pour la pêche de la baleine, avec la perspective d’obtenir en primes un subside de 150,000 francs par an

Je crois qu’il y a lieu de renvoyer l’article concernant la pêche de la baleine, soit à une commission spéciale qui serait nommée actuellement soit à celle qui sera chargée d’examiner le projet de loi que le gouvernement se propose de présenter.

En tout cas, je demande l’ajournement du crédit de 150,000 francs.

M. A. Rodenbach – Messieurs, je voterai les 50,000 francs que l’on demande pour la pêche du hareng et de la morue, parce que c’est une industrie qui existe depuis longtemps, et qu’elle a besoin d’une protection spéciale. On vient ensuite demander 150,000 francs pour la pêche de la baleine. Mais, messieurs, il n’y a pas encore de loi à cet égard, et déjà l’on veut fixer un chiffre : cela ne me paraît pas très rationnel. Faisons d’abord une loi, et nous pourrons fixer dans cette loi le chiffre qu’il convient d’accorder. Je me joins donc à ceux qui ont demandé l’ajournement du crédit.

M. Desmet – Messieurs, nous avons des ports de mer, et cependant nous possédons peu de marins, il faut tâcher d’en créer ; c’est là le principal motif qui me fera admettre le crédit demandé. On a objecté que le crédit était exclusivement destiné à l’encouragement de la pêche à la baleine Je conviens avec l’honorable préopinant qu’il faut protéger aussi bien la pêche du hareng, de la morue que celle de la baleine, mais il faut convenir cependant aussi que la pêche de la baleine offre bien plus de difficultés que les autres pêches, et que c’est là que se forment des marins. On pourra dire peut-être que le moment est mal choisi pour faire une nouvelle dépense, mais cependant la somme de 150,000 francs dans la masse de notre budget, n’est pas une dépense tellement considérable qu’il faille reculer devant elle, eu égard aux avantages qu’elle doit procurer.

M. Eloy de Burdinne – Je n’ai pas été compris par celui des honorables préopinants qui a parlé le premier, lorsqu’il est venu dire que les 200,000 francs n’étaient pas seulement destinés à la pêche de la baleine, mais qu’ils seraient encore appliqués à la pêche de la morue et du hareng. Je crois m’être assez clairement expliqué.

Le même honorable préopinant a cité l’exemple de la France ; il a dit qu’en France l’on considérait la pêche de la baleine comme une école de navigation. Je conviens que ce peut-être là une bonne école à former des marins ; mais je demanderai si nous avons bien besoin d’une semblable école qui nous entraînerait à des dépenses considérables. Quand vous aurez des marins, l’on viendra peut-être vous demander la création d’une marine nationale. N’entreprend-on pas déjà trop en Belgique ? Faut-il entreprendre davantage et compromettre la fortune publique ?

M. le président – M. le ministre de l'intérieur propose d’apporter l’explication suivante :

« Il ne sera disposé du crédit en faveur de la pêche de la baleine qu’autant qu’une loi intervienne sur la matière. »

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Il était dans mon intention, en présentant le projet, d’en agir ainsi : les explications au tableau en font foi ; mais j’ai voulu donner aux honorables opposants la garantie, qu’une loi devra réellement intervenir, avant qu’il soit disposé du crédit.

M. Van Hoobrouck de Fiennes – Je prie la chambre d’observer que je n’ai pas voulu rejeter la demande du gouvernement, mais j’ai désiré que l’on en fît l’objet d’un examen particulier.

M. de Langhe – Messieurs, pourquoi, dans l’attente d’une loi, charger notre budget ? Pourquoi faire croire que nous serons d’avis de donner une prime ? Pourquoi faire croire aux pêcheurs de la baleine que la législature a établi un précédent par lequel elle manifeste l’intention d’accorder une prime ? c’est une question qui n’est pas du tout décidée. Je demanderai donc que l’article soit rayé du budget. Si une loi est adoptée plus tard, on pourra demander un crédit supplémentaire.

M. A. Rodenbach – L’explication de M. le ministre me fait changer d’opinion, elle est dans le sens de mes observations ?. Puisqu’il ne s’agit plus que d’un crédit éventuel, et que rien ne sera résolu que par la loi à intervenir, je voterai provisoirement la somme demandée.

