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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du vendredi 17 juin 1842
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment pétition
relative à l’enseignement supérieur (Delehaye)
2) Proposition de M. Zoude modifiant les lois sur la milice, en
ce qui concerne le remplacement (Zoude)
3) Motion d’ordre relative à l’industrie linière et
négociations avec la France, l’Espagne et les Pays-Bas (Delehaye,
Nothomb, Delehaye), évolution
des tarifs douaniers avec la France (Dumortier),
négociations avec la France (Nothomb, Delehaye, Nothomb, Dumortier)
4) Motion d'ordre relative à l’emprunt à contracter
pour le financement du chemin de fer (d’Hoffschmidt,
Smits, (+chemin de fer et routes du Luxembourg) d’Hoffschmidt, Desmaisières,
d’Hoffschmidt)
5) Projet de loi relatif à la police maritime. Rapport
6) Projet de loi tendant a autoriser le gouvernement à
réduire les péages (notamment sur les houilles) sur les canaux et rivières (de La Coste, (Delfosse), David, Desmet, Nothomb,
Sigart, Dumortier, Rogier, Nothomb, Osy,
de Mérode, Nothomb, Delehaye, Dumortier, Osy, (droits sur le
coton) Cogels, Delehaye, Nothomb, Dumortier, Coghen, Osy, Nothomb)
7) Projet de loi concernant l'importation du bétail
étranger
8) Projet de loi annulant la délibération du conseil
provincial du Hainaut relative à la sonnerie des cloches
9) Ajournement de la session (Nothomb)
(Moniteur
belge n°170, du 19 juin 1842)
(Présidence de M. de Behr)
M. de Renesse fait l'appel nominal à midi et demi.
M.
Scheyven donne
lecture du procès-verbal de la dernière séance.
M.
Delfosse. - Le
bruit que l’on fait m’a empêché d’entendre la lecture du procès-verbal ; je
suppose qu’il mentionne que c’est pour M. David et non pour moi que j’ai
demandé hier un congé. Un journal annonce, par erreur, que c’est pour moi que
je l’ai demandé.
M.
Scheyven. - Le
procès-verbal est exact, il mentionne que c’est pour M. David que M. Delfosse a
demandé un congé.
-
Le procès-verbal est adopté.
M. de Renesse présente l’analyse des pièces adressées à la chambre
:
PIECES ADRESSEES A
« Les
membres du tribunal de Marche demandent la suppression de la 4° classe des
tribunaux de première instance. »
-
Renvoi à la section centrale chargée d’examiner le projet de loi relatif aux
traitements de l’ordre judiciaire.
__________________
« La
chambre de commerce de Liége présente des considérations en faveur du projet de
loi tendant à autoriser le gouvernement à réduire les péages sur les canaux et
rivières. »
-
Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet.
__________________
« Les élèves de l’université catholique présentent des
observations concernant le projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et
demandent que ce projet ne soit pas adopté. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.
M. Delehaye. - Je demande l'insertion au Moniteur.
- Adopté.
___________________
« Les habitants de Waillet demandent que cette commune continue à faire partie
du canton de Rochefort. »
- Renvoi à la commission chargée
d'examiner le projet de loi sur la circonscription cantonale.
COMPOSITION DE DIVERSES COMMISSIONS
M. le
président. - Le bureau a composé de la manière suivante les commissions
que la chambre l'a chargée de nommer :
Commission pour l'examen du projet
relatif à la rectification des limites d'Eekeren et
de Cappellen : MM.
Cogels, Mast de Vries, Peeters, de Nef et Henot.
Commission chargée
d'examiner le projet qui fixe les limites entre les communes d'Ougrée et
d'Esneux : MM. David, Eloy de Burdinne, Vandensteen,
Demonceau, Fleussu.
M. le
président. - Les sections ayant autorisé la lecture de la proposition
déposée hier sur le bureau, M. Zoude a la parole pour donner cette lecture.
M. Zoude. - J'ai l'honneur de proposer
l'addition suivante à la loi sur la milice :
« Le milicien remplacé sera libéré lorsque la maladie ou infirmité
du remplaçant n'aurait été découverte qu'après deux mois de
l'incorporation. »
Si la chambre y consent, je
donnerai immédiatement les développements de ma proposition.
L'article 30 de
la loi du 27 avril 1820, est ainsi conçu :
« Art. 30. Les maladies
ou défauts qui seraient découverts dans les deux mois qui suivent
l'incorporation d'un remplaçant, seront censés avoir existé avant son
incorporation, à moins qu'il ne soit constaté que ces maladies ou défauts ont
été contractés après l'incorporation. »
Pour apprécier l'esprit dans
lequel cet article a été rédigé, je crois nécessaire de rappeler à la chambre
que lors de la discussion de cette loi, les états-généraux avaient reconnu que
le remplacement était plutôt dans l'intérêt public que dans celui des
miliciens, parce que les citoyens ne peuvent tous indistinctement suivre la
carrière militaire ; que dans un état il faut des fonctionnaires civils, des
hommes professant des arts libéraux, des négociants, des artistes. (Discours de
M. Lieffman, dans la séance du 22 août 1820.)
M. Lieffman,
s'expliquant encore, dit que l'art. 30 aggrave la responsabilité du remplacé,
mais que cette disposition est juste parce qu'il est des maladies ou infirmités
muettes dont le remplaçant doit répondre, à moins qu'il ne soit constaté
qu’elles ont été contractées après l'incorporation.
Mais comme cette responsabilité
doit avoir son terme, l'art. 30, continue M. Lieffman,
ne rend le remplacé garant de ce chef que pendant 2 mois. La volonté du législateur
est donc bien clairement exprimée ; la garantie du remplacé est bornée à 2
mois.
Il résulte à toute évidence
que la loi a été conçue dans le but de favoriser le remplacement, que
l'interprétation forcée tout arbitraire du département de la guerre tend a le
rendre difficile, onéreux, disons mieux, impossible, car en effet dans l'esprit
du ministre il n'y a plus de terme au rappel, il dépendrait du caprice, et la
responsabilité pèserait sur le remplacé pendant toute la durée du service.
C'est évidemment ce que la
loi n'a pas voulu ; c'est ce que la législature ne tolérera pas.
Il est pénible, messieurs,
d'occuper le temps précieux de la chambre pour interpréter un article de loi
qui est clair pour tout le monde, sauf pour le département de la guerre ; et c'est
pour faire cesser jusqu'à la possibilité du doute que j'ai l'honneur de
proposer d'ajouter à l'art. 30 la disposition suivante :
« Le milicien remplacé sera libéré, lorsque la maladie ou infirmité
du remplaçant n'aura été découverte qu'après deux mois de
l'incorporation. »
- La proposition est
appuyée.
La chambre décide qu'elle
s'occupera immédiatement de la prise en considération.
Personne ne demandant la parole, la
prise en considération est mise aux voix et prononcée.
La proposition
est ensuite renvoyée à l'examen des sections.
M. Delehaye. - La chambre se rappellera
probablement que j'avais annoncé les interpellations que je devais adresser au
gouvernement et que j’avais ajournées au retour de M. le ministre des affaires
étrangères, que des motifs sans doute très graves avaient forcé de s’absenter ;
mais, comme nous sommes sur le point de nous ajourner et que nous tenons
peut-être à notre dernière séance, j’espère que la chambre me permettra de
revenir sur cette résolution et de faire les interpellations que me suggère
l'intérêt seul du pays.
Je demanderai au
gouvernement si M. le ministre des affaires étrangères n'a pas communiqué à ses
collègues les observations qu'il se proposait de faire sur mes interpellations.
II me semble que la gravité de la question que j'ai soulevée méritait bien
qu'on prît la peine de donner une explication. Je viens demander si messieurs
les ministres sont à même de nous satisfaire.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Si l'honorable membre veut répéter ses interpellations,
nous chercherons à y satisfaire.
M. Delehaye. - Vous n'ignorez pas
combien est grave la question qui se rattache à l'industrie linière. Vous avez
vu par les journaux que
Nous sommes en droit de
demander non seulement le maintien du statu quo, mais même une réduction
des droits, comme suite de nos concessions faites précédemment. Nous avons voté
des réductions. On n'en a tenu aucun compte ; aujourd'hui même il paraît que
Le gouvernement français n'a
encore apporté aucune modification à son tarif. Les choses sont dans le même
état. Je ne veux pas me répéter, mais je persiste dans ce que j'ai dit. Nous ne
pourrons jamais obtenir quelque chose de
J'avais demandé aussi où en
étaient nos négociations avec l'Espagne. Jamais nous n'avons été dans une
position plus avantageuse pour avoir un tarif favorable à notre industrie ; je
ne sais si le gouvernement en est informé. Mais j'ai, pour ma part, des
renseignements positifs de négociants belges, établis en Espagne : l'on
m'assure que la ville de Barcelone, qui est celle dont les intérêts sont le
plus intimement liés avec ceux de
Pour cela il faudrait
modifier notre tarif, en ce qui concerne les vins espagnols. J'ai la conviction
que le tarif que demande une des villes les plus importantes de l'Espagne
serait adopté si, de notre côté, nous prenions cette mesure, et nous en
tirerions les plus grands avantages.
