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Chambre des représentants de Belgique
Séance du lundi 16 juillet
1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi relatif aux concessions de péages, notamment sur les
voies navigables (Legrelle, Dumortier,
Barthélemy, Legrelle, Goethals, Barthélemy, Pirmez, Goethals)
3) Proposition de loi relative aux restitutions de droits sur le sel (Zoude, Verdussen, Osy,
Coghen, Zoude, Lebeau,
Osy, Coghen, A.
Rodenbach, Goethals)
3) Projet de loi fixant le traitement des membres de l’ordre judiciare.
Projet amendé par le sénat. Traitements des membres et classement des tribunaux
de première instance, entrée en vigueur (Dubus),
traitements des membres et du personnel de la cour de cassation (Jonet, A. Rodenbach, d’Elhoungne, A. Rodenbach),
des tribunaux de première instance (Lebeau, Verdussen, Dubus, Legrelle, Gendebien, d’Elhoungne, Verdussen, Jonet, de Theux, Dubus,
de Muelenaere, Osy, de Muelenaere, Jonet, de Theux, Legrelle, Dubus), du greffier de la cour de cassation (Gendebien, Lebeau, Gendebien, Dubus, Gendebien, Dubus), du greffier des
cours d’appel (Osy, Dubus), entrée en
vigueur de la loi (Dubus, Brabant,
Osy, Dubus, Lebeau,
Devaux, Taintenier, Mary, Dubus, Devaux,
Osy, de Muelenaere, Lebeau), vote sur l’ensemble (A.
Rodenbach, Dumortier, A.
Rodenbach, Dubus, Gendebien,
Dubus, Lebeau, de Muelenaere, d’Elhoungne,
Barthélemy, A. Rodenbach, Dumortier, Dubus, A. Rodenbach, d’Elhoungne, Mary, Legrelle, Davignon)
(Moniteur belge n°200, du 18 juillet 1832)
(Présidence
de M. Destouvelles.)
L’ouverture de la
séance avait été fixée à dix heures ; à onze heures M. Dellafaille fait l’appel
nominal ; 45 membres seulement sont présents.
Une heure
s’écoule, la chambre se trouve en nombre.
M. Dellafaille donne lecture du procès-verbal ; il est adopté.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
M. Liedts
présente l’analyse de deux pétitions qui sont renvoyées à la commission ; il
annonce ensuite l’envoi par M. le ministre de l’intérieur d’une liste
supplémentaire des membres de la légion d’honneur.
PROJET DE LOI RELATIF AUX CONCESSIONS DE PEAGES
Second vote des articles
Article premier
M. le président. - L’ordre du jour appelle le vote sur le projet de loi relatif aux
péages.
L’article 1er est
mis aux voix et adopté. (Voir le Moniteur du 17 juillet.)
Article 2
M. le président. donne lecture de l’article 2.
M. Legrelle. - Il y a une erreur d’impression à l’article 2...
M. le président. - C’est juste, il faut mettre jusqu’au 1er juillet
1833 au lieu de 1832.
M. Legrelle. - J’ai une
autre observation à faire, c’est que l’article 2 devrait être mis à la place de
l’artice premier, et réciproquement. C’est dans l’article 2 en effet que le
principe de la loi est posé, et l’article premier n’en est que la conséquence.
Il me semble que le principe doit être posé avant tout.
M. le président. - On fera cette transposition, car l’observation est
fort juste.
M. Dumortier.
- Il me semble aussi qu’il faudrait mettre à la fin de la loi la disposition
qui porte qu’elle ne sera exécutée que jusqu’au premier juillet 1833 ; car par
ce moyen la disposition s’appliquera à la loi tout entière, et ce sera plus
régulier.
M. Barthélemy. - Je ferai
observer que ce qui regarde les communes n’est pas temporaire ; il n’y a de
temporaire que ce qui est relatif au droit à accorder au gouvernement de faire
des concessions. La transposition n’est pas admissible.
M. Legrelle. - Il est assez indifférent que la disposition fixant
le terme pendant lequel la loi sera exécutoire, soit placée au commencement ou
à la fin de la loi ; mais il est nécessaire de dire que le gouvernement peut
concéder des péages, avant de déduire les conséquences de ce droit.
M. le président. - La chambre désire-t-elle que la disposition qui limite l’exécution
de la loi au 1er juillet 1833, soit placée à la fin de la loi ? (Oui ! oui ! Aux voix ! aux voix !)
M. Goethals.
- Je demande la parole sur l’article 2. Je propose la suppression des mots :
des fleuves et des rivières, par lesquels se termine l’article. Vous avez
accordé au gouvernement le droit de faire des concessions pour des travaux
publics, tels que routes, ponts, canaux, etc., à l’exception des fleuves et des
rivières. Vous avez reconnu qu’il y aurait inconvénient à accorder au
gouvernement la faculté de canaliser les fleuves et les rivières. Pourquoi
cette restriction ? Parce que vous avez pensé que ces canalisations pourraient
léser les intérêts des tiers. Je pense qu’il faut non seulement que la
restriction porte sur la canalisation des fleuves et des rivières, mais sur
toutes les canalisations en général, parce qu’il est impossible de faire un
canal sans froisser quelques intérêts. Les mêmes motifs doivent donc militer
pour ne permettre l’ouverture de canaux autrement que par une loi. C’est là le
but de mon amendement. (Aux voix ! aux
voix !)
M. Barthélemy. - Messieurs, il est probable que l’honorable membre
n’était pas présent à la dernière séance, où j’ai combattu l’amendement de M.
Pirmez qui ne tendant qu’à assurer le monopole des charbonnages aux houillers
de Charleroy. (Aux voix ! aux voix !)
Cet amendement serait préjudiciable aussi à la province de Brabant, en lui
interdisant l’ouverture de l’embranchement du canal qui doit joindre à
Trois-Fontaines les canaux de Bruxelles et de Louvain ; les travaux
préparatoires sont prêts depuis longtemps, et il est à
désirer qu’ils s’achèvent. On n’a admis la restriction pour les fleuves et les
rivières que pour empêcher la canalisation de l’Escaut, contre laquelle il
y a opposition ; et, pour ce qui est de
la canalisation de la Meuse, il ne s’en agira probablement pas avant 50 ans. (Aux voix ! aux voix ! La clôture !)
M. Pirmez. - Je demande la parole pour un fait personnel.
M. Goethals.
- Je demande la parole aussi. (Aux voix !
aux voix ! C’est inutile.) C’est pour un fait personnel.
Plusieurs voix. - Il n’y a rien de personnel. La clôture !
M. Goethals.
On a toujours le droit d’être entendu sur un fait personnel. (Aux voix ! aux voix !) L’honorable
préopinant a cru que je n’étais pas présent à la séance où il a combattu
l’amendement de M. Pirmez. Il s’est trompé, j’étais présent, et je me rappelle
fort bien ce qu’il a dit. Mais je n’ai pas cru devoir me rendre aux observations
qu’il a faites, et je crois que les intérêts généraux du pays me font un devoir
d’insister pour l’adoption de mon amendement. (Aux voix ! aux voix !)
M. Pirmez. - L’honorable M. Barthélemy a dit que j’avais voulus
favoriser le monopole de Charleroy. Messieurs, je n’ai pas dit un seul mot le
cela ; je n’ai prononcé le mot de Charleroy et j’ajoute qu’il n’est seulement
pas entré dans ma pensée.
- L’amendement de
M. Goethals est ensuite mis aux voix et rejeté.
Articles 3 à 7
Les articles 3, 4,
5 et 6 du projet sont ensuite adoptés sans discussion.
La disposition qui
se trouvait en tête de l’article 2 fixant le terme pendant lequel la loi sera
obligatoire, formera l’article 7 de la loi ; cet article sera aussi conçu :
« La présente loi
ne sera obligatoire que jusqu’au premier juillet 1833. »
Vote sur l’ensemble du projet
On procède à
l’appel nominal sur l’ensemble ; le projet est adopté par 46 voix contre 7.
Ont voté pour :
MM. Barthélemy, Berger, Taintenier, Boucqueau de Villeraie, Coppens,
Coppieters, Corbisier, Davignon, Dellafaille, de Muelenaere, de Nef, de Roo, de
Sécus, Destouvelles, de Terbecq, de Theux, Dewitte, Domis, Dubus, Dugniolle,
Dumortier, Hye-Hoys, Jonet, Lardinois, Lebeau, Leclercq, Lefebvre, Legrelle,
Liedts, Mary, Milcamps, Morel-Danheel, Nothomb, Olislagers, Pirmez, Polfvliet,
Poschet, Raymaeckers, Rogier, Serruys, Thienpont, Vandenhove, Verdussen,
Vuylsteke, Watlet et Zoude.
Ont voté contre :
MM. Brabant, de Haerne, Desmet, Goethals, Osy, A. Rodenbach, et Tiecken de
Terhove.
MM. Coghen et
Fallon, n’ayant pas assisté à la discussion, se sont abstenus.
L’ordre du jour
appelle la discussion du projet de loi sur l’exportation du sel.
M. Zoude. - Je demande la parole.
M. Verdussen. - Je demande la parole pour proposer la question
préalable.
M. le président. - La question préalable passant avant tout, M. Verdussen a la parole.
M. Verdussen. - Messieurs, dans une précédente séance l’honorable
M. d’Elhoungne a émis l’opinion que le projet de loi était inutile, le
gouvernement ayant le droit d’ouvrir ou de fermer comme bon lui semblait les
bureaux d’exportation. Cette observation m’a frappé, et j’ai cherché à en
vérifier l’exactitude. Je dois commencer par dire qu’un arrêté de M. le Régent,
du 25 mars 1831, porte :
« Nous baron
Surlet de Chokier, Régent de la Belgique,
« Vu les
articles 6, 37 et 313 de la loi générale du 26 août 1822 qui confèrent au
pouvoir exécutif le droit de désigner, d’établir, de changer ou de supprimer
les bureaux des douanes admises pour l’importation, l’exportation ou le
transit, soit en général, soit par rapport à certaines marchandises. »
Voilà donc une
assertion qu’il faut vérifier ; car si ce considérant est fondé, il sera vrai
de dire que la loi est totalement inutile, puisqu’il s’agit de donner au gouvernement
un droit qu’il a déjà. J’ai donc vérifié la loi générale, et voici ce que porte
d’abord l’article 6 :
« Aucunes
marchandises ne pourront être importées par mer que par les premiers postes ou
premiers bureaux d’entrée existant déjà, ou qui pourront être désignés par nous
aux embouchures des rivières, passes ou autres points de communication avec la
mer, ni être déchargées qu’en vertu de permis ou documents délivrés à cet
effet, aux lieux de déchargement désignés, et conformément aux dispositions et
sauf les exceptions contenues dans la présente loi. »
Voilà donc bien le
pouvoir exécutif revêtu du pouvoir de fixer les bureaux par où il sera permis
d’introduire des marchandises importées par mer.