M. Van Hoobrouck de Fiennes – Je maintiens ce que j’ai dit, je ne vois aucune utilité à grossir le budget de crédits éventuels. Cette question est grave et pour le prouver, il suffit de vous dire qu’en France chaque matelot employé à la pêche de la baleine coûte 1,700 francs à l’état.

- Le chiffre de 200,000 francs proposé par le gouvernement n’est pas adopté.

La chambre adopte celui de 50,000 francs.

Article 4

« Art. 4. Agriculture : 567,000 fr. »

La section centrale propose une réduction de 50,000 francs.

M. le ministre ne se rallie pas à cette réduction.

M. Dechamps, rapporteur – Messieurs, je ferai remarquer que ce n’est pas positivement une réduction que vous propose la section centrale, comme vous pouvez vous en convaincre par la lecture du rapport. Il y a eu partage dans le sein de la section centrale sur le chiffre proposé par le gouvernement et un chiffre subsidiaire a été adopté, qui réduit le crédit de 50,000 fr.

M. de Jaegher – Messieurs, les années précédentes, lors de la discussion du budget de l’intérieur on a exprimé le regret que la discussion d’une allocation dont le chiffre va toujours en augmentant ne soit pas appuyée de renseignements plus positifs sur l’état des diverses branches d’agriculture, qu’il a pour but d’encourager. Je ne veux en rien contester l’utilité des encouragements demandés, mais il est des chiffres qui ont pour objet l’encouragement de certaines branches d’agriculture dont l’utilité ou l’inutilité devrait être démontrée, aujourd’hui qu’on a cinq ou six années d’expérience.

Dans ce nombre figure l’établissement modèle de la culture du mûrier. Déjà plusieurs fois on a prétendu que le lieu de cet établissement était mal choisi, que les résultats sont nuls, qu’on ne pouvait rien en attendre de bon, et chaque fois le gouvernement s’est évertué à prouver que cet établissement promettait de bons résultats. Maintenant le directeur lui-même vient demander la suppression de son emploi, et engager à aliéner l’établissement, parce que le lieu a été mal choisi par le gouvernement précédent. Si l’on se bornait à la note explicative du crédit demandé, je serais d’accord avec le gouvernement ; mais s’il est ajouté qu’on se réserve de proposer une loi pour l’achat d’un nouvel établissement dans un terrain mieux choisi. D’après ce que la chambre vient de décider à l’égard de la pêche de la baleine, je crois qu’il y a lieu d’ajourner jusqu’à la discussion de la loi annoncée, le crédit de 20 mille francs demandé.

Il est vrai que si la loi est adoptée, il ne sera pas fait usage du crédit demandé pour l’établissement actuel ; mais je crois, que dans tous les cas, il serait bon de ne pas voter de fonds, attendu que s’il est reconnu que l’établissement de Meslin-l’Evêque a été mal choisi, il faut se hâter de s’en défaire ; il est inutile de voter de nouveaux fonds pour le maintenir. Il n’y a donc pas lieu de faire usage du crédit pour cet établissement. Quant à l’autre, sa création est subordonnée à la loi à présenter par le département de l’intérieur.

Je passe à la culture de la garance. Trente mille francs ont été consacrés à l’achat de plants distribués gratuitement aux cultivateurs. Il me semble que depuis le nombre d’années que les cultivateurs ont pu faire des essais, on doit savoir à quoi s’en tenir. Le gouvernement aurait dû nous donner des renseignements sur la question de savoir si cette culture prend ou ne prend pas dans certaines provinces. Il est à ma connaissance que dans certains lieux les essais faits n’ont pas complètement réussi, et d’un autre côté cette culture dérange les assolements. S’il était prouvé au contraire que cette culture est avantageuse, l’intérêt des cultivateurs suffirait pour qu’elle se propageât. Je crois qu’il est plus que temps que le gouvernement ou, à son défaut, la chambre réduise la somme allouée jusqu’à présent pour encourager ce genre de culture.