J'ai appelé l'attention du
gouvernement sur une troisième question. S'il est vrai, que, contrairement à ce
qu'a annoncé le discours du trône, nos négociations avec le gouvernement
hollandais étaient loin d'être terminées, que
Messieurs, je n'ai pas la
prétention de croire que mes paroles ont assez d'importance près de vous pour
être restées dans votre souvenir, par ce motif, je me permettrai de rappeler
qu'il y a quelques années je me suis opposé aux paiements qu'il s'agissait de
faire à
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - L'honorable préopinant, en adressant ses interpellations au
gouvernement, remplit un devoir que je ne conteste pas. Mais le gouvernement,
de son côté, a aussi des devoirs à remplir ; et un de ces devoirs, quand il
s'agit de nos relations extérieures, est une extrême circonspection, quelque
défavorable que puisse paraître cette circonspection, cette réserve ; il doit
même au besoin accepter toutes les défaveurs qui peuvent résulter de son
silence.
J'ai récemment, en l'absence
de mon collègue des affaires étrangères, donné quelques explications sur nos
relations commerciales avec
Quant à l'Espagne, je dois
saisir l'occasion qui m'est offerte pour dire que le chargé d'affaires et le
commissaire commercial, qui est resté quelque temps à Madrid, ont été
parfaitement accueillis par le gouvernement espagnol ; je puis donc démentir
les bruits qui ont été répandus.
Vous savez que le tarif de
douane qui régit l'Espagne a été introduit par ordonnance. Les cortès, dans
leur session de 1840, avaient, à la fin de la session, autorisé le gouvernement
à changer le tarif par ordonnance.
Le gouvernement a en effet
changé le tarif par ordonnance. Ses pouvoirs étant épuisés par la promulgation
d'un nouveau tarif, le gouvernement s'est de nouveau adressé aux cortès, pour
avoir l'autorisation de modifier le tarif par ordonnance. Cette proposition
était faite, lorsque le ministère Gonzalès est tombé
; une crise ministérielle est survenue en Espagne. Nous espérons que, quand le
ministère sera constitué, la proposition faite aux cortès sera reprise, et que
le régent sera autorisé à modifier le tarif, que déjà une première fois il
avait modifié par ordonnance. Nous aurons recours à toutes les influences que
nous pouvons avoir pour que les pouvoirs qu'aura le régent s'exercent en notre
faveur. Nous ne négligerons pas l'influence qu'a indiquée l'honorable préopinant.
A
Quant à en référer à la
conférence, j'ignore s'il faudra en venir là. On conçoit néanmoins que, dans
une négociation si importante, il peut y avoir, de part et
d'autre, des moments où l'on désespère d'une solution. Il est impossible que
cela n’arrive pas.
M. Delehaye. - Du moment que le
gouvernement hollandais en référerait à la conférence, je pense que notre
gouvernement suspendrait les payements. J'ai énoncé à cet égard mon opinion, et
j'y persiste.
Quant à ce qu'a dit M. le
ministre de l'intérieur, que le gouvernement espagnol a modifié le tarif, le
fait est vrai. Mais il faut remarquer qu'en Espagne l'Angleterre a toujours eu
une très grande influence ; toutes les modifications au tarif ont toujours été
faites dans l'intérêt de l'Angleterre.
Il me suffit, du reste, que
le gouvernement déclare qu'il portera son attention sur ce point, pour que je
croie ne pas devoir insister. Je me bornerai à lui signaler, comme je l'ai déjà
fait, la position du commerce et les mesures à prendre en faveur des
propriétaires de vignobles. Ces mesures sagement combinées nous vaudront leur
appui.
M. le ministre de l'intérieur
m'a fait un reproche ; il a dit que j'étais la cause que les affaires n'avaient
pas tout à fait bien tourné. Je dois répondre à cette accusation. Je m'adresse
à la bonne foi des membres de la chambre. Lorsque j'ai fait ma première
interpellation, j'ai commencé par dire que je n'attendais pas du ministre une
réponse qui pût être interprétée contre nous. Si donc il y a eu quelque
imprudence, c'est M. le ministre de l'intérieur qui l'a commise, en
disant que
Des le premier instant, M.
le ministre n'a pas répondu comme aujourd'hui. S'il l'avait fait, la
connaissance que j'ai des égards diplomatiques et des intérêts du pays m'aurait
déterminé à ne pas insister. Mais non ; M. le ministre m'a fait une réponse
imprudente, dont j'ai le droit de lui faire un reproche. Je ne l’aurais pas
fait cependant, s'il ne m'avait pas accusé le premier.
Au reste, il était de mon
devoir de renouveler mon interpellation, à cause de la déclaration qu'a faite,
il y a quelques jours, M. le ministre de l'intérieur, que d'un jour à
l'autre le Moniteur français pouvait contenir une ordonnance qui
exigerait notre présence à Bruxelles. Ces mots ont jeté de l'inquiétude dans le
pays. On s'est demandé : quelle grande nouvelle peut donc exiger à Bruxelles la
présence de nos députés ? Voilà la question que tout le monde
s'est faite ; et chacun attendait avec impatience une solution. J'ai cru de mon
devoir de la provoquer.
M. Dumortier. - Je suis bien loin de
vouloir créer des embarras au gouvernement, dans les circonstances actuelles.
Je crois l’avoir prouvé dans une séance précédente. Toutefois vous me
permettrez de faire quelques réflexions au sujet de la question soulevée par
l'honorable député de Gand.
J'ai examiné avec soin ce
qui s'est passé dans la presse française, d’après les interpellations qui ont
été faites à cette tribune ; et il est vrai qu'une chose m'a frappé, c'est que
la presse française parait méconnaître tout à fait l'état de la question, posée
comme j'ai eu l'honneur de la présenter hier. Il importe donc de rappeler un
peu les faits, afin que non seulement
Ainsi que j'ai eu l'honneur
de le dire dans une séance précédente, il y a, entre la position de
C'est le congrès qui a pris
cette mesure. Le droit de sortie sur les houilles rapportait un demi-million de
florins, un million de fr. à
Remarquez, messieurs, que le
département du Nord, en particulier, s'est toujours opposé à ce qu'on élevât
les droits sur nos houilles dont il a absolument besoin dans l'intérêt de ses
fabriques. Remarquez encore que plusieurs départements de France ont demandé
avec de vives instances l'abaissement des droits sur les fers belges, qui
seraient d'un immense intérêt pour la fabrication française et pour
l'agriculture.
Ainsi le tarif français a été
jusqu'ici basé exclusivement sur l'intérêt français. Je ne veux pas en blâmer
le gouvernement français, rien n'est plus juste. Mais alors peut-on trouver
mauvais que nous basions aussi nos tarifs sur l'intérêt du pays ? Non, sans
doute ; il faut bien vouloir chez les autres ce que l'on veut chez soi-même. Si
les mesures que l'on devait prendre par une juste réciprocité internationale
sont ainsi mises à néant, si nous, parce que nous sommes faibles, nous devons
subir la loi et maintenir les mesurés que nous avons prises dans l'abaissement
des droits sur les produits français, sans jouir des avantages qu'une juste
réciprocité doit nous faire obtenir, avantages qui d'ailleurs paraissaient nous
être assurés par l'arrangement international dont je vous ai parlé, je dis
qu'une pareille position ne serait pas tenable.
Messieurs, j'aime
Je dis donc, messieurs,
qu'exiger aujourd'hui de nous de nouveaux sacrifices, c'est méconnaître ceux
que
Eh bien ! nous
n'avons pas obtenu cette réduction.
Voilà ce qui
paraît être ignoré par le gouvernement français, voilà ce que la presse
française veut absolument ignorer et mettre de côté. Et je saisis cette
occasion pour le proclamer hautement ; car je suis convaincu qu'il y a en
France des hommes d'une grande loyauté, qui, lorsqu'ils connaîtront bien les
faits, avoueront qu'on ne peut prendre, vis-à-vis une sincère alliée comme
Que si, malgré ces
considérations on voulait frapper nos produits de droits plus élevés, je dis
encore, avec beaucoup de regret, mais chacun de vous le comprendra, qu'il est
impossible que nous ne remplissions pas un devoir. Ce devoir, messieurs, nous
aurions plusieurs moyens de le remplir ; mais comme il est question que la chambre
s'ajourne, je ferai une observation au gouvernement. J'espère que ce que je
vais dire n'aura pas de résultat, parce que j'espère que
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je ne puis, à mon tour,
accepter les reproches que m'a adressés l'honorable M. Delehaye. Mes reproches
ne s'adressaient d'ailleurs pas directement à ce qu'il avait dit ;
l'observation que je faisais s'appliquait à l'interpellation en général.
Ce qui a blessé la
susceptibilité française, et j'en appelle sur ce point aux journaux français,
ce sont les menaces prématurées de représailles. Voilà sur quoi
portait mon observation.