Voyons maintenant
l’article 37. Il dit :
« A
l’importation par les rivières et par terre, les capitaines, bateliers,
voituriers ou autres personnes qui dirigent ou effectuent le transport des
marchandises, doivent les conduire ou présenter, et les déclarer au premier
poste ou bureau d’expédition établi sur les rivières et sur les frontières,
dans les villes et endroits qui sont. ou seront désignés par nous pour
l’importation en général que spécialement pour l’importation de marchandises
d’accises ou de quelques-unes d’entre elles. »
Encore une fois,
voilà le pouvoir exécutif investi du droit de fixer les bureaux d’expédition
par terre. Enfin voici les termes de l’article 313 :
« Aucun bureau de recette, ni premier bureau
d’entrée ou dernier de sortie, ne pourra être supprimé, déplacé ou établi sans
une autorisation spéciale de notre part ; l’arrêté pris par nous pour
l’établissement, la suppression, ou le déplacement d’un premier bureau d’entrée
ou dernier de sortie, sera inséré dans le journal officiel, etc., etc. »
D’après ces trois
articles, justement invoqués par l’arrêté de M. le Régent, il est évident que
la loi qu’on propose est inutile et qu’elle ne saurait être admise telle que la
section centrale nous l’a proposée. Je demande la question préalable.
M. Osy. - J’appuie la question préalable.
M. le ministre des finances
(M. Coghen).
- Messieurs, il est vrai que la loi générale donne au gouvernement le droit
d’ouvrir et de fermer les bureaux de douane, tant du côté de la mer que du côté
de terre. Mais comme il s’agissait dans le projet de M. Zoude de fermer tous
les bureaux à l’exception seulement de quatre, je n’ai pas voulu m’y opposer,
parce que j’ai craint qu’en m’opposant on ne fit retomber sur moi la
responsabilité et les réclamations que pourrait exciter une mesure aussi
générale. J’ai cru qu’il valait mieux que cette mesure fût décrétée par le
pouvoir législatif, et néanmoins j’ai demandé que le gouvernement pût permettre
l’exportation par d’autres bureaux, si les intérêts du commerce l’exigeaient, et
pour autant que le trésor n’en souffrirait pas. Si cependant on insiste
maintenant sur la question préalable, je ne m’opposerai pas à son adoption.
M. Zoude. - Messieurs, l’honorable M. d’Elhoungne vous a dit
que le projet était inutile ; et moi je prouve son utilité par les motifs mêmes
dont il s’est appuyé.
En effet, si les
articles 15 et 16 de la loi spéciale, que j’ai invoqués, dépendaient dans leur
exécution de telle disposition générale qui avait échappé jusqu’ici à l’attention
de l’administration financière, je me féliciterais d’un projet qui aurait fait
reconnaître un droit dont j’espère qu’on fera un bon usage ; et très
certainement, si le ministre avait cru qu’une loi l’investissait du pouvoir
d’ouvrir ou de fermer tel bureau, suivant que l’intérêt de l’Etat pourrait
l’exiger, il ne serait pas venu présenter un amendement à mon projet ; il l’eût
repoussé tout entier, par le motif de son inutilité.
Il y a plus, c’est
que jamais il n’y aurait eu lieu à projet, parce que le ministre étendant sa
bienveillance sur tous les sauniers, il n’y aurait pas eu de réclamation de
leur part, et le ministre eût conservé au trésor plusieurs centaines de mille
francs que la fraude lui enlève.
C’est cette fraude
à laquelle mon devoir m’oblige de m’opposer, et je le fais en vous la
signalant.
Maintenant, si M.
le ministre veut déclarer qu’il a le droit, comme le prétend M. d’Elhoungne,
d’ouvrir ou de fermer les bureaux lorsqu’il le trouvera convenable, sans
recourir à la législature, je consentirai à retirer mon projet, persuadé que M.
le ministre prendra des mesures qui protégeront toutes les sauneries et que sa
protection la plus efficace sera d’interdire la restitution du droit.
Mais je lui
conteste ce pouvoir en ce qui concerne un pays tout entier, ce qui fait l’objet
de mon projet ; car, s’il pouvait fermer à sa volonté tous les bureaux d’une
frontière, il enlèverait au saunier un droit que la loi lui a accordé, celui de
faire décharger son compte par exportation.
Il
peut bien allonger la route en fixant tel autre bureau de sortie que l’intérêt
du trésor exige, mais il ne peut les lui enlever tous sans violer une faveur
accordée par la loi ; s’il en était autrement, la fortune des citoyens serait
soumise à l’arbitraire ministériel.
Si le ministre a
eu le droit de fermer les divers bureaux qui ne sont ouverts qu’à la fraude, je
lui demanderai pourquoi il n’a pas usé de cette faculté.
Quel que soit le
sort de mon projet, je me résigne entièrement ; en vous le présentant, j’ai cru
faire acte de bon citoyen.
M. Lebeau. - Il ne me semble pas qu’on puisse rien objecter de
sérieux à la question préalable proposée par M. Verdussen, appuyée par M. Osy,
et que je viens appuyer à mon tour. Je ne conçois pas, messieurs, comment M. le
ministre des finances, qui dit reconnaître pleinement le droit du gouvernement
à ouvrir et fermer les bureaux de douanes, veuille, par le motif excessivement
commode de déplacer la responsabilité, consentir à ce que le gouvernement
abdique sa prérogative. Et remarquez, messieurs, qu’ici le gouvernement est,
par la nature des choses, le seul apte à user d’un pareil droit. Les lignes des
douanes sont à tout instant sujettes à se modifier ; il faut
connaître les faits qui donnent lieu aux changements, et le gouvernement seul
peut avoir cette connaissance. Aussi, par exemple, des bureaux de douanes sont
ouverts sur tel ou tel point : le génie de la fraude rend inutile ou impossible
à surveillance sur ces points ; il faut placer ailleurs les bureaux. Or, qui
connaît les faits ? Qui les peut connaître ? Le gouvernement. C’est donc lui
qui doit faire ces mutations, c’est sur lui seul qu’en doit tomber la
responsabilité ; et, si en règle générale l’exécution des lois appartient au
gouvernement, elle doit lui appartenir, à plus forte raison, en matière de
douanes : je ne vois donc pas de motif qui empêche d’accueillir la question
préalable.
M. Osy. - Je viens également appuyer la question préalable,
et je me fonde surtout pour cela sur l’amendement de M. le ministre des
finances, qui nous demande absolument la même chose que ce que la loi de 1822
lui accorde. Il veut que le gouvernement puisse permettre l’exportation par
d’autres bureaux ; or, c’est précisément le droit qu’il peut préciser dans la
loi générale. Le projet est donc inutile, et doit être rejeté.
M. le ministre des finances (M. Coghen). - Messieurs, si je ne me suis pas opposé au projet, c’est
que j’en trouvais la disposition trop générale, et je pensais que le pouvoir
législatif pouvait seul sanctionner une telle mesure. Je ne pensais pas que le
gouvernement pût fermer tous les bureaux ; mais, puisque des explications qui
viennent d’être données il résulte que le gouvernement a ce droit, je ne suis
pas disposé à diminuer le pouvoir royal et je voterai pour la question
préalable.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, il résulte de ce que vient de dire M. le
ministre que la loi générale accorde au gouvernement tous les droits qu’on
voulait lui accorder par le projet. Mais je pense que le district de Courtray
n’aura pas lieu d’être satisfait, car il est certain que les lois existantes
n’empêchent pas l’importation du sel par infiltration de ce côté. Le
gouvernement devra donc prendre d’autres mesures pour empêcher cette
infiltration. Je vais dire à M. le ministre quelles sont les mesures que le
gouvernement devrait adopter. Le sel vaut aujourd’hui fl. 4-50 les 100 kilo. ;
les droits sur la même quantité s’élèvent à fl. 8-35 environ. Lorsque les
employés des douanes saisissent 100 kil. de sel, ce sel est vendu, et
l’administration des accises commence à percevoir sur la vente le droit de 8
fl. 35, et, comme la vente n’en a produit que 4-50, il ne reste rien pour les
employés ; au contraire, ils sont obligés, quand ils font une saisie, de payer
le timbre. On sent qu’ils se montrent fort peu zélés à faire des saisies, et
les fraudeurs profitent de cette disposition.
Il
me semble qu’il faudrait donner une prime de 10 fl. par saisie quand elle aura
lieu la nuit, et de 5 fl. quand la saisie sera faite le jour. Je voudrais de
plus que de fortes amendes fussent prononcées contre les fraudeurs. On dit que
beaucoup ne pourront pas payer l’amende ; mais contre ceux-là il y a des peines
corporelles. Celles qui existent sont trop douces, puisqu’elles se bornent, je
crois, à 6 jours de prison. Je voudrais qu’elles fussent de 6 ou 8 mois, et je
crois que par ce moyen la fraude cesserait ou diminuerait beaucoup. (Aux voix ! aux voix !)
M. Goethals.
- Je serai très court. Messieurs, si j’ai appuyé le projet de loi dans notre
dernière séance, c’est que je l’avais cru absolument nécessaire au gouvernement
pour empêcher la fraude. Qu’il est à ma parfaite connaissance que l’on n’a pu
empêcher jusqu’à ce jour. Si aujourd’hui M. le ministre dit qu’il a les moyens
d’empêcher la fraude, je consentirai à l’adoption de la question préalable ;
mais je crois devoir prendre acte de la déclaration qu’il vient de faire, que
le gouvernement a tous les moyens nécessaires d’empêcher la fraude, parce que,
si elle ne cesse pas, c’est à lui qu’il faudra s’en prendre. (Aux voix ! aux voix !)