Plus loin, je trouve une somme de 250,000 pour les haras. Je désirerais savoir si le gouvernement est d’avis de créer un haras véritable, au lieu de continuer à avoir une station d’étalons. Je regretterais qu’il entrât dans la voie de créer des haras ; les essais tentés dans notre pays par plusieurs propriétaires n’ont pas été heureux. Sous l’ancien gouvernement, il existait un haras à Tervueren, ce n’était pas un établissement considérable, il est vrai, mais malgré tous les frais et soins dont il était l’objet, il n’a jamais rien produit de bon : sur 10 élèves, il y en avait un ou deux qui pouvaient être vendus avec quelques chances de bénéfice, pour l’éleveur. Il y a donc perte réelle et continuelle.

L’état est en général mauvais administrateur dans ce genre d’entreprise ; il travaille à des prix plus élevés que les particuliers, et a par conséquent d’autant moins de chances de réussite. C’est un motif pour qu’il n’entre pas dans une voie abandonnée par les premiers.

Je désire avoir des explications sur ce point, je subordonne mon vote à celles qui seront données.

M. Eloy de Burdinne – Le gouvernement nous demande 250 mille francs pour le haras. La section centrale a réduit ce chiffre à 200,000 francs. L’expérience faite de l’établissement d’un haras a-t-elle été heureuse ou malheureuse ? Si elle avait été malheureuse, je serais le premier à dire : laissons cette opération, mais je crois que l’on a lieu de s’en applaudir, et je suis à même de vous mettre dans le cas d’en juger, en vous faisant connaître le résultat obtenu depuis 1834 :

En 1834, 13 étalons ont fait 458 saillies, produit 174 poulains ;

En 1835, 20 ont fait 575 sailles et produit 221 poulains

En 1836, 41 ont fait 1,097 saillies et produit 465 poulains ;

En 1837, 52 ont fait 1,664 saillies et produit 750 poulains

En 1838, 61 étalons ont fait 2,637 saillies.

1570 poulains, voilà le nombre obtenu pendant ces quatre années. En général ceux qui ont eu des poulains provenant de ces étalons en ont été satisfais ; on a l’espoir de voir introduire dans le pays des races de chevaux qui pourront servir à la cavalerie et même au luxe et de nous affranchir de l’impôt que nous payons à l’étranger.

Messieurs, la somme de 250,000 francs n’est pas la somme qu’il serait nécessaire d’employer à un haras. C’est une somme trop minime, mais je conviens que dans le moment on ne peut pas l’augmenter ; mais la diminuer serait fort imprudent, car si vous tardez à acheter en Angleterre des chevaux pur sang et demi-sang, vous n’en aurez plus, ou, vous les payerez à des prix excessifs, la Russie et la France se portant en Angleterre et les prenant à tout prix.

J’ai une autre question à soumettre à M. le ministre. Je lui demanderai s’il ne croit pas qu’il importerait de se procurer des juments ; car bientôt il n’y aura plus moyen de s’en procurer des étalons qu’en faisant des sacrifices énormes.

Je crois en avoir dit assez pour motiver mon vote qui sera approbatif du chiffre du gouvernement.

M. Corneli – Messieurs, j’ai voté à la section centrale contre la majoration de crédit, parce que je croyais qu’il s’agissait de commencer avec ce fonds l’établissement d’un haras d’élèves, c’est-à-dire qu’on voulait ajouter aux étalons un certain nombre de juments de pur sang et de demi-sang, afin de pouvoir produire les chevaux nécessaires à la reproduction de pur et de demi-sang dans le pays même. Quoique je sois loin de réprouver pareille institution, surtout si elle était sagement conduite, et quoique je sois convaincu que, si l’on savait trouver et choisir des hommes capables de diriger pareil établissement avec intelligence, on rendrait un service immense au pays en lui conservant et acclimatant des producteurs que l’étranger nous fournit à grands frais et avec des dépenses telles que des personnes particulières ne peuvent y atteindre. Je pensai cependant que le moment n’était pas bien choisi pour tel haras, qui, selon moi, doit coûter des sommes très fortes, et qui, une fois établi, exige des conditions d’existence qu’on ne rencontre point ou très difficilement en Belgique. Ce que M. de Jaegher a dit prouve qu’on a mal dirigé les essais tentés ; pour l’avenir, outre une quantité d’autres conditions, la première c’est la bonne direction, et, me semble, beaucoup d’argent.

