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Congrès
national de Belgique
Séance du
samedi 5 mars 1831
Sommaire
1) Communications des pièces
adressées au congrès
2) Projet de décret sur la
levée d’un emprunt de 12,000,000 de florins. Nécessité
de passer cet emprunt au vu (A) de la situation diplomatique, (B) de l’état de
l’armée belge, (C) de la position particulière de la société générale et des
domaines, (D) des conditions et de la nécessité de l’emprunt (Beyts (A), Lardinois (A), Meeûs (C), Beyts (C), de Robaulx (A, B, C,
D), d’Hanis van Cannart, Le Grelle (C), Lardinois (C), Van de Weyer (A, B), Goblet (B), Ch. de Brouckere (D, C,
commerce des vins), Osy, Beyts (C), Tielemans, Jottrand (A), Van de Weyer (A), Jottrand (A), Ch. de Brouckere (A), A. Rodenbach (A), de Pélichy van Huerne (D), Lardinois (D), d’Hanis van Cannart (D), Le Grelle (D), Osy (D), Ch. de Brouckere (D), de Theux (D), Meeûs (D))
3) Projet de décret sur le
serment à prêter par les fonctionnaires publics (François, d’Elhoungne)
(E. HUYTTENS, Discussions du
Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 2)
(page 666) (Présidence de M.
Destouvelles, premier vice-président)
La séance
est ouverte à une heure. (P. V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il
est adopté. (P. V.)
COMMUNICATION DE PIECES ADRESSEES AU CONGRES
M. Liedts, secrétaire, présente l'analyse des pièces
suivantes :
Un
habitant de Verviers demande que les procès de ce district pendants devant le
tribunal de Liége ne soient pas renvoyés au tribunal nouvellement établi à
Verviers.
Quatorze
habitants de Bruxelles se plaignent de la distribution actuelle des emplois.
La veuve
O'Kelly se plaint du retard que met la ville de Bruxelles à lui payer les
canons échus de quatre rentes.
Les
membres de l'administration communale de Mont-Saint-Guibert
demandent une interprétation de l'article de la constitution relatif aux
traitements des ministres du culte. (J. F.. 7 mars., et
P. V.)
- Renvoi à
là commission des pétitions. (P. V.)
Discussion générale
L'ordre
du jour est la suite de la discussion du projet de décret relatif à la levée
d'un emprunt de 12,000,000 de florins. (P. V.)
M. le baron Beyts ne croit pas à la nécessité
d'accorder l'emprunt dans les termes où il a été demandé. L'horizon, loin de
s'obscurcir, s'éclaircit. L'Italie,
Il craint qu'un
emprunt ne réussisse pas. Qui prêtera dans les circonstances actuelles ? et à quel taux empruntera-t-on ? La vente des domaines
rencontrera beaucoup de difficultés. On craindra d'acheter. Et puis il faudra
peut-être vendre à 50 pour cent de perte. Il accédera cependant à l'une ou à
l'autre de ces mesures, mais il faudra d'abord que la nécessité lui en soit
démontrée. (C., 7 mars.)
M. Lardinois critique également le
projet d'un emprunt ; il voit qu'on avait déjà demandé une augmentation du
budget en nous montrant la guerre comme imminente ; la guerre n'est pas déclarée,
et l'on nous en demande encore. L'opération qu'on propose sera ruineuse ; il
faudra sacrifier 17 millions pour en avoir
M. Meeûs – Messieurs,
l'honorable M. Beyts a attaqué la banque, en l'accusant de faire de gros
bénéfices, par suite des opérations dont elle est chargée pour le compte de
l'État. Je ne répondrai que deux mots : c'est que, loin de lui être profitable,
le service qu'elle fait pour l'État lui est onéreux ; à tel point qu'hier j'ai
proposé à M. le ministre de finances de vouloir bien retirer de nos mains les
caisses de l'État. La banque, au lieu de bénéficier sur le trésor, a sacrifié,
depuis deux ans, deux cent mille florins. Outre cette perte, elle est souvent
obligée de faire des avances très considérables ; c'est ainsi qu'il y a quinze
jours ou trois semaines, le ministre des finances avait disposé de 600 mille
florins de plus qu'il n'y avait dans ses caisses, et si la banque n'eût pas
fait (page 667) cette avance, le
service aurait été interrompu. Ce n'est que par patriotisme que la société
générale continue le service. Elle le continuera encore pendant quelque temps ;
mais, si plus tard elle devait le continuer, ce ne serait qu'à d'autres
conditions.
L'honorable
orateur réfute ensuite ce qu'avait dit le préopinant , relativement aux
capitaux dont la banque était redevable envers le gouvernement, et il soutient
que, loin d'être débitrice, la banque se trouvera créancière du gouvernement de
plus d'un million de florins. (I., 7 mars.)
M.
le baron Beyts – Messieurs, l'honorable préopinant, gouverneur de la banque,
est mon ami particulier ; il se plaint de moi cependant (on rit) ; mais
c'est à tort : je n'ai pas nié les services que la banque pouvait rendre au
gouvernement, mais j'ai dit que c'était un mauvais système que de charger la
banque de faire l'office d'agent et de caissier du trésor de l'État. Du reste,
un fait qui est vrai et qu'on ne contestera pas, c'est que la banque a un trentième pour faire le service dont elle est chargée,
et je me suis plaint de ce double emploi. Je suis bien aise, au surplus,
d'apprendre qu'on a le projet de lui retirer les caisses de l'État. (I., 7
mars.)
M. de Robaulx – Messieurs, ainsi que je l'avais
prévu, des symptômes de malaise se font sentir ; si la commotion qu'a éprouvée
l'Europe en est une première cause, la situation précaire de notre gouvernement
affecte plus spécialement notre crédit ;
Si notre
avenir politique était moins menaçant, si les événements ne nous pressaient pas
autant, je combattrais une mesure que je regarde comme ruineuse pour le pays,
et je dirais au ministre des finances de réparer l'incurie que l'on a mise jusqu’a
présent, et de méditer un système financier, si facile à établir dans un pays
aussi riche qu'est le nôtre ; je lui dirais : « Sondez les ressources du pays,
et ne recourez pas à des moyens extrêmes ; » mais tout annonce qu'une
conflagration générale est inévitable et prochaine, nous devons fournir notre
contingent pour la défense de la cause des peuples. Notre armée a besoin d'être
augmentée et mieux organisée, et puisque des sacrifices deviennent nécessaires,
mieux vaut un emprunt négocié, tout onéreux qu'il puisse être, que d'avoir
recours à un emprunt forcé ou au papier-monnaie. Si donc la paix était
probable, je dirais : « Nous vous avons donné des crédits suffisants, et à
votre projet je réponds : Non. »
Mais la
guerre générale, la guerre des principes, la guerre des esclaves contre les
hommes libres est aujourd'hui imminente, tous les rois absolus n'ont pas eu
besoin de demander des fonds à qui que ce fût, ils se sont préparés sans bruit,
leurs armées sont sur le pied de guerre ; et nous nous attendrions la déclaration
de guerre pour faire des préparatifs... C'est l'opinion d'un des
préopinants (M. Lardinois) ; il me suffit de la signaler pour qu'elle ne puisse
être partagée par personne. Il faut, comme on l'a dit, se préparer à la guerre
si l'on veut obtenir la paix.