M. Delehaye. - Messieurs, si j'ai dit à
M. le ministre que l'imprudence venait de lui, et non de moi, je n'ai point
prétendu que cette imprudence était bien grave, En effet, messieurs, il n'était
point nécessaire pour le gouvernement anglais, que M. le ministre fît cette
déclaration ; nos démarches auprès du gouvernement français sont suffisamment
connues.
Quant à ce qui concerne nos
menaces à
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je vois que l'honorable préopinant suppose que c'est par
nous que l'Angleterre aurait appris qu'il pourrait arriver que l'ordonnance ne
fût pas applicable à
M. Delehaye. - Pourquoi avez vous dit
qu'on avait commis une imprudence ?
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - J'ai parlé de l'imprudence que présentent les
interpellations en général ; et j'en appelle à ce qui vient de se passer ; c'est, je le répète, la menace prématurée des
représailles qui a blessé l'amour-propre français.
M. Dumortier. - Je prie la chambre
d'être bien persuadé que dans ce que j'ai dit il n'y a pas la moindre apparence
de menace ; je serai fortement peiné qu'on le prît de la sorte. J'ai seulement
voulu faire connaître la position réelle du pays, position qui ne paraît pas
comprise, et qu'il est nécessaire de faire connaître.
M.
d’Hoffschmidt.
- Je demande la parole pour adresser une interpellation à M. le ministre des
travaux publics, interpellation qui, je crois, ne présentera pas le moindre
danger ; car il n'y s'agit pas de nos relations extérieures.
Messieurs, des bruits
circulent d'après lesquels il paraîtrait qu'à notre première réunion, le
gouvernement demandera à la législature un nouvel emprunt pour subvenir aux
travaux de construction du chemin de fer. D'après ces bruits, cet emprunt
s'élèverait à une somme de 30,000,000 de francs. Je
crois, messieurs, qu'il serait bon que nous fussions instruits, dès maintenant,
si ces bruits sont fondés, parce qu'il serait utile que nous eussions le temps
de réfléchir mûrement sur les conséquences qu'une dépense pareille peut
entraîner pour les finances du pays. Il serait bon aussi que nous eussions le
temps de nous enquérir pourquoi les travaux du chemin de fer entre Liége et la
frontière prussienne sont aussi onéreux qu'on l'annonce.
D'après les premiers
calculs, la lieue ne devait coûter qu'un million de francs. On a dit ensuite
qu'elle coûterait 2,200,00 fr. et enfin il paraît
maintenant que la lieue entre Liége et la frontière prussienne coûtera la somme
énorme de 3 millions de francs !
Je prierai M. le ministre de
bien vouloir nous dire ce qu'il y a de fondé dans ces bruits. Je crois qu'il
serait nécessaire que nous le sachions maintenant, si
toutefois nous devons nous occuper de cette question lors de notre première
réunion.
M. le ministre des
finances (M. Smits) - Messieurs l'interpellation de l'honorable M. d'Hoffschmidt, pour
n'avoir pas trait à des questions de relations extérieures, n'en présente pas
moins de danger. Car l'annonce prématurée d'un emprunt affecte immédiatement le
crédit public. Je crois donc qu'il est du devoir du gouvernement de ne pas
répondre à ces sortes de questions.
Si la construction des
travaux du chemin de fer exige un emprunt, le gouvernement vous le demandera ;
mais, quant à moi, je ne suis encore saisi d'aucune demande officielle de ce
genre de la part de M. le ministre des travaux publics. Les mesures à prendre
dépendront des rapports à établir entre son département et celui des finances.
Mais, je le répète, ces questions sont imprudentes, parce que l'annonce
intempestive d'un emprunt est de nature à comprimer
la rente et à affecter le crédit.
M.
d’Hoffschmidt. -
Messieurs, je crois que je n'ai commis aucune imprudence en faisant
l'interpellation que je viens d'adresser. Car, il a déjà été question de la
somme et de la dépense dont j'ai parlé dans un rapport qui a été
distribué à la chambre et dont il n'a pas été donné lecture, mais qui est à
l'impression.
Certes, que le pays se
procure cette somme par un emprunt ou de toute autre manière peu importe ; mais
ce qu'il y a de certain, c'est que par le rapport que je viens de mentionner,
ainsi que par les bruits qui s'accréditent chaque jour, il est connu de tous
qu'il sera nécessaire de se procurer une somme pour achever les travaux du
chemin de fer.
Du reste, je n'insisterai
point ; ce qui m'a guidé dans l'interpellation que je viens d'adresser, c'est
que si le gouvernement se propose de demander sous peu à la législature de
nouvelles sommes pour les travaux du chemin de fer, j'espère bien qu'il
n'oubliera pas d'y comprendre les deux millions que les députés du Luxembourg
ont demandés pour travaux de route dans cette province.
Je rappellerai au
gouvernement que la loi avait promis un embranchement du chemin de fer au
Luxembourg, et que cette promesse subsiste toujours. Il est vrai qu'elle est
remplacée maintenant par la proposition qui tend à ce qu'il soit accordé des
routes ordinaires à cette province jusqu'à concurrence de deux millions de
francs. Mais il serait profondément injuste que nous votassions encore de
nouvelles sommes, que l'on construisît dans le pays pour une valeur de
160 millions de chemins de fer et qu'une province tout entière, qui
reste encore la plus grande du royaume, fût exclue des bienfaits d'une pareille
communication, et n'obtînt rien en compensation.
J'espère
donc que le gouvernement comprendra dans les sommes qu'il devra nous demander
les fonds nécessaires pour les routes du Luxembourg.
M. le ministre
des travaux publics (M. Desmaisières) - Quant aux renseignements que demande l'honorable
préopinant sur le coût des travaux du chemin de fer de Liège à la frontière
prussienne et sur le coût des autres parties du chemin de fer, il les trouvera
dans le compte-rendu que j'ai déposé sur le bureau de la chambre et qui sera
incessamment distribué. S'il peut résulter de ce travail que de nouvelles sommes
seront nécessaires plus tard pour l'achèvement des travaux, il n'est pas dit
pour cela que le gouvernement doive recourir à un emprunt, c'est là une
question qui n'est pas décidée et qui devra être l'objet d'une instruction
ultérieure de la part du ministre des finances. Mais, je le répète encore, il
est imprudent de parler prématurément des moyens de
faire face aux besoins qui peuvent résulter de la nécessité d'achever les
travaux du chemin de fer.
M.
d’Hoffschmidt.
- Je ne puis nullement accepter, je le répète, le reproche d'avoir commis une
imprudence en faisant la question que j'ai soumise au ministère. Il est certain
qu'il faudra de nouveaux fonds pour achever le chemin de fer. C'est ce dont
personne ne doute. Qu'on dise maintenant qu'on se les procurera par un emprunt
ou d'une autre manière, peu importe. J'admets bien volontiers que le
gouvernement peut avoir des motifs pour ne pas déclarer de suite qu'il aura
recours à un emprunt, mais je n'ai fait que remplir un devoir en lui adressant
la question que vous venez d'entendre. Du reste, il est toujours libre au
gouvernement de répondre, comme il l'entend, à de semblables questions, et
c'est ce que ses organes disent qui peut seul engager les intérêts du pays.
PROJET DE LOI RELATIF A
M. Malou, au nom de la section
centrale, dépose le rapport sur le projet de loi relatif à la police maritime.
- La chambre ordonne
l'impression et la distribution de ce rapport.
Discussion générale
M. de La
Coste, rapporteur. - Messieurs, je voyais hier la chambre très pressée d'en finir, et je
croyais que l'on allait en venir immédiatement à une décision, c'est ce qui m'a
engagé à abréger beaucoup ce que j'avais à dire ; comme la discussion continue,
je demanderai la permission d'ajouter encore quelques développements à ceux
dans lesquels je suis entré.
Je commencerai par répondre
à quelques observations de M. le ministre de l'intérieur. Je ne pense pas avoir
rien dit d'où l'on pût inférer que la section centrale ait considéré la seconde
des propositions soumises à la chambre comme insolite. Elle nous a paru
seulement donner ouverture à des questions fort graves.
M. le ministre a fait
ensuite une comparaison dont l'exactitude me semble contestable, à l'égard de
cette même proposition.
Ici je prie la chambre de
vouloir bien se rappeler que le projet embrasse deux propositions ; la première
relative à l'exportation des produits de notre sol ou de notre industrie ; la
seconde relative à l'importation des matières premières étrangères.
La faveur proposée pour
faciliter l'exportation de nos produits, et qui est vivement sollicitée dans
l'intérêt des houillères du Hainaut et de la province de Liége, a été admise
par la section centrale sans aucune restriction, quoiqu'elle fût repoussée par
deux sections. C'est l'autre disposition, qui concerne les matières premières
importées, sur laquelle il y a eu dissentiment. M. le ministre a comparé cette
faveur aux droits modérés que l'on perçoit sur certaines matières premières à
l'entrée dans le royaume ; mais je ferai remarquer qu'il y a une grande
différence entre ces deux mesures, car lorsqu'on établit un droit modéré sur
les matières premières, on n'accorde pas une prime ; au contraire, on impose
encore une charge ; le droit, tout faible qu'il est, est encore une charge,
tandis qu'ici on accorde une véritable prime aux matières premières exotiques,
au détriment des matières premières indigènes. Voilà sur quoi nous avons basé
une partie de nos observations.
