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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du jeudi 14 mai 1840
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre (notamment pétition relative au projet
de loi sur le notariat (Vandensteen, d’Hoffschmidt, de Garcia)
2) Projet de loi relatif aux créances arriérées du département de la
guerre
3) Proposition d’enquête parlementaire chargée de s’enquérir de la
situation actuelle du commerce extérieur (proposition de Foere, droits
différentiels, système douanier, etc.). Discussion générale (Smits,
Manilius, Smits, Cogels, Manilius, Van Cutsem, d’Hoffschmidt, de Foere, Cogels)
4) Projet de loi tendant à ouvrir un crédit supplémentaire au budget des
affaires étrangères pour l’exercice de 1839. Dépôt du projet
5) Proposition d’enquête parlementaire chargée de s’enquérir de la
situation actuelle du commerce extérieur. Discussion des articles. Position de
principe (F. de Mérode, Rodenbach,
Dechamps, Dubus (aîné), Liedts, Dubus (aîné), Pirson, Liedts, Hye-Hoys),
frais de l’enquête (Verhaegen, Delehaye,
Dolez, Dumortier, Eloy de Burdinne, Rodenbach, d’Huart, Dubus (aîné), Verhaegen, Dechamps, Dolez, Eloy de Burdinne, Dumortier), portée de l’enquête (d’Huart,
de Foere, Smits, de Foere, Cogels), mode de nomination
des membres de la commission (Dolez, Dumortier,
Dolez, de Foere), frais de
l’enquête (F. de Mérode, d’Huart)
(Moniteur belge
n°136 du 15 mai 1840)
(Présidence de M.
Fallon)
M.
Scheyven fait l’appel nominal à 1 heure un quart.
M. Mast de Vries lit le procès-verbal de la
séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M.
Scheyven communique les pièces adressées à la chambre.
PIECES
ADRESSEES A
M. de Villegas informe la chambre que des affaires de famille l’obligent à s’absenter pendant quelques jours.
____________________
« La commission des notaires des campagnes de l’arrondissement de Liége demandent une prompte discussion de la loi portant des modifications à la loi sur le notariat. »
M. Vandensteen – Messieurs, à l’occasion de cette pétition, je ne demanderai pas pour le moment la mise en discussion de la loi dont il s’agit, dans la pièce qui vient d’être produite. Mais je veux rappeler à la chambre, que l’honorable M. d’Huart, faisant une proposition à cet égard, avait demandé que le travail sur le projet de loi des circonscriptions cantonales fût distribué aux membres qui ne faisaient pas partie de la chambre, quand ce projet fut présenté.
Il lui fut répondu, par M. le président, qu’il conviendrait de renvoyer ce travail à la commission, après le second vote sur la compétence en matière civile, parce qu’il pourrait y avoir des modifications à y apporter. C’est pour demander ce renvoi à la commission que je prends la parole, afin qu’elle puisse mettre son travail sur les circonscriptions cantonales en harmonie avec la loi sur la compétence que nous avons votée, pour que la chambre puisse enfin s’occuper aussi de la loi si importante du notariat. Je demande, en outre, que l’on complète les commissions chargées de ce travail ; plusieurs membres qui les composaient, ne faisant plus partie de la chambre.
M. le président – La commission chargée d’examiner le projet de loi des circonscriptions cantonales a fait son rapport ; il en est de même de la commission à laquelle fut renvoyée le projet de loi sur le notariat. Ces commissions ayant terminé leur travail, si la chambre est d’avis de faire revoir le travail précédemment fait sur ces deux objets, elle devra nommer de nouvelles commissions et leur renvoyer ce travail.
M. Vandensteen – Il me semble qu’on pourrait toujours compléter ces commissions.
M. le président – Le projet de loi sur la compétence civile n’est pas encore voté, n’est pas encore converti en loi. La commission qu’on nommerait n’aurait aucune base certaine sur laquelle elle puisse fonder son travail.
M. d’Hoffschmidt – Il me semble qu’il conviendrait toujours que la commission revît les rapports qu’elle a faits sur la loi de circonscription cantonale et qu’elle examinât surtout s’ils sont en harmonie avec la loi qui vient d’être votée sur la compétence civile. On devrait nommer une commission nouvelle si l’ancienne n’existe plus, ou la compléter si quelques membres seulement ne font plus partie de la chambre et lui renvoyer toutes les pièces qui nous sont revenues sur la loi de circonscriptions, afin qu’il y prennent égard et qu’elle voie si les rapports faits sont conformes à ce qui a été adopté pour la compétence civile et ne doivent pas être modifiés.
M. le président – La commission des circonscriptions cantonales était composée de 18 membres, trois membres par province : MM. Verdussen, Doignon, Lardinois, Simons, d’Hoffschmidt (aîné), Gendebien, Fallon, Pollénus, de Nef, Milcamps, Van Volxem, Thienpont, Kervyn, Angillis, Coppieters, de Behr, Berger et Pirson.
Vous voyez qu’il y aurait un certain nombre de membres à remplacer. Cinq membres ne font plus partie de la chambre : ce sont MM. Gendebien, Lardinois, Verdussen, Pollénus et d’Hoffschmidt aîné.
M. Vandensteen – Je demanderai que le bureau veuille bien procéder à leur remplacement.
M. le président – La commission ne pourrait rien faire, car nous n’avons pas encore de loi sur la compétence civile.
M. Vandensteen – Cela n’empêche pas de s’occuper de la loi.
M. le président – On ne sait pas si la loi sera adoptée par le sénat, ou si des modifications y seront apportées.
M. de Garcia – Cela n’empêche pas de compléter la commission. En le faisant, on gagnera du temps. Ce ne sera qu’à la prochaine session qu’on pourra s’occuper de cet objet. Si le sénat adopte le projet que nous lui avons renvoyé, la commission pourrait s’occuper de la révision des rapports et nous présenter son travail dès les premiers jours de la prochaine session.
M. le président – Je vais consulter la chambre sur la question de savoir si elle entend que la commission des circonscriptions cantonales soit complétée.
- La chambre décide que cette commission sera complétée par le bureau et que la pétition lui sera renvoyée.
PROJET
DE LOI RELATIF AUX CREANCES ARRIEREES DU DEPARTEMENT DE
Rapport
de la section centrale
M. Mast de Vries – J’ai l’honneur de déposer le rapport de la section centrale sur le projet de loi relatif aux créances arriérées du département de la guerre.
La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce rapport et la mise à l’ordre du jour après les objets qui y sont déjà.
PROPOSITION
D’ENQUETE PARLEMENTAIRE CHARGEE DE S’ENQUERIR DE
Discussion
générale
M. Smits – Avant d’aborder l’objet en discussion, je dois remercier M. le ministre de l'intérieur du discours qu’il a prononcé à la séance d’hier ; car, outre qu’il est bien pensé, il confirme en tous points la démonstration formelle des progrès de notre commerce extérieur qu’antérieurement j’ai faite, déjà bien souvent, dans cette chambre. Que M. le ministre de l'intérieur se tienne toujours sur le terrain des intérêts généraux, il aura toujours, pour ces questions-là, mon franc et loyal appui ; car, pour ces questions, le pouvoir, quel qu’il soit, mérité d’être secondé, attendu qu’elles exigent plus de courage et plus d’abnégation personnelle que les questions administrations et politiques ; celles-ci ne blessent, n’irritent personne ; tandis qu’il est de la nature des questions d’intérêt matériel de froisser presque toujours des individus et des intérêts.
Quant à la proposition elle-même, je la repousserai, parce que je la crois inutile et dangereuse : inutile, attendu que les causes du malaise de quelques branches d’industrie sont parfaitement connues et appréciables ; dangereuse, parce qu’il est de la nature de toute enquête de jeter le trouble et la confusion dans les intérêts matériels. Ces enquêtes alarment toujours le commerce et l’industrie, parce que le commerce et l’industrie attendent ou plutôt craignent de voir apporter aux tarifs et au système des modifications de nature à compromettre des spéculations ou des opérations déjà commencées.
J’aurais cependant désiré pouvoir donner un vote approbatif à la proposition d’enquête qui vous est faite par M. de Foere ; je l’aurais désiré parce que je suis convaincu qu’il résulterait d’investigations calmes, réfléchies et impartiales, une approbation complète et entière du système qui a été suivi jusqu’à présent, système susceptible sans doute d’améliorations et de développements, mais qui, jusqu’à présent, a dû être tel qu’il a été dans la situation politique où le pays s’est trouvé.
J’aurais désiré pouvoir voter pour la proposition d’enquête, parce que je la considère comme le triomphe de mes convictions personnelles et la preuve de l’impuissance de nos adversaires à formuler en projet de loi le système dont ils ont souvent entretenu la chambre, sans le définir, sans le préciser. J’aurais volontiers voté pour la commission d’enquête, parce qu’il est de certains systèmes, comme de certains remèdes, qui, à force d’être prônés,, finissent pas trouver des gens crédules et par faire des victimes, jusqu’à ce que les hommes de l'art découvrent le poison caché sous une enveloppe, quelquefois séduisante.
J’aurais désiré voter pour l’enquête, parce qu’il faut mettre un terme à ces débats oiseux, auxquels la chambre assiste quelquefois, malgré elle. Mais je le demanderai : à qui la faute de ces discussions stériles ? est-ce à nous qui défendons dans cette enceinte ce que l’expérience, ce que la pratique, ce que les lois ont établi ? Ou bien est-ce à nos adversaires qui, je le répète encore, ne savent pas encore formuler le système qu’ils n’ont cessé de vanter ?
Je sais qu’on me répondrai qu’on a formulé le système, et qu’une proposition déjà avait été faite en 1834. Le fait est vrai. L’honorable député de Thielt a, en effet, proposé à cette époque un projet de loi sur les intérêts matériels, que j’ai trouvé profondément enseveli dans les cartons de la chambre. Mais ce projet ne contient pas plus de système commercial, d’après les idées nouvelles de l’honorable membre, c’est-à-dire, dans le sens du commerce direct, que n’en contient la pharmacopée du royaume. Ce projet stipule, par l’article premier, des droits différentiels que j’appellerai monstrueux, capables de nous attirer des représailles générales ; il stipule une tarification exagérée sur les bois venant du nord ; ensuite il renferme un article fort peu orthodoxe, car il a pour but d’empêcher l’entrée par le port d’Anvers, du poisson destiné aux populations catholiques, alors même qu’il viendrait par navires nationaux.
Cependant, l’honorable membre se
pose comme seul protecteur de l’industrie et de la marine nationale. Il est
vrai que l’honorable membre, forcé, par mes interpellations, de dénoncer
l’existence de ce projet, est venu quelques jours après déclarer qu’il y
renonçait. J’étais fâché et bien aise tout à la fois de cette
renonciation ; j’étais fâché parce que je croyais m’emparer de ce projet,
le discuter devant vous et démontrer son inadmissibilité pour
Il faut croire que l’honorable député de Thielt avait prévu l’objection ; car il a dit : « Mon système, s’il ne se trouve pas dans le projet que j’ai présenté antérieurement, se trouve tout au moins dans les traités de commerce faits entre les différents peuples. » Mais, répondrai-je, à mon tour, si votre système se trouve dans les traités, que ne l’y copiez-vous ? Que ne le présentez-vous à la chambre ! Mais il ne s’y trouve pas, messieurs, et il ne peut pas s’y trouver, par une raison bien simple : c’est qu’il ne peut y avoir des principes rigoureux dans les traités, attend que les traités varient suivant les avantages ou désavantages que présentent les relations entre pays.
A parler franchement, je crois que l’honorable membre avait prévu cette seconde objection, puisqu’il a ajouté : « Si mon système ne se trouve pas dans les traités, il se trouve au moins dans les systèmes des nations. » Eh bien, examinons encore.
Un membre – Et les importations des colonies en Hollande !
M. Smits – Je n’en parle pas, parce que,
comme nous n’avons pas de colonies, le système colonial de
L’Angleterre a un tout autre
système. Elle accorde à son pavillon le droit exclusif d’importer, pour la
consommation de
En France, c’est encore autre chose. En France, tous les produits quelconques, sauf ceux frappés de prohibition absolue, peuvent être importés par navires étrangers. Mais ce pays favorise plus spécialement les importations de provenance directe. Son pavillon, sous ce rapport, jouir de grands avantages ; de plus, il a la navigation exclusive des colonies ; enfin, sous le rapport des droits de port, le pavillon français a des avantages qui le favorisent non seulement quant à la cargaison, mais encore quant au navire.
Voilà donc trois nations et autant de systèmes.
En Portugal, les navires nationaux sont frappés, à l’importation, d’un droit de 15 p.c., ad valorem, d’après un tarif arrêté par le gouvernement, tandis que les navires étrangers sont frappés d’un droit de 22 ½ p.c.
Je vous ai parlé des avantages considérables que le gouvernement avait accordés à la marine nationale de France. On croit peut-être que, par suite de ces avantages, la marine française est importante et riche. Pas du tout. Cette marine languit ; elle en est au point de devoir réclamer de nouveaux avantages.
Je vous demanderai la permission de vous lire, par extrait, une lettre que M. Duchâtel a été dans le cas d’adresser à des armateurs français :
« Paris, 11 octobre 1825
« Messieurs,
« Vous êtes les premiers
signataires d’une lettre souscrite par un certain nombre de maisons de commerce
de Marseille, et adressée à mon prédécesseur : c’est à vous qu’en
conséquence je crois
devoir faire parvenir ma réponse à cette pétition commune.
« Elle a pour but de réclamer de plus fortes
surtaxes dans les droits de douane sur les marchandises qui arrivent à
Marseille par d’autres pavillons que le français, ou qui, n’y venant pas
directement des pays de production, ne sont portées par les navires français
qu’au moyen de leur transbordement dans les entrepôts étrangers les plus
voisins.
« Vous reconnaissez que le tarif des douanes n’a
pas oublié la protection due à la navigation nationale. Il y a des surtaxes
imposées au pavillon étranger, et il y en a généralement sur ce qui passe par
les entrepôts ; mais vous voudriez qu’en cela il fût fait une part plus
large à notre marine.
« La loi de douane qui vient d’être révisée, l’a
été, messieurs, avec toute l’attention possible en pleine connaissance de
cause ; elle a dû faire justice à tous les intérêts. Celui de la marine
marchande est grand, mais il n’est pas le seul, et il a été traité avec la
mesure convenable.
« Si le navire français exige plus de fret que
l’étranger, on doit y avoir égard jusqu’à un certain point, mais il n’est pas
possible d’interdire absolument l’économie dont le commerce et les manufactures
ont besoin, pour se défendre contre la concurrence extérieure sur les produits.