Mais j’ai été depuis mieux instruit ; il ne s’agit pour le moment aucunement de tout cela, les sommes demandées doivent servir à l’entretien des étalons qui sont au dépôt, pour les mettre dans des loges plus spacieuses et mieux séparées, choses, selon l’expérience bien constatées des Anglais, essentiellement nécessaires à la conservation des étalons. Il faudra aussi faire l’acquisition d’un certain nombre encore d’étalons, afin de satisfaire aux besoins les plus pressants, et afin de pouvoir en envoyer en station dans toutes les localités qui peuvent en avoir besoin.

Je reconnais trop la justice qu’il y a de faire jouir tout le pays des mêmes avantages pour m’opposer à pareille mesure, surtout, et avec d’autant plus de confiance, que ceux qui dirigent le dépôt se sot appliqués à faire de meilleurs choix, et que, d’après les dernières acquisitions, on a la certitude que les besoins ont été compris ; c’est à tel point, que les défectuosités des premiers entrés au dépôt se font remarquer. A cet égard, je n’hésite pas un instant de le dire, il faut éliminer et remplacer tout ce qui ne donne point des produits d’une supériorité incontestable ; en faire autrement serait dégoûter les producteurs, et leur inspirer une telle défiance qu’ils délaisseront complètement les étalons du gouvernement, et toutes les mesures d’amélioration seraient paralysées.

Mais si l’on continue à importer des chevaux qui, au sang et aux belles formes, réunissent l’étoffe et la vigueur nécessaires, vous exciterez l’émulation des éleveurs, et vous leur ferez comprendre ce que , jusqu’à ce jour, beaucoup d’entre eux semblent ignorer ; que c’est uniquement en adoptant et suivant les moyens d’amélioration que le gouvernement leur offre, qu’ils parviendront à créer des chevaux à tout usage.

Mais une première condition de la part des éleveurs, c’est d’avoir de bonnes juments, et sous ce rapport je me permettrai d’appeler l’attention sur la nécessité d’en procréer ; jusqu’à présent tout avait concouru pour faire négliger cette production. La première faute des éleveurs a été de vouloir amalgamer toutes les races du pays. Je sais qu’il est très difficile d’obvier aux inconvénients, et que dans tous les pays, on se plaint plus de pénurie de juments que d’étalons ; mais il doit être moins difficile de porter remède au mal chez nous où l’on trouve des types que les autres nations recherchent pour servir chez eux à la création des races perfectionnées ; et si le gouvernement trouve des hommes capables de créer et de diriger un haras d’élèves, il en trouvera j’espère qui indiqueront les moyens de parer à ces besoins et feront d’autant plus d’efforts pour les belles races du pays, qu’il est nécessaire de les conserver bien pures, tout en les améliorant afin de pouvoir, à l’exemple de nos maîtres les Anglais, procréer les belles et fortes races intermédiaires dont la production est encore une énigme chez nous, et que nous ne produirons que quand on aura, par une amélioration de nos fortes races indigènes, créé des juments propres à cet usage. Je ne me permettrai point d’indiquer les moyens à prendre et les genres d’encouragement à donner, mais je sais qu’il faut faire comprendre aux éleveurs qu’ils ont le plus grand intérêt à conserver leurs meilleurs élèves pour la reproduction, plutôt que de les vendre. Il faut stimuler leur intérêt en leur apprenant qu’une race ne s’améliore ou même ne se soutient qu’en choisissant toujours pour la reproduction les meilleurs sujets de la race. Ce n’est qu’alors que les mesures du gouvernement produiront tous les effets.

M. Van Hoobrouck – J’ai demandé la parole pour rectifier quelques-unes des idées de l’honorable député d’Audenaerde sur l’établissement modèle pour l’éducation des vers à soie et la culture du mûrier. J’ignore si l’honorable député a visité cet établissement ; pour moi, je l’ai examiné avec beaucoup de soins et chaque fois j’ai été frappé de ses grands progrès. On comprend que dans un tel établissement on ne peut obtenir instantanément des avantages aussi grands que ceux que le temps amène. Cependant il répond à l’attente du gouvernement. Les étrangers qui l’ont visité l’ont comparé à ce qu’il y a de mieux en ce genre dans les Cévennes et dans le Piémont. S’il y a quelques vices d’organisation, ils ne tiennent pas à la direction actuelle, mais à celui qui l’a fondé. Du reste, ces vices n’existent nullement, cet établissement rend les services qu’on a le droit d’en attendre. D’ailleurs, ce n’est pas seulement pour la culture du mûrier et l’éducation des vers à soie qu’il a été érigé, il a un autre but il prend tous les cocons, il file tous les cocons qu’on y envoie.

