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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 27 avril 1844

(Moniteur belge n°119, du 28 avril 1844)

(Présidence de M. d’Hoffschmidt, vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse procède à l’appel nominal à midi et demi.

M. Dedecker donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Renesse présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur Velu, ancien brigadier des douanes, prie la chambre de lui faire obtenir les arrérages de sa pension. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des négociants en bois, constructeurs de navires et cordiers, à Bruges, présentent des observations contre le projet de naturaliser des navires étrangers et prient la chambre de favoriser le pavillon national. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion des conclusions de l’enquête parlementaire.


« Le sieur Rensonnet réclame l’intervention de la chambre pour obtenir une indemnité du chef des pertes qu’il a essuyées comme fermier de la barrière de Battice. »

M. Lys. - Je ne prétends point, messieurs que le pétitionnaire soit fondé en stricte justice, mais en équité, sa demande est incontestable. Sa position est extrêmement critique. Poursuivi en payement du fermage, il est à la veille d’être ruiné entièrement. Ajoutez qu’il est père d’une nombreuse famille. Je demande que cette pétition soit renvoyée à la commission avec demande d’un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.

Projet de loi créant une nouvelle commune sous le nom de Beersel

M. Huveners, au nom de la commission chargée de l’examen du projet de loi tendant à ériger en une seule commune les quatre hameaux de Groot-Beersel, Molen-Beersel, Boemerstraat et Manenstraat (Limbourg), presenté par M. Vilain XIIII, le 17 janvier dernier, présente le rapport sur ce projet de loi. Conformément aux conclusions subsidiaires de cet honorable membre, je propose le renvoi du projet de loi à M. le ministre de l’intérieur, avec invitation de le soumettre à une instruction et de réclamer du conseil provincial du Limbourg l’avis qui lui est réservé par l’art. 83 de la loi provinciale.

- Ces conclusions sont mises aux voix et adoptées.

Motion d'ordre

Dérivation de la Meuse à Liége

M. Delfosse. - Il y a trois jours des habitants de Liége ont adressé une pétition à la chambre pour réclamer l’exécution des travaux relatifs à la station intérieure, combinés avec la dérivation de la Meuse. Je rappellerai à M. le ministre des travaux publics qu’il avait promis, il y a déjà longtemps, de présenter un projet de loi pour faire sanctionner par les chambres la convention qu’il annonçait avoir conclue avec l’administration communale de Liège ; je n’ai pas à me prononcer en ce moment sur le mérite de cette convention, mais je désire savoir pourquoi le projet de loi promis par M. le ministre n’a pas encore été présenté.

M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Effectivement, dans la discussion du budget des travaux publics, j’avais annoncé que le gouvernement était tombé d’accord ou à peu près sur les conditions essentielles d’une convention à intervenir entre le gouvernement et la ville de Liège relativement à la rectification de la Meuse liée à l’établissement de la station intérieure. Il restait un point à résoudre ; c’était de proposer à la chambre la ratification de cette convention conditionnelle, parce que la ville de Liége demandait que le gouvernement fût autorisé par la législature à lui faire une avance de 600,000 fr., remboursable par annuité.

Depuis que j’ai fait connaître à la chambre l’intention du gouvernement et l’état de la question, un fait est intervenu. Ce sont les inondations dont la ville de Liége a été le théâtre cette année. Après ces inondations, la commune de Liége a pris elle-même l’initiative d’une demande d’études nouvelles. J’ai reçu le 1er avril une pétition de la régence de Liége ; je vais donner lecture de quelques passages de cette pétition :

« C’est pour atténuer autant que possible les effets des inondations futures, que nous croyons devoir appeler l’attention du gouvernement sur les travaux que les rives de la Meuse et de l’Ourthe pourraient exiger, afin de préserver la ville de Liége d’une catastrophe que tous les hommes habitués à observer le mouvement de ces rivières redoutent à juste titre, et que certains ouvrages d’art parviendraient peut-être à prévenir. Nous croyons qu’il serait à la fois prudent et équitable de prescrire aux ingénieurs de l’Etat une étude sérieuse des moyens à employer pour préserver la commune de Liège de l’invasion des eaux, etc. »

Vers la même époque, je reçus de M. l’inspecteur général, au nom du conseil, un rapport sur les résultats de ces inondations.

Voici comment s’exprimait M. l’inspecteur général :

« J’ai examiné attentivement les traces que les dernières hautes eaux ont laissées aux environs de la ville de Liège, sur les rives, depuis le pont du Val-Benoît jusqu’à Jupille. »

« Cet examen m’a conduit à reconnaître que toutes les conséquences qui pourraient résulter de l’établissement des ouvrages projetés sur la rive gauche, au quai d’Avroy, n’ont pas été suffisamment appréciés jusqu’aujourd’hui.

« Je suis convaincu que l’on s’exposerait à commettre des fautes irréparables, si, avant que des études complètes, comprenant le vallon tout entier, depuis les pieds des coteaux qui accompagnent les deux rives, aient été faites.

