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Note d’intention
Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du jeudi 9 février 1837
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi portant le budget du département de l’intérieur pour
l’exercice 1837. Discussion des articles. Instruction primaire (école primaire
à Bruges) (de Theux, Dumortier,
Devaux, Dumortier, Pollénus, Devaux, Dumortier), culte protestant (de
Theux, Dumortier, Pollénus,
de Theux), subsides aux villes et communes (Desmet, de Theux, Dumortier, de Theux, de Jaegher, Desmanet de Biesme,
Verdussen), droit sur les grains oléagineuses et les
huiles (de Muelenaere, de
Theux, A. Rodenbach, Desmet,
de Theux, Dumortier, Smits, Dubus, A.
Rodenbach, de Muelenaere, Pirmez),
pêche nationale (Smits, Dumortier,
A. Rodenbach, Pollénus, de Theux, Dumortier, Smits, Hye-Hoys, d’Huart,
Dubois, Desmet, Dumortier, de Theux, Smits, Dubus, Pollénus),
jardin botanique de Bruxelles (de Theux, Hye-Hoys, Dumortier, A. Rodenbach, Heptia, de Theux, A. Rodenbach, de Jaegher, Dumortier, de Muelenaere), industrie de la soie (Zoude, Dumortier, de Theux, Van Hoobrouck, Zoude, Dumortier), lutte contre
les épizooties (Desmet, de Theux,
de Jaegher, Desmanet de Biesme,
de Jaegher, de Theux, Mast de Vries, Eloy de Burdinne, Desmet, de Jaegher, de Theux), cours (de musique) de l’école vétérinaire (Devaux, de Theux), lutte contre
les épizooties (Eloy de Burdinne, de
Theux), cours (de musique) de l’école vétérinaire (Dumortier,
Devaux, de Theux, Dumortier, de Theux, Dumortier, Eloy de Burdinne, de Theux, Dumortier),
encouragement aux lettres, aux sciences et aux arts (Heptia,
Verdussen)
(Moniteur
belge n°41, du 10 février 1837 et Moniteur belge n°42, du 11 février 1837)
(Présidence de M. Fallon.,
vice-président.)
(Moniteur
belge n°41, du 10 février 1837)
M. de Renesse
procède à l’appel nominal à midi un quart.
M. Kervyn donne
lecture du procès-verbal de la séance d’hier dont la rédaction est adoptée.
M. de Renesse
fait connaître l’analyse des pétitions suivantes.
PIECES ADRESSEES A
« Les élèves
de l’école vétérinaire de Liége adressent des observations sur le projet de loi
relatif à l’école vétérinaire, présenté par M. le ministre de
l’intérieur. »
________________
« Le conseil communal
et le bureau de bienfaisance de Boussu (Hainaut) adressent des observations en
faveur des réclamations des fabricants de sucre indigène. »
________________
« Le sieur Vreucop adresse des
observations sur le projet de loi relatif à l’instruction primaire. »
________________
« Les raffineurs de sucre de Gand
réclament contre le mémoire adressé à la chambre par les fabricants de sucre de
betteraves. »
________________
- Ces diverses
pétitions sont renvoyées aux sections centrales chargées de l’examen des
projets de loi auxquels elles ont trait. La pétition des élèves de l’école
vétérinaire de Liége et celle du sieur Vreucop resteront déposées sur le bureau
pendant la discussion du budget de l’intérieur.
________________
MM. Raikem, de Meer
de Moorsel et Jadot informent la chambre que l’état de leur santé ne leur
permet pas d’assister à la séance.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DU
DEPARTEMENT DE L’INTERIEUR POUR L’EXERCICE 1837
Discussion des articles
Chapitre
IV. – Instruction publique
Article
7
M.
le président. - La chambre a à statuer sur l’art. 7 du chap. IV :
« Art. 7.
Instruction primaire : fr. 255,000. »
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Le motif pour lequel l’honorable M. Devaux
a demandé hier que l’on ajournât cet article, est qu’il était à sa connaissance
que la régence de Bruges réclame une majoration de 4.900 fr. en faveur de ses
écoles primaires.
Je regrette, ayant
été obligé d’assister à un conseil, de n’avoir pu examiner cette demande en
détail.
La ville de Bruges
n’a pas une industrie et un commerce proportionnés à sa population. Il en
résulte que l’octroi n’est pas pour cette ville une ressource aussi
considérable que pour les villes de même importance. Une autre conséquence de
cet état de choses, c’est que la classe indigente est également plus nombreuse
que dans d’autres villes.
En outre on a fait observer que plusieurs villes, telles que Gand,
Bruxelles et Liège jouissent, du chef de divers établissements publics, de
subsides plus considérables que Bruges.
Tels sont les
principaux motifs que l’on a fait valoir. De manière que la ville de Bruges est
dans l’impuissance d’améliorer la situation de ses écoles gardiennes, qui sont
au nombre de deux.
Cette ville a
également deux écoles primaires et chacun de ces établissements n’a qu’un
instituteur.
Maintenant vous
apprécierez si, dans ces circonstances, il y a lieu d’accorder la majoration
demandée. Ce subside serait accordé à la charge d’introduire, s’il y a lieu,
des améliorations dans l’administration des écoles gardiennes.
M. Dumortier. - Je ne crois pas qu’il
y ait nécessité d’adopter la proposition de M. le ministre de l’intérieur.
Si la régence de
Bruges veut avoir des écoles gardiennes comme en ont les autres régences,
qu’elle prenne à son propre budget les sommes nécessaires à ces établissements,
ou que son bureau de bienfaisance y pourvoie.
Si vous accédez à
la demande de l’administration communale de Bruges, vous aurez des demandes du
même genre de la part de toutes les administrations communales, et force vous
sera de les accueillir favorablement. Car ce que vous aurez fait pour une, il
faudra, en bonne justice, le faire pour toutes. Or, comme le budget n’y
suffirait pas, je n’ai pas besoin de vous présenter d’autre considération pour
vous faire voir la nécessité de rejeter l’augmentation demandée.
Je vois l’honorable
député de Bruges qui se lève. Je suis persuadé qu’il va nous dire d’excellentes
choses. Il aura cependant de la peine à me convaincre.
M.
Devaux. - L’honorable préopinant comprend mal ce dont il s’agit. Il
croit qu’il s’agit d’un système nouveau. Il n’y a rien de semblable. M. le
ministre de l’intérieur demande une augmentation de 5,000 fr. à la somme de
255,000 fr., qu’il avait demandée pour l’instruction primaire. Mais vous
n’allouez rien à la ville de Bruges. Le gouvernement repartit les fonds suivant
les besoins de chaque localité.
Il y a deux ans
l’honorable M. d’Hoffschmidt a représenté les grands besoins du Luxembourg, et
la chambre a majoré le crédit sans rien allouer spécialement à aucune commune
du Luxembourg.
Je vous ferai voir
en peu de mots la situation toute particulière de la ville de Bruges
comparativement aux autres villes.
Sa population est
de 43,000 habitants. Le nombre de ses pauvres est de plus de 16,000. Vous
sentez que chez ces 16,000 individus il y a un grand besoin d’instruction
gratuite. On évalue au quart de la population totale le nombre des enfants en
âge de fréquenter les écoles ; donc 4,000 enfants pauvres.
Si vous ajoutez à
cela les petits ouvriers qui, sans être des indigents proprement dits, n’ont
pas le moyen d’instruire leurs enfants, vous aurez un nombre de 7,000 enfants
auxquels l’instruction doit être donnée gratuitement. Il est impossible que la
ville de Bruges, avec ses ressources, puisse satisfaire à de pareils besoins.
Elle subsidie plusieurs établissements d’instruction primaire. Dans un de ces
établissements un seul homme dirige plus de 500 enfants. On n’a pu lui accorder
un adjoint. Il en résulte que cet homme est maintenant abîmé. En effet, à
diriger seul l’instruction de 500 enfants, il est impossible de ne pas se
perdre la poitrine.
Bruges est dans une
position tout à fait exceptionnelle. C’est une ville d’une grande étendue,
reste d’une ancienne splendeur commerciale. Mais une chose lui manque :
l’industrie et le commerce. Il résulte de là que, si à Bruges il y a bien de
grands propriétaires et beaucoup de pauvres, il n’y a pas de classe moyenne, ce
qui fait la ressource d’une ville.
La comparaison des
revenus de la ville de Bruges avec les revenus des autres villes, dont elle se
rapproche le plus par son importance, fait ressortir d’énormes différences. La
ville de Bruges est la cinquième du royaume, elle n’a que 450,000 francs de
revenus ordinaires. Je ne parle pas des revenus extraordinaires. La différence
serait plus sensible. Mais la comparaison ne serait pas aussi sûre.
Eh bien, les quatre
autres grandes villes ont les revenus suivants :
Liège, dont la
population est d’un tiers supérieure de celle de Bruges, a eu l’année dernière
800,000 fr. de revenus ordinaires. Cette année son revenu sera de plus de
900,000 fr.
Gand a 1,300,000
fr. de revenu ordinaire. Ainsi sa population est double de celle de Bruges ;
son revenu triple.
Anvers, dont la
population est également double de celle de Bruges, a 1,400,000 fr. de revenu
ordinaire.
Je ne parle pas de
Bruxelles qui est dans une position particulière.
Vous voyez que la
position de Bruges ne peut être comparée à celle d’aucune autre ville.
On dit qu’il faut
que le bureau de bienfaisance de Bruges pourvoie à la dépense de ses
établissements d’instruction primaire (car ce ne sont pas, comme on l’a dit,
des écoles gardiennes). Mais je ferai remarquer que le bureau de bienfaisance
est à la charge de la ville chaque année pour 50,000 fr. L’an prochain les
besoins qui sont déjà connus seront de 55,000 fr.
Vous voyez,
messieurs, quelle est la position exceptionnelle de cette ville ; si j’avais
besoin de la constater par des détails, ma tâche ne serait pas difficile.
Tandis que Bruges est forcée de consacrer à son bureau de bienfaisance sur ses
modiques sources 87 francs par 1,000 de revenus ordinaires, Gond n’a consacré
que 59 ; Bruxelles 8 ; Liége rien. Ceci vous montre quelle distance il y a de
l’une de ces villes à l’autre.
Les dépôts de
mendicité coûtent énormément à Bruges, à cause du grand nombre de pauvres :
Liége ne paie de chef que 9 francs par 1,000 de revenus ordinaires ; Anvers 27
: Bruges paie jusqu’à 45 pour le même objet.
De la situation de
la ville de Bruges, il résulte que toutes les dépenses nécessaires y sont extrêmement
restreintes. On dit que relativement à l’instruction moyenne, un bon collège
coûte ordinairement 30 à 40,000 francs ; Bruges ne peut y dépenser que 15,000
fr., y compris les minervales et un subside de l’Etat. Si vous comparez
maintenant les subsides que reçoivent les autres grandes villes à ceux que
reçoit la ville de Bruges, vous verrez qu’il n’y a pas l’ombre de proportion
avec les besoins respectifs.
Car ce dont il
s’agit n’est pas une nouveauté, et vous savez que les villes reçoivent des subsides
pour leurs écoles. Voici ce que reçoivent les quatre autres grandes villes du
pays :
Anvers, ville qui,
je le répète, a près de un million et demi de revenu, et une population qui
n’est pas double de celle de Bruges, reçoit du gouvernement 2,100 fr. pour
l’instruction primaire.
Liège, dont la
population n’est pas d’un tiers plus grande que celle de Bruges, et dont le
revenu est à peu près double de celle de Bruges, si je ne me trompe, reçoit du
gouvernement 2,100 fr. pour l’instruction primaire ; je ne suis pas bien sûr du
chiffre.
Le gouvernement
donne à Gand 10,000 fr. pour l’instruction des ouvriers ; c’est une ville
encore plus riche que Liége.
Le gouvernement
paie 6 à 7,000 fr. à la ville de Bruxelles pour l’instruction primaire.
Ainsi toutes ces
villes reçoivent, proportion gardée des besoins, beaucoup plus que ce que
réclame la ville de Bruges.
Mais si la ville de
Bruges ne reçoit rien pour l’instruction primaire, reçoit-elle plus que les
autres villes pour l’instruction élevée ? Non, il n’y a pas compensation dans
ce que le gouvernement accorde pour les autres branches de l’industrie.
Par exemple, on
accorde à Bruxelles, pour l’athénée, 25,000 fr., et 60,000 francs pour l’école
vétérinaire.
Liége reçoit 6,000
francs pour son collège ; et si on y ajoute ce qu’elle reçoit pour son
université, c’est une dépense de 300,000 francs.
A Gand, il y a
aussi une université.
Bruges reçoit pour
son collège 6,000 francs.
Voulez-vous passer
en revue l’enseignement des arts, voici ce que le gouvernement donne pour les
académies de peinture et de musique ou pour les conservatoires :
A Gand, 4,000 fr.
A Liége, 18,000 fr.
A Bruxelles, 22,000
fr.
A Bruges, 4,200 fr.
Ainsi, vous voyez
que de toutes les manières Bruges se trouve au plus bas degré de l’échelle
quant au chiffre du subside, et au plus élevé quant à celui de ses besoins.
Au reste, ce n’est
qu’un crédit que le gouvernement demande ; il jugera lui-même encore la
convenance de son application. J’ai voulu prouver seulement que la demande était
loin d’être exagérée, si on la compare aux besoins existants.