Les personnes qui élèvent des vers à soie ont compté sur l’écoulement de leur produit : si on supprimait cet établissement où elles ont compté envoyé leurs cocons, elles auraient le droit de dire qu’on les a induites en erreur. Le directeur, à la vérité, a demandé au gouvernement d’acheter cet établissement, mais c’est parce qu’il a vu dans la disposition de la chambre qu’on ne croit pas que cet établissement doive être avantageux pour propager la culture du mûrier dans le pays. Pour moi, je crois que cette culture doit être très avantageuse pour le pays ; il m’est permis de le croire d’après l’exemple de la Prusse, où elle a rapporté des millions à ceux qui s’en sont occupés. En tous cas, je crois que nous devons suspendre toute décision jusqu’à ce qu’une loi soit présentée, et je me réserve de m’expliquer sur cette loi. En attendant, il faut continuer de porter au budget la somme demandée parce que l’établissement modèle ne pourrait être supprimé sans un grand désavantage pour le pays.

M. de Jaegher – J’ai demandé quelques explications à M. le ministre. Je voudrais savoir s’il veut créer un haras ou une station d’étalons.

M. Eloy de Burdinne ne m’a pas compris. Je n’ai pas parlé contre une station d’étalons que je crois utile au pays et à l’agriculture. J’ai parlé contre le projet qu’a, je crois, le gouvernement, de fonder un haras, parce que je n’attends rien d’un pareil établissement. Il y a à cet égard des difficultés qui tiennent au climat et qui sont insurmontables.

Je répondrai à M. Van Hoobrouck qu’il serait extraordinaire que nous eussions des notions précises sur Meslin-l’Evêque, attendu que les moindres renseignements sur cet établissement sont encore à nous donner. S’il est aussi prospère qu’il le dit, je ne conçois pas que le directeur en propose la vente, qui entraînerait la suppression de son emploi. Voilà ce que je me bornerai à répondre à M. Van Hoobrouck.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Ainsi que je l’ai dit, il ne peut être question de supprimer l’établissement modèle de Meslin-l’Evêque avant qu’un autre établissement n’ait été formé à Uccle, où le personnel de Meslin-l’Evêque serait transféré, ce qui ne peut avoir lieu qu’en vertu d’une loi autorisant l’aliénation du domaine d’Uccle. Il importerait dans ce cas d’y transférer le personnel de l’établissement de Meslin-l’Evêque qu’à raison de son expérience, il serait très difficile de remplacer.

En ce qui concerne la garance, vous vous rappelez que, sur la proposition des députés des Flandres, une augmentation de crédit a été allouée dans la session dernière. Jusqu’à présent il n’a pas été accordé de primes, mais cette question est soumise à l’examen d’une commission spéciale chargée de faire une enquête sur plusieurs points qui sont restés douteux.

Quant au haras, le principal but du crédit demandé est de profiter encore des occasions qui peuvent se présenter d’acquérir des étalons et d’acquérir en outre quelques juments, si cette dépense est jugée nécessaire.

M. Desmaisières – Je demande la parole pour confirmer ce que vient de dire M. le ministre de l'intérieur.

J’ai l’honneur de président une commission spéciale chargée de faire une enquête sur la culture de la garance et de faire au ministre une proposition sur les encouragements à donner à cette culture ; cette commission est déjà fort avancée dans son travail, elle est composée de trois membres, dont deux ont déjà par-devers eux tous les documents qui sont très volumineux, et dont le troisième aura incessamment terminé son travail. J’ai cru devoir faire connaître ce fait à la chambre et au public en général, afin de rassurer es cultivateurs et les fabricants de garance, qui ne cessent de pétitionner auprès du ministère pour avoir leur juste part dans les encouragements votés dans la session dernière, postérieurement au budget.

L’article 4 « Agriculture » est mis aux voix et adopté avec le chiffre de 567,000 francs.