Les
besoins de fonds existent donc pour parvenir à compléter notre armée et les
préparatifs nécessaires, il s'agit de trouver moyen de créer des ressources.
Un emprunt
paraît au premier abord être peu praticable dans un moment où non seulement
notre pays, mais toute l'Europe, est dans un état de malaise ;
jusqu'aujourd'hui le gouvernement provisoire a profité de la situation prospère
où nous étions lors de la révolution, aujourd'hui nous commençons à sentir la
secousse, et la guerre générale, qui paraît prochaine, nous impose le de. voir de faire des sacrifices, des pertes même.
Quant aux
conditions de l'emprunt, je ne puis croire qu'il soit possible de les fixer
d'avance, car si nous imposons au gouvernement un maximum et un minimum des
sacrifices que nous autorisons, c'est le moyen d'avertir les prêteurs de la
mesure de ce qu'ils peuvent exiger, et toujours le maximum sera stipulé ; je
pense, messieurs, qu'en votant un emprunt nous devons laisser au ministre le
soin de stipuler les conditions, sous sa responsabilité, nous aurons le
droit d'être d'autant plus sévères que nous aurons été confiants.
Quant à
l'aliénation des domaines, je m'y oppose, parce que dans le moment actuel les
biens dont il s'agit sont hypothéqués à d'autres dettes, et qu'en outre la
plupart sont situés au Luxembourg ; et vu les prétentions de
Mais en
votant des fonds pour l'armée, je dois signaler au gouvernement et au congrès
les abus qui ont eu lieu dans ce département : j'appelle donc l'attention du
ministre sur l'administration des vivres et sur les marchés pour les
fournitures ; il est constant que beaucoup de plaintes ont été faites, elles
disent que ces opérations sont contractées d'une manière onéreuse, au moins la
plupart.
J'appelle l'attention
du ministre sur le nombre (page 668)
d'officiers sans troupes que je considère comme trop considérable ; je
voudrais, eu égard à la guerre probable, que ces officiers fussent employés
plus utilement, en leur donnant des commandements. Je voudrais que le nombre
des soldats fût augmenté de manière à le mettre en rapport avec celui des
officiers.
J'appelle
l'attention du ministre sur la distribution des grades dans l'armée : je
voudrais que les emplois fussent donnés à ceux qui, dès le commencement de la
révolution ou après, ont rendu des services signalés à la patrie en combattant
pour elle ; je voudrais que justice fût rendue à un grand nombre de braves qui,
depuis si longtemps, sont promenés de bureau en bureau sans jamais obtenir les
récompenses et les grades que la reconnaissance publique leur doit ; je
voudrais qu'une commission de révision examinât les titres de ceux promus et de
ceux à promouvoir, afin de réparer les fautes commises. Je ne crois pas qu'il y
ait lieu à renvoyer aucun officier, vu que la guerre nous oblige à en augmenter
le nombre : ainsi il sera facile de rendre à chacun ce qui lui est dû ; mais au
moins, ceux qui servent dans une arme pour laquelle ils n'ont pas les
connaissances requises pourront être mieux employés. Mais je ne provoque aucune
destitution, ce n'est pas là ma pensée, je n'aime pas ces mesures.
Lors de la
discussion du budget, j'ai déjà demandé que le ministre nous fournît la liste
ou le tableau des nominations faites dans l'armée ; je réitère aujourd'hui la
même demande : si nous votons des fonds, nous devons en connaître l’emploi,
afin, par exemple, de nous rendre compte de la disparité qui a eu lieu dans les
rapports des ministres sur le nombre des troupes ; on se rappelle en effet,
qu'un rapport portait les troupes à 40,000, l'autre à 30,000, et cela à la même
époque.
Messieurs,
vous avez jugé à propos d'établir un nouveau provisoire ; ce n'était pas mon
avis : aujourd'hui il est nécessaire de donner aidé et protection à ce
gouvernement, et de l'entourer de notre confiance. Mais si nous le traitons
avec cette faveur, si nous lui confions le soin et les moyens de consolider
notre indépendance, on sent que les ministres doivent s'attendre à nous rendre
un compte exact et sévère de ce qu'ils auront fait. Le budget, qui doit être
bientôt discuté, fournira aux députés l'occasion de prouver à leurs mandants
que la protection qu'ils accordent au gouvernement ne les empêchera pas de
soumettre l'administration au creuset de la plus sévère investigation.
Je voterai
pour l'emprunt et contre l'aliénation. (E., 7 mars.)
M. d’Hanis van Cannart
demande qu'on lui prouve
par des chiffres la nécessité de l'emprunt. (C., 7 mars.)
M.
Le Grelle – J'ai entendu dire que l'État devait plus d'un million à la banque. Cela
m'étonne beaucoup et je suis surpris que M. le ministre des finances n'ait pas
relevé ou expliqué cette assertion. (C. 7 mars.)
M. Charles de Brouckere,
ministre des finances – Je le ferai quand j'aurai la parole. (C., 7 mars.)
M. Lardinois demande la production des comptes
de la banque, arrêtés au 30 octobre. (C., 7 mars.)
M. Van de Weyer, ministre des affaires étrangères – Messieurs, j'ai pensé que, dans
une discussion où il s'agit de voter un emprunt, et lorsque cet emprunt,
demandé par M. le ministre des finances, l'a été, comme on vous l'a dit dans
l'exposé des motifs, parce qu'il considérait la guerre comme imminente, j'ai
pensé, dis-je, qu'il était de mon devoir de ne pas garder le silence, et
quoique la multiplicité des affaires dont je suis chargé dans ce moment ne
m'ait pas permis de vous soumettre le rapport que j'ai soumis à M. le régent sur
notre situation, il est bon, je pense, que le congrès sache où nous en sommes
et où nous allons. (Attention et silence profond.)
M. Goblet, ministre de la guerre – Messieurs,
avant de répondre aux interpellations de détail qui m'ont été faites par divers
membres de cette assemblée, je crois devoir émettre quelques idées générales en
rapport avec le département qui m'est confié.