M. Dumortier. - Il me semble que le préopinant
a justement dit tout ce qu’il fallait pour repousser sa demande. Il a dit que
la ville de Bruges n’avait pour revenu ordinaire que 450 mille francs ; et il a
comparé ce revenu à celui des autres grandes villes du royaume : qu’est-ce que
cela prouve ? c’est que la ville de Bruges n’a pas suffisamment élevé ses
impôts municipaux ; mais qu’elle fasse comme on a fait à Liège, à Anvers, à
Bruxelles ; et elle pourra subvenir à ses besoins, et subsidier ses écoles
gardiennes. Si tous nous voulions prêcher pour notre cloche, nous pourrions
grever le trésor qui l’est déjà beaucoup trop.
L’honorable membre
a pris pour terme de comparaison les quatre plus grandes villes du royaume ; je
prendrai pour terme de comparaison la ville de Tournay, la sixième ville du
pays.
Tournay n’a que
30,000 habitants, peut-être que 25,000 ; cependant elle compte autant de
pauvres qu’à Bruges, c’est-à-dire 17,000 pauvres. Ainsi à Tournay les pauvres
forment plus des trois cinquièmes de la population, et à Bruges ils n’en
forment que le tiers ; cependant Tournay ne demande pas de subsides. A Bruges,
dit-on, il y a deux écoles primaires suivies chacune par 500 élèves ; il y a de
même à Tournay un professeur pour 600 élèves, dans une école lancastrienne.
Les revenus à
Tournay sont de 400 mille fr., et tous ces revenus sont pris sur les impôts
mais si nous avions établi ces impôts communaux proportionnellement à ceux de
la ville de Bruges, Tournay n’aurait que 300,000 fr. à peu près. Si Tournay a
des revenus plus élevés, c’est parce qu’elle perçoit davantage d’impôts ; que
Bruges fasse comme Tournay, et elle aura de quoi fournir à ses besoins.
A Bruges vous avez une académie de peinture et de dessin, et vous
recevez 4,000 fr. du gouvernement pour cet objet ; eh bien, nous avons aussi à
Tournay une académie de dessin et de peinture, et le gouvernement ne lui donne
rien ; cependant l’académie de Tournay a fourni des élèves qui sont la gloire
de la Belgique ; Gallais est un élève de Tournay, et beaucoup d’autres ; ainsi
nous fournissons des artistes et nous ne demandons rien du gouvernement ; il y
a plus, nous ne demandons rien. Voilà un exemple que nous vous proposons.
On a cité des
villes qui ont un conservatoire de musique ; à Tournay, il y a un semblable
établissement, et nous ne recevons rien encore pour cet objet ; notre
conservatoire a aussi produit des élèves remarquables : Dubois qui a reçu le
prix de violon, à Liége, sort de notre conservatoire. Ainsi nous formons des
élèves distingués sans rien demander.
Je ne crois pas en
effet que les administrations communales doivent rien demander au gouvernement.
Toutes les villes doivent faire comme à Tournay ; là on s’est cotisé ;
cotisez-vous de la même manière. Ce n’est pas dans un moment où le trésor se
couvre pas ses dépenses, où nous n’établissons pas la balance entre nos
recettes et nos besoins que nous devons demander pour nos clochers ; c’est à
peine si, dans les temps de prospérité, on peut demander pour son cocher,
faites comme nous ; faites des sacrifices pour subvenir à vos besoins.
M. Pollénus. - Je crois qu’il serait dangereux
d’admettre des demandes improvisées pour les écoles gardiennes des communes.
S’il y a nécessité d’accorder des subsides à la ville de Bruges, le ministre
les lui accordera sur le chapitre dont nous nous occupons. Cette année les
conseils provinciaux ont alloué des sommes plus considérables que les années
précédentes pour les écoles gardiennes, ainsi le gouvernement n’aura pas besoin
de donner des sommes aussi fortes que par le passé. Si des besoins
extraordinaires se sont révélés dans la ville de Bruges, le ministre y fera
facilement face.
Je crois que généralement il serait inconvenant de rien donner aux
localités. Les autres années vous savez combien de demandes successives vous
ont été faites pour des communes ; ces demandes se renouvelleront si vous en
accueillez une seule.
Quant à moi, si
j’avais prévu que des demandes semblables fussent accordées, j’en aurait fait
une pour la province du Limbourg qui a été privée de son athénée, lequel était
à Maestricht. Ni Tongres, ni Ruremonde n’ont rien obtenu pour augmenter leurs
collèges, et rien ne remplace l’athénée. Mais, messieurs, ajournons toutes les
demandes de cette nature ; nous sommes à la veille de voter une loi sur
l’enseignement primaire ; attendons cette loi avant de rien modifier. Je le
répète, si la ville de Bruges a des besoins extraordinaires le gouvernement
aura le moyen d’y pourvoir. Je persiste à penser qu’il serait dangereux et
inconvenant d’accorder l’allocation.
M.
Devaux. - Il ne s’agit pas, messieurs, pour la chambre d’allouer un
subside à une localité spéciale ; le gouvernement pense qu’il y a lieu de
majorer un article du budget ; on a pu dire les motifs qui militent en faveur
de cette majoration, mais, je le répète, dans aucun cas il ne peut être
question pour la chambre d’allouer un subside pour une localité spéciale. C’est
là l’affaire de l’administration.
L’argumentation de
M. Dumortier se réduit à ceci : « Vous êtes pauvres, nous sommes riches ;
faites comme nous. »
M. Dumortier. - Nous sommes riches par nos
impôts !
M.
Devaux. - Mais les mêmes impôts n’offrent pas les mêmes produits quand
une population a peu de ressources que quand elle est riche. Voulez-vous
apprécier ces ressources ? le moyen est bien simple. Comparez les produits des
7 centimes additionnels que différentes villes perçoivent sur les contributions
personnelle et foncière ; eh bien, messieurs, ces 7 centimes additionnels
produisent :
Pour Bruxelles, fr.
105,000.
Pour Gand, fr.
47,000
Pour Anvers, fr.
60,000
Pour Liège, fr.
29,000
Pour Bruges, fr.
14,900
C’est-à-dire que la
contribution personnelle et foncière rapporte à la ville de Bruxelles 1 fr. 5
c. par habitant, à Gand 54 centimes, à Anvers, 81, à Liége 49, tandis qu’elle
ne produit à Bruges que 32 centimes par habitant.
Voilà, messieurs,
une démonstration bien claire que ce ne sont pas les impôts, mais la matière
imposable qui fait défaut à Bruges.
La ville de Tournay, dit l’honorable préopinant a une académie de
peinture, un conservatoire ; eh bien, messieurs, Bruges ne peut rien faire de
tout cela ; l’académie de peinture de Bruges est une institution particulière,
et cette ville n’a ni conservatoire ni école de musique.
La ville de Bruges,
messieurs, se trouve dans une positon spéciale en ce qu’elle ne supporte pas
seulement des charges proportionnées à sa population actuelle, qui est de
43,000 habitants, mais des charges proportionnées à son ancienne population ;
la ville est assez étendue pour contenir 100 mille habitants : il résulte de là
des charges beaucoup plus fortes que celles qu’elle aurait à supporter si son
étendue était proportionnée à sa population.
Il me semble,
messieurs, que ces motifs suffisent pour vous déterminer à mettre le
gouvernement à même d’allouer à la ville de Bruges un subside en faveur de ses
écoles primaires où, faute de ressources, les enfants sont maintenus pour ainsi
dire entassés dans des locaux malsains ; où rien n’est suffisant. Mais je le
répète il ne s’agit pas de voter un crédit spécialement pour la ville de Bruges
; il est seulement question d’accorder au gouvernement, comme on le fait tous
les ans, la faculté d’allouer un subside à telle ou telle ville, lorsqu’il le
jugera convenable.
M. Dumortier. - Messieurs, l’honorable
préopinant me fait dire tout le contraire de ce que j’ai dit ; il prétend que
mes observations se réduisent à ceci : « Nous sommes riches, vous êtes
pauvres, faites comme nous ! » Ce n’est point du tout là ce que j’ai dit ;
j’ai dit, messieurs : « La ville de Tournay a établi des impôts très
onéreux, des charges très fortes, et par ce moyen elle pourvoit à tous ses
besoins sans venir demander des subsides au gouvernement ; faites comme nous,
établissez des impôts suffisants pour couvrir les dépenses que vous croyez
devoir faire. » On dit : « Nous avons établi des impôts, mais les
ressources nous manquent. » Il est manifeste, messieurs, que les habitants
de Tournay paient deux fois plus d’impôts que les habitants de Bruges ; il est
manifeste aussi que sur une population de 25,000 habitants nous avons 17,000
pauvres, tandis que Bruges n’en a que le même nombre sur une population de
43,000 habitants. Cela prouve suffisamment, ce me semble, que les ressources ne
sont pas plus abondantes à Tournay qu’à Bruges.
Je le déclare donc,
messieurs, si l’amendement est adopté, je demanderai aussi 5,000 fr. pour la
ville de Tournay, et j’engagerai chacun de nous à en faire autant en faveur de
sa localité, car si le trésor public est au pillage, il faut que tout le monde
en profite.
- Le chiffre de
259,900 francs est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
Le chiffre primitif
de 255,000 francs est ensuite mis aux voix et adopté.
Chapitre
V. – Cultes
Article
3
M.
le président. - Dans la séance d’hier la chambre a ajourné à aujourd’hui
l’article 3 du chapitre V allouant un crédit de 80,000 francs pour le culte
protestant ; la discussion est ouverte sur cet article.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - J’ai demandé la parole,
messieurs, pour donner quelques explications sur la réclamation qui nous a été
adressée par le comité de direction du culte protestant dans la province de
Limbourg. On sait, messieurs, que la pétition se fonde sur ce que, sous le
gouvernement précédent, il existait une direction centrale du culte protestant,
établie à Maestricht ; mais, messieurs, indépendamment de ce que le nombre des
protestants a singulièrement diminué dans la province de Limbourg (si ma
mémoire est fidèle, le chiffre ne s’en élève plus guère qu’à 1,200), la
direction dont il s’agit a été supprimée de fait à l’époque de la révolution,
par suite de l’occupation de la ville de Maestricht par les troupes
hollandaises, et ceux qui réclament aujourd’hui la même position que l’ancienne
direction ont obtenu leur titre du suffrage de quelques-uns des pasteurs du
Limbourg, je pense même de la majorité de ces pasteurs ; mais ce qu’il y a de
certain, c’est que tous n’ont pas voulu reconnaître la direction dont il s’agit
; ce qu’il y a de certain encore, c’est que dans les autres parties du royaume
les pasteurs protestants ne reconnaissent point de direction ; ils
correspondent directement avec les autorités provinciales pour ce qui concerne
les affaires matérielles, et sous le rapport religieux ils ne reconnaissent
l’autorité de personne.
M. Dumortier. - Ce que vient de dire
M. le ministre de l'intérieur prouve qu’il n’y a pas lieu à voter le crédit ;
si tout le culte protestant reconnaissait la direction dont il s’agit, il
faudrait lui accorder un subside, mais puisque les protestants ne s’entendent
pas eux-mêmes à cet égard, je crois qu’il convient de laisser les choses dans
l’état où elles se trouvent. J’ai vu d’ailleurs des ministres protestants qui
m’ont dit être très content de la situation où se trouve leur culte.
M. Pollénus. - Dans la séance d’hier
j’ai demandé, messieurs, que la discussion de l’article qui nous occupe en ce
moment fût remise à aujourd’hui afin de laisser au gouvernement le loisir
d’examiner les motifs de la demande d’une augmentation de subside pour le culte
protestant. Vous venez maintenant d’entendre M. le ministre de l'intérieur, qui
vous apprend que la direction, en faveur de laquelle le subside est demandé,
n’existe plus ; en admettant ce fait, il est évident que l’augmentation ne peut
être accordée, et il faut reconnaître que la demande n’a pas été suffisamment
justifiée ; si les réclamants avaient fourni des preuves à l’appui de leur
demande, ce qu’ils n’ont pas fait, alors j’aurais invoqué en leur faveur ce qui
s’est pratiqué depuis 1830, car la chambre a constamment montré qu’elle était
animée des sentiments de tolérance et qu’elle ne voulait rien innover au
détriment d’un culte quelconque ; mais puisque la demande n’est pas accompagnée
d’une justification suffisante, et d’après ce que vient de nous dire M. le
ministre de l'intérieur, je ne ferai aucune proposition.
M.
le président. - Je mettrai d’abord aux voix le chiffre de 80,000 fr.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Le chiffre de 79,000 fr. est celui qui a
été voté l’année dernière et que nous demandons également cette année ; nous
n’avions pas de motifs pour demander une majoration ; c’est par une erreur
d’impression qu’il a été mis 80,000 fr.
- Le chiffre de
79,000 fr. est mis aux voix et adopté.
Articles
4 et 5
« Art. 4. Culte israélite : fr.
10,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 5.
Secours : fr. 60,000. »
- Adopté.
Chapitres
VI et VII
M.
le président. - Nous passons au chapitre VIII, les chapitres VI et VII
étant transférées au budget du ministère des travaux publics.
Chapitre
VIII. – Subsides aux villes et communes
« Article
unique. Subsides aux villes et communes dont les ressources sont insuffisantes
: fr. 20,000. »
M.
Desmet. - Je demande la parole pour faire une simple observation. Ce
n’est pas sans surprise que j’ai parcouru le tableau de la répartition qui a
été faite du crédit alloué pour cet objet au budget de 1836.
Si l’on en excepte
deux communes, Turnhout et Silenrieux, toutes les localités qui ont été comprises
dans la répartition appartiennent au district de Bruxelles.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Messieurs, l’honorable préopinant est dans
l’erreur ; je puis assurer que nous n’avons fait aucune acception de communes
dans la répartition de la somme votée l’année dernière.
