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Note d’intention
Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du vendredi 17 février 1837
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Vérification des pouvoirs d’un membre de la chambre (Corneli) (Pollénus)
2) Projet de loi portant le budget du département des travaux publics
pour l’exercice 1837. Discussion des articles.
a) Traitement du personnel transféré du département de l’intérieur, du
personnel du chemin de fer et/ou dépenses du chemin de fer (Nothomb,
Legrelle, de Theux, Dumortier, d’Huart, Nothomb, Dumortier, Verdussen, de Theux, Pirmez, d’Huart, (+conseil des ponts
et chaussées) Desmet, Nothomb, Dubus, Nothomb, Dumortier,
Rogier, Lebeau, d’Huart,
Dumortier, de Theux, Dubus, Devaux, Dumortier,
d’Huart, Nothomb, Lebeau, Pirson)
b) Organisation de la garde civique (Nothomb, Mast de Vries, Heptia, F. de Mérode, Dumortier, Mast de Vries, Pollénus, (+armée de
réserve) Legrelle, d’Huart, Dumortier, Rogier, Nothomb, (+armée de réserve) Pirson,
Legrelle, Dubus, Heptia)
c) Construction de routes par l’Etat et répartition du produit de
l’emprunt de 6 millions et/ou du produit des barrières (Verdussen,
(Limbourg) Pollénus, de Theux,
(Hainaut) Dumortier, (+règlement de la chambre) (Verdussen, Dubus, Lebeau, Dumortier, Dubus))
(Moniteur belge n°50, du 19 février 1837)
(Présidence de M. Fallon, vice-président.)
M. Verdussen fait l’appel nominal à midi et un
quart.
M.
Kervyn donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la
rédaction en est adoptée.
M. Verdussen donne communication des pièces
suivantes adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A
« Plusieurs
habitants des communes de Neerhaeren et Reckheim (rive gauche de
- Renvoi à la
commission des pétitions.
________________
« La dame
veuve De Ridder, fermière, et les héritiers de la
veuve Storms, en son vivant fermière à Berchem,
réclament le paiement de l’indemnité qui leur revient du chef de l’incendie de
leur ferme en 1830. »
- Renvoi à la
commission des pétitions.
________________
« La chambre de commerce et des fabriques
de Bruges adresse des observations sur le projet de loi relatif à cet
objet. »
- Renvoi à la
commission chargée de l’examen du projet de loi relatif à cet objet.
________________
M. van Hoobrouck de
Fiennes demande un congé.
- Accordé.
VERIFICATION DES POUVOIRS
D’UN MEMBRE DE
M. Pollénus (pour une motion d’ordre.) - Le
rapport de la commission chargée de la vérification des pouvoirs du député élu
par le district de Maestricht a été distribué hier ; je ne vois pas de motif
pour différer davantage la discussion de ce rapport. Je propose en conséquence
de mettre cette discussion à l’ordre du jour de demain. Cette élection a eu
lieu le 22 décembre dernier, il faut enfin prendre une décision.
- La chambre
consultée met à l’ordre du jour de la prochaine séance la discussion du rapport
sur l’élection du district de Maestricht.
________________
M.
le président. - Voici comment le bureau a composé la commission chargée
d’examiner la proposition de M. Devaux : MM. Desmet, Desmaisières, Demonceau,
Liedts, Simons, de Longrée.
Nous passons à
l’ordre du jour.
PROJET DE LOI PORTANT LE
BUDGET DU DEPARTEMENT DES TRAVAUX PUBLICS POUR L’EXERCICE 1837
Discussion des articles
Chapitre premier. - Administration centrale (personnel)
Article premier
« Art. 1er.
Traitement du ministre (transféré du budget des affaires étrangères) : fr.
21,000. »
- Adopté.
« Art. 2.
Traitement des fonctionnaires, employés et gens de service :
« Traitement du
secrétaire-général : fr. 8,400.
« Traitement
des fonctionnaires et employés attachés aux anciennes divisions des ponts et
chaussées, de la milice et de la garde civique (transféré du budget de
l’intérieur) : fr. 38,000.
« Traitement des
fonctionnaires et employés de l’administration centrale des postes et
messageries (transféré du budget des finances) : fr. 44,000
« Traitement
d’un commis autrefois attaché au secrétariat-général des finances, pour le
service des postes (transféré du budget des finances) : fr. 1,000.
« Gens de
service autrefois attachés au ministère des finances, pour l’administration
centrale des postes (transféré du budget des finances) : fr. 1,850.
« Gens de
service et concierge de l’ancien ministère des affaires étrangères (transféré
du budget de ce département) : fr. 4,000.
« Ensemble :
fr. 97,250. »
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Messieurs, il n’est demandé qu’une allocation nouvelle, c’est le traitement
du secrétaire-général ; le reste consiste en transferts. Je suis forcé de dire
à la chambre que le personnel attaché au nouveau ministère des travaux publics
est insuffisant. Je crois même qu’il l’était déjà lorsque les travaux publics
ne formaient qu’une division du ministère de l’intérieur, Sous ce rapport, j’en
appellerai à mon honorable prédécesseur.
Au chapitre VIII,
dépenses imprévues, on indique un transfert de dix mille francs du budget de l’intérieur.
Mon honorable collègue a consenti à porter ce transfert à 20 mille fr. Je
demanderai qu’on partage cette somme de 20 mille francs, qu’on ajoute la moitié
au chapitre premier, et qu’on laisse l’autre moitié au chapitre dernier ;
l’ensemble du budget ne serait donc pas augmenté ; le chiffre du chapitre
premier serait porté à 107,260 fr.
Le service des
travaux publics prend tous les jours une telle extension, la correspondance
avec les autorités provinciales prend un si grand développement, que le nombre
des employés ne suffit plus. Une pièce paraphée par moi aujourd’hui, par
exemple, ne me revient de l’expédition que dans deux ou trois jours.
Il y a un
secrétaire-général, mais il n’y a pas de secrétariat-général ; il faut au
secrétaire général des employés, ces employés manquent.
Tous les orateurs
que vous avez entendus hier ont applaudi à la création d’un ministère des
travaux publics Je crois qu’il n’est pas hors de propos de vous faire connaître
ce que coûtait ce ministère sous l’ancien gouvernement. Vous verrez que la
demande que je fais et qui, en définitive, ne changera rien à l’ensemble du
budget, est extrêmement modérée.
Avant 1830, le
service des travaux publics formait, sous le nom de waterstaat
un ministère spécial comme aujourd’hui ; mais ses attributions étaient moins
étendues.
Le département dit
du waterstaat avait dans ses attributions :
1° Les routes de
première classe. Celles de deuxième classe étaient administrées par les
provinces au moyen de subsides.
2° Les rivières
navigables et quelques canaux qui n’étaient pas cédés aux provinces.
3° Les polders.
En 1837, le
ministère des travaux publics a dans ses attributions (pour la partie des
travaux publics) :
1° Les routes de
première et de deuxième classe ;
2° La concession
des routes, canaux, chemins de fer ;
3° Les rivières
navigables ;
4° Les polders ;
5° Les mines ;
6° Les bâtiments
nationaux ;
7° Les moulins et
usines ;
8° Les chemins de
fer construits aux frais de l’Etat.
En 1830,
l’administration centrale du waterstaat se composait
et était payée ainsi qu’il suit :
1 ministre, 20,000
fl.
1
secrétaire-général, 5,000 fl.
1 administrateur,
5,000 fl.
1 référendaire,
3,400 fl.
2 ingénieurs en
chef, 6,000 fl.
1
ingénieur-archiviste, 1,800 fl.
6 premiers commis,
10,600 fl.
6 commis-adjoints,
5,200 fl.
6
commis-expéditeurs, 3,600 fl.
8
huissiers-messagers, 8,000 fl.
Total pour le waterstaat, 68,000 fl.
Les mines formaient
une administration spéciale :
1 administrateur,
5,000 fl.
1 référendaire,
3,200 fl.
3 commis, 1,000,
800 et 600 fl.
1 archiviste, 750
fl.
3
huissiers-messagers, 2,400 fl.
Ensemble, 13,750
fl.
Les bâtiments
civils :
1 surintendant,
6,000 fl.
Les moulins et
usines ressortissaient à l’administration dé l’industrie placée sous un
administrateur spécial, pour mémoire, 87,000 fl.
Lorsque le siège du
gouvernement était à Bruxelles, chaque fonctionnaire ou employé touchait deux
tiers en sus de son traitement pour indemnité de déplacement. Ce déplacement
n’ayant lieu que tous les deux ans, la dépense n’était donc que d’un tiers en
sus ; mais comme tous les employés ne venaient pas à Bruxelles, on peut
l’évaluer à 1/6, 14,625 fl.
Total de ce que
coûtait l’administration centrale, 102,375 fl. ou 216,665 fr.
Au montant de ces
traitements, il faut ajouter celui des loyers. Aujourd’hui, la division du
ministère des travaux publics, qui réunit les diverses branches de service du waterstaat, des mines, des bâtiments civils, des chemins de
fer, des moulins et usines, se compose et coûte :
1 chef de division,
6,300 fr.
3 premiers commis,
ou chefs de bureau, 10,600 fr.
7 commis et
expéditionnaires, 8,740 fr.
1 huissier, 900 fr.
Total, 26,540 fr.
Il faut y ajouter 5
commis payés sur le chemin de fer, 7,700 fr.
Ensemble, 31,240
fr.
Le ministre des
travaux publics et le secrétaire-général ayant dans leurs attributions d’autres
services, il faudrait répartir leurs traitements dans la proportion des
dépenses de chacune de ces branches.
Vous voyez qu’il
n’y a aucune comparaison à faire entre l’ancien département du waterstaat et le ministère des travaux publics
d’aujourd’hui. Sans doute, il faut tenir compte de ce qui n’est plus ; par
exemple, l’administration des polders n’a plus la même étendue ; le royaume des
Pays-Bas n’existe plus en entier : aussi je ne demande ni la moitié, ni les
deux tiers du montant des anciennes allocations : cependant d’autres faits
pourraient être pris en considération ; on ne connaissait pas alors les chemins
de fer, et les demandes de concessions étaient bien moins nombreuses. Ce que je
demande est que le cinquième de ce que coûtait précédemment l’ensemble des
mêmes services.
Je me résume : je
renonce, au chapitre VIII, à demander la totalité du transfert que m’a accordé
le ministre de l’intérieur ; par compensation, je demande une augmentation au
chapitre premier.
M. le président. - M. le ministre des
travaux publics demande une augmentation de 10,000 fr.
M. de Brouckere. - Le traitement du
secrétaire-général est-il compris dans ces 10,000 fr.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Non !
M. de Brouckere. - C’est donc une
augmentation de 18,400 fr.
M. Legrelle. - Messieurs, j’ai applaudi à la
séparation du ministère des travaux publics, mais je ne désire pas que cette
séparation devienne une nouvelle source de dépenses pour le pays. C’est
cependant ce qu’on veut faire aujourd’hui. En effet, le ministre des travaux
publics, sous prétexte que ce service a pris de l’extension, vient nous
demander une augmentation de 18,000 et des francs.
M. le ministre
vient de nous parler de l’augmentation de travail qui résulte la construction
d’un chemin de fer. A moins que je ne me trompe, les dépenses occasionnées par
le chemin de fer sont déduites des produits de l’exploitation. Ainsi ces
dépenses ne figurent pas ici ; elles figureront plus tard au budget, j’espère,
car la comptabilité actuelle ne peut être considérée que comme provisoire. Pour
le moment, on ne peut donc présenter le service du chemin de fer comme
nécessitant une augmentation au budget, puisque ces dépenses sont prises sur
les recettes.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Et
l’administration centrale !
M. Legrelle. - Il est possible que la construction du chemin
de fer donné quelque travail à quelques employés de l’administration centrale ;
mais d’un autre côté, par suite de la construction du chemin de fer, on n’a
plus besoin d’exercer une aussi grande surveillance sur d’autres routes qui
sont maintenant moins fréquentées. Il y a là une espèce de compensation ; je ne
vois donc pas de motif suffisant pour accorder l’augmentation qu’on nous
demande. Nous devons rester dans les limites des crédits déjà votés.
Je consentirai à
accorder le traitement du secrétaire-général ; mais, pour l’augmentation de
10,000, j’engagerai M. le ministre à l’ajourner jusqu’au moment où les travaux
du chemin de fer tireront à leur fin, parce qu’il aura alors un excédant de
personnel dont il ne saura que faire et qui lui restera sur les bras si, dès
aujourd’hui, il augmente le personne de son administration lorsqu’il n’y a pas
nécessité absolue. Il vaut mieux marcher avec discrétion. Je demande donc que la
proposition que vient d’improviser M. le ministre des travaux publics subisse
l’examen de la section centrale avant d’être soumise au vote de la chambre.
Faites attention
que si vous votez aujourd’hui cette augmentation, ce sera fini, vous devrez la
voter chaque année. M. le ministre a eu tort d’invoquer à l’appui de sa demande
ce qui se passait sous le gouvernement précédent, car le pays entier s’est
soulevé contre les dilapidations qui se commettaient, et les nombreuses
sinécures qui existaient alors ont été une des causes de notre régénération
politique.
Je conseille à M.
le ministre de ne pas suivre cette voie erronée, et de rester dans les limites
d’une sage économie, qui est dans l’intention de la chambre et de tous ses
membres en particulier.
M. le ministre de l'intérieur et
des affaires étrangères (M. de Theux). - Si mon honorable collègue a
parlé des dépenses pour les travaux publics sous le gouvernement précédent, il
n’a pas dit qu’il prenait ce gouvernement par exemple ; loin de là, et sa
demande le prouve suffisamment, puisqu’elle est infiniment au-dessous de la
dépense faite à cette époque. Mais il faut remettre la question sur son
terrain, et l’envisager sous son véritable point de vue. Il est clair que la
création d’un ministère des travaux publics exige un secrétaire-général ; cela
est hors de toute discussion ; ainsi, il reste à savoir s’il y a lieu à
accorder 10,000 fr. de plus pour les employés des travaux publics ; je pense
que cette augmentation a été bien justifiée. Il faut considérer que la besogne
augmente d’année en année aux travaux publics : par exemple, l’emprunt de six
millions a fait naître beaucoup de projets, non seulement de la part du
gouvernement, mais de la part des provinces ; tous ces projets doivent être
contrôlés à l’administration centrale.
D’autre part le
nombre des demandes en concession est vraiment extraordinaire. Toutes doivent
être instruites convenablement et avec célérité. Dès lors il est hors de doute
qu’en mettant l’administration des travaux publics plus à l’aise, elle
accélèrera des travaux si utiles, résultat que vous voulez obtenir.