Messieurs,
entre des amis et des ennemis également portés à ne pas nous tirer d'embarras,
j'ai partagé toutes les opinions des ministres. L'état de marasme dans lequel
on veut nous plonger ne peut être évité qu'en reprenant l'attitude que nos
puissants adversaires nous ont fait perdre par leur entremise empressée.
Si donc on
ne veut pas nous accorder promptement une existence tolérable, il faut recourir
à la guerre. Mais, messieurs, il faut bien vous pénétrer de la nature de cette
guerre ; elle ne doit pas être méthodique, elle ne doit pas se faire à forces
égales contre un ennemi dont l'art et la nature ont pris soin de fortifier le
territoire : c'est une guerre d'invasion qu'il faut entreprendre, et ne
l'entreprendre qu'avec des masses imposantes.
Notre
armée régulière est ce que nos finances ont permis qu'elle fût. Le temps nous
manque pour la porter à la hauteur qu'il lui conviendrait pour opérer sans
auxiliaires. C'est aux volontaires, au patriotisme individuel que nous devons
faire un appel ; c'est donc en révolutionnant de nouveau le pays que nous
échaufferons toutes les passions qui engendrent les grandes actions. C'est une
dure nécessité, mais elle découle naturellement du système
de la guerre que nous avons à soutenir.
Je
n'ai point besoin, messieurs, de vous énumérer tous les genres de sacrifices
qu'elle exige ; mais aux grands maux il faut de grands remèdes ; ce n'est point
en présence des actions héroïques qui ensanglantent les rives de
Maintenant,
messieurs, en supposant que les exigences de nos ennemis ne nous forceront pas
à reprendre immédiatement les hostilités, je vais passer aux motifs qui
militent malgré cela en faveur de l'emprunt proposé.
D'autres
orateurs ont parlé des probabilités de la paix ou d'une guerre, soit générale,
soit particulière ; je me dispenserai donc de toute discussion à cet égard, et
l'existence de la paix ne m'étant pas démontrée, je dois proposer de se
préparer à la guerre. Je ne suis point d'avis que nous ne devons faire de
grands préparatifs que dans la prévision d'une guerre générale ; je crois, au
contraire, que ce n'est que dans la nécessité d'une lutte corps à corps avec
Nous
n'avons maintenant sous les armes que trois classes de miliciens, deux autres
pourraient et devraient être appelées, ce sont celles de 1830 et 1831. Dès le
15 février, j'avais obtenu du gouvernement provisoire un arrêté de rappel pour
la levée de 1830 ; mais peu de jours après je fus averti que le trésor ne
pourrait, dans le mois de mars, pourvoir aux besoins nombreux de 10,000
nouveaux soldats, et force me fut de faire révoquer l'arrêté, pour ne pas
appeler des citoyens que je ne pourrais ni vêtir ni armer.
A
plus forte raison il ne fut pas permis de penser à la levée de 1831.
Notre
armée est donc dans ce moment réduite aux trois cinquièmes de sa force
naturelle en état de guerre.
C'est là , messieurs, l'état de paix qui m'a servi de base en vous
demandant le budget, c'est avec ce peu de troupes que depuis plusieurs mois
nous satisfaisons à cet état de demi-hostilité, plus
pénible cent fois qu'une guerre bien déclarée ; ce n'est qu'à force de prudence
et d'activité que nos généraux sont parvenus à se mettre pendant autant le temps
à l'abri de toute insulte.
Vous ne
sauriez croire, messieurs, de combien (page
670) de demandes je suis assailli par les divers commandants pour augmenter
leurs forces, et combien leur responsabilité et la mienne pourraient être compromises,
si un tel état de choses devait durer plus longtemps. Je suis donc convaincu
que nos forces régulières doivent être augmentées, et alors les 12 millions de
florins demandés pour les six premiers mois de l'année en faveur du département
de la guerre ne suffiront pas ; sous ce point de vue, l'emprunt est donc incontestablement
nécessaire.
Mais ce
sacrifice n'est pas le seul à attendre de la nation : votre exemple doit
exercer une influence salutaire pour porter les autres corps constitués à ne pas
se refuser à quelques efforts de détail dont l'absence a déjà peut-être menacé
de porter des atteintes funestes à l'esprit de l'armée. Je veux parler du casernement
des troupes, auquel presque partout les régences cherchent à se soustraire, , même lorsque l'indemnité leur peut être régulièrement
payée ; et cependant, il faudrait sans doute ; que, pour un terme plus ou moins
long, elles pussent ouvrir à l'État un crédit pour cette dépense, si le
patriotisme et l'amour de la liberté ne les portaient à en faire le sacrifice
absolu.
Messieurs,
un honorable membre a désiré obtenir quelques éclaircissements sur les motifs
qui avaient déterminé la formation d'approvisionnements de vivres dans les
places fortes de
Mon
collègue des affaires étrangères a déclaré hier qu'aucune invitation officielle
ne nous avait été faite à cet égard de la part de
Peut-on,
comme on l'a fait hier, raisonnablement établir à notre égard un parallèle
juste entre
Je voue
beaucoup de reconnaissance à un honorable membre d'avoir soulevé la question de
savoir 'il n'y avait pas eu d'abus dans les nominations d'officiers.
Cette
circonstance m'autorise sans doute à examiner le mécanisme de notre
gouvernement avant l'adoption et la mise en vigueur de la constitution ; en
posant une telle question l'on semble avoir admis qu'avant cette époque il y
avait des ministres responsables. Non, messieurs, il n'en existait pas ; nous
étions les agents d'un pouvoir absolu, et par conséquent on peut nous consulter
pour s'éclairer, mais non pas nous attribuer, d'une manière absolue, ce qui
s'est fait relativement aux nominations dans chaque département
d'administration générale.
La
désignation de pouvoir absolu a pu paraître étrange en parlant de l'ensemble
des excellents citoyens qui ont su avec tant de dévouement diriger l'État
pendant six mois ; je ne puis cependant, messieurs, lui en donner d'autre, mais
je dois ajouter que jamais pouvoir absolu n'a agi avec plus de bonne foi, et si
des nominations étranges ont eu lieu, c'est qu'elles ont été nécessaires, ou
bien encore, que les individus qui en ont été l'objet avaient su en imposer par
des preuves plus ou moins certaines d'un dévouement sans bornes.
Il ne faut
pas oublier, messieurs, que d'abord les grades furent donnés en récompense de
toute espèce d'actions, sans avoir égard aux capacités ; personne plus que moi
ne s'en aperçoit, et il serait injuste de m'en assumer la responsabilité.