Il est très vrai
que dans une circonstance toute particulière la ville de Bruxelles a obtenu un
subside assez élevé ; mais les motifs en ont été expliqués. Il était vraiment
déplorable de voir la rue Royale et le Parc dans un état de dégradation qui
faisait honte à la capitale de
C’est pour faire cesser cet état de choses, que le gouvernement a pris
le parti d’accorder le subside ; la ville a alloué le surplus, et tous les
dégâts ont été immédiatement réparés.
M.
Desmet. - Messieurs, je n’ai qu’à dire un mot. En faisant tout à
l’heure mon observation, je n’ai nullement voulu inculper les intentions de M.
le ministre de l'intérieur ; je n’ai voulu que constater un fait.
M. Dumortier. - Est-il réellement
nécessaire de maintenir au budget une somme pour être affectée à des subsides
en faveur de communes dont les ressources sont insuffisantes ? Je désirerais
que M. le ministre de l’intérieur voulût bien nous donner une assurance à cet
égard.
Vous vous
rappellerez, messieurs, dans quelles circonstances nous avons voté pour la
première fois une allocation de ce genre ; c’était à l’époque qui a suivi
immédiatement la révolution. Plusieurs localités éprouvaient alors de grands
besoins ; elles s’étaient imposé de très grands sacrifices pour donner de
l’ouvrage à la classe pauvre. Aussi nous nous sommes empressés de notre côté de
voter des crédits très considérables ; si mes souvenirs sont fidèles, nous
avons alloué jusqu’à 300,000 florins.
Cet état de choses
étant venu à cesser, il va sans dire que les secours doivent ainsi ne plus être
accordés.
Dans l’état actuel
de nos lois, lorsque la commune n’a pas assez de ressources pour subvenir ses
dépenses, c’est à la province qu’elle doit s’adresser pour obtenir des
subsides.
Je pense donc qu’il
y a lieu de supprimer au budget l’allocation dont il s’agit.
M. le ministre
de l'intérieur et des affaires étrangères (M. de Theux). - Messieurs,
il est bien certain qu’aujourd’hui la nécessité de cette allocation est
beaucoup diminuée : aussi le chiffre en est-il considérablement réduit.
Je rappellerai que
dans les premières années qui ont suivi la révolution, la somme qui a été
accordée de ce chef a été très considérable. J’ajouterai que plusieurs de ces
subsides ne sont alloués qu’à titre d’avance, et à charge de remboursement dans
un terme plus ou moins rapproché.
Mais je déclare
qu’il m’est tout à fait impossible de constater dans le moment actuel la
nécessité de l’emploi de l’allocation pendant l’année 1837, cela dépendra des
cas particuliers qui se présenteront.
M. de Jaegher. - Messieurs, je crois que la
chambré ne devrait pas rayer entièrement du budget l’allocation dont il s’agit.
Des subsides ayant une destination très utile sont prélevés sur ce crédit ; une
commune, par exemple, projette la construction d’un établissement pour les
pauvres ; elle contribue dans la dépense pour une certaine partie la province
et l’Etat se chargent du surplus.
M. Desmanet de
Biesme. - J’appuie les
observations de M. Dumortier.
Nous savons tous
dans quelles circonstances le crédit dont la discussion nous occupe a été
accordé pour la première fois ; circonstances tout à fait politiques et qui
n’existent plus aujourd’hui.
Depuis la mise en
vigueur de la loi communale, cet article doit être rayé du budget ; les dépenses
pour lesquelles des subsides pourraient être accordés sur cet article, ont été
déclarées dépenses communales.
Par suite l’allocation de ces subsides devient une affaire de faveur, et
conséquemment de jalousie entre les communes.
Tous les ans, nous
augmentons le budget de l’intérieur pour des choses que nous croyons
nécessaires, mais je pense que l’allocation dont il s’agit n’est pas de cette
catégorie, et qu’il y a lieu par conséquent de ne plus la porter au budget.
D’après ces
considérations, je voterai contre le chiffre en discussion.
M. Verdussen. - Messieurs, je pense aussi que
le crédit ne doit pas figurer au budget. Si une commune se trouve dans le cas
de devoir recourir au gouvernement, le subside qu’on voudrait lui accorder
devrait faire l’objet d’une proposition spéciale.
Au reste, je pense
qu’il est beaucoup plus dans l’ordre que les communes dont les ressources sont
insuffisantes s’adressent d’abord à la province ; si celle-ci n’a pas assez de
moyens pour accorder le subside demandé, que l’Etat intervienne alors, je le
veux bien ; mais je le répète, l’allocation doit toujours faire l’objet d’une
disposition spéciale et particulière.
- Il est procédé au
vote, par appel nominal, sur le chiffre de 20,000 fr.
53 membres prennent
part au vote.
44 répondent non.
9 répondent oui.
En conséquence, le
chiffre n’est pas adopté.
Ont répondu non :
MM. Bekaert, Goblet, Brabant, Cornet de Grez, Dams, de Jaegher, de Puydt, de
Renesse, Desmaisières, Desmanet de Biesme, Desmet, de Terbecq, d’Hoffschmidt,
Dubois, Dubus (aîné), Dumortier, Eloy de Burdinne, Fallon, Heptia, Hye-Hoys,
Keppenne, Kervyn, Mast de Vries, Morel-Danheel, Pirmez, Pirson, Pollénus,
Raymaeckers, A. Rodenbach, Simons, Stas de Volder, Thienpont, Trentesaux, Troye,
Ullens, Vandenbossche, Vanderbelen, Verdussen, Vergauwen, Verrue-Lafrancq, Van
Hoobrouck, C. Vuylsteke, Watlet et Zoude.
Ont répondu oui :
MM. de Longrée, de Muelenaere, de Nef, Dequesne, de Theux, Devaux, Milcamps et
Smits.
Chapitres
IX et X
A transférer au
budget du département des travaux publics
Chapitre XI. – Industrie, commerce, agriculture
Article
premier
« Art. 1er.
Encouragement à l’industrie et au commerce, frais de rédaction et de
publication de la statistique industrielle et commerciale : fr. 220,000. »
M. de Muelenaere. - Messieurs, je demande la permission de vous
entretenir un instant d’un objet qui me semble d’un intérêt assez majeur.
Mes observations ne
se rattachent pas au chiffre du budget, mais elles ont rapport à une question
industrielle et commerciale que je livre aux méditations de M. le ministre de
l'intérieur.
Il est vrai,
messieurs, que cette question aurait mieux trouvé sa place dans une discussion
qui probablement se présentera bientôt ; mais peut-être alors serait-il trop
tard ; et, à défaut de renseignements que ne peuvent être bien recueillis que
par le gouvernement, la chambre se trouverait hors d’état de pouvoir apporter
un remède au mal.
Il n’est pas dans
mon intention de provoquer une discussion immédiate, je désire uniquement
soumettre une demande à M. le ministre de l’intérieur.
Ceux qui s’occupent
d’agriculture, et particulièrement les députés des Flandres, savent que la
culture des graines oléagineuses constitue une des branches essentielles de
notre richesse agricole.
Sous ce rapport,
cette culture est digne de toute notre sollicitude, D’un autre côté, ces
semences oléagineuses servent à la fabrication des huiles, et cette fabrication
par son importance mérite également toute notre attention. De tout temps les
graines oléagineuses ont trouvé en France un débouché facile. Je me rappelle
que j’ai souvent entendu des plaintes amères de la part des fabricants d’huile
contre l’exportation des graines oléagineuses à l’époque où le tarif français
les frappait d’un droit d’entrée de 11 à 12 fr. par 100 kilog. Ces plaintes
n’ont rien d’étrange. En effet, cette matière première ne sort du pays que pour
y rentrer immédiatement après, sous une autre forme, au grand préjudice des
fabriques indigènes, c’est-à-dire convertie en huiles et en tourteaux.
Si ces plaintes
étaient déjà très vives, et non peut-être sans raison, à l’époque où, comme je
viens de le dire, le tarif français frappait d’un droit assez élevé nos graines
à l’entrée en France, combien ces plaintes ne doivent-elles pas être plus
fortes, maintenant que la France, dans l’intérêt des fabriques qui s’érigent
dans le département du Nord, vient de réduire le droit d’entrée de 11 fr. à un
simple droit de balance de quelques centimes ou tout au plus d’un franc. Les
renseignements me manquent pour me former une opinion raisonnée à cet égard ;
mais je désirerais savoir s’il est vrai que la plupart de nos moulins à huile
sont en souffrance par suite de la difficulté que les fabricants éprouvent à se
procurer la matière première. Je désirerais savoir s’il est vrai qu’une grande
partie du pays reçoit ses approvisionnements d’huile de l’étranger ; s’il est
vrai que dans l’une des provinces les plus considérables du pays, où il se fait
une grande consommation de tourteaux, les quatre cinquièmes de
l’approvisionnement sont tirés de
Vous sentez que, si ces faits sont vrais, sont constatés, il est urgent
au moyen de porter un remède au mal.
Deux moyens se
présentent, vous les devinez ; mais à défaut de renseignements, je ne sais
auquel je dois m’arrêter ; je ne sais pas même s’il ne faudra pas les combiner
et les appliquer simultanément dans des proportions équitables.
Un malaise existe, et le malaise est assez grand ; les modifications
apportées au tarit français vont accroître le mal. Ce mal, je le signale, et je
me borne à demander à M. le ministre de l’intérieur si cette question a fixé
son attention. Dans le cas contraire, je le prierai de s’entourer, le plus tôt
possible, des lumières et des renseignements nécessaires pour que la chambre,
en temps et lieu, puisse être mise à même de se prononcer sur les mesures qu’il
convient d’adopter.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Les questions soulevées par l’honorable
préopinant ont attiré notre attention. Du moment que nous avons connu qu’il
existait des plaintes sur l’état de l’industrie de la fabrication des huiles,
nous nous sommes empressés de recueillir des renseignements. Mais ces
renseignements ne nous sont pas encore parvenus ; je ne serais pas à même de
donner pour le moment tous les éclaircissements que la chambre pourrait désirer
sur ces questions. Mais nous ne perdrons pas de vue cet objet, qui est d’un
grand intérêt pour le pays.
M. A. Rodenbach. - Les faits
signalés par l’honorable M. de Muelenaere sont constants. Dans la moitié de
L’augmentation qu’a
éprouvée le charbon dans la moitié de
M.
Desmet. - M. le ministre va prendre des renseignements sur l’article
des graines de colza, mais il ne doit pas faire ces démarches, qui ne sont
nullement nécessaires, car nous sommes amplement informés de tout ce que nous
devons connaître à ce sujet. Nous connaissons les modifications que
Je le répète
encore, les modifications que
D’un autre côté,
nous gênons de toute façon l’industrie de la fabrication des huiles ; ou fait
payer une patente pour battre le colza, on en exige également une de celui qui
écrase les tourteaux, puis de celui qui débite les tourteaux, et enfin de celui
qui débite l’huile. Toutes ces tracasseries enlèvent à cette industrie tous ses
bénéfices. Je le dis encore, on n’a besoin d’aucun renseignement pour se
convaincre de l’état fâcheux de cette industrie ; tout le monde le connaît. Un
grand nombre de pétitions vous ont été adressées à cet égard.
Mais aussi, quand elle ne veut rien faire pour nous, quand elle ne nous
donne rien, nous ne serons pas si maladroits, je l’espère, de lui donner
quelque chose !
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Je dois relever l’assertion de l’honorable
préopinant, que
M. Dumortier. - Je remercie
l’honorable député de Courtray des observations qu’il vient de soumettre à
l’attention de la chambre. Nous ne devons pas regarder comme une concession la
mesure par laquelle
Ce que nous
pourrions faire, ce serait d’établir un droit modéré et sage qui favorisât
notre industrie. Il est de fait de l’état de nos fabriques d’huiles est très
peu prospère ; je remercie, je le répète, l’honorable député de Courtray des
observations qu’il a présentées. Elles porteront leurs fruits. La chambre,
étant informée de l’état des choses, verra ce qu’elle doit faire ; elle prendra
en considération les observations qui lui ont été présentées, s’occupera des
modifications à apporter à notre tarif des douanes : cet objet est digne de
toute notre sollicitude.
M. Smits. - J’ai demandé la parole pour
faire remarquer que la réduction apportée par
Quant à la question
soulevée par l’honorable M. de Muelenaere, une espèce d’enquête a été faite
pour connaître l’état des choses et consulter tous les intérêts. Cette question
est assez difficile à résoudre. D’un côté c’est l’agriculture qui demande la
libre exportation de ses produits ; il est de son intérêt de chercher à les
écouler ; d’un autre côté ce sont les fabricants d’huile qui demandent que la
sortie des graines oléagineuses soit frappée de hauts droits ; en troisième
lieu, vous avez l’agriculture qui demande que les tourteaux soient fortement
imposés à la sortie et restent dans le pays ; et en quatrième lieu les
fabricants demandent à pouvoir écouler leurs tourteaux. Voilà donc quatre
intérêts opposés ; il faut trouver le point juste où ces diverses prétentions
doivent s’arrêter, c’est ce que le gouvernement cherche.
J’ai voulu vous
soumettre ces observations pour vous faire apprécier la difficulté que présente
la solution des questions soulevées.
M. Dubus. - Ainsi qu’on vient de le faire
remarquer, un autre intérêt que celui des fabricants d’huile se trouve en jeu dans
cette question, c’est l’intérêt de l’agriculture. Pour les fabricants d’huile,
les graines oléagineuses sont une matière première qu’il ne faut pas laisser
sortir trop facilement, parce qu’ils en ont besoin, disent-ils, pour la
fabriquer. Mais si la graine est pour eux une matière première, pour le
cultivateur c’est un produit, c’est ce qu’il obtient par l’exercice de son
industrie. Ainsi quant à lui, il est intéressé à ce que vous ne provoquiez pas
une mesure dont le résultat serait d’avilir le prix de sa production.