M. Dumortier. - Dans le budget du ministère des
travaux publics, on remarque plusieurs irrégularités. D’abord, on devrait tenir
compte du personnel qui est au chemin de fer ; mais voici la plus grande
irrégularité que l’on puisse signaler. Vous avez admis que dans tous les
budgets les dépenses doivent figurer au budget spécial des dépenses, et les
recettes au budget général des recettes ; c’est là un principe sacramental. Le
mettre en oubli, ce serait rendre impossible la liquidation des comptes des
divers exercices ; et vous savez de combien d’accusations le gouvernement de
Guillaume a été l’objet pour l’avoir méconnu, à dessein probablement. Je
demande donc comment il se fait que nous ne voyions pas figurer au budget des
travaux publics les dépenses relatives à la confection du chemin de fer ? Je
voudrais même voir à ce budget le personnel attaché à l’administration du
chemin de fer, soit qu’ils fassent partie de l’administration centrale, soient
qu’ils soient disséminés sur les routes. Je comprends que la première année on
n’ait pas procédé de cette manière ; il n’y avait, pour ainsi dire, alors
qu’une administration embryonnée, et on pouvait
passer par-dessus. Mais actuellement il doit en être autrement, et les employés
du chemin de fer doivent figurer au budget : la dépense qu’ils occasionnent est
permanente. Je demande donc l’insertion au budget, et des dépenses
qu’occasionne la construction du chemin de fer, et des dépenses occasionnées
par les employés à ce chemin.
M. le président. -
M. Verdussen a déposé un amendement tendant à insérer dans le budget des
dépenses qui n’y sont pas mentionnées.
M. Dumortier. - Mais il ne s’agit pas de
dépenses dont je parle, et qui sont relatives au capital employé en
constructions ; il faut que nous puissions mettre nos dépenses en regard de nos
recettes ; je ne comprends pas la comptabilité qu’on veut suivre, et cependant
je comprends un peu la comptabilité quand elle est régulière.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). -
L’honorable M. Dumortier veut que l’on porte un crédit au budget du ministère
des travaux publics pour les travaux de construction du chemin de fer ; mais le
crédit nécessaire a été voté par deux lois spéciales en 1834 et en 1836.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Je ferai d’abord remarquer que la question soulevée par l’honorable M.
Dumortier reviendra quand on discutera l’amendement de M. Verdussen. Je ne demande au budget de mon ministère que les
sommes nécessaires pour les employés de l’administration centrale. Du reste, je
m’expliquerai plus tard en détail relativement à la demande de l’honorable
membre ; il s’agit maintenant de l’administration centrale. On a allégué que
des employés spéciaux, payés sur les fonds du chemin de fer, se trouvaient à
l’administration centrale, chargés de traiter les questions que font naître les
travaux du chemin de fer ; voici ce qu’il y a de vrai dans cette allégation :
On a détaché des bureaux du chemin de fer plusieurs employés, pour une somme de
7,700 fr., afin de venir en aide, quant aux écritures, aux employés de
l’administration centrale. Ces employés ne sont en quelque sorte qu’adjoints ;
si la besogne dont ils sont chargés venait à diminuer ou à cesser, comme ils ne
sont nommés que provisoirement, ils n’auraient pas de titres pour être
maintenus à l’administration centrale. Toutes les affaires de comptabilité,
toutes les questions contentieuses que soulève le chemin de fer, se traitent
pas des employés supérieurs du ministère des travaux publics ; un chef de
bureau est chargé de toutes les questions qui se rattachent au chemin de fer,
des demandes en concessions de chemins de fer, des mines, des canaux et de
polders. C’est beaucoup, c’est peut-être trop.
Il y a un autre
chef de bureau chargé des routes, tant des routes de l’Etat, que des routes
provinciales. Je crois qu’il n’y a aucun ministère où tant d’affaires
difficiles se trouvent accumulées sur un aussi petit nombre d’employés
supérieurs.
En ce moment, je le
répète, tout ce qui concerne le chemin de fer est traité par le personnel de
mon ministère, sauf quelques commis temporairement adjoints ; je prendrai même
l’engagement envers la chambre de ne plus adjoindre à l’administration centrale
d’autres employés du chemin de fer.
M. Dumortier. - Je veux faire observer que la
question que j’ai soulevée était relative non seulement aux employés du
ministère, mais encore aux employés du chemin de fer.
Quant à ce qu’a dit M. d’Huart, que déjà on a voté des fonds par la loi
de l’emprunt de 30 millions, je lui répondrai que je sais aussi bien que lui
que nous avons voté la loi sur l’emprunt de 30 millions. Mais cela n’empêche
pas de porter les dépenses au budget des dépenses. Une loi a fixé la liste
civile pour la durée du règne. La constitution a réglé la quotité de
l’indemnité des membres de la chambre. Les traitements des membres des
tribunaux sont réglés par une loi. Vous devez néanmoins porter toutes ces
dépenses au budget des dépenses. Il doit en être ainsi pour les dépenses du
chemin de fer. Sans cela, lorsque vous arrêterez les comptes, vous ne pourrez
vous retrouver ; car les dépenses auront été faites en 1834, 1835, 1836, 1837,
1838, 1839 et 1840, et il vous faudra régler les comptes de 8 exercices pour
régler le compte du crédit du chemin de fer.
Je ferai remarquer
qu’en Belgique la durée des exercices n’est que de trois années. Quand
l’exercice sera clos, le ministre ne pourra plus imputer aucune dépense sur les
fonds du chemin de fer, attendu que la loi aura perdu ses effets. De manière
que dans tous les systèmes, dans toutes les hypothèses, il faut rentrer dans le
système de régularité.
Comment ! vous
portez au budget des dépenses pour ordre que nous ne connaissons pas, témoin
les dépenses des cautionnements, et vous ne porteriez pas au budget les
dépenses du chemin de fer.
Songez que vous
devez porter au budget des recettes tout ce qui est recette, et que vous devez
porter au budget des dépenses tout ce qui est dépense.
M. Verdussen. - Je suis d’accord avec
l’honorable préopinant quant au principe. J’ai été dans le cas de déclarer à
cet égard mon opinion, quand on a discuté le budget des voies et moyens. J’ai
dit alors qu’il fallait porter au budget des voies et moyens non seulement le
produit brut du chemin de fer, mais encore les sommes capitales affectées à la
construction de la route, d’après la loi de 1834.
Mais je crois que
la chambre n’ayant pas eu égard à cette observation, il serait intempestif de
s’en occuper maintenant.
Si vous aviez porté
au budget des voies et moyens la somme de 27,600,000 fr., produit de l’emprunt
de 30 millions négocié à 92, il me paraîtrait naturel de porter au budget des
dépenses l’emploi de cette somme.
Je n’ai pas insisté
dans la discussion du budget des voies et moyens, parce que les dépenses
devaient être réparties sur plusieurs exercices, sans que l’on pût apprécier
par avance la somme à affecter à chaque exercice.
Maintenant que la
question est renouvelée immédiatement, la chambre ne doit pas ce me semble s’y
arrêter. On examinera, si l’on veut, ces observations lors du vote de l’emprunt
dont a parlé M. de Puydt, ou de tout autre emprunt, comme de celui dont a parlé
M. le ministre de l'intérieur, pour la continuation du chemin de fer vers
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - L’honorable député de Tournay a soumis, il
y a deux ans, à la chambre la proposition qu’il lui soumet en ce moment. Elle a
été résolue négativement par la raison qu’il est impossible de déterminer
quelles dépenses doivent être faites chaque année pour le chemin de fer. En
effet cela est impossible à déterminer. Les ingénieurs ne peuvent le faire même
approximativement.
Cependant la partie
de l’emprunt affectée aux travaux du chemin de fer ne peut être dépassée par le
gouvernement. Il y doue des garanties dans la loi du chemin de fer.
La même
considération nous a empêchés de porter au budget des dépenses les dépenses d’entretien
et d’exploitation du chemin de fer. Jusqu’ici il a été impossible de déterminer
d’avance d’une manière satisfaisante les sommes à dépenser. Dès lors il n’y
avait aucun avantage à spécifier les dépenses dans les budgets ordinaires.
Je dirai quelques
mots en faveur de l’allocation de 10,000 fr. Il est à remarquer que cette somme
n’est pas nécessaire seulement pour des employés nouveaux, mais encore pour
améliorer le sort des employés anciens.
Ainsi le chef de
bureau dont on a énuméré les attributions, qui a fait d’excellentes études en
droit et qui est depuis 10 ans dans l’administration, n’a qu’un traitement de
3,200 fr. Vous concevez que journellement il a l’occasion de se placer d’une
manière plus avantageuse. C’est par attachement pour l’administration et par
l’espoir fondé de voir son sort s’améliorer qu’il a consenti à rester à de
telles conditions. Quant à moi j’avais déjà résolu de porter son traitement à
5,000 fr., parce qu’il a demandé la place de secrétaire du conseil des mines à
laquelle est attribuée un traitement de 5,000 fr. ; et certes cet avocat qui
s’occupe depuis longtemps de ces matières était le premier en titre pour
obtenir cet emploi. C’est donc dans l’intérêt de l’administration que j’avais
promis cette augmentation.
Un autre employé qui a 20 ans de service, et qui est chargé de tous les
travaux des routes ordinaires, n’a que 3,200 fr. de traitement.
Toutes les sociétés
financières accordent des traitements considérables à leurs employés. Aussi
plusieurs employés ont-ils quitté le ministère, par suite de l’impossibilité où
l’on était de fixer convenablement leur sort. Force est donc au gouvernement et
aux chambres d’accorder des traitements suffisants aux employés sous peine de
voir dépérir l’administration, ; car si les employés qui sont depuis longtemps
à l’administration, et qui ont fait une étude spéciale de l’objet de leurs
travaux, quittent le ministère, on ne pourra les remplacer que par des employés
novices et par des employés en plus grand nombre qui, n’ayant pas la même
expérience, prendront plus de temps pour traiter les mêmes matières et pour les
traiter moins bien.
Sous ce rapport je
n’hésite pas à dire que la majoration est indispensable, si l’on veut
définitivement attacher ces employés à l’administration centrale.
M. Pirmez. - On a déjà dit ce que je
voulais dire quant à la comptabilité. Mais je ferai une remarque.
Lorsqu’on a vu les ministères des
affaires étrangères et de l’intérieur réunis sur une même tête, les moins
clairvoyants ont vu que l’on voulait arriver à la création d’un sixième
ministère.
Je fais cette
remarque à propos des allocations dont il s’agit, et qui vous amènent d’une
manière détournée à la formation d’un sixième ministère. Pourquoi alors ne le
demandait-on pas franchement ? Si vous créez un sixième secrétaire-général et
tous les autres employés, il ne manquera plus que le ministère. Il valait mieux
dire franchement que vous vouliez un sixième ministère ; la chambre aurait
examiné si elle y consentait ou non.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je
trouve qu’il est assez inutile de répondre aux dernières observations du
préopinant. Le ministère a suffisamment prouvé que, dans son opinion, il n’est
pas question de nommer un sixième ministre, et si M. Pirmez avait bien voulu
tenir compte de la discussion récente, si mémorable qui a eu lieu à propos de
certain vote du budget des affaires étrangères, il aurait pu s’épargner la
réflexion qu’il vient de présenter à la chambre.
Nous avons, du
reste, déclaré alors, messieurs, que si nous reconnaissions un jour la
nécessité d’un sixième ministre, nous n’hésiterions pas à le dire franchement
ni à demander les fonds nécessaires. Nous repoussons donc le reproche gratuit
de défaut de franchise qui nous est adressé en ce moment.
Je reviens à la
question de comptabilité, objet de la discussion.
Vous vous rappelez
que la loi du 1er mai
L’article 6 de
cette loi porte :
« Avant le 1er
juillet 1835 et d’année en année, jusqu’au parfait achèvement des travaux, il
sera rendu un compte détaillé aux chambres de toutes les opérations autorisées
par la présente loi. »
C’est-à-dire le
compte de la comptabilité et de toutes les opérations relatives à la
construction du chemin de fer.
Par la loi du 19
juin 1836, on a exécuté les stipulations de celle du 1er mai 1834, en ce qui
concerne le remboursement des 10 millions de bons du trésor avancés pour le
chemin de fer. En effet, l’art. 3 de la loi du 18 juin 1836 porte :
« Art. 3. Le
capital effectif provenant de la négociation de l’emprunt, autorisé par l’art.
1er ci-dessus, sera spécialement affecté :
« 1° Au
remboursement successif des bons du trésor émis pour la construction du chemin
de fer, en vertu de la loi du 1er mai 1834. »
(Or, comme les 10
millions de bons du trésor avaient été entièrement émis, voilà 10 millions de
l’emprunt affecté au remboursement.)
« 2° Au
remboursement, à échéance, des 1,490,000 fr. de bons du trésor, émis par suite
de la transaction approuvée par la loi du 26 septembre 1835, relative à la
rétrocession de
« Et 3° jusqu’au complément dudit capital, à la construction de
routes nouvelles, pavées et ferrées, conformément à la loi du 2 mai 1836 et à la
continuation de l’exécution du chemin de fer, décrété par la loi du 1er mai
1834, dans la proportion des besoins respectifs de ces travaux. »
Or, il vous a été
donné connaissance, par la situation du trésor que j’ai déposée sur le bureau
le 1er novembre dernier, de l’état des fonds affectés, dans le produit de
l’emprunt, à la construction du chemin de fer. Outre les 10 millions de bons en
réserve, remboursés, 8,810,000 fr. seront attribués à ces travaux, sauf
toutefois ce qui en a déjà été dépensé ; car en ce moment il reste disponible
pour 1837 à peu près six millions. Somme qui suffira, pensons-nous, pour cette
année.
Ainsi, messieurs,
tout ce que M. Dumortier voudrait voir adopter par la chambre, serait de faire
ouvrir au budget des travaux publics un crédit de 8,810,000 fr., et vous voyez
que cela est complètement inutile, puisque par une loi spéciale ce crédit a été
ouvert avec celui de 10,000 fr. qui était destiné au remboursement des bons du
trésor émis primitivement pour commencer la construction des chemins de fer.
Nous pouvons donc dépenser actuellement au-delà du crédit ouvert par la loi du
19 juin 1836 à l’objet auquel il a été consacré par cette loi, et vous trouvez
là, messieurs, toutes les garanties désirables.
M.
Desmet. - Je ne suis pas dans le secret de la dernière combinaison
ministérielle, mais je crois cependant qu’il y a quelque chose de vrai dans ce
qu’a dit l’honorable M. Pirmez ; vous savez, messieurs, qu’il se commet
toujours des indiscrétions dans ces sortes d’affaires ; eh bien, je crois qu’il
y a grande apparence de créer un sixième ministère ; quant à moi, je ne désire
pas une semblable création, je désire au contraire qu’il n’y ait que cinq
ministères mais j’aurais voulu qu’on conservât un ministère des affaires
étrangères, et qu’on déchargeât par ce moyen le ministère de l’intérieur d’une
partie de ses attributions qui étaient trop nombreuses, ce qui aurait été très
facile. C’est ce que la chambre et la chambre entière a toujours demandé ; je
crois que l’administration y aurait beaucoup gagné si le ministère eût voulu
écouter les vœux de la chambre, et qu’au lieu d’exécuter cette malencontreuse
combinaison ministérielle du 15 janvier, on eût conservé le ministère des
affaires étrangères et y ajouter le commerce et l’industrie.