Quant an
nombre d'officiers sans troupes, il n'est point aussi considérable qu'on le
suppose, et pour le prouver, il suffirait d'entrer dans des détails peu intéressants
pour cette assemblée, et dont je m'abstiendrai. Je déclare en outre, messieurs,
que désormais on apportera tous les soins possibles à rectifier les abus et à
n'en plus commettre. (l., supp.,
7 mars.)
M.
de Robaulx – Je veux seulement que l'on emploie les officiers déjà nommés, mais je ne
provoquerai jamais de destitutions. (J. B., 7 mars.)
M.
Charles de Brouckere, ministre des finances – Messieurs, mes collègues vous ont
exprimé la pensée politique du gouvernement ; appelé à mon tour à défendre le
projet, je me bornerai à le justifier sous le rapport financier.
Quelques
orateurs ont opposé les rapports que j'ai eu l'honneur de vous présenter
successivement sur la situation du trésor à ceux de mon prédécesseur. Je
regrette, messieurs, de voir reproduire de pareils arguments, après les
explications que (page 671) j'ai
déjà été contraint de vous donner pour justifier le projet de décret de voies
et moyens que vous avez adopté le 26 janvier.
Il est.
vrai, comme le disait, au mois de novembre, l'administrateur général des
finances, que le solde de la trésorerie générale s'élevait, le 30 septembre 1830,
à plus de dix millions ; mais sur ce solde, il y avait des mandats en
circulation pour 861,976 florins ; il y avait des autorisations accordées aux
administrateurs du trésor pour 5,268,802 florins ; enfin il était dû pour
intérêts et remboursement à la banque 255,728 florins ; de telle manière que le
solde net ne s'élevait qu'à quatre millions environ.
Sur les
autorisations accordées, il faut défalquer 2,343,446
florins qui se trouvaient dans les caisses des agents en Hollande ; l'excédant
est employé à l'acquittement des autorisations. mêmes
en faveur de Belges.
La banque
se trouvait de plus en compte courant avec l'ancien gouvernement ; son, compte
courant offre une créance de plus de six millions à charge du ministère du waterstaat, et d'environ un million à charge de celui de la
marine.
Dans cet
état de choses, j'ai cru qu'il était prudent de ne pas entrer en liquidation
pour l'ancien solde, d'abord, parce que, si même le compte légal pouvait être
arrêté et le reliquat exigible sans s'enquérir du compte de commerce, il eût
été impossible d'exiger la réalisation du débet sans porter un coup mortel au
commerce ; en outre, parce qu'aussi longtemps que nous nourrirons l'espoir de
liquider à l'amiable avec
Mes
collègues vous l'ont dit, messieurs, nous sommes déterminés à hâter le dénouement
de notre révolution, à en finir avec
D'autres
orateurs ont cherché à me. mettre en contradiction. avec moi-même ; ils ont ou rassemblé des phrases éparses,
dont le sens ainsi a été dénaturé d'une manière peu généreuse, ou opposé mes
paroles de janvier à celles de mars. J'ai dit, j'en conviens, en présentant le
budget, que les voies et moyens présents suffiraient à couvrir les crédits
alloués ; mais, messieurs, j'ai ajouté que dans des temps de révolution chaque
jour dénonçait de nouveaux besoins, et précédemment j'avais informé le congrès
que nous n'avions trouvé ni archives, ni documents d'aucune espèce, et
qu'ainsi, au ler octobre, nous savions pertinemment
que nous n'avions pas un florin en caisse, mais nous ignorions l'importance de
nos charges, de nos dettes.
Ainsi, le
26 janvier, j'appréciai à 2,664,633 florins les
payements qui restaient à effectuer sur 1830 à la fin de l'année, tandis
qu'aujourd'hui il a été payé 2,961,723 florins sur cet exercice, et qu'il est impossible
d'évaluer l'arriéré. Dans des temps ordinaires il y aurait eu imprévoyance, incurie,
à vous présenter des évaluations aussi inexactes, mais notre position justifie
de pareilles erreurs, et les rend inévitables.
Vous-mêmes,
messieurs, vous avez ouvert des crédits pour lesquels aucun fonds n'a été
alloué : la somme. De 150,000 florins accordée pour indemnité
au gouvernement provisoire, et la liste civile du régent, sont des dépenses non
prévues par le budget des voies et moyens.
. Les
crédits ouverts aux marchands de vin s'élèvent à 1,734,762
florins, dont un tiers environ sont échus sans pouvoir être recouvrés.
Permettez-moi
de vous donner quelques explications pour justifier les mesures que j'ai prises
pour améliorer la position de cette classe de débiteurs.
Antérieurement
au 1er janvier 1830, les marchands de vins jouissaient d'un crédit permanent
pour l'acquit des droits d'accises ; ne payant ainsi qu'en proportion de la
vente des marchandises, ils réglaient leurs spéculations sur les prix et les qualités
des vins. En 1830, le mode de crédit fut changé ; les droits devinrent
exigibles à des échéances fixes, les spéculations durent se calculer sur
d'autres bases, c'est-à-dire sur l'importance de la vente dans un temps donné.
Ce
changement de législation porta un grand préjudice aux marchands qui avaient
des approvisionnements ; la révolution a cruellement empiré leur position. Vous
le savez, messieurs, depuis six mois il ne s'est vendu que très peu de vins.
Les marchands, loin donc de pouvoir réaliser leurs capitaux, doivent faire de
nouvelles avances pour payer des droits de consommation sur des marchandises
restées dans leurs magasins. Dans cet état de choses, j'ai cru devoir admettre
en entrepôt, et avec bénéfice de crédit permanent, les vins entrés avant 1830 :
mesure nécessaire pour éviter la ruine de beaucoup de débiteurs ; mesure juste,
parce qu'elle corrige la rétroactivité de la loi. J'ai même été plus loin, j'ai
accordé des délais pour le payement de l'accise sur les vins dont les marchands
sont encore détenteurs.
(page 672) Les rentrées sur les avances faites
en faveur de l'industrie étaient estimées à 410,000 florins. Il est dû
actuellement de ce chef 343,000 florins, qu'il est impossible de faire rentrer intégralement
au trésor. Quelques débiteurs ont abandonné le pays, d'autres n'offrent aucune
solvabilité, d'autres encore ont besoin de délais pour remplir leurs
engagements. Je suis persuadé, messieurs, que vous, qui avez mis un million à
la disposition du gouvernement provisoire pour venir au secours de l'industrie,
vous n'exigerez pas que l'on poursuive sans pitié le recouvrement d'avances de
même nature. Je serai inexorable sur le payement des intérêts, mais je
n'oserais agir avec autant de sévérité pour la rentrée des capitaux.