En avilissant le
prix des graines, vous frappez l’agriculture. Il me semble que plusieurs des
raisons qu’on a fait valoir tendraient à obtenir l’avilissement des graines
oléagineuses, afin que les fabricants d’huile pussent gagner plus d’argent.
Mais ce ne serait là qu’un déplacement d’écus. Les fabricants d’huile
gagneraient plus d’argent ; mais aux dépens de qui ? Aux dépens des
agriculteurs. Il faut donc examiner la question sous ces deux faces. Il ne faut
pas perdre de vue l’intérêt de l’agriculture.
Je conviens que
nous devons tenir à ce qu’autant que faire se peut les huiles consommées en
Belgique soient le résultat de la fabrication du pays, et que les Français ne
viennent pas acheter nos graines et ensuite nous vendre leurs huiles.
Il y a des mesures
par lesquelles on peut empêcher un pareil état de choses.
On nous dit que la mesure prise par le gouvernement français à l’égard
de nos graines est toute dans l’intérêt de
C’est une question
qui mérite d’être mûrement examinée. J’engage M. le ministre à la considérer
sous toutes ses faces et à ne pas perdre de vue l’intérêt de l’agriculture, qui
paraît avoir échappé aux premiers orateurs qui ont pris la parole dans cette
discussion.
M. A. Rodenbach. - Je pense que les
honorables collègues qui ont parlé avant moi, n’ont pas perdu de vue l’intérêt
de l’agriculture. Nous ne voulons en aucune façon sacrifier l’agriculture ;
nous nous sommes montrés ses plus fermes soutiens dans toutes les
circonstances, et nous en agirons encore de même aujourd’hui. Mais nous ne
pouvons pas lui donner une faveur tellement grande que nous ruinions
l’industrie, il faut un système qui concilie les intérêts de l’industrie et de
l’agriculture. Nous ne pouvons pas accorder toute faveur à l’agriculture et
faire chômer tous nos moulins.
C’est un fait
constaté qu’ils sont obligés de chômer.
Je vais vous
expliquer pourquoi les Français ont intérêt à accaparer nos graines.
Je ne demande pas qu’on prohibe les graines à la sortie, je me suis
toujours prononcé contre la prohibition ; quand les Flandres ont demandé la
prohibition de certains articles, j’ai voté contre leur demande. Je veux un
tarif qui protégé en même temps l’agriculture et l’industrie. Je demande un
droit suffisant pour remédier au mal, parce que le mal est certain, l’enquête
le prouvera.
Comme on fabrique
infiniment plus d’huile dans le département du Nord qu’en Belgique, et que nous
manquons de tourteaux pour la culture du lin, nous sommes obligés d’en faire
venir de France. De sorte que notre graine sort au préjudice de nos fabriques,
et nous revient partie en huile, partie en tourteaux.
Si vous voulez
anéantir nos fabriques, proclamez le principe de la liberté de commerce ; vous
n’aurez plus de fabriques. Je ne pense pas que ce soit l’intention du
gouvernement, d’anéantir l’industrie pour favoriser l’agriculture et le commerce.
M. de Muelenaere. - Mon intention, en présentant mes observations,
n’était pas de provoquer la discussion qui s’agite en ce moment, mais seulement
d’engager le gouvernement à s’entourer de renseignements, afin qu’on puisse, en
temps et lieu, s’occuper utilement de la question que j’ai soulevée. Il n’était
pas entre non plus dans ma pensée de provoquer l’avilissement du prix des
graines oléagineuses. J’ai commencé par dire que la culture de ces graines
constituait une des branches essentielles de notre richesse agricole, et que
sous ce rapport cette culture méritait toute notre sollicitude.
Ce que je veux, je
le répète, que le gouvernement se livre à l’examen sérieux de cette question,
et qu’après avoir réuni tous les renseignements nécessaires, il propose des
mesures de nature à concilier les intérêts de l’agriculture avec ce que réclame
la fabrication des huiles et des tourteaux.
Autrefois,
Je le répète, il
existe un malaise ; le mal se fait sentir vivement ; je n’indique pas le, moyen
d’y porter remède, je l’ignore à défaut de renseignements ; j’engage le
gouvernement à y réfléchir et à nous proposer les moyens qu’il croira les plus
convenables ; la chambre adoptera ceux qui lui paraîtront devoir atteindre le
but que nous nous proposons.
M.
Pirmez. - On a signalé comme un mal la mesure prise par
Il faut avouer que
nos fabricants d’huile sont d’une extrême maladresse, si les Français viennent
prendre nos graines pour aller fabriquer en France, et peuvent ensuite nous
renvoyer cette huile à meilleur marché que nos producteurs. En vérité, il faut
qu’ils soient bien maladroits !
Ce n’est pas le
moment de traiter cette question. Quand en serons là, on prouvera que ceux qui
condamnent les modifications apportées par
- L’article premier
est mis aux voix et adopté.
Article
2
« Art. 2.
Secours maritimes : fr. 40,000. »
- Adopté.
« Art. 3.
Pêche nationale : fr. 40,000. »
M.
Smits. - Ces 40 mille francs sont destinés à encourager la pêche
maritime. Depuis deux ans le gouvernements a présenté un projet de loi ayant
pour but de régler la distribution des primes pour la pêche du cabillaud et du
hareng mais jusqu’ici la législature n’a pas eu le temps de s’occuper de cette
loi. Cependant la pêche souffre de cet état de choses.
Beaucoup de
pécheurs émigrent. Je demanderai s’il ne serait pas convenable d’autoriser le
gouvernement par un vote de confiance à distribuer cette allocation en primes,
mais de la manière déterminée par le projet de loi qui vous est soumis.
Je demande que la
chambre, en attendant le vote de la loi sur la matière, accorde cette faculté
au gouvernement.
M. Dumortier. - J’avais demandé la parole en
même temps que l’honorable préopinant pour faire remarquer comme lui que la
pêche maritime est en souffrance. Vous avez témoigné le désir de venir au
secours de cette industrie.
La pêche, comme
vous le savez, est l’agriculture de la mer. Il dépend de nous de profiter des
produits que la mer nous offre. C’est une richesse dont le pays peut s’emparer
sans dépense aucune, sans exposer de capitaux ; ce qu’on emploie pour
construire et armer les vaisseaux, cordages, fers, ancres, tout cela est le
produit de notre industrie, et la pêche est une pépinière de marins.
Il est à désirer
que
Dans l’adresse que
vous avez votée en réponse au discours du trône, vous avez déclaré que la pêche
serait l’objet de votre sollicitude : le moment est venu de remplir les
promesses que vous avez faites au pays dans une occasion aussi solennelle :
votez donc le subside proposé par le gouvernement. Toutefois, ce vote ne suffirait
pas à lui seul, parce que ce crédit se trouve stérile dans les mains du
ministre de l’intérieur, à défaut d’une loi qui l’autorise à disposer de ce
crédit et qui règle les mesures à prendre en pareil cas ; mais il semble que
nous pouvons très bien combler cette lacune législative par une simple
disposition que je vais proposer. Je voudrais que l’on mît dans le budget :
« Jusqu’à ce qu’il y ait été pourvu par une loi, les primes pour la pêche
de la morue et du hareng seront payées sur le même pied qu’elles l’étaient
avant la révolution. »
Par cette disposition le gouvernement aura le moyen de disposer du
crédit.
Quant à la
proposition faite par M. Smits, nous ne pouvons l’admettre : nous ne pouvons
donner un crédit au gouvernement avec la faculté d’en disposer à sa volonté ;
ce serait contraire à tout vote parlementaire ; quelque bon que soit un
ministère, dans un pays constitutionnel, il faut que ses actes soient réglés
par des lois. Mettons donc dans la loi mon amendement et, vous donnerez par là,
au ministre, la facilité de disposer du crédit que nous lui ouvrons
annuellement.
Je le répète,
j’aimerais mieux refuser le crédit que d’adopter l’amendement de M. Smits.
M. A. Rodenbach. - J’appuie les
observations présentées par l’honorable préopinant ; mais la mesure qu’il
propose n’est pas suffisante. Vous savez que tous les pêcheurs d’Ostende, de
Nieuport, de Blankenberg vont en Hollande, et il est important de porter un
prompt remède à ce mal. Je crois qu’il y a un projet tout prêt au ministère de
l’intérieur sur la pêche ; ce projet pourrait arrêter les émigrations.
Quelques primes, quelques subsides ne sont qu’un
simulacre de protection ; il faut des dispositions législatives et permanentes
pour un objet aussi important. J’invite le ministre à présenter son projet le
plus promptement possible afin que notre pêche ait une véritable protection.
M. Pollénus. - Je dois déclarer qu’il est
impossible de voter sur l’amendement présenté par M. Dumortier sans
connaissance de cause. Me dire qu’on fera comme avant la révolution, c’est ne
me rien dire ; il faudrait citer les arrêtés ou les lois qui contenaient les
mesures que l’on veut suivre. Je crois qu’il conviendrait de renvoyer
l’amendement à la section centrale.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - J’aurais préféré que l’amendement eût une
autre rédaction. Je voudrais que l’on prît pour bases de la manière d’accorder
les primes, celles qui sont dans le projet de loi dont la chambre est
actuellement saisie ; d’ici au second vote du budget de l’intérieur, la section
centrale pourra examiner la proposition qui vous est présentée, et elle pourra
faire à la chambre un rapport sommaire sur l’objet en discussion ; d’après ses
conclusions vous jugerez ce qu’il y aura à faire et quelle rédaction il faut
adopter.
M. Dumortier. - Si la chambre désire que mon
amendement soit renvoyé à la section centrale, je ne m’y opposerai pas ; mais
je n’en vois pas la nécessité. On a suivi, avant la révolution, des règles
tracées dans un arrêté que je n’ai pas sous les yeux ; on n’a pas réclamé
contre leur application, et je ne sais pas pourquoi on ne continuerait pas de
la même manière. Mais admettre la proposition du ministre de l’intérieur, ce
serait voter un projet de loi à l’occasion d’un simple amendement...
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Non pas !
M. Dumortier. - Les primes étaient
accordées autrefois en vertu d’un simple arrêté, et non en vertu d’une loi ;
les primes ne sont plus accordées maintenant parce qu’il n’y a pas de loi ;
mais si vous donnez force de loi à cet arrêté au moyen de la rédaction que je
propose, vous aurez tout ce qu’il faut ; vous aurez une mesure temporaire.
Dans la session
actuelle, vous n’aurez pas le temps de voter la loi sur les primes, et vous ne
pourrez en faire usage.
Plus tôt on examinera
le projet de loi sur les primes et plus tôt je serai satisfait ; mais,
voulez-vous, en attendant, laisser la pêche en souffrance, laisser émigrer nos
navires et nos matelots ? Ce n’est sans doute pas votre intention ; faites donc
comme faisait le roi Guillaume, et ce sera une bonne action pour le pays.
M. Smits. - L’honorable M. Dumortier veut
bien accueillir ma proposition ; mais c’est sous la condition de suivre les
lois anciennes ; ces lois anciennes accordaient une prime de 500 florins pour
chaque bâtiment qui allait à la pêche du cabillaud et du hareng ; mais elles
contenaient d’autres dispositions qui ne seraient peut-être plus applicables
dans les circonstances actuelles. Le projet présenté par le gouvernement, et qui
a été élaboré de concert avec les collèges de pêche, est beaucoup plus
favorable aux pêcheurs que les lois antérieures. Je ne veux pas discuter les
dispositions qu’il renferme ; elles seront examinées plus tard ; mais je crois
devoir lui donner la préférence
M. Dumortier a dit que l’on ne pouvait accueillir ma proposition, parce
que ce serait faire adopter un projet de loi à l’occasion d’un amendement ; je
lui ferai observer que nous n’admettons les mesures portées dans le projet que
pour un an ; le budget est annuel ; et notre vote actuel ne préjugera rien sur
l’avenir. Je persiste dans ma proposition.
M. Hye-Hoys. - Je dois dire que si la section
centrale chargée de l’examen du projet de loi relatif au primes sur la pêche
n’a pas terminé son travail, c’est qu’elle attend communication d’un autre
projet sur la pêche, et que doit présenter M. le ministre des finances. Je
demanderai à M. le ministre des finances s’il a l’intention de soumettre
prochainement ce projet à l’assemblée.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- Ce n’est pas pour examiner le mérite des amendements présentés, mais
simplement pour répondre deux mots à l’interpellation qui vient de m’être
adressée, que je prends la parole.
Effectivement,
messieurs, un projet de loi sur la pêche a été élaboré au ministère des
finances. Ce projet concerne la police à observer pour empêcher les
introductions frauduleuses du poisson de pêche étrangère ; il comprend aussi
des droits de douane plus élevés que ceux qui existent aujourd’hui sur le
poisson importé par l’étranger.
A l’égard de la
première partie de ce projet, je pense qu’il y a lieu de l’introduire par
amendement dans la loi dont il vient d’être parlé, proposée par M. le ministre
de l’intérieur pour l’encouragement de la pêche du cabillaud. Je suis en ce
moment en correspondance avec mon collègue, afin que des modifications à son
projet puissent vous être soumises, de commun accord, dans ce sens.
Relativement à l’augmentation des droits de douanes, il parait
convenable de ne vous la présenter qu’après la discussion du projet dont vous
êtes saisis, complété comme je viens de le dire.
