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Chambre des représentants de Belgique
Séance du lundi 3 octobre
1831
Sommaire
1) Projet de loi obligeant
les dépositaires d’armes de guerre d’en faire la déclaration, notamment
atteinte au droit de propriété et visite domicilaire (Fallon,
Raikem, Jullien, Raikem, (+droit de révocation des bourgmestres et échevins)
Jullien, Destouvelles, Lebeau, de Theux, Brabant, H. de Brouckere, Destouvelles, Jonet, Raikem, Brabant, Jonet,
Devaux, Destouvelles, Fallon, de Theux)
2) Projet de loi sur les consuls commerciaux
étrangers
3) Projet de loi
obligeant les dépositaires d’armes de guerre d’en faire la déclaration,
notamment atteinte au droit de propriété (Leclercq, Devaux, Lebeau)
(Moniteur belge n°112, du 5 octobre 1831)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est ouverte
à une heure.
M.
Liedts,
l’un des secrétaires, donne lecture du procès-verbal, qui est adopté.
L’ordre du jour est
la suite de la discussion du projet de loi sur les armes.
Discussion des
articles
« Art. 3. Il sera procédé à la visite par deux officiers
de police judiciaire ; ils pourront se faire assister de la force
publique. »
M. Fallon propose un
paragraphe additionnel ainsi conçu :
« Les gardes
champêtres ou forestiers ne pourront faire la perquisition qu'en présence du
bourgmestre ou d'un membre de l'administration municipale par lui
délégué. »
M. le
ministre de la justice (M. Raikem) adhère à cet amendement.
M. Jullien réclame une garantie en faveur des citoyens.
Dès que la loi sera rendue, elle sera obligatoire, dit-il, et alors le foyer
domestique sera livré au dernier agent de police judiciaire. Il suffira de la
suspicion de cet agent pour visiter la demeure d’un citoyen. Je doute que, dans
le royaume d’Alger, on agisse avec moins de cérémonie. (On rit.)
Pour obvier à cet
inconvénient, l’honorable membre propose, par un amendement, que la visite soit
faite par deux officiers de police judiciaire, dont l’un sera nécessairement le
bourgmestre ou l’échevin, ou un membre du conseil municipal, et qu’il ne puisse
y être procédé que sur l’ordre écrit, soit du gouverneur de la province, soit
du procureur du Roi, soit du commissaire du district.
M.
le ministre de la justice (M. Raikem). - J’accepte
l’amendement de M. Fallon, qui me semble parer à tous les inconvénients ; quant
à celui de M. Jullien, qui veut que le bourgmestre du lieu soit toujours l’un
des officiers de police judiciaire chargé de la visite, je ne crois pas que
cela doive avoir lieu ; car il y a d’autres officiers de police qui occupent un
certain rang, et qui inspirent par eux-mêmes assez de confiance aux citoyens.
D’un autre côté, M.
Jullien veut un ordre écrit du gouverneur, du procureur du Roi ou du
commissaire de district. Je crois, messieurs, que cela est inutile, et que
toutes les garanties se trouvent dans la loi.
On a dit aussi que,
la loi étant obligatoire, les officiers de police pourraient visiter les
demeures aussitôt qu’elle serait rendue. Je n’ai qu’un mot à répondre : c’est
que la loi accorde un délai de huit jours pour faire la déclaration.
- L’amendement de M.
Fallon est ensuite adopté.
« Art. 4. Tout
officier de police judiciaire qui, sur la réquisition du gouvernement ou d’un
de ses agents, refuserait ou tarderait de procéder aux visites domiciliaires,
sera suspendu de ses fonctions, et même, le cas échéant, destitué et puni d'un
emprisonnement qui ne pourra excéder six mois ni être moindre de six
jours. »
M. Jullien. - Messieurs, il se rencontre ici une
difficulté grave. Le bourgmestre et l’échevin sont des officiers de police
judiciaire, qui peuvent être requis de faire les visites domiciliaires. Eh bien
! s’ils refusent de le faire, seront-ils passibles de suspension ou de
destitution ? Il sont élus par le peuple. Or, si vous accordiez au gouvernement
le droit de les destituer ou de les suspendre, ce serait porter atteinte au
principe de l’élection directe. Je ne suis pas de l’avis de notre honorable
collègue M. Lebeau, qui disait hier qu’on pouvait destituer l’officier de
police judiciaire sans atteindre le magistrat.