Pendant
que nous devons ainsi nous relâcher de nos prétentions, nous sommes obligés de
tenir des engagements contractés par l'ancien gouvernement. Le syndicat
d'amortissement et l'État sont associés dans une foule d'entreprises, ont
contracté des marchés de toute espèce. Ainsi, pour ne citer qu'un fait, une société
manufacturière des environs de Bruxelles s'adressa au gouvernement provisoire,
réclamant une somme de 25,000 florins
pour alimenter son établissement ; le secours fut refusé, mais on revint à la
charge avec un contrat, inconnu à l'administration du domaine, par lequel le
gouvernement était actionnaire pour 100,000 florins : force fut de payer la
somme demandée pour ne pas perdre celle de 73,000 florins fournie antérieurement.
Enfin, les
produits des passages d'eau, et surtout des barrières, ont subi des
diminutions. Les événements des mois de septembre et d'octobre ont interrompu
toute communication dans quelques provinces, et ralenti ailleurs la
circulation. Les pertes essuyées par les fermiers ne s'élèvent pas à moins de 100,000
florins.
Voilà,
messieurs, autant de mécomptes dus aux circonstances ; mais il en est de bien
plus grands encore.
Les six
premiers douzièmes de l'impôt foncier devaient rentrer le 15 février : leur
import est de quatre millions. Cependant, avant l'époque fixée pour le
recouvrement, il n'avait été fait aucune perception sur le foncier, et depuis,
jusqu'au 1er mars, la recette totale du trésor ne s'est élevée qu'à 1,528,205 florins.
Il faut
bien l'avouer, puisqu'on nous a mis dans une fausse position en s'attaquant à
la banque, être passif dans le recouvrement des impôts, nous avons été obligé
de dépasser de 443,000 florins notre solde ; toutefois, je me hâte de le dire,
les rentrées des premiers jours de ce mois ont amélioré notre position. Il ne
suffit pas, pour la régularité du service, que le trésor soit en mesure de
couvrir les dépenses, il est nécessaire qu'il y ait toujours dans les caisses 1
à 2 millions, pour éviter des lenteurs et des embarras dans les payements ;
aussi, comme on vous l'a fait pressentir, la direction de la banque demande
pour continuer son service des conditions plus onéreuses pour l'État.
Quelques
orateurs ont attribué à la négligence de l'administration le peu d'empressement
que les contribuables mettent à acquitter l'impôt ; l'un deux lui a même
reproché de suivre les errements de M. Appelius.
Je dois à
la responsabilité qui pèse sur moi de vous informer, messieurs, qu'à mon entrée
au ministère j'ai formellement défendu qu'aucune circulaire, aucune mesure
générale fût prise par l'un ou l'autre des administrateurs ; toutes les instructions
émanent directement du ministre.
Autrefois,
quand un fonctionnaire élevait un doute, demandait une explication sur un point
quelconque, l'administration prenait une résolution générale, et pour peu qu'un
autre employé ne comprît pas bien la circulaire interprétative, il en
paraissait une seconde, puis une troisième. Aujourd'hui, nous abandonnons
l'exécution des lois à ceux qui en sont directement chargés, et nous nous
bornons, quand il se présente des difficultés, à donner des conseils à ceux qui
en réclament.
La lecture de la
circulaire que j'adressai le 24 février dernier à MM. les gouverneurs, vous prouvera
que, pour ce qui me concerne au moins, j'ai donné des ordres positifs pour
activer la rentrée des impôts. Jusqu'ici, je n'ai, pour ainsi dire, 1 déplacé
aucun ancien fonctionnaire, persuadé qu'il était plus que jamais nécessaire
d'avoir l'habitude des affaires et la connaissance pratique des lois
financières pour assurer le service ; mais je suis décidé à proposer la destitution
de tous les comptables ,qui, soit par mauvaise
volonté, soit par insouciance, ne mettraient pas la diligence nécessaire à
faire rentrer les contributions.
Toutefois, ne vous le
dissimulez pas, le payement anticipatif ne s'effectuera pas partout avec la
même facilité ; l'administration sera même forcée d'user de modération dans
quelques arrondissements.
(L'orateur donne
lecture du rapport du gouverneur du Luxembourg, et entre dans quelques détails
sur la position de cette province et d'une partie de celle de Limbourg.)
Je me
flatte, messieurs, d'avoir suffisamment (page
673) établi qu'il y aura des déficit considérables mais
momentanés sur les voies et moyens mis à la disposition du gouvernement,
et justifié, sous ce rapport, la nécessité de recourir à de nouveaux moyens.
Si
maintenant vous voulez prendre en considération la. possibilité
d'une guerre générale, le besoin que nous avons de terminer avec
Je ne me
suis jamais dissimulé que l'on avait mal choisi le temps pour diminuer les
impôts ; le projet que je présentais le 19 janvier au congrès, devait prévenir
une crise immédiate ; déjà alors je m' occupais de réaliser un emprunt ; des
propositions me furent faites ; l'honorable M. Osy, qui a combattu hier le
projet, n'ignorait pas mes démarches ; je l'avais consulté, ainsi que plusieurs
autres membres du congrès, et puis, pour la première fois, je lui ai entendu
soutenir qu'un emprunt n'était pas nécessaire.
L'honorable
membre vous a rappelé que l'article 2 du décret du 26 janvier devait être révisé
pendant le mois de mars ; j'aurai l'honneur de proposer un article
supplémentaire au projet pour que le gouvernement soit autorisé à rendre les
derniers douzièmes de la contribution foncière exigibles. Avant le 15 mars il
nous est impossible d'apprécier jusqu'à quel point la remise de 4 pour cent,
accordée aux contribuables qui auraient payé leur cote, pourrait dispenser de
la mise à exécution d'une mesure coercitive ; jusqu'à ce qu'il y ait un contrat
d'emprunt, il nous est de même impossible d'estimer s'il sera fait eu temps utile,
ou si la réalisation des fonds s'effectuera assez vite pour permettre qu'on
éloigne le moment où la contribution sera exigible dans son intégralité.
Des
détenteurs d'obligations de l'emprunt patriotique ont manifesté l'intention de
payer leurs cotes exigibles au 1er avril en papier. A la rigueur on ne peut pas
s'opposer à cette opération : l'arrêté qui autorise l'emprunt, permet aux
preneurs de faire usage des obligations pour le payement des contributions du
second semestre ; et l'anticipation du payement ne change pas la désignation,
la nature de l'impôt : c'est donc un nouveau déficit de 300,000 florins que le
trésor essuiera.
La faculté
de payer les six derniers douzièmes de la contribution foncière en papier,
exige qu'on restreigne la remise de 4 pour cent aux contribuables qui se
libéreront en argent.