M.
Dubois. - Je demanderai que les deux amendements soient renvoyés à la
section centrale. Je demanderai en outre que la section centrale examine s’il
ne serait pas possible de disposer des primes votées dans les années 1834 et
1835. Tous les ans les armateurs font des arrangements avec les matelots, ils
leur promettent partage dans les primes ; mais comme les primes ne sont pas
distribuées, les matelots trompés dans leur espoir ne veulent plus s’engager,
et les armateurs sont obligés d’aller en chercher en France. Si cela continue
il ne sera plus possible avoir des matelots pour la pêche.
M. Desmet. - Quand j’avais demandé la
parole, l’honorable M. Smits n’avait pas encore fait la déclaration que les
dispositions que contient le projet de loi que le ministre de l’intérieur a
présenté, sur la distribution des primes pour la pêche nationale, ne valaient
rien ou du moins n’étaient pas comme on désirait qu’elles fussent. C’est ce que
je voulais faire remarquer à la chambre, que les dispositions dudit projet de
loi avaient beaucoup été critiquées et que les personnes intéressées dans la
pêche nationale leur préféraient celles des lois hollandaises. Il n’est aussi
pas très exact d’avancer que les collèges maritimes aient approuvé le projet de
loi, car celui du port d’Ostende l’a fortement critiqué, et déclaré positivement
et dans des termes non ambigus qu’il était destructif pour la pêche nationale.
Je pense donc,
messieurs, que nous agirons très prudemment d’accepter l’amendement de
l’honorable M. Dumortier.
M. Dumortier. - Je n’ajouterai, messieurs,
que deux mots à ce qui vient d’être dit ; c’est qu’il est impossible d’adopter
la proposition qui vous est faite de mettre en vigueur une loi qui n’a pas été
examinée. Si nous admettions cette proposition, le gouvernement aurait intérêt
à ce qu’on n’examinât pas le projet qu’il nous a présenté et auquel nous
aurions donné force de loi sans aucun examen préalable. Une semblable manière
de procéder est d’ailleurs sans précédent dans les assemblées législatives.
Il vaut bien mieux
remettre provisoirement en vigueur les dispositions qui existaient sous le
gouvernement précédent. Lorsque j’ai été à Ostende, pendant l’année dernière,
j’y ai vu des pêcheurs qui m’ont dit qu’ils seraient fort satisfaits si on
mettait le gouvernement à même d’accorder les primes de la même manière que le
gouvernement hollandais les accordait ; pourquoi, messieurs, ne pas satisfaire
à un vœu si légitime ? Votez le crédit que vous votez depuis six ans, et donnez
force légale aux dispositions qui existaient avant la révolution, jusqu’à ce
que vous ayez voté le projet qui vous est présenté sur la matière ; de cette
manière vous satisferez aux besoins de l’industrie dont il s’agit et vous ne
mettrez pas le gouvernement dans la nécessité de chercher à retarder l’examen
de ce projet, comme vous le feriez en adoptant la proposition de M. Smits,
proposition que réellement je ne conçois pas et qui, si elle était admise, me
ferait voter contre tout le budget.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Je pense, messieurs, qu’il
n’est jamais entré dans la pensée de M. Smits, non plus que dans la mienne, de
vouloir faire adopter comme définitif un projet de loi qui n’a pas été discuté,
pas plus qu’il n’est entré dans la pensée de M. Dumortier et des autres
honorables membres qui appuient son amendement de vouloir faire adopter comme
définitives les anciennes dispositions qui n’ont également pas été soumises à
votre examen ; il s’agit seulement de savoir d’après quelles bases on pourra
provisoirement appliquer les primes. Puisqu’il y a doute à cet égard,
j’appuierai le renvoi à la section centrale des deux amendements (Appuyé, appuyé.)
M. Smits. - Si l’honorable M. Dumortier
ne conçoit pas comment la chambre pourrait admettre mon amendement, il me
permettra de dire que je ne conçois pas non plus comment la chambre pourrait
admettre le sien ; la seule différence qu’il y ait entre les deux propositions,
c’est que M. Dumortier demande qu’on distribue les primes conformément à une
loi qui n’existe plus, et que je demande qu’on les distribue conformément à un
projet de loi qui est présenté à la chambre.
La loi dont M.
Dumortier demande l’application n’existe plus, et n’existait même plus lorsque
la révolution a éclaté, car je crois qu’en 1830, et même en 1829, les primes
n’étaient plus distribuées aux pêcheurs. J’engage en conséquence M. Dumortier à
rectifier sa proposition ; car, je le répète, la loi dont il demande
l’application a cessé d’exister depuis 1829, si ma mémoire est fidèle.
M. Dubus. - J’ai demandé la parole pour
répondre à M. le ministre de l’intérieur et pour faire remarquer la grande
différence qu’il y a entre la proposition de mon honorable ami et celle de l’honorable
député d’Anvers. L’une et l’autre donnent, en quelque sorte, une exécution
provisoire à des dispositions qui ne sont pas maintenant eu vigueur, mais celle
de mon honorable ami tend à faire exécuter provisoirement des dispositions qui
existaient avant 1830 et dont tout le monde est censé avoir connaissance, que
tous ceux pour qui la loi aura été faite connaîtront à la simple énonciation
qui en aura été insérée au budget. Ces documents-là sont entre les mains de
tous ceux qui veulent les trouver.
Ainsi, messieurs, si vous adoptez la proposition de mon honorable ami,
tout le monde saura ce que vous aurez voulu dire, tandis que si vous adoptez
celle de M. Smits, vous invitez toute
Je vous demande, messieurs,
s’il existe un seul exemple qu’on ait rendu obligatoire un projet de loi qui
repose au greffe de la chambre et que personne ne connaît, que nous et le
ministre qui nous l’a présenté ? Une pareille proposition n’est pas même
présentable.
Du reste, je ne
m’oppose pas au renvoi des deux propositions à la section centrale, mais je
suis bien persuadé que cette section nous proposera une autre mesure que celle
de mettre à exécution un projet de loi. (La
clôture ! la clôture !)
M. Pollénus. - Je ne demande qu’à faire une
seule observation, c’est que le renvoi de la proposition de M. Smits à la
section centrale ne peut pas même avoir lieu, la constitution ne permet pas de
voter globalement une loi ; tout projet de loi doit être voté article par
article. (Aux voix ! aux voix !)
- La clôture est
mise aux voix et prononcée.
Le renvoi des deux
propositions à la section centrale est également mis aux voix et adopté.
(Moniteur belge n°42, du 11 février 1837)
« Article 4. Agriculture : fr. 366,000. »
M.
le président. - La section centrale propose l’ajournement du crédit de
12,000 fr. en faveur du jardin botanique qui est compris dans cet article.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Je vais vous donner, messieurs, quelques
explications concernant le jardin botanique ; la pétition qui nous a été
adressée à cet égard signale que la société du jardin botanique met en vente
une quantité de plantes, au détriment des jardiniers ; je vous ferai observer,
messieurs, que la société ne fait en cela que se conformer à ses statuts, où
nous trouvons, en effet, que les revenus de la société se composent : 1° du
secours annuel de 12,000 florins que le gouvernement et la ville de Bruxelles
lui ont alloué ; 2° du produit de la vente des plantes d’agrément ou d’utilité
qu’elle cultive. Ainsi, aux termes mêmes de ses statuts, la société est
autorisée à faire le commerce de plantes.
La section centrale
a élevé des doutes sur la permanence du subside qui a été alloué par le
gouvernement ; je pense, messieurs, que ces doutes doivent disparaître en
présence des deux faits que je vais vous signaler : d’abord la ville de
Bruxelles a accordé à la société d’horticulture un subside permanent pour toute
la durée de la société, et, d’un autre côté, dans les statuts de la société le
subside du gouvernement est mis sur la même ligne que celui de la ville de
Bruxelles, puisque nous y lisons que les revenus de la société se compose : 1°
du secours annuel accordé par le gouvernement et par la ville de Bruxelles. Or,
comme je le disais tout à l’heure, d’après des pièces authentiques, la ville de
Bruxelles a accordé le subside qu’elle fournit, d’une manière permanente, pour
tout le temps que doit durer la société.
Je conviens que,
malgré toute la force de ce raisonnement, la chambre a le droit d’exiger la
production de l’arrêté royal qui accorde le subside dont il s’agit ; mais je
ferai observer que les démarches qui ont été faites jusqu’ici à cette fin ont
été infructueuses, et que le contrat doit avoir été perdu ou détruit à l’époque
de la révolution.
Mais du moins il existe la présomption la plus forte que le subside de
la part du gouvernement devait être permanent. En admettant même que le subside
ne fût pas obligatoire, je dirais qu’alors encore il serait utile de le
conserver, parce qu’il est certain, d’après la situation financière de la
société, que celle-ci est hors d’état de maintenir l’établissement sur le pied
actuel, si le subside vient à ne plus être fixé.
J’ajouterai une
autre considération : c’est que la société consent à ce que le gouvernement
nomme auprès d’elle un commissaire qui serait chargé de surveiller
l’institution, de manière que la société ne se refuse nullement à ce que toute
la surveillance désirable soit exercée, pour qu’elle remplisse le but de son
institution.
M. Hye-Hoys. - Je demanderai à M. le
ministre de l'intérieur si la société n’est pas obligée de donner un cours de
botanique.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Je pense, messieurs, que la société s’est
engagée à ouvrir ses jardins pour un cours de botanique ; je crois que cette
condition est aujourd’hui remplie.
M. Dumortier. - Dans la séance
d’hier, j’ai eu l’honneur de voir plusieurs membres de la société
d’horticulture de Bruxelles ; je leur ai demandé si l’arrêté du roi Guillaume
qui a autorisé la collation du subside des 6,000 florins existait encore. Ces
messieurs m’ont répondu que dans un incendie qui a eu lieu au local de la
société d’horticulture, lors de l’invasion des Hollandais en 1830, l’arrêté
dont il s’agit a été la proie des flammes.
Mais il paraît que
deux lettres qui constatent l’existence de l’arrêtée étaient entre les mains du
secrétaire qui habitait la ville, de manière que ces deux pièces ont échappé à
l’incendie. Ces lettres sont rédigées en hollandais ; je ne connais pas cette
langue ; ceux de mes collègues qui la comprennent pourront, en prenant lecture
des deux pièces, s’assurer qu’elles certifient l’existence de l’arrêté dont il
s’agit.
Au reste, je pense
que si même l’arrêté n’existait pas, la chambre ne pourrait, selon moi, se
dispenser de voter un subside en faveur d’un des plus beaux établissements
d’horticulture en Belgique et peut-être en Europe.
M. A. Rodenbach. - Nous ne nions pas que
l’établissement d’horticulture de Bruxelles soit un des plus beaux de l’Europe.
Ce que nous voulons, c’est que l’on exécute les conditions qui ont été
attachées à l’obtention du subside. Il paraît que la société est tenue à donner
un cours de botanique dans l’établissement ; M. le ministre dit que ce cours y
est donné ; j’ai des raisons pour croire le contraire.
M. Dumortier. - L’honorable préopinant est dans
l’erreur. Si je suis bien informé, la société ne devait pas donner un cours de
botanique, mais devait seulement ouvrir ses salons pour le cours que le
gouvernement aurait voulu y faire donner. Or, la société est très disposée à
prêter ses salons dans ce but.
Je ferai remarquer,
an reste, messieurs, que ce cours ne serait pas d’une très grande utilité à
Bruxelles ; car cette capitale possède déjà deux cours de botanique professés,
l’un à l’université libre, et l’autre à l’école vétérinaire ; je pense même
qu’il y en a un troisième dans l’établissement particulier de M. Vandermaelen.
Sous ce rapport donc, l’établissement d’un quatrième cours de botanique
à Bruxelles ne serait pas d’une très grande importance.
Au reste, si des
conditions quelconques ont été attachées à
l’obtention du subside des 6,000 florins, qu’on les exécute, je le veux
bien ; mais je pense, et je le dis avec franchise, je pense que la chambre
commettrait un acte de vandalisme en supprimant l’allocation et en mettant
ainsi la société dans la triste position de devoir détruire un établissement
aussi précieux.
J’ai le ferme
espoir que la chambre ne voudra pas provoquer par son vote un aussi déplorable
résultat, et qu’elle s’empressera d’allouer les fonds nécessaires pour une
dépense aussi utile.
M.
Heptia, rapporteur. - Messieurs, la question ne se présente pas devant
la chambre comme elle s’est présentée devant la section centrale.
Lorsque la section
centrale a examiné la demande de crédit pour le jardin botanique de Bruxelles,
elle a cru reconnaître que la société, pour avoir droit à ce subside, devait
remplir certaines conditions.
D’après le
prospectus de la société, ces conditions consistaient à ériger une école de
botanique, et à donner une culture modèle pour les différents arbustes et
plantes qu’on aurait voulu acclimater dans le pays.
C’est pourquoi la
commission centrale a désiré connaître d’une manière positive si l’arrêté du
roi Guillaume en date du premier juillet 1828 existait. Elle a désiré avoir
communication de cet arrêté, pour s’assurer s’il n’y avait pas formellement
stipulé les obligations de cette société.
En place de
l’arrêté, on a fait parvenir à la section centrale trois lettres qui paraissent
établir d’une manière très probable, même certaine, que le roi Guillaume aurait
accordé un subside de 6,000 florins.
Ces pièces, je les
ai analysées dans le rapport de la section centrale. Ce sont les mêmes que
celles dont a parlé M. Dumortier ; voici quelle en est la teneur :
La première est une
lettre de cabinet, datée de La Haye (16 mai 1826), par laquelle le roi
Guillaume faisait connaître qu’il accorderait à la société un subside annuel de
6,000 florins.