- La question
préalable est mise aux voix et adoptée.
PROJET DE LOI FIXANT LE TRAITEMENT DES MEMBRES
DE L’ORDRE JUDICIAIRE, AMENDE PAR LE SENAT
Discussion générale
L’ordre du jour
appelle la discussion sur le projet de loi relatif au traitement des membres de
l’ordre judiciaire.
M. Dubus. - Messieurs, la commission que vous avez chargée de
l’examen du projet de loi sur les traitements des fonctionnaires de l’ordre
judiciaire, qui cous a été renvoyé par le sénat dans votre séance d’hier, a
fixé son attention sur les amendements que ce projet a subis dans l’autre
chambre.
Elle fait
remarquer que l’article premier a été admis par le sénat tel qu’il avait été
voté par vous, et qu’il y a accord des deux chambres sur la fixation des
traitements des membres de la cour de cassation.
Mue par le désir
de faciliter ce bon principe sur les autres points, votre commission a
l’honneur de vous proposer d’adopter l’article 2 du nouveau projet, avec
l’adjonction d’un troisième paragraphe, qui fixé l’indemnité des conseillers
chargés de présider les assises, et sauf un léger changement de rédaction au
deuxième paragraphe ; en effet, ce paragraphe, tel qu’il est rédigé, donnerait
lieu de croire qu’il y a aujourd’hui de la différence, pour les traitements,
entre les conseillers, présidents de chambres, avocats-généraux, substituts,
greffiers et commis-greffiers des cours de Bruxelles et de Liége, tandis que
ces traitements sont les mêmes pour les deux cours.
Mais votre
commission pense qu’il n’y a pas lieu à admettre également l’article 3 du
projet amendé.
Il ne peut y avoir
qu’une opinion sur l’insuffisance évidente des traitements des membres des
tribunaux de première instance. Les suffrages ne s’étaient partagés presque
également que sur la proposition dans laquelle ces traitements doivent être
augmentés.
Il est
généralement reconnu aussi que la classification actuelle de ces tribunaux,
quant aux traitements, est vicieuse et injuste.
Dans le cas même
où l’état de nos finances exigerait de différer jusqu’au 1er janvier 1834 toute
augmentation de ces traitements, encore importerait-il de fixer dès maintenant,
et avant la réorganisation prochaine de l’ordre judiciaire, les traitements
dont les juges jouiront alors. Il faut que ceux que le gouvernement appellera à
ces importantes fonctions sachent, avant de les accepter, quel avenir la loi
leur assure.
D’ailleurs, à
quelque taux que l’on s’arrête, on ne peut différer sans injustice de placer
chaque tribunal dans la classe à laquelle il doit appartenir.
En conséquence,
votre commission estime qu’il a lieu à rétablir dans le projet l’article par
lequel vous avez divisé les tribunaux de première instance en quatre casses ;
et elle vous propose d’adopter pour traitements ceux des quatre dernières
classes du projet du gouvernement.
Des considérations
de la même nature la déterminent à insister aussi sur le maintien de la
nouvelle classification que vous aviez arrêtée pour les justices de paix,
toutefois en laissant à chaque classe les traitements qui lui appartiennent
actuellement. Les juges de paix ont d’autres émoluments que leur traitement
fixe.
Il y a lieu, par
suite, à rétablir encore dans la loi l’article que vous aviez déjà adopté sous
le numéro 6.
Le 3ème et le 9ème
ont été conservés par le sénat.
En résultat, par
le projet de loi, tel que votre commission vous propose de le modifier et de
l’arrêter, il y a économie, sur celui du gouvernement, de 58,090 fr. Et, en
mettant à part les traitements de la cour de cassation, l’augmentation de
dépense à laquelle il donnerait lieu ne s’élève qu’à 115,742 fr. 83 c. ; le
tout, en établissant les calculs sur les données que M. le ministre de la
justice avait précédemment fournies à la section centrale.
Vous apprécierez,
messieurs, si, dans ces circonstances, il y a lieu de maintenir la disposition
que vous aviez votée précédemment et qui forme l’article 8 du projet ci-joint.
Enfin, votre
commission vous propose la suppression de l’article dernier du projet amendé
par le sénat. Le pouvoir législatif est toujours le maître de réviser et de
modifier les lois qu’il porte ; sous ce rapport, la disposition est inutile.
D’un autre côté, au taux auquel sont fixés les traitements par le projet que
votre commission a l’honneur de vous soumettre, il me paraît désirable
d’appeler une révision à l’époque à laquelle notre situation financière nous
permettra d’améliorer encore le sort d’une partie des membres de l’ordre
judiciaire.
« Léopold,
Roi des Belges,
« A tous
présents et à venir, salut.
« Nous avons,
de commun accord avec les chambres, décrété et nous ordonnons ce qui suit :
« Art. 1er.
Le traitement des membres de la cour de cassation est fixé comme il suit :
« Premier
président, 14,000 fr.
« Art. 1er.
Le traitement des membres de la cour de cassation est fixé comme suit :
« Premier
président, 14,000 francs.
« Président
de chambre, 11,000
« Conseiller,
9,000
« Procureur-général,
14,000
« Avocat-général,
9,000
« Greffier,
6,000
« Commis-greffier,
3,000. »
« Art. 2. Le
traitement du premier président et du procureur-général pour les trois cours
d’appel est fixé à 9,000 fr.
« Il n’est
rien innové au traitement dont tous les autres membres des cours d’appel de
Bruxelles et de Liége jouissent actuellement.
« L’indemnité
aux conseillers, pour présider les assises ailleurs que dans les siéges de la
cour d’appel, est fixée, pour les trois cours, à 500 fr. »
« Art. 3 Les
tribunaux de première instance sont divisés en quatre classes, comprenant :
« La
première, les tribunaux d’Anvers, Bruxelles, Gand et Liége ;
« La deuxième,
les tribunaux siégeant à Arlon, Bruges, Mons, Namur, Tongres et Tournay ;
« La
troisième, les tribunaux d’Audenarde, de Charleroi, Courtray, Louvain, Malines,
Termonde, Verviers et Ypres ;
« La quatrième,
tous les autres tribunaux. »
« Art. 4. Le
traitement des membres des tribunaux de première instance est fixé comme il
suit
« Président :
première catégorie : 4,800 fr. ; deuxième catégorie : 4,200 fr. ;
troisième catégorie : 3,600 fr. ; quatrième catégorie : 3,050 fr.
« Vice-président
: première catégorie : 4,000 fr. ; deuxième catégorie : 3,500 fr. ;
troisième catégorie : - ; quatrième catégorie : -.
« Juge
d’instruction : première catégorie : 3,730 fr. ; deuxième catégorie
: 3,260 fr. ; troisième catégorie : 2,800 fr. ; quatrième catégorie :
2,450 fr.
« Juge :
première catégorie : 3,200 fr. ; deuxième catégorie : 2,800 fr. ;
troisième catégorie : 2,400 fr. ; quatrième catégorie : 2,100 fr.
« Procureur
du Roi : première catégorie : 4,800 fr. ; deuxième catégorie : 4,200
fr. ; troisième catégorie : 3,600 fr. ; quatrième catégorie :
3,050. »
« Substitut :
première catégorie : 3,200 fr. ; deuxième catégorie : 2,800 fr. ;
troisième catégorie : 2,400 fr. ; quatrième catégorie : 2,100 fr.
« Greffier :
première catégorie : 2,800 fr. ; deuxième catégorie : 2,000 fr. ;
troisième catégorie : 1,800 ; quatrième catégorie : 1,700 fr.
« Commis-greffier
: première catégorie : 1,700 fr. ; deuxième catégorie : 1,200 fr. ;
troisième catégorie : 1,100 fr. ; quatrième catégorie : 900 fr. »
« Art. 5. Le
traitement des juges de paix et des greffiers des justices de paix est fixé
comme il suit :
« 1° A
Bruxelles, Anvers, Gand et Liège. Juges, fr. 1,444. Greffier, fr. 480.
« 2° Dans les
chefs-lieux d’arrondissements judiciaires des deuxième et troisième classes.
Juges, fr. 1,200. Greffier, fr. 400.
« 3° Partout
ailleurs. Juges, fr. 960. Greffiers, fr. 320. »
« Art. 6. Il
n’est rien innové quant aux traitements des greffiers des tribunaux de commerce
et de simple police. »
« Art. 7. Le
traitement ne sera payé aux fonctionnaires désignes dans la présente loi qu’à
partir du premier jour du mois qui suivra la prestation de leur serment. »
« Art. 8.
L’augmentation de traitements établie par les articles 2 et 4 ne profitera aux
membres de l’ordre judiciaire qu’à partir du premier janvier 1834. »
« Art. 9. Les
pensions des membres actuels de l’ordre judiciaire, qui seraient admis à faire
valoir leurs droits à la retraite, seront liquidées d’après les dispositions de
l’arrêté du 14 septembre 1814.
« Néanmoins
l’article 17 de cet arrêté est abrogé.
« Mandons et
ordonnons, etc. »
Article 2
M. le président. - Personne ne demande la discussion sur l’ensemble, nous allons passer
à l’article premier.
M. Lebeau. - Le sénat n’y a pas fait de changement ; il est
inutile de le mettre aux voix.
M. le président. - C’est ce que j’allais dire. Nous allons ouvrir la discussion sur
l’article 2. (Voir plus haut.)
M.
Jonet. - Je demande la parole. Messieurs, ce n’est pas pour
discuter sur l’amendement de la section centrale, mais pour y ajouter un
sous-amendement. Il a été reconnu précédemment qu’il devait exister une
différence entre le traitement des membres de la cour de Bruxelles, et celui
des membres des cours de Liége et de Gand. Je proposerai d’augmenter de 500 fr.
le traitement des conseillers. La justice de cette différence avait été
reconnue ; je ne sais pourquoi la commission n’est pas revenue là-dessus, si
c’est oubli ou autrement : en tout cas, je propose d’augmenter de 500 fr. le
traitement des membres de la cour de Bruxelles.
M. le président. - L’amendement est-il appuyé ?
M. A. Rodenbach. - Il n’est pas appuyé.
Plusieurs membres se lèvent pour appuyer l’amendement.