L'emprunt,
en effet, fut contracté à raison de 6 pour cent d'intérêt au moins en principe.
La plupart des prêteurs ont versé pendant le mois de novembre, ils pourront se
rembourser au mois de mars, de telle manière qu'ils toucheront en réalité
l'intégralité de l'intérêt pour quatre à cinq mois de prêt, ou, en d'autres
termes, qu'ils auront placé leurs fonds à plus de 10 pour cent. Ce serait du
patriotisme bien froid, bien égoïste que d'exiger encore la participation à une
remise de 4 pour cent pour une anticipation de quinze jours dans le payement.
Plusieurs
membres ont témoigné le désir de connaître la nature et la quantité des
propriétés domaniales dont le gouvernement propose l'aliénation.
La dépense
de sept millions représente la valeurs de la totalité des propriétés du
domaine, et lui explique suffisamment la différence du capital que l'on propose
de réaliser par la vente, avec celui qu'on espère obtenir par un emprunt.
Ces
propriétés se composent de
Les
propriétés rurales donnent un produit annuel de 66,462 florins ; les rentes sur
les particuliers 34,403 florins, ensemble avec les bois et la houillère de Kerkraede, le tout peut s'élever à sept millions, valeur
vénale et actuelle.
Mais on
nous objecte que tous ces biens sont hypothéqués en vertu de la loi du 27
décembre 1822. Il est vrai que par cette loi le syndicat fut autorisé à lever
un emprunt de cent millions, auquel les domaines devaient servir de garantie.
Cependant,
l'arrêté du 1er avril 1830 autorisa le syndicat à contracter un nouvel emprunt
de 152,250,000 florins, et les propriétés domaniales
et les revenus du syndicat furent de nouveau donnés en garantie. Cette
disposition prouve suffisamment que nos propriétés n'ont jamais été spécialement
affectées à une opération, mais qu'elles étaient mises en avant à chaque
emprunt, qu'elles étaient destinées à servir de garantie à toutes les levées
d'argent. Nous serions donc autorisés par les antécédents à disposer de nos
domaines, si nous ne l'étions, d'ailleurs, comme l'a démontré un orateur par
les événements. En outre, je l'ai déjà dit, les domaines dont, nous proposons (page 674) l'aliénation ont été mis en
vente par l'ancien gouvernement, et n'ont pu être adjugés que par défaut
d'offres suffisantes. Ce que nous vous proposons est en harmonie avec ce qui
fut fait en 1824 et 1825 ; aujourd'hui, comme alors, l'aliénation a pour but de
diminuer la dette de l'État.
Quelques
orateurs, préférant l'emprunt, ont insisté pour connaître les motifs qui
avaient fixé la somme à douze millions. Je le répète, il nous est impossible de
mesurer avec rigueur l'étendue de nos besoins ; elle dépend des événements. Un
capital de douze millions, valeur nominale, ne vous paraîtra, sans doute, pas
exorbitant pour nous préparer à la guerre ; loin de là, vous conviendrez qu'il
serait insuffisant en cas de lutte. D'un autre côté, je dois vous informer que
les prêteurs ne veulent pas contracter pour moins d'un million de livres
sterling.
Quant aux
taux, je ne puis le fixer, parce qu'une légère différence pourrait rendre notre
proposition inexécutable, si vous le fixiez trop haut ; qu'au contraire, en le
fixant au-dessous de ce que nous espérons obtenir, les prêteurs se
prévaudraient de votre décision pour être plus exigeants. Veuillez être
convaincus que nous ne nous sommes déterminés à vous proposer un acte de
confiance que par la résolution que vous avez prise de vous séparer
immédiatement ; il nous eût été beaucoup plus agréable de pouvoir présenter à
votre sanction un contrat : non que nous puissions croire que les révélations
sur le malaise momentané puissent nuire au crédit public, mais parce qu'il nous
répugne de demander des votes de confiance.
Nous sommes
dans une position à offrir des garanties aux prêteurs, quelles que soient leurs
opinions politiques ; et ici, messieurs, je dois admettre ces suppositions
absurdes, mais qui pourraient trouver place dans l'esprit de spéculateurs
étrangers.
Ceux qui
pourraient croire à la possibilité d'une restauration, savent que
Ceux qui
entrevoient la réunion à
Ceux enfin
qui, comme nous, veulent l'indépendance de
Enfin,
messieurs, un honorable membre a déjà répondu aux orateurs qui ont combattu le
projet, en ce qui concerne la charge qu'il imposera à nos neveux.
Les emprunts sont un mal, j'en conviens, mais alors que nous
aurons légué à nos fils là liberté et l'indépendance, achetée au prix de notre
sang et des plus purs sacrifices, ils porteront avec reconnaissance une partie
du fardeau sous lequel il faut éviter que leurs pères ne succombent. Leur part
d'ailleurs sera bien faible ; nous stipulerons des termes de remboursement
assez rapprochés pour éteindre nous-mêmes la plus grande partie de la dette. (I..
supp.,
7 mars.)
M. le baron Osy demande si M. le ministre entend que
l'emprunt sera de 12 millions en tout ou si le gouvernement a besoin de 12
millions. (I., 7 mars.)
M. Charles de Brouckere,
ministre des finances répond que l'État ne sera grevé, par suite de l'emprunt, que
d'une dette de 12 millions. (I., 7 mars.)
M.
le baron Beyts – Je demande, dans le cas où l'emprunt ne réussirait qu'en
partie, si M. le ministre entend recourir à la vente des domaines pour parfaire
les sommes nécessaires aux besoins de l'État. (I., 7 mars.)
M.
Charles de Brouckere, ministre des finances – J'aurai l'honneur de répondre à l'honorable
membre qu'il y a ou dans le projet et non pas et. (On rit.) (I.,
7 mars.)
M. Tielemans, ministre de l’intérieur – L'état de ma santé ne me permet pas
de parler assez haut pour être entendu. Je réclame donc votre indulgence.
Lorsque vous avez voté les dépenses, nous espérions que les affaires du pays
seraient bientôt arrangées. Cependant le provisoire s'est prolongé et se prolonge
encore. Une somme de 300,000 florins a dû être distribuée aux communes pour
conserver la tranquillité dans les provinces. Si l'état provisoire ne s'était
pas prolongé, nous aurions pu licencier une partie de l'armée et les fusils
auraient pu servir pour la garde civique, tandis que nous avons dû en acheter
de nouveaux. (J. B., 7 mars.)
M. le baron Osy demande qu'on fasse connaître au congrès
le tableau de la répartition de la somme de 300,000 florins, et se plaint que
la ville d'Anvers n'ait reçu que 15,000 florins. (I., 7 mars.)