La seconde est une
autre lettre du 16 juin 1827, ou plutôt un arrêté du roi Guillaume, par lequel,
sur la demande d’un nouveau subside, pour contribuer aux frais d’une exposition
de fleurs, le gouvernement accordait 500 florins, en disant que la société
avait déjà obtenu par l’arrêté du 1er juillet 1826 une somme annuelle de 6,000
florins.
Il paraît que ces
pièces n’ont été communiquées à la section centrale que parce qu’elles mentionnaient
d’une manière précise et formelle l’arrêté du 1er juillet 1826.
La troisième pièce est une lettre du 26 juin 1830, par laquelle M. le
ministre de l'intérieur d’abord faisait connaître à la société que le roi
refusait d’allouer le nouveau subside qui lui avait été demandé. Cette pièce
parle encore nominativement de l’arrêté du 1er juillet 1826.
Il est donc hors de
doute que le roi Guillaume a accordé un subside annuel à la société ; mais
comme je l’ai déjà dit, la section centrale aurait voulu savoir uniquement si
la société remplissait ses engagements.
Dans cette
circonstance, la chambre jugera s’il y a lieu à voter la somme demandée, sans
que l’arrêté du 1er juillet 1826 ait été produit.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Messieurs, il est certain que
la société n’a pas rempli toutes les obligations de ses statuts, mais on n’en
sera pas étonné, lorsqu’on prendra en considération les événements de la
révolution, les embarras financiers qui en sont résultés pour la société ;
l’incertitude de la continuation du subside qui a été remis chaque année en
question a encore contribué à ce résultat.
Mais je puis
assurer qu’aujourd’hui la société est disposée à donner le plus d’extension
possible à l’établissement, et à le mettre sur un pied complet, conformément à
ses statuts.
Les obligations
sont définies dans les statuts déjà communiquées à diverses reprises à la
chambre.
Si la chambre
exprime l’intention de continuer l’allocation des subsides, je ne doute pas que
la société ne fasse tous ses efforts pour remplir complètement ses obligations.
M. A. Rodenbach. - Au commencement
de cette discussion, le jardin botanique était magnifique ; il remplissait
parfaitement ses obligations, il donnait des cours. Nous savons maintenant
pertinemment qu’il ne donne pas de cours ; et, des conditions dont vient de
parler M. le ministre de l'intérieur, la moitié n’est pas remplie. Il y a une
demi-heure, lorsqu’a commencé la discussion, on ne disait pas cela. Ceci prouve
la nécessité de nommer un commissaire du gouvernement pour voir si la société
remplit ses engagements, car on ne peut voter ainsi chaque année des fonds à la
charge du pays.
Si j’accorde les
fonds demandés, c’est à la condition sine qua non qu’il sera nommé un
commissaire qui fera suivre l’arrêté de Guillaume, arrêté que l’on a perdu, je
ne sais pourquoi.
Puisque les statuts
énoncent des obligations, on doit tenir la main à ce que ces obligations soient
remplies.
M. de Jaegher. - Dans l’analyse, du
reste assez exacte, des titres que M. Dumortier a dans les mains, on a omis un
mot qui pourra jeter du jour sur le caractère de permanence du subside de 6,000
fl. Je crois que M. le ministre de l’intérieur vient de dire que la ville de
Bruxelles s’était engagée à continuer le subside pendant la durée de la société
; or, une lettre de 1826, que M. Dumortier a dans les mains, dit que le roi
Guillaume accorde le subside de 6,000 fl. comme l’avait accordé la ville de
Bruxelles. Je crois que cette expression est assez importante dans l’état de la
discussion, et doit nous porter à croire que l’intention du roi était de
donner, comme l’avait fait la ville, un caractère de permanence au subside
qu’il accordait.
Je me bornerai à
cette observation, et n’entrerai pas dans l’examen des questions
conditionnelles de l’exécution du contrat.
M. Dumortier. - Je ne répondrai qu’un mot à M.
A. Rodenbach. Il a prétendu que la société ne remplissait pas ses engagements,
parce qu’elle n’avait pas établi de cours. Mais on se trompe sur l’expression :
« Ecole de botanique. » Une école de botanique n’est pas un cours de
botanique. On entend par école de botanique une plantation systématique formant
le fonds d’un jardin scientifique. Ainsi un cours et une école de botanique
sont choses bien distinctes. Cette école de botanique existe : chacun de nous
peut la voir. La société a donc rempli en cela ses engagements.
M. A. Rodenbach dit que l’on a perdu l’arrêté du roi Guillaume il ne
sait pourquoi. Mais il sait au moins comment la révolution s’est faite. Il sait
qu’il y a eu des pillages, des incendies. C’est dans un de ces incendies que
les archives de la société ont été brûlées, car nous avons vu malheureusement
beaucoup d’incendies. Toute la rangé de maisons qui fait face au jardin
botanique a été incendiée.
L’honorable M. de
Muelenaere demande la parole pour parler d’une lettre en hollandais d’où
résulte un droit acquis à la société. N’y eût-il pas de droit acquis, il
faudrait encore accorder le subside. Il peut se trouver à Tournay et Gand des
jardiniers qui trouvent mauvais cet établissement. Mais nous ne devons pas nous
arrêter à cela.
M. de Muelenaere. - Vous venez d’entendre dire à M. le ministre de
l’intérieur que la ville de Bruxelles s’était engagée à payer à la société un
subside pendant toute la durée de son existence. Or, il résulte d’une lettre du
16 mai 1826 que M. le ministre de l’intérieur de l’ancien gouvernement des
Pays-Bas écrivait au baron Wellens, à cette époque bourgmestre de Bruxelles,
que le Roi s’engage, de la même manière que la ville de Bruxelles, à payer à la
société un subside annuel de 6,000 florins.
Il résulte
évidemment de là que ce subside annuel était accordé à la société pour toute la
durée de son existence. Cette intention est confirmée par une lettre du 26
juin. La société avait demandé un nouveau subside pour contribuer aux dépenses
d’une exposition de plantes. Ce nouveau subside est refusé par le motif que la
société jouit d’un subside annuel de 6,000 fl., et parce que l’état financier
de la société était tel que l’année précédente, indépendamment des intérêts, les
actionnaires ont touché un dividende. Dans cette lettre le gouvernement déclare
que, malgré cette circonstance, le subside continuera d’être payé.
Maintenant reste à savoir si la société remplit vis-à-vis du
gouvernement les conditions auxquelles le subside a été accordé. C’est au
gouvernement à y veiller. Si ces conditions ne sont pas remplies, le
gouvernement ne doit pas continuer son subside.
M. le président. - M. Zoude propose une
augmentation de 3,000 fr. en faveur de l’industrie sétifère de la province de
Liége. Il a la parole pour développer cette proposition.
M.
Zoude. - (Le discours de
l’honorable membre ne nous a pas été communiqué.)
M. Dumortier. - Je ne vois pas la
nécessité d’augmenter, à l’occasion de la proposition de M. Zoude, le chiffre
de l’article du budget en discussion, article montant à 366,000 fr. Le
gouvernement a des fonds suffisants pour faire droit à cette demande s’il la
trouve fondée ; car deux sommes pour l’industrie sétifère figurent déjà au
budget de l’intérieur, savoir : 8,000 fr. pour des vers à soie, et 10,000 fr.
pour encouragement de l’industrie sétifère. Donc 18,000 fr. Et c’est vraiment
tout ce que vaut cette industrie dans notre pays. Je pense donc qu’il n’y a pas
lieu de proposer à la chambre une augmentation de chiffre. Si la demande de M.
Zoude est fondée sur de justes motifs, qu’il appuie une allocation sur les
sommes que je viens d’indiquer.
M.
Zoude. - J’ai demandé une allocation spéciale, parce que j’ai appris au
ministère de l’intérieur que l’on ne pouvait rien distraire des deux crédits
spéciaux dont on vient de parler. Si M. le ministre de l’intérieur vent prendre
l’engagement d’accorder sur les fonds de son budget le subside que je demande,
je ne demande pas mieux que de retirer ma proposition.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Nous avons été en effet, à diverses
reprises, sollicité par M. Foulon de lui accorder un subside pour son
établissement ; si nous n’avions pris en considération que l’intérêt
particulier qu’inspire M. Foulon et les soins qu’il donne à cette entreprise,
il est certain que nous n’aurions pas hésité à lui accorder annuellement un
subside de 3,000 fr. Je dis annuellement, car, une fois ce subside commencé, il
faudra le continuer tous les ans. Mais nous avons été arrêté par cette
considération qu’il existe d’autres personnes qui s’adonnent à cette culture en
Belgique et qui ne manqueraient pas de crier au privilège. En effet, il existe
un industriel dans les Flandres qui a occupé la chambre de ses plaintes, à mon
avis très injustement, ainsi qu’il résulte des renseignements que j’ai adressés
à la commission. Mais il n’en est pas moins vrai que cela fait suffisamment
prévoir des réclamations opposées à une allocation que le gouvernement ferait
en faveur de M. Foulon.
Jusqu’à présent
nous avons accordé aux personnes qui s’adonnent à la culture du mûrier, des
prêts à charge de remboursement moyennant un intérêt modique. Attendu qu’il
s’agit d’une culture tout à fait nouvelle, nous avons fait ici ce que nous
avons fait dans des circonstances rares pour l’industrie.
Ensuite,
indépendamment des primes allouées annuellement au meilleur éducateur, il y a
une allocation pour l’établissement modèle établi aux frais de l’Etat.
Dans notre opinion,
il serait plus utile pour les établissements de culture du mûrier et d’éducation
des vers à soie qu’une loi assurât pour un nombre d’années considérable des
primes aux meilleures plantations de mûriers, au plus bel établissement
d’éducation de vers à soie, à la production la plus abondante et la meilleure.
De cette manière il y aurait des garanties permanentes ; il y aurait un
stimulant donné au zèle des personnes qui voudraient se livrer à ce genre
d’industrie.
Je dirai même que le directeur de l’établissement modèle de
Meslin-Lévêque nous a proposé de concéder cet établissement à quelqu’un qui
offrait de faire face aux dépenses de l’établissement actuel, et de le
maintenir pendant un nombre déterminé d’années si la législature voulait
accorder des primes permanentes pendant un temps d’années assez considérable
pour engager à faire les frais qu’exigent ces établissements.
Jusqu’à présent je
n’ai pas présenté de projet de loi. Cependant j’incline assez à le faire.
Si la chambre,
déterminée par l’intérêt particulier qu’inspire M. Foulon, voulait accorder une
majoration de 3,000 francs, nous ne nous y opposerions pas. Mais alors nous
serions exposé aux récriminations d’industriels qui prétendraient avoir les
mêmes droits.
M. Van Hoobrouck. - Si l’intention de l’honorable M. Zoude, en
proposant une augmentation de 3,000 fr., a été d’encourager l’entreprise de M.
Foulon, je ne m’y opposerai pas. Mais si son intention a été de créer une
succursale de l’établissement modèle de Meslin-Lévêque, je m’y opposerai de
toutes mes forces.
Vous avez à
Meslin-Lévêque un bel établissement dirigé avec le plus grand zèle par un homme
plein de connaissances en cette matière. C’est là que tous les renseignements
doivent être puisés.
M.
Zoude. - Puisqu’on vient d’élever des doutes sur les connaissances de
M. Foulon, je ferai remarquer que le rapport de M. Winssinger rend l’hommage le
plus éclatant aux connaissances de M. Foulon et aux soins qu’il prend, ainsi
que Madame son épouse, de l’établissement qu’il dirige.
M. Dumortier. - Je n’ai pas l’honneur de
connaître M. Foulon, non plus que Madame son épouse (on rit) ; mais je déclare que je ne suis pas disposé à voter pour
eux une allocation au budget, quand ce seraient les plus respectable gens du
monde. Si on admettait ce système, on formerait des établissements pour avoir
des subsides. Ce deviendrait une spéculation !
- Le chiffre de
369,000 fr., proposé par M. Zoude, est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
L’art. 4 est adopté
avec le chiffre de 366,000 fr.
« Art. 5.
Ecole vétérinaire et d’agriculture : fr. 244,000. »
M.
Desmet. - Je demande la parole pour attire l’attention de M. le
ministre de l'intérieur sur les épizooties des bêtes à cornes.
L’art. 459 du code
pénal n’est pas observé.
Ensuite les animaux
malades sont tués, et leur viande est débitée pour la nourriture des garnisons
et des prisons. J’appelle particulièrement sur ce point l’attention du ministre
; car cela doit être bien contraire, surtout en raison de la maladie régnante.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - J’ai spécialement recommandé aux
gouverneurs de province de tenir sévèrement la main aux règlements sur les
épizooties et sur le débit de la viande des bêtes abattues pour cause de
maladie.
En ce qui concerne
les mesures que le gouvernement a prises pour arrêter les épizooties, j’avoue
que ces mesures, en général, dépendent des particuliers. Des artistes
vétérinaires ont été chargés de visiter les localités où règnent les
épizooties.
Un rapport a été adressé au gouvernement. Ce rapport a été communiqué
aux autorités avec invitation d’engager les habitants à employer les moyens
indiqués pour prévenir les épizooties.
Une cause qui
exercé beaucoup d’influence sur les épizooties, c’est que les étables sont
généralement mal construites, ne sont pas espacées, ne sont pas aérées.
On a lieu de croire
que les sujets qui sortiront de l’école vétérinaire, en éclairant les
habitants, arrêteront un fléau qui cause la ruine d’un grand nombre de
cultivateurs.
