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Chambre des représentants de Belgique
Séance du vendredi 15 mai 1846
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre,
notamment pétition relative aux droits sur les céréales (Delfosse)
2) Projet de loi modifiant
la loi sur les sucres (Loos, Malou, de Renesse, Manilius, Eloy de Burdinne, Osy, Delehaye, Dumortier, Malou)
3) Projet de loi portant le
budget du département de l’intérieur pour l’exercice 1846. Discussion des articles.
a) Service de santé.
Inspection (Orban, de Theux, Dumortier, Orban, de Theux), commissions médicales provinciales (Orban, de Theux, Veydt,
de Theux, de Corswarem, Sigart), encouragements (notamment pour la vaccine) (Dumortier, de Theux, Veydt), académie de médecine (Orban, de Theux)
b) Jeux et constructions de
Spa (de Renesse, Zoude, de Renesse, David), entretien des
monuments ((+Chaudfontaine) de Brouckere, Osy, Malou, de
Garcia, de Brouckere, de
Renesse, de Brouckere, Mast de
Vries, de Renesse, de
Brouckere, de Theux, Lesoinne,
de Brouckere)
c) Construction d’un palais
provincial à Arlon (Osy, de Theux)
et à Liége (palais des princes-évêques) (Delfosse, de Theux, Rogier, de Brouckere, de Theux, de