Quant à la
construction du chemin de fer, tout le monde a critiqué qu’une somme aussi
forte que celle qui est consacrée à cet objet ne figure pas au budget ; c’est
véritablement contre la constitution ; mais ce qui m’étonne aussi davantage,
c’est d’avoir entendu M. le ministre de l’intérieur dire qu’il ne connaît pas
les sommes nécessaires pendant un an pour les besoins du chemin de fer : cela
prouve, me semble-t-il, qu’il y a un grand désordre dans l’administration du
chemin de fer.
Je pourrais
effectivement signaler une quantité d’abus qui se commettent dans cette
administration ; mais je ne veux pas le faire ici. Si M. le ministre le désire,
je les lui ferai connaître.
Quelques membres. - Il faut les signaler.
M. Desmet. - Je ne veux pas les signaler
dans cette enceinte, mais je les ferai connaître à M. le ministre.
On dépense 30
millions sans qu’on nous donne aucune garantie à cet égard ; quand il s’agit de
dépenser deux ou trois cents francs pour faire un pont, il faut que toute la
direction des ponts et chaussées soit consultée, et ici tout dépend de deux
individus sans contrôle.
Ces considérations,
messieurs, me détermineront à voter contre le budget si la dépense relative au
chemin de fer n’y est pas portée, car l’état de choses actuel est un véritable
scandale, et je voterai encore contre, si le ministre nous donne l’assurance
que tout ce qui concerne le travaux des chemins de fer ne sera pas mis dans les
attributions de toute la direction des ponts et chaussées, car je ne puis assez
rappeler que c’est un scandale de laisser des travaux si importants et si
coûteux sous la direction de deux simples ingénieurs et sans aucune
surveillance ni contrôle.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Si l’honorable préopinant connaît des abus, il m’obligera en m’en faisant
part ; mais je vous avoue qu’après l’annonce qu’il vient de faire en public,
presque autant vaudrait les signaler ici ; il pouvait me faire cette
communication sans instruire le public de cette démarche officieuse : il me
peine de le dire ; mais des annonces de ce genre doive décourager ceux qui sont
presque devenus des hommes indispensables, doivent décourager des hommes que
nous envient beaucoup de sociétés particulières. Si donc l’exemple qui vient
d’être donné par l’honorable préopinant était suivi, si l’on jetait ainsi dans
le découragement les auxiliaires de mon département, et si ceux-ci venaient à
m’abandonner, la responsabilité de cet abandon ne devrait pas retomber sur moi.
Je dois l’avouer, le ministère est en retard de fournir à la chambre le
rapport sur la situation des dépenses, qui est prescrit par la loi du 1er mai
1834 : ce rapport je l’ai reçu en partie hier : il sera très volumineux : ce
sera, j’ose le dire, un véritable document historique. Il sera complet, je
l’espère, avant dix jours. Il sera aussitôt livré à l’impression. Je dois aussi
proposer à la chambre la prorogation de la loi sur la perception des péages du
chemin de fer ; vous aurez alors l’occasion de renouveler la discussion qui
vient de s’élever ; vous avez une garantie contre moi, vous pourrez me refuser
la loi sur la perception du péage, loi qui expire au premier juillet ; vous
pouvez donc avec certitude compter sur le rapport.
Ce travail que je
vous annoncer, à en juger d’après la partie que j’ai vue, sera extrêmement
important ; c’est un vaste compte-rendu ; il remonte jusqu’aux premiers jours
du commencement des travaux ; il embrasse tous les détails de l’exécution, de
l’exploitation, de la police et de l’entretien.
Ainsi je prie la
chambre de ne rien précipiter, mais d’attendre le document que je déposerai sur
le bureau ; d’ici là je connaîtrai mieux les hommes et les choses, et je serai
plus sûr de moi-même.
M. Dubus (aîné). - Relativement à
l’interpellation qui a été faite par un honorable député du Hainaut sur la
création probable, selon lui, d’un sixième ministère, je dirai que la
discussion du budget des affaires étrangères, et le refus fait par le ministère
d’un traitement pour le ministre des affaires étrangères, que certains membres
de cette assemblée voulaient maintenir au budget, m’ont convaincu qu’il n’est
nullement question de la création d’un sixième ministère, car la conduite que
les ministres ont tenue dans cette occasion, n’est pas du tout conciliable avec
la pensée secrète de créer un sixième ministère, au moins dans le cours de cet
exercice.
Quant au regret
qu’un autre député a témoigné de ce qu’il appelle la suppression du ministère
des affaires étrangères, je dirai que, dans l’état actuel des choses, je ne
partage pas ce regret, pas plus que la crainte de voir créer un sixième
ministère ; je pense que les choses sont très bien comme elles se trouvent
maintenant.
Je dirai un mot de
la question de comptabilité qui a été soulevée ; il me semble que le mode qui
est suivi aujourd’hui est contraire à la constitution. On a beau dire que le
mode actuellement suivi offre des garanties suffisantes ; ni les ministres, ni
nous-mêmes n’avons le droit de nous mettre à côté de la constitution ; lorsque
la constitution a parlé, nous n’avons plus qu’à obéir ; or, messieurs, que
porte l’art. 115 de la constitution ?
« Chaque année
les chambres arrêtent la loi des comptes et votent le budget.
« Toutes les
recettes et dépenses de l’Etat doivent être portées dans les comptes. »
Vous voyez donc,
messieurs, qu’aucune dépense, qu’aucune, sans exception, ne peut échapper au
budget, au budget qui se fait chaque année. Prétendrait-on, en présence d’une
pareille disposition, qu’on peut faire un budget spécial pour le chemin de fer,
et un budget applicable à plusieurs années ? Cela est en opposition manifeste
avec l’article de la constitution que je viens de citer ; vous devez comprendre
toutes les dépenses et toutes les recettes du chemin de fer dans le budget
général que vous votez chaque année, vous êtes liés à cet égard par le pouvoir
constituant.
Peu importe donc si
une loi de 1834, si une autre loi de
Cette question,
messieurs, n’est pas étrangère à l’article qui nous occupe, car il paraît
qu’une partie des dépenses de l’administration centrale sont imputées sur la
recette du chemin de fer sans qu’elles figurent au budget ; c’est là un abus
réel, c’est faire un budget en dehors du budget, c’est violer d’une manière
ouverte et patente l’art. 115 de la constitution.
Il ne s’agit ici ni
de confiance au ministère, ni d’opposition contre le ministère ; il s’agit de
quelque chose de plus fort que toutes les questions ministérielles ; il s’agit
d’une question de constitution et l’hommage que nous devons rendre à la
constitution doit l’emporter sur toutes les considérations.,
Une autre question
a été soulevée, messieurs, c’est celle d’une augmentation de 10,000 fr. ; dans
l’état actuel de la discussion, il m’est impossible de voter cette augmentation
; à mes yeux, la nécessité n’en est pas démontrée, et je ne veux voter aucune
augmentation sans que la nécessité en soit établie ; cependant je n’aimerais
pas non plus rejeter la somme qu’on nous demande, sans un examen préalable. Il
s’agit d’augmenter le nombre des employés ainsi que le traitement d’employés
existants.
Mais, messieurs, jamais la chambre n’a décidé une
question de cette nature qu’après qu’elle eût été examinée par la section
centrale, et ce qui doit nous déterminer d’autant plus à ne pas voter le
chiffre dont il s’agit, sans examen préalable, c’est que quand le ministre de
l’intérieur a dressé son budget, il n’a pas connu la nécessité d’une
augmentation de 10,000 fr. ; il y a plus, quand M. le ministre des travaux
publics, de concert avec son collègue de l’intérieur, a formé, il n’y a pas
encore dix jours, le tableau que nous discutons en ce moment, la nécessité de
cette augmentation n’a pas encore été reconnue ; il n’y a que depuis très peu
de jours qu’elle s’est fait sentir ; or, la conviction d’une semblable
nécessité, on doit nous la faire partager autrement que dans une discussion
improvisée ; une semblable question demande à être plus mûrement examinée.
J’appuie donc la proposition de l’honorable député d’Anvers, de renvoyer
l’amendement à la section centrale.
M. le ministre des travaux
publics (M. Nothomb). - Je consens à ce renvoi.
M. Dumortier. - Je demanderai que la section
centrale veuille bien examiner, en même temps, la question qui a été soulevée
par l’honorable M. Legrelle et par moi, de savoir s’il ne convient pas de
porter au budget toutes les dépenses et toutes les recettes du chemin de fer.
M.
Rogier. - Si l’article est renvoyé à la section centrale, je n’ai rien
à dire pour le moment. J’avais demandé la parole pour appuyer l’augmentation
qui me paraît nécessaire. J’attendrai que la section centrale ait fait son
rapport.
M.
Lebeau. - Messieurs, la discussion me paraît presqu’épuisée par
l’adhésion de ministre des travaux publics au renvoi de l’article à la section
centrale.
Ce procédé me
semble, en effet, le plus sage. Je suis pénétré, quant à moi, de l’importance
que prennent les travaux publics, et je suis persuadé que, si la séparation
opérée récemment ne doit pas rester inefficace, il faut que le nouveau ministre
soit en mesure de suffire, avec un personnel convenable, à l’extension, non
seulement des travaux publics exécutés par le gouvernement, mais encore des
travaux entrepris par des particuliers. Ces derniers travaux établissent
nécessairement entre le ministère et les particuliers des relations nombreuses,
à l’égard desquelles même des reproches de lenteur se sont élevés dans cette
enceinte.
Je ne suis pas tout à fait de l’avis de M. Dumortier, lorsqu’il
recommande à la section centrale d’examiner la question soulevée par MM. Verdussen
et Legrelle ; mon intention, messieurs, n’est pas de me livrer à l’examen de la
question ; je ne crois pas que nous puissions nous en occuper cette année ; je
crois qu’il y a une fin de non recevoir très naturelle, tirée de la
jurisprudence de la chambre, relativement au budget des voies et moyens.
Si, en effet, l’on
portait dans le budget des dépenses celles qui concernent la construction du
chemin de fer, en exécution de la loi du 1er mai 1834, ou devrait aussi faire
figurer, dans les voies et moyens, les produits de l’emprunt des trente
millions affectés aux mêmes chemins et à la construction d’autres routes pour
lesquelles vous avez voté six millions ; dés lors vous établiriez un déficit
entre le budget des voies et moyens et celui des dépenses. Il faudrait donc,
pour rétablir l’équilibre porté au budget des voies et moyens, le prélèvement
probable à faire dans le courant de l’année sur chacun des emprunts votés pour
les travaux du chemin de fer et pour la construction d’autres routes.
Je ne pense pas,
messieurs, que l’on puisse admettre le système de comptabilité qui a été mis en
avant par deux honorables membres, mais la discussion de ce système serait en
ce moment prématurée et trouvera naturellement sa place dans la discussion des
budgets de 1838.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je
dirai encore deux mots sur la question de comptabilité, parce que M. Dubus lui
a donné une certaine gravité en la rattachant aux dispositions qui concernent
les finances.
Je prierai la
chambre de remarquer que nous avons une quantité de lois spéciales qui ouvrent
des crédits aux divers départements ministériels, et que l’on n’a jamais
considéré comme inconstitutionnelle l’ouverture de ces crédits.
C’est ainsi, par
exemple, qu’une loi spéciale a mis il y a quelques jours à la disposition du
gouvernement une somme de 315,000 francs pour l’achat de la bibliothèque Van Hulthem ; je pourrais en citer une foule d’autres.
On a parlé,
messieurs, de lois de principe qui déterminent le taux de certains
appointements, et l’on a dit que cependant le budget portait chaque année
l’application de ces lois. Mais, messieurs, il y a ici une différence notable :
ces lois consacrent un principe de dépenses dont chaque année le renouvellement
plus ou moins étendu est remis en question, tandis qu’ici c’est une dépense,
une fois faite, une dépense votée dans une limite déterminée.
Si les lois qui ouvrent des crédits spéciaux aux départements
ministériels pouvaient être considérées comme inconstitutionnelles,
l’administration se trouverait entravée : c’est ce que ne voudrait certainement
pas l’honorable M. Dubus.
Dans la question
toute spéciale qui nous occupe, je dirai avec l’honorable M. Lebeau que si l’on
voulait faire figurer au budget des dépenses les frais de construction du
chemin de fer, il faudrait porter dans ce budget des recettes la partie de
l’emprunt des 30 millions affectée à cette construction, et cela pour rétablir
l’équilibre.
Je crois en
conséquence que nous devons en finir avec cette discussion. Prétendre,
messieurs, qu’il faut porter au budget les dépenses de construction du chemin
de fer (je n’entends pas parler des dépenses du personnel), ce serait remettre
en question la loi qui a décrété la création de ce chemin et la loi de l’emprunt
des 30 millions, ce serait donner aux chambres la faculté de supprimer ces lois
ce qui sans doute ne peut entrer dans l’intention de personne.
M. Dumortier. - Il y a deux questions
qu’il importe de ne pas confondre. La première concerne les dépenses et les
recettes proprement dites du chemin de fer, la seconde est relative à la
construction du chemin de fer lui-même.
Quant à la première
partie, il est incontestable, messieurs, que puisque vous avez porté au budget
des voies et moyens les recettes du chemin de fer, vous pouvez et devez porter
les dépenses du personnel dans le budget des dépenses : tel est l’objet de ma
proposition. Il est hors de doute que les observations de M. Lebeau ne peuvent
s’appliquer à ce point.
J’arrive maintenant
à la deuxième question. Ici, messieurs, l’on vient vous dire que de même que
vous votez des lois spéciales, de même vous pouvez vous en référer à la loi
générale du chemin de fer. Je répondrai que les lois spéciales que nous votons
sont des lois annuelles et des annexes du budget, tandis que la loi générale du
chemin de fer doit s’appliquer à plusieurs exercices et n’est pas une annexe du
budget, de façon qu’il faut nécessairement des lois qui régularisent
définitivement la dépense et qui appliquent au budget de chaque année la partie
de la somme qui a été votée in globo.
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - Messieurs, la question qui s’agite en ce
moment a déjà été résolue, il y a deux ans, à une forte majorité ; et en effet,
je pense que la résolution de la chambre était tout à fait fondée.
Qu’est-ce qui s’est
passé lorsqu’on a voté la loi du chemin de fer le 1er mai 1834 ? L’on a alors
ouvert un crédit de 10 millions, à couvrir au moyen de l’émission de bons du
trésor, et l’on a en même temps affecté la recette de cet emprunt à la
confection d’un chemin de fer, de manière que c’est une affaire consommée qui
se rattache à l’exercice 1834.