On a pu donner une prime à notre pavillon, et vous voyez qu’elle est au moins
de 10 pour cent sur les droits de douanes, de 1 francs 23 centimes par
hectolitre sur les blés ; mais on ne saurait aller au-delà, sans lui
réserver un monopole entier sur les transports, et par là ôter à nos armateurs
l’intérêt d’apprendre à faire naviguer avec plus d’économie. »
Vous voyez donc, messieurs, que M Duchâtel repousse
les réclamations des armateurs français, parce qu’il leur dit en résumé :
« En vous favorisant davantage, j’exclus l’utile concurrence des navires
étrangers. »
Je reprends l’examen des systèmes.
Dans les villes anséatiques, il n’y a pas de droits
différentiels, et cependant les villes anséatiques ont une marine considérable
qui navigue sur toutes les mers, et qui soutient partout la concurrence. Cette
marine exporte les produits de l’Allemagne dans des contrées où les nôtres sont
à peine connus. Mais, dira-t-on, si nos produits sont à peine connus dans les
pays exploités par la marine des villes anséatiques, cela ne démontre-t-il pas
le vice de notre système ? Nullement.
Les débouchés sont ouverts pour nous comme pour la
marine des villes anséatiques. Ces débouchés ont été créés par les soins du
gouvernement. C’était un devoir pour lui ; et il l’a rempli avec bonheur.
Mais s’il ouvre les débouchés, il ne les explore pas. Ceci est l’affaire du
commerce ; car le gouvernement ne saurait être ni armateur, ni négociant.
Si maintenant d’Europe nous passons dans le nouveau
monde, nous y trouvons encore autant de systèmes que de nations.
L’Amérique ne connaît que deux pavillons : le
pavillon national ou assimilé au pavillon national ; et le pavillon non
assimilé. Ce dernier seul supporte une surtaxe d’un dollar par tonneau et de 10
p.c. sur tous les droits.
Au Brésil, une combinaison nouvelle a surgi. Dans ce
royaume, les navires étrangers assimilés sont considérés comme les siens
propres. Seulement, tous les navires sans distinctions, payent 640 reiss par
matelot, 4000 reiss par brick et 6000 reiss par trois-mâts.
Dans les républiques de l’Amérique du sud, il y a des
systèmes divers. Seulement la règle générale est de favoriser mutuellement leur
navigation de cabotage de certains privilèges qu’ils n’accordent pas aux
nations européennes.
Je le demande, dans tous ces systèmes, où donc est
celui de l’honorable député de Thielt ? S’il s’y trouve, qu’il l’indique,
qu’il choisisse au moins ; et si, dans ces systèmes, des améliorations utiles,
applicables au pays, peuvent être trouvées, peut-être nous empresserons-nous de
les adopter ; mais, encore une fois, qu’il nous dise où se trouve son
introuvable système !
Je pourrais encore, messieurs, tout à mon aise étendre
la nomenclature des systèmes divers qui partagent les nations et dans lesquels
je n’ai pas parlé des systèmes coloniaux, parce que, comme nous n’avons pas de
colonies, ce système, dans aucun cas, ne pourrait nous être applicable, mais je
craindrais d’abuser de vos moments.
Si je suis entré dans ces détails, c’est, d’un côté,
parce que j’ai pensé qu’ils pourraient être utile à la commission d’enquête, si
elle se forme ; et, d’un autre côté, pour prouver à la chambre que le
système de l’honorable député de Thielt ne se trouve ni dans les traités de
commerce, ni dans les systèmes des nations étrangères.
J’aborde maintenant une autre série de faits et de
raisonnements.
On a dit que
Il est sans doute facile de critique des actes
quelconques ; mais ici on aurait dû tenir compte du défaut des moyens qu’a
eu le gouvernement de seconder puissamment l’industrie et le commerce, et de
leur donner l’essor ; on aurait dû faire attention qu’il n’est pas dans la
puissance humaine de surmonter des difficultés telles que celles qui résultent
d’un déchirement politique. Les difficultés étaient d’autant plus grandes en
Belgique qu’au moment où elle a opéré sa révolution, un Etat voisin, avec
lequel elle entretient de nombreuses relations, venait également de changer son
état politique : mais
La révolution de France fut close quelques jours après
l’avènement d’une nouvelle dynastie : son sol avait été légèrement
ébranlé, et cependant l’illustre Perrier réclama 60 millions de secours pour
venir en aide à l’industrie et au commerce. En Belgique, nous avons lutté entre
la crainte et l’espérance jusqu’à ce que le roi soit venu se dévouer si
noblement à nos destinées ; mais à peine un million put-il être accordé
aux intérêts souffrants.
Cependant, après l’avènement du roi, on ne put pas s’occuper
immédiatement des questions commerciales et industrielles : trop de
difficultés surgissaient encore ; et ce n’est véritablement qu’en 1833
qu’un premier regard put être porté sur ces intérêts. La position était
extrêmement difficile, car non seulement
Que faut-il faire dans cette situation ? Je
n’hésite pas à le dire, ce qui fut fait.
La politique commerciale d’un Etat peut se diviser en
trois sections, qui toutes se lient intiment, mais qui obéissent cependant à
des lois et à des combinaisons diverses.
La première, commerce maritime, commerce
extérieur ;
La deuxième, intérêts agricoles et industriels ;
La troisième, traités et relations internationales.
En bien, pour la première section, le système de
Dans les précédents, qui démontrent à la dernière
évidence que c’est toujours aux relations avec l’Allemagne que
Dans les lois où nous trouvons écrit en toutes lettres
que le pavillon national seul jouira d’une réduction de 10 p.c. sur les droits
de tonnage, etc., remarquez, messieurs, que cet avantage n’est pas sans
importance, comme quelques membres sembleraient le croire, puisqu’un navire de
300 tonneaux, chargé de café, par exemple, jouirait au taux du tarif actuel,
d’une faveur de 2,400 francs ;
Dans les lois où nous trouvons que le navire national
seul jouira de l’importation exclusive du sel, qu’il jouira de faveurs
spéciales pour l’importation du sucre, etc. ; que la pêche nationale sera
favorisée.
Ces faveurs n’étaient-elles pas assez grandes ?
Et, si elles ne l’étaient pas, pouvait-on les modifier dans la position où le
pays se trouvait ? Pour ma part, messieurs, je refuserais la qualification
d’homme d’Etat à celui qui soutiendrait l’affirmative.
L’interprétation donnée par la conférence de Londres
au traité du 15 novembre avait mis le principe de liberté de nos fleuves en
danger ; fallait-il alors que
Le système suivi par
Si on venait vous proposer de frapper de droits
quadruplés les voituriers qui viennent de
Le port d’Anvers reçoit annuellement 1,200 à 1,300
navires ; le port d’Ostende en reçoit 600 ; total 1,900
navires : nous en avons 150 à 160, et vous voulez que le mouvement de vos
ports s’alimente par cette chétive navigation ! Encore une fois, cela ne
se conçoit point, cela est incompréhensible.
Mais, dit-on, aujourd’hui nous ne voulons plus des
droits différentiels ; nous ne voulons que favoriser le commerce direct,
en ce sens qu’un navire venant du nord avec des bois du nord, qu’un navire
américain venant des Etats-Unis avec du coton, sera reçu sur le pied des
nationaux (ou peut-être plus favorablement, car on n’en sait rien encore).
Mais où sera l’avantage pour l’industrie
nationale ? Aujourd’hui il arrive fréquemment que sur les marchés de
l’Europe, le coton, les teintures ou autres matières premières sont à 4, 5, 6
p.c. à meilleur marché que sur les lieux de provenance directe : Pourquoi
empêcher les industriels de profiter de ces avantages, et les forcer d’aller
directement payer plus cher ailleurs ?
Il y a plus, messieurs ; c’est que si on applique
le système direct dans le sens que je viens d’exposer, c’est-à-dire, si on
permet aux Américains d’arriver sur le pied des nationaux dans nos ports, il y
aura dans ce cas un désavantage incontestable pour la navigation
nationale ; car chez nous on continue de frapper les Américains de la
surtaxe de 10 p.c. pour les importations, tandis que les navires belges sont
reçus aux Etats-Unis sur le pied des nationaux.
On dit, les avantages du commerce directe résident
surtout en ceci : C’est que les navires venant des lieux de provenance et
se trouvant obligés d’y retourner, doivent prendre nécessairement des produits
de nos industries pour faire leur cargaison de retour ; l’expérience
prouve quelquefois le contraire. Ainsi, aujourd’hui, les navires américains qui
arrivent dans nos ports s’en retournent presque toujours sur lest, et
pourquoi ? D’abord parce que, dans ces derniers temps, les marchés
américains ont été fortement encombrés, et, en second lieu, parce que nos
entrepôts ne présentent pas encore les assortiments pour opérer une cargaison
de retour pour l’Amérique. De plus, nos produits y sont encore peu connus, et
les navires des Etats-Unis sont conséquemment obligés d’aller au Havre, à
Hambourg, à Liverpool pour faire leur cargaison ; s’ils trouvaient dans
nos entrepôts, si ceux-ci étaient convenablement approvisionnés, des produits
de l’Allemagne, de
Soyez-en persuadés, messieurs, vous n’encouragerez le
commerce direct, vous n’étendrez vos marchés, vous n’alimenterez votre
navigation, qu’en permettant une utile concurrence, en ouvrant des relations
avec l’Allemagne, et nous constituant l’intermédiaire des échanges des peuples
qui nous entourent. De cette manière seule, messieurs, vous donnerez des
aliments à la navigation nationale, et les plaies dont on se plaint aujourd’hui
disparaîtront ; mais ce n’est point par des restrictions ou par un système
qu’on ne définit point, qu’on atteindra ce but.
Pour obtenir ce résultat, vous devez encore améliorer
le régime de vos entrepôts, encourager le transit, et, quand je parle ici du
transit, je dois une fois m’expliquer plus largement sur ce mot qui n’a pas
encore été bien compris. Quand je dis transit, je dis système d’entreposage, je
dis libre arbitre commercial, je dis transaction générale, et je vais tâcher de
me faire comprendre.
Je me suppose négociant ; j’ai besoin de
certaines marchandises coloniales ; pour me les procurer avec avantage,
que dois-je faire ? Je dois charger un navire de produits industriels,
afin d’avoir une cargaison de sortie ; car sans cela, le navire devant partir
à vide, il aurait un double fret, c’est-à-dire que la marchandise à rapporter
serait d’autant plus chargée ; le navire revient ; le marché de
l’Allemagne, par exemple, présente des avantages à la vente ; peut-être
va-t-on croire que je vais immédiatement charger ces marchandises sur le chemin
de fer pour les envoyer en Allemagne ? pas du tout, messieurs, je fais
décharger le navire et je dépose les marchandises à l’entrepôt ; je vois
les variations des différentes places de l’Europe, je vois si la spéculation ne
se porte pas sur mes marchandises ; j’attends, je laisse la marchandise à
l’entrepôt, quelquefois pendant une année entière, pendant laquelle elle est
assujettie à des manipulations et à des frais divers, tous profitables au
pays ; le marché d’Allemagne reste-t-il le plus favorable ; j’expédie
les marchandises par transit, je les dirige par les canaux, par le roulage ou
par le chemin de fer, vers leur destination ; si le marché intérieur est
plus favorable, je les place sur le marché intérieur et j’acquitte les droits
de consommation ; si au contraire, c’est le port d’Amsterdam, le Havre,
Hambourg qui offre plus d’avantages, je réexporte les marchandises en franchise
de doits. Eh bien, messieurs, c’est cette triple opération, c’est cette triple
faculté, qui constitue réellement le transit, et vous concevez que, si cette
triple faculté n’existait point, les opérations devraient se limiter au marché
intérieur et que les importations devant se limiter au marché intérieur,
l’exportation des produits de notre industrie serait limitée dans la même
proportion ; si au contraire les importations peuvent alimenter non
seulement le marché intérieur, mais aussi l’Allemagne et les ports étrangers,
la masse de ces importations doit nécessairement augmenter considérablement, et
dès lors il est évident que l’exportation des produits industriels doit croître
de la même manière.
Ainsi, messieurs, quand je dis transit, je dis système
d’entreposage, de libre arbitre, de transactions générales en matière de
commerce.
Il y a donc, messieurs, un système commercial, système
fortement et largement conçu. D’après cela un honorable sénateur a dit qu’il y
avait confusion dans les idées ; cela ne m’étonne point ; car,
veuillez bien remarquer qu’il ne prononçait ces paroles qu’en réponse à un
discours de l’un de ses collègues, l’honorable sénateur nommé par le district
de Saint-Nicolas, dont il combattait le système.
Sous le rapport industriel, messieurs, le système
commercial de
Quant à la troisième partie du système, celle qui
concerne les traités, les relations internationales, vous savez, messieurs, que
le gouvernement des Pays-Bas nous avait laissé peu de legs sous ce
rapport ; nous avions un seul traité, celui avec le Brésil. Aujourd’hui,
ce traité a été renouvelé ; les Américains, comme je le disais tantôt,
nous reçoivent comme les nationaux ; au Mexique, nous sommes admis sous le
pied des nations les plus favorisées ; dans tous les Etats du sud nous
sommes admis sur le même pied ; en Suède nous sommes admis comme les
nationaux ; au Danemark, nous avons obtenu l’abolition de la surtaxe pour
le Sund et les Belt ; l’Angleterre a suspendu en notre faveur la
perception des droits de
J’ai voulu donner des explications à la chambre pour
prouver que jamais les intérêts du pays n’ont été perdus de vue ; que toujours
ils ont fait l’objet de la plus sérieuse sollicitude du gouvernement et que la
confusion existe seulement dans les idées de ceux qui ne voudraient point
reconnaître ces vérités.