L'honorable M. Delehaye a
semblé croire que nous nous étions uniquement préoccupés du sucre. Nous avons,
il est vrai, été frappés de voir M. le ministre poser en principe qu'il ne
s'agissait que d'objets n'ayant pas de similaires indigènes, et comprendre
parmi eux le sucre ; mais ce n'est pas là le seul objet que nous ayons en vue.
Un membre, entre autres, a fait observer que l'huile de baleine, après avoir
été épurée, sert maintenant aux mêmes usages que l'huile de colza ; serait-il
juste d'accorder la faveur dont il s'agit à l'huile de baleine, qui viendrait
faire concurrence à l'huile de colza, tandis que celle-ci n'en jouirait point ?
M. le ministre a cité pour
exemple le tarif du chemin de fer, mais autant que je sache, ce tarif n'est pas
l'ouvrage de la chambre, et on ne peut donc pas le lui opposer ; si ce tarif
offre de semblables disparates, il faudrait plutôt le corriger en ce point que
de le prendre pour modèle.
Je demanderai, à cette
occasion, si la laine importée par chemin de fer jouit de la réduction de 20
p.c. accordée aux matières premières ? La laine a bien droit, sans aucun doute,
à cette dénomination, c'est la matière première du drap et de diverses étoffes.
Si l'on refuse la réduction aux laines étrangères, j'y vois une injustice, et
pourquoi ne l’accorderait-on pas alors au transport des laines indigènes ?
Ce sont là des questions,
messieurs, qui me paraissent mériter un examen sérieux.
On a encore
agité cette autre question : en ce moment il est nécessaire de venir au secours
des houillères ; mais il y a quelques années que le combustible était fort cher
; à cette époque n'aurait-il pas tout aussi utile, et même davantage, de
favoriser sa circulation à l’intérieur au profit de nos fabriques que de
favoriser l'exportation ?
En ce moment les céréales
sont assez chères, cependant il n'y a point de disette ; mais dans le cas où il
y eût disette, ne serait-il pas avantageux que les céréales et les pommes de
terre pussent également jouir de la faveur dont il s’agit ?
Toutes ces questions,
messieurs, ne nous ont pas paru susceptibles de recevoir une solution
immédiate, et ne voyant pas d'urgence dans la deuxième disposition dont il
s'agit, nous avons pensé qu'il vaudrait mieux ajourner cette deuxième
disposition jusqu'à ce que M. le ministre ait pu examiner mûrement les
questions qui s'y rattachent, en profitant, à cet effet, des observations des
chambres de commerce.
Celles de Louvain et de
Bruxelles ont présenté sur la matière des considérations fort intéressantes. Il
est dit, par exemple, dans les avis de ces chambres de commerce, que les
formalités auxquelles il faut se soumettre pour obtenir la réduction du droit
sont tellement onéreuses, qu'en certains cas elles anéantissent la faveur
accordée.
Voici maintenant, messieurs,
dans quelle position se trouvait la section centrale à l'égard des sections
particulières : deux sections avaient absolument refusé d'adhérer à la mesure
qu'elles regardaient comme contraires aux principes constitutionnels et aux
intérêts du trésor ; deux autres sections avaient adopté la proposition ; deux
autres sections, qui adhéraient à la première partie, faisaient des réserves
quant à la seconde ; l'une voulait que les matières premières ne fussent
admises à jouir de la faveur à l'importation qu'autant qu'elles n'eussent pas
de similaires dans le pays ; l'autre, qui m'avait choisi pour son rapporteur,
pensait qu'il y avait lieu de rendre la mesure plus générale, qu'il fallait
l'appliquer aux matières premières indigènes ct même aux engrais.
C'est, messieurs, parce que
nous avons trouvé la question si délicate, si compliquée que nous avons voulu
non pas écarter la deuxième partie du projet, mais simplement l'ajourner
provisoirement. Dans l'esprit de ma section et dans le mien, il y a plutôt lieu
à rendre la mesure plus générale qu'à la restreindre. Si maintenant la chambre
ne croit pas devoir adopter cet ajournement, notre but sera également atteint
si M. le ministre s'engage à profiter des observations
qui lui ont été faites, dans l'intervalle qui s'écoulera d'ici au moment où il
nous présentera quelque chose de définitif.
M.
Delfosse. -
Mon intention n'est pas d'entrer dans le fond de ce débat qui a déjà été fort
long. Je me bornerai à exprimer le vœu que le gouvernement mette, autant
que possible, les péages du chemin de fer en rapport avec ceux des canaux ; il
ne faut pas que les houillères de Liège soient sacrifiées à celles du Hainaut,
ni les houilles du Hainaut à celles de Liége ; le gouvernement doit montrer la
même sollicitude pour les deux bassins houillers. Je suis sûr que le sentiment
que j'exprime est partagé par tous nos honorables collègues du Hainaut ; mais
l'honorable M. David m'a
remis hier, au moment de son départ, une note dont il m'a prié de donner
lecture à la chambre ; je vais la lire, si la chambre le permet.
M. Dumortier. - On pourrait l'insérer au
Moniteur.
M. Delfosse. - Elle est très courte, et
il peut être utile d'en donner lecture avant le vote.
Des membres. - Lisez.
M. Delfosse. - Voici cette note :
« Je regrette de
ne pouvoir assister à la discussion sur la loi de prorogation des péages sur
les canaux et rivières.
« Je me proposais deux
choses que je vais dire en trois mots, afin que les amendements que je voulais
soumettre soient peut-être repris par d'autres de mes honorables collègues.
« 1° Je voulais la
prorogation jusqu'à la fin de 1843, parce qu'au terme de l'année où nous en
sommes venus, la prorogation demandée ne sera valide que pour quelques mois à
partir du jour de sa promulgation.
« 2° Je voudrais
étendre l'abaissement des péages sur toutes les productions, pour la
circulation intérieure comme pour l'importation et l'exportation, et rédiger
l'article unique comme suit :
« Le
gouvernement est autorisé à réduire les péages des canaux et rivières. »
« Je ne
vois pas pourquoi nous nous traiterions moins bien, nous qui sommes
propriétaires des canaux, que les intérêts étrangers qui les empruntent pour
naviguer.
« Enfin, j'aurais
demandé que le gouvernement profitât de cette prorogation pour ramener les
péages (qui, d'après le § 5 du rapport du ministre, présente les anomalies
les plus étranges) à un mode simple, tel que celui adopté en France, au
moyen d'une échelle graduée, qui présente le chargement réel sur lequel le
droit est assis. On apprécie facilement l'avantage et surtout la justice qu'il
y aurait à établir cette base pour les bateliers, pour la navigation de
« L'état si déplorable
de la navigation de
M. Desmet. - Messieurs, j'appuie le
projet du gouvernement. Il est fort utile de conférer pour un certain temps au
gouvernement le pouvoir de modifier le tarif, à l'effet de prendre des mesures
pour favoriser l'industrie et le commerce du pays.
Le gouvernement n'abusera
pas de la loi, je n'ai aucune inquiétude à cet égard ; il tâchera, sans doute,
de maintenir les recettes du trésor, tout en accordant un avantage au commerce
et à l'industrie. Je suis convaincu qu'il appliquera la loi avec
impartialité.
On a parlé de la
mesure qui va être prise en Angleterre. Sans juger cette mesure en elle-même,
je dirai que
M. le
ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, on a cité plusieurs fois dans cette
discussion la mesure projetée par le nouveau tarif anglais à l'égard de la
sortie des houilles. Le premier projet frappait la sortie des houilles de
quatre schellings ; nous avons reçu hier la nouvelle que ce droit
sera réduit à 2 schellings ; dès lors, les espérances que nous avait fait
concevoir le nouveau tarif anglais, viennent à disparaître en grande partie.
M. Sigart. - Messieurs, je n'ai demandé la parole dans la
séance d'hier que pour calmer les inquiétudes de l'honorable M. Dumortier,
relativement à la diminution de la recette, diminution qui serait la
conséquence de l'abaissement des péages. Messieurs, cette diminution n'est pas
possible parce qu'il n'y a pas de recette ; et pourquoi n'y a-t- il pas de
recette ? parce qu'il n'y a pas d'exportation.
Messieurs, on ne peut pas
appeler exportation ce qui a été expédié en Hollande jusqu'ici. Les expéditions
qu'on a faites n'ont eu lieu qu'à titre d'essai, et cette tentative
d'exportation cesserait immédiatement si, contre toute attente, la mesure
proposée par le gouvernement n'était pas adoptée.
Messieurs, on a expédié en
Hollande une douzaine de mille tonneaux de houille (je ne parle que de Mons,
car je sais que Liége expédie davantage, et je dirait peut-être pourquoi) ; or,
une douzaine de mille tonneaux de houille compose une exportation absolument
insignifiante, en comparaison de l'importance du marché hollandais, car dans
les seules distilleries de Schiedam, Dordrecht et Rotterdam, on en consomme
au-delà d'un million.