L’on dernier, l’on
a voté un nouvel emprunt pour être appliqué également aux travaux du chemin de
fer ; l’on a donc de ce chef une nouvelle recette et une nouvelle dépense qui
se rapportent à l’année 1836.
En procédant ainsi, on ne porte pas atteinte aux principes
constitutionnels invoqués par M. Dubus.
Veuillez remarquer,
messieurs, qu’il y a une différence énorme entre un crédit dont la destination
spéciale ne serait pas déterminée dans la loi, et un crédit dont la loi a
clairement prescrit la spécialité.
D’ailleurs, il
existe à cet égard des précédents ; l’on a, par exemple, voté des sommes pour
des travaux publics qui ne pouvaient certainement pas être achevés dans la même
année ; l’imputation de ces sommes peut se faire pendant trois années. Et en
effet, il est une impossibilité de fait à déterminer d’une manière
rigoureusement exacte la dépense qui doit être faite annuellement. Il n’est pas
un seul ingénieur qui soit capable d’établir d’avance, et au juste, la dépense que le chemin de fer entraînera
pendant une année.
De cette manière,
l’on justifie en fait et en droit les résolutions du pouvoir législatif.
M. Dubus (aîné). - Messieurs, je dirai un mot
pour répondre à M. le ministre des finances qui me paraît n’avoir pas bien
compris la force de l’objection que j’avais faite, lorsqu’il m’avait opposé les
lois spéciales par lesquelles nous votons, dans le cours de l’année, certaines
dépenses particulières. .
J’ai voulu dire que
les lois spéciales font partie du budget de l’année, et que cela revient à ce
que nous faisons chaque année, à voter le budget en plusieurs années : mais ces
lois n’ont que la durée d’une année, comme toute loi du budget, tandis qu’ici
il s’agit d’une loi qui aurait, prétend-on, établi le budget du chemin de fer,
et l’aurait établi en une seule ligne de chiffre, pour 5, 6 ou 10 ans. Il y a
déjà, messieurs, trois ans que la loi est votée, et je crois que si les travaux
se continuent, jusqu’à leur achèvement, de la manière dont ils ont été suivis
jusqu’ici, il pourra bien s’écouler 6, 8 ou 10 ans, avant qu’ils soient
terminés. Mais que le terme ne soit même que de 5 ans, il n’en est pas moins
vrai, puisqu’on a voté un emprunt pour être affecté à certains travaux publics,
que l’on considérerait cette loi d’emprunt comme une espèce de budget de cinq
ans, en dépit de la constitution, qui veut que le budget soit voté chaque
année.
Messieurs, je ne pourrais jamais donner mon assentiment à un pareil
système qui est en opposition manifeste avec la lettre et l’esprit de la
constitution. De la manière dont on me dit que les choses se passent, non
seulement l’article 115, mais l’article 116 est manifestement violé. Prenez, si
vous voulez, cette loi de 1835 et les autres lois dont l’effet se perpétue
aujourd’hui, quoique nous ayons voté le budget sans les y comprendre, que
résulte-t-il de là ? D’après les règles de notre comptabilité, c’est que toutes
les recettes doivent entrer dans le trésor, et que le ministre ne peut imputer
aucune dépense sur les recettes à moins d’un vote des chambres et sans le visa
préalable de la cour des comptes.
Il paraît que ce
n’est pas ainsi qu’on procède dans l’administration du chemin de fer. On me dit
qu’une partie des dépenses est purement et simplement prélevée sur la recette.
On ne se fait pas autoriser par la cour des comptes. Que devient alors
l’article 116 de la constitution ? J’engage MM. les ministres à l’avoir sous
les yeux et à observer l’un comme l’autre les articles 115 et 116.
Il résulte
manifestement des articles 115 et 116 que toute la recette de chemin de fer
doit entrer dans la caisse de l’Etat, et que rien n’en peut sortir que dans les
limites d’un vote émané des chambres et moyennant le visa préalable de la cour
des comptes. Je désire qu’on me démontre que l’état actuel des choses est en
harmonie avec ces deux articles.
M.
Devaux. - Deux systèmes sont en présence, l’un est celui que
soutiennent MM. Dubus et Dumortier ; mais je pense que celui qu’ils combattent
est très justifiable.
On est d’accord que
les recettes annales doivent figurer annuellement au budget des voies et
moyens, et de l’autre côté, que les dépenses ordinaires doivent figurer aussi
au budget annal des dépenses. La différence d’opinion n’est que sur le produit
de l’emprunt, et son emploi en travaux et constructions.
Je pense, ainsi que
le préopinant vient de le dire, que la loi spéciale de 1834 est une annexe au
budget de cet exercice. Eh bien, cette loi, qu’a-t-elle décidé ? Elle a décidé deux
choses : d’abord que c’était une annexe au budget des voies et moyens, en ce
qu’elle autorise un emprunt de tant de millions, et ensuite une annexe au
budget des dépenses, en ce qu’elle ouvre un crédit d’autant de millions.
Considérée de cette manière, il me semble que la question devient très claire.
La constitution
dit, et il est vrai, que toutes les dépenses doivent être votées chaque année ;
mais elle ne dit pas que la même dépense doive être votée trois et quatre fois.
Au mois de mai 1834, par une annexe au budget de 1834, vous avez décidé que
telle dépense aurait lieu ; maintenant, qu’elle l’exécute en 1834, 1835 et
1836, peu importe ; le crédit pour cette dépense a été portée au budget de
1834, avec cette application ; jusqu’à ce que le travail soit terminé, vous
imputez la dépense sur ce crédit.
Pour tout ce que
vous avez autorisé par la loi de 1834, il n’est pas nécessaire de porter un
nouveau crédit au budget. Il en est de cette dépense comme de beaucoup
d’autres. Si vous aviez décidé au budget de la justice qu’un crédit de 400,000
fr. serait accordé pour la construction d’un palais de la cour de cassation,
vous ne prétendriez pas que chaque année, tant que durerait la construction, on
devrait porter le crédit au budget.
Il suffit qu’un crédit ait été une fois ouvert avec une application
spéciale, pour que cette application continue jusqu’à l’achèvement de l’objet
auquel il était destiné. C’est ainsi que la dépense du chemin de fer s’impute
sur le crédit que vous avez ouvert en 1834. Cela se fait pour beaucoup de
dépenses ; il y a beaucoup de travaux publics qui ne s’achèvent qu’en plusieurs
années. On ne répète pas chaque année au budget le crédit ouvert pour
l’exécution de ces travaux, ni les moyens de faire face à la dépense. La cour
des comptes a sur ces dépenses son droit de visa comme pour toutes les autres.
Il n’y a là rien
d’irrégulier ni d’inconstitutionnel.
Le système proposé
par l’honorable membre qui a parlé avant moi peut avoir ses avantages ; mais
puisque nous avons adoptée l’autre pour le chemin de fer, et qu’on ne signale
pas d’abus, je ne vois pas de motif pour l’abandonner ; si vous le faisiez,
vous devriez régulariser tous les crédits portes aux budgets antérieurs, et qui
n’ont pas été épuisés dans le courant de l’année. C’est là une chose qui ne
s’est jamais faite.
M.
le président. - Je demanderai si toute cette discussion se rattache à
la proposition de MM. Dumortier et Verdussen.
M. Dumortier. - Cette discussion se rattache
assurément à la question que j’ai soulevée. Il s’agit de savoir si on peut
imputer sur le produit du chemin de fer le traitement du personnel de
l’administration centrale. Il est évident que cela doit figurer à l’article
actuel.
M. Devaux est dans
l’erreur, s’il considère la loi votée en 1834 comme devant continuer à être
exécutée comme annexe au budget de 1834. Mais combien d’années pense-t-il qu’un
exercice reste ouvert ? Un exercice reste ouvert pendant trois ans. Dès lors
depuis le 1er janvier 1837, l’exercice de 1834 est clos ; on ne peut plus rien
imputer sur cet exercice.
M.
Rogier. - On a ouvert un nouveau crédit par la loi d’emprunt de 30
millions.
M. Dumortier. - Mais la loi qui autorise l’emprunt
ne fait que mettre l’argent dans les caisses de l’Etat, mais elle n’autorise
pas de dépenses.
Plusieurs membres. - Lisez l’article 3, vous verrez qu’il autorise
des dépenses.
M. Dumortier. - C’est alors une loi singulièrement
vicieuse ; jamais on n’a pu l’entendre comme cela. Vous auriez, dans un seul et
même article, le budget des recettes et le budget des dépenses. Je demande si
personne de vous a pu comprendre cela ainsi.
M. Dumortier. - C’est une singulière manière de
simplifier les lois ; nous n’avons qu’à voter tout le budget en un seul
article. Ma proposition tend à ce que la section centrale, chargée d’examiner
le supplément de crédit demandé par le ministre des travaux publics, examine en
même temps quel est le crédit nécessaire pour payer le personnel chargé de
l’exploitation du chemin de fer.
Un membre. - Renvoyons en même temps la proposition de M. Verdussen à la section
centrale.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Quand
nous en serons au chapitre auquel elle se rapporte. Le gouvernement ne veut pas
s’opposer à ce renvoi. Mais procédons régulièrement.
M. Dumortier. - Depuis plusieurs années la cour
des comptes est privée de tout contrôle sur l’emploi des fonds imputés sur les
recettes du chemin de fer. Si on maintenait cet état de choses, je ne vois pas
pourquoi le ministre des finances ne prélèverait pas les traitements des receveurs
des contributions et des receveurs et employés des douanes sur leurs recettes
respectives. Si vous autorisez qu’on prélève des dépenses sur des recettes, je
ne sais pas où vous iriez. Où la cour des comptes s’est-elle trouvée investie
du pouvoir d’imputer la dépense du chemin de fer sur le produit de la recette ?
Nulle part. Vous voyez que nous sommes dans un système radicalement vicieux
dont il faut revenir.
M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Par
la loi du 18 juin 1836, le gouvernement a été autorisé a faire plusieurs
dépenses qui y sont mentionnées.
C’est en vertu de
l’art. 3, dont j’ai déjà donné lecture, que la cour des comptes ordonnancera
jusqu’au complément de la partie de l’emprunt qui doit être affectée à la
construction du chemin de fer. Rien n’est plus clair que cela.
L’honorable M. Dubus a fait une objection en disant que la loi accordant
un crédit spécial doit être considérée comme une annexe au budget des dépenses.
Mais de ce qu’une dépense est votée dans l’année, il ne s’ensuit pas qu’elle
doive avoir lieu dans la même année.
Les budgets ont
pour leur exécution un cours de 3 ans de durée. C’est ainsi qu’une dépense
votée en 1837 peut être payée en 1840 ; c’est ainsi que l’excédant de 8,810,000
fr., pris sur l’emprunt de 30 millions, outre le remboursement des 10 millions
de bons du trésor, seront utilement dépensés dans les trois ans qui suivront
l’époque de la loi du 19 juin 1836. Il me semble qu’il ne peut rester aucun
doute à cet égard.
Je dois dire encore
que l’on serait dans l’erreur si l’on supposait que le ministère des travaux
publics paie des dépenses sans visa préalable de la cour des comptes ; il
serait dans l’impossibilité de le faire quand bien même il le voudrait, car le
département des finances n’ordonnancerait pas le paiement de dépenses sans ce
visa.
Il ne se paie donc
pas un centime, ni au ministère des travaux publics, ni à aucun autre
département, sans le visa préalable de la cour des comptes, et ce visa, dans la
spécialité qui nous occupe, est accordé régulièrement en vertu de l’art. 3 de
la loi du 18 juin 1836 dont j’ai parlé.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Je voulais faire les mêmes observations. J’ajouterai celle-ci : l’honorable
préopinant commet une erreur de fait, lorsqu’il suppose qu’on impute les frais
de perception sur les recettes du chemin de fer. Ceci est inexact. Toute la
recette brute est renseignée au budget des voies et moyens ; les versements se
font quotidiennement chez le caissier de l’Etat. Les frais de perception sont
prélevés sur les fonds de l’emprunt. Je l’ai dit hier : cela est irrégulier ;
c’est même contraire à mes intérêts comme ministre des travaux publics ; car en
imputant ainsi ces frais de perception, je diminue les fonds qui sont à ma
disposition pour l’exécution des travaux.
Je dois être le
premier à désirer que l’on rentre dans une voie régulière.
Quand on arrivera à
la proposition de M. Verdussen, j’en demanderai le renvoi à la section centrale
; et d’ici à demain, j’espère être à même de présenter une proposition analogue
à celle de M. Verdussen. Hier,
je doutais encore. Mais d’après les documents que j’ai reçus des ingénieurs du
chemin de fer, je crois que je serai en état de faire moi-même une proposition.
Ainsi, sous ce
rapport, nous rentrerons contre mon attente dans un système régulier.
M. Lebeau. - Les explications données
par M. le ministre des travaux publics rendent inutile l’interpellation que je
me proposais de lui adresser, et à laquelle je savais d’ailleurs la réponse qui
me serait faite. Je savais que l’on renseignait au budget des voies et moyens
toute la recette brute, et que les frais de perception étaient prélevés sur
cette recette.
M. Dumortier. - C’est irrégulier.
M.
Lebeau. - Sans doute, mais non pas dans le sens que vous aviez dit. Il
n’est pas vrai que l’on ait fait subir aux recettes aucune déduction. On
renseigne la recette brute.
Je conçois avec M.
le ministre des travaux publics que le prélèvement des frais de perception le
mette dans une mauvaise situation dont il désire sortir ; car la latitude qui
lui est accordée par l’emprunt se trouve ainsi restreinte.
M.
Pirson. - Quand il a été question des chemins de fer, nous en voulions
tous ; mais nous ne savions pas trop ce que c’était, car nous n’en avions pas
l’expérience. Mais l’expérience a justifié toutes mes espérances. Les choses
ont bien marché, sauf un peu de lenteur dont on s’est plaint dans quelques
localités.
Je ne crois pas
qu’il y ait lieu d’insister sur l’irrégularité qui a été signalée quant à la
comptabilité, d’autant plus que M. le ministre des travaux publics attend
l’état exact des recettes et se propose de le présenter à la chambre. Par là
nous rentrerons dans la régularité.
- Le renvoi à la
section centrale de la demande de majoration de 10,000 fr. faite par M. le
ministre des travaux publics, et des amendements de MM. Dumortier et Verdussen,
est mis aux voix et adopté.
- L’art. 2 est
adopté avec le chiffre 97,250 fr., la majoration de 10,000 fr. réservée.
Articles
3 à 5
« Art. 3.
Matériel : fr. 17,000. »
- Adopté.
_______________
« Art. 4.
Papiers pour l’administration centrale des postes : fr. 7,000. »
- Adopté.
_______________
« Art. 5.
Mobilier : fr. 10,000. »
- Adopté.
Chapitre II. - Garde civique
Article
unique
« Art. unique.