M. Tielemans, ministre de l’intérieur – Il est vrai que la ville d'Anvers n'a
reçu que (page 675) 15,000 florins ;
la ville de Bruxelles a reçu beaucoup plus que cela, mais on comprendra
aisément que la classe indigente a dû recevoir ici de plus grands secours, pour
prévenir les malheurs qu'auraient pu causer les mouvements populaires dans la
capitale du royaume. (I., 7 mars.)
M. le baron Osy
Je demande seulement qu'on
nous mette le compte sous les yeux. (J. B., 7 mars.)
M.
Jottrand – Je désire, connaître, avant de me décider sur mon vote, quel terme le gouvernement
peut assigner approximativement aux négociations qui doivent décider de la
reprise des hostilités avec
Pour moi,
je n'accorderai plus ma confiance qu'à charge de responsabilité pour ceux qui
en abuseraient ; or, cette responsabilité ne serait qu'un vain mot, si l'on ne
nous fixait dès aujourd'hui le terme dont on croit avoir besoin, pour connaître
s'il faudra ou non reprendre les hostilités contre
Si le ministère, après nous avoir exposé un plan, qu'e nous
approuvons tous, ne pouvait nous fixer encore le temps moral dont il croit
avoir besoin pour l'exécuter, je ne pourrais de mon côté, comme représentant de
la nation, lui confier les subsides qu'il demande. (C., 7 mars.)
M. Van de Weyer, ministre des affaires étrangères – Dans tout le cours de la
discussion, le congrès national a eu l'occasion de se convaincre que l'emprunt
est nécessaire, soit que nous conservions la paix, soit que nous devions recommencer
la guerre. Mais pour répondre plus directement à la question, je dirai qu'en
fait de négociations diplomatiques il est impossible de fixer un terme précis
où elles pourraient être terminées. La pensée du gouvernement est de réclamer fortement
l'exécution de l'armistice, la démarcation des lignes, l'évacuation de la
citadelle d'Anvers, de celle de Maestricht et de tous les autres points du
territoire de
M.
Jottrand revient
sur ce qui a déjà été dit de l'inutilité d'un emprunt, si l'on n'a pas d'autres
besoins que ceux prévus lors de la demande du dernier budget. C'est dans l'éventualité
de la continuation de la guerre contre les Hollandais qu'il est seulement
nécessaire d'allouer de nouveaux fonds, et tout le monde alors les votera avec
plaisir, car c'est le seul moyen de tirer le pays des embarras où l'ont plongé
les trois mois d'irrésolution et de mollesse du gouvernement provisoire. Mais,
encore une fois, les ministres doivent engager leur responsabilité devant le
pays, que nos affaires avec
M.
Charles de Brouckere, ministre des finances – Nous sommes tous solidaires quand
nous venons vous demander un emprunt dont nous sentons la nécessité, et je
répondrai d'abord, comme l'a fait M. le ministre des affaires étrangères, qu'il
est impossible de prévoir ou de fixer au juste le moment de la reprise des
hostilités, et voici pourquoi : nous allons demander l'exécution de l'armistice
; s'il est accepté, nous commencerons immédiatement les négociations pour la
paix définitive, pour la dette, etc. ; s'il est refusé, nous recommençons la
guerre. Tant que nous verrons que les conditions de l'armistice seront
exécutées de bonne foi de part et d'autre, nous ne ferons pas la guerre. A la
moindre infraction, nous sommes déterminés à la faire, car il est temps d'en
finir avec
L'orateur
parcourt ainsi une à une et réfute les autres objections de M. Jottrand. (I., 7
mars.)
M.
Alexandre Rodenbach – Messieurs, avec la nation la plus opiniâtre
de l'Europe, il est impossible d'en finir autrement que par la voie des armes.
Il y a cinq mois que les héros de
- La
clôture de la discussion générale est mise aux voix et prononcée. (I., 7 mars.)
Discussion des articles
La
discussion est ouverte sur les articles. (I., 7 mars.)
M. le président donne lecture de l'article 1er en ces
termes :
«
Art. 1er. La levée d'un emprunt est autorisée jusqu'à concurrence de 12
millions de florins.
« A
défaut d'emprunt, il pourra être aliéné des propriétés et des rentes du
domaine, à concurrence de 7 millions de florins. » (I., 7 mars, et A. C.)
M. le baron de Pélichy van Huerne
propose d'effectuer
l'emprunt demandé par adjudication publique. (A.)
- Cette
proposition n'est pas appuyée. (P. V.)
On
demande la division, et qu'il soit voté seulement sur le 1 er
paragraphe.
-
Adopté. (I., 7 mars.)
M. Lardinois propose de rédiger ainsi
le 1er paragraphe :
« Le
ministre est autorisé à contracter un emprunt jusqu'à concurrence de douze
millions de florins. » (A.)
M. Charles de Brouckere,
ministre des finances – Je demande qu'il soit dit : le gouvernement et non pas
le ministre. (J., 7 mars.)
M. le baron Osy propose d'ajouter aux mots : jusqu'à
concurrence, ceux-ci : d'un capital nominal. (P. V.)
M.
d’Hanis van Cannart demande s'il ne conviendrait pas de stipuler l'intérêt. (C.,
7 mars.)
M. Charles de Brouckere,
ministre des finances, répond qu'il est impossible de le faire, parce qu'il est en
négociation, et que le congrès veut se séparer aujourd'hui. (C., 7 mars.)
M. Le Grelle demande qu'on fixe l'intérêt de la
rente à 5 pour cent. (C., 7 mars.)
M. Charles de Brouckere,
ministre des finances, répond que son système est d'emprunter au pair et qu'il ne
peut pas déterminer l'intérêt. (C., 7 mars.)
M.
le baron Osy demande qu'on fixe un taux plus élevé que 5 pour cent. (C., 7
mars.)
M. d’Elhoungne appuie l'amendement de M. Le Grelle. (C., 7
mars.)
- Plusieurs
orateurs prennent encore part à la discussion. (C., 7 mars.)
M. Le Grelle retire son amendement. (C.,7 mars.)
- Le
premier paragraphe de l'article, amendé par M. Lardinois et sous-amendé par M.
le ministre des finances et M. le baron Osy, est mis aux voix et adopté en ces
termes :
« Le gouvernement est autorisé à contracter un emprunt
jusqu'à concurrence d'un capital nominal de 12 millions de florins. » (P. V.)
Le deuxième paragraphe, mis aux voix, est
rejeté. (P. V.)
M. le baron Osy
propose d'ajouter au
paragraphe premier :
« Avant la
conclusion définitive de l'emprunt, le gouvernement le soumettra à la
ratification du congrès ou de la législature. » (A.)