M. Manilius – Messieurs, quoique plusieurs points du discours de M. le
ministre de l'intérieur aient été réfutés par les honorables orateurs qui m’ont
précédé, il en est encore sur lesquels on n’a point répondu, et il m’importe,
cependant, dans l’intérêt d’une industrie qui paraît fixer l’attention de la
chambre, qu’une assertion de M. le ministre soit mise en son état d’exacte
vérité. Oui, messieurs, aucune année peut n’avoir donné l’exemple d’une
semblable quantité d’arrivages de cotons au port d’Anvers ; mais la raison
que je vais vous en donner est très facile à concevoir : une baisse
extraordinaire d’au moins 25 à 30 p.c. a eu lieu sur ce produit, tant en
Amérique que dans d’autres lieux de provenance. Cette circonstance en a fait
déverser des masses sur tous les marchés de l’Europe, et Anvers a offert cette
fois un avantage marqué pour s’y approvisionner. Gand étant le principal lieu
de consommation de ce lainage, il n’est pas surprenant qu’une grande partie ait
pris cette direction. Cela arrive et doit arriver toutes les saisons pour
alimenter la consommation des fabriques ; mais les lieux de provenance, ou
le Havre, ou Liverpool obtiennent souvent la préférence sur Anvers pour des
raisons calculées sur les prix de ces marchés. Grâce à la possibilité de ces
énormes provisions auxquelles M. le ministre a fait allusion, car elles doivent
servir à procurer du travail et du pain à un nombre considérable d’ouvriers. Eh
bien, messieurs, ce que nous craignons, et ce que nous voulons prévenir, soit
par l’enquête et de toute manière, c’est que les fabricants ne soient obligés
de cesser de s’approvisionner ; car, je n’hésite pas à le dire, la
cessation de leurs travaux amènerait une catastrophe terrible ; c’est
pourquoi, messieurs, que nous devons redoubler d’efforts pour y parer ; et
c’est, à mon avis, un devoir pour le gouvernement de ne point retarder à porter
remède à ce danger, les moyens lui sont signalés depuis longtemps ; il est
de son pouvoir de les appliquer immédiatement ; et avec du bon vouloir, il
obtiendra de la législature ceux dont il ne peut disposer sans elle. Je dis
qu’il faut se hâter, parce qu’il y a encombrement de produits et épuisement de
moyens, et comme il y a une fin à tout, les travaux devrait stater un jour
forcément, c’est alors que les plaintes seront aiguës, elles ne partiront plus
des chefs d’établissement, mais des masses d’ouvriers affamés, et la
responsabilité des premiers sera à couvert ; leur devoir aura été
accompli ; je désire que le gouvernement puisse en dire autant, si
toutefois un pareil malheur venait à se réaliser.
Messieurs, si je suis bine informé, M. le ministre de
l'intérieur a l’intention de se rendre à Gand, et de voir par lui-même ;
là il sera convaincu, par l’évidence des faits énoncés, que je pourrais encore
étendre davantage ; mais c’est assez de ce triste exposé.
Maintenait, pour ce qui est de l'enquête, j’y donne
mon appui parce que je pense qu’elle peut amener du bien. Dans tous les cas, ni
le gouvernement, ni la chambre, ne seront liés par les conclusions de ces
travaux ; et dès lors, je trouverai déplacé qu’on voulût ne point
sérieusement prendre la résolution de réviser un système commercial, qui n’a
jamais été créé pour
Aujourd’hui, l’honorable M. Smits veut rendre de
nouveau cet état permanent, par la seule crainte, dit-il, des
représailles ! ainsi quelle est notre position ? La chambre et le
pays jugeront une semblable déclaration, surtout faite par l’organe de cet
honorable membre.
Ce qui est frappant, messieurs, c’est l’assertion de
l'honorable M. Smits, qu’il se trouve des débouchés merveilleux partout ;
et d’un autre côté, l’honorable M. Cogels, qui a déclaré que, s’il y avait des
avantages à réaliser par le commerce maritime, toute la ville d’Anvers
abandonnerait ses capitaux à de semblables opérations. Cette dernière assertion
est patente ; de nombreux essais ont été faits, et de nombreuses pertes
ont été essuyées. L’honorable M. Smits en sait quelque chose ; mais il a
garde de se rapprocher de l’expérience ; la théorie est beaucoup plus
facile, et il se retranche derrière elle.
Je me rallie à la proposition de l'honorable M.
Dedecker, pour composer la commission à nommer de 9 membres au lieu de 7.
M. Smits – Messieurs, l’honorable M. Manilius m’a sans doute fort mal
compris. Je n’ai pas di que
M. Cogels – Messieurs, je n’ai pas dit du tout que
M. Manilius – Messieurs, j’ai pris exactement note des paroles qui ont été
prononcées hier par l’honorable M. Cogels ; mais je dois convenir que je
ne les ai pas retrouvées dans le Moniteur.
M. Van Cutsem – Messieurs, la discussion qui nous occupe en ce moment est
peut-être une des plus importantes qui aient eu lieu à la chambre depuis fort
longtemps. Il y est question de notre existence politique, et quand je dis que
notre nationalité dépend de la solution que nous allons donner à nos débats, je
ne vais pas trop loin, parce que si notre système commercial actuel est mauvais
et que nous décidions qu’il est bon, nous allons ruiner
Les partisans de la proposition de notre honorable collègue, M. de Foere,
prétendent avec lui que nos échanges avec les nations voisines sont à peu près
nuls ; ses adversaires soutiennent que l’exportation de nos produits
augmente chaque année avec le système commercial, aujourd’hui en vigueur :
les derniers s’étayent sur les suppositions de relevés inexacts de statistique
pour démontrer la vérité de leurs allégués, les autres s’appuient sur des
statistiques faites par le gouvernement lui-même, et qui prouvent
qu’annuellement il est importé en Belgique pour quarante à cinquante millions
plus de marchandises qu’il n’en est exporté, et affirment que ce résultat est
d’autant plus désavantageux, que notre pays est un pays de production où il y a
exubérance, et par suite besoin d’un écoulement à l’étranger.
Les soutènements des deux parties établissent une
chose pour moi, c’est que l’un et l’autre sont parfaitement d’accord sur les
principes commerciaux ; ces principes, personne ne les ignore ; en
effet chacun sait que la nation qui fait les plus nombreux échanges et qui voit
la balance commerciale se tourner le plus en sa faveur est la plus riche, si
toutefois les échanges sont des échanges de produits naturels ou manufacturés,
de manière qu’il est vrai de dire, que si un pays achète à une nation voisine
pour cent millions, et qu’il lui vend pour cent dix millions, que ce pays
s’enrichit, et qu’il se ruine s’il achète et s’il ne vend point.
Ainsi, toute la question est là ; la chambre
sait-elle, si le chiffre de nos exportations prime celui des importations, ou
si nous recevons plus de marchandises que nous n’en expédions, et a-t-elle eu
soin de connaître, à cet égard, la position du pays, pour aviser s’il y
a lieu aux mesures à prendre en faveur du commerce et de l'industrie, afin
d’établir un juste équilibre entre nos exportations et nos importations ?
Quant à la nécessité de connaître le chiffre de nos importations et de nos
exportations, elle est évidente ; la décroissance de la prospérité des
nations qui achètent sans vendre, n’a jamais pu être mise en doute ;
l’Espagne, par ses mines du nouveau monde, possédait plus de métaux précieux et
de richesses que toutes les autres nations de l’Europe ; restée sans
industrie, elle n’eut que des écus à donner en échange des produits
manufacturés des autres nations ; on sait combien elle est déchue de son
ancienne splendeur ; l’Angleterre, qui ne possédait ni mines d’or, ni
mines de diamants, a beaucoup fabriqué, beaucoup vendu aux autres peuples, a
toujours fait balancer en sa faveur le chiffre des exportations sur celui des
importations ; on sait où elle est parvenue.
Nous nous bornerons, par conséquent, à rechercher si
nos exportations sont inférieures aux importations qu’on fait dans notre
pays ; nous vous le démontrons par des relevés officiels, qui nous
paraissent d’autant plus exacts, que le trop plein, qui existe dans les usines
de nos fabricants de coton, d’armes, de produits de toute espèce dans les
magasins de nos marchands de toiles et de nos extracteurs de houille, vient
encore les confirmer.
Ajoutez à ces preuves les plaintes qui surgissent de
toutes les parties de
Nous exportons chaque année davantage, nous disent les
adversaires de l’enquête ; devez-vous les croire, parce qu’ils vous le
disent sans vous le démontrer ? Pouvons-nous admettre, lorsque nous voyons
que notre marine marchande est venue presque à rien depuis 1830, lorsqu’elle
diminue chaque jour que nous livrons nos fabricats à l’étranger ?
Pouvons-nous ajouter foi à ce qu’ils avancent lorsque nous savons que les
navires qui nous encombrent de marchandises, partent pour la plupart sur
lest ? Pouvons-nous penser que notre commerce d’outre-mer soit dans un
état florissant, lorsqu’il est constant que
Je crois, messieurs, si je ne vous ai pas démontré que
nos importations sont plus nombreuses que nos exportations, voir avoir prouvé
que tout doit vous faire croire que le chiffre des premiers est plus élevé que
celui des derniers, et s’il en est ainsi, c’est un devoir pour vous de vous
éclairer sur ce fait dont tout notre avenir dépend.
Quant aux moyens à employer pour rétablir l’équilibre
entre nos exportations et nos importations, il serait prématuré de les
discuter ; seulement je vous dirai que les partisans de droits protecteurs
ont pour eux les célébrités, les grands hommes de l’époque. Lorsque je parle de
droits protecteurs que les hommes éclairés jugent utiles à leur pays dans
l’état actuel des relations internationales, je n’ai en vue que des droits
protecteurs sages et bien calculés ; et non pas ces droits protecteurs qui
vident les caisses de l’Etat, sans protéger le commerce et l’industrie, tels
que des garanties de pertes, qui sont cause qu’il y a toujours pertes et ne
sont destinées qu’à quelques privilégiés, garanties qui font perdre de l’argent
à ceux qui ne participent pas à ces largesses parce qu’ils suivent l’exemple
des expéditions qui se font avec une avance de dix pour cent : des droits
protecteurs de cette nature, nous les repoussons comme des combinaisons maladroites
et nuisibles aux intérêts du pays et nous engageons tout gouvernement qui y
aurait recours à s’en désister au plus tôt.
Voici, messieurs, ce que M. Thiers, dont la parole à
tant d’autorité, quelle que soit la matière qu’il traite, vient de dire, il y a
peu de jours à la tribune française : « J’avais l’honneur d’être
ministre du commerce la première fois où l’on a réuni l’agriculture, la
fabrique et le commerce pour les consulter sur les besoins réciproques ;
la lutte, au début, a été effroyable ; et puis, quand tous les intérêts
ont été mis en présence, que la discussion a été suivie avec vigueur, avec
précision, ils ont été obligés de reconnaître qui le système protecteur leur
était nécessaire à tous. J’ai démontré à messieurs des ports, et je leur prouverai
encore aujourd’hui que leur commerce ne peut exister sans l’industrie
intérieure. Les raisonnements que j’ai entendu faire sont applicables au coton,
au fer, au drap, à toutes les industries, encore plus qu’au sucre de
betteraves. »
Elle part de bien haut, sans doute, la leçon que ce
discours donne aux apôtres de la liberté de commerce, nous désirons qu’ils la
méditent et que le gouvernement en fasse son profit dans l’intérêt de notre
belle patrie, qui a dans son sein tous les éléments de prospérité si l’on sait
les en faire sortir ;
Les paroles que je viens de prononcer me paraissent
suffisantes pour motiver le vote favorable que je donnerai à la proposition de
l’honorable M. de Foere, et j’espère que la conviction qui m’anime passera dans
l’esprit de la plupart des membres de cette assemblée.
J’ai dit.
M.
d’Hoffschmidt – Messieurs, quand
l’honorable M. de Foere a annoncé qu’il allait soumettre à la chambre une
proposition d’enquête commerciale, j’ai applaudi à cette idée, car il m’a
semblé que, quelque fût le sort de cette proposition, les débats qu’elle devait
nécessairement soulever ne seraient pas stériles pour le pays. Ces débats ont,
en effet, l’avantage d’attirer l’attention publique et particulièrement celle
des membres de la représentation nationale par des questions dont dépend la
prospérité de
On doit donc savoir gré à l’honorable M. de Foere de sa
persistance à ramener souvent nos débats sur des questions qui intéressent à un
si haut degré l’avenir industriel et commercial du pays.
Je conçois parfaitement que la proposition de
l’honorable membre ait trouvé, au premier abord, de nombreux partisans parmi
nous. Qui ignore, en effet, ou qui révoque en doute qu’un grand nombre de nos
branches d’industries sont dans un état de malaise ? Qui peut douter que
la chambre ne soit disposée à faire tout ce qui est en son pouvoir pour changer
cet état de choses ?
Or, l’idée d’une enquête commerciale, exécutée sur de
larges proportions, destinés à constater les causes du mal et les remèdes à y
apporter, devait au premier aspect être accueillie avec faveur.
J’avoue que moi aussi, j’étais, au premier moment,
assez favorablement disposé pour l’enquête ; mais depuis, un examen plus
attentif, et les discours qui ont été prononcés hier, m’ont amené à ne plus
avoir de doutes sur l’inutilité de l’enquête, soit parlementaire, soit
ministérielle.
L’enquête fera, dit-t-on, reconnaître les causes de la
situation fâcheuse où se trouvent notre industrie et le commerce extérieur du
pays ;
Elle mettra à même d’indiquer le remède à appliquer au
mal, et de formuler le système commercial et naval qu’il convient d’établir.
Messieurs, je crois qu’il est permis de douter que
cette mesure législative amène des résultats aussi positifs ; je pense
qu’il pourrait même arriver que la commission chargée d’une opération aussi
vaste, aussi difficile, se fourvoyât au milieu du dédale de renseignements, de
dépositions, de déclarations souvent erronées, enfin de faits de toute espèce
qu’elle devrait recueillir, et qu’elle vînt ensuite présenter un système
commercial qui ne serait pas le plus avantageux pour le pays.
La composition de la commission ne serait-elle pas
déjà, elle-même, une chose fort difficile ?
Qu’arriverait-il si cette commission était nommée
suivant le mode proposé par la section centrale ?
Sans parler de la singularité, pour ne pas dire plus,
qu’il y aurait à exclure, sans motif, les membres du sénat de toute
participation à cette grande mesure, ni de l’inconvénient de l’exécuter
contrairement aux désirs du gouvernement, je crois que la commission ne
pourrait être que difficilement formée en la prenant exclusivement parmi les
membres de cette chambre.
Il est probable, en effet, qu’il est plusieurs de nos
collègues, très capables d’ailleurs de remplir cette mission, qui s’y
refuseraient, soit parce qu’ils ne seraient pas partisans de la mesure, soit
parce que leurs affaires personnelles ne leur permettraient pas de consacrer
tout leur temps à un travail de plusieurs années.
Ensuite, il est à croire que les partisans de l’un ou
de l’autre système seraient en majorité dans la commission. Dès lors ne
serait-il pas à craindre que cette majorité ne fût entraînée à remanier les
notions et les faits qu’elle recueillerait vers un sens favorable à son
opinion ?