Frais de voyage et d’administration ; achat, réparation et entretien d’armes :
fr. 95,000. »
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- La section centrale a été d’avis d’ajourner l’allocation de 70,000 fr.
demandée pour achat de sabres. Je ne puis me rallier à cette proposition.
D’après les
renseignements parvenus au ministère, le nombre des gardes des bans sédentaires
dans les villes où le gouvernement a rendu le nouvel uniforme obligatoire et
prescrit la réorganisation, est de 31,447.
Chaque garde devant
être pourvu d’un sabre, un crédit de 120,000 fr. avait été demandé aux chambres
en 1836, pour couvrir une partie de cette dépense. Les chambres n’ont accordé
que 50,000 fr.
Avec cette somme,
le gouvernement a fait confectionner 10,000 sabres.
Le ministère de la
guerre lui en avait précédemment fourni 5,100.
Total, 15,100.
Pour compléter
l’armement, il faut donc encore 16,347 sabres, qui, à raison de 5 fr.,
coûteront 81,735 fr. ; mais on s’est borné, dans le budget de 1837, à demander
une somme de 70,000 fr., dans la prévision qu’elle pourrait peut-être suffire.
La section centrale
propose de rejeter cette demande, ou au moins de l’ajourner. Cette demande
avait rencontré les mêmes objections en 1836 de la part de la section centrale
; mais, au vote du budget, la chambre a accordé 50,000 fr., c’est-à-dire
qu’elle a mis à la disposition du gouvernement une partie de la somme
nécessaire à l’achat des sabres. J’espère qu’en 1837 la chambre fera comme en
1836, et qu’elle accordera le complément de l’allocation.
En proposant
l’ajournement de la dépense, la section centrale proteste « qu’elle ne
veut pas entraver l’organisation déjà si difficile de cette institution. »
Je le crois sans peine, car elle se compose d’hommes sincèrement dévoués au
pays ; sa proposition, si elle était adoptée, ferait plus qu’entraver
l’organisation de cette force constitutionnelle : non seulement elle
empêcherait la réorganisation de s’achever dans plusieurs villes, mais encore
elle annihilerait les résultats avantageux et complets obtenus dans d’autres
localités.
La section centrale
a pensé que dans l’état actuel de la garde civique, le besoin de sabres ne lui
paraît pas démontré. Mais il ne faut pas perdre de vue que le sabre fait partie
obligée de l’armement du garde ; que, pour que l’on soit en droit de prescrire
au garde de se fournir des objets que la loi met à sa charge, il faut aussi que
l’Etat lui fournisse tous les objets d’armement et d’équipement qu’il doit lui
donner. Cette obligation de la part de l’Etat, la chambre l’a déjà en partie
reconnue, en votant un crédit pour l’achat des gibernes et buffleteries ; elle
doit la reconnaître aussi pour l’armement.
Il y a 24 villes
comprenant 16,347 gardes qui doivent recevoir des sabres.
Dix villes ont reçu
des sabres ; ce sont Anvers, Bruxelles, Tirlemont,, Bruges, Ostende, Mons,
Tournay, Ath,Verviers et Arlon, Le nombre de sabres envoyés à ces dix villes
est de 12,697.
Les villes qui
attendent des sabres ; sont : Turnhout, Lierre, Malines, Ypres, Nieuport,
Courtray, Menin, Nivelles, Louvain, Diest, Saint-Nicolas, Termonde, Lokeren,
Alost, Liège, Huy, Hasselt, Saint-Trond, Tongres, Bouillon, Namur, Dinant,
Philippeville et Charleroy.
La section centrale
appelle de tous ses vœux une nouvelle organisation : est-ce à dire que la
législation soit si défectueuse ? on peut contester cette assertion à mon sens,
il n’y a pas de loi mauvaise, quand on veut se prêter franchement à son
exécution ; l’exemple de Bruxelles, d’Arlon, de Bruges, d’Ostende et de
Tirlemont est là pour justifier ce que j’avance.
Si les administrations locales voulaient prêter leur concours à
l’exécution de la loi, comme l’ont fait celles de ces villes, partout la garde
aurait été organisée. Pour y parvenir, il ne faut peut-être que de la bonne
volonté. Un refus de la part des chambres d’accorder la somme demandée
donnerait beaucoup de crédit à une opinion que l’on cherche à répandre, que ni
les chambres ni le gouvernement ne veulent de la garde civique, qu’ils la
considèrent comme une institution gênante, qu’enfin ils veulent que l’art. 122
de la constitution qui dit si impérativement : « il y a une garde civique, »
soit un vain mot. Personnellement je devrais me considérer, par suite de ce
vote, comme dispensé de m’occuper de l’organisation de la garde civique.
M. Mast de Vries. - Dans
l’énumération que vient de faire M. le ministre des travaux publics, se trouve
comprise la ville de Lierre. Mais elle n’a pas demande de sabres.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Eh bien, c’est ce que j’ai dit. La ville de Lierre est au nombre des villes
pour lesquelles je demande des sabres.
M. Mast de Vries. - Mais c’est inutile. La
loi sur la garde civique est inexécutable à Lierre comme dans la plupart des
petites villes. Il faudrait à Lierre 60 officiers, et l’on ne pourrait pas même
en trouver 20.
M. Heptia. - Les faits ont suffisamment
démontré que l’organisation de la garde civique était impossible ; cette
impossibilité est suffisamment démontrée par cette circonstance que nulle part la
loi sur la garde civique n’a reçu un commencement d’exécution ; car, à part
Bruxelles, je ne crois pas que la moindre exécution de la loi ait été tentée
dans aucune localité.
Nulle part les
officiers ne sont nommés ; nulle part on n’a pu réunir les gardes civiques pour
faire ces nominations ; dans le plus grand nombre des localités ils se sont
refusés à faire toute nomination. Dans ces circonstances, la section centrale a
cru, avec une grande partie du pays, qu’une nouvelle loi organique de la garde
civique était nécessaire. On n’a pas pensé qu’il fût utile de donner des armes
à des soldats qu’on ne pouvait pas rassembler, et qu’il fallait ajourner
l’allocation du crédit demandé jusqu’à ce qu’une nouvelle loi soit portée. La
section centrale, comme tout le pays, appelle de tous ses vœux cette loi ; la
chambre entière partage la même opinion, elle ne demande pas mieux que de
s’occuper d’une législation sur cet objet, pour remplacer celle que l’on a
votée un peu trop à la hâte.
Je pense que ces
raisons seront comprises par tout le monde, et qu’il ne convient pas de donner
des armes à une garde qu’on ne peut réunir.
M. F. de Mérode. - Une partie des
faits que l’on vient de signaler est très exacte. Je crois que dans beaucoup de
villes, les habitants ont de la répugnance pour mettre à exécution la loi sur
la garde civique ; toutefois il importe de ne pas décourager les habitants des
villes qui ont montré du zèle. A Bruxelles l’organisation de la garde civique
s’est très bien faite ; les citoyens y sont couverts de leurs uniformes ; et
nous avons admiré une très belle revue dans les journées de septembre. Que la
loi soit incomplète, qu’elle soit mal combinée, il n’en est pas moins vrai
qu’elle serait très utile si on le voulait bien.
M. Dumortier. - J’entends souvent dire que la
loi sur la garde civique est inexécutable ; c’est bientôt fait ; mais ce n’est
là qu’une allégation, et quand je recherche dans la loi les articles
inexécutables, je n’en trouve aucun. Si la loi est inexécutable dans certaines
localités, cela tient au mauvais vouloir des autorités municipales ; si ces
autorités le voulaient bien, il y aurait une garde civique dans toutes les
localités comme à Bruxelles…
M. Mast de Vries et M. Legrelle demandent la parole.
M. Dumortier. - Les habitants se refusent à
faire partie de la garde civique ; je ne vois pas cela. Je sais fort bien que
la loi sur la garde civique impose des devoirs ; mais si la constitution a
donné des droits, elle a aussi prescrit des devoirs, et tous les bons citoyens
ont intérêt à se trouver en armes devant un ennemi qui menace leur
indépendance. Si vous voulez consulter beaucoup de personnes que le moindre
devoir incommode, vous supprimerez le jury ; vous supprimerez surtout la
milice, et vous resterez à la merci de votre ennemi. Ce n’est pas dans les
circonstances actuelles qu’il faut jeter de la défaveur sur une loi utile au pays.
La garde civique est une institution faite toute en faveur des riches, car elle
a pour but le respect de propriétés, et ce sont les riches qui se soucient le
moins de se soumettre à la loi.
Que les magistrats des localités le veuillent, et la garde civique
s’organisera. Si vous supprimez l’allocation demandée par le ministre, c’est
comme si vous supprimiez la garde civique. Quand on refuse des armes aux
habitants, comment peut-on exiger d’eux qu’ils fassent la dépense d’un uniforme
? Les conseils de discipline pourraient-ils condamner un citoyen qui n’aurait
pas d’uniforme, quand il ferait observer qu’on ne lui a pas donné d’armes ? Si
le gouvernement manque à ses engagements, peut-on obliger un citoyen à remplir
les siens ?
Je voudrais que le
crédit porté au budget fût divisé en personnel et en matériel.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- On peut faire cette division à l’instant même.
M. Dumortier. - Quant au crédit en lui-même,
vous ne pouvez le rejeter. Refaites la loi sur la garde civique, si vous voulez
; mais n’allez pas porter le découragement là où l’on a montré du zèle, en
disant que la loi est inexécutable.
M. Mast de Vries. - Je félicite M.
Dumortier, colonel de la garde civique de Tournay, d’avoir pu si bien
l’organiser en cette ville ; je voudrais que l’honorable membre fût bourgmestre
de toutes les localités afin d’arriver partout à une organisation semblable à
celle de la cité qui le compte au nombre de ses habitants. Le zèle ne suffit
pas pour accomplir cette tâche, car beaucoup de magistrats municipaux, qui n’en
manquent pas, ont vu leurs efforts inutiles. M. Dumortier a dit que la garde
civique était faite pour les riches, et que les riches devaient s’empresser
d’en faire partie ; c’est sans doute parce qu’il y a beaucoup de riches à
Tournay que M. le colonel y commande de très beaux bataillons ; mais comment
faire là où il n’y à pas de riches et beaucoup de pauvres ? Sous les Hollandais
nous étions, à Lierre, obligés d’habiller les habitants pour la schuttery ; nous ne pouvons maintenant y trouver presque
personne pour les grades à cause de la dépense ; peut-être que si M. Dumortier
était bourgmestre dans ma localité, il pourrait avec des pauvres faire des
riches ; je n’ai pas ce secret ; je sais seulement que le plus ordinairement il
est facile de faire des pauvres avec des riches. (On rit).
M. Pollénus. - On semble se méprendre sur la portée
de la proposition de la section centrale ; il ne s’agit en aucune manière de
supprimer la garde civique, seulement on demande l’ajournement d’une allocation
de 70,000 fr. pétitionnée pour achat de sabres.
Cet ajournement me
paraît tout rationnel dans l’état d’organisation incomplète de la garde
civique. Il a été démontré que la loi telle qu’elle est ne peut obtenir une
exécution convenable, et l’état de désorganisation de la garde civique
n’est-elle pas la preuve la plus irrécusable des vices de la loi qu’on
s’obstine à vouloir maintenir ? Je soutiens donc avec plusieurs des préopinants
qu’il faut ajourner l’achat de sabres puisqu’il ne peut s’agir de vouloir armer
une garde civique qui n’existe pas.
Messieurs, il faut
bien le reconnaître, nos mœurs repoussent une institution qui étend au-delà de
ses justes limites l’obligation du service militaire ; il est un âge où l’homme
veut se reposer, où il lui répugne de jouer au soldat ; veut-on une garde
civique, il faut alors de toute nécessité limiter le service à un âge moins
avancé que ne le fait la loi actuelle.
Mais, dit-on, le
jury est aussi une charge ; que ne propose-t-on aussi de le supprimer ?
On fait sonner bien
haut l’organisation de la garde civique de Bruxelles ; je ne contesterai certes
point ce degré tout exemplaire de l’organisation de cette garde dans la
capitale, cependant je n’ai pas oublié que les ministres ont dû intervenir à
l’effet d’engager bon nombre d’employés à venir habiter la ville, et qui
émigraient dans les faubourgs afin de se soustraire aux agréments du service de
la garde civique.
Je pourrais vous
citer d’autres localités, je me bornerai à celle que j’habite ; à Hasselt on
n’est point parvenu encore à pouvoir se procurer des officiers, personne ne se
rend à ces élections, et si parfois on y prend part, ces élections présentent
alors tous les caractères d’une plaisanterie… et les élus n’ont rien de plus
pressé que d’offrir leur démission, et puis c’est à recommencer.
Je suis intimement
convaincu que la législation sur la garde civique est inexécutable ; ce que
nous pouvons faire de mieux c’est d’adopter la proposition de la section
centrale en ajournant une allocation qui me paraît un non-sens dans l’état
d’organisation défectueuse de la garde civique.
Encore une fois, il
n’est pas question de supprimer, il s’agit uniquement d’ajourner une somme qui
resterait sans application en attendant la révision de la loi sur la garde
civique que nous tous nous considérons comme une nécessité.
Mais on n’a pas été
heureux en objectant l’institution du jury.
Oui, le jury, tel qu’il existe, est vicieux et très vicieux ; le
gouvernement en fait lui-même l’aveu dans la présentation du projet de loi sur
lequel il nous a été fait rapport récemment par M. de Behr ; mais pourquoi ne
fait-on pas pour la garde civique ce que l’on a fait pour le jury ? C’est là
une inconséquence, me semble-t-il, car si les vices d’une institution font
reconnaître la nécessité du remède dans un cas, il en droit être de même de
toute autre institution dont les vices sont aussi patents que dans celle de la
garde civique.
Dans l’état actuel
de notre organisation militaire, la garde civique ne me paraît pas d’une
rigoureuse nécessité ; voyez
Dans l’état
d’organisation incomplète où se trouve la garde civique, il est inutile de
voter la dépense dont il s’agit puisqu’elle ne pourrait pas recevoir
d’application, la garde civique n’étant pas organisée et ne pouvant pas l’être
dans un grand nombre de localités, et les difficultés qui s’opposent à son
organisation devant se perpétuer aussi longtemps que nous n’aurons pas apporter
de modifications à la loi qui régit cette institution.