- Cet amendement est
appuyé. (E., 7 mars.)
M.
le baron Osy le développe en peu de mots. (E., 7 mars.)
M. Charles de Brouckere, ministre des finances, pense que si un tel amendement
était admis, le projet en lui-même deviendrait sans objet, et le gouvernement
se trouverait dans la nécessité de le retirer. (E., 7 mars.)
M.
de Robaulx trouve aussi la ratification inutile, puisqu'on a la responsabilité
ministérielle. (J. F., 7 mars.)
(page 677) - La proposition de M. le baron
Osy est rejetée. (J. F., 7 mars.)
Article
2
«
Art. 2. Il sera rendu compte au congrès ou à la législature de toutes les
opérations relatives à la négociation ou à la vente autorisée par l'article 1er,
aussitôt que l'une ou l'autre aura été effectuée. » (A. C.)
M. le baron Osy demande un changement à cet article.
(E., 7 mars.)
M. le président invite M. le baron Osy à le rédiger. (E.,
7 mars.)
M.
de Robaulx,
M. Lebeau et M. Jottrand prennent la parole. (E., 7 mars.)
- L'art. 2
est ensuite adopté avec le changement de rédaction que nécessite le rejet du §
2 de l'article 1er ; il est ainsi conçu :
« Il
sera rendu compte au congrès ou à la législature de toutes les opérations
relatives à la négociation autorisée par l'art. 1er, aussitôt que l'emprunt
aura été contracté. » (P. V.)
Article 3
M. Charles de Brouckere,
ministre des finances, propose l'article additionnel suivant :
« Le
gouvernement est autorisé à mettre à exécution le § 3 de l'art. 2 du décret du
26 janvier dernier, relatif aux six derniers douzièmes de l'impôt foncier. »
- Il
développe sa proposition en peu de mots. (E., 7 mars, et P. V.)
M. Devaux la combat. (E., 7 mars.)
- Cet
article additionnel est mis aux voix et adopté ; il forme l'article 3 du
décret. (P. V.)
M. Charles de Brouckere,
ministre des finances, propose encore une disposition additionnelle, ainsi conçue
:
« La
remise de 4 pour cent accordée par le § 2 du même article, ne sera pas faite
aux contribuables qui acquitteraient l'impôt en obligations de l'emprunt
patriotique. » (P. V.)
M.
le chevalier de Theux de Meylandt et M. Meeûs
disent que ces coupons ne jouissent pas de la remise et par conséquent que la
stipulation deviendrait inutile. (J. F., 7 mars.)
M. Jottrand combat la disposition additionnelle.
(E., 7. mars.)
M.
de Robaulx soutient que le congrès n'a pas le droit de voter une telle disposition. (J.
F., 7 mars.)
- L'article,
mis aux voix, est adopté ; il forme l'article 4 du décret. (P. V.)
Vote sur l’ensemble du décret
On
passe au vote par appel nominal sur l'ensemble du décret ; 117 membres répondent
à l'appel : 96 votent pour ; 21 contre ; en conséquence le
décret est adopté. (P. V.)
Ont
voté contre : MM. Seron, Le Grelle, Jottrand, le baron de Liedel de Well,
Lardinois, Annez de Zillebeecke, Thienpont, de Labeville, le baron Osy, le
baron de Viron, de Thier, le comte de Bergeyck, Huysman d'Annecroix, Du Bois,
d'Hanis van Cannart, Domis, Watlet, le baron Van Volden de Lombeke,
Werbrouck-Pieters, Henri Cogels, Teuwens. (C., 7 mars.)
Ont
signé la liste de présence mais n'ont pas répondu à l'appel : MM. Blomme, le
baron de Pélichy van Huerne, le comte d'Arschot, Maclagan, de Ville. (J. F., 7
mars.)
PROJET DE DECRET SUR LE SERMENT A PRETER PAR LES FONCTIONNAIRES PUBLICS
M. Alexandre Gendebien, ministre
de la justice, monte à la tribune et présente au nom de M. le régent un projet de
décret relatif au serment à prêter par les fonctionnaires publics. (I., 7 mars.)
- On passe immédiatement à la discussion du projet. (I., 7 mars.)
Article 1er
« Art. 1er.
Tous les fonctionnaires de l'ordre judiciaire et administratif, les officiers
de la garde civique et de l'armée, et en général tous les citoyens chargés d'un
ministère ou d'un service public quelconque, seront tenus, avant d'entrer en
fonctions, de prêter le serment dont la teneur suit :
« Je
jure fidélité au régent, obéissance à la constitution et aux lois du peuple
belge.»
- Adopté. (A., et P. V.)
Article 2
« Art. 2.
Ce serment sera reçu par les autorités que les lois existantes désignent à cet
effet, et dans les formes observées jusqu'ici. »
- Adopté. (A.,
et P. V.)
Article 3
« Art. 3.
Les citoyens qui seront en fonctions lors de la promulgation du présent décret,
et qui n'auront pas prêté le serment dans le mois.qui
le suivra, seront considérés comme démissionnaires. »
- Adopté. (A.,
et P. V.)
M. François propose la disposition additionnelle
suivante :
«
L'acte de prestation de serment est exempt des droits de timbre et
d'enregistrement. » (I., 7 mars.)
M. d’Elhoungne demande de restreindre (page 678) cette exemption aux fonctionnaires
non salariés. » (I., 7 mars.)
- Ces
amendements donnent lieu à une assez vive discussion. (I., 7 mars.)
M. Alexandre Gendebien, ministre
de la justice, propose l'amendement suivant :
« Les
actes de prestation de serment des fonctionnaires non salariés ou dont le
traitement est inférieur à 550 florins, seront enregistrés gratis. »
-
Adopté. (I., 7 mars, et P. V.)
Vote sur
l’ensemble
On vote par appel nominal sur l'ensemble du décret ; 108
membres répondent à l'appel : 88 votent pour, 20 contre ; en
conséquence le décret est adopté. (P. V.)
Ont
voté contre : M. Olislagers de Sipernau, l'abbé Corten, le baron Osy, le
baron de Viron, le comte de Bergeyck, le baron Joseph d'Hooghvorst, Meeûs, le
comte de Renesse, Du Bois, le comte d'Ansembourg, Domis, le baron Van Volden de
Lombeke, le chevalier de Theux de Meylandt, Werbrouck-Pieters, Henri Cogels, le
baron de Sécus (père) , le baron de Stockhem, l'abbé Boucqueau de Villeraie, le
baron Frédéric de Sécus, Le Grelle. (I., 7 mars.)
La séance
est levée à cinq heures. (P. V.)