Certes, ce ne serait sans doute pas par amour-propre
que ses membres agiraient ainsi ; mais leur conviction, déjà formée
d’avance, les amènerait naturellement à envisager les choses sous un aspect
avantageux pour leur manière de voir.
Eh bien, s’il était vrai, et je pense qu’il serait
difficile qu’il en fût autrement, s’il était vrai que les partisans de l’un ou
l’autre système commercial dominassent dans la commission d’enquête, la chambre
et le sénat devraient-ils adopter aveuglément leurs conclusions ? non,
sans doute ; et pour pouvoir juger sainement, qui sait s’il n’y aurait pas
lieu peut-être de déléguer une nouvelle commission composée des partisans d’un
système contraire ?
Un des inconvénients graves inséparables de l’enquête
parlementaire, c’est la lenteur de ses opérations, c’est le temps extrêmement
long qu’il faudrait pour la terminer.
En effet, l’examen d’une question quelconque par une
commission marche toujours lentement. En général les commissions sont, de leur
nature, portées à la paresse. Cependant j’admets que ceux de nos honorables
collègues qui voudraient bien se charger de l’enquête apportassent tout le
zèle, toute l’assiduité que la chose comporte ; je suppose que, pour se
livrer entièrement à ce besogne pénible, fatigante, ils abandonnent leurs
propres affaires ; serait-il en leur pouvoir alors d’empêcher qu’elle ne
se prolonge pendant plusieurs années ? non, messieurs, car, quelle que
soit la capacité des hommes appelés à remplir cette mission difficile, leur
travail ne pourrait avoir du mérite que s’il était fait avec les plus grands
soins et fondé sur des investigations logues et scrupuleuses.
Certes, on est effrayé quand on réfléchit aux immenses
travaux que devrait exécuter la commission d’enquête ; en effet, elle ne
pourrait se borner à interroger seulement, comme on le disait hier, sur
l’unique objet de savoir si la législation sur le commerce extérieur ne contribue
pas à la souffrance de l’industrie ; restreinte ainsi, elle serait
insuffisante et ne ferait pas connaître ce que l’on veut principalement savoir.
Les causes du malaise et les moyens d’y remédier.
Il faudrait donc porter son investigation sur toutes
les branches principales d’industrie du pays ; il faudrait s’enquérir, non
seulement des débouchés qui leur sont nécessaires, mais des procédés de
fabrication de chacune en particulier ; il faudrait entrer dans les
détails concernant la matière première, le salaire des ouvriers ; il
faudrait voir si les machines sont à la hauteur des inventions actuelles ;
si les frais de production ne dépassent pas les prix de vente ; si
l’étranger n’est pas plus avancé que nous dans tel ou tel genre de fabrication ;
il faudrait examiner les questions des frais de transport, les quantités que
l’on pourrait livrer à la consommation des pays étrangers. Il faudrait même se
transporter sur les marchés que l’on veut ouvrir aux produits belges. Pour
recueillir toutes ces données, on devrait nécessairement entendre une foule
d’individus, recevoir une masse de dépositions. Ainsi, messieurs, quel que soit
le zèle de la commission d’enquête, l’exécution de l’œuvre laborieuse qui lui
serait confiée, ne pourrait pas être de peu de durée ; elle serait longue,
fort longue, peut-être même interminable.
Si, au moins, tout ce labeur devait rendre
infailliblement à notre commerce et à notre industrie la prospérité qui leur
est nécessaire, alors il n’y aurait pas à hésiter, la chambre tout entière dût-elle
se transformer en commission d’enquête ; mais ce résultat, messieurs, il
est permis d’en douter ; je le répète, il est permis de croire même que
l’enquête n’amènerait aucune amélioration dans notre situation.
Les enquêtes parlementaires, pour éclairer des
questions commerciales, n’ont eu lieu, je pense, jusqu’à présent, qu’en
Angleterre.
L’honorable M. Eloy de Burdinne nous en a cité une
hier, faite sur l’agriculture, qui a duré trois ans, et qui a coûté des sommes
énormes.
En France, on n’a pas eu recours jusqu’ici au mode
d’enquête parlementaire. Depuis une douzaine d’années, on y a fait quatre ou
cinq enquêtes importantes, entre autres sur les fers et sur les houilles ;
mais ces enquêtes ont toutes été dirigées par le gouvernement.
Elle ont duré fort longtemps ; et je ne pense pas
qu’elles aient amené des résultats fort utiles.
Ne croyez pas cependant, messieurs, que je suis d’avis
qu’en aucun cas les enquêtes ne sont utiles ; loin de moi cette pensée. Je
crois seulement que ce mode d’information ne produit pas toujours tout le
bien-être qu’on en attend, et que, dans tous les cas, il ne doit jamais
embrasser un trop grand nombre d’objets, si on veut qu’il soit efficace.
On veut que la commission formule un système
commercial et naval. Mais quel système prétend-t-on qu’il présente, si après
les investigations, elle reconnaît que, comme le disait hier si judicieusement
l’honorable M. Pirmez, le malaise provient de la libre concurrence et de
l’excès de production ?
Remarquez bien d’ailleurs, messieurs, que, quand au
bout d’un certain nombre d’années la commission d’enquête rentrera dans cette
enceinte courbée, pour ainsi dire, sous le poids des notes, des renseignements,
des documents de toute espèce, qu’elle aura recueillis ; remarquez que
tout ne sera pas fini alors ; des débats nouveaux, interminables,
s’ouvriront encore dans les chambres, les mêmes systèmes, les mêmes convictions
se représenteront dans l’arène et nous ne serons probablement pas plus avancés
qu’à présent.
Quant à l’enquête à faire sous la direction du
gouvernement, je la crois aussi inutile. En effet, le gouvernement exerce en
réalité une enquête continuelle, permanente ; il peut consulter les
députations provinciales, les gouverneurs, les commissaires d’arrondissement,
les employés des contributions ; il peut surtout s’éclairer des lumières
des chambres de commerce et s’adresser même directement aux industriels et aux
commerçants. Ces moyens, il les emploie fréquemment, et, en général, je pense
qu’ils sont suffisants. Si d’ailleurs, le gouvernement croyait devoir faire
exécuter une enquête, il serait libre de l’ordonner, comme il l’a fait pour
l’industrie linière.
Un honorable membre vous a dit hier qu’il fallait
adopter l’enquête, parce que son rejet aurait pour résultat de faire croire que
nous ne prenons nullement à cœur les intérêts du pays. Mais, messieurs, si nous
ordonnons l’enquête, on murmurerait bientôt, soyez-en sûrs, contre ses
lenteurs, et si elle ne produisait pas les résultats qu’on en attend, les
industriels croiraient alors qu’il n’y a plus de remèdes à leurs souffrances.
Je pense donc, messieurs, que l’adoption de la
proposition de l’honorable M. de Foere n’amènerait pas un changement favorable
dans notre situation commerciale et industrielle ; je crois même qu’elle
pourrait avoir des effets nuisibles en ce qu’elle paralyserait pendant
plusieurs années l’action du gouvernement, quant aux améliorations qu’il peut
introduire à cet égard. Je voterai contre la proposition.
(Moniteur
n° 137 du 16 mai 1840) M.
de Foere – Messieurs, il est permis de
croire que le discours que l’honorable ministre de l’intérieur a prononcé dans
la séance d’hier, est l’expression du cabinet actuel. Puisque les ministres
occupent le pouvoir dirigeant dans toutes les assemblées parlementaires, je
m’attacherai particulièrement à l’examen du discours de l’honorable ministre de
l’intérieur. Dans la route que je me suis tracée, je rencontrerai quelques
autres honorables adversaires.
Deux fois, messieurs, j’ai présenté des développements
différents de ma proposition d’enquête. L’honorable ministre de l’intérieur ne
les a pas attaqués. Ils sont donc restés debout sans avoir été ébranlés.
L’honorable ministre a fondé en grande partie son
opposition à l’enquête sur notre injuste appréciation de la situation de notre
commerce extérieur.
Or, avons-nous fondé la nécessité de l’enquête sur
l’opinion que nous nous sommes formés nous-mêmes sur la situation de notre
commerce extérieur ? Dans mes développements, j’ai eu un soin
particulier ; c’est celui de constater l’opinion des autorités les plus
respectables du pays sur la fâcheuse situation de notre commerce extérieur,
autorités que personne ne récuse.
Après de longues hésitations, l’administration est
venue enfin avouer devant le pays tout entier que les négociants du pays se
bornaient presque exclusivement au commerce de commission. Notre envoyé
extraordinaire près de la cour de Londres a affirmé le même fait. Les deux
documents, dans lesquels ces témoignages ont été déposés, ont été rendus
publics. Ils n’ont été niés ni contestés.
Ce n’est donc pas nous qui nous sommes formé
exclusivement une opinion fausse de la situation fâcheuse du commerce extérieur
du pays. C’est d’abord dans ces aveux de l’administration précédente que ma
proposition d’enquête a pris naissance. Il est vrai, longtemps avant ces aveux,
j’avais établi le fait, et longtemps il avait été nié ; mais il arrive
enfin un temps où l’évidence rend toute dénégation impossible. La lutte des
partis parlementaires contre les faits patents est insensée. Elle ne peut avoir
d’autre résultat que la chute de ces partis.
Le fait est d’ailleurs généralement avoué. L’honorable
M. Cogels lui-même l’a avoué dans la séance d’hier. Le commerce de
M. Cogels – Je demande la parole.
M.
de Foere – M. Cogels paraît nier
l’aveu que je lui prête ; écoutez, messieurs, les paroles que l’honorable
membre a prononcées hier ; je les lirai textuellement dans le
Moniteur :
« Elle (
Ai-je prêté à M. Cogels d’autres paroles que celles
qu’il a prononcées ?
C’est je le répète, dans ces aveux, qui sont
universellement conformés, qui ne sont niés par personne, que ma proposition
d’enquête a pris son existence.
Si vous aviez l’intention d’entrer de bonne foi dans
une discussion logique, vous disposiez de deux moyens : ou contester mes
prémisses basées sur des faits universellement reconnus, ou, si vous ne pouviez
pas les nier, contester les conséquences que j’en ai déduites. Vous n’avez fait
ni l’un ni l’autre.
Si vous étiez entrés dans cette voie logique, j’aurais
compris de véritablement débats parlementaires et j’aurais vu un pouvoir
dirigeant ces débats.
Nous apprécions mal, dites-vous, la situation de notre
commerce extérieur ! Messieurs, nous ne constituons pas à nous seuls la
chambre. Or, depuis dix ans, la chambre n’a cessé d’exprimer ses plaintes sur
le manque de débouchés pour l’industrie du pays ; depuis dix ans, de tous
les bancs de la chambre, on ne cesse de réclamer ces débouchés. Or, selon vous,
nous seuls, nous apprécierions mal la situation du commerce extérieur du pays.
Je ne pense pas qu’il existe un seul membre dans la chambre, sans en excepter
même les ministres, qui ne demandent encore aujourd’hui ces débouchés.
L’honorable M. Pirmez lui-même, malgré sa vive
opposition à l’enquête, les réclame hautement. De peur qu’on ne se méprenne sur
ses intentions, il a constamment répété qu’il appelle de tous ses vœux de
grands débouchés. Il croit donc, lui aussi, que les débouchés manquent au pays.
« Nous apprécions mal, dites-vous, la situation
du commerce extérieur du pays. »
Est-ce nous qui avons écrit les mémoires de la chambre
de commerce de Liége et de la chambre de commerce de Verviers ? Est-ce
nous qui sommes les auteurs du mémoire de la fabrication de Gand ?
Est-nous enfin qui avons demandé l’impression de ces documents dans le
Moniteur ? Cette impression n’est-elle pas le fait de la chambre tout
entière qui, sans opposition aucune, a ordonné l’impression de ces documents
dans le but de s’éclairer sur la détresse de l’industrie, considérée dans ses
rapports avec le commerce extérieur et intérieur ?
« Nous apprécions mal, dites-vous, la situation
du commerce extérieur. » Chose singulière ! Comment nos adversaires
eux-mêmes apprécient-ils cette situation ? Qui a prononcé ces paroles dans
la séance du 29 avril, sur la prise en considération de ma proposition :
« L’honorable député de Thielt quelques autres membres de cette assemblée
partent de ce principe que
Nous apprécions mal la situation du commerce extérieur
du pays !... Et, chose plus singulière encore, est-ce nous qui avons lu le
programme dans la séance dans laquelle le nouveau cabinet est venu nous
annoncer sa constitution ? Est-ce nous qui avons dit dans ce programme
d’une manière assez directe qu’il fallait au pays des débouchés ; que des
débouchés lui manquaient ? Vous vous réfutez donc vous-mêmes, lorsque vous
nous attribuez à nous seuls une opinion défavorable et injuste sur la
déplorable situation du commerce extérieur du pays.
Est-ce nous qui avons récemment présenté le projet de
loi relatif à l’établissement d’un service de bateaux à vapeur entre
Il est donc vrai que la situation du commerce
extérieur de
Est-ce nous enfin, qui avons présenté à la suite de ce
projet même, le tableau des exportions et des importations réciproques entre
Est-ce nous enfin qui, dans la séance du 13 février,
avons prononcé au sénat ces discours mémorables sur lesquels nous nous sommes
appuyés ? ce sont là autant de faits sur lesquels nous avons basé la nécessité
d’une enquête commerciale ; vous ne contestez pas les uns ; les
autres vous appartiennent, et c’est nous, dites-vous, qui apprécions mal la
situation du commerce extérieur du pays ?
Ces faits posés, messieurs, il ne vous sera pas
difficile d’apprécier à sa véritable valeur une assertion de M. Pirmez que j’ai
le bonheur de rencontrer toujours comme adversaire. Il a dit dans la séance
d’hier (ce sont ses propres expressions) « que je reste seul pour affirmer
que la situation de notre commerce extérieur et de notre industrie est
fâcheuse. »
Tous ces faits exposés dans mes développements sont
restés intacts.
Nous avons encore établi que le système de 1816 et de
1822 est devenu en Belgique un énorme anachronisme. En effet, toutes les
combinaisons avec le système de 1816 et de 1822 ont été rompues complètement
par notre séparation de
M. le ministre de l'intérieur s’est borné à faire une
comparaison entre une année d’exportation vers Java et les exportations
générales que nous faisons maintenant vers tous les ports. Il trouve que la
perte de cinq millions d’exportations vers nos anciennes colonies, est
compensée par neuf millions d’exportations générales.