M. Legrelle. - Messieurs, lorsque l’année
dernière, à l’occasion de la demande d’un crédit considérable pour achat de
sabres pour la garde civique, j’ai cru de mon devoir de demander l’ajournement
d’une partie au moins de ce crédit, j’ai été attaqué par l’honorable député de
Tournay, qui est en même colonel de la garde civique de la même ville, et par
d’autres membres de cette assemblée ; je vois avec plaisir aujourd’hui que
l’opinion que je soutenais alors a fait de grands pas dans la chambre, ce n’est
plus maintenant une opinion isolée, mais l’opinion de la section centrale tout
entière. La section centrale, que certes on ne pourra pas accuser de mauvais
vouloir, demande à l’unanimité, l’ajournement du crédit de 70,000 fr. destiné à
l’achat de sabres pour la garde civique ; et sur quoi se fonde la section
centrale ? Sur l’argument que j’ai fait valoir l’année dernière, sur
l’impossibilité de mettre en pratique la loi actuelle et la nécessite d’y
apporter des modifications ; voici comment elle s’explique :
« La section
centrait a alloué à la majorité de 4 voix contre 3 la somme de 25,000 fr., et
elle vous propose à l’unanimité d’ajourner le litt. C jusqu’à la réorganisation
définitive de la garde civique. Elle n’a pas voulu entraver l’organisation déjà
difficile de cette institution, en diminuant le crédit ; mais elle a pensé
qu’on pouvait, sans inconvénient, ajourner l’achat des sabres, dont le besoin,
dans l’état actuel de la garde civique, ne lui paraît pas démontré. Toutefois,
la section appelle de tous ses vœux une nouvelle organisation, qu’elle désire
voir entreprendre le plus tôt possible ; il se pourrait que la tâche fût
aujourd’hui simplifiée et devenue plus facile ; le pays possède une armée de
réserve capable de contribuer puissamment à sa défense, et dans laquelle sont
incorporés les miliciens qui ont fini leur temps de service ; cette armée de
réserve absorbe les soldats d’élite qui auraient dû, aux termes de la loi
actuelle, faire partie du premier ban de la garde civique, qui se trouve par la
privée de sa principale force. Ce nouvel état de choses ne doit-il pas amener
un changement dans l’organisation de la garde civique ? Voilà la question que
la section centrale livre aux méditations du gouvernement et de la chambre. »
Je ne saurais
messieurs, rien dire de mieux pour exprimer mon opinion que ce que dit la
section centrale ; je suis tout à fait d’accord avec elle, et si j’ai pris de
nouveau la parole, c’est parce qu’on a voulu récriminer contre les bourgmestres
de certaines villes, et leur attribuer le défaut d’organisation de la garde
civique dans les communes qu’ils administrent. D’après la loi communale
actuelle, messieurs, les bourgmestres ne peuvent rien sans le concours des
conseils communaux ; et que sont les conseils communaux, sinon les
représentants légaux des habitants de la commune ? Si donc le conseil communal
déclare qu’il est impossible d’attacher aux habitants un uniforme sur les
épaules, ce sont bien tous les habitants qui se prononcent dans ce sens, à
l’exception peut-être de quelques individus qui ont intérêt à ce qu’il y ait
des uniformes.
Lorsqu’à Anvers les
élections ont eu lieu, il y a eu des réunions où il se trouvait 5, 6 ou 8
électeurs ; il y en a eu même où l’on n’en comptait que quatre ; eh bien !
messieurs, des officiers qui ont été élus de cette manière, il en est plus de
la moitié qui n’ont pas accepté ou qui ont donné leur démission. Combien
encore, parmi les officiers de la garde, civique, n’y a-t-il pas d’employés du
gouvernement qui n’ont accepté leurs fonctions que parce qu’ils croyaient ne
pouvoir décemment faire autrement ? Je suis persuadé qu’à Bruxelles même, si
l’on pouvait faire pouvait une distinction entre ceux qui ont accepté librement
et ceux qui ne l’ont fait que par des motifs de convenance, le nombre de ces
derniers surpasserait de beaucoup celui des autres. Qu’on dise après cela que
si la garde civique n’est pas organisée dans un grand nombre de localités,
c’est la faute des bourgmestres !
Voulez-vous encore une preuve du contraire, messieurs ? Malgré toutes
les peines qu’on s’est données à Anvers, quoique les conseils de discipline
n’aient pas cessé de siéger, malgré les amendes sans nombre qui ont été
infligées et toutes les condamnations à la prison qui ont été prononcées, il a
été jusqu’ici impossible d’amener plus d’un douzième des gardes à se présenter
pour le service. Voilà donc les onze douzièmes d’une population condamnés à
l’amende ou à la prison ! Peut-on dire après cela les habitants ne sont pas
contraires à la loi actuelle sur la garde civique, et que c’est la faute des
autorités locales que cette loi n’est pas exécutée ? Non, messieurs, les
autorités locales ne sont pour rien dans l’inexécution de la loi sur la garde
civile ; ce qui en empêche l’organisation c’est l’esprit des populations, ce
sont les vices de la loi elle-même, c’est l’impossibilité de faire revêtir
l’uniforme des gens dont les épaules sont déjà usées, à des personnes qui ne
l’ont jamais porté quoiqu’ils aient parcouru les trois quarts de leur carrière.
Je vous en conjure
donc, messieurs, ralliez-vous à l’opinion de la section centrale, faites
disparaître les vices de la loi, et surtout cette honteuse anomalie qu’un père
peut se trouver placé sous l’autorité de son enfant comme cela se rencontre
dans la garde civique, et à cet égard j’en appelle à l’honorable M. Dumortier
lui-même ; je suis bien persuadé qu’il me donnera raison sous ce rapport.
M. Dumortier. - Certainement.
M. le ministre des finances (M. d'Huart).
- J’avais demandé la parole pour rectifier l’interprétation que M. Legrelle a
donnée à une interruption qu’il avait entendue sur mon banc, lorsqu’il parlait
des vices qui, selon lui, rendent la loi sur la garde civique inexécutable.
L’interruption à
laquelle M. Legrelle a cru répondre tendait simplement à lui faire remarquer
que si l’on mettait partout de la bonne volonté dans l’exécution de la loi sur
la garde civique, il est bien certain que les vices qu’on reproche à cette loi
seraient bien minimes ; ce qui le prouve c’est que dans certaines villes la
garde civique est parfaitement organisée.
J’ajouterai,
puisque j’ai la parole, que l’on a eu raison lorsqu’on a dit tout à l’heure que
l’organisation de la garde civique marcherait beaucoup mieux si les
administrations communales y apportaient plus de zèle.
L’honorable M.
Legrelle trouve que la loi est mauvaise parce qu’on ne se rend pas aux
élections qu’elle prescrit ; mais qu’est-ce que cela prouve ? cela ne prouve
rien contre la loi : cela prouve uniquement que dans certaines localités on ne
se soucie pas d’élections. Quand, il y a peu de temps, il s’est agi de nommer
des membres du tribunal de commerce d’Anvers, les négociants de cette ville ne
pouvaient pas non plus se réunir en nombre suffisant pour choisir des candidats
; cela prouverait-il qu’on ne veut pas de tribunaux de commerce, ou que
l’organisation de ces tribunaux est mauvaise ?
M. Dumortier. - Messieurs, deux honorables
membres, dont l’un est en même temps bourgmestre de Lierre, et dont l’autre est
en même temps bourgmestre d’Anvers, ont fait allusion aux fonctions de colonel
de la garde civique que j’exerce dans la ville que j’habite ; et ils ont cru
trouver dans cette circonstance un excellent argument pour combattre les
raisons que j’avais fait valoir. Il est vrai, messieurs, que je suis colonel de
la garde civique ; j’ai accepté ces fonctions lorsque la patrie était en
danger, et je m’en félicite ; ce sont des fonctions purement gratuites ; j’ai
cherché à faire exécuter la loi, et je désire que ceux qui exercent des
fonctions rétribuées pour faire exécuter la loi, la fassent exécuter comme je
l’ai fait.
On vient nous dire
que la loi est inexécutable parce qu’à Lierre il n’y a que des pauvres, et
parce qu’à Anvers on ne se rend pas aux élections : l’honorable ministre des
finances a fait justice de l’argument du député d’Anvers ; je vais à mon tour
faire justice de celui du député de Lierre. La loi est inexécutable à Lierre
parce qu’on y est trop pauvre ; mais à Arlon, où l’on est tout aussi pauvre,
elle s’exécute parfaitement : c’est que là règne l’amour de la patrie, c’est
que là on ne veut pas du retour du prince d’Orange.
M. Mast de Vries. - On ne le veut pas non
plus à Lierre.
M. Dumortier. - Je ne dis pas qu’on le veut à
Lierre, mais je dis qu’on ne le veut pas à Arlon, et que là la loi sur la garde
civique ne rencontre point d’obstacles.
Voilà ce que l’on a
fait dans les provinces où règne un véritable patriotisme, et je désire de tout
mon cœur que dans toutes les villes frontières de
Ce sont, dit-on,
les habitants qui ne veulent pas de la loi sur la garde civique, et l’on ajoute
même que la section centrale a reconnu ce fait.
Mais vraiment, messieurs, c’est singulièrement tromper la chambre que de
recourir à un pareil système de défense ; car la section centrale, loin de
prétendre que la loi est inexécutable, dit au contraire qu’il n’est pas dans
son intention d’en entraver l’exécution.
Si donc il est
démontré que le rejet du crédit que le gouvernement vous demande serait une
véritable entrave à l’organisation de la garde civique, nous devons nous
empresser de voter ce crédit.
La loi est
inexécutable, disent certains membres de cette chambre. Mais pourquoi ? Disons,
pour nous, les choses comme elles sont ; le vice de la loi sur la garde
civique, le voici : c’est que le trésor communal doit intervenir dans les
dépenses d’habillement des gardes qui n’ont pas le moyen de s’équiper par eux-mêmes
: c’est ce que vous ont dit les bourgmestres de certaines localités. Voilà le
vice, le seul vice de la loi sur la garde civique. On veut bien dans ces
localités consacrer des fonds à la construction de salles de spectacle, de
monuments, etc. ; mais on recule devant le moindre sacrifice en faveur de la
garde civique.
MM. les
bourgmestres actuels, prenez exemple de ce qui s’est fait sous le roi Guillaume
; on est parvenu alors à organiser une garde civique, et cela au profit du
despotisme ; organisez-en une maintenant pour le soutien de la liberté.
M.
Rogier. - Messieurs, j’ai pris la parole, pour faire une espèce de
motion d’ordre. Je demanderai si d’honorables membres sont dans l’intention de
continuer les attaques qu’on a dirigées de nouveau contre la loi que nous avons
votée, il y a deux ans. S’il en est ainsi, je proposerais que la discussion fût
close immédiatement.
Je crois,
messieurs, qu’il y a un grand inconvénient à se livrer dans cette enceinte à
des attaques aussi vives contre une loi qui est notre propre ouvrage, attaques
qui ne peuvent que perpétuer la désorganisation où se trouve la garde civique
dans plusieurs localités.
Je n’ai pas besoin
de rechercher les motifs qui, dans certaines villes peuvent s’opposer à l’exécution
de la loi. Mais n’allons pas, nous qui avons fait la loi, n’allons pas donner
un mauvais exemple, exercer une fâcheuse influence en proclamant ici que cette
loi est impraticable, en jetant une espèce de ridicule sur une loi qui
produirait les meilleurs résultats, si le zèle et le patriotisme présidaient à
son exécution.
Je dois relever une
erreur qui est échappée à un honorable préopinant. Cet honorable membre a dit
que la loi sur la garde civique pouvait rester sans exécution en Belgique,
attendu qu elle n’est pas non plus exécutée dans un pays voisin. C’est une
erreur, messieurs, la garde civique en Hollande (car c’est sans doute à ce pays
qu’on a fait allusion) a conservé une organisation qu’on peut appeler
formidable, en présence de ce qui existe chez nous ; je pense qu’en Hollande,
dans toutes les localités, la loi sur la garde communale est exécutée très
rigoureusement. Que si l’on ne voit pas figurer au budget annal de ce pays les
dépenses de cette garde, c’est que ces dépenses sont communales, et que là
beaucoup de citoyens sont habillés aux frais de la commune. Là encore, l’ardeur
du patriotisme ne semble pas avoir abandonné les citoyens, et au besoin les
autorités chargées de l’exécution de la loi ont conservé assez de force pour
empêcher les habitants de se retrancher dans un état d’inertie, sans doute fort
commode pour eux, mais en même temps très préjudiciable aux intérêts du pays.
Au reste, je ne
veux pas me poser ici le champion exclusif de la loi sur la garde civique.
Mais, je le répète, il ne nous appartient pas de nous livrer contre elle à des
attaques inconvenantes. Je ne prétends pas que cette loi soit à l’abri de toute
critique dans toutes ses parties, quoique je doive avouer que ses adversaires,
jusqu’ici, se sont bornés à des observations générales, et n’ont pas indiqué,
suivant moi, un seul point sur lequel la réforme devra porter.
Qu’on nous dise quels sont les vices radicaux de cette loi ; comment il
se fait qu’une loi, qu’on exécute facilement dans une localité, ne puisse pas du
tout l’être dans une autre ?
Il est à désirer
que M ; le ministre des travaux publics s’explique d’une manière
catégorique sur ses intentions, relativement au résultat du vote qu’on va
émettre ainsi qu’aux modifications qu’on propose d’apporter dans l’institution
de la garde civique.
Le ministre a
déclaré que la somme qu’il demande est nécessaire, pour parfaire l’organisation
de la garde civique. S’en suivra-t-il que si le chiffre est rejeté, on
considérera la loi sur la garde civique comme inexécutable, et de nul effet ?
Il me semble,
messieurs, que l’on ne peut pas faire dépendre le sort de la loi de l’adoption
ou du rejet de ce chiffre. Autrement il est certain que les localités qui
répugnent à l’institution de la garde civique trouveraient dans le rejet du
chiffre de nouveaux motifs de ne pas coopérer activement à l’exécution de la
loi, tandis que le découragement pourrait gagner celles qui ont fait preuve de
zèle et de bonne volonté.
Il est dès lors
important que M. le ministre s’explique à cet égard.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Messieurs, je ne connais qu’un moyen de révoquer une loi : c’est de l’abroger
par une autre loi ; de sorte que je dois répondre à l’honorable préopinant que
la loi sur la garde civique ne sera pas précisément révoquée sur le refus de la
chambre ; mais voici ce qui résultera de ce vote.
Je suis chargé de
l’exécution de la loi : c’est mon devoir. Il faut des moyens d’exécution ; si
ces moyens me sont refusés, alors, bien que la loi existe, il est impossible de
la faire exécuter. Telle serait ma position. Je prie la chambre de la prendre
en sérieuse considération.
Une voix. - Vous pouvez exécuter la loi sans donner de sabres aux gardes.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- Organisez, me dit-on, la loi sans donner de sabres aux gardes. J’ai déjà
répondu à cette objection, j’ai été au-devant d’elle, et je l’ai discutée, je
pense, de manière à rendre toute réponse impossible.
La loi promet aux
gardes civiques l’armement qui consiste dans le sabre et le fusil, et, d’un
autre côté, elle exige que les gardes civiques pourvoient à leur équipement.
Comment voulez-vous que je dise aux citoyens : Vous exécuterez votre obligation
; mais je n’exécuterai pas la mienne. N’y a-t-il pas ici en quelque sorte un
contrat bilatéral ? Vais-je exiger que la garde civique s’organise à Liége sans
sabres, tandis que la garde civique à Bruxelles a reçu des sabres ? La
comparaison suffirait pour autoriser la garde civique de la première ville à
refuser de se prêter à une organisation. Il faut même craindre de soulever une
question d’amour-propre.