L’orateur demande
ensuite que le délai pour faire la visite domiciliaire soit déterminé.
M. Destouvelles propose d’ajouter à l’article les mots :
« sans motif reconnu valable, » et de supprimer ceux-ci : « sera
suspendu de ses fonctions, et même, le cas échéant, destitué. »
M. Destouvelles
combat aussi l’opinion émise hier par M. Lebeau.
M.
Lebeau. - Messieurs, je pense qu’il est inutile
d’insérer dans la loi que les officiers de police judiciaire pourront être
suspendus ou destitués ; de deux choses l’une : ou ces officiers sont
révocables ou ils ne le sont pas. S’ils sont révocables, ils sont à la
disposition du gouvernement, et le dire dans la loi, ce serait une
superfétation.
J’ai dit hier que,
dans certains cas, on pouvait atteindre l’officier de police judiciaire sans
atteindre le magistrat. J’ai peut-être eu tort de généraliser, mais mon
argument n’en était pas moins concluant. Je citerai un exemple : souvent on
suspend un juge d’instruction comme officier de police judiciaire, sans pour
cela lui ôter sa qualité de juge.
Je dis toutefois que
les mots « suspension et destitution » doivent sortir de l’article 4,
car vous porteriez atteinte au principe de l’élection. D’ailleurs, remarquez
bien qu’après la destitution le collège électoral nommerait presque toujours le
même magistrat, ce qui donnerait lieu à une fâcheuse collision.
Je ne crois pas non plus qu’il soit utile
d’ajouter à l’article les mots « sans motif reconnu valable, » car
les tribunaux offrent toute garantie à cet égard. Ils n’apprécient pas
seulement le fait matériel, mais l’intention du prévenu ; et, quand ils
décident qu’il n’y a pas intention coupable, le prévenu est acquitté.
Il me semble qu’il
faudrait admettre l’article avec la suppression que je viens d’indiquer.
M. de Theux pense que les
officiers de police judiciaire ne pourront être suspendus ou destitués que par
les tribunaux ; car il me semble, dit l’honorable membre, que ce sont des
peines motivées sur un délit, et l’appréciation du délit et l’application des
peines appartiennent aux tribunaux.
Quant aux
bourgmestres et à leurs assesseurs, l’orateur ne fait point de distinction pour
eux ; s’ils ont commis un délit, ils doivent être punis comme les autres.
M. Brabant. - Hier vous avez dit ce que vous entendiez par
armes de guerre ; je demande que vous déclariez aujourd’hui ce que vous entendez
par agent du gouvernement. Je crains, comme agent de la police judiciaire,
d’être forcé par un agent du gouvernement à des actes arbitraires ; et j’ai
tant vu déjà d’arbitraire, que cette crainte est bien naturelle. Je propose en
conséquence de rédiger ainsi l’article :
« Tout officier
de police judiciaire qui, sur la réquisition du gouverneur de la province, du
commissaire de district, ou du procureur du Roi, etc. »
M.
H. de Brouckere. - Les observations qu’on vient de faire
montrent que l’article 4 ne peut pas être adopté tel qu’il est. Je viens vous
en soumettre une nouvelle sur les mots « le cas échéant. » Quand le
cas échera-t-il ? On répond : lorsqu’il y aura des motifs suffisants ; mais
quels seront ces motifs ? Il est nécessaire de ne point laisser ce vague dans
la loi, car ce serait livrer les officiers de police judiciaire, je ne dirai
pas à l’arbitrage, mais à l’arbitraire des juges.
M. Destouvelles retire son amendement, mais il persiste à
demander la suppression des mots « suspension » et
« destitution. »
M.
Jonet
propose un autre amendement ayant pour but d’ajouter après ces mots :
« qui refuseraient, » ceux-ci : « sans excuse légitime. »
M.
le ministre de la justice (M. Raikem) combat les amendements de MM. Brabant et Jonet
comme étant inutiles.
M. Brabant. - Les commandants de provinces et de places
sont aussi des agents du gouvernement ; je ne pense pas que la chambre veuille
leur soumettre les affaires de police judiciaire.
- L’amendement de M.
Brabant est mis aux voix et adopté, ainsi que celui de M. Jonet.
La chambre adopte
également la suppression demandée par M. Destouvelles.