Cette comparaison est-elle bien admissible ? Elle
mène à une conclusion directement opposée. L’excédant ne présente en réalité
que quatre millions, et si nous exportations vers tous les points du globe
n’offrent qu’une augmentation de quatre millions, c’est une preuve évidente que
le système actuel est défectueux, et que la situation de
La vérité des chiffres est dans la juste appréciation
des faits auxquels ils s’appliquent. Les démonstrations mathématiques, même les
plus rigoureuses, ne prouvent rien, si les chiffres ne représentent pas
exactement les faits sur lesquels ils sont basés.
Etablissez, une bonne fois, la discussion sur le
terrain sur lequel nous l’avons posée ; alors la discussion sera possible,
elle sera fructueuse ; alors et alors seulement elle pourra éclairer la
chambre et le pays. Mais je conçois qu’il était de votre intérêt de sortir de
la question. Vous vous seriez trouvés dans la dure nécessité de combattre
l’opinion générale du pays. Vous vous seriez vus obligés de combattre vous-même
et vos amis politiques.
L’honorable ministre de l’intérieur a trouvé plus
commode de se jeter en dehors de mes développements. Il a attaqué l’opinion que
souvent j’ai émise dans cette chambre relativement au résultat de notre balance
commerciale, opinion que, malgré son opposition, je soutiens dans toute son
intégrité.
Voici comment l’honorable ministre de l’intérieur
établit la question : Il nous fait dire :
« Voyez, dit-il, le commerce extérieur de
D’abord, jamais je n’ai attribué le dépérissement de
notre commerce à la défaveur de notre balance commerciale. Cette allégation
inexacte ne prouve donc rien contre mes développements. Mais le ministre en
tire la conclusion « que si autant de numéraire sortait de nos frontières,
non seulement il n’y aurait plus un écu dans le pays, mais encore qu’il en
serait déjà sorti plus que n’en possède le monde entier. » Or, dix fois
quarante font 400 millions, et
Toutes les fois que j’ai parlé de l’excédant
défavorable de notre balance commerciale, je n’ai entendu que le numéraire qui
prend la direction du commerce et de l’industrie, et non celui qui suit
d’autres voies et est appliqué à d’autres besoins, à d’autres transactions.
Souvent je me suis expliqué à cet égard de la manière la plus claire et la plus
précise. L’honorable ministre soutient que la différence défavorable que
présentent les balances commerciales ne sont pas soldées en numéraire et que,
dans cette proportion, l’argent commercial et industriel ne sort pas du pays.
Il assure même que le numéraire augmente d’année en année, et que ce fait est
prouvé par les tableaux statistiques d’importation. Vous n’avez qu’à lever,
comme vous le faites tous les ans chez Rothschild, à Paris, une somme moyenne
de 60 millions, soit en emprunts, soit en bons du trésor, qui ne sont autre
chose que des emprunts, et, nul doute, vos tableaux statistiques prouveront que
le numéraire augmente en Belgique d’année en année. Il était inutile de
recourir à vos tableaux statistiques pour transmettre cette conviction dans nos
esprits ; mais ce fait prouve-t-il que la somme de l’argent commercial et
industriel s’est accrue et que la différence défavorable de notre balance
commerciale n’est pas soldée en numéraire ?
Le ministre de l’intérieur considère ensuite notre
numéraire comme matière première, et il le fait augmenter par ses
transformations en objets de luxe d’or et d’argent. Encore une fois, ce fait
prouve-t-il que la différence défavorable de notre commerce avec les pays
étrangers ne doive pas être soldée en argent ?
L’honorable ministre a trouvé encore un autre
expédient. Le nombre de voyageurs étrangers qui passent par
Il est surprenant que l’honorable ministre n’ait pas
exploité cette belle thèse d’une manière plus large ! Les étrangers qui
restent temporairement en Belgique et y dépensent les revenus qu’ils tirent de
leur pays, les capitalistes de
L’honorable M. Pirmez reproduit ses idées sur le
mouvement du numéraire avec une persévérance imperturbable et sans tenir aucun
compte de ses propres principes et des objections de ses adversaires.
Au risque de faire encore des efforts inutiles, je
poserai la question d’une manière claire et précise ; j’adopterai même son
principe, sur lequel il n’est pas de doute possible. L’honorable adversaire a
lu quelque part : « Le crédit détermine la rareté du numéraire, et
l’absence du crédit augmente le numéraire. » Cette maxime ne reçoit
d’application que sous le rapport du numéraire commercial ; or le crédit
commercial existe ou il n’existe pas, mon honorable contradicteur n’en conclut
pas moins de son principe que le numéraire commercial n’est pas rare !
puis il nous rappelle la discussion sur la conversion de nos anciennes
monnaies, et, par une admirable connexité de ses idées avec les navires
étrangers qui partent sur lest, il s’écrie triomphalement : « Qui ne
se souvient de toutes ces singulières idées du député de Thielt ! »
« Soyez tranquilles, dit M. le ministre de
l'intérieur, le numéraire ne s’exporte pas ; s’il y a différence, c’est en
plus, ce n’est pas en moins. » Continuez d’augmenter la dette nationale,
continuez d’emprunter à l’étranger, vous aurez raison. Mais dès qu’une saine
politique vous aura conseillé de cesser vos emprunt, votre assertion, entendue
dans le sens du numéraire commercial, ne sera plus soutenable en présence de
l’infériorité de vos exportations comparée à vos importations.
M. le ministre de l'intérieur se livre, sur les
importations et sur les exportations, à des raisonnements basés sur des
chiffres. Quoique je sois loin d’en admettre l’exactitude, je les accepterai
gratuitement. Il suffit que l’honorable ministre admette que tous les ans il y
a une balance défavorable entre nos importations et nos exportations. Je lui
ferai une seule question : Si la différence défavorable de notre balance
commerciale n’est pas soldée en numéraire, de quelle manière ce solde
s’opère-t-il ? car enfin il faut bien qu’il y en ait une. Ce n’est pas la
première fois que je demande cette question ; toujours elle est restée
sans réponse. Si enfin on en produit une, je me charge de prouver que de
réponse en réponse il faudra en venir, en dernier résultat, à payer la
différence en numéraire.
Messieurs, vous connaissez tous la crise financière et
commerciale de l’Amérique du Nord. Vous avez pu lire dernièrement le message du
président des Etats-Unis sur les causes de cette crise. Il l’a attribuée à la
différence qui a existé l’année précédente entre les importations et les
exportations. Vos importations, a-t-il dit à la nation américaine, ont excédé
la somme de vos exportations. Vous n’avez pu balancer vos comptes par vos
échanges à l’extérieur. Il a fallu solder en numéraire vos billets de banque
n’ayant aucune valeur à l’extérieur. La grave atteinte que le crédit commercial
a reçue en a restreint la circulation à l’intérieur. La position des banques
américaines a été gravement compromise. Les détenteurs des billets ont réclamé
le payement en numéraire. Qu’en est-il advenu ? Les banques ont été dans
l’impossibilité de faire des avances au commerce et à l’industrie. Leurs agents
ont fait, en Angleterre et sur le continent, des efforts pénibles pour ouvrir
des crédits. Les négociants et les industriels ont donc été obligés d’envoyer
leurs marchandises en masse sur le continent et d’en forcer la vente pour faire
de l’argent et pour régler leurs comptes avec l’étranger. Les prix des produits
américains en ont été considérablement dépréciés.
Tels sont les faits. L’honorable M. Smits vient de
vous le présenter comme étant à peu près l’état normal de l’Amérique. Il
entrait dans son but de vous faire accroire que les fabricants pouvaient
acheter souvent le coton sur les marchés d’Europe à un prix inférieur à celui
auquel ils pouvaient se les procurer sur les lieux de provenance.
Cependant le numéraire qui, aux Etats-Unis, ne coule
pas dans les canaux du commerce et de l’industrie, en est-il devenu plus
rare ? Il est, au contraire, augmenté, par la raison fort simple que le
numéraire est retiré du commerce et de l’industrie toutes les fois qu’il est
compromis entre les mains des banques, des négociants et des industriels.
En présence de faits aussi patents, aussi publics,
vous serez à même, messieurs, d’apprécier à leur juste valeur les misérables
théories de M. Pirmez, de quelques-uns de nos journaux de parti, ainsi que des
erreurs de l’honorable ministre de l’intérieur.
L’honorable ministre et M. Smits croient que ma
proposition d’enquête n’a d’autre but que d’établir le système maritime que
j’ai souvent proposé à la chambre. Mais en exposant ce système, ils le font de
nouveau consister exclusivement, malgré toutes mes dénégations, dans les droits
différentiels. Je n’ai cessé de répéter qu’il est fondé sur les provenances
directes, et, en dehors de ce commerce direct, sur les droits de protection
navale, système adopté par toutes les nations continentales et suivi comme une
source abondante de prospérité commerciale et industrielle. Ce système nous
ouvre toutes les débouchés lointains que, sans lui, il est impossible
d’atteindre.
Chose digne de remarque, messieurs, ce système qui a
été si longtemps l’objet des dédains, de la risée même d’un parti parlementaire
dont une fraction occupe maintenant les bancs ministériels. Ce même système,
dis-je, vient d’être adopté par les mêmes hommes qui sont aujourd’hui au
pouvoir. Le projet de loi qu’ils viennent de présenter sur la ligne de
navigation directe vers les Etats-Unis en est la preuve. Ils avouent maintenant
de la manière la plus ouverte que la législation actuelle est impuissante pour
notre commerce d’exportations.
En présence du dépérissement de notre commerce et de
notre industrie, ils sont forcés d’établir le commerce direct et la protection
navale. Ils sont aujourd’hui convaincus, par les faits les plus incontestables,
que les navires étrangers ne suffisent pas pour exporter nos produits, et que
le plus puissant moteur de nos exportations est le commerce direct et la
navigation nationale.
Ces mêmes hommes politiques veulent établir
aujourd’hui des relations directes avec les Etats-Unis, afin d’y trouver un
débouché qu’auparavant, selon leur propre aveu, nous n’avions pas, et qui était
exploité par le commerce étranger. Ils vous diront peut-être que la protection
qu’ils veulent accorder à notre navigation, n’est pas un droit différentiel.
Cette distinction ne serait pas même subtile.
En effet, la somme de 400 mille francs proposée pour
protéger cette navigation transatlantique n’est au fond autre chose qu’une
protection accordée à la navigation nationale. Vous l’appelez subside ou droit
différentiel, il n’importe. Si vous voulez trouver de la différence dans les
mots, il n’est pas nécessaire que vous ayez des adversaires ; le simple
bon sens sera là pour vous entendre et vous juger. C’est ce que vous n’avez pas
toujours compris.
Voilà ce système qui a été si souvent ridiculisé dans
les journaux du parti, dans l’Indépendant, dans le Précurseur. Le voilà, par la
force des choses, adopté par ces mêmes hommes qui l’avaient si souvent répudié
et qui, en le repoussant, pendant dix ans, ont arrêté tous les mouvements de la
prospérité nationale.
Ce système que vous admettez pour les Etats-Unis, vous
serez encore par la force des choses, obligés de l’admettre pour les pays avec
lesquels vous voudrez avoir des relations commerciales. Cependant, quoi que
j’admettre le principe du projet de loi présenté, je suis loin d’en admettre
les moyens d’exécution.
Lorsque le temps de la discussion sera arrivé, je vous
ferai voir que, si vous adoptiez les moyens d’exécution que je vous ai
présentés depuis longtemps il ne vous en coûterait pas un centime. Outre que
votre projet est un essai dangereux, insolite et disproportionné avec la
position relative du pays, vous nous proposez de dépenser annuellement, pendant
14 années, 400,000 francs, tandis que le système européen ne conduirait pas
notre commerce seulement aux Etats-Unis, mais sur tous les points du monde
commercial, et sans qu’il fût nécessaire de demander au pays de nouveaux
subsides.
A propos des réclamations qui, depuis longtemps, ont
surgi de toute part, et qui ont pour objet la situation fâcheuse de notre
commerce extérieur, l’honorable ministre de l’intérieur vous a encore
dit : Ces plaintes de l’industrie sont faites en France, en Angleterre, et
ailleurs. Mais si ces plaintes s’élèvent en France, et en Angleterre, est-ce
qu’elles s’élèvent contre le système maritime, contre la législation maritime
qui est ici seule en question ? L’industrie fera toujours entendre des
plaintes par le seul fait de la concurrence ; il y aura toujours des
industries qui ne pourront soutenir la lutte ; la victoire n’appartiendra
qu’à celles qui auront assez de capitaux pour préserver assez d’activité et
d’intelligence pour mieux faire.
Si en France on fait entendre des plaintes,
relativement au commerce maritime, elles sont restreintes à la question des
sucres des colonies, qui sont en concurrence avec les sucres indigènes.
La législation maritime est parvenue en Angleterre à
un point de perfection que personne ne songe à contester. Celui qui, en
Angleterre, voudrait s’imposer la tâche de changer le système commercial qui y
est établi serait considéré comme atteint d’aliénation mentale.
Si donc les plaintes ne s’élèvent pas dans d’autres pays
relativement au système maritime c’est une nouvelle preuve que l’honorable
ministre a été réduit à chercher des moyens d’opposition en dehors de la
question.
Messieurs, afin de repousser l’enquête, l’honorable
ministre de l’intérieur en a considérablement exagéré, dans son imagination,
les difficultés. Selon lui, il faudrait que la commission possédât des
connaissances universelles, qu’elle interrogeât toutes les industries sur leurs
procédés, sur leurs moyens d’écoulement ; qu’elle entrât dans une masse
considérable de faits et de comparaisons ; qu’elle absorbât un temps
immense pour achever sa tâche.
Eh ! messieurs, ma proposition, mes
développements, l’opinion de la section centrale sont là. L’enquête se borne à
une enquête commerciale : c’est exclusivement une question de haute
politique commerciale, sur laquelle il serait inutile d’entendre une foule
d’industries secondaires. Pour exécuter cette enquête, il suffira d’interroger
les chambres de commerce, et, à côté de ces chambres, les spécialités qui se
trouvent dans le pays.
Les chambres de commerce sont en rapport chaque jour
avec les industriels, avec les négociants ; ils connaissent la situation
et les opinions des uns et des autres. Le mal qui ronge le pays et les moyens à
appliquer ont été, depuis des années, l’objet de leurs plus sérieuses
considérations. Les chambres de commerce sont instituées par nos lois pour être
l’intermédiaire entre le commerce et l’industrie et entre les pouvoirs
constitués et pour être l’expression de leurs besoins.