« Il est indispensable de combiner les moyens d’améliorer la situation des parties bâties du quai d’Avroy et de la Boverie, sans rendre plus mauvaise la position de la partie du vallon qui doit rester soumise aux inondations,

« Cette étude difficile, je crois, M. le ministre, qu’il y a urgence à l’ordonner sans aucun délai. »

La régence de Liège et le conseil des ponts et chaussées m’avaient donc demandé de nommer une commission d’ingénieurs qui fît des études nouvelles complètes sur les travaux d’art à exécuter à la Meuse. C’est pour répondre au vœu manifesté par la ville de Liège que j’ai nommé une commission composée d’ingénieurs, d’un membre de l’administration provinciale et d’un membre du conseil communal de Liége.

Cette commission s’est assemblée il y a quelques jours. J’ai reçu un rapport sur les résultats de cette première conférence.

Le gouvernement ne veut pas invoquer un fait qu’il n’a pas créé, la nécessité d’une étude nouvelle pour demander l’ajournement d’une proposition sur laquelle le gouvernement et la ville de Liége étaient presque tombés d’accord. Mais de l’examen des ouvrages à exécuter pour prévenir les inondations, il est résulté des doutes dans l’esprit de chacun.

Ainsi, je suppose un moment que les travaux projetés par l’ingénieur Girardot de Sermoise, pour la dérivation de la Meuse, eussent été exécutés avant les dernières inondations ; les terrains de la rive gauche de la Meuse eussent été élevés par les ouvrages projetés par M. Girardot de Sermoise, et dès lors il est clair que l’inondation se serait rejetée sur la rive droite, de manière à causer de grands désastres.

Le pont de la Boverie et la chaussée de Grétry ont formé une espèce de barrage qui a empêché l’inondation de se porter plus loin. Si les ouvrages projetés eussent été exécutés sur la rive gauche, il n’est pas douteux, je le répète, que l’inondation n’eût eu des résultats beaucoup plus désastreux.

Les ingénieurs et le conseil communal de la ville de Liége ont été frappés de ce fait. Des études nouvelles ont été nécessitées par ces faits nouveaux. J’ai recommandé à la commission de travailler à ces études, afin que le gouvernement soit à même, dans un bref délai, de proposer aux chambres, s’il y a lieu, le projet de ratification dont je parlais tout à l’heure.

M. Delfosse. - Je remercie M. le ministre des travaux publics des explications qu’il a données ; je ne puis cependant m’empêcher d’exprimer quelqu’étonnement de ce que les ingénieurs chargés de présenter un plan de dérivation n’aient pas pris eu considération les inondations qui pouvaient avoir lieu ; le fait des inondations n’est pas nouveau à Liège, il y en a eu à diverses époques de très fortes, et il me semble que les ingénieurs auraient dû en tenir compte dans leurs projets.

Quoi qu’il en soit, dans l’état actuel de choses, je ne puis qu’inviter M. le ministre des travaux publies à activer autant que possible les travaux de la commission, il y aura bientôt deux ans que la chambre a voté des fonds pour une station intérieure à Liége, il serait temps que l’on mît la main à l’œuvre ; M. le ministre des travaux publics doit sentir, comme nous, qu’il y a urgence.

M. Lesoinne. - Les inondations de la Meuse sont tellement connues que, pour la construction du pont du Val-Saint-Benoît, on a pris un niveau plus élevé d’un mètre que les inondations de l’année dernière. On devait donc tenir compte de ce fait, et je ne conçois pas qu’une inondation, qui peut se renouveler tous les cinq ou dix ans, nécessite un changement dans les travaux projetés. J’aurais voulu que M. l’ingénieur de Sermoise fût présent aux réunions de la commission ; il aurait pu défendre son projet ; mais il est absent.

M. de Brouckere. - Il est revenu.

M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - M. Girardot de Sermoise n’était pas présent la dernière réunion de la commission à Liége. Cet ingénieur est revenu d’un voyage en Angleterre ; il assistera aux réunions subséquentes. La commission a décidé qu’une sous-commission serait nommée pour activer les études à faire. L’inondation de cette année est un fait important ; jamais les inondations n’avaient atteint une hauteur aussi considérable. On conçoit que l’ingénieur qui avait pris pour base de ses études les inondations précédentes n’avait pu prévoir celle-là.

Rapport sur une pétition

M. de Naeyer, rapporteur. - La commission des pétitions m’a chargé de vous présenter son rapport sur une pétition datée du 12 janvier dernier, par laquelle le sieur Antoine-Alexandre de Marneffe prie la chambre de lui faire obtenir le secours accordé aux blessés de septembre, ou de voter une indemnité en sa faveur, pour les services qu’il a rendus et les sacrifices qu’il a faits dans l’intérêt de la cause nationale.