M. d’Elhoungne. - Messieurs s’il s’agissait de savoir si le traitement
que le sénat a fixé pour les conseillers des cours d’appel est assez élevé,
certainement je voterais pour une augmentation ; car, dans mon opinion, la
somme de 6,000 fr. n’est pas en disproportion avec l’importance des fonctions
de ces magistrats : ce n’est pas trop pour les services que les conseillers
rendent, ni pour assurer au pays une bonne administration de la justice. Mais
du moment que l’on propose d’établir une différence entre les conseillers de la
cour de Bruxelles et ceux de Liége et de Gand, je ne suis plus d’avis de
l’augmentation, alors surtout que son adoption ferait
renaître un conflit entre les deux chambres. Il est connu que les loyers à
Bruxelles sont plus chers qu’à Liége et à Grand ; mais, si sous ce rapport la
condition des conseillers est pire, cette différence est compensée par d’autres
avantages. L’honorable M. Leclercq les a énumérés dans une précédente séance ;
je me bornerai à les rappeler sommairement. Dans l’ordre judiciaire, les places
comme celles de conseillers de cours supérieures fournissent à ceux qui les
occupent le moyen de se ménager des relations et de parvenir plus facilement à
la cour de cassation, quand ils habitent la capitale, que s’ils habitaient Gand
ou Liége. Un autre avantage, c’est que dans la capitale, ils ont plus de
ressources qu’ailleurs pour faire élever et placer leurs enfants ; et sous ce
rapport, il me semble qu’il y a une compensation plus que suffisante pour la
plus grande cherté des loyers. Je voterai donc contre la proposition de M. Jonet.
M. A. Rodenbach. - Messieurs, les études ne doivent pas être plus
fortes pour être conseiller à la cour de Bruxelles que pour l’être à Gand ou à
Liège ; et, quant aux loyers, on a établi, et je crois l’avoir prouvé moi-même,
qu’à Gand, pour être convenablement logé, il en coûtait plus cher qu’à
Bruxelles. D’un autre coté l’octroi est plus élevé à Gand qu’ici, et par
conséquent la vie animale n’y est pas moins chère. Il n’y a donc aucune raison
d’augmenter de 500 fr. les conseillers de la cour de Bruxelles, qui d’ailleurs
ont l’insigne avantage d’habiter la capitale, d’être plus rapprochés du
gouvernement, et d’avoir plus de facilités pour obtenir de l’avancement ; et je
crois qu’il n’est pas un seul membre de la cour de Gand qui n’aimât mieux, au
même prix, résider à Bruxelles. (Aux voix
! La clôture !)
- La clôture est
prononcée.
L’amendement de M.
Jonet est mis aux voix et rejeté.
L’article 2 est
mis aux voix et adopté.
Article 2
M. le président. - L’article 2 proposé par le sénat est conforme à celui proposé par la
commission ; mais je dois mettre aux voix l’article 3 présenté par la
commission.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere).- L’article 3 de la commission est le même que
l’article que la chambre avait déjà adopté.
M. le président. - Voici l’article 2 :
« Art. 2. Le
traitement du premier président et du procureur-général pour les trois cours
d’appel est fixé à 9,000 fr.
« Il n’est
rien innové au traitement dont tous les autres membres des cours d’appel de
Bruxelles et de Liége jouissent actuellement.
« L’indemnité
aux conseillers, pour présider les assises ailleurs que dans les sièges de la
cour d’appel, est fixée, pour les trois cours, à 500 fr. »
- Cet article est
adopté.
Article 3
« Art. 3 Les
tribunaux de première instance sont divisés en quatre classes, comprenant :
« La
première, les tribunaux d’Anvers, Bruxelles, Gand et Liége ;
« La
deuxième, les tribunaux siégeant à Arlon, Bruges, Mons, Namur, Tongres et
Tournay ;
« La
troisième, les tribunaux d’Audenarde, de Charleroi, Courtray, Louvain, Malines,
Termonde, Verviers et Ypres ;
« La quatrième,
tous les autres tribunaux. »
Cet article est
adopté sans discussion.
M. le président. - La commission propose un article 4 qui est le même que l’article du
projet ministériel, où l’on fixait le traitement des membres des juges de
première instance, excepté que la première classe exceptionnelle établie dans
le projet ministériel est supprimée.
Voici cet article
:
« Art. 4. Le
traitement des membres des tribunaux de première instance est fixé comme il
suit
« Président :
première catégorie : 4,800 fr. ; deuxième catégorie : 4,200 fr. ;
troisième catégorie : 3,600 fr. ; quatrième catégorie : 3,050 fr.
« Vice-président
: première catégorie : 4,000 fr. ; deuxième catégorie : 3,500 fr. ;
troisième catégorie : - ; quatrième catégorie : -.
« Juge
d’instruction : première catégorie : 3,730 fr. ; deuxième catégorie
: 3,260 fr. ; troisième catégorie : 2,800 fr. ; quatrième catégorie :
2,450 fr.
« Juge :
première catégorie : 3,200 fr. ; deuxième catégorie : 2,800 fr. ;
troisième catégorie : 2,400 fr. ; quatrième catégorie : 2,100 fr.
« Procureur
du Roi : première catégorie : 4,800 fr. ; deuxième catégorie : 4,200
fr. ; troisième catégorie : 3,600 fr. ; quatrième catégorie :
3,050. »
« Substitut
: première catégorie : 3,200 fr. ; deuxième catégorie : 2,800 fr. ;
troisième catégorie : 2,400 fr. ; quatrième catégorie : 2,100 fr.
« Greffier :
première catégorie : 2,800 fr. ; deuxième catégorie : 2,000 fr. ;
troisième catégorie : 1,800 ; quatrième catégorie : 1,700 fr.
« Commis-greffier
: première catégorie : 1,700 fr. ; deuxième catégorie : 1,200 fr. ;
troisième catégorie : 1,100 fr. ; quatrième catégorie : 900 fr. »
M. Lebeau. - Je crois que le sénat et la chambre des
représentants sont à peu près d’accord sur l’insuffisance des traitements actuels
des membres des tribunaux de première instance, et, si je ne me trompe sur
l’insuffisance des traitements des conseillers des cours d’appel. On a moins
méconnu, dans l’une et dans l’autre chambre, la nécessité d’une augmentation
que son opportunité ; or, la question d’opportunité a été sainement jugée par
la chambre des représentants, lorsque, prenant en considération la situation du
pays, elle a déclaré que les augmentations ne pourraient avoir lieu qu’en 1834.
C’est aussi en
prenant en considération ces circonstances, que le sénat a adopté la mesure qui
a été renvoyée à notre sanction.
Il s’ensuit que la
différence du résultat de la délibération du sénat et du résultat de la
délibération de la chambre des représentants est plus dans les termes que dans
l’esprit, que dans le fond même de la rédaction. Cependant je voterai de
préférence pour les articles présentés par notre commission.
Le sénat ne
détermine pas quel sera l’avenir des magistrats d’un ordre inférieur, qui sont
rétribués avec une parcimonie vraiment mesquine. Cependant il importe, au
moment d’une organisation judiciaire, de montrer, au moins en perspective, le
sort réservé à la magistrature.
Par
ce motif, je donnerai la préférence à l’article de la commission ; je la lui
donnerai, quelque dominé que je puisse être par l’esprit de concession
nécessaire pour conserver entre les deux chambres l’harmonie qu’on doit désirer
voir régner entre elles. Ici, dans l’intérêt de cet esprit de conciliation, je
protesterai contre la manière vraiment insolite, antiparlementaire, dont au
sénat, je ne dis pas la majorité, mais quelques membres se sont permis de
censurer les votes de la chambre des représentants. Nous nous respectons trop
pour relever des paroles inconvenantes, et pour user de représailles envers le
sénat comme corps constitué.
De toutes parts. - Très bien ! très bien !
M. Verdussen. - Si le projet de loi du sénat pouvait être admis en
son entier, je n’aurais pas pris la parole. Mais, puisque vous venez de
l’amender, je puis proposer une autre modification.
L’article 4 divise
en quatre classes différentes les tribunaux de première instance : il a été dit
que les greffiers de première classe toucheraient 2.800 fr. ; ceux de deuxième
classe, 2.000 fr. ; ceux de troisième, 1,800 fr. ; ceux de quatrième classe,
1,700 fr. La distance de la seconde classe a la première est de 400 fr., tandis
que la différence de la troisième à la deuxième est de 200 fr., et que la
différence de la quatrième à la troisième est de 100 fr. M. le ministre de la
justice a été frappé de cette disproportion ; je voudrais qu’on fît cesser
cette anomalie.
Je propose en
conséquence de réduire le greffier de première classe à 2,400 fr.
M. Dubus. - Le chiffre des greffiers dans les quatre classes
est celui qui a été fixé par le gouvernement. En examinant les éléments qui ont
servi à former cette classification, je crois voir la raison pour laquelle les
chiffres ont été ainsi posés.
On a porté le
chiffre du greffier de première instance dans la première classe à 2,800 fr.,
en prenant une moyenne entre les traitements actuellement assignés aux
greffiers de Bruxelles, d’Anvers, de Gand et de Liége. A Liége, le greffier
reçoit 3,125 fr. ; à Bruxelles, il reçoit 2,800 fr. ; à Anvers et à Gand,
environ 2,300 fr. Le traitement varie dans ces localités, et le gouvernement a
pris un terme intermédiaire. Les traitements de tous les membres de l’ordre
judiciaire ont reçu, en première instance, une augmentation ; le traitement des
greffiers n’est pas augmenté.
Cependant je ne
m’opposerai pas à l’amendement.
M. Legrelle. - L’observation de M. Verdussen n’est pas la seule
qu’il faille faire dans l’intérêt de la proportionnalité. Les différences n’ont
aucun rapport entre elles pour le traitement des commis-greffiers.
Quoi
qu’il en soit du principe de proportion entre les traitements et du dessein que
l’on a de faire entrevoir aux magistrats quel sera leur sort, je voterai contre
la proposition de la commission : je veux maintenir la bonne harmonie qui
existe entre les deux chambres. Car, si le sénat persistait dans son vote, vous
n’auriez pas de loi. Le projet du sénat
me paraît le plus rationnel.
