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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 2 février 1844

(Moniteur belge n°34, du 3 février 1844)

(Présidence de M. Liedts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Huveners procède à l’appel nominal à 3 heures et 1/4.

M. de Renesse lit le procès-verbal de la séance précédente, dont la rédaction est approuvée ;

Pièces adressées à la chambre

M. Huveners présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le conseil communal de Templeuve présente des observations contre le projet de loi sur les tabacs. »

« Mêmes observations de fabricants et débitants de tabacs de Lokeren. »

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée de l’examen du projet.


« Quelques habitants de Walswilden présentent des observations contre le projet de loi sur les céréales. »

« Mêmes observations des cultivateurs de la commune de Meldert. »

- Renvoi à la section centrale chargée de l’examen du projet.


« La dame Vandoorsselaere, maîtresse de la poste aux chevaux à Wetteren, prie la chambre de s’occuper du projet de loi sur la poste aux chevaux. »

« Même demande des sieurs Desmet, maître de poste à Ninove ; Dartevelle, maître de poste à Grandry. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet.


« Le sieur Pierre-Henri Vansoerst, sergent au régiment d’élite, né à Jype (Pays-Bas), prie la chambre de lui accorder la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


M. le ministre de la justice adresse à la chambre douze demandes de naturalisations accompagnées de renseignements.

- Renvoi à la commission des naturalisations.


M. Quetelet fait hommage à la chambre de 102 exemplaires de l’Annuaire de l’académie des sciences et belles-lettres.

- Distribution aux membres de la chambre et dépôt à la bibliothèque.


M. David demande un congé de cinq jours.

- Accordé.

Projet de loi sur la cessation du cours en Belgique, des pièces de monnaie des Pays-Bas, en argent

Rapport de la section centrale

M. Cogels. - J’ai l’honneur de déposer le rapport de la section centrale chargée d’examiner le projet de loi sur la mise hors de circulation en Belgique des pièces de monnaie d’argent du royaume des Pays-Bas.

M. le président. - Ce rapport sera imprimé et distribué.

La discussion en est fixée à lundi.

Je proposerai de fixer aussi à lundi la nomination d’un membre de la commission des finances. C’est à la demande des membres restants de la commission que je fais cette proposition.

- Elle est adoptée.

Rapports sur des pétitions

M. Simons, rapporteur. - « Par pétition datée d’Ecaussines le 3 avril 1843 le sieur Rousseau réclame l’intervention de la chambre pour obtenir le payement de ses frais de route et de séjour en 1839, du chef des fonctions de secrétaire du conseil de milice pour l’arrondissement de Soignies. »

Le pétitionnaire expose qu’en 1839 il a rempli les fonctions de secrétaire du conseil de milice dans l’arrondissement de Soignies ; qu’il s’est adressé, à différentes reprises, à M. le ministre de l’intérieur pour obtenir le payement des frais de route et de séjour, qui lui sont dus de ce chef ; mais que, malgré les réclamations réitérées faites à ce sujet, il n’a pu obtenir jusqu’a ce jour l’objet de sa demande.

Le pétitionnaire, du reste, n’indique pas dans sa pétition, si le département de l’intérieur a formellement décliné la demande, ou bien si ses réclamations sont restées sans réponse.

Dans cet état de choses, votre commission n’a pu apprécier les motifs qui ont pu déterminer M. le ministre à refuser au pétitionnaire le salaire et l’indemnité auxquels les fonctions, qu’il dit avoir remplies, paraissent lui donner droit. Elle n’a pu s’assurer non plus, si, de la part du département de l’intérieur, il y a réellement déni de justice.

En conséquence, pour qu’il soit fait droit à cette demande, s’il y a lieu, ou au moins pour que M. le ministre fasse connaître au réclamant les motifs qui s’opposent à ce que la demande puisse être accueillie, votre commission a l’honneur de vous proposer le renvoi M. le ministre de l’intérieur.

- Adopté.