L’enquête n’a pas un but partial. Elle doit être
consciencieuse. Je désire que le gouvernement propose lui-même les questions
qu’il voudrait que la commission adressât aux chambres de commerce et aux
autres spécialités du pays. La commission, de son côté, leur posera les
siennes.
Il n’y aurait rien à craindre sous ce rapport des
résultats partiaux que l’enquête pourra produire. L’honorable M. Cogels peut
être parfaitement rassuré à cet égard. Il a craint que si la commission était
composée d’une certaine majorité de cette chambre, on n’arriverait pas au
résultat désiré. Quelle que soit cette majorité, elle ne fera que poser des
questions ; le secrétaire de l’enquête sera enjoint d’inscrire
textuellement les réponses dans les procès-verbaux de l’enquête. La commission
prendra ses conclusions sur l’ensemble du travail et les présentera à la
chambre.
L’honorable M. Cogels craint une commission nommée par
l’opinion d’une majorité. C’est, en d’autres termes, craindre le résultat du
principe parlementaire. Une majorité peut et doit exprimer son opinion.
Toutefois, je désire moi-même que la commission ne soit pas composée d’opinions
exclusives. L’esprit de parti pourrait s’emparer de cette composition pour
taxer de partialité les travaux de la commission pour nous faire continuer les
incertitudes dans lesquelles le pays est traîné au détriment de ses plus grands
intérêts.
Quant au temps qu’emploiera la commission pour
terminer son travail, quelques membres, dans leur imagination, l’ont
extraordinairement prolongé. Il est possible d’arriver au résultat en quelques
mois. Si l’amendement présenté par M. Dedecker est adopté, la commission
d’enquête pourra se diviser et entendre les chambres de commerce et les hommes
spéciaux sur différentes localités du pays. Elle n’aura point à débattre les
questions avec les personnes interpellées, elle n’aura qu’à les poser et à
recueillir les réponses. Si une chambre de commerce partage le système de
liberté de commerce ou du statu quo, on lui posera des questions résultant du
système contraire ; si au contraire une spécialité partage le système des
provenances directes et de la protection navale, la commission lui posera des
questions favorables au système de la liberté de commerce. Par ce moyen le
résultat de l’enquête pourra satisfaire toutes les exigences, et la chambre
pourra se régler sur l’opinion du pays.
L’honorable ministre de l’intérieur est donc dans
l’erreur quand il dit que l’enquête a pour but d’établir le système de
protection à accorder à notre navigation. L’enquête a pour but de consulter le
pays sur tous les systèmes qui sont en présence et de recueillir son opinion.
Le résultat de l’enquête doit être l’opinion pure,
claire du pays ; la chambre délibérera après sur le système qui convient
aux intérêts du pays et à sa position actuelle. L’opinion du pays lui sera d’un
grand poids et lui servira de direction parlementaire.
Un honorable député d’Anvers a déploré la perte des
navires nationaux qui, en 1831 et 1832, sont passés en Hollande. Il a ajouté
que nous devons chercher à réparer cette perte. Je partage son opinion dans
toute sa force. Mais comment l’honorable M. Cogels voudrait-il réparer cette
perte ? par quel autre moyen eut-il étendre notre navigation, la rétablir
au point où elle était lors de la révolution, si ce n’est en protégeant
suffisamment notre navigation ! C’est le seul moyen qui ait été employé
par toutes les nations, seul moyen qui, en effet, puisse atteindre ce but. Quoi
qu’il en soit, le pays pourra être entendu sur cette importante question, il
pourra désigner la marche la plus efficace d’atteindre le but que l’honorable
M. Cogels et nous désirons ardemment.
Le même honorable membre a fort bien fait observer que
les bonnes affaires manquent à la place d’Anvers et que c’est là la raison pour
laquelle les négociants de cette ville se bornent le plus souvent aux affaires
de commission. C’est encore là abonder dans l’opinion que nous avons constatée.
Mais l’honorable membre demande en même temps que l’on indique aux négociants
d’Anvers les moyens de faire de bonnes affaires. Il diffère avec nous sur ces
moyens. L’enquête pourra peut-être nous mettre d’accord.
L’honorable M. Cogels est dans l’erreur s’il croit que
j’ai adressé des reproches aux négociants d’Anvers pour s’être bornés au
commerce de commission. Je les ai, au contraire, justifiés. J’ai dit que la
faute n’était point à eux, mais au système commercial qui nous régit. J’ai dit
que la nécessité les réduisait à ce point, et que même
Nous désirons que nos négociants soient les
intermédiaires entre les producteurs du pays et les consommateurs étrangers, et
qu’ils ne se bornent pas au commerce de commission. La question est donc tout
entière dans les moyens qu’il fait employer pour atteindre ce but ; or, ce
moyen est-il dans le statu quo ? Evidemment non, puisque le statu quo a eu
pour résultat presque exclusif de réduire les négociants au commerce de commission.
Il faut donc tenter d’autres moyens, et c’est là le véritable but de
l’enquête ; ce sont ces moyens que nous voulons chercher.
Il existe une incertitude continuelle dans les
esprits ; un parti parlementaire s’oppose à l’adoption des moyens que nous
avons proposés ; eh bien, pour arriver à la solution de la question,
recueillons consciencieusement l’opinion du pays, l’opinion des chambres de
commerce, l’opinion de toutes les spécialités commerciales. Recueillons ces
opinions d’une manière consciencieuse. Ce sera d’ailleurs entrer dans le vrai
système parlementaire, dans le vrai système représentatif. Lorsque les chambres
sont divisées sur une grande question, que font les cabinets ? Quelquefois
ils en viennent à une dissolution des chambres, et pourquoi ? Pour consulter
l’opinion du pays sur la question sur laquelle les chambres sont en opposition
avec le ministère, et pour la décider par une nouvelle majorité. Eh bien,
messieurs, l’enquête parlementaire sur une grave question commerciale et
industrielle n’a d’autre but que de connaître l’opinion du pays sur cette
question et pour sortir des déplorables incertitudes dans lesquelles nous
restons depuis longtemps.
Je n’ai plus, messieurs, que quelques mots à répondre
à l’honorable député d’Anvers, qui vient de parler.
Arès l’avoir longtemps nié, il convient aujourd’hui
que j’ai proposé, en 1834, un projet de loi sur le système maritime que j’ai
présenté à la chambre. Il ne nie donc plus le fait ; mais à quoi est-il
réduit maintenant ? Il conteste et le sens, et la nature, et le caractère,
et les conséquences de ce projet de loi. Selon lui, il ne renferme pas un
système. Eh bien, messieurs, ce projet est l’expression des grands principes
suivis, dans l’espèce, par les autres nations.
Dans le but d’étendre leur navigation, les autres
puissances ont commencé par établir dans leurs lois des droits différentiels
sur les articles d’importation, plus élevés pour les uns, moins élevés pour les
autres, selon leurs convenances et leurs intérêts. C’est là, messieurs, le
premier pas que toutes les nations ont fait ; c’est par là qu’il faut
commencer ; il n’est pas même possible de suivre une autre marche. Ces
lois établies, on voit avec quelles nations, et sur quel pied il convient aux
intérêts du pays de traiter de réciprocité. Les droits différentiels tombent en
tout ou en partie devant les nations avec lesquelles on a conclu ces
traités ; mais seulement à l’égard de leurs provenances. C’est ainsi que
toutes les puissances ont procédé. C’est cette marche que j’ai suivie.
C’est dans ce sens qu’était conçu le projet de loi,
que j’ai présentée à la chambre en 1834 ; et c’est ce même projet, dont
l’existence n’est plus niée, qui est aujourd’hui l’objet d’une nouvelle
tactique parlementaire aussi méprisable que la première.
M Smits a trouvé que les droits différentiels que je
proposais étaient exagérés. Le projet devait être soumis aux délibérations de
la chambre. Si elle l’avait discuté, il lui était loisible de réduire ces
droits ou de les maintenir.
L’honorable M Smits a encore soutenu, contre
l’évidence des faits, que les autres nations continentales ne suivent pas un
système commercial maritime. Je défie l’honorable membre de produire un seul
traité de réciprocité qui ne repose pas sur un système fixe et régulier,
approprié aux besoins de chaque nation, et basé sur les deux grands principes
des provenances directes et des droits de protection navale ; ce n’est pas
là de la théorie ; ce sont des faits que je cite, des traités publics et
connus, et vous venez continuellement lancer à la chambre des théories et des
assertions fausses.
Qu’il y ait de la différence dans l’application des
grands principes, je l’ai dit souvent moi-même. Cette différence résulte de la
position différente des nations ; mais toujours est-il que les deux grands
principes restent debout dans tous les traités. Dans une séance précédente,
j’ai fait la même réponse à M. Devaux, qui avait soutenu les mêmes erreurs sur
les faits de politique commerciale, tels qu’ils sont aujourd’hui développés.
Sans doute, ces grands principes établis partout, maintenus partout, reçoivent
une application différente tantôt à l’égard de telle nation, tantôt à l’égard
de telle autre ; mais cette différence dans l’application ne détruit pas
le principe ; elle résulte de la différence qu’il y a entre la position
des divers pays. Examinez les traités de réciprocité conclus entre
Quel est le but que les puissances cherchent à
atteindre en contractant sur les provenances directes. C’est l’exportation de
leur industrie dans les pays lointains, l’échange de leurs produits contre les
articles coloniaux. En allant chercher elles-mêmes ces articles, elles trouvent
sur les lieux de provenance l’occasion et le moyen d’échanger contre ces
articles les produits de leur industrie et par conséquent des moyens
d’exportation.
Quand vous aurez l’avantage d’importer vous-mêmes ces
produits lointains, et quand les autres nations ne voudront pas introduire les
provenances indirectes ou paieront des droits différentiels sur ces
provenances, vos négociants se déferont avec facilité dans vos ports des
produits des contrées lointaines, et cette facilité qu’ils auront à se défaire
de ces produits dans vos ports, leur permettra de multiplier leurs
exportations.
C’est là le véritable résultat du système des
provenances directes. L’Angleterre, comme je l’ai dit, pousse ce système
jusqu’à ses dernières limites. L’Angleterre n’entrave pas par des droits
différentiels l’importation des provenances directes ; elle va plus loin,
afin de stimuler ses exportations, elle interdit à toutes les nations
l’importation des produits coloniaux, parce qu’en les important elle-même dans
ses ports, elle trouve l’occasion d’exporter ses propres produits sur les
marchés coloniaux.
La navigation de
Voilà le système sur lequel nous désirons interroger
le pays, interroger les chambres de commerce. L’insuffisance de notre
navigation est aussi la raison pour laquelle nous ne pouvons songer qu’à
imposer des droits différentiels légers, mais efficaces, sur les importations
indirectes, parce que, comme je l’ai dit dans les développements du projet de
loi que j’ai eu l’honneur de vous présenter en 1834, notre navigation est loin
de suffire à nos besoins de consommation intérieure.
Il faut donc commencer par imposer sur les provenances
indirectes des droits différentiels légers et assez efficaces pour stimuler la
construction des navires et les affaires directes, et augmenter ces droits dans
la proportion dans laquelle s’accroît la navigation nationale.
Messieurs, je crois inutile de vous entretenir plus
longtemps des différentes parties du discours que l’honorable député d’Anvers a
prononcé dans la séance d’aujourd’hui, ce sont des opinions éternellement
reproduites, des opinions auxquelles nous avons plusieurs fois répondu, sans
que l’honorable membre ait jamais tenu compte des objections que nous lui avons
faites.
J’ai dit.
(Moniteur belge n°136 du 15 mai 1840) M. Cogels – Je demande la parole (Non ! non ! la clôture !)
La clôture de la discussion générale étant demandée
par plus de dix membres, est mise aux voix et adoptée.
PROJET DE LOI TENDANT A
OUVRIR UN CREDIT SUPPLEMENTAIRE AU BUDGET DES AFFAIRES ETRANGERES POUR
L’EXERCICE DE 1839
Communication du
gouvernement
M.
le ministre des affaires étrangères (M. Lebeau) dépose un projet de loi
tendant à ouvrir un crédit supplémentaire à son département sur le budget de l’exercice de 1839.
Ce projet est renvoyé à l’examen de la section centrale
du budget des affaires étrangères pour 1839, laquelle l’examinera comme
commission spéciale.
PROPOSITION
D’ENQUETE PARLEMENTAIRE CHARGEE DE S’ENQUERIR DE
Discussion des articles
M. le président – La discussion est maintenant ouverte sur les paragraphes de
la proposition d’enquête. Il y a un amendement de M. Dedecker qui propose de
composer la commission de neuf membres. Cet amendement a été développé. Est-il
appuyé ?
- L’amendement est appuyé.
M.
F. de Mérode – Il me semble, d’après le
résumé du discours de M. de Foere, qu’il suffirait de connaître l’opinion des
chambres de commerce, de leur poser un certain nombre de questions et d’attendre
leurs réponses. (Non ! non !
Aux voix ! aux voix !) L’honorable M. de Foere, qui connaît à
fond la matière, pourrait poser ces questions. (Aux voix ! aux voix !)
M. Rodenbach – Je veux seulement faire observer à l’honorable préopinant
que l’honorable M. de Foere n’a pas seulement dit qu’il fallait consulter les
chambres de commerce, mais il a dit qu’il fallait encore encourager les
spécialités des différentes industries et qu’on annoterait leurs réponses.
Ainsi, M. de Foere veut beaucoup plus que ne le suppose M. de Mérode. (Aux voix ! aux voix !)
M. Dechamps, rapporteur – Messieurs, je pense que, pour procéder avec ordre, la
chambre doit, comme en d’autres circonstances, voter sur des questions de
principe. Je crois qu’il faudrait d’abord poser la question : Y aura-t-il
ou n’y aura-t-il pas une enquête ? cette question une fois résolue, on
pourra aborder les questions subsidiaires. (Appuyé !
appuyé !)
M. le président – On paraît d’accord, pour voter sur cette question : y
aura-t-il une enquête ?
Des
membres – Une enquête parlementaire.
M.
Dumortier – Du moment que nous
ordonnons une enquête, nous ordonnons une enquête parlementaire. Par conséquent,
il faut se borner à demander : Y aura-t-il une enquête ? (Oui ! oui !)
M. Mast de Vries – M. Devaux a fait hier une observation ; elle tend à
savoir si la commission d’enquête, dans l’hypothèse, qu’elle soit nommée,
pourra se livrer à ses travaux hors de la session des chambres.