L’article 4 est
ensuite adopté en ces termes :
« Art. 4. Tout
officier de police judiciaire qui, sur la réquisition du gouverneur de la
province, du commissaire de district ou du procureur du Roi, refuserait sans
excuse légitime de procéder aux visites domiciliaires, sera puni d'un
emprisonnement qui ne pourra excéder six mois ni être moindre de six
jours. »
« Art. 5. Les
armes de guerre non déclarés seront saisis au profit de l'Etat.
« Les armes qui portent
l'une des empreintes qui ont été et sont encore en usage depuis la séparation
de la Belgique de la France pour indiquer soit l'essai, soit la réception, soit
la distribution de ces armes de la part du gouvernement, sont censées sa
propriété, et il pourra les faire saisir en tout temps. »
M. Jonet invoque la
constitution, et dit qu’on ne peut opérer de confiscations générales pas plus
que de confiscations particulières. En conséquence, il demande la suppression
de la première partie de l’article.
M. Devaux réfute cette opinion comme erronée.
M. Destouvelles propose un amendement qui est rejeté.
M. Fallon. - Je propose de remplacer
ces mots : « Les armes de guerre non déclarées seront saisies, » par
ceux-ci : « Les dépôts d’armes de guerre seront saisis, etc. »
M. de Theux demande que la
mesure soit facultative, et qu’en conséquence on mettre « pourront être
saisis. »
- Cette proposition
est rejetée.
L’amendement de M.
Fallon est mis aux voix et adopté.
L’article 5, ainsi
amendé, est ensuite adopté.
PROJET DE LOI SUR LES
CONSULS COMMERCIAUX ETRANGERS
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere) présente un projet de loi sur les consuls étrangers
commerciaux.
PROJET DE LOI
OBLIGEANT LES DEPOSITAIRES D’ARMES DE GUERRE D’EN FAIRE LA DECLARATION
Discussion des
articles
Article 6
La discussion est
reprise sur l’article 6, ainsi conçu :
« Art. 6. Il est
défendu à toute personne de vendre ou d'acheter, sans une autorisation spéciale
du ministre de la guerre, des armes de guerre ou des pièces faisant partie de
ces armes, des effets d'habillement, d'équipement ou d'armement militaire, à
moins qu'ils ne portent les marques de rebut.
« Les objets
achetés en contravention de la loi seront confisqués, et le vendeur sera puni d’un
emprisonnement qui ne pourra excéder une année, ni être moindre de quinze
jours.
« Les acheteurs,
entremetteurs et complices seront punis de la même peine d’emprisonnement, et,
en outre, d’une amende qui ne pourra être moindre de 50 florins ni excéder 500
florins. »
Cet article excite un
débat assez vif. Plusieurs amendements y sont proposés par M. Jonet et M. de Theux. Après avoir entendu plusieurs
orateurs pour ou contre les amendements, l’article est renvoyé à la section
centrale sur la demande de M.
Fallon.
Les amendements
seront imprimés et distribués.
Articles 7 à 10
Les articles 7, 8, 9 et
10 sont adoptés sans amendement dans les termes suivants :
« Art. 7. Les dépôts de cartouches à balles de calibre
non déclarés seront saisis au profit de l'Etat, et le détenteur sera puni d'un
emprisonnement de six jours à un mois, ou d'une amende de vingt à cent florins.
« Les cartouches
seront considérées comme dépôt, lorsqu'elles excéderont trente par habitant
mâle au-dessus de l'âge de quinze ans.
« La déclaration
devra être faite dans le délai fixé par l'article premier, et les articles 2, 3
et 4 seront également applicables. »
_____________
« Art. 8. Les
peines établies par la présente loi seront appliquées par les tribunaux
correctionnels. »
_____________
« Art. 9. Ils
pourront réduire ces peines, même au-dessous du minimum fixé, si les circonstances
paraissent atténuantes. Ils pourront aussi prononcer séparément l'amende ou
l'emprisonnement , sans qu'ils puissent être inférieurs aux peines de simple
police. »
« Art. 10. La
présente loi n'aura force obligatoire que jusqu'à la paix. »
A ce dernier article,
M. Leclercq a proposé un amendement ainsi conçu :
« La présente
loi n’aura force obligatoire que pendant trois mois ; elle cessera également à
la paix, si avant le terme de trois moins elle vient à être conclue. »
Cet amendement a été
combattu par M. Devaux et M. Lebeau, qui ont fait remarquer que cette loi, étant
toute de circonstance, doit être en vigueur tant qu’existeront les motifs qui
l’auront fait adopter.
L’amendement a été
rejeté.
La séance est levée à
quatre heures.