M. Simons, rapporteur. - « Par pétition datée de Bourseigne, le 6 avril 1843, le sieur Thiry demande que son fils Barthelemy soit libéré du service militaire. »

Le pétitionnaire expose que son fils Barthelemy Joseph, milicien de la classe de 1827, a été incorporée dans la 11ème division (afdeeling) d’infanterie ; il est resté en activité de service dans l’armée hollandaise jusqu’en 1831 ; ce n’est qu’après l’affaire de Louvain qu’il quitta les drapeaux hollandais et retourna dans ses foyers sans jamais avoir été inquiété ni recherche d’aucune autorité.

Son pays venant à manquer de travail il se rendit en France, où manquaient des bras, et il y resta jusqu’en 1842, époque où son père, vieillard de 75 ans, ayant un besoin plus pressant de son assistance, le redemanda.

Arrivé dans ses foyers, il fut arrêté le 2 juillet 1842 et reconduit à son régiment, où il figurait comme retardataire, ayant été rayé comme tel du registre matriculé, suivant décision ministérielle du 20 janvier 1840.

Par une autre disposition ministérielle du 17 août 1842, le susnommé fut incorporé parmi les volontaires du corps, pour le terme de 5 ans, en vertu de l’article 168 de la loi du 18 janvier 1817.

C’est de cette dernière disposition que le pétitionnaire se plaint. Il soutient que l’article 168 précité ne pouvait pas être rendu applicable au fait de son fils, attendu qu’en quittant le drapeau néerlandais, après la bataille de Louvain, il n’a fait que ce que tout bon Belge a fait à cette époque, et, par suite, d’après lui, il ne serait passible d’aucune pénalité.

Voire commission n’a pu partager cette manière de voir. En 1831, lorsque le fils Thiry a quitté les drapeaux néerlandais, il n’avait pas encore terminé les cinq années de service que la loi lui impose. Aux termes de la loi sur la matière, il aurait donc dû rejoindre son corps en Belgique, puis y achever le terme du service voulu. Il s’y est soustrait en quittant le pays, et par suite, il a encouru la pénalité comminée par l’art. 168 précité, qui porte :

« Ceux qui, après l’expiration de leur congé ne se seraient point rendus à leurs corps, seront mis à la disposition du département de la guerre, pour être employés au service de l’armée, etc. »

Votre commission est donc d’avis qu’il a été fait une juste application de la loi et que, sous ce rapport le pétitionnaire n’a aucun juste motif de se plaindre de la disposition ministérielle, dont il demande la révocation.

Toutefois, vu les circonstances extraordinaires dans lesquelles le fils du pétitionnaire s’est trouvé à la suite de la révolution, et en égard à la bonne foi dans laquelle il paraît avoir versé, qu’en quittant l’armée néerlandaise il se trouvait libéré du service militaire ;

Ayant en outre égard à la position malheureuse du pétitionnaire, qui est âgé de 75 ans, et qui n’a que ce seul fils pour soutien dans ses vieux jours, votre commission a cru devoir vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la guerre, afin de se mettre à même de pouvoir mitiger, dans la circonstance exceptionnelle dont il s’agit, la rigueur de la décision, en vertu de laquelle ce militaire a été de nouveau incorporé en 1842, pour un terme de 5 ans.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Simons, rapporteur. - « Par pétition datée de S-Trond, le 24 mars 1843, le sieur Van Wenkelhuisen réclame l’intervention de la chambre pour que son fils Gérard, milicien de la levée de 1841, obtienne un congé illimité. »

Le pétitionnaire expose que sa famille ne se compose que de deux fils, savoir : Denis, milicien de 1835, et Gérard, qui appartient à la classe de 1841. Le premier nommé a été incorporé dans le 7ème régiment de ligne, par suite d’un engagement volontaire qu’il avait contracté ; il a ensuite déserté ses drapeaux pour aller en Alger, et après son retour, il a été condamné à 6 mois de détention.

Dans l’intervalle, le second fils, milicien de 1841, ayant obtenu au tirage un numéro passible de service, a été également appelé sous les drapeaux.