Je dirai encore un mot, en
réponse à l'honorable M. Dumortier, qui a exprimé la crainte que le
gouvernement, au lieu de rendre au couchant de Mons le marché qu'il a perdu, ne
le livre à un autre bassin houiller, par exemple, aux charbonnages du centre.
Je sais bien que le gouvernement pourrait abuser de la loi, je dirai même que
pour cela il n'aurait qu'à suivre le régime de l'arrêté de 1841, il faut que le
gouvernement ne rembourse point une quotité du péage, mais rembourse une
certaine somme par tonneau (nos exploitants estiment qu'elle doit être d'un
franc), mais je suppose que le gouvernement voudrait être injuste envers nous,
et remarquez qu'il n'a aucune raison pour cela, il ne pourrait pas nous nuire,
attendu, comme je vous l'ai dit, que nous n'expédions rien, il ne ferait que
nous laisser dans la position où nous nous trouvons.
Au surplus, je remercie
l'honorable M. Dumortier de l'intérêt qu'il veut bien prendre aux charbonnages
du couchant de Mons, mais j'aurais désiré qu'il eût
réservé cette marque de sympathie pour d'autres occasions. (On rit.)
M.
Dumortier - Messieurs, je croyais bien
faire, en prenant à cœur, dans cette circonstance, les intérêts des
charbonnages du couchant de Mons ; mais du moment que les défenseurs directs et
naturels de ces charbonnages viennent proclamer que l'application de la loi ne
peut, dans aucun cas, leur faire du tort, je n'ai, comme vous pensez, plus rien
à dire, et je retire mes observations.
Messieurs, quant à la loi
elle-même, je conçois qu'il existe des motifs qui militent en faveur de
l'adoption du 1er paragraphe du projet du gouvernement ; les explications qu'on
a données sur ce point me paraissent assez satisfaisantes ; mais je regrette
beaucoup que l'on n'ait pas fait de la mesure l'objet d'un projet de loi ; pour
ce motif, je tiens beaucoup à ce que, conformément à la proposition de la section
centrale, la durée du pouvoir qu'on veut conférer au gouvernement soit fixée au
31 mars 1843. Il y aurait des inconvénients à fixer ce terme au 31 décembre ;
la chambre se réunissant vers la mi-novembre, ne pourrait voter une loi sur
cette matière avant le 1er janvier, tout son temps étant absorbé jusque-là par
la discussion des budgets. Il est donc beaucoup plus sage d'adopter la
proposition de la section centrale, qui limite la durée de la loi au 31 mars.
Messieurs, je dois ici
repousser un reproche que M. le ministre de l'intérieur m'a adressé. Il vous a
dit que j'aurais prétendu qu'il fallait rétablir les droits à l'exportation des
houilles. Je n'ai rien dit de semblable. Je me suis borné à signaler ce que
nous avions fait pour le commerce des houilles ; mais je n'ai pas demandé qu'on
rétablît des droits à la sortie. C’est une manière par trop commode de
combattre un adversaire, que de lui prêter des idées qu'il n'a pas eues.
Revenant au projet de loi, je dirai que, si je donné mon assentiment au
premier paragraphe, je ne vois absolument aucun motif pour adopter le second.
On n'a présenté aucune considération qui milite en faveur de cet article, et
les arguments présentés par la section centrale contre l'article sont
extraordinairement saillants. Comment ! vous voulez, par l'abaissement du péage sur les canaux, vous
voulez accorder un avantage à l'importation des produits étrangers en
concurrence avec nos propres produits ; vous faites donc une véritable guerre à
vos matières premières. Des laines arrivent de l'étranger ;
Vous voyez donc bien,
messieurs, que vous allez favoriser les produits étrangers au détriment de vos
matières premières, des produits de votre sol. Ne serait-ce pas vouloir, par le
second paragraphe, le contraire de ce que vous aurez voulu et décidé par le
premier ? Que veut le premier paragraphe ? Favoriser l'exportation de nos
produits. Que veut le second paragraphe ? Mettre les matières premières du
pays, les produits de notre sol dans une situation moins favorable que les
mêmes produits venant de l'étranger. Voilà donc bien deux dispositions qui sont
diamétralement opposées l’une à l’autre.
Messieurs, je ne vois
absolument aucune utilité à voter le second paragraphe. En ce qui concerne la
houille, on dit qu'on n'en transporte pas aujourd'hui en Hollande, de manière
qu'en diminuant les frais du transport, on augmentera les exportations, et le
trésor recevra quelque chose ; ici, au moins, il y a utilité, mais rien de
semblable n'existe quant à l'autre point, Si, dans ce cas, vous accordiez une
réduction, ce serait une perte réelle que vous feriez, un sacrifice sans
aucun motif. Voilà ce qui a frappé la section centrale, et les raisons qu'elle
a fait valoir, à l'appui du rejet du second paragraphe, sont corroborées par
les puissantes considérations que l'honorable M. de
Je voterai donc contre ce second paragraphe de la loi.
M. Rogier. - Messieurs, je vois avec
grand plaisir, dans le rapport qui a été présenté par M. le ministre de
l'intérieur, qu'il professe les principes que je me suis toujours plu à
professer, principes qui consistent à faire transporter à bon compte les objets
qui se rapportent à l'industrie du pays, soit comme matières premières, soit
comme produits même de l'industrie. Le rapport de M. le ministre de l'intérieur
est, à mon avis, le meilleur mémoire justificatif qui ait été publié en faveur
de la réduction des péages sur le chemin de fer.
Du reste, ce qu'on demande
aujourd'hui pour les canaux n'est que l'application des principes qui, en
dernier lieu, ont été adoptés par M. le ministre des travaux publics sur le
chemin de fer.
En effet, nous avons vu que,
par arrêté ministériel du 21 avril, M. le ministre des travaux publics a cru
devoir accorder une réduction considérable à certains produits indigènes
destinés à l'exportation, et à certaines matières premières exotiques destinées
à l'industrie du pays. C'est aussi à ces deux catégories de produits que l'on
propose d'accorder une réduction sur les canaux, cette autre voie de transport.
Pour mon compte, je donnerai
mon approbation aux deux paragraphes du projet du gouvernement. Je dois dire
cependant que, dans mon opinion, la proposition est incomplète et qu'elle
présente même une sorte d'inconséquence.
Le gouvernement demande de
pouvoir accorder une réduction de péages aux matières premières servant à
l'industrie nationale ; mais je demanderai pourquoi on n'accorderait pas cette
même réduction aux matières premières indigènes servant à l'industrie nationale
? Sous ce rapport, je ne puis que me rallier aux observations qui ont été
présentées par deux honorables préopinants.
Comment se fait-il que la
houille destinée à l'exportation, à alimenter l'industrie étrangère, soit
transportée à meilleur compte que celle destinée à alimenter l'industrie
nationale. La houille est le principal agent moteur de l'industrie. Une des
premières conditions de la prospérité de notre industrie, le moyen de lui
permettre de concourir avec l’industrie étrangère, soit sur les marchés de
l'intérieur, soit sur les marchés étrangers, c'est de lui procurer la houille à
bon compte. Je ne vois pas pourquoi la houille destinée à l'industrie indigène
serait grevée de péages plus élevés que la houille destinée à l'industrie
exotique.
Je viens de dire que le
principe du projet concernant les canaux s'applique également au chemin de fer.
Eh bien, la laine de Tirlemont, quand elle devra servir à la fabrication de
Verviers, paiera des droits plus élevés par le chemin de fer que quand elle
sera destinée à la fabrication d'Eupen. Pourquoi accorder cette faveur à
l'industrie exotique ? Pourquoi la matière première destinée à l'industrie
indigène ne jouirait-elle pas de la même faveur que celle destinée à
l'industrie exotique ? Sous ce rapport, on devrait compléter l'art. 2 et dire :
« Le gouvernement est autorisé à réduire les péages sur les matières premières
exotiques et indigènes servant à la fabrication indigène. » Certainement
jamais je ne me plaindrai des faveurs accordées à l'exportation des matières
premières indigènes, mais cependant je ne veux pas que ce soit à ce point d'en
augmenter le prix sur les marchés du pays.
Si l'on ne veut pas protéger
exclusivement, par une réduction de péage, la fabrication indigène, il faudrait
au moins maintenir sous ce rapport l'égalité entre elle et la fabrication
étrangère.
Je ne proposerai pas
d'amendement, parce que je ne sais pas si cela convient au gouvernement, je me
borne à faire cette observation. Je crois qu'on sera amené forcément à accorder
à la matière première, destinée à la fabrication indigène, la même faveur qu'à
celle destinée à la fabrication étrangère. Ainsi la houille transportée par le
chemin de fer à St-Trond ou à Tirlemont ne doit pas payer plus que la houille
destinée an premier village de la frontière hollandaise. Vous avez, dans la
province d'Anvers, le village de Putte qui est moitié hollandais, moitié belge.