Chapitre VII. Lettres, sciences et arts ; fonds provenant des brevets ; service de santé

Articles 1 à 5

« Art. 1er. Lettres, sciences et arts : fr. 373,900. »

- Adopté


« Art. 2. Monument de la place des Martyrs : fr. 25,000. »

- Adopté


« Art. 3. Subsides aux villes et communes dont les ressources sont insuffisantes pour la conservations des monuments : fr. 20,000 fr. »

- Adopté


« Art. 4. Primes et encouragements aux arts et à l’industrie aux termes de la loi du 25 janvier 1817, sur les fonds provenant des droits des brevets, et frais de délivrance des brevets : fr. 25,000. »

- Adopté


« Art. 5. Service de santé : fr. 43,000. »

M. de Jaegher – L’année dernière j’ai appelé l’attention de M. le ministre de l'intérieur sur la nécessité d’accorder un subside à la ville d’Audenarde pour la conservation de sa maison de ville.

Plusieurs membres – C’est voté.

M. le président – Nous sommes arrivés à l’article « service de santé. »

M. de Jaegher – J’ai pu laisser passer le chiffre, parce qu’il était difficile de suivre M. le président.

M. le président – J’ai demandé si l’on réclamait la parole.

M. de Jaegher – Ce chiffre de 20,000 francs a été alloué par la chambre, par la considération qu’il fallait venir au secours de certaines villes pour la conservation de leurs monuments. Cependant la ville d’Audenaerde n’a pu avoir part dans ce subside. On a objecté, je le sais, que quand les provinces n’interviennent pas, le gouvernement ne peut accorder de subsides aux villes. Si la province n’est pas intervenue pour la dépense nécessaire à la conservation du monument d’Audenaerde, c’es qua sa réclamation aux états provinciaux n’a pas été appuyée par le gouvernement. Je demande si le ministre, a pris quelque mesure pour venir au secours de cette ville. Puisque le temps est passé de construire des monuments semblables à ceux de son hôtel de ville, il faut au moins les conserver et montrer aux étrangers que nous savons apprécier les chefs-d’oeuvre des arts.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – J’ai déclaré dans la précédente session qu’il ne serait fait emploi du crédit qu’autant que les administrations provinciales interviendraient dans la dépense, ce qui était de toute justice. J’ai appelé l’attention de la députation permanente du conseil provincial de la Flandre orientale sur le monument d’Audenaerde ; cette ville peut de son côté faire des démarches pour obtenir un subside du conseil provincial ; pour moi, je ne refuserai pas d’y en joindre un autre.

« Service de santé : fr. 43,000. »

- Adopté.

Chapitre VIII. Archives du royaume

Articles 1 à 5

« Art. 1er. Frais d’administration. Personnel : fr. 21,350.’

- Adopté.


« Art. 2. Frais d’administration. Matériel : fr. 2,600. »

- Adopté


« Art. 3. Frais de rédaction et publication des inventaires des archives : fr. 4,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Archives de l’état dans les provinces et frais de recouvrement de documents provenant des archives tombées das des mains privées ; frais de copie des documents concernant l’histoire nationale, existant à l’étranger : fr. 15,500. »

- Adopté


« Art. 5. Location et frais d’entretien de la maison servant de succursale au dépôt général des archives de l’état : fr. 3,162 fr. 96 c. »

- Adopté

Chapitre IX. Fêtes nationales

Article unique

« Article unique. Frais de célébration des fêtes nationales : fr. 40,000. »

Chapitre X. Récompenses honorifiques et pécuniaires

Article unique

« Art. unique. Médailles ou récompenses pécuniaires pour actes de dévouement, de courage et d’humanité : fr. 10,000. »

Chapitre XI. Statistique générale

Article unique

« Article unique. Frais de publication des travaux de la direction de la statistique générale : fr. 2,540. »

M. Smits – Il sera nécessaire de porter le chiffre à 7,500 francs.

La proposition de M. Smits est adoptée.

Chapitre XII. Frais de police

Article unique

« Article unique. Mesures de sûreté publique : fr. 80,000. »

M. Gendebien – Je me bornerai cette année à protester contre la police ; je dirai qu’après la conférence de Londres, je ne connais pas de plus grand fléau pour la Belgique que la haute police.

- Le chiffre de 80,000 francs est adopté.