Le sénat convient
avec nous que le traitement des tribunaux de première instance est trop modique
; il dit qu’il faut le changer, mais seulement quand les circonstances seront
différentes, quand nous ne serons plus dans l’état de guerre. Le sénat n’a pas
voulu se lier pour l’avenir, il a cru plus rationnel de soumettre la loi à une
révision avant 1834, tandis que nous, nous avons décidé que les traitements
commenceraient à courir du 1er janvier 1834. Ainsi nous nous lions pour
l’avenir, nous nous lions pour 1834 ; nous pourrions nous lier pour 1835, 1836,
et même lier nos successeurs, ce qui ne me paraît pas très régulier.
M. Gendebien. - Il me semble qu’il a été démontré jusqu’à la
dernière évidence que les traitements des greffiers de première instance
étaient insuffisants ; que souvent ils étaient obligés de prendre sur leurs
traitements pour remplir les déficits des frais de greffe. Je dois à cette
occasion témoigner de nouveau mes regrets de ce que leurs traitements sont si
modiques, tandis qu’on crée une sinécure à la cour de cassation, sinécure de
6,000 fr. Le greffier de cette cour n’aura rien à faire ; il n’aura pas la
centième partie de l’ouvrage d’un greffier de tribunal de première instance. Je
voudrais bien qu’on me dît en quoi consiste la responsabilité d’un greffier de
la cour de cassation. Sa seule responsabilité c’est de s’assurer que les
mémoires sont bien et dûment copiés, que les arrêts sont bien copiés, que les
noms des juges qui ont siégé sont inscrits au plumitif, et voilà tout ; tandis
qu’en première instance le greffier a mille autres garanties à offrir. Je
demande que l’on maintienne le traitement à 2,800 fr. pour les greffiers de la
première classe ; que ceux de la deuxième soient portés à 2,400 fr.
Je dois déclarer
que dans le compte rendu relativement aux greffiers, on m’a fait dire autre
chose que ce que j’ai dit ;on m’a attribué des calculs qui seraient absurdes.
Quoi
qu’il en soit, je persiste à soutenir que le greffier de la cour de cassation a
moins de garanties à donner que le greffier de première instance.
Je proposerai
5,000 francs pour le greffier de la cour de cassation...
Plusieurs membres. - On ne peut pas voter sur l’article premier.
M. Gendebien. - La somme retranchée au greffier de la cour de cassation
serait portée sur les greffiers de première instance. Ainsi je demande 2,800
fr. pour ceux de première classe, et 2,600 fr. pour ceux de seconde classe.
M. d’Elhoungne. - Messieurs, j’aurai les mêmes plaintes à faire pour
la manière dont on a rendu compte de nos séances, lors de la discussion
relative aux commis-greffiers. On a mis dans ma bouche la réclamation d’un
retour à l’ancien régime : ce n’est pas ma manière de voir ; c’est travestir
mes opinions que de les rendre ainsi.
Une
proposition est faite par M. Legrelle ; il demande que l’on revienne à
l’article 3 du sénat ; cela est impossible : nous avons adopté l’article 3 de
la commission qui établit la classification des tribunaux de première instance,
II faut en adopter les conséquences en fixant les traitements. La proposition
de M. Legrelle vient tardivement. Elle ne peut plus être l’objet de vos
délibérations ; au surplus je ne pense pas qu’il s’élève à cette occasion aucun
conflit entre les deux chambres. Le sénat sentira sans doute que les légères
modifications apportées au sort des juges de première instance ne seront pas un
motif pour modifier le projet de loi que vous voterez ; elles seront d’autant
moins un motif pour modifier que les augmentations sont ajournées jusqu’au
premier janvier 1834.
M. Verdussen. - M. Gendebien propose un amendement qui mettrait
plus d’harmonie entre les traitements des greffiers de première instance. Il
prétend que les traitements des greffiers de deuxième, troisième et quatrième
classe, ont été portés à une somme trop modique ; il s’ensuivrait qu’on aurait
commis trois erreurs ; il est plus probable qu’on n’en a fait qu’une seule, sur
les greffiers de première classe,
Je n’ai pas fait
d’amendement, parce que, quand il s’agit de sommes faibles, on peut réduire de
manière à priver du nécessaire les choses nécessaires à la vie sont plus
coûteuses dans les villes où les tribunaux de première classe sont établis que
dans les villes où sont établis les tribunaux de seconde classe. Je crois que
la différence de 400 fr. mise entre ces classes serait assez juste ; mais reste
à savoir si cette différence ne doit pas avoir lieu en diminuant la première
classe.
M.
Jonet. - On sait que le président du tribunal de première
instance de Bruxelles a joui d’un traitement de 6,000 fr. ; en mettant le
tribunal de Bruxelles avec ceux de Gand, d’Anvers, de Liége, on fixe le
traitement du président à 4,800 fr. : il y aura donc une diminution de 1,200
fr. Cette diminution sera trop forte eu égard aux nombreuses affaires dont le
tribunal est surchargé. Je crois que la somme de 4,800 fr. est insuffisante ;
je demande une augmentation de 200 fr.
D’un autre côté,
l’article 4 sera plus en harmonie avec l’article 2 ; s’il importe à la société
d’avoir des capacités dans les cours supérieures, il importe aussi d’en avoir
dans les tribunaux de première instance. Si vous donnez à un président de
première instance le même traitement qu’à un conseiller d’appel, il pourra
avoir le désir de conserver sa place ; si vous lui donnez moins, il fera tous
ses efforts pour arriver à la cour d’appel. Je propose donc de porter le
chiffre à 5,000 fr.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, il me semble qu’il y a une observation
très importante à faire et que la chambre ne doit pas perdre de vue, c’est que
les amendements qui sont présentés dans ce moment se rapportent en définitive à
des objets de très peu d’importance ; que, s’ils sont adoptés, la loi ne peut
pas être votée aujourd’hui ; qu’il faudrait un second vote après-demain, et
qu’alors il serait douteux que le sénat fût en nombre pour délibérer. Cette
considération pourra vous paraître assez grave.
Si, au contraire,
la loi est adoptée comme la commission le propose, le projet pourrait être
présenté aujourd’hui même au sénat. J’ai cru devoir vous soumettre cette
observation.
M. Dubus. - Un honorable préopinant a demandé le rejet de
l’article 4, afin de maintenir le bon accord entre la chambre et le sénat ; eh
bien ! il a été répondu à cette objection que le principe de l’article est déjà
voté, puisque l’article 3 est adopté. L’article 4 suit la même classification
que l’article 3. Messieurs, je crois qu’il a été établi dans le rapport qu’il
est tout à fait nécessaire de déterminer les traitements dont les juges
jouiront au 1er janvier 1834. Il est indispensable que leur avenir soit connu
d’eux, au moment où il va être procédé à une première nomination de tous les
membres de l’ordre judiciaire ; et il me semble que l’honorable préopinant,
auquel je réponds, n’a pas entendu qu’un traitement de 1,700 fr. fût suffisant
pour un juge.
Il n’a pas
prétendu qu’on puisse dire à un jurisconsulte : Vous avez passé de longues
années à étudier le droit ; eh bien, vous aurez le traitement d’un des derniers
employés d’un ministère, le traitement d’un copiste : voyez si cela peut vous
tenter, et venez siéger dans un tribunal. Messieurs, 800 fl. ou 1,700 fr., sont
un traitement qu’il faut augmenter, et il y a opportunité à déterminer de suite
cette augmentation.
Quant à ce qu’on a
dit, qu’il faut maintenir le bon accord entre cette chambre et l’antre, je
pense que cette considération ne doit pas nous entraîner trop loin, ne doit pas
nous entraîner à être injustes. Au reste, cette considération doit avoir de
l’influence sur l’autre chambre comme sur nous-mêmes.
On trouve qu’il y
a une cascade trop forte de la première classe à la seconde, relativement aux
greffiers. La pensée qui a dominé dans le projet ministériel, d’où ces chiffres
ont été extraits, a été de satisfaire aux réclamations qui ont surgi de toutes
parts, relativement aux traitements des juges, et de maintenir ceux pour
lesquels aucune réclamation n’avait lieu.
On se plaignait
généralement de l’insuffisance des traitements des juges ; mais on ne se
plaignait pas de l’insuffisance des traitements des greffiers. On a donc
maintenu ces derniers traitements à peu près où ils étaient. Il a fallu faire
de l’uniformité dans les classes. Pour la première, on a pris le chiffre qui se
rapprochait le plus de la moyenne ; les traitements variaient de 2,400 fr. à
3,000 et quelques cents francs. Pour la seconde classe, les traitements
variaient de 1,500 à 2,000 fr. ; on a pris le chiffre 2,000 fr.
On a un peu élevé le traitement des greffiers de la troisième classe et
de la quatrième classe. Ces chiffres se justifient en prenant en considération
les chiffres anciens et les circonstances de localité.
Je m’opposerai à
ce que l’on porte le traitement des présidents des tribunaux de première classe
à 5,000 fr. On a suivi une règle en déterminant ce traitement ; on prend le
traitement du juge et on met la moitié en sus. Le juge de première classe ayant
3,200 fr., la moitié en sus fait 4,800 fr.
Si l’on veut
entrer dans la voie des amendements, il faudra voter sur tous les paragraphes
de l’article 4.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - J’appuierai la proposition faite par votre
commission dans son article 4. Il me semble important, avant la nouvelle
organisation de l’ordre judiciaire, de fixer le traitement des magistrats de
manière qu’il n’y ait plus aucune réduction à craindre dans la suite et qu’ils
n’aient plus d’autre perspective que celle de l’amélioration de leur sort.
Quant à
l’amendement présenté pour le tribunal de première instance de Bruxelles, il me
semble que véritablement vous l’avez déjà rejeté. Sur l’article 2 il vous a été
proposé une augmentation pour les conseillers à la cour de Bruxelles ;
l’amendement n’a pas été admis. S’il n’existe pas de considération qui motive
une augmentation pour les conseillers, il n’en existe pas pour les présidents
du tribunal de première instance. D’ailleurs, il existe une règle uniforme pour
les traitements des présidents, c’est de prendre les traitements des juges et
de mettre la moitié en sus.