Bien que, d’après la loi, il ne puisse régulièrement être appelé au service que la moitié des fils de chaque famille ; cependant, dans le cas particulier qui nous occupe, l’incorporation des deux fils ne présente aucune illégalité, attendu que l’état de désertion dans lequel se trouvait le fils aîné, a dû nécessairement priver le fils puîné du bénéfice de l’exception à laquelle il aurait nécessairement eu droit sans cette circonstance.

La loi a donc reçu une juste application et, sous ce rapport, l’incorporation des deux fils dont se compose cette famille est à l’abri de toute critique. Aussi, votre commission n’aurait pas hésité à vous proposer l’ordre du jour, si les circonstances malheureuses précitées et la position déplorable du père, qui perd dans la personne de son fils puîné l’unique soutien dans ses vieux jours, n’étaient de nature à faire fléchir la rigueur de la loi.

Le frère aîné qui, par la désertion, a privé son puîné du bénéfice de l’exemption, se présente pour remplir le terme de service auquel ce dernier est encore assujetti. Il réparera ainsi le tort que par son fait il a fait à celui-ci et conservera à son père sexagénaire son unique soutien.

C’est dans la vue de mettre le gouvernement à même de pouvoir accueillir cette demande, pour autant que l’intérêt de service le comporte, que votre commission a l’honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. Simons, rapporteur. - Par pétition datée d’Avins, le 11 mars 1843, le sieur Brouxhon demande que son fils mineur, Charles, qui s’est engagé au service militaire sans le consentement de ses parents, soit renvoyé dans sa famille. »

Le pétitionnaire se plaint de ce que son fils Charles Alexandre se serait engagé comme volontaire, sans le consentement de ses parents, étant encore mineur et par suite incapable de prendre un engagement de cette nature sans l’assentiment du père.

Votre commission n’a pu vérifier si à l’époque de cet engagement volontaire, le fils n’avait pas encore l’âge requis par l’art. 31 de la loi du 8 janvier 1817.

Mais, comme depuis cet engagement, qui a eu lieu en 1839, cinq années se sont écoulées, sans que le pétitionnaire ait réclamé ; d’où l’on peut raisonnablement conclure qu’il y a eu au moins un consentement tacite de sa part ; comme d’ailleurs ce fils a maintenant atteint sa majorité et par suite qu’il est capable de disposer librement de sa personne ; qu’il a acquis depuis son incorporation une certaine position dans l’armée (il a obtenu le grade de sergent fourier) qui ne peut lui être enlevée malgré lui, votre commission a cru devoir vous proposer l’ordre du jour sur cette demande.

- Adopté.


M. Simons, rapporteur. - « Par pétition datée de Paris, le 5 mars 1843, le sieur Valtier, ancien officier au service de la Belgique, demande que la médaille qui lui a été donnée le 20 octobre 1830, par le général Van Halen, soit reconnue par le gouvernement belge comme un ordre militaire. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Simons, rapporteur. - « Par pétition datée de Habay-la-Vieille, le 4 avril, le sieur Bourgeois, ex-sous-officier, demande d’être autorisé à porter la croix d’ancienneté de deuxième classe. »

Ordre du jour.

- Adopté.


M. Simons, rapporteur. - « Par pétition datée de Dinant, le 21 mars 1843, le sieur Claise, disciplinaire au corps de discipline, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir son congé du service militaire. »

- Ordre du jour.

Adopté.


M. de Roo, rapporteur. - « Par pétition datée de Charleroy, le 23 octobre 1843, plusieurs habitants du faubourg de Charleroy demandent que toutes les formalités prescrites par la loi soient observées dans l’instruction de la requête qu’ils ont présentée pour obtenir que le faubourg de Charleroy soit séparé de la ville.

La pétition a pour objet d’obtenir la séparation de la section dite du faubourg d’avec la ville de Charleroy. Elle est signée par 325 chefs de famille. La nouvelle commune porterait le nom de Sainte-Barbe.