Chapitre XIII. Jeux de Spa

Article unique

« Article unique. Traitement du contrôleur des jeux et autres dépenses : fr. 4,220. »

M. Dechamps, rapporteur – Il y a sans doute ici une faute d’impression, car le ministre a demandé 20,000 francs pour réparations aux bâtiments de la ville de Spa. C’est par suite de condamnations judiciaires que cette somme est réclamée.

M. Verdussen – Je demande que le chiffre de 20,000 francs qui ne doit paraître que cette année, fasse un article à part, afin qu’on ne soit pas disposé, l’an prochain, à voter 24,220 francs.

M. Demonceau – Je ne vois pas d’inconvénient à ce que le subside soit considéré comme extraordinaire. La dépense est la conséquence de condamnations judiciaires.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – La ville de Spa a obtenu ses jeux par suite de diverses concessions des gouvernements qui ont régi la principauté de Liége et la Belgique. Il a été fait un contrat entre cette ville et le gouvernement des Pays-Bas. Par suite de ce contrat il est des dépenses à supporter par le gouvernement, montant à 2,220 francs. Ensuite, comme le gouvernement a sa part dans les bénéfices assez considérables que fait l’administrateur des jeux, part qui est notée au budget des voies et moyens, on a cru juste d’accorder des subsides à la ville pour la conservation de ses monuments. Cette ville est très petite et ne pourrait subvenir seule à ses besoins. Depuis la révolution, elle n’a obtenu aucun subside, et ses monuments sont dans un grand état de dégradation : il est juste de lui accorder 20,000 francs. L’état fait une perception supérieure à cette somme.

M. A. Rodenbach – Il paraît que c’est le gouvernement hollandais que l’on a fait à la ville de Spa cette concession immorale ; c’est le prince d’Orange… On me dit que c’est le prince de Liége ; qu’importe, ce n’en est pas moins une concession immorale que celle qui ruine le peuple. Dans ma province, une ville a demandé une concession de cette nature, et j’espère que le ministre la repoussera.

M. Lardinois – Je viens appuyer l’allocation de Spa ; c’est acte de justice de lui accorder de quoi réparer ses bâtiments publics. La somme d’ailleurs, est prise sur le produit des jeux . Tout cela est payé par les étrangers.

M. A. Rodenbach – C’est un vol !

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Il faut ramener la question à son véritable point. Il ne s’agit pas ici de la question d’immoralité. Il s’agit de l’ exécution d’un contrat. Il y a un contrat qui a été fait. A la suite de ce contrat, il y a eu un procès. Il résulte de la décision que ce contrat doit suivre son cours, c’est une affaire décidée par la justice. Quand ce contrat sera expiré, viendra la question de savoir s’il faut continuer la concession à la ville de Spa.

M. Raikem – Si je ne me trompe, on avait d’abord proposé 2,000 francs, et l’on a ensuite porté le subside à 20,000 francs, de manière qu’il y a eu 18,000 francs d’augmentation.

M. Lardinois – En premier lieu, le gouvernement avait demandé 2,000 francs pour subvenir à certaines dépenses de la ville de Spa, et je suppose que cette allocation sera portée tous les ans au budget ; mais comme depuis la révolution la ville de Spa n’a rien touché de ses jeux et que, d’après le contrat, la part du bénéfice revenant à l’état devait être versée dans la caisse communale pour être employée à la restauration des monuments et à l’entretien des promenades, la commune s’est adressée au gouvernement pour obtenir un subside de 80,000 francs ; il n’en a été accordé que 20,000 ; mais c’est ce subside de 20,000 francs qu’il faut considérer comme extraordinaire et qu’il faut voter indépendamment des 2,000 fracs qui devront être alloués annuellement.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Il s’agit de savoir si la chambre veut faire deux articles, et, dans ce cas, le premier doit être de 2,220 francs, et le second de 20,000 francs.

De toutes parts - C’est cela.

La chambre consultée alloue le chiffre de 20,000 francs qui formera l’article 2 du chapitre XIII, et décide que le chiffre de l’article 1er de ce même chapitre sera de 2,220 francs.

Chapitre XIV. Dépenses imprévues

Article unique

« Article unique. Crédit ouvert pour les dépenses imprévues : fr. 30,000 fr. »

- Adopté.