La houille destinée à la partie belge serait soumise à un péage plus élevé que
la houille destinée à la partie hollandaise du village. Cela n'est pas juste.
Il faudrait mettre les deux parties du village sur la même ligne.
Un membre. - Il y a le droit d'entrée en Hollande.
M. Rogier. - Ce droit pourrait être
supprimé par
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Il est de 2 florins.
M. Rogier. - Messieurs, par
l'application de la nouvelle loi aux canaux et rivières, les houilles du bassin
du Hainaut vont être transportées à meilleur compte sur le marché hollandais.
Je suis très favorable à cette mesure ; mais c'est à une condition que les
houilles d'un autre bassin n'aient pas à en souffrir, ne se trouvent pas
exclues des marchés hollandais par suite de cette faveur accordée au bassin du
Hainaut. Il faut qu'il demeure bien entendu que si les houilles du Hainaut ont
un avantage sur nos canaux afin d'entrer plus facilement en Hollande, les
houilles de Liége jouiront de la même faveur, non seulement par la voie d'eau,
mais aussi par la voie de fer.
Ainsi, quand le chemin de
fer a été créé, il a eu, surtout en ce qui concerne la province de Liége, pour
but d'amener ses houilles sur le marché de Louvain, de Malines et d'Anvers. Je
crois qu'il faut mettre les bassins de Liége en mesure de lutter sur le marché
d'Anvers avec les houilles du Hainaut. Il importe que cette concurrence existe
même ailleurs que sur le marché d'Anvers. Il importe que la houille se vende à
bon compte dans tout le pays.
On dit qu'il y a
encombrement. Il est certain cependant que cette matière première si précieuse
pour toutes les industries et toutes les familles, est à un prix très élevé, et
il serait à désirer que ce prix diminuât. En favorisant l'exportation, on
augmente l'extraction, et par suite l'on peut amener une réduction dans les
prix. Cependant ce résultat ne me paraît pas, quant à présent, probable.
Je crois donc, et sous ce
rapport je m'en remets à la sagesse du gouvernement, je crois qu'il faut que
les choses s'arrangent de manière que les houilles de Liége ne soient pas
repoussées des marchés hollandais par les houilles du Hainaut, et que les
houilles des deux bassins puissent se faire, dans le pays même, une concurrence
qui sera favorable à tous les intérêts. Je suis loin de demander une faveur
pour les houilles de Liége ; je demande seulement qu'il y
ait nivellement dans les prix de transport,
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, c'est sur ma proposition que la chambre a, il y
a quelques années, fait rentrer dans le domaine public les canaux et rivières
dont l’administration avait été confiée aux provinces. En faisant cette
proposition, j'étais préoccupé d'une idée : j'avais été frappé des anomalies
que présentent les tarifs des péages, c'est à ce point qu'on peut dire que
véritablement il n'y a pas ici égalité devant la loi. On ne pouvait faire
cesser ces anomalies qu'en faisant rentrer les canaux et rivières dans le
domaine public. Le gouvernement seul pouvait se charger de la révision des
tarifs. Ce que nous faisons aujourd'hui est un premier pas.
Si les canaux et rivières
étaient restés confiés aux provinces, d'abord les provinces n'auraient pas été
dominées par des considérations d'intérêt général. En second lieu, il aurait
fallu établir un accord entre les provinces pour arriver à des bases communes
de perception de péages. Voilà comment la mesure que nous ébauchons aujourd’hui
se rattache à une autre grande mesure qui a été prise, il y a quelques années.
La proposition actuelle est une proposition partielle très incomplète, nous en
convenons, mais c'est tout ce que nous pouvions demander dans le moment actuel.
La question n'est pas suffisamment instruite. L'instruction commence seulement.
II fallait faire imprimer tous les tarifs de péages. Sans ces pièces, il eût
été impossible aux membres de la chambre et aux chambres de commerce, en un mot
à tous ceux qui s'occupent de la question des frais de transport, de cette
question si importante dans le mouvement commercial et industriel, il leur eût
été impossible de l'étudier. Aujourd'hui, on le peut, au moyen du recueil
imprimé.
La mesure n'est et ne
pouvait être que partielle. Nous venons le résultat. Nous reconnaissons que la
mesure étant partielle présente des inconvénients qu'on peut même aller
jusqu'à lui reprocher des injustices dans l'application. C'est là le caractère
de tout ce qui est provisoire, de tout ce qui n'est qu'essai. Le gouvernement
aussi doit tenir compte d'une nécessité. Il ne faut pas que, par une mesure
générale, bien qu'avantageuse, il compromette les recettes du trésor. C'est
pour cela qu'on ne vous a proposé qu'une mesure incomplète. Il a fallu mettre
une limité dans le projet et ajourner certaines réclamations, certaines
prétentions, fussent-elles mêmes justes, je vais jusque-là ; c'est la situation
financière du pays qui lui en fait la loi.
Mes honorables collègues et
moi avons toujours été d'accord avec l'honorable préopinant sur les principes
qui doivent dominer la fixation de tous les tarifs de péages soit pour les
chemins de fer soit pour les canaux et rivières. Ces principes, je les ai
développés dans le travail que vous connaissez, et j'ai eu soin d'indiquer la
limite de ce principe. C'est qu'il faut chercher à augmenter le mouvement sans
diminuer la recette totale. C'est là ce qu'exige notre situation financière. On
n'est pas toujours parvenu à concilier ces deux intérêts. On procède quelquefois
par tâtonnement. En un mot, le problème doit être posé comme je l'ai posé à la
page 16 de mon rapport : « Augmenter le mouvement sans diminuer la recette
totale, tel est le problème. Il y a un point qu'il faut saisir et qu'on ne
découvre quelquefois qu'à la suite de tâtonnements, point où le mouvement
augmente sans diminuer le total des recettes. »
C'est là ce que
nous devons chercher, Nous sommes entièrement d'accord avec l'honorable membre.
Il arrive même que l'on peut, à l'aide de réductions sagement calculées,
augmenter à la fois et le mouvement, quant au transport, et la recette.
C'est là la solution avec
tous les avantages possibles. Je crois que le moyen le plus complet, le plus
rationnel, serait de faire ce qu'a proposé M. Delfosse, au nom de M. David.
Mais il serait impossible de prendre une mesure de ce genre. Le gouvernement,
en présence de notre position financière, ne peut en prendre la responsabilité.
Nous demandons que la
proposition soit votée, telle qu’elle a été présentée. Nous n'en dissimulons
pas les côtés faibles. Mais je le répète, c'est une mesure
partielle et provisoire.
M. Osy. – Par arrêté du premier
septembre 1840, on a réduit le péage sur
Mais si vous comparez
maintenant le bénéfice que le pays retire par cet abaissement de tarif, vous
verrez que nos exportations ont considérablement augmenté, et que pendant
l’année du premier septembre 1840 au 31 août 1841, on a expédié en plus que
dans la même époque du 1er septembre 1839 au 31 août 1840 :
273 p. c. de
plus en ardoises ;
81 1/2 p. c. de plus en charbons ;
plus de 200 de plus en fer de
fonte.
Le trésor a donc gagné, les
exploitants et industriels ont considérablement augmenté leurs débouchés ;
beaucoup plus de bras auront été occupés, la navigation intérieure a été
beaucoup plus active, ce qui aura encore donné un second bénéfice au
gouvernement pour le droit de patente et les autres impôts indirects.
Je crois que ceci répond
victorieusement aux assertions faites hier par l'honorable M. Dumortier, et je
pense que s'il avait lu avec attention le rapport de M. le ministre, il aurait
joint ses efforts aux nôtres pour engager le ministre, après lui avoir accordé
la loi maintenant en discussion, de prendre des mesures en abaissant le taux de
transport par canaux et rivières, de mettre bien en concordance les tarifs à
établir sur les canaux du Hainaut avec celui de la ligne de navigation de la
province de Liége et les transports par le chemin de fer, pour qu'aucune partie
du pays n'ait une préférence sur l'autre, et que tous puissent lutter pour
tâcher d'augmenter nos exportations, sans se nuire réciproquement.
Comme ce n'est que par un
essai qu'on pourra connaître exactement ce qu'il faut faire à ce sujet,
j’accorde avec plaisir au gouvernement le projet de loi proposé, et je trouve
que nous devons laisser cette loi en vigueur, soit jusqu'au 31 mars 1843, ou
jusqu'au 31 décembre 1843 ; mais je ne puis me rallier à la nouvelle
proposition de M. le ministre, d'accorder cette faculté jusqu'au 30 juin 1843.
En accordant l'époque du 31 mars, le gouvernement sera obligé de nous
présenter un projet de loi définitif des péages dans la session prochaine, qui
ne pourra pas être aussi longue que celle de cette année, à cause des élections
pour la moitié de la chambre, au mois de juin.