Par un second mémoire, ils demandent que l’instruction se fasse conformément à l’art. 83 de la loi provinciale, et que, d’après cet article, le conseil soit consulté et non la députation.

La commission propose le renvoi à M. le ministre de l’intérieur.

- Adopté.


M. de Roo, rapporteur. - « Par pétition datée de Gonrieux, le 24 mars 1843, le sieur Martelleur et la veuve Gosset réclament l’intervention de la chambre pour obtenir le remboursement du montant des prestations militaires qu’ils ont fournies de 1813 à 1816, en acquit de la commune de Gonrieux. »

Cette pétition est accompagnée d’une décision de l’administration communale, ainsi que d’une autre de la députation permanente du conseil provincial de Namur et du ministre de l’intérieur, qui rejettent la demande des pétitionnaires, pour la raison que les prestations dont s’agit n’ont été fournies qu’à titre de contingent par les habitants de la commune, conformément à un rôle de répartition générale et régulière, qu’ainsi ils n’ont fait que s’acquitter d’une charge qui leur a été imposée, comme à tout autre habitant de la commune.

La commission a pensé qu’il serait inutile de retourner la pétition à M. le ministre de l’intérieur, qui y a déjà statué et que le cas est identiquement le même ; elle propose l’ordre du jour.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. de Roo, rapporteur. - « Le conseil provincial du Hainaut demande l’intervention de la chambre pour obtenir le remboursement des sommes avancées par la province du chef de transports militaires. »

Le conseil prétend que généralement toutes les dépenses relatives à l’année sont une charge de l’Etat, et que les frais des convois militaires font partie de ces dépenses, parmi lesquels doivent figurer ceux résultant de la différence qui existe entre le prix réel payé pour les transports militaires pour la province et celui résultant de l’indemnité reçue conformément au tarif fixé par les règlements pour cet objet. Ils soutiennent que l’arrêté du 3 août 1814 est aboli par l’art. 112 de la Constitution.

C’est de ce chef qu’il réclame du gouvernement le remboursement des sommes avancées d’après ses budgets de 1837 et 1838.

La commission propose le renvoi au ministre de la guerre.

M. Osy. - L’année dernière nous avons eu à la commission des finances plusieurs réclamations de ce genre ; elles ont été non pas rejetées, mais ajournées. M. le ministre de la guerre avait annoncé la présentation d’un projet de loi de crédit global, destiné à liquider toutes ces créances, dont plusieurs datent du siège d’Anvers. Puisque M. le ministre de la guerre n’est pas présent, je demanderai que la pétition lui soit renvoyée avec demande d’explications.

Adopté.


M. de Roo, rapporteur. - « Le conseil provincial du Hainaut demande une modification à la loi électorale, concernant la répartition des représentants et des sénateurs entre les divers provinces. »

Il est joint à cette pétition un tableau de répartition d’après lequel il y aurait 103 représentants et 51 sénateurs ; mais ce tableau, contenant la population de chaque province, n’est aucunement conforme aux documents tableaux statistiques qui nous ont été communiqués par le ministère. C’est ainsi que le Brabant y figure pour 640,050 âmes tandis qu’il n’en a que 634,804. La Flandre occidentale s’y trouve portée à 650,809 âmes, tandis qu’elle en a 634,379. Le Hainaut s’y trouve porté pour 668,442, tandis qu’il n’en a que 667,292, et ainsi de suite.

Conclusion : Renvoi au ministre de l’intérieur et dépôt au bureau des renseignements.

M. Sigart. - A l’occasion de cette pétition, et tout en appuyant les conclusions de la commission, je rappellerai à la chambre que j’ai eu l’honneur de lui soumettre, dans le temps, des observations analogues à celles du conseil provincial. M. le ministre de l’intérieur avait réclamé quelque temps pour les examiner et y répondre ; je lui demanderai s’il ne trouve pas que c’est le moment de tenir sa promesse.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Cette pétition soulève la question de savoir s’il faut faire un dénombrement officiel de la Belgique ; il n’en a pas été fait depuis qu’elle forme un Etat officiel. C’est une question que le gouvernement examine ; elle ne se rattache pas seulement à la répartition des sénateurs et des représentants, mais encore à l’exécution de plusieurs lois, et notamment des lois fiscales.