Quant à la
proposition relative aux greffiers, il y a été victorieusement répondu. Le traitement
du greffier du tribunal de première classe est un terme moyen entre les
traitements que ces greffiers reçoivent maintenant à Anvers, Gand, Bruxelles et
Liège.
La
disproportion est grande entre le traitement du greffier de première classe, et
celui de greffier de seconde classe ; mais elle est moins forte entre les
traitements des greffiers des deuxième et troisième classes. Il est évident que
plus les traitements sont modiques, moins la différence doit être grande.
Cette
observation porte également sur les commis-greffiers.
En supposant que
la chambre adopte l’amendement de M. Verdussen, ou la diminution de 400 fr. sur
le traitement des greffiers de première classe, il en récolterait une
diminution de 1,600 sur les quatre greffiers, diminution trop mesquine pour
qu’elle soit prise en considération
M. Osy. - Le président de Bruxelles a maintenant 6,000 fr. ;
il n’aura plus que 4,800 fr., de sorte que nous faisons une économie ; mais il
faudra mettre dans la loi que les diminutions seront opérées à partir du 1er
octobre prochain.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere).
- Les traitements des présidents sont fixés par l’article à dater de
l’organisation judiciaire, les présidents n’auront droit qu’aux traitements
fixés dans cet article. D’après l’article 7, les augmentations ne peuvent
profiter qu’à partir du 1er juillet 1834 ; mais il est évident qu’à dater de
l’organisation judiciaire le traitement du premier président ne sera plus que
de 4,800 fr.
M.
Jonet. - D’après l’adoption de l’article 3, je sais bien
qu’on ne peut plus faire une distinction entre les tribunaux d’Anvers, de Gand,
de Liège, de Bruxelles ; par mon amendement je propose de donner 5,000 fr. aux
présidents des tribunaux de ces villes. Si on adoptait cet amendement, on ne
pourrait voter sur la loi qu’après-demain, a dit un ministre ; c’est une erreur
de fait. Je dirai de plus à M. le ministre de l’intérieur que cette
considération ne pourrait pas déterminer à commettre une injustice : nous avons
déjà adopté des amendements sur l’article 3, vous avez adopté l’article 3 de la
commission et non celui du sénat ; il faut donc que vous vous réunissiez après-demain.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux).
- Il me semble qu’on ne m’a pas compris. Je n’ai pas dit qu’il ne fallait pas
adopter les amendements de la commission ; mais j’ai dit qu’il y avait un
inconvénient à adopter des sous-amendements aux propositions de la commission
pour des objets de peu d’importance.
M. Legrelle. - J’ai dit que, s’il n’y a pas de proposition entre les
traitements des greffiers des quatre classes, il n’y en avait pas non plus
entre les traitements des commis-greffiers. Les traitements des juges se
concilient bien ; mais les traitements des greffiers et des commis-greffiers ne
se concilient pas. Je voudrais avec M. Gendebien qu’il y eût des rapports mieux
entendus.
M. Dubus. - Messieurs, la fixation du traitement des greffiers
et des commis-greffiers n’a pas été faite sur des proportions, mais sur les
traitements actuels de ces greffiers. On a pensé que cette fixation n’avait pas
été établie au hasard ; qu’elle l’avait été sur des considérations tirées des
localités. Il n’y a pas lieu d’augmenter les traitements des greffiers de
deuxième classe, car il en est qui n’ont que 1,500 fr. et vous leur donnez
2,000 fr. (Assez ! assez ! Aux voix ! La
clôture !)
- La chambre ferme
la discussion.
M. le président. - je mets aux voix l’amendement de M. Verdussen, qui consiste à
réduire à 2,400 fr. le traitement de 2,800 fr. des greffiers de première
classe.
M. le président. - L’amendement de M. Gendebien tend à porter les traitement des
greffiers de second classe à 2,400 fr., au lieu de 2,000 fr. ; les traitements
des greffiers de troisième classe à 2,200 fr. ; ceux des greffiers de quatrième
classe à 2,000 fr. au lieu de 1,700 fr.
- L’amendement
pour la deuxième classe est rejeté.
M. Gendebien. - Je demande pardon si je prends la parole entre deux
épreuves : on peut faire des diminution sur les gros traitements pour augmenter
les petits… Au reste, je retire mes amendements qui sans doute auraient le sort
du premier.
M. le président. - M. Gendebien a déposé un amendement sur la cour de
cassation ; je ne puis pas mettre aux voix un amendement sur un article déjà
adopté par la chambre, et adopté par le sénat.
M. Gendebien. - Nous n’avons pas voté sur l’article de la cour de
cassation, car nous ne l’avons pas discuté.
En vertu de
l’article 45 du règlement, comme des amendements qui ont été faits sur les
traitements des greffiers de première instance, je dis que je peux présenter
mon amendement sur celui du greffier de la cour de cassation ; il y a connexité
entre ces matières. Les greffiers de première instance sont véritablement des
hommes de peine, des hommes dont on ne rétribue pas le travail, tandis que le
greffier de la cour de cassation est un sinécuriste.
M. Lebeau. - Cette question est véritablement nouvelle ; mais
j’avoue que j’ai quelque scrupule à admettre que nous puissions voter sur
l’amendement proposé sans violer le règlement. Remarquez bien qu’une
disposition législative a reçu toute la sanction qu’elle peut obtenir, moins
celle du gouvernement, lorsqu’il y a accord des deux branches du pouvoir
législatif sur un fait quelconque. Or, évidemment ici il y a concours de
volonté, mais il y a eu assentiment du sénat, il y a eu concours des deux
branches ; elles ont épuisé leurs pouvoirs ; il ne me semble pas possible de
revenir sur un fait consommé.
J’avoue que, comme
la question est nouvelle, je ne la résous pas.
M. Gendebien. - Il me semble que la question ne peut être douteuse.
Qu’on y réfléchisse : notre consentement comme celui du sénat est dans le vote
sur l’ensemble de la loi ; dès l’instant que vous amendez un article, vous
tombez dans le cas de l’article 45 ; l’assentiment que vous avez donné à divers
articles n’est qu’un assentiment provisoire.
M. Lebeau. - Je crois que l’orateur a raison.
M. Dubus. - On propose
de réduire de 6,000 fr. à 5,000 fr. le traitement du greffier de la cour de
cassation. Ce sera, dit-on, un sinécuriste.
Messieurs, le
greffier de la première cour du royaume ne sera pas un sinécuriste, et je ferai
observer que ce traitement doit être supérieur à celui du greffier des cours
d’appel. Or, le traitement des greffiers des cours d’appel sera de 5,000 fr. ;
ainsi, vous pouvez laisser le traitement du greffier de la première cour à
6,000 fr.
M. Gendebien. - J’apprends
pour la première fois que, sous le prétexte de faire des économies, on augmente
les dépenses. Les traitements des greffiers des cours d’appel ont été fixés à
4,000 fr. ; c’est pour la première fois que j’entends parler de l’élévation à
5,000 fr. S’il en est ainsi, je ferai la proposition de réduire les greffiers
d’appel à 4,000 fr. L’amendement que je propose est tout à fait raisonnable ;
on voulait mettre le greffier de la cour de cassation à 8,000 fr. ; on a fait
observer que le traitement d’un greffier devait être inférieur au traitement
d’un conseiller à la cour d’appel ; aujourd’hui que le traitement des
conseillers d’appel est de 5,000 fr., il faut mettre le greffier de la cour de
cassation à 5,000 fr. un magistrat, dont la capacité, dont la dignité, dont la
responsabilité sont plus grandes que celui d’un greffier, ne peut avoir un
traitement inférieur.
Le greffier de la
cour de cassation n’est qu’un chef de scribes, c’est un chef de bureau, et rien
de plus ; vous devez réduire nécessairement le traitement du greffier de la
cour de cassation à 5,000 fr., sans cela il aurait plus qu’un conseiller
d’appel, ce qui serait indécent.
M. Dubus. - La proposition primitive du gouvernement fixait le
traitement du greffier de la cour de cassation à 8,000 fr. ; on l’a réduit à
6,000 fr. ; eh bien, remarquez que les traitements des greffiers de l’article 4
sont la plupart égaux aux deux tiers des traitements des juges ; pour la cour
de cassation 6,000 fr. ; sont les deux tiers du traitement de conseiller.
M. Gendebien. - Messieurs, je ne pense pas qu’il soit entré dans la
volonté de la chambre de faire une harmonie de chiffre ; nulle part on n’a
reconnu pour règle que le greffier devait avoir les deux tiers du conseiller.
M. le président met aux voix l’amendement.
- L’amendement est
adopté, c’est-à-dire, que le greffier de la cour de cassation, au lieu de 6,000
fr., n’aura que 5,000 fr.
M. le président. - L’amendement de M. Jonet tend à fixer à 5,000 fr. les traitements
des présidents des tribunaux de première instance de première classe.
M. Osy. - Maintenant qu’on a réduit le traitement du greffier
de la cour de cassation, je demande que l’on réduise le traitement du greffier
de la cour d’appel : le chiffre est porté à 5,000 fr. ; je demande qu’on mette
4,000 fr. Il est impossible de donner au greffier de la cour d’appel autant
qu’au greffier de la cour de cassation. (Appuyé
! Appuyé !)
M. Dubus. - On ne pourra faire cette suppression que par une
addition à l’article 2. Ou dira : « Néanmoins le traitement du greffier
est réduit à 4,000 fr. »
- L’amendement de
M. Osy mis aux voix est adopté.
L’article 4 est
mis aux voix est adopté.
Les articles 5, 6,
7 sont adoptés sans discussion.
M. Osy. - Il y a une erreur dans l’article 8 : il ne faut pas
mettre : « L’augmentation établie par les articles 2 et 4... » Par
l’article 2 il n’y a pas d’augmentation.
M. Dubus. - Cela est vrai ; il faut dire : « par l’article
4. »
Puisque cet
article est en délibération, j’appellerai l’attention de la chambre sur les
résultats de l’augmentation du traitement total des membres de l’ordre
judiciaire d’après le vote des divers articles.
L’augmentation
des traitements se serait élevée à 115,000 fr. selon le chiffre proposé par
votre commission, sans compter celle qui résulte de l’érection de la cour de
cassation ; mais, par suite de la décision qui vient d’être prise en ce qui
concerne les greffiers de la cour de cassation et des cours d’appel,
l’augmentation n’est plus que de 112,542 fr.