Messieurs, je ne
connais pas les vices de la loi sur la garde civique, j’ai besoin de les
constater, et à cet effet même il m’est indispensable d’en poursuivre
l’organisation. Si dans certaines localités il était démontré à l’évidence que
l’exécution de la loi fût complètement ou partiellement impossible, dès lors je
ne dépenserais pas la totalité du crédit que je demande ; je ne prélèverai sur
ce crédit que les sommes dont l’emploi sera reconnu possible.
Je dirai d’ailleurs
qu’on n’a articulé aucun fait direct contre l’institution de la garde civique.
Si, comme le dit l’honorable M. Legrelle, c’est l’horreur de l’uniforme, alors
il faudra supprimer la garde civique Si c’est, selon le même membre, l’espèce
d’atteinte portée aux prérogatives de la paternité, il faudra supprimer la
garde civique.
M. Legrelle ne veut
pas qu’on lui puisse être le supérieur de son père ; mais, messieurs, cette
anomalie se rencontre dans beaucoup d’autres relations civiles, Pour n’en citer
qu’un exemple il peut arriver qu’un homme fort jeune, dont le père vit encore,
soit bourgmestre : son père, dès lors, est au nombre de ses administrés. (Hilarité.)
La garde civique
est complètement organisée dans plusieurs villes. Si elle est organisée à
Bruges, pourquoi ne le serait-elle pas à Liége, ville si semblable à la
première ? Elle l’est à Bruges ; règne-t-il donc, dans cette paisible ville, un
esprit plus belliqueux qu’ailleurs ? Si Ostende, ville maritime, est parvenue à
constituer sa garde civique, pourquoi Anvers, autre ville maritime, ne
l’essaierait-elle pas ? La garde civique est organisée à Tirlemont, ville de
campagne, en quelque sorte ; pourquoi ne le serait-elle pas à Lierre, par
exemple ? Elle ne peut l’être à Lierre, dit-on, parce qu’on y est trop pauvre ;
par un motif contraire, il me semble qu’elle devrait l’être à Anvers ; si elle
ne l’est pas ici, c’est probablement qu’on y est trop riche. (Hilarité.)
Il est une ville
reléguée à l’extrémité di royaume, dont la position offre des dangers et des
incertitudes, Arlon, ville de 4,000 âmes ; la garde civique y est parfaitement
organisée ; pourquoi n’en agirait-on pas de même à Hasselt, ville dont la
position politique est la même ?
Une voix. - La garde civique n’est pas organisée à Arlon.
M. le ministre des travaux publics (M. Nothomb).
- La garde civique d’Arlon, comme celle de Bruxelles, est complètement organisée
; je puis l’attester.
Ainsi, messieurs,
ce n’est pas seulement dans la capitale que la garde civique est organisée.
S’il en était ainsi, on pourrait dire que c’est une exception. L’organisation
est possible par analogie de position dans beaucoup d’autres villes que j’ai
énoncées tout à l’heure.
Messieurs, ce
serait une chose très grave, un acte dont la chambre doit calculer toute la
portée que le refus de l’allocation demandée ; ce serait dire ou autoriser à
dire qu’on ne veut plus de garde civique, qu’on regarde cette institution comme
impossible en Belgique. Je pense qu’il ne faut pas que cette conséquence puisse
même indirectement être attachée à un vote de la chambre. Vous pourriez par la
suite, messieurs, vous trouver dans des circonstances où vous auriez besoin de
la garde civique, elle nous manquerait au jour du danger. Je consens
volontiers, comme l’a proposé M. Dumortier, à ce qu’on divise l’article pour le
vote et même qu’on en fasse plusieurs articles ; là n’est pas la question.
M.
Pirson. - Je ne dirai pas que nous avons fait une mauvaise loi sur la
garde nationale, c’est une loi que nous avons faite selon les circonstances
dans lesquelles nous nous trouvions ; mais je pense que les circonstances ne
sont plus les mêmes. Je regrette que M. le ministre de la guerre ne soit pas
ici pour entendre les observations que je vais avoir l’honneur de faire.
Lorsque nous avons
organisé la garde civique, nous étions menacés par l’étranger ; nous avons
établi un premier, un second et un troisième ban. Depuis lors notre système de
défense et d’armement a été changé, j’ai peut-être été pour quelque chose dans
ce changement.
J’ai parlé souvent
à l’ancien ministre de la guerre de cet objet, et je ne sais si c’est d’après
ce que je lui ai dit ou d’après ses propres idées qu’il a agi.
Voici ce que je
disais au ministre : Que voulez-vous faire du premier ban qui n’est pas exercé,
qui est formé d’une réunion de toutes sortes de populations et sans ensemble ?
Que voulez-vous faire de ce que vous appelez réserve et que vous prenez dans la
milice de l’année qui n’est pas non plus exercée ? Quand on fait une réserve,
il faut la composer d’hommes faits pour la guerre et en état d’en supporter les
fatigues. C’est alors que le ministre a fait son armée de réserve en la
composant des miliciens libérés, mais qui à l’occasion auraient été rappelés
sous les armes si la défense du pays l’avait rendu nécessaire. Si aujourd’hui
vous révisiez la loi sur la garde civique, que vous supprimiez le premier ban
pour n’en garder que deux, les plus jeunes et les plus vieux, cela vaudrait
mieux ; vous conserveriez la garde civique, non comme une arme de réserve, mais
pour tenir en tout temps, en paix comme en guerre, la police dans les localités
; et en second lieu pour remplacer les garnisons qui devraient entrer en
campagne, pour garder les magasins, les fortifications. Au besoin, si nous
avions le malheur d’être envahis, je pense que les citoyens entre les mains
desquels nous aurions mis des armes ne les garderaient pas inutiles, mais
voleraient à la défense de la patrie. C’est pour cela que je voudrais voir
réviser la loi sur la garde civique parce que notre système d’armement et de
défense n’est plus le même que quand vous avez voté cette loi.
Puisque j’ai la parole, je dirai un mot sur les obstacles qui s’opposent
à ce que dans la ville de Dinant la loi sur la garde civique reçoive son
exécution. Nos officiers sont nommés mais notre garde civique n’est pas
habillée. La raison en est que nous avons beaucoup de pauvres qui sont de la
garde civique, qui n’ont pas le moyen de s’habiller. Ce serait une dépense très
onéreuse pour la ville si elle devait en faire les avances.
Nous avons demandé
une chose au ministre de l’intérieur nous lui avons dit : Nous avons six compagnies
; réformez-en deux, celles des pauvres, et le reste pourra marcher. Je
comprends que la garde civique est instituée dans l’intérêt du riche et non
dans l’intérêt du pauvre ; car le pauvre ne risque pas d’être pillé, si le
Russe on l’Autrichien envahit votre territoire. Alors en l’organisant, mettez
de côté la classe presque indigente, n’appelez que les hommes qui ont le moyen
de s’habiller : vous aurez le droit de vous plaindre, s’ils ne veulent pas
faire ce qui est nécessaire non seulement pour la défense du pays, mais pour
leur propre défense et la conservation, de leurs propriétés dans le cas, où il
se trouverait dans le pays des mauvais sujets qui pussent mettre ces propriétés
en danger.
D’après cela
j’appelle de tous mes vœux, la révision de la loi sur la garde civique. Cela
n’empêche pas d’organiser ce qui est susceptible de l’être. J’espère que M. le
ministre des travaux publics, dans les attributions duquel se trouve le service
de la garde civique, fera attention à mon observation, de mettre de coté les
plus pauvres. A Dinant, nous n’avons que cela qui arrête notre organisation. (Aux voix ! aux voix ! La clôture !)
M. Legrelle. - Je demande la parole contre la
clôture.
D’abord on m’a attaqué
personnellement rien n’était plus simple que de demander la parole pour un fait
personnel ; j’en avais le droit, on ne pouvait pas me la refuser ; je me suis
laissé incriminer parce que je m’attendais à ce qu’on me permettrait de me
défendre ; M. le ministre des finances entre autres.
M.
président. - Vous n’avez la parole que contre la clôture.
M. Legrelle. -
C’est contre la clôture que je parle ; je dis qu’après avoir été attaqué comme
chef d’administration communale, j’ai le droit de me défendre. Je demanderai
que le rapporteur, qui après des votes sur les observations faites pour
réclamer la discussion, soit aussi entendu.
Voyez ce qui
arrivera si vous formez la discussion, vous n’entendrez pas le rapporteur de la
section centrale.
M. Dubus. - Je désirerais savoir si le
rapporteur réclame la parole.
M.
Heptia. - Je l’ai demandée pour faire observer que dans cette
discussion on a travesti l’opinion de la section centrale.
M. Legrelle. - Je demande à avoir la parole
après le rapporteur.
M. Dubus. - Je demande qu’il soit entendu que
si la chambre clôt la discussion, la parole est réservée au rapporteur.
- La clôture est
prononcée avec cette réserve.
M.
Heptia, rapporteur. - En proposant l’ajournement du crédit de 70 mille
fr. destiné à acheter des sabres pour la garde civique, la section centrale n’a
entendu aucunement attaquer l’institution de la garde civique ; institution qui
repose sur un texte de notre pacte fondamental. Il ne s’agit pas de savoir si
on pourrait ou non supprimer cette institution quant à présent. Voilà pourquoi
je tenais à prendre la parole : c’est pour que le pays ne pût pas se méprendre
sur les intentions de la section centrale qui a examiné la question avec toute
la maturité que son importance comportait.
Ce qui a frappé la
section centrale, c’est que l’organisation de la garde civique dans beaucoup
d’endroits n’avait pas même reçu un commencement d’exécution, c’est que la loi
n’était pas exécutée partout d’une manière uniforme et large. S’il y a des
charges imposées aux citoyens, elles doivent être également réparties sur tous.
La faculté de se
soustraire aux obligations qu’impose la loi ne devrait être laissée à aucune
espèce de citoyens, aux habitants d’aucune localité.
Pour mon compte je
suis frappé de la circonstance que la résistance à l’organisation de la garde
civique n’a été combattue nulle part. Si cependant la loi soumet les citoyens à
une obligation, il ne doit être au pouvoir de personne de les y soustraire.
On a demandé que
l’on signale les vices de la loi. Les vices de la loi sont qu’on ne peut forcer
les gardes à organiser les cadres. D’abord je ne crois pas qu’il existe de
dispositions qui forcent les gardes civiques à se rendre aux élections, les
officiers à accepter les grades qui leur sont conférés et à ne pas donner leur
démission quand bon leur semble. Il faudrait peut-être adopter des dispositions
de cette nature ; car je ne crois pas qu’il y ait lieu d’agiter la question de
savoir si l’on organisera ou si l’on n’organisera pas la garde civique. Je
crois que l’on devrait seulement aviser aux moyens d’organiser la garde civique
dans les localités où il y a eu à cet égard résistance de la part des gardes ou
de l’administration.
- La division étant
demandée par M. Dumortier l’article unique du chapitre « garde
civique, » est mis aux voix et adopté, par littera comme suit :
« A. Frais de
voyage de l’inspecteur-général de la garde civique, des aides-de-camp qui
l’accompagnent, et frais de bureau de l’état-major général : fr. 9,000.
« B.
Réparations et entretien des armes de la garde civique : fr. 16,000.
« C. Achat de
sabres pour l’armement de la garde civique (la section centrale avait proposé
l’ajournement de cette somme) : fr. 70,000.
« Total, fr.
95,000. »
L’article est
ensuite adopté dans son ensemble avec le chiffre de 95,000 fr.
Chapitre III. - Milice
Article
unique
« Art. unique.
Impressions des listes alphabétiques pour l’inscription des miliciens : fr.
1,600. »
- Adopté.
Chapitre IV. - Travaux publics
Article
premier
« Art. 1er.
Routes : fr. 2,065,000. »
M. Verdussen. - Mon amendement ayant été
renvoyé à la section centrale, je n’y donnerai aucuns développements. Je
suppose que la chambre m’autorisera à me rendre au sein de la section centrale.
(Oui ! oui !)
C’est là que je me
réserve de faire valoir les motifs de mon amendement.
M. Pollénus. - A la séance d’hier vous avez
entendu plusieurs membres se plaindre des obstacles que rencontrait la
construction de plusieurs routes nouvelles, sous le prétexte que la défense du
pays s’y opposait. L’honorable M. Mast de Vries a adresse à cette occasion à M.
le ministre des travaux publics une demande à laquelle il n’a pas jugé à propos
de répondre jusqu’à ce moment. M. Mast de Vries a fait connaître que, contre
toutes les routes importantes projetées dans la province d’Anvers, on avait
fait une seule objection, et que cette objection était tirée des besoins de la
défense du pays. Il est à ma connaissance que dans le Limbourg déjà plusieurs
projets de routes ont été écartés par le même motif. Il résulte de cet état de
choses que les provinces d’Anvers et du Limbourg, qui, d’après la loi de
l’emprunt des 6 millions pour construction de routes, devraient jouir de
nouvelles communications, sont privées du bénéfice de cette loi, sans aucuns
motifs qu’elles puissent apprécier, sans aucunes données qu’elles puissent
débattre.
Si ces motifs de
défense des frontières doivent constamment leur être objectées, alors il en
résultera qu’aucune des constructions de routes qu’il importait le plus à ces
provinces d’obtenir, ne pourra être réalisée, et que sur les 6 millions
affectés à la construction de routes nouvelles et sur l’excédant du produit des
barrières, rien ne pourra être appliqué aux provinces du Limbourg et d’Anvers.
L’honorable M. Mast
de Vries a demandé au gouvernement s’il n’y aurait aucun moyen de lever ces
obstacles, et, ainsi que je l’ai dit, M. le ministre des travaux publics n’a
pas répondu.
Si le gouvernement
persiste à garder le silence, nous verrons dans ce silence la preuve que nous
n’avons rien à espérer quant à la construction de routes nouvelles, même de
celles dont la nécessité a été reconnue par le gouvernement lui-même ; car
plusieurs communications auxquelles on oppose les besoins de la défense du pays
avaient été autorisées par arrêté royal. Il en est ainsi des routes de Lierre à
Herenthals, de Malines à Westerloo
et de Turnhout à Diest. On a fait la même objection en masse contre les routes
dans
Je conçois que
cette considération de la défense du pays, si elle était bien justifiée, ne
devrait pas rencontrer d’objections. Mais quand j’entends parler de la défense du
pays, je ne puis m’empêcher d’exprimer l’étonnement que m’a causé l’exposé des
motifs de la demande du budget supplémentaire du département de la guerre. Ces
messieurs si soucieux de la défense du pays nous apprennent que, par une voie
sur laquelle on a tous les moyens de surveillance, il a été introduit dans
Maestricht plusieurs batteries d’artillerie de campagne ; et ils sont si bien
informés que le rapport adressé au gouvernement porte que ces batteries sont au
nombre de 6, et qu’elles ont été introduites dans la forteresse de Maestricht
par quart de batterie.