Le pétitionnaire expose, à l’appui de cette demande, qu’il a été blessé à Bruxelles dans la journée du 25 août en combattant à la tête des volontaires ; qu’à peine guéri de sa blessure, il a formé un corps franc dans la province du Limbourg, et qu’il a payé de ses propres deniers la solde des troupes qu’il commandait, d’après l’assurance qui lui fut donnée par le gouverneur du Limbourg que ses avances lui seraient remboursées ; que les nombreuses réclamations qu’il a adressées au département de la guerre pour obtenir ce remboursement ont été infructueuses ; qu’il a aussi fait inutilement des démarches auprès du département de l’intérieur pour jouir du secours accordé aux blessés de septembre, quoique les autorités consultées aient fait des rapports très favorables sur son compte ; enfin qu’il croit avoir bien mérité de son pays et que, devenu vieux et infirme, il se trouve dénué de toutes ressources.

Cette pétition a attiré l’attention spéciale de votre commission, parce que le pétitionnaire se trouve réellement dans une position malheureuse et que les titres indiqués à l’appui de sa demande se rattachent à la conquête de notre indépendance et de notre nationalité.

Déjà, en 1840, le sieur de Marneffe a adressé à la chambre une pétition par laquelle il réclamait, à la charge du trésor public, une somme considérable en remboursement de ses avances pour la solde du corps franc qu’il avait commandé dans le Limbourg. Par décision du 28 avril 1842, cette réclamation fut renvoyée au département de la guerre avec demande d’explications.

Dans son rapport adressé à la chambre sous la date du 12 mai suivant, M. le ministre de la guerre s’attache à démontrer que les prétentions assez élevées du pétitionnaire, quant aux avances qu’il soutient avoir faites, ne sauraient être accueillies en l’absence de tous moyens de justification légale ; mais M. le ministre de la guerre est loin de nier que le sieur de Marneffe ait fait preuve de bonne volonté et de dévouement pour son pays, et qu’il ait rendu des services à la cause de la révolution. Cela est d’ailleurs prouvé par des certificats et autres pièces justificatives annexés à la pétition dont il s’agit ; après un examen attentif de ces documents, on demeure convaincu que le pétitionnaire a montré du courage et du dévouement dans la journée du 25 août 1830, et qu’il a empêché plusieurs villages dans la ville de Bruxelles et au faubourg Saint-Gilles ; que, dans le courant du mois d’octobre suivant, il a formé dans le Limbourg un corps franc en agissant de concert avec les autorité administratives de cette province, qui lui donnèrent effectivement l’assurance que la paye serait accordée à ses troupes par le gouvernement de la Belgique ; qu’il a rallié dans cette même province du Limbourg, plusieurs communes à la cause de la révolution, tout en empêchant les réactions politiques ; enfin qu’il a été en relation avec le gouvernement provisoire en qualité de commandant de corps franc, puisque le comité central le chargea, pat une lettre datée du 30 octobre 1830, de s’entendre et de se concerter avec un autre patriote et ancien militaire, pour la prise de Venloo, en l’engageant toutefois à ne pas négliger l’objet principal de sa mission, qui était de propager la cause nationale et d’empêcher le détournement des fonds publics au profit du gouvernement déchu. Il est d’ailleurs évident que les services rendus par le sieur de Marneffe, ont nécessité des sacrifices de sa part ; or, il ne paraît pas qu’il ait reçu, jusqu’à ce jour d’autre indemnité qu’une somme de cent florins, qui lui fut donnée par le général de Chazal, en payement d’un premier état de solde ; encore ce payement n’est constaté que par l’aveu même du pétitionnaire.

Votre commission a pris aussi connaissance des rapports mentionnés dans la pétition dont il s’agit ; ces rapports sont effectivement très favorables au pétitionnaire, il y est dit qu’il ne peut être comparé à ces pétitionnaires qui sollicitent continuellement des secours sans y avoir aucun titre particulier ; qu’il s’est parfaitement distingué pendant les événements qui ont accompagné notre régénération politique ; que sa conduite est d’ailleurs régulière, et qu’il se trouve aujourd’hui dans un état très voisin de l’indigence. En cet état de choses, votre commission est d’avis qu’il conviendrait d’améliorer la position du pétitionnaire en lui accordant une indemnité ou gratification, et elle vous propose de renvoyer, à cet effet, la pétition aux départements de la guerre et de l’intérieur.

M. Rodenbach. - J’appuie cette requête, car, si j’ai bonne mémoire, cet homme, à la révolution, a fait parler de lui. Je sais même que, lorsqu’il était aux avant-postes, il y en avait d’autres qui ne combattaient pas et qui sollicitaient des brevets. Lui s’occupait de combattre ; il ne faisait pas le solliciteur ; il n’était pas dans les antichambres pour solliciter des brevets. Je sais qu’il n’a pas de droit, puisqu’il n’a pas de brevet ; mais on pourrait lui accorder une gratification. Comme on le dit dans le rapport, il est infirme. Il paraît que des personnes qui étaient menacées de pillage fournissent à sa subsistance, et, par reconnaissance lui donnent en quelque sorte la charité. A la révolution, il était commandant d’un corps franc.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.

Commission d'enquête parlementaire sur la situation du commerce extérieur

Conclusions et formation du comité secret

- La séance publique est levée à une heure. La chambre se forme en comité secret.