Convient-il,
d’après cet aperçu, de reculer l’exécution de la loi de 18 mois et de faire
attendre les juges de première instance, de les laisser recevoir des
traitements de copistes ? Cette différence me semble trop faible pour maintenir
la disposition de l’article 8.
Je
crois qu’il serait plus juste de maintenir l’article de la section centrale que
M. Devaux a amendé. II faudrait mettre que les traitements profiteront aux
membres de l’ordre judiciaire à partir du 1er janvier 1833.
M. Brabant.
- Il faut substituer le chiffre 1833 au chiffre 1834.
M. Osy. - Je désirerais savoir quelle sera l’augmentation
totale en comprenant la cour de cassation, la cour de Gand.
M. Dubus. - L’augmentation totale sera de 336,000 fr. avec la
cour de cassation ; mais retranchez-en cette cour, et l’augmentation n’est que
de 112,000 fr.
M. Osy. - Il faut aussi en déduire la cour de Gand.
M. Dubus. - Je crois
qu’il ne faut pas en déduire la cour de Gand : cette cour augmente les
traitements ; mais, d’un autre côté, par la première loi sur l’ordre judiciaire
on a diminué le personnel, et il y a compensation.
M. Lebeau. - Les trois cours d’appel, telles qu’elles seront
organisées coûteront 25,000 fr. de moins que les deux cours de Bruxelles et de
Liége.
M. Devaux. - Nous avons dans une première séance adopté la
disposition qui fixerait à l’année 1834 le paiement des augmentations de
traitements ; je ne vois pas de raison pour revenir sur cette mesure.
L’augmentation
totale est assez considérable pour que nous n’en surchargions pas le trésor ;
cette augmentation répartie sur deux ou trois cents juges...
Plusieurs membres. -Il n’y a pas un aussi grand nombre de juges !
M. Devaux. - Comptez le nombre des tribunaux et celui des juges
pour chaque tribunal, et vous verrez que je ne m’éloigne pas de la vérité.
Messieurs, les
avantages donnés pour l’année 1834 seront suffisants pour déterminer à entrer
dans l’ordre judiciaire des hommes capables de remplir dignement les fonctions
de magistrats. Leur sort n’est sans doute pas brillant ; mais il a été tel
depuis lougnes années. Je ne vois pas pourquoi on ne différerait pas d’une
année : il s’agit plutôt de fixer le sort général d’un juge que de s’occuper de
ce qu’il aura à subir pendant une année.
M. Taintenier. - Nous tomberions dans une injustice flagrante si
nous ne faisions pas droit à la proposition de M. le rapporteur de la
commission.
Si l’augmentation
des traitements des juges de première instance est un acte de justice, pourquoi
différer ? Si cette augmentation n’est pas un acte de justice, on peut en
éloigner l’exécution autant qu’on voudra ; mais nous venons de reconnaître que
les traitements des juges de première instance étaient insuffisants pour
pourvoir aux premiers besoins, bien plus encore pour soutenir le rang assigné
au magistrat dans la société : vous venez de reconnaître la justice de votre
vote, et vous voulez ensuite en ajourner l’effet, cela est impossible. Si vous
aviez admis le principe posé par le sénat, vous raisonneriez d’une manière
conséquente ; mais ici vous avez raisonné dans une autre hypothèse : vous avez
dit qu’il était honteux de tenir les juges dans une situation telle qu’ils
pouvaient difficilement se procurer les choses nécessaires à la vie ; ces
prémisses posées, tirez-en donc la conséquence inévitable.
M. Mary. - Il y a peu de jours vous avez adopté le principe
de l’ajournement du paiement de l’augmentation des traitements à l’unanimité ;
le sénat a pris la même résolution ; et aujourd’hui on nous propose de revenir
sur la même décision prise.
Je ne comprends
pas cette proposition : est-ce que la situation est changée ? Est-ce que le
trésor pourra plus facilement supporter des augmentations de charges qu’il y a
quelques jours. Messieurs, c’est déjà beaucoup que vous ayez accordé une
augmentation de traitements ; ne devançons pas les événements ; attendons 1834.
M. Dubus. - Messieurs, je dois répondre à ce que vient de dire
M. Mary. En proposant mon amendement, je ne crois pas avoir été en contradiction
avec moi-même quoique j’aie voté pour que l’augmentation de traitement ne
commençât à courir qu’à dater du 1er janvier 1834. J’adoptais alors cette
disposition comme un correctif ; le traitement des juges étant plus élevé par
le projet primitif qu’il ne l’est maintenant, au lieu d’une augmentation de 400
fr. que consacre le projet, l’augmentation s’élevait à 6 ou 700 fr. Cela devait
produire au budget une élévation de chiffre considérable ; d’un autre côté,
l’augmentation n’avait été admise qu’à une faible majorité, et je dus comme
beaucoup d’autres membres de la minorité adopter le correctif de ne faire
courir l’augmentation qu’à dater de 1834. Mais aujourd’hui il n’en n’est plus
de même. Les traitements fixés par le projet sont modiques, et c’est une raison
pour faire cesser plus tôt cet état de choses. (Aux voix ! aux voix !)
- L’amendement de
M. Dubus est mis aux voix et rejeté.
L’article 8 est
ensuite adopté après deux épreuves.
Article 9
M. le président. - Nous passons à l’article 9. C’est l’article 5 du projet du sénat,
qui n’a pas été amendé. Il n’est pas besoin de le mettre aux voix.
M. Brabant.
- Si ! si ! Ceci est comme un projet nouveau.
- L’article 9 est
mis aux voix et adopté.
M. le président. - Veut-on voter aujourd’hui sur l’ensemble de la loi ? (Oui ! oui ! Non ! non !)
M. Dubus. - Il y a encore un article sur lequel il faut voter.
C’est l’article 6 du projet du sénat, dont la commission a proposé le rejet.
M. le président. - Voici comment est conçu cet article : « La présente loi sera
révisée avant le 1er janvier 1834. »
M.
Devaux.
- Je demande la parole. Messieurs, je ne sais pas si la loi est assez claire
telle qu’elle est rédigée. Je ne sais si nous sommes d’accord sur le point
qu’elle ne doit être appliquée qu’à dater du 15 octobre prochain, mais cela
n’est dit nulle part. Il me semble qu’il faudrait un article final portant que
la loi ne sera exécutoire qu’à partir de l’installation des tribunaux. Sans
cela, si le gouvernement sanctionnait la loi demain, on pourrait croire que
l’augmentation du traitement serait due à partir de demain.
M. Osy. - Le gouvernement ne donnera sa sanction à la loi
qu’au moment de la mettre à exécution.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere).
- Il est évident que la loi est subordonnée à la nouvelle organisation
judiciaire.
M. Lebeau. - Je crois que cela résulte évidemment, non pas de
cette loi, mais de la loi d’organisation judiciaire, où l’on dit que les juges
actuels conserveront leurs fonctions jusqu’au moment de leur installation .
- L’article 6 est
mis aux voix et rejeté. (Aux voix ! aux
voix ! l’appel nominal sur l’ensemble !)
M. A. Rodenbach. - Le vote à
après-demain. (Non ! non !)
M. Dumortier.
Je demande la parole pour un rappel au règlement. (Bruit). Messieurs, vous ne pouvez pas voter aujourd’hui sur le
projet, d’abord parce qu’il a été amende par le sénat, et deuxièmement parce
qu’il renferme des amendements que vous avez faits vous-mêmes. Le projet qui
vous est soumis est en effet le projet du sénat, auquel la commission a fait
des amendements que vous avez adoptés. Or, l’article 45 veut que quand des amendements
sont adoptés, le vote soit remis ami surlendemain. Votre vote serait donc nul
et frappé de nullité. (Rires bruyants,
murmures.)
M. le président agite la sonnette.
M. Dumortier. - Oui, messieurs, le vote est frappé de nullité aux
termes de l’art. 45 de la constitution qui dit : « Chaque chambre
détermine, par son règlement, le mode suivant lequel elle exerce ses
attributions. » Or, si vous
exerciez vos attributions en dehors de votre règlement, tout ce que vous feriez
serait nul. J’ai entendu dire tout à l’heure que si nous ne votions pas la loi
aujourd’hui, demain le sénat ne serait pas en nombre ; cela me touche peu, et
j’ai une trop haute idée du sénat pour craindre qu’il ne sache pas accomplir
son devoir et rester à son poste quand son devoir l’exige. Je demande donc
l’exécution du règlement, et qu’on ne vote qu’après-demain sur l’ensemble de la
loi. (Aux voix ! aux voix !)
M. A. Rodenbach. - Je défie
qu’un seul orateur prouve qu’il y a urgence, et, s’il n’y a pas urgence, je ne
vois pas de nécessité de violer le règlement. S’il y a des membres qui sont
pressés de se retirer, qu’ils partent ; nous resterons à notre poste.
M. Dubus. - L’honorable M. Dumortier a mal appliqué l’article
45 du règlement. Je vois ici non pas une proposition nouvelle, mais un projet
déjà amendé par nous et renvoyé au sénat, et que le sénat nous renvoie de
nouveau. L’article 45 a déjà été exécuté quand nous avons discuté le projet la
première fois, et il ne doit pas recevoir deux fois son exécution. Quand le
vote définitif fut renvoyé à deux jours d’intervalle, et que des amendements
furent encore adoptés ce jour-là, en résultait-il que vous dussiez renvoyer de
nouveau au surlendemain pour voter sur les nouveaux amendements ? Non sans
doute ; cela n’arrive qu’une fois. Je crois donc qu’en considération de ce qui
s’est passé dans les diverses épreuves qu’a subies le projet, il n’y a pas lieu
à appliquer l’article 45 du règlement et que vous pouvez voter aujourd’hui sur
l’ensemble. (Aux voix ! aux voix !)