- Cette observation n’a pas de suite.
M. le président – Ainsi, je vais mettre aux voix la question de savoir s’il y
aura une enquête, et il est entendu qu’il s’agit d’une enquête parlementaire. (Oui ! oui !)
M. Dubus (aîné) – Cette expression d’enquête parlementaire peut présenter du
doute. Il y aurait lieu, je pense, à poser deux questions ; la
première : Y aura-t-il une enquête ? La seconde : La commission
sera-t-elle nommé par la chambre ou par le gouvernement ? Il faudra bien
poser cette deuxième question, parce que dans la séance d’hier, il y a eu
divergence d’opinion à cet égard.
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) – Messieurs, je m’étonne qu’un député qui fait constamment
preuve d’un jugement si sain, puisse élever la question de savoir si la chambre
peut imposer par elle seule une enquête au gouvernement. Non seulement nous ne
pouvons pas reconnaître à la chambre le droit de nous imposer une enquête, mais
je crois que même par une loi, on ne pourrait pas imposer une enquête au
gouvernement. Chacune des trois branches du pouvoir législatif a le droit de
faire une enquête ; le sénat a ce droit, la chambre des représentants a ce
droit, le gouvernement a ce droit ; mais je ne crois pas que vous puissiez
imposer une enquête au gouvernement pas plus que le gouvernement n’a le droit
d’en imposer une à la chambre.
Une enquête est une espèce d’acte administratif, aussi
a-t-il fallu un article spécial dans la constitution, pour attribuer à la
législature le droit d’enquête. Le gouvernement a ce droit d’enquête par la
seule force des choses, parce que les enquêtes, par leur essence même, sont des
actes qui rentrent dans ses attributions ; et comme j’ai eu l’honneur de
le dire, je ne pense pas qu’on puisse même par une loi, imposer au gouvernement
l’obligation de faire un pareil acte d’administration.
Du reste, ceci est une question de doctrine qu’il est
inutile d’examiner, parce que je ne pense pas que le cas se présente
jamais ; et si les deux chambres étaient jamais d’accord sur une pareille
proposition, il est à croire qu’elle aurait aussi l’assentiment du
gouvernement. Mais, dans le cas actuel, il n’est pas question d’une proposition
de ce genre. De quoi s’agit-il ? La chambre, usant d’un droit
constitutionnel, veut faire un enquête parlementaire, le gouvernement ne s’y
oppose pas et n’a pas le droit de s’y opposer ; mais évidemment la chambre
ne peut pas ordonner que l’enquête sera faite concurremment par la chambre des
représentants et par le gouvernement.
M. Dubus (aîné) – Messieurs, le ministre de l’intérieur m’a mal compris ;
il m’a attribué une opinion que je n’ai pas : il a supposé que j’avais
l’opinion qu’il y avait lieu de déférer au gouvernement la nomination des
membres de la commission d’enquête. Or, j’ai une opinion tout à fait
contraire : mon opinion est que la chambre doit les nommer.
Mon opinion est que c’est la chambre qui doit les
nommer. De quoi me suis-je occupé ? Des questions qui résultent du débat.
Or cette question résulte du débat, j’en appelle à la discussion à l’honorable
député de Verviers qui siège non loin de moi et qui a déclaré qu’il entendait
que ce fût le gouvernement qui nommât les membres de la commission.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. Lebeau) – En supposant que le gouvernement se ralliât à la
proposition.
M. Dubus (aîné) – Le gouvernement répudie cette nomination, cela déterminera
les honorables membres qui se disposaient à voter avec l’honorable M. Lys, à
voter pour la nomination par la chambre.
M. Pirson – Nous n’avons pas le droit d’imposer une enquête au
ministère, cependant voici de quelle manière indirecte on pourrait la lui
imposer. Je crois même que le ministère aurait bien fait de prendre cette
position, d’offrir à la chambre, non pas une enquête, mais un rapport sur
l’état du commerce et de l’industrie en général. Le gouvernement, dans sa
position et succédant à un autre ministère, se doit à lui-même cette enquête,
car avant qu’il adopte ce qu’on appelle un système, il faut qu’il sache à quoi
en sont les choses industrielles et commerciales. D’un autre côté, le ministère
nous doit aussi un rapport. Voilà comme j’aurais voulu qu’on présentât la
chose. Pas de doute que le ministère n’eût accepté, car la chambre a toujours
le droit de demander des informations au ministère. D’après l’opinion que je
viens d’émettre, je dois voter contre l’enquête parlementaire.
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) – C’était bien notre intention que, dans le courant de la
session prochaine, le gouvernement présenterait un rapport à la chambre sur la
question spéciale qui nous occupe. Mais, pour cela, le gouvernement n’a pas
besoin de procéder à une enquête particulière, car pour lui l’enquête est
permanente, incessante, et précisément par les soins de tous les hommes
spéciaux. Ce n’est pas quand on est arrivé au pouvoir à la fin d’une session,
et lorsqu’on a une foule de détails à examiner, qu’on peut rassembler tous les
documents et coordonner un rapport mûri et circonstancié. Ce n’est pas un rapport
qu’il n’eût pas réuni toutes ces conditions que j’aurais voulu présenter à la
chambre.
Si la chambre veut absolument instituer une commission
d’enquête, le gouvernement, à son tour, réunira tous les renseignements qui
pourront lui arriver par cette voie. Si le gouvernement ne revendique pas
l’enquête, je m’en suis assez expliqué, c’est parce que si on veut recourir à
tous les moyens pour présenter un travail complet, si on veut exécuter
consciencieusement les vœux de la section centrale, non seulement l’enquête ne
peut pas s’exécuter en peu d’années, mais elle serait même impraticable.
Vous venez d’entendre d’ailleurs qu’on n’est pas
seulement d’accord sur les moyens d’exécuter l’enquête ni sur sa portée. Selon
M. de Foere, il suffit d’entendre, outre les chambres de commerce, quelques
négociants ; un autre membre a dit qu’il fallait entendre les industries,
à l’exclusion cependant de l’industrie cotonnière et de l’industrie de
Verviers, attendu que déjà une enquête a été faite sur ces deux industries.
On n’est donc pas plus d’accord sur la direction qu’on
devra suivre que sur le personnel dont devra se composer cette commission. Si
le gouvernement avait eu le malheur d’instituer une commission de ce genre, on
n’aurait pas manqué de dire qu’elle avait été mal composée, qu’on la traînait
en longueur, qu’elle était mal dirigée.
Après tout, je le répète, j’ai suffisamment expliqué
pourquoi le gouvernement n’a pas revendiqué la direction de l’enquête comme on
l’entend ; libre à la chambre de la faire, le gouvernement ne s’y est pas
opposé et ne pouvait pas s’y opposer. Si elle est stérile dans ses résultats,
la chambre ne nous reprochera pas de ne l’avoir pas prévenue.
M. Hye-Hoys – Puisque le gouvernement persiste à ne pas intervenir dans
l’enquête dont nous nous occupons, je modifierai mon opinion en votant pour une
enquête parlementaire, mais je ne crois pas moins, dans ce cas, que les
inconvénients que j’ai signalés existeront.
M. le président – On est d’accord sur la position de la question :
« La chambre fera-t-elle une enquête ? »
- On procède à l’appel nominal sur cette question.
72 membres répondent à l’appel.
1 membre s’abstient.
43 membres répondent oui ;
28 membres répondent non.
En conséquence la chambre décide qu’elle fera une
enquête.
M. de Mérode, qui s’est abstenu, est invité à énoncer
les motifs de son abstention.
M. F. de Mérode – M. de Foere avait indiqué selon moi une sorte d’enquête plus
simple que le mode d’investigation par une commission. L’honorable membre très
au courant de la matière aurait dû formuler les questions qu’on eût envoyées à
ceux qu’il désignait comme compétents pour y répondre. Je ne rejetterais pas
une enquête semblable ; mais il paraît que l’on voudrait une enquête dont
la portée m’est inconnue ; en conséquence, j’ai cru devoir m’abstenir.
Ont répondu oui : MM. Brabant, Coghen, Coppieters, David, de Behr, Dechamps, de Florisone, de Foere, Dedecker, Delehaye, de Meer de Moorsel, W. de Mérode, Demonceau, de Potter, de Renesse, de Roo, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, Doignon, Donny, Dubus (aîné), Dumortier, Eloy de Burdinne, Hye-Hoys, Jadot, Maertens, Manilius, Mast de Vries, Morel-Danheel, Polfvliet, Puissant, Raikem, Rodenbach, Scheyven, Simons, Trentesaux, Van Cutsem, Vandenbossche, Vandenhove, Wallaert, Zoude et Fallon.
Ont répondu
non : MM. Cogels, de Langhe, Delfosse, de Nef, de Perceval, de Sécus,
Devaux, d’Hoffschmidt, d’Huart, Dolez, Dubois, Dumont, Lange, Lys, Metz,
Milcamps, Nothomb, Pirmez, Pirson, Raymaeckers, Seron, Sigart, Smits,
Troye, Ullens, Vandensteen, Vanderbelen et Verhaegen.
L’amendement de M. Dedecker
qui propose de composer la commission de neuf membres au lieu de sept est mis
aux voix et adopté.
La proposition serait alors
conçue de la manière suivante :
« Une commission
d’enquête est chargée :
« 1° De s’enquérir de
la situation actuelle du commerce extérieur, dans ses rapports avec l’industrie
et l’agriculture du pays ;
« 2° D’examiner si la
législation existante est suffisante ;
« 3° En cas
d’affirmative, de présenter les bases du système commercial et naval qu’il
conviendrait d’établir, dans l’intérêt de la nation.
« La commission
d’enquête sera nommée par la chambre et parmi ses membres, au scrutin secret et
à la majorité absolue.
« Elle sera composée de
neuf membres.
« Elle nomme, en dehors
de son sein, un secrétaire.
« Les
frais de l’enquête sont à la charge du budget de la chambre. »
M. Verhaegen – Il est entendu que les membres de la commission ne recevront
pas de traitement.
M. Delehaye – Je demanderai si les
membres de l’enquête linière ne reçoivent pas de traitement.
M. Dolez – Je crois que l’observation de
mon honorable ami, M. Verhaegen, mérite toute votre attention, d’autant plus
que c’est sur le budget de la chambre que les frais de l’enquête doivent se
prélever.
Or, je demanderai à
l’honorable auteur de la proposition, comment il prélèvera sur le budget de la
chambre les frais très considérables de la commission d’enquête. Je crois donc
que les membres de la commission devront donner une preuve d’abnégation et
remplir leur mission sans indemnité. Le pays en sera reconnaissant, c’est la
seule récompense qu’ils doivent attendre de leur travail.
M.
Dumortier – Il me semble que ceux qui
ne veulent pas d’enquête, auraient dû se borner à demander qu’il n’y en eût
pas ; mais après que la chambre a décidé qu’il y en aurait une, venir
demander que les députés la fassent sans indemnité, vous qualifierez cette
proposition comme vous voudrez, pour moi je la trouve inadmissible. Je ne
demande pas un traitement pour les membres de la commission ; mais je
demande pour eux une juste indemnité, à raison des débours qu’ils auront à
faire. Vous ne devez pas vouloir que ceux qui sacrifient leur temps aux
intérêts du pays, fassent encore des sacrifices pécuniaires. Je voudrais bien
savoir si quand on charge un avocat d’une cause, on lui dit : Vous la
plaiderez gratis.
M. Eloy de Burdinne – Comme j’ai eu l’honneur de le dire hier, je désire qu’une
enquête soit faite pour au moins apaiser les inquiétudes des différentes industries,
c’est dans ce sens que j’ai voté. Mais si vous voulez faire une enquête
complète sur toutes les industries, ce n’est pas avec un million que vous la
ferez. (Dénégations.)
L’enquête faite en
Angleterre sur la seule industrie agricole a coûté un million et a duré trois
ans ; une enquête complète en Belgique coûtera plus d’un million et durera
bien six ans. (Nouvelles réclamations.)
M.
Rodenbach – L’auteur de la proposition
l’a aujourd’hui développée ; nous voyons qu’il ne s’agit pas d’une enquête
monstre (On rit.) L’honorable membre
l’a dit lui-même, il ne s’agit que d’une petite enquête. Je pense que
c’est dans ce sens que l’enquête doit être entendue. L’auteur de la proposition
a dit que l’on consulterait les chambres de commerce, les spécialités du
pays ; ainsi cette enquête n’est pas si effrayante qu’on veut le
prétendre ; elle ne coûtera pas des frais énormes, il n’y aura que
quelques indemnités pour les membres de la commission. On ne devrait pas effrayer
les membres disposés à se charger de ce travail en venant dire qu’il faudra
cinq ou six ans pour le terminer. Pour moi, je suis convaincu que la commission
avec du zèle peut faire l’enquête en six mois.
M. d’Huart – La simple demande de l’honorable M. Verhaegen doit vous
démontrer qu’il y a une lacune dans la proposition sur laquelle nous allons
voter. Qu’il faille indemniser les personnes qui seront chargées de l’enquête,
cela me paraît indispensable, car elles supporteront des frais extraordinaires
que l’équité exige qu’on leur rembourse ; mais je demanderai comment ces
frais seront mandatés, quelle autorité les fera liquider. C’est à la chambre à
régler les conditions de cette indemnité ; il y a donc lieu de compléter
sous ce rapport la proposition.
Un membre – On le fera plus tard.
M. d’Huart – Ainsi il n’y aura pas dès à
présent d’indemnité certaine, et ce point, en l’absence d’une autorité qui ait
délégation pour établir les mandats, restera incertain et contestable. Il me
semble que la section centrale devrait faire droit à la demande de M. Verhaegen
et nous indiquer les conditions d’après lesquelles elle pense que la commission
d’enquête sera indemnisée ; je voudrai de sa part des conclusions
additionnelles sur ce point. Il serait prudent de nous rendre compte d’avance
de la dépense à laquelle ces indemnités peuvent nous conduire ;
l’honorable M. Eloy de Burdinne vient de nous donner un exemple si effrayant de
ce que peut coûter une enquête, qu’il est bon de poser des limites à cet
égard ; M. le ministre de l'intérieur nous a d’ailleurs fait voir que
votre enquête pouvait et devait durer plusieurs années, et pour exemple de
l’immensité du travail, il nous a dit que la commission d’enquête sur la
question unique de l’industrie linière qui n’a fait que commencer ses
investigations, avait déjà écrit huit à neuf cents pages. Ceci donne une idée
de ce qu’il faudra faire pour une enquête qui s’appliquera peut-être à tous les
articles du tarif des douanes.