M. de Jaegher. - Aux causes
signalées par M. Desmet et par M. le ministre de l'intérieur lui-même comme
s’opposant à ce que les épizooties soient arrêtées dans les Flandres, il faut
ajouter celle-ci :
Du temps du
gouvernement hollandais, il avait été formé un fonds appelé fonds de
l’agriculture, sur lequel étaient indemnisés les cultivateurs qui perdaient
quelques têtes de bétail ; ce fonds étant resté en Hollande depuis la
révolution, il a été pour ainsi dire impossible depuis lors d’indemniser de ces
pertes les cultivateurs. Il en est résulté qu’ils ont cessé de se conformer aux
règlements qu’ils devaient suivre sous peine de ne pas avoir de droits à
l’indemnité.
Je regrette que M.
le ministre de l’intérieur soit sorti depuis un instant. Je lui aurais demandé
s’il n’y aurait pas quelque moyen de remplacer le fonds dont il s’agit, de
manière à indemniser les cultivateurs qui perdent du bétail.
M. Desmanet
de Biesme. - Déjà plusieurs fois on
s’est occupé des abus qui ont lieu dans cette partie de l’agriculture. Quant à
moi, je n’attends pas grands résultats des élèves des écoles vétérinaires, sous
le rapport dont il s’agit. Je crois que la maladie qui sévit actuellement est
assez connue ; mais comme l’a fait observer M. de Jaegher, depuis que le fonds
d’agriculture n’est plus en notre possession, les habitants des campagnes
négligent d’appeler des vétérinaires brevetés, parce qu’ils ont peut qu’on
abatte leur bétail.
Je crois que pour
remédier au mal, on ferait bien d’engager les états provinciaux à rétablir la
taxe pour le fonds d’agriculture et d’en faire un fonds provincial. Le
gouvernement, avec la somme qui est au budget, pourrait alors accorder des
secours qui deviendraient efficaces pour les contrées atteintes de la maladie.
Cette maladie est
devenue presque endémique ou presque permanente dans les Flandres ; dans nos
provinces nous la connaissons moins. Elle a beaucoup d’influence sur la santé
publique, comme l’a très bien dit M. Desmet, car on conduit les bestiaux
atteints aux boucheries des villes.
J’engage M. le
ministre de l’intérieur à faire faire un fonds spécial et provincial contre la
maladie et contre les cas extraordinaires ; ce sera le meilleur moyen de
remédier au mal ou de l’atténuer.
M. de Jaegher. - Voici M. le
ministre de l’intérieur ; je dois lui répéter à peu près ce que j’ai déjà dit.
J’ai attribué l’étendue que prend l’épizootie à ce que nous n’avons plus le
fonds spécial à l’agriculture ; les cultivateurs, n’étant plus indemnisés, ont
cessé de s’adresser aux vétérinaires brevetés, parce qu’ils ont peur que
ceux-ci ne fassent abattre le bétail ; ils ont recours à des empiriques qui ne
connaissent rien à l’art de guérir les animaux, et ils vendent leurs bestiaux
malades. C’est ainsi qu’ils compromettent la santé publique. J’engageais en
conséquence M. le ministre de l’intérieur à aviser au moyen de créer de
nouveaux fonds pour l’agriculture en remplacement de ceux qui sont dans les
mains des Hollandais.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Il est certain que plus la
prime accordée pour l’abattage des bestiaux est forte, et plus facilement les
paysans se déterminent à déclarer ceux de leurs animaux qui sont atteints de la
maladie ; cela est incontestable. Aussi depuis 1832 nous avons songé à mettre à
exécution l’idée que vient d’exposer M. Desmanet de Biesme, de faire un fonds
provincial pour l’épizootie ; si nous n’avons pas présenté de projet sur la
matière, c’est parce qu’alors on ne prévoyait pas que la liquidation entre
M. Mast de Vries. - Beaucoup de
mesures sont à prendre dans les circonstances actuelles, et en voici une qui
aurait, je pense, beaucoup d’utilité : ce serait d’appliquer sur les bestiaux
une marque de santé. Les bestiaux qui, en Hollande, sont frappés par la maladie
se vendent à vil prix, et les marchands ont un grand intérêt à les faire entrer
en Belgique. Il faudrait prendre une mesure d’après laquelle les bestiaux, non
porteurs de la marque de santé, ne seraient pas reçus dans nos marchés. Selon
ce que disent plusieurs personnes qui s’occupent du commerce des bestiaux, on
fait entrer, en fraude, beaucoup d’animaux malades par les frontières d’Anvers.
Si l’épizootie est endémique dans les environs d’Anvers, à plus forte raison
doit-elle sévir en Hollande ; on devrait donc redoubler de vigilance de ce côté
de nos frontières.
M. Eloy de
Burdinne. - Les artistes
vétérinaires reçoivent-ils toujours un traitement pour visiter les animaux
malades par suite d’une épizootie ? Ils en recevaient un, comme vous savez,
sous l’ancien gouvernement. Si les animaux cessent d’être visités, le mal doit
s’accroître prodigieusement. Toutefois je dirai que si la maladie règne avec
tant de force dans certaines localités, sa malignité a pour cause une mauvaise
nourriture et le manque d’air ; car on entasse les bestiaux dans des étables
étroites et mai disposées. Ces sortes de maladies ont régné aussi dans nos
contrées, et elles y ont fait de grands ravages ; des indemnités, prises sur
les fonds de non-valeurs des provinces, ont été accordés aux propriétaires.
Cependant je m’opposerai à ce qu’il soit formé un nouveau fonds par des impôts
provinciaux ; un premier fonds a été fait ; il a été versé dans les mains du
gouvernement c’est donc au gouvernement à subvenir aux besoins pour lesquels ce
fonds a été créé.
De ce qu’un fonds
pour les pensions avait été formé et déposé dans les mains du gouvernement,
vous avez décidé qu’il serait pourvu par le budget aux pensions liquidées, en
attendant que le gouvernement hollandais, détenteur de la caisse des pensions,
ait restitué ce qu’il a emporté ; vous devez par les mêmes motifs pourvoir, par
le budget, aux indemnités que l’on accordait aux agriculteurs sur le fonds
d’agriculture. Il faut que l’on fasse à l’égard de l’agriculture ce que l’on a
fait à l’égard des fonctionnaires pensionnés. Quand on liquidera avec
M.
Desmet. - J’ai demandé la parole pour la deuxième sur l’objet en
discussion, parce qu’il me semble que M. le ministre, dans ce qu’il vient de
dire, ne reconnaît pas toute l’importance de l’épizootie qui règne actuellement
dans le bétail et tout le danger qu’elle présente. On dirait que M. le ministre
de l’intérieur n’est pas informé de ce qui se passe dans l’intérieur du pays :
qu’il veuille s’informer près des fonctionnaires subalternes et près des
autorités provinciales et municipales, il pourra se convaincre de la nécessité
urgente de prendre des mesures énergiques pour arrêter les fléaux de la maladie
contagieuse. Sous les gouvernements précédents, et particulièrement sous le
régime autrichien et français, on appréciait mieux toute l’importance du bétail
pour
C’est vraiment
inconcevable que depuis quelque temps l’administration soit si insouciante pour
ce qui regarde les maladies épidémiques du bétail ; elle l’est tellement que
les dispositions du code pénal même sur cette matière sont tombées en
désuétude. Pourrait-on me dire que, quelque part où l’épizootie existe, les
administrations municipale ou judiciaires font observer les articles 459, 460
et 461 du code pénal ? Nulle part. Cependant les dispositions en sont bien
claires, et l’objet en est si important pour que le chef du département de
l’intérieur se donne la peine d’écrire, à ce sujet, une circulaire aux
fonctionnaires subalternes.
Je dois aussi appuyer la remarque que vient de faire l’honorable M. Mast
de Vries, qui désire que le bétail étranger, à l’entrée dans le pays, reçoive
la marque de santé. Pourquoi ne prendrions-nous pas la même précaution que
prennent nos voisins les Hollandais pour garantir leur pays de la contagion,
car vous savez qu’en Hollande aucune tête de bétail ne peut entrer sans qu’elle
ait reçu la marque de santé ; à chaque bureau, il y a en permanence un artiste
vétérinaire qui visite la bête qui se présente pour entrer, en grand détail, et
quand le moindre indice de maladie se laisse apercevoir, l’entrée est
interdite. Cette précaution ne peut être critiquée de personne ; mais pourquoi
ne ferions-nous pas de même, pourquoi ne serions-nous pas aussi vigilants que
les Hollandais ? Je me flatte que M. le ministre des finances voudra bien
prendre en considération ces remarques et celles de M. Mast de Vries, et faire
exécuter cette mesure qui sera entièrement dans l’intérêt du pays et de notre
agriculture ; il y trouvera en même temps une garantie que le bétail étranger
ne sera pas entré en contrebande.
M. de Jaegher. - Si la proposition
de M. Mast de Vries est exécutable, je l’appuie ; mais il faut réfléchir que la
plupart des maladies ne sont pas ostensibles, et que le plus souvent ce n’est
qu’après un jour ou deux de traitement dans une étable que l’on s’aperçoit de
la maladie.
M. Eloy de Burdinne
a demandé si les artistes vétérinaires étaient encore payés comme ils l’étaient
sous le gouvernement hollandais, pour visiter les bestiaux ; je crois pouvoir
lui répondre par cette règle :
« Un fermier
dont le bétail est malade, pour avoir droit à une indemnité quelconque, doit
faire traiter son bétail à ses propres frais, par un artiste vétérinaire
reconnu par le gouvernement. » Vous voyez donc que le fermier préfère
appeler un vétérinaire non breveté. On a dit que plus l’indemnité sera forte et
plus le fermier s’empressera de déclarer son bétail ; cela n’est pas exact,
parce que le fermier ne veut pas faire traiter son bétail par un vétérinaire
breveté, dans la crainte qu’il ne soit abattu ; il aime mieux le vendre ; et il
propage par là la maladie dans d’autres étables.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Les fonds n’étant pas
suffisants, messieurs, pour indemniser
convenablement les propriétaires de bétail, ceux-ci évitent d’appeler un
artiste vétérinaire, de crainte qu’il ne les oblige à abattre leur bétail ;
c’est là la véritable cause du mal qu’on a signalé. En ce qui concerne les
mesures de police dont a parlé l’honorable M. Desmet, c’est l’affaire des
autorités locales, et sur ce point elles doivent être taxées ; soit de
négligence, soit d’une fausse humanité envers les détenteurs de bétail, en
voulant leur éviter la nécessité de l’abattage. Le manque de surveillance en
cette matière provient principalement de ce que les administrations communales
craignent de léser leurs habitants en les exposant à voir abattre leur bétail,
alors qu’ils conservent encore quelque espoir de guérison.
M. Devaux. - C’est sur l’art. 5,
messieurs, que j’ai demandé la parole. L’année dernière, lorsqu’il s’est agi de
l’école vétérinaire, j’ai dit que tout en attachant un grand prix à
l’établissement d’une école rurale, je trouvais peu heureuse et surtout fort
peu économique l’idée de l’établir là où on voulait la fonder et où elle se
trouve maintenant. Je ne répéterai point les observations que je faisais à cet
égard, quoique, sous le rapport de l’économie, les chiffres prouvent bien que
j’avais raison ; mais j’ai une question à adresser à M. le ministre de
l’intérieur : il y a au budget un article spécial, libellé « Ecole
vétérinaire et d’agriculture, et où figure une somme de 244,000 francs ; c’est
l’art. 5 : il semble qu’il aurait fallu porter à cet article toutes les
dépenses pour l’école vétérinaire ; mais il n’en est pas ainsi : il est encore
porté à un autre article, celui de l’agriculture, 60,000 francs pour la même
institution. Ce n’est pas tout : l’école vétérinaire touche encore des fonds
sur un troisième article : parmi les encouragements aux beaux-arts se trouvent
une somme pour la musique de l’école vétérinaire. Je ne me plains pas qu’on
enseigne le musique à l’école vétérinaire ; je désire que l’enseignement de la
musique se propage dans l’éducation du peuple, même dans l’éducation rurale,
mais il me semble qu’il serait plus régulier de porter à un seul article les
244,000 fr. qui figurent à l’art. 5, les 60,000 fr. qui sont portés à
celui de l’agriculture, et le crédit
pour la musique de l’école. Je demanderai à M. le ministre s’il trouve qu’il y
aurait des inconvénients à réunir dans l’art. 5 toutes les dépenses relatives à
l’école vétérinaire ; je lui demanderai, en outre, si à d’autres articles que
ceux que j’ai cités, il se trouve encore des dépenses pour l’établissement dont
il s’agit.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Remarquez, messieurs, que le
crédit porté à l’art.
M. Eloy de
Burdinne. - Un honorable préopinant
a paru croire, messieurs, que lorsqu’il règne une épidémie, le bétail doit être
traité d’après les dispositions qui étaient autrefois en vigueur ; il fallait
alors que les artistes vétérinaires nommés par le gouvernement, et dont il y en
avait un pour chaque canton, ou au moins pour deux cantons lorsqu’ils y étaient
requis par le conseil provincial, par le commissaire de district ou par une
commission d’agriculture, traitassent gratuitement les animaux malades ; et sur
leur déclaration que la maladie était épidémique, l’abattage était ordonné et
les propriétaires recevaient une indemnité. Voilà comment les choses se
passaient.
Je demande à M. le ministre de l’intérieur si les artistes vétérinaires
continuent à être chargés des mêmes opérations, et s’ils continuent à recevoir
un traitement.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Le traitement est continué aux anciens
artistes vétérinaires qui en avaient joui jusqu’ici ; mais l’insuffisance des
fonds n’a pas permis de l’accorder aux nouveaux artistes.