M. A. Rodenbach. - Je demande l’appel nominal.
M. Gendebien. - On vous a dit que quand la section centrale fait un
rapport sur un projet, et que ce projet est adopté par l’assemblée, la
proposition, quoique amendée par la section centrale, n’est pas soumise à un
second vote. Cela est vrai, mais il est bien entendu que ce n’est que quand le
ministre qui a présenté le projet adhère aux amendements, et fait le nouveau
projet sien ; mais pour le cas où le projet a été renvoyé par le sénat, il n’en
est plus de même ; car ce n’est plus un projet venu du ministère, et dès lors
l’article 45 doit recevoir son application. De quoi s’agit-il ici ? D’un projet
amendé par le sénat en vertu de son initiative. Nous adoptons ce projet et nous
y ajoutons des amendements ; il est bien certain que nous devons laisser
écouler 24 heures entre le vote d’aujourd’hui et le vote définitif.
M. Dubus. - Je ferai remarquer que l’honorable M. Gendebien
interprétait tout à l’heure l’article 45 du règlement comme moi ; car vous vous
souvenez que quand il a voulu proposer un amendement à l’article premier, il a
invoqué la disposition finale de l’article 45, et qu’il s’est fondé sur un
amendement fait à propos du traitement des greffiers pour soutenir qu’il avait
le droit de faire un amendement pour réduire le traitement du greffier de la
cour de cassation ; or, quand cela peut-il se faire ? Quand l’article 45
trouve-t-il son application ? C’est lors du dernier vote d’une loi.
M.
Lebeau.
- J’appuie les observations de l’honorable M. Dubus. D’abord je ne suis pas
d’accord avec l’honorable M. Gendebien, que le sénat ait exercé son initiative
; car, en fait de lois financières, le sénat n’a pas d’initiative ; il ne peut
pas augmenter les dépenses, il ne peut que les réduire. Mais ces raisons ne me
touchent pas ; car la section centrale, en présentant un projet, use aussi de
son droit d’initiative, et quand le ministère s’y rallie, on convient qu’il n’y
a pas lieu d’ajourner le second vote. Ici la position est la même, et toute la
question est de savoir si le ministère se rallie au projet que nous venons de
voter. Je ferai remarquer en outre que quand M. Gendebien a proposé un
amendement pour réduire le traitement du greffier de la cour de cassation, ce
n’est pas un amendement qu’il a proposé, mais le rejet de l’amendement du
sénat. Par ces considérations, je crois que nous pouvons passer au vote
définitif aujourd’hui, si le ministère se rallie à la proposition de la
commission.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere).
- Pour autant que cela peut abréger la discussion, je déclare me rallier à tous
les amendements proposés.
M. d’Elhoungne. - Je ne partage pas l’opinion de l’honorable
préopinant. Il a dit que quand la section centrale présentait un projet, elle
usait de son initiative en proposant des modifications, et que du moment que le
ministère s’y ralliait, il n’y avait pas lieu d’ajourner le vote. Voyez un peu,
messieurs, la différence qu’il y a dans la position actuelle de la chambre.
Quand la section centrale présente un projet et que le ministère s’y rallie,
alors il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 45. Toutes les présomptions
existent que le projet a été examiné avec maturité. Ici c’est tout autre chose.
Un projet tout nouveau est renvoyé par le sénat. Que fait la chambre ? Elle le
renvoie à une commission spéciale et celle-ci vous fait une proposition
nouvelle ; et maintenant que nous sommes engagés dans une discussion, le projet
est-il accepté par la chambre ? Non, puisque la chambre a modifié quelques
articles. Il y a lieu par conséquent d’appliquer l’article 45. D’ailleurs je ne
vois pas grande nécessité ici de transformer la chambre en une lice olympique
et d’aller vite (on rit), mais au
contraire de faire bien et lentement et je plains les nations dont les
représentants se laissent ainsi entraîner à faire des lois précipitamment, sous
prétexte de nécessités qui n’existent pas, et je déclare que je me retirerai si
on persiste à vouloir voter aujourd’hui.
M. Barthélemy. - Messieurs, toutes les théories doivent céder aux
règles du bon sens. Pourquoi avons-nous dit dans le règlement que les lois ne
seraient votées définitivement que 24 heures après l’adoption des amendements ?
C’est dans le but d’avoir la certitude que les amendements n’auront pas été
accueillis sans réflexion et avec trop de légèreté. Sommes-nous dans une
position semblable ? Non, car nous avons depuis 15 jours discuté et
archi-discuté (on rit.) le projet. Le
sénat l’a discuté à son tour et nous avons connaissance de ses discussions.
Aujourd’hui vous avez adopté quelques petites modifications
presqu’insignifiantes par rapport au traitement des greffiers. Je vous demande
si c’est le cas de dire qu’il y aurait précipitation de notre part à voter
aujourd’hui. N’ayez pas peur, messieurs, nous ne serons pas accusés d’avoir été
surpris (on rit), et on ne nous dira
pas que nous avons mal fait.
- La clôture est mise aux voix et adoptée.
M. A.
Rodenbach.
- L’appel nominal !
M. le président. - On va voter par appel nominal sur la question de savoir si le vote
aura lieu aujourd’hui.
M. Dumortier,
vivement. - Mais c’est mettre aux voix la violation du règlement ! (Explosion d’hilarité).
M. Dubus. - De manière que toutes les fois qu’il y aura
divergence sur l’interprétation du règlement, il faudra suivre l’avis de
l’honorable membre.
M. Dumortier.
- Certainement non : il ne faut pas, en cas de divergence, suivre mon avis pas
plus que celui de tel ou tel membre ; mais quand le règlement est positif
peut-on se dispenser de l’observer ? Quant à moi je le déclare, si on met cette
question aux voix, je me retire. (Bruit
et murmures.)
M. le président. - Je ne crois pas violer le règlement en consultant la chambre sur une
question qu’elle désire résoudre.
M. A. Rodenbach. - Je demande
la parole sur la position de la question. Y a-t-il urgence ?...
Plusieurs voix. - Il ne s’agit pas d’urgence.
M. A. Rodenbach. - Il faut d’abord poser cette question : Y a-t-il
urgence ? (Non ! non !)
M. le président. - On va procéder à l’appel nominal pour savoir si on votera
aujourd’hui.
M. d’Elhoungne. - Je demande que la question soit ainsi posée :
Votera-t-on définitivement après-demain ?
M. le président. - Il va de soi-même que, si la chambre décidait que le vote n’aura pas
lieu aujourd’hui, il aurait lieu après demain. Votera-t-on aujourd’hui ? Ceux
qui seront d’avis de l’affirmative répondront oui ; ceux qui seront d’un avis
contraire répondront non.
M. Liedts
fait l’appel nominal.
Ont voté pour :
MM. Barthélemy, Berger, Boucqueau, Brabant, Coppieters, Davignon, Dellafaille,
de Muelenaere, de Roo, de Sécus, Destouvelles, de Terbecq, de Theux, Dewitte,
Dugniolle, Duvivier, Lardinois, Lebeau, Lefebvre, Legrelle, Liedts, Mary,
Milcamps, Morel-Danheel, Olislagers, Pirmez, Polfvliet, Rogier, Serruys,
Thienpont, Ullens, Vandenhove, Verdussen et Vuylsteke.
Ont voté contre :
MM. Taintenier, Coppens, Corbisier, H. de Brouckere, de Haerne, Desmet, de Nef,
Devaux, d’Hoffschmidt, Domis, Dumortier, Fallon, Gendebien, Goethals, Helias
d’Huddeghem, Hye-Hoys, Jonet, Leclercq, Nothomb, Osy, Poschet, Raymaeckers, A.
Rodenbach, C. Rodenbach, Tiecken de Terhove, Van Innis, Van Meenen et Watlet.
M. le président. - Voici le résultat de l’appel nominal : sur 63
membres présents, 34 ont répondu oui et 29 non : On votera par conséquent
aujourd’hui.
A
peine M. le président a-t-il annoncé le résultat du vote que plusieurs membres
sortent de la salle, en sorte que la chambre ne se trouve plus en nombre.
Plusieurs voix. - C’est manquer de respect pour la chambre.
M. Mary. - Je demande qu’on fasse l’appel nominal pour qu’on
sache les noms de ceux qui se sont retirés.
- La séance est
suspendue pendant quelques secondes. La chambre paraît espérer que quelques-uns
des membres sortis rentreront.
M. Legrelle. - M. le président, je crois que ce serait le cas de
prier quelques-uns de ces messieurs de rentrer ; on ne peut pas ainsi entraver
les opérations de la chambre, ni empêcher la majorité de voter : c’est manquer
de respect à l’assemblée.
Plusieurs voix. - L’appel nominal !
M. le président. - Je ne peux pas faire procéder à l’appel tant que
nous ne sommes pas en nombre.
M. Mary. - Il faut faire l’appel nominal.
M. le président. - Pour constater la présence des membres qui restent ? (Oui ! Oui !)
M. Davignon. - Oui, l’appel nominal, d’autant plus
qu’après-demain plusieurs membres seront partis, et ce sera notre
justification.
M. Liedts
fait l’appel nominal.
Voici les noms des
membres restants : MM. Barthélemy, Berger, Taintenier, Boucqueau de Villeraie,
Brabant, Coghen, Coppieters, Corbisier, Davignon, de Haerne, de Nef,
Dellafaille, de Muelenaere, de Roo, de Sécus, Destouvelles, de Terbecq, de
Theux Dewitte, Domis, Dubus, Dugniolle, Goethals, Helias d’Huddeghem, Hye-Hoys,
Lardinois, Lebeau, Leclercq, Lefebvre, Legrelle, Liedts, Mary, Milcamps,
Morel-Danheel, Nothomb, Olislagers, Pirmez, Polfvliet, Poschet, Rogier,
Serruys, Thienpont, de Tiecken de Terhove, Ullens, Vandenhove, Van Meenen,
Verdussen, Vuylsteke.
Voici les noms des
membres qui, s’étant retirés, ont fait manquer le vote : MM. Coppens, H. de
Brouckere, Desmet, Dumortier, Fallon, Gendebien, Jonet, Osy, Raymaeckers, A
Rodenbach, C. Rodenbach, Watlet et Zoude.
(Erratum inséré au Moniteur
belge n°203, du 21 juillet 1832 : A la fin du compte rendu de la séance de
la chambre des représentants du 16 de ce mois (dans le supplément), parmi les
noms des membres qui, s’étant retirés, ont rendu le vote impossible, il faut
effacer celui de M. Zoude, et le remplacer par celui de M. d’Hoffschmidt).
- La séance est
levée à 3 heures.