En accordant, comme le
demande le ministre jusqu'au 30 juin, il est à craindre que la session
prochaine se terminera sans la présentation de la loi, et alors, à partir du 30
juin, il faudra rétablir les anciens péages ; si on ne contribue pas par la
diminution pendant un an à faire du bien au trésor et à nos exportations, nous
verrons ralentir ce bien-être jusqu'à l'adoption de la loi pendant la session
de 1843 à 1844. Je propose donc de rejeter la proposition ministérielle ; mais
si on n'acceptait pas l'époque proposée par la section centrale, de se rallier
à la proposition faite par ma section, d'accorder cette faculté jusqu'au 31
décembre 1843, je me réserve de faire un amendement à ce sujet si la proposition
de la section centrale était rejetée.
Il me reste à vous faire un
résumé du bien-être qu'a produit l'arrêté du 17 juillet 1841, et vous verrez
que, pendant le deuxième semestre, les exportations ont augmenté de 15 millions
de kil. de houille, en comparaison du premier semestre
de la même année 1841, et de 28 millions de k. de plus que pendant les trois
semestres du 1er janvier 1839 au 1er juillet
Comme je pense que nous ne
devons pas avoir de craintes de voir de sitôt épuisés nos houillères, je
crois très contraire de voir rétablir un droit d'exportation, et certainement,
je ne voudrais pas dans ceci imiter l'exemple de l'Angleterre, qui a raison
d'augmenter ses droits d'exportations parce qu'elle aura encore des grands
avantages sur nous, et pourra nonobstant cela, lutter avec
J'aurais désiré voir adopter
la seconde partie du projet, mais je dois regretter que les informations du
gouvernement à la section centrale laissent trop à désirer pour pouvoir lui
accorder l'autorisation demandée. Certainement, comme l'a dit l'honorable M.
Delehaye, il faudrait que les matières premières pour nos fabriques soient
également soulagées par des droits modérées de navigation intérieure ; mais je
crois qu'il n'y a pas de périls en la demeure d'attendre un an, parce que Gand
pour ses besoins de coton, sucre, etc., les tire presque tous par les arrivages
directs à Anvers, ou si elle fait des achats en Angleterre ou au Havre, ses
importations se font principalement par le port d'Ostende, où il y a maintenant
une navigation régulière à vapeur par pavillon belge. Cependant si M. le
ministre pouvait nous donner quelques renseignements exacts sur les arrivages
par le canal de Terneuse, je ne serais pas éloigné
d'autoriser le gouvernement à faire quelques réductions par cette voie sur les
matières premières.
Mais je crois pouvoir dire,
que si, en 1840 et 1841 les négociants de Gand ont reçu directement des navires
d'Amérique avec des cotons et de
On a aussi parlé de ce que
la navigation à vapeur s'alimente de houille étrangère ; mais je dirai que
comme les houilles belges reviennent trop cher à Anvers, à cause des trop forts
péages des canaux. Il est à espérer qu'on voudra, dans le projet de loi, comprendre
les houilles pour alimenter cette navigation, et si alors on peut acheter à
aussi bon compte que les houilles étrangères, soyez persuadé que la société anversoise est assez nationale
pour employer de préférence des produits belges.
M. de Mérode. - La faculté que demande
le gouvernement ne doit être exercée qu'autant qu'elle ne portera ni
directement ni indirectement aucun préjudice aux intérêts du trésor public. Il
ne peut donc être question de réduire les droits de navigation que pour les
charbons que l'on essaierait d'exporter en Hollande ; car les objets qui
concernent le second paragraphe ne seront dégrevés de frais de transport qu'en
nuisant au revenu de l'Etat. Or, il y a un moment, l'honorable M. d'Hoffschmidt
vient de vous rappeler les sommes énormes que coûtera encore le chemin de fer
vers
Je
ne voterai donc que pour le premier paragraphe du projet.
M. le
ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je dois répondre à l'honorable M. Osy, qui a parlé
du canal de Terneuzen. Il faut distinguer entre la navigation intérieure et la
navigation maritime. Pour la navigation maritime, nous avons soutenu qu'aucun
péage n'est dû.
Il résulte de là que pour
les laines qui viennent par mer les navires ont payé 1 fl. 50 pour la partie
qu'on emprunte à l'Escaut. Ils se dirigent sur Gand, après avoir payé le droit
que perçoit, indûment selon nous,
- La clôture est mise aux
voix et adoptée.
La chambre passe au § 1er de
l'art. unique du projet.
M. Delehaye. - Le gouvernement a
proposé un n° 2 dont la section centrale propose la suppression. Je suppose
qu'il le maintient. Sans doute il ne faut pas accorder des avantages aux
produits exotiques qui sont en concurrence avec les nôtres, par exemple, aux
laines dans l'intérêt de notre industrie, aux huiles de baleines dans l'intérêt
de notre industrie et de l'hygiène publique. Mais pour les cotons, par exemple,
que nous faisons venir de France ou d'Angleterre et pour lesquels nous avons
des frais de commission, de chargement et de déchargement considérables, il est
certain que, dans l'intérêt de notre commerce, il faut accorder une réduction
sur les péages.
Je dois ajouter un mot sur
ce qu'a dit M. le ministre relativement au canal de Terneuzen. Je pense qu'il
considère comme fondée la réclamation du commerce de Gand, et que le gouvernement
persiste dans son opinion à ce sujet.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Assurément.
M. Delehaye. – Fort bien.
M.
Dumortier. -
Mon honorable collègue est d'accord avec moi, qu'il n'y aurait aucun avantage à
accorder des facilités pour réduire les droits sur les laines et sur l'huile de
baleine. Mais, dit-il, il faut qu'on puisse accorder des facilités pour les
cotons. Ma réponse sera facile. Par quelle voie les cotons arrivent-ils à
Gand ? Par Anvers, ou par le canal de Terneuzen. Par Anvers, il n'y a pas de
droits ; ainsi il n'y a rien à rendre. Par le canal de Terneuzen, il n'y a pas
de droits ; ainsi il n'y a rien à rendre. La disposition du projet ne
peut donc pas s'appliquer à cet article.
Si quelques balles de coton
arrivent dans le pays par une autre voie, si dix ou douze balles de coton se
trouvent à bord d'un navire, faut-il que, pour cela, le gouvernement soit
autorisé à réduire les péages ? Evidemment non. Un dégrèvement ne peut avoir
lieu que pour un chargement complet.
L'honorable membre reconnaît
lui-même que pour les laines et pour l'huile de baleine, il n'y a pas lieu à
appliquer, la disposition. Pour le surplus, son système ne tient pas.
M. le
ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il faut mettre l'article aux voix par paragraphe.
M. le
président. - En ce cas, je vais mettre aux voix le 1er § ; il est ainsi
conçu :
« Article
unique. Le gouvernement est autorisé à réduire les péages des canaux et
rivières, perçus au profit de l'Etat :
« 1°
Sur les productions du sol ou de l'industrie qui sont exportées. »
M. Osy. - Je demanderai à M. le
ministre de l'intérieur s'il comprend dans sa proposition les charbons qui
seront employés par les bateaux à vapeur naviguant entre Anvers et Londres ?
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Ces charbons peuvent être considérés comme des charbons
exportés, puisqu'on les consomme dans le trajet entre Anvers et Londres. C'est
là une véritable exportation.
- Le § est adopté.
M. le président. -. - Le § 2 est ainsi conçu
:
« 2° Sur les matières
premières exotiques servant à l'industrie nationale. "
M. Cogels. - Messieurs, j'adopterai
le projet du gouvernement, parce que je crois qu'effectivement il sera très
utile aux intérêts de notre industrie d'accorder des réductions sur les péages,
dans plusieurs circonstances qu'il serait difficile de préciser en ce moment ;
je pense d'ailleurs que le gouvernement n'aura aucun intérêt à abuser de cette
faculté.
Quant aux observations que
vous a présentées tout à l'heure l'honorable M. Delehaye, je crois devoir
rectifier quelques erreurs qu'il a commises en parlant des cotons. Il vous a
dit que nous ne pouvions pas les aller chercher maintenant aux lieux de
production parce que nous n'avions pas de droits différentiels. Messieurs, les
droits différentiels n'exerceraient aucune influence sur' les cotons par la
raison bien simple, qu'ils ne sont soumis qu'à un droit assez insignifiant. Les
droits différentiels seraient plutôt nuisibles que favorables dans cette
circonstance.
Messieurs, les cotons nous
arrivent généralement des lieux de production ; ils nous viennent des
Etats-Unis par cargaisons entières, et si nos fabricants les ont quelquefois
été chercher dans les entrepôts d'Europe, c'est parce que cela était favorable
à leurs intérêts ; c'est que, par suite d'opérations imprudentes de la part des
négociants des Etats-Unis, il est arrivé, après la crise de 1837, que les
cotons ont été souvent à meilleur marché au Havre et à Liverpool que sur les
lieux de production même.
Lorsque j'ai demandé la
parole en premier lieu, c'était pour répondre au vœu émis par un de mes
honorables collègues qui siège à côté de moi. II a émis le vœu que votre
section centrale s'occupât de l'examen du projet de loi sur les sucres pendant
la vacance de la chambre, pour qu'elle fût en état de présenter son rapport à
la rentrée.