Il y a sans doute beaucoup à dire en faveur d’un dénombrement officiel du pays ; il est même étrange qu’il n’y ait pas eu de dénombrement officiel du pays depuis qu’il forme un Etat indépendant.

Mais je ne dois pas cacher que c’est une opération qui coûtera une somme assez considérable de 60,000 à 100,000 fr. Ce serait un crédit extraordinaire à demander à la chambre.


M. de Roo, rapporteur. - « Les conseils communaux d’Oyghem, Coolscamp, Meulebeke, Ardoye, Culleghem, Cruyshautem, Grammont, Oostroosbee, Moorseele, Aersele, Waeken, Wurteghem, Vive-St.-Bavon, Vive-St.-Eloy, Zulte, Ingelmunster, Machelen et Deynze, demandent des mesure de protection pour l’industrie linière. »

Toutes ces pétitions exposent l’urgence de venir au secours de l’industrie linière, vu que la misère est parvenue à un degré d’intensité effrayante dans les Flandres, et qu’elle n’a d’autre cause que la décadence de l’ancienne industrie linière.

Ils allèguent que les bureaux de bienfaisance sont partout obérés, et qu’on est forcé de tolérer la mendicité ; aussi les délits augmentent d’une manière extraordinaire, notamment les vols d’objets nécessaires à la vie.

Ils indiquent trois moyens pour obvier au mal qui les accable et que j’ai eu l’honneur de développer lors de la discussion sur l’allocation faite à l’industrie linière dans le budget de l’intérieur, savoir :

Le premier, l’union douanière avec la France.

Le deuxième, la majoration des droits sur les produits similaires anglais.

Le troisième, c’est l’établissement des droits à la sortie des lins bruts.

Ils prétendent que si on avait établi des droits protecteurs à la sortie de cette matière première depuis longtemps, les tisserands ne seraient pas tombés dans le dénuement où ils se trouvent actuellement.

Et, quoique la baisse sur les lins soit actuellement réalisée, elle ne change rien à la position relative car si les tisserands achètent le lin à 20 p. c. meilleur marché, les fabricants l’achètent au même taux, et les droits dont ils sont protégés ne continuent pas moins de nous atteindre. Il en serait tout autre, d’une mesure fiscale, l’industrie serait alors placée dans une position exceptionnelle.

La commission a pensé qu’il était bon d’appuyer ces pétitions, toutes intéressantes et pleines de vérité, et de les envoyer à M. le ministre de l’intérieur et à la commission de l’industrie.


M. de Roo, rapporteur. - « Par pétition datée de Lokeren, le 27 septembre 1843, plusieurs fariniers de la ville de Lokeren et des environs demandent que le blé sarrasin soit prohibé à la sortie ou frappé de droits protecteurs. »

Renvoi au ministre de l’intérieur.

Ils motivent leur pétition, de ce que nos voisins en font opérer l’accaparement : qu’elle est indispensable à la commission de la classe ouvrière des villes et des campagnes ; qu’elle est encore nécessaire pour la fabrication du papier des tisserands qui ne peuvent la remplacer par aucune autre matière.

- Les conclusions de la commission sont adoptées.


M. de Roo, rapporteur. - « Par pétition en date du 2 novembre 1843, le conseil communal de Martelange demande que les habitants de cette commune soient dispensés de payer le montant de leurs contributions, à partir de la conclusion du traité du 19 avril 1839. »

Renvoi au ministre des finances.

- Adopté.


M. de Roo, rapporteur. - « Par pétition en date du 4 décembre 1843, les cultivateurs de Neuve-Eglise demandent l’annulation de l’arrêté royal qui autorise le libre transit des bestiaux par Anvers et par le chemin de fer vers la France.