Second vote

M. le président – Il y a eu des amendements, veut-on remettre le vote définitif ?

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Je pense qu’on ne doit pas considérer comme un amendement, mais comme un simple ajournement la réduction de 130,000 francs opérée sur l’article 3 du chapitre X, puisque je reproduirai la demande de ces 150,000 francs, lors de la présentation du projet de loi concernant la pêche de la baleine.

M. le président – Il y a encore un amendement qui a été adopté au chapitre XI.

Plusieurs voix – Votons de suite.

- La chambre consultée décide qu’elle passera immédiatement au vote définitif.

L’amendement qui a été apporté à l’article unique du chapitre XI, est ensuite mis aux voix et définitivement adopté.

M. Smits – Avant de voter sur l’ensemble de la loi, je vous ferai remarquer, messieurs, que le crédit voté l’année dernière pour la pèche de la morue et du hareng, n’a pas suffi ; cette industrie a pris des développements, et je crois que pour pouvoir accorder les primes qu’il était dans l’intention du législateur d’établir, il faudrait majorer de 4,000 francs le crédit alloué pour cette espèce de pêche. Rien ne s’oppose à cette rectification.

M. le ministre de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux) – Il avait été décidé, messieurs, que les primes pour la pêche du hareng et de la morue seraient provisoirement accordées d'après les anciens règlements, et que, si la somme allouée au budget était insuffisante, il serait fait une réduction proportionnelle sur les demandes des ayants-droit ; cependant, comme l’intention du législateur était de donner une somme suffisante, je crois qu’il vaut mieux d’accorder la majoration de 4,000 francs qui permettra de donner les primes conformément aux anciens règlements, c’est trop peu de chose pour faire subir une réduction à ceux qui ont le droit à la prime. Il faudrait donc porter le chiffre de l’article concernant la pêche nationale à 54,000 francs.

M. Eloy de Burdinne – Je ne sais trop pourquoi nous adopterions cette augmentation qui nous est ainsi proposée ex abrupto, et cela pourquoi ? Pour pêcher ! Si l’on nous demandait des fonds pour faire des cartouches, je les accorderais volontiers, mais ce n’est pas du poisson qu’il nous faut en ce moment, ce sont des armes./ ce n’est pas le moment de nous occuper d’augmenter le budget pour donner des primes ; qu’aux termes de ce qui a été décidé lorsque nous avons voté les primes, on les donne d’après les fonds que l’on a. Au surplus, on n’a demandé au budget que 50,000 francs pour la pêche de la morue et du hareng, je ne vois pas pourquoi l’on irait, sans examen, porter ce chiffre à 54,000 francs.

- L’augmentation de 4,000 francs est mise aux voix et adoptée.

Vote des articles et de l'ensemble du porjet

Les deux articles de la loi du budget sont ensuite mis successivement aux voix et adoptés.

On procède à l’appel nominal sur l’ensemble : en voici le résultat :

68 membres prennent part au vote.

65 adoptent.

3 rejettent.

En conséquence, le projet est adopté.

Ont voté l’adoption : MM. Andries, Beerenbroeck, Berger, Brabant, Coppieters, Corneli, de Behr, Dechamps, de Florisone, de Jaegher, de Langhe, de Longrée, de Meer de Moorsel, F. de Mérode, W. de Mérode, Demonceau, de Muelenaere, de Nef, de Puydt, de Renesse, de Roo, de Sécus, Desmaisières, Desmanet de Biesme, Desmet, de Terbecq, de Theux, Devaux, d’Hoffschmidt, Dubus (aîné), B. Dubus, Duvivier, Eloy de Burdinne, Hye-Hoys, Keppenne, Kervyn, Lardinois, Lecreps, Lejeune, Maertens, Manilius, Mast de Vries, Mercier, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Pirmez, Pirson, Polfvliet, Pollénus, Raikem, A Rodenbach, C. Rodenbach, Scheyven, Simons, Smits, Thienpont, Ullens, Vandenbossche, Vandenhove, Vanderbelen, Van Hoobrouck, Verdussen, Wallaert et Fallon.

Ont voté contre : MM. Gendebien , Seron et Verhaegen.


Sur la proposition de M. le ministre des travaux publics, la chambre met le budget de ce département à l’ordre du jour après le budget de la guerre.

La séance est levée à 4 heures et demie.