M. Dumortier. - J’ai demandé la parole, messieurs, pour appuyer les
observations de M. Devaux ; je ne pourrai jamais consentir à ce qu’on impute
des dépenses pour l’école vétérinaire, qui a un article au budget, sur le fonds
spécial de l’agriculture, et sur le fonds plus spécial encore qui est consacré
à l’encouragement des lettres et des arts ; c’est là, messieurs, une véritable
distraction des deniers publics, c’est un scandale. Les régiments de l’armée
ont aussi une musique, mais ils la paient : que l’école vétérinaire en fasse
autant, je l’approuverai ; mais je ne concevrai jamais que pour faire de la
musique dans un établissement privé, on détourne les fonds que nous avons votés
pour les sciences et les arts pour l’encouragement des hautes sciences en Belgique.
Je pense,
messieurs, que sans rien changer au vote que vous avez émis, l’on pourrait très
bien réunir dans l’article 5 tous les crédits destinés à l’école vétérinaire :
on ne peut pas dans un budget imputer des dépenses pour un même objet sur
différents articles ; il faut que chaque article ait sa spécialité, sans cela
ne seraient point catégorisées, et l’on tomberait dans un véritable chaos.
M. Devaux. - Je persiste, messieurs,
dans les observations que j’ai faites ; puisqu’il y a un article au budget pour
l’école vétérinaire, il convient d’y porter toutes les dépenses concernant cet
établissement, aussi bien les dépenses qui ne doivent être faites qu’une fois
que les dépenses annuelles. En ce qui concerne la dépense pour la musique de
l’école, je ne m’oppose pas à ce qu’on enseigne la musique aux élèves, mais je
demande que cette dépense soit portée sous son véritable nom et qu’on ne
l’impute sur l’article des sciences et des arts. Vous avez une école
industrielle à Gand pour laquelle vous votez annuellement 10,000 fr. ; eh bien,
cet objet a un article spécial au budget : qu’on porte de même à l’article qui
concerne l’école vétérinaire toutes les dépenses à faire pour cet
établissement, alors les choses seront régulièrement faites. Je demande de
nouveau à M. le ministre s’il prend encore sur d’autres articles des fonds pour
l’école vétérinaire.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Il n’est fait, messieurs,
aucune dépense pour l’école vétérinaire que sur les trois articles dont on nous
a parlé. Si les dépenses une fois à faire ont été séparées des dépenses
permanentes, ç’a été pour mieux les spécialiser ; c’était une affaire d’ordre.
Il m’est du reste indifférent que la dépense figure en entier à l’art. 5, ou
que les dépenses une fois à faire soient portées à l’art. 4, et seulement les
dépenses annuelles à l’art. 5. Quant à la musique de l’école vétérinaire,
décidément dans le budget prochain la dépense à faire pour cet objet sera
portée au même article que les autres dépenses de l’établissement.
Ce n’est d’ailleurs
pas sérieusement sans doute que l’honorable M. Dumortier a parlé, dans cette
affaire, de distraction des deniers publics, car les fonds employés à
entretenir une musique vétérinaire sont bien appliqués à l’encouragement des
beaux-arts, à moins que la musique ne fasse plus partie des beaux-arts.
M. Dumortier. - M. le ministre de l’intérieur a
eu grand tort de croire que ce n’est pas sérieusement que j’ai présenté les
observations que je viens de faire relativement à la musique vétérinaire ;
c’est très sérieusement, messieurs, que j’ai fait ces observations, et je suis
très étonné que la cour des comptes ait liquidé la somme qui concernait cet
objet ; car il était certainement du devoir de la cour des comptes de ne pas
approuver une dépense pour la musique d’un établissement particulier, imputée
sur le crédit destiné à l’encouragement des sciences et des arts, comme il
était du devoir du gouvernement de ne pas faire une pareille dépense.
La musique est au compte de ceux qui s’en procurent le plaisir ; mais il
serait étrange que dans un établissement quelconque on fît de la musique au
compte du pays.
Encore une fois,
vous ne devez pas prendre une somme destinée au paiement des professeurs de
l’école vétérinaire, sur le crédit affecté à l’encouragement des sciences et
des arts en Belgique. Ce crédit, certes, n’est pas déjà assez considérable, et
quant à l’article qui s’y rapporte, je démontrerai aisément combien un
encourage peu les sciences et les arts dans notre pays ; et lorsqu’on les
encourage si peu, n’est-il pas pénible de voir qu’une partie du crédit soit
détournée de sa véritable destination, pour être employée à un cours de musique
dans un établissement privé ?
Je maintiens,
messieurs, qu’on ne peut prélever sur le budget une somme quelconque pour être
affectée à des dépenses de récréation. Sinon, je ne vois pas de raison pour ne pas
porter au budget les traitements de maîtres de classes d’escrime. (On rit.) Oui, messieurs, c’est là que
vous en arriveriez avec ce système, si vous pouviez y donner votre assentiment.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Je pense, messieurs, que cette
allocation dont l’honorable préopinant a fait la critique, n’est pas trop
élevée ; je dis, en outre, qu’elle est très utilement employée, car, d’une
part, les élèves de l’école vétérinaire ont besoin d’une récréation convenable,
et de l’autre, ils reçoivent par là une meilleure éducation.
On dit qu’ils
devraient payer la musique. Mais, messieurs, on sait que la plupart de ces
jeunes gens sont sans fortune : c’est à tel point que plusieurs d’entre eux
reçoivent des bourses, pour être admis à l’établissement.
L’école vétérinaire
est une institution toute spéciale et qui appartient à l’Etat ; la dépense est
généralement admise comme utile, et je ne pense pas que l’honorable préopinant
la conteste sérieusement.
Ainsi, si l’article
relatif à l’école vétérinaire n’était pas voté, la chose la plus simple serait
de porter la somme de 2,800 fr. à cet article. Mais, puisque l’article est
voté, il ne vaut pas la peine pour cette année de revenir sur un vote de la
chambre. L’année prochaine, la musique de l’école vétérinaire pourra être
comprise dans les dépenses ordinaires de l’établissement.
M. Dumortier. - Je ne puis passer sous silence
la réponse que vient de faire M. le ministre de l'intérieur, car il résulterait
de cette réponse que, dans le cours de la présente année, on imputera encore la
dépense de la musique de l’école vétérinaire sur les fonds destinés à
l’encouragement des sciences et des arts.
S’il en est
tellement ainsi, je déclare que, pour ne pas sanctionner une pareille
distraction de fonds, je voterai plutôt contre le budget.
Si vous voulez de
la musique à l’école vétérinaire, imputez-en la dépense sur les fonds affectés
à cette école, et non pas sur le crédit destiné à l’encouragement des sciences
et des arts.
Quand je songe que l’année dernière on n’a donné en tout qu’une
misérable somme de 20,000 fr. pour l’encouragement des sciences et des arts,
qui ont cependant un si grand besoin de protection, je m’indigne qu’une partie
de ce crédit, voté par la législature dans les meilleures intentions du monde,
reçoive une tout autre destination.
Comment ! il se
trouve en Belgique des auteurs qui ne peuvent publier le résultat de leurs
travaux, et cela faute d’argent ; et c’est en présence d’un pareil fait qu’on
viendra distraire du crédit une somme de 2,800 fr. pour la musique de l’école
vétérinaire.
Est-ce là,
messieurs, le but que vous vous êtes proposé, quand l’année dernière vous avez
voté des fonds pour l’encouragement des sciences et des arts ? Sera-ce dans
cette intention que vous voterez une semblable allocation au budget de 1837 ?
M. Eloy de
Burdinne. - Ce qui m’étonne de la
part de ceux qui s’opposent à l’imputation sur les fonds des sciences et des
arts, du crédit affecté à la musique de l’école vétérinaire, c’est qu’ils ne
font pas la même observation an sujet des subsides qui sont accordés aux élèves
en musique, et qui font partie d’un autre établissement.
Il me semble,
messieurs, que les campagnards qui fréquentent l’école vétérinaire ont autant
de droits que les citadins particuliers aux fonds destinés aux arts et aux
sciences.
Dans mon opinion,
le subside accordé pour la musique de l’école vétérinaire ne peut figurer à
aucun autre chapitre qu’à celui où il est porté maintenant.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Il semblerait, messieurs,
d’après ce que vient de dire M. Dumortier, que le crédit dont on aurait
distrait 2,800 francs pour la musique de l’école vétérinaire ne s’élèverait
qu’à 20,000 fr. ; c’est une erreur. La somme votée l’année dernière pour
l’encouragement des sciences et des arts est de plus de 300,000 francs. Ainsi,
la somme de 2,800 francs qu’on a imputée sur ce crédit n’a pu porter préjudice
aux intentions de l’honorable M. Dumortier, alors même qu’il trouverait
défectueux l’emploi de cette somme, ce que, pour ma part, je suis loin
d’admettre.
M. Dumortier. - M. Eloy de Burdinne vient de
dire que les campagnards ont autant de droit que les citadins à participer aux
fonds destinés à l’encouragement des sciences et des arts. Je suis parfaitement
d’accord avec cet honorable membre : il est hors de doute que tous les
habitants du pays, indistinctement jouissent des mêmes droits.
Mais, je ferai
observer à l’honorable M. Eloy de Burdinne, que déjà l’école vétérinaire figure
au budget pour une somme de 300,000 francs ; il me semble que c’est faire là
une part assez large à l’école, pour qu’elle ne porte pas ses prétentions à la
jouissance d’une partie du crédit destiné aux sciences et aux arts.
Il y a, dit M. Eloy
de Burdinne, des élèves en musique qui reçoivent des subsides, et pour ceux-là,
ajoute l’honorable membre, vous n’avez à faire aucune observation. Je ferai
remarquer qu’il y a une grande différence entre les deux cas. Oui, des élèves
en musique touchent des subsides, mais la chambre a voté des fonds spéciaux
pour un conservatoire de musique ; elle avait donc déterminé la destination de
ce crédit. Mais quant à la somme de 2,800 fr., la chambre n’en a nullement
réglé l’emploi d’avance ; c’est par une communication faite par le gouvernement
à la section centrale que nous avons appris que l’on avait affecté à la musique
de l’école vétérinaire une partie d’un crédit que la chambre n’avait nullement
alloué pour un semblable usage.
Ainsi,
l’observation faite par l’honorable M. Eloy de Burdinne est dénuée de tout
fondement. (La clôture ! la clôture !)
- La clôture est
prononcée.
Le chiffre de
244,000 fr. est mis aux voix et adopté.
Chapitre
XII. – Lettres, sciences et arts ; fonds provenant des brevets, service de
santé
« Art. 1er.
Lettres, sciences et arts : fr. 307,000. »
La section centrale
propose une réduction de 40,000 fr.
M.
Heptia, rapporteur. - La première section avait proposé de réduire de
40,000 francs la somme destinée à l’encouragement des sciences et des arts, par
le motif qu’il ne doit pas y avoir en 1837 une exposition d’objets d’art à
Bruxelles.
La section centrale
a partagé cet avis, elle le dit formellement dans le rapport qu’elle a présenté
à la chambre.
M. Verdussen. - Messieurs, j’espère que la chambre
ne se rangera pas de l’avis de la section centrale qui propose une réduction de
40,000 francs sur le crédit en discussion.
J’ai encore présent
à la mémoire tout ce qui a été dit l’année dernière en faveur de l’augmentation
de ce crédit, et l’on n’a pas oublié avec quelle chaleur plusieurs honorables
membres de cette assemblée ont plaidé la cause des arts et des sciences dans
notre pays.
Le moment,
messieurs, me paraît mal choisi, pour venir demander une réduction sur le
crédit propose par le gouvernement.
En effet,
messieurs, chacun de nous a pu remarquer avec plaisir que la dernière
exposition de Bruxelles a dignement répondu à la générosité de la chambre
envers les arts ; chacun de nous a pu s’assurer que jamais allocation ne fut
mieux placée que celle qui a fait éclore en Belgique d’aussi belles
productions.
Le principal motif
allégué par la section centrale à l’appui de sa proposition de réduction est
qu’il n’y aura pas une exposition d’objets d’art à Bruxelles en 1837.
Mais, messieurs, je
pense que la section centrale n’aurait pas été d’avis d’admettre la proposition
de la première section, si elle s’était rappelée que l’arrêté du 7 janveir 1835
qui a institué une exposition triennale, n’est que la conséquence d’un arrêté
du 29 juin 1827.
Il ne s’agissait
pas seulement dans cet arrêté d’établir une exposition dans Bruxelles ; mais
dans trois villes de
C’est ainsi que
dans la ville que j’habite à Anvers, chaque fois qu’il y a une exposition, nous
avons mis 15,000 fr. de nos propres fonds. A Bruxelles, vous avez exigé un
droit d’entrée des visiteurs ; nous, nous les admettons toujours gratis. Un
jour par semaine est réservé pour les souscripteurs, et ce jour-là on ne
pourrait pas entrer en payant une rétribution ; on délivre des cartes, mais
toujours gratis.
Il ne s’agit pas de
retrancher cette somme de 40,000 fr., qu’on veut réduire comme si elle était
votée uniquement pour l’acquisition des chefs-d’œuvre qu’on rencontrerait à
l’exposition ; il faut que quand l’occasion se présente de faire l’acquisition
d’une pièce digne de figurer dans le musée national, le gouvernement puisse en
faire l’acquisition. En conséquence je demande le maintien du chiffre. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dumortier. - Je demande la discussion par littera.
Un grand nombre de voix. - A demain ! à demain !
- La séance est
levée à 4 1/2 heures.