Renvoi au ministre des finances avec demande d’explications.

- Adopté.

Projet de loi augmentant le traitements des membres de l'ordre judiciaire

Motion d'ordre

M. de Garcia (pour une motion d’ordre). - A la séance d’hier, j’avais demandé la mise à l’ordre du jour du projet de loi relatif à l’augmentation des traitements des membres de l’ordre judiciaire. On a fait observer que M. le ministre de la justice n’était pas présent. Comme il assiste à cette séance, je lui demanderai s’il n’a pas d’objections à faire contre la mise à l’ordre du jour. J’insiste d’autant plus pour que ce projet de loi soit mis en discussion qu’il est présenté depuis longtemps. Si les finances de l’Etat ne permettent pas l’exécution immédiate de la loi, on pourra, par une disposition finale, stipuler qu’elle ne sera exécutée que quand nos finances nous le permettront.

Je l’ai dit hier, et je le répète, il est pénible de voir, alors que nous n’avons rien à l’ordre du jour, différer un projet de loi qui constitue une promesse faite aux membres de l’ordre judiciaire et qui est réclamé par un grand nombre de membres.

Je demande donc si M. le ministre de la justice s’oppose à la mise à l’ordre du jour pour lundi.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) - Personne plus que moi ne désire la mise en discussion et l’adoption du projet de loi relatif à l’augmentation des traitements des membres de l’ordre judiciaire, et destiné à mettre ces traitements en rapport avec l’importance des fonctions des membres de l’ordre judiciaire.

Mais je demanderai à la chambre si, dans l’intérêt même du projet de loi, il ne conviendrait pas d’attendre, pour le discuter, le vote des lois de finances, qui ont été présentées ? Mes collègues et moi pensons qu’il doit en être ainsi.

Du reste, je suis prêt et depuis longtemps à soutenir la discussion de ce projet de loi, dont j’appelle l’adoption de tous mes vœux.

M. Lys. - Je ne vois aucune difficulté à la mise à l’ordre du jour pour lundi. Peu importe que les lois des finances ne soient pas votées, puisqu’on pourrait stipuler dans la loi qu’elle ne sera mise à exécution qu’à dater du 1er janvier prochain.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) - Si la chambre pensait que ce projet de loi peut être discuté avant les lois des finances, je dois faire observer, non pas que je ne suis pas prêt, car je le suis depuis longtemps, mais que je ne pourrai assister aux séances lundi et mardi, attendu que le sénat fixera probablement à lundi, la discussion générale, et à mardi la discussion sur les articles du budget de la justice.

M. de Saegher. - Messieurs, j’ai demandé la parole pour appuyer la proposition de l’honorable M. de Garcia. Tout le monde est d’accord que la magistrature, afin de pouvoir remplir la haute mission qui lui est confiée....

Plusieurs membres. - On est d’accord.

M. de Saegher. - Si l’on est d’accord, je renonce à la parole.

M. Desmet. - Il me paraît cependant que l’on devrait peser mûrement les paroles que vient de faire entendre M. le ministre de la justice. Dans un moment où le déficit est certain, on doit y penser à deux fois avant d’augmenter les dépenses, alors surtout que nous ne savons pas si les lois de finances seront adoptées. Je crois, quant à moi qu’il faut discuter avant tout ces dernières.

Je ferai d’ailleurs observer que nous ne sommes pas en nombre suffisant pour délibérer ; que dés lors nous ne pouvons prendre en ce moment une décision sur une proposition aussi importante.

M. de Saegher. - J’avais demandé la parole pour appuyer la motion de l’honorable M. de Garcia. Comme je le disais tout à l’heure tout le monde est d’accord que la magistrature, afin de pouvoir remplir dignement la haute mission qui lui est confiée, a besoin d’être entourée de beaucoup de considération.

Or, messieurs, il est incontestable que l’état d’incertitude où se trouve la magistrature, par suite de la proposition de l’honorable M. Verhaegen, faite il y a plus de sept ans, doit diminuer la dignité, la considération dont elle doit être entourée.