Messieurs, la section
centrale s'est occupée de cette question très grave avec toute l'activité, mais
aussi avec toute la maturité qu'elle réclamait. Car vous concevez qu'il y a ici
plusieurs intérêts fort difficiles à concilier. Je crois devoir dire à la
chambre qu'aujourd'hui encore, elle s'en est occupée aussi longtemps qu'elle
l'a pu ; qu'elle s'en occupera encore demain, el qu'il est probable et même
presque certain qu'à la rentrée de la chambre, l'honorable M. Mercier pourra vous présenter son rapport.
M. Delehaye. - Messieurs, je dois
répondre deux mots à ce qu'a dit l'honorable M. Cogels. En parlant de
l'importation des cotons, je n'ai seulement pas eu en vue la ville de Gand,
mais j'ai pensé que du moment où le gouvernement l'avait comprise dans le
projet, il fallait que la mesure fût applicable aux quelques autres localités
qui reçoivent des cotons.
Maintenant, quant aux lieux
de provenance, je sais qu'une partie des cotons employés à Gand ont été achetés
sur les marchés français, et principalement au Havre, où de fortes quantités
ont été introduites.
Messieurs, ce n'est pas le
moment de nous occuper des droits différentiels. Je sais que ces droits ne sont
pas applicables pour le moment aux cotons ; mais je crois que si vous aviez
établi plus tôt des droits différentiels, vous auriez pu vous créer une marine
marchande qui nous procurerait aujourd'hui à plus bas frais les matières
premières dont notre industrie a besoin.
- Le 2° est mis aux voix et
adopté.
M. le
président. -. - Le dernier § est ainsi conçu :
« Les pouvoirs qui
résultent de cette disposition cesseront (au 31 décembre 1842), s'ils ne sont
renouvelés avant cette époque, et, en cas de non-renouvellement, les anciens
tarifs reprendront leur cours de plein droit, à la même époque, quand même
aucun terme n'aurait été indiqué dans les mesures prises par le
gouvernement. »
La section centrale propose
de substituer à la date du 31 décembre 1842 celle du 31 mars 1843.
M. le ministre de l'intérieur a
proposé la date du 1er juillet 1843.
M. Osy a
déposé un amendement par lequel il propose la date du 31 décembre 1843.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je me rallie à l'amendement de l'honorable M. Osy. Je
dois reconnaître la justesse de ses observations. Le 1er juillet est une époque
assez mal choisie l'année prochaine, où la session devra probablement, à cause
des élections, être close en avril.
M. Dumortier. - Je renouvellerai
l'observation que j'ai faite tout à l'heure. Si vous admettez la date du 31
décembre, vous serez dans l'impossibilité de rien décider pour cette époque.
Vous vous réunissez le 15
novembre ; jusqu'au 31 décembre vous n'avez que six semaines, et dans ces six
semaines, vous devez vérifier les pouvoirs, voter l'adresse, discuter les
budgets. Quand donc aurez-vous le temps de discuter une pareille question ?
C'est dire à l'avance que vous ne la discuterez pas.
M. Coghen. – Messieurs, la section
centrale avait proposé la date du 31 mars ; mais je crois que, dans l'intérêt
de l’expérience à faire, il convient de proroger le délai et d'adopter la date
du 31 décembre.
Cette année nous allons
avoir le chômage des canaux, et pendant ce temps, il n'y aura pas d'essai
possible. Viendra ensuite l'hiver, et jusqu'au mois de mars la navigation sera
interrompue. Nous n'aurons donc pas eu d'essai.
D'un autre côté, un
honorable membre nous a fait observer qu'il y aurait peut-être impossibilité de
discuter avant le premier juillet sur l'effet de la nouvelle loi, parce que la
session devra se terminer de bonne heure, à cause des élections.
Si, au contraire, nous
adoptons la date du 31 décembre, nous aurons l'expérience acquise pendant 18
mois, et nous pourrons nous prononcer avec maturité sur le
projet à intervenir.
M. Osy. - Messieurs, je dois
ajouter à ce que vient de dire l'honorable M. Coghen que, si au 31 décembre
nous n'avions pas voté une nouvelle loi, il n'y aurait pas grand mal, parce que
certainement pendant le mois de janvier, on pourrait la discuter, Il n'y
aurait, d'ailleurs, aucun inconvénient à ce que les anciens
tarifs fussent rétablis pendant quelque temps, parce que, à cette époque, il
n'y a pas de navigation.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Dire le 31 décembre 1843, c'est dire le 1er avril 1844.
Car nous avons trois mois d'hiver pendant lesquels il n'y a pas de navigation.
- La date du 31 décembre 1843
est mise aux voix ; elle est adoptée.
Le paragraphe,
ainsi que l'ensemble de l'article, sont adoptés.
Vote sur l’ensemble du projet de loi
Il est procédé au vote par appel
nominal sur l'ensemble du projet.
58 membres
prennent part au vote.
54 adoptent le
projet.
4 s'abstiennent.
Ont voté pour le
projet :
MM. de
Se sont abstenus : MM.
Doignon, Dumortier, Eloy de Burdinne et Orts.
MM. les membres qui se sont
abstenus sont appelés à faire connaître les motifs de leur abstention.
M. Doignon. - Messieurs, je voulais
bien de la première disposition qui a été adoptée à l'unanimité par la section
centrale, mais je ne pouvais donner mon assentiment à la deuxième disposition
qui a été rejetée par la même section.
M. Dumortier. - J'ai déclaré que je ne
m'opposerais pas au 1er § relatif à l'exportation de nos houilles ; quant au
2ème § on n'a pas dit quelles seraient les marchandises venant de l'étranger
que l'on pourrait introduire par chargements complets, et comme il ne s'agit
pas de donner l'autorisation pour 1/8, pour 1/16, pour 1/32 de chargement, j'ai
cru que la mesure était absolument impossible à exécuter. Or, comme je n'ai pas
l'habitude de voter des impossibilités, je me suis abstenu.
M. Eloy de
Burdinne. - Je
me suis abstenu par les mêmes motifs que l'honorable M. Dumortier. J'ajouterai
toujours que je suis très disposé à voter des réductions d'impôt lorsque la
situation du trésor le permet, mais je ne pense pas qu'il en soit ainsi dans ce
moment.
M. Orts. -Je me suis abstenu parce que je n'ai pas pu assister à la
discussion.
PROJET DE
LOI CONCERNANT L'IMPORTATION DU BETAIL ÉTRANGER
M. le président. -. - L'ordre du jour appelle
la discussion du projet de loi concernant le bétail. L'article unique de ce
projet est ainsi conçu :
« La loi du 31 décembre 1835
sur le bétail (Journal officiel, n°
2) est rendue applicable à la partie de la frontière de la province de Liége
vers le duché de Limbourg, qui s'étend de
- Personne ne demandant la parole,
il est procédé au vote par appel nominal sur ce projet. .
56 membres
prennent part au vote.
48 adoptent.
8 rejettent.
En conséquence le projet est
adopté.
Ont voté l'adoption : MM. de
Ont voté le rejet : MM.
Delfosse, Fleussu, Pirmez, Raikem, Raymaeckers, Sigart, Troye et de Behr.
PROJET DE LOI ANNULANT
M. le ministre de
la justice (M. Van Volxem) - Messieurs, le conseil provincial du Hainaut, dans sa
dernière session, avait pris une résolution au sujet de la sonnerie des
cloches ; le Roi, usant du droit qui lui est conféré, a suspendu indéfiniment
l'exécution de cette résolution, parce que le gouvernement a pensé que le
conseil provincial était sorti de ses attributions. Aux termes de la loi
provinciale, un projet de loi devrait être présenté à cet égard dans la
première session des chambres. C'est ce projet que le Roi m'a chargé de vous
apporter, je vais vous en donner lecture.
- M. le ministre donne
lecture de l'arrêté royal qui l'autorise à présenter ce projet et de l'article
unique du projet lui-même, qui est ainsi conçu :
« La
délibération du conseil provincial du Hainaut, en date du 15 juillet 1841,
relative à la sonnerie des cloches, est annulée. »
La chambre
ordonne l'impression et la distribution du projet et le renvoie à l'examen des
sections.
M. le
président. - La chambre, est-elle d'avis de se réunir demain.
Plusieurs membres. - Non, non ;
l'ajournement.
M. le
ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il me paraît être dans les intentions de la chambre
de cesser au moins momentanément ses travaux ; il faudra alors se contenter
d'un ajournement indéfini. Nous ne savons pas si le sénat ne nous renverra pas,
avec des amendements, l'un ou l'autre des projets urgents que nous lui avons
transmis ; en deuxième lieu, vous n'ignorez pas, messieurs, quelle est la question
qui inquiète en ce moment le gouvernement et le pays ; nous ne pouvons donc pas
nous prononcer en ce moment sur la durée de l'ajournement, mais le gouvernement
fer tout ce qui lui sera possible pour faire cesser au plus tôt toute
incertitude à cet égard.
- La chambre s'ajourne
indéfiniment.
La
séance est levée à 5 heures et demie.