Je demande que la
proposition soit complétée, qu’on y ajoute comme conséquence nécessaire, la
base de l’indemnité à accorder aux membres qui seront chargés de l’enquête.
M. Dubus (aîné) – La question n’est plus entière, elle est résolue. On a mis
en question s’il y aurait une enquête ; la chambre à une forte majorité,
s’est prononcée pour l’affirmative. Maintenant, on s’efforce de mettre des
bâtons dans les roues, on cherche évidemment des difficultés. On demande comment
on fera payer les membres de cette commission. Nous avons tout le temps
d’examiner cela, déterminons auparavant quel sera le but de l’enquête, par qui
et à quel nombre seront nommés les membres de la commission. Vouloir qu’on
s’occupe d’abord de régler le mode de l’indemnité, c’est, permettez-moi
l’expression, atteler la charrue devant les bœufs, c’est chercher des
difficultés qui n’existent pas. J’ajouterai que ce sont ceux qui ne veulent pas
de l’enquête qui trouvent ces difficultés. (On
rit.)
M.
Verhaegen – On nous attribue des
intentions que nous n’avons pas. Ce n’est pas la question, dit M. Dubus, il ne
s’agit pas de savoir comment on couvrira les frais, il s’agit de décider par
qui la commission sera nommée et quel sera le nombre de ses membres. Mais on
perd de vue que le dernier paragraphe de la proposition est ainsi conçu ;
« Les frais de l’enquête sont à la charge du budget de la chambre. »
Si je n’avais pas fait d’observations, quelles auraient été les conséquences de
l’adoption de cette disposition ? Le budget de la chambre n’est-il pas
fixé ? Quels sont les frais à faire ? Dira-t-on que ce sont des
indemnités aux membres de la commission ? Mais il n’y a aucun tarif
applicable à cela. On vient de décider que la commission serait de 9
membres ; mais combien de temps dureront ses travaux ? Il me semble
que la chose valait bien la peine qu’on s’en occupe. Vous voyez déjà que cette
proposition présente des difficultés dans l’exécution. Mais ce n’est pas à nous
qu’il faut s’en rende, c’est à ceux qui ont formulé la proposition.
M. Dechamps, rapporteur – Je pense que si l’objection qui vient d’être faite n’avait
pas été émise, de même que s’il n’y était pas donné suite, les frais de
l’enquête seraient moindres que si on fixait d’avance les indemnités des
membres de la commission. La section centrale a pensé qu’il fallait s’en
rapporter à la commission et que la commission de comptabilité devrait rendre
compte à la chambre qui devrait contrôler et faire les observations qu’elle
jugerait convenables. Je suis convaincu que si on introduit dans la proposition
un amendement relatif à la quotité de l’indemnité, les frais seront plus élevés
que si vous laissiez ce soin aux membres de la commission même.
M. Dolez – Je veux faire remarquer
que, contrairement à ce qu’a dit M. Dubus, la question qui a été faite n’a rien
d’inopportun, car la proposition se termine par ces mots : « Les frais
de l’enquête seront à la charge du budget de la chambre. » Il faut donc
régler le mode d’exécution de cette partie de la proposition. Consultez votre
règlement et vous verrez qu’il est indispensable de statuer à cet égard. Il
porte :
« Art. 83… la commission
de comptabilité, sur la proposition des questeurs, détermine le budget de la
chambre et le soumet à son approbation. »
Vous avez arrêté ce budget
sur la proposition des questeurs et il ne comprend pas les frais de l’enquête.
Si maintenant on veut une enquête dont les frais soient à la charge du budget
de la chambre, il y a une proposition corrélative à faire, il faut décider
comment le budget de la chambre fera face à ces frais. C’est ce que demande
avec raison l’honorable M. d’Huart.
Il me paraît donc
indispensable d’examiner quels seront les frais de la commission d’enquête, et
comment elle sera payée sur le budget de la chambre.
M. Eloy de Burdinne – Je consens à l’enquête ; mais, dans la proposition de
M. de Foere, il y a trois choses :
1° S’enquérir de la
situation actuelle du commerce extérieur, dans ses rapports avec l’industrie et
l’agriculture du pays ;
2° Examiner si la
législation existante est suffisante ;
3° En cas d’affirmative,
présenter les bases du système commercial et naval qu’il conviendrait
d’établir, dans l’intérêt de la nation.
Dans la section dont je
faisais partie, j’ai voté pour le premier point ; mais je n’entends pas
que l’enquête soit faite dans les trois points ; je ne veux pas qu’on agite
la question du système naval ; si vous voulez entrer dans tant de détails,
vous n’aurez pas fini dans trois ans.
M. Rodenbach – C’est décidé.
M.
Dumortier – Il me paraît que la
discussion a besoin d’être régularisée. Nous avons décidé à une immense
majorité, que l’enquête aurait lieu ; vous avez décidé que la commission
d’enquête serait composée de 9 membres ; maintenant vous avez à voter les
questions subsidiaires, puis vous viendrez à la question relative aux fonds
pour indemniser les membres de la commission.
Il est très facile de voir
que le budget de la chambre pourra pourvoir aux frais : on calcule
toujours pour les indemnités aux députés sur une session plus longue qu’elle ne
dure ordinairement, et il y a toujours 60 ou 80 mille francs qui ne sont pas
employés.
On a parlé d’un million pour
une enquête faite en Angleterre ; mais en Belgique on fera une enquête à
un moindre prix. On a fait une enquête sur l’industrie cotonnière, est-ce qu’elle
coûtera 300 à 400 mille francs ?
Je crois que si les membres
de la commission reçoivent l’indemnité mensuelle des députés pendant qu’ils
resteront à Bruxelles et s’il reçoivent pour frais de déplacement la même
indemnité que le gouvernement accorde à ses commissaires, la dépense ira à
peine à 15,000 ou 20,000 francs. Dans tous les cas je suis convaincu qu’il y
aura excédant dans le budget de la chambre.
M. le président met
successivement aux voix les paragraphes de la proposition de la section centrale
ainsi conçue dans son ensemble :
« Une commission
d’enquête est chargée :
« 1° De s’enquérir de
la situation actuelle du commerce extérieur, dans ses rapports avec l’industrie
et l’agriculture du pays ;
« 2° D’examiner si la
législation existante est suffisante ;
« 3° En cas
d’affirmative, de présenter les bases du système commercial et naval qu’il
conviendrait d’établir, dans l’intérêt de la nation.
« La commission
d’enquête sera nommée par la chambre et parmi ses membres, au scrutin secret et
à la majorité absolue.
« Elle sera composée de
neuf membres.
« Elle nomme, en dehors
de son sein, un secrétaire.
« Les frais de
l’enquête sont à la charge du budget de la chambre. »
Les deux premiers
paragraphes sont adoptés sans discussion.
M. d’Huart prend la parole sur le
troisième paragraphe – Messieurs, dit-il, je crois que je suis dans mon droit
en demandant les explications inutilement réclamées hier par un honorable
membre. Qu’entendent les auteurs de la proposition, par « système commercial » ?
Cela comprend-t-il le tarif des douanes ? Par ces mots en effet, ajoutés à
ceux de « système naval », s’agit-il de la révision simultanée de nos
systèmes douaniers et de navigation ? C’est qu’il faudrait pourtant savoir
avant de voter ; si c’est là où on entend nous conduire, nous en aurons
pour 10 ans.
M. Dubois – Est-il vrai, comme le dit un journal que la loi de douane
présentée antérieurement a été retirée ?
M. le ministre des finances (M. Mercier) – L’assertion du journal est inexacte.
M.
de Foere – Je dois donner des
apaisements à M. d’Huart. S’il avait été question de changer le système de
douanes, nous aurions demandé explicitement d’examiner la législation sur ce
point. Il s’agit d’une question commerciale ; il s’agit de connaître les
meilleurs moyens d’exporter les produits de notre industrie ; c’est tout.
M. Smits – Messieurs, les observations qui viennent d’être présentées par
l’honorable député de Thielt prouvent encore une fois qu’on ne se comprend
pas ; car je mets en fait qu’il est impossible d’examiner le système naval
sans entrer dans l’examen des tarifs. On veut favoriser le commerce
direct ; dès lors il faut changer toute votre tarification, article par
article. Je citerai un exemple.
Il en est de même en France
pour le coton, et d’autres marchandises.
On devra donc fortement
entrer dans l’examen des questions de tarification ; et il faudra
nécessairement débattre les questions industrielles ; cela est évident,
cela est clair comme le jour.
M. Nothomb – Il faut adopter la commission d’enquête sous ce triple
rapport.
M. Smits – Dès lors votre enquête ne pourra se terminer en trois mois,
et elle exigera des frais considérables.
M.
de Foere – L’honorable M. d’Huart avait
posé une question dans ce sens général : « Chaque article de nos
tarifs sera-t-il assez élevé pour protéger notre industrie ?’
Ce n’est pas ainsi qu’on
procèdera ; il faudra considérer le tarif sous un rapport spécial, afin de
savoir si les droits sont assez élevés pour stimuler l’exportation de nos
produits ; mais il ne s’agit pas d’examiner chaque article pour savoir
s’il donne assez de protection contre la concurrence étrangère.
M.
Cogels – Je demande seulement une explication à l’honorable auteur de
la proposition. Aux craintes qui ont été manifestées sur la partialité qui
pourrait exister dans la commission, l’honorable membre a répondu que la
commission ne devait pas même formuler une opinion, qu’elle ne devait que recueillir
des renseignements ; or, d’après la disposition dont il s’agir en ce
moment la commission doit formuler un système. N’y a-t-il pas là une
contradiction évidente.
- L’ajournement à demain est
mis aux voix ; il n’est pas adopté.
M. Dolez – Messieurs, l’honorable M.
Dedecker vous a proposé de porter le nombre des membres de la commission à 9,
j’ai voté pour cette proposition et voici pourquoi. J’ai pensé qu’il était dans
l’intention de l’honorable membre que chaque province fût représentée dans la
commission, et je crois qu’il serait en effet très utile que les industries qui
appartiennent aux diverses parties du pays aient des représentants dans la
commission ; j’aurai donc l’honneur, messieurs, de vous proposer un paragraphe
additionnel ainsi conçu :
« Chacune des provinces
sera représentée dans la commission. »
- Les paragraphes 3 et 4
sont successivement mis aux voix et adoptés.
M. le président – La chambre a décidé que la
commission serait composée de 9 membres, je déclarerai dont le cinquième
paragraphe adopté avec cette modification.
Nous passons à l’amendement
de M. Dolez.
M.
Dumortier – Je ne pense pas, messieurs,
qu’on puisse admettre cet amendement. Les membres de la chambre représentent le
pays et non la province qui les a nommés ; la proposition de l’honorable
M. Dolez est contraire à ce principe constitutionnel. D’après cette proposition
il semblerait que
M. Dolez – En ordonnant l’enquête,
messieurs, la chambre a principalement pour but de connaître la situation de
chacune des industries du pays. Eh bien pour parvenir à ce résultat, il me
paraît que le meilleur moyen et peut-être le seul, c’est d’avoir dans la
commission d’enquête des membres qui appartiennent aux différentes provinces.
Vous conviendrez, en effet, messieurs, que la commission trouvera beaucoup plus
de facilité dans les opérations auxquelles elle doit se livrer si elle
rencontre dans toutes les localités la sympathie des personnes avec lesquelles
elle doit se mettre en rapport ; eh bien, un membre de la députation d’une
province trouvera toujours dans cette province un degré de sympathie de plus
que les membres de la députation d’autres provinces.
Je ne vois point que la
proposition que j’ai l’honneur de soumettre à la chambre heurte en quoi que ce
soit le principe constitutionnel que l’honorable M. Dumortier nous a rappelé
tout à l’heure ; il s’agit uniquement ici de régler l’exécution de la
proposition qui a été adoptée par la chambre, et, je le répète, le mode que je
propose donnerait de grandes facilités à la commission, et la ferait marcher
plus directement vers le but que la chambre se propose.
M.
de Foere – Je crois, messieurs, que
l’honorable député de Mons aura ses apaisements par la manière dont la
proposition sera exécutée ; la commission interrogera les chambres de
commerce de tout le pays. Eh bien, les chambres de commerce de Mons, celle de
Charleroy, celles enfin de toutes les villes de
- L’amendement de M. Dolez
est mis aux voix, il n’est pas adopté.
Le sixième paragraphe de la
proposition est mis aux voix et adopté.
M. le président – Je vais mettre aux voix le dernier paragraphe :
« Les frais de l’enquête sont à la charge du budget de la chambre. »
M. F. de Mérode – Je ne sais pas, messieurs, si l’on peut ainsi voter les
frais de l’enquête sans le concours des autres pouvoirs ; les crédits alloués
au budget de la chambre ne sont destinés qu’à couvrir l’indemnité des membres
pendant le temps de la session et les autres frais de la session, mais il
s’agit ici de toute autre chose ; il n’y a dans le budget de la chambre
aucun article sur lequel on puisse imputer les frais de l’enquête , et ces
frais ne peuvent être couverts régulièrement que par un crédit qui serait
alloué par une loi. Quant à moi, je ne puis pas consentir à ce que les sommes
nécessaires pour faire face aux dépenses auxquelles l’enquête donnera lieu
soient prises sur les fonds de la chambre, car ces fonds sont tout à fait
étrangers à l’enquête.
- Le paragraphe est mis aux
voix et adopté.
M. d’Huart – Je demanderai qu’aux termes du règlement il y ait un
intervalle de 24 heures entre le vote actuel et le vote définitif, attendu
qu’un amendement ayant été introduit dans le projet, il ne peut pas être voté
immédiatement. Je crois qu’il est d’autant plus prudent d’observer le règlement
que l’objection que vient de présenter M. de Mérode me paraît soulever une
question constitutionnelle. Il ne sera peut-être pas difficile de démontrer
qu’en vertu de l’article 116 de la constitution la cour des comptes refuserait
son visa aux mandats de paiement qui seraient motivés sur la décision qui vient
d’être prise.
- Un grand nombre de membres
quittent leurs bancs.
_____________________
M. le président fait connaître à la chambre comment le bureau a
complété la commission chargée d’examiner le projet de loi sur la
circonscription cantonale et le projet de loi sur le notariat :
M. Verdussen a été remplacé
par M. Cogels ; M. Gendebien par M. Lange ; M. Lardinois par M.
Lys ; M. Pollénus par M. Raymaeckers et M . d’Hoffschmidt par M.
Jadot.
- La séance est levée à 5
heures et demie.