En effet, depuis sept ans, à chaque session et à différentes reprises on a agité devant vous la question de savoir si l’on discuterait, oui ou non, le projet de loi relatif à l’augmentation des traitements de la magistrature ; les uns parlent en faveur de la magistrature ; les autres soutiennent que l’augmentation des traitements n’est pas nécessaire ; toujours est-il que dans ces débats la magistrature ne peut rien gagner, mais pourrait, au contraire, perdre en considération. Cela est si vrai, messieurs, que déjà des journaux commencent à s’occuper de cette question, au détriment de la magistrature, et qu’il en est qui osent dire que les réclamations de la magistrature ressemblent beaucoup à de la mendicité.

Je dis, messieurs, que tous ces retards, que toutes ces discussions sont contraires à la dignité de la magistrature, et qu’il est temps de prendre une décision définitive.

On dit, messieurs, que l’état de nos finances ne permet pas de songer dans ce moment à ce projet. Mais vous remarquerez que déjà en 1839, la section centrale chargée de l’examen du budget de la justice, vous a proposé de voter ce projet, sauf à fixer une époque ultérieure quelconque pour sa mise en vigueur. On a renouvelé plus de dix fois cette proposition dans cette enceinte. L’essentiel n’est pas de faire jouir immédiatement les magistrats d’une augmentation de traitement ; ce qui importe, c’est que le sort de la magistrature soit définitivement fixé dans l’intérêt de sa dignité. D’ailleurs, la question qui se présente dans ce moment n’est pas de savoir si l’on augmentera les traitements des membres de la magistrature, mais bien de savoir si l’on discutera le projet le plus tôt possible, c’est-à-dire dans le courant de la semaine prochaine.

Ainsi, messieurs, examinons et discutons le projet et si la majorité de cette assemblée trouve que l’état de nos finances ne permet pas d’augmenter les traitements des membres de la magistrature, si elle croit qu’on peut encore, sans injustice, refuser cette augmentation, eh bien, elle rejettera le projet. Quoi qu’il arrive, la décision de la chambre aura toujours ce résultat favorable de délivrer la magistrature d’un état d’incertitude qui est devenu intolérable, parce que, je le répète, il est contraire à la dignité et à la considération qui lui est due.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) - Je le répète, je crois qu’il est préférable d’ajourner la discussion de ce projet, jusqu’après le vote des lois de finances. Je pense que cet ajournement est désirable dans l’intérêt bien entendu de la magistrature. La magistrature ne perdra rien en considération par cet ajournement. Elle est trop haut placée dans l’opinion publique ; elle jouit d’une considération trop méritée pour craindre qu’il y soit porté la moindre atteinte, par un retard que l’état actuel de nos finances justifie, mais dont le motif disparaîtra par le vote des lois qui vous sont proposées.

Messieurs, je crois plaider la cause de la magistrature et soutenir ses véritables intérêts, en demandant que cette discussion soit ajournée jusqu’au moment où nous serons à même, non pas de nous borner à décréter en principe que les traitements seront augmentés, mais de fixer l’époque à laquelle ces augmentations votées se réaliseront et amélioreront, comme la justice l’exige, la position de l’ordre judiciaire.

M. de Garcia. - Tout le monde semble d’accord sur un point, c’est que la magistrature n’est pas rétribuée comme elle devrait l’être. Si l’on pouvait contester ce fait, il suffirait de citer les justices de paix qui n’ont pas reçu l’organisation nouvelle, prescrite par la constitution. La magistrature supérieure à celle-ci a été organisée en 1832. Le vœu de la constitution a été en quelque sorte rempli à son égard. Mais en est-il de même envers les justices de paix ? Evidemment non ; et différer de les faire sortir de la position où elles se trouvent, c’est un véritable déni de justice. La constitution fait un devoir à la législature d’organiser l’ordre judiciaire. Or, je dis que la partie de cet ordre qui concerne les juges de paix n’a pas été organisée, qu’ainsi vous n’avez pas rempli un devoir qui vous était imposé par la constitution.