Après cela, lorsque
j’entends le gouvernement faire toujours la même objection contre toutes les
routes de la province d’Anvers, à peu près contre toutes les routes du
Limbourg, contre ce qu’ont dit les honorables MM. Scheyven et Simons, ne
suis-je pas autorisé à demander ce que signifient ces objections du
gouvernement ?
Je déclare donc que
si le ministère persiste dans son silence sur la demande de M. Mast de Vries,
je serai obligé comme plusieurs préopinants de voter contre ce budget ; car je
ne puis mettre à la disposition du gouvernement une somme à laquelle je suis
sûr d’avance qui deux provinces ne participeront pas, coutre l’intention
clairement exprimée par la législature.
En 1833, vous avez
voté des fonds pour l’exécution d’une route de Hasselt à Diest. Cette route qui
n’est que de quatre heures n’est pas encore terminée. Cependant, elle est
réclamée vivement par l’industrie de cette contrée. Il serait donc à désirer
qu’elle fût achevée le plus tôt possible. Il importe de hâter les travaux, afin
de ne pas laisser trop longtemps improductifs les capitaux qui y sont employés.
Il y a une communication qui est vivement désirée sur la rive droite de
Il y a un autre
projet de route qui a reçu un commencement d’exécution : c’est une route de
Diest par Beeringen à Hasselt ; il faudrait qu’elle
fût prolongée jusqu’à Beverloo.
Les communes du
Brabant et du Limbourg seraient ainsi mises en communication avec le camp de
Beverloo qui est le principal marché de nos contrées, pendant le séjour des
troupes. Cette route serait donc utile au camp, aussi bien qu’à ceux qui
viennent l’approvisionner.
Je ferai une
dernière observation relativement aux difficultés que l’on rencontre pour
l’exécution des routes dans
M. le ministre de l'intérieur et des affaires
étrangères (M. de Theux). - D’honorables préopinants se sont plaints de
ce que l’on n’avait pas fait de travaux suffisants dans les provinces du
Limbourg et d’Anvers et des empêchements que le génie militaire a apportés à la
confection des routes dans ces contrées : cependant, messieurs, je ferai
observer que depuis la révolution belge, les provinces d’Anvers et de Limbourg
n’ont pas été moins bien partagées que les autres provinces du royaume. Il est
très vrai que dans
Quant à celles pour
lesquelles il y a prohibition temporaire, le gouvernement s’empressera, lorsque
les circonstances le permettront, d’effectuer les travaux.
Cependant on ne
peut autoriser la création simultanée de plusieurs routes qui, dans certaines
localités et dans certaines circonstances, seraient avantageuses à un ennemi
que nous voyons dans un état constant d’hostilité. Néanmoins, je pense qu’avant
l’épuisement de l’emprunt de six millions, beaucoup de prohibition seront
levées, et que plusieurs intérêts locaux pourront être satisfaits.
Un honorable membre
vient de parler d’une route de Hasselt à Diest, dont l’exécution dure depuis
longtemps : l’honorable membre a-t-il
perdu de vue que dans les premières années on n’a pu disposer que de très peu
de fonds ? La dernière adjudication relative à cette route a eu lieu avant
l’emprunt de six millions ; on a donc dû donner un temps suffisant à
l’entrepreneur pour achever son travail ? Depuis l’emprunt on a voulu hâter la
construction de la route, et pour arriver à ce but, on a offert des fonds à
l’entrepreneur qui n’a pas cru devoir les accepter ; il a répondu qu’à cause de
la difficulté de se procurer des pavés et du haut prix où ils sont parvenus, il
y aurait perte pour lui à accepter la proposition qu’on lui faisait.
Une telle difficulté disparaîtra bientôt par suite de l’achèvement de
plusieurs routes, parce qu’alors les pavés seront moins recherchés et parce que
ces routes seront un moyen plus facile de les transporter.
M.
le président. - Une disposition additionnelle au budget des travaux
publics a été déposée sur le bureau par M.
Dumortier.
D’après cette
disposition la répartition de l’excédant du produit des barrières pour 1838, et
de l’emprunt de six millions serait présentée aux chambres avec le budget.
La parole est à M.
Dumortier pour développer sa proposition.
M. Dumortier. - Messieurs, la chambre
est toujours en droit de répartir comme elle l’a déjà fait l’excédant du
produit des barrières. Je crois que nous pouvons déclarer que nous procéderons
ainsi l’an prochain. Ma proposition a pour but qu’aucune province ne soit favorisée
aux dépens d’une autre, c’est-à-dire d’empêcher qu’aucune province ne soit
exclue du partage de l’excédant des barrières au profit d’une autre province.
On a élevé des
plaintes relativement à la répartition qui a eu lieu ; elles sont fondées tant pour
l’excédant du produit des barrières que pour l’emprunt de six millions. Ainsi
nous savons que dans l’emprunt de six millions la province du Hainaut n’aura
rien ou presque rien ; nous savons que
Dans l’origine, la
chambre avait réparti par elle-même l’excédant du produit des barrières ; c’est
ainsi que nous avons procédé pendant deux ans. Nous pouvons nommer dix-huit
membres formant une commission de répartition ; ce sera deux membres par
province.
Lorsque la dernière
fois nous avons consenti à laisser au gouvernement le soin d’opérer cette
répartition, il a été formellement stipulé que c’était pour une année seulement
; mais aujourd’hui que les grands travaux de la chambre sont terminés, il est
de notre devoir de faire par nous-mêmes ce que nous faisions auparavant, et que
nous n’avons abandonné momentanément qu’à cause de la besogne qui nous
absorbait. Messieurs, la répartition ne sera jamais mieux faite que quand
chacun de nous exposera les besoins de sa localité ; nous sommes les
représentants des intérêts locaux.
M. Verdussen. - Je demande la parole pour un
rappel au règlement.
M. Dumortier. - Vous ne pouvez m’interrompre ;
je développe une proposition ; quand j’aurai terminé, vous prendrez la parole.
M.
le président. - Aux termes du règlement, on peut interrompre l’orateur
pour un rappel au règlement.
M. Dumortier. - On ne peut m’enlever la parole
; ce serait une chose odieuse qu’une assemblée ôtât la parole à un orateur
quand il développe une proposition qu’il a faite. (Bruit.)
M.
le président. - Mais il y a un article du règlement qui autorise
l’interruption pour un rappel au règlement.
M. Dumortier. - Mais il y a un autre article du
règlement qui veut que le membre qui a déposé une proposition ait le droit de
la développer.
M.
le président. - En ce cas je vais consulter la chambre.
M.
Lebeau. - Il n’y a pas lieu à consulter la chambre, le règlement est
formel.
M. Dumortier. - Non, il n’y a pas lieu à
consulter la chambre, et je vais continuer. (Bruit.)
M.
Lebeau. - Ce n’est pas ainsi qu’il faut l’entendre !
Je demande que M.
Verdussen veuille bien dire quel est l’article du règlement qu’il invoque.
M. Verdussen. - C’est l’article 11 ; il me
donne le droit de parler pour un rappel au règlement.
M. Dumortier. - Citez l’article que je viole !
(Aux voix ! aux voix !)
M. Verdussen. - Messieurs, nous discutons en ce
moment le budget des travaux publics pour 1837, et l’amendement de l’honorable
M. Dumortier ne se rattache pas du tout au budget de 1837, car il porte en
toutes lettres qu’il concerne le budget de 1838...
M. Dumortier. - On ne peut pas
interrompre un orateur si ce n’est pour un rappel au règlement ; cependant M.
Verdussen ne parle pas du règlement, mais il parle sur le fond de ma position ;
si j’ai manqué au règlement, qu’on cite l’article auquel j’ai contrevenu, mais
qu’on ne vienne pas m’enlever la parole sous un vain prétexte.
M. Verdussen. - J’ai déjà eu l’honneur de dire
à la chambre que l’objet que nous discutons en ce moment est le budget des
travaux publics pour 1837 ; or, comme la proposition de M. Dumortier est tout à
fait étrangère à cet objet, il faut nécessairement l’autorisation des sections
pour qu’elle puisse être développée. (Appuyé
! Appuyé !)
M. Dubus (aîné). - La critique que
fait M. Verdussen de la proposition de mon honorable ami est tout à fait hors
de propos. Il faut laisser à l’auteur de la proposition le temps de la
développer ; après cela on aurait vu si cinq membres se seraient levés pour
l’appuyer ; si la proposition n’était pas appuyée, elle ne pouvait plus donner
lieu à aucune discussion ; mais si elle l’était, M. Verdussen pouvait encore
proposer la question préalable ou toute autre fins de non-recevoir, ou bien le
rejet formel. De quel droit donc vient-on, avant que ces deux préliminaires
aient eu lieu, interrompre l’auteur de la proposition dans les développements
qu’il y donne ?
Remarquez,
messieurs, que les formalités dont je parle ont été introduites dans le
règlement pour empêcher ces sortes d’interruptions qui sont tout au moins fort
inconvenantes. Un membre de la chambre fait une proposition ; mais sur la
simple lecture l’assemblée n’en saisit pas entièrement le but ni la portée ;
l’auteur est donc appelé à la développer, et la chambre est ensuite constituée
pour voir si cinq membres appuient la proposition : il fallait le laisser
accomplir ces préliminaires, et dans le cas où ils auraient été favorables à la
proposition, on aurait encore eu le temps de proposer la question préalable.
M.
Lebeau. - Ce que je vais avoir l’honneur de vous dire, messieurs, n’a
rien de personnel ; il s’agit simplement d’une interprétation du règlement. Je
pense que l’interprétation qu’y donne M. Verdussen n’a rien d’inconvenant, à
moins qu’on ne dise que le règlement lui-même est inconvenant ; je crois que
d’après l’art. 35 du règlement, M. Verdussen avait le droit d’interrompre
l’orateur pour un rappel au règlement ; je pense encore qu’il était dans son
droit en disant que l’orateur s’écartait du règlement en présentant sous la
forme d’amendement une proposition tout à fait étrangère à l’objet en
discussion : si l’honorable M. Dumortier avait rattaché sa proposition au
budget de 1837, s’il avait demandé que la somme pétitionnée dans ce budget ne
pourrait être employée que conformément à une loi spéciale ultérieure, je pense
qu’il aurait été dans son droit, et qu’il n’y aurait pas eu lieu à un rappel au
règlement ; mais il ne s’agit pas du budget de 1837, mais de celui de 1838 ; il
n’y a donc pas péril en la demeure, et l’honorable membre pouvait faire sa
proposition aussi bien dans quelques jours qu’aujourd’hui, et se soumettre aux
dispositions fort sages de l’article 35 du règlement que voici. (Ici l’orateur donne lecture de cet article.)
Je crois qu’il est impossible que l’honorable M. Dumortier ne
reconnaisse pas lui-même qu’il est en dehors du règlement s’il ne rattache pas
sa proposition au budget de 1837, que nous discutons, ou s’il ne la soumet pas
aux formalités prescrites par l’art. 35 ; quoi qu’il en soit, je pense qu’on ne
peut pas laisser continuer l’orateur dans les développements de sa proposition.
M. Dumortier. - Il est vraiment étonnant que
l’honorable préopinant, tout en prétendant vouloir discuter simplement le
règlement, vienne examiner ma proposition.
M.
Lebeau. - Je n’ai pas examiné le fond.
M. Dumortier. - Vous avez dit que la
proposition est étrangère au budget de 1837.
On a invoqué le
règlement ; or, messieurs, voici ce que porte l’article 31 du règlement :
« Si un membre
trouble l’ordre, il y est rappelé nominativement par le président ; en cas de
réclamation, le président consulte l’assemblée, etc. »
Eh bien, messieurs,
qui est-ce qui a troublé l’ordre si ce n’est l’honorable M. Verdussen qui est
venu me rappeler au règlement ? Remarquez, messieurs, que la chose est d’autant
plus sérieuse que c’est un membre du bureau qui est descendu du bureau pour
interrompre un orateur. On dit que ma proposition se rapporte au budget de 1838
: eh bien, messieurs, j’en appelle à votre souvenir, n’a-t-on pas introduit de
semblables dispositions dans les budgets des années antérieures ? N’avons-nous
pas voté des dispositions analogues ? Alors on n’a pas demandé de rappel au
règlement, alors on aurait trouvé qu’il était scandaleux de venir d’une manière
déloyale interrompre un orateur sous prétexte d’un rappel au règlement. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dubus (aîné). - L’ordre exige, messieurs,
qu’on n’interrompe pas l’orateur, et si vous ne voulez pas rendre faciles les
moyens de troubler l’ordre, il ne faut pas permettre qu’on vienne interrompre
un orateur sous prétexte d’un rappel au règlement, car tout rappel au règlement
trouble nécessairement l’ordre.
Tout amendement
déposé sur le bureau amène avec lui la question de savoir, d’abord s’il est
recevable, et ensuite s’il doit être adopté, la question de savoir s’il est
recevable s’éclaircit par les développements dont l’auteur l’accompagne, et ce
n’est qu’après avoir entendu ces développements qu’on voit si l’amendement est
appuyé.
Si l’amendement est
contraire au règlement, il n’y aura pas cinq membres pour l’appuyer. S’il est
appuyé, quelqu’un pourra alors proposer la question préalable ou l’ajournement,
ou faire toute autre demande.
La question
préalable est invoquée, lorsque l’amendement est en délibération ; mais alors
que l’auteur de l’amendement ne fait que développer sa proposition, elle n’est
réellement pas en délibération.
J’entends donc le
règlement, me paraît-il, conformément au but que doit atteindre tout règlement
; quel est ce but ? Celui de maintenir l’ordre dans les délibérations...
Des membres. - Aux voix ! aux voix !
D’autres. - A demain ! à demain !
M. Dubus (aîné). - Mais messieurs, j’ai encore
à ajouter quelques observations.
J’ai débuté par
dire que mon intention n’était pas d’aborder maintenant le fond de la question,
comme l’ont fait d’honorables préopinants ; je me bornerai à déclarer quant à
présent qu’il y a réellement quelque chose à dire sur la question, et je crois
qu’on pourrait opposer aux honorables préopinants des précédents de la chambre
elle-même ; par exemple, si ma mémoire est fidèle, des articles ont été ajoutés
en 1832, notamment au budget des finances, articles dont l’effet devait se
reporter au budget de l’année suivante ; or, la question qui nous occupe est
précisément ce que la chambre a déjà fait. (Assez
! assez ! Aux voix ! aux voix ! A demain ! à demain !)
M.
le président. - Je vais consulter la chambre sur la question de savoir
si la parole sera continuée à M.
Dumortier.
- L’assemblée n’étant
plus en nombre, il n’est pas pris de décision.
La séance est levée
à 4 heures trois quarts.