Messieurs, je concevrais qu’on divisât le projet, qu’on ne s’occupât que d’une partie, et qu’on en ajournât l’autre. Mais je ne conçois pas qu’on ajourne la partie qui concerne les juges de paix. Ces fonctionnaires sont découragés, je ne crains pas de le dire. Vous n’avez pas hésité, lorsqu’il s’est agi d’augmenter leurs nouvelles attributions et leur travail, et elles l’ont été singulièrement par la dernière loi sur la compétence, et vous vous refusez à augmenter leur traitement. Quant à moi, je décline complètement cette manière d’agir qui est aussi inconstitutionnelle qu’injuste. Au surplus, je désirerais aussi que l’on s’occupât de la classe supérieure de la magistrature ; je sais qu’elle n’a pas les traitements que réclame sa positions sociale ; à la vérité, on objecte que l’état de nos finances ne permet pas d’améliorer actuellement sa position. J’en conviens avec M. le ministre et avec tous les adversaires de la mise à l’ordre du jour de la loi dont s’agit, mais rien n’empêche de faire pour l’avenir la position de la magistrature en général par une loi, sauf à laisser au gouvernement, qui doit mettre le dernier sceau à cette mesure, le soin de fixer l’époque où elle recevra ses effets.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) - Ce que vient de dire l’honorable membre, me fait désirer encore plus l’ajournement de la discussion de ce projet, puisqu’il nous menace d’une division du projet. Je pense qu’aucune division ne doit être prononcée et que si tout le monde doit désirer l’augmentation des traitements des juges de paix, le même désir doit se faire sentir, en ce qui concerne les autres membres de l’ordre judiciaire, qui, dans leur position respective ne sont pas mieux traités.

M. le président. - Dès qu’il y a contestation, nous devons être en nombre pour prendre une décision. Or, la chambre n’est plus en nombre.

Ordre des travaux de la chambre

M. le président. - Vous avez chargé le bureau de compléter les commissions auxquelles il pourrait manquer des membres. M. Angillis faisait partie de la section centrale chargée d’examiner le projet de loi relatif à la fabrication des pièces d’or ; le bureau a nommé pour le remplacer M. Cogels.

La continuation du rapport des pétitions pourrait être fixée à mardi. Lundi nous avons à l’ordre du jour le projet relatif à la mise hors de circulation des pièces d’argent des Pays-Bas, et la nomination d’un membre de la commission des finances.

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) - Une commission a été chargée de l’examen du projet de loi interprétatif de l’art. 334 du code pénal. Il serait à désirer qu’elle fît son rapport dans un bref délai. Il y a des personnes qui depuis très longtemps se trouvent sous une prévention qu’on ne peut faire cesser par suite du défaut de la loi interprétative.

M. Maertens. - Je fais partie de cette commission, mais je dois faire remarquer que son honorable président, M. Savart, se trouve retenu chez lui par une indisposition. D’autres membres sont aussi absents ; lorsqu’ils seront présents, la commission reprendra l’examen du projet. Elle s’en est déjà occupée dans plusieurs réunions.

M. le président. - J’ai encore engagé hier les différentes commissions spéciales à examiner leur travail le plus tôt possible. Je viens d’inviter M. le greffier à écrire aux différents membres qui sont absents, pour les prier de se rendre à leur poste. (Très bien !)

M. Cogels. - Je demanderai à quoi en est l’examen du projet de loi interprétatif de l’art. 442 du code de commerce. Il est urgent que cette question soit décidée, car nous restons complètement sans législation en ce qui concerne le dessaisissement en matière de faillites. Il y a une faillite ouverte depuis vingt ans ; il y a eu plusieurs jugements rendus et on ne peut arriver à un résultat parce que la question reste indécise.

M. le président. - Il sera écrit au président de la commission chargée de l’examen de ce projet pour que celle-ci s’en occupe immédiatement.

- La séance est levée à 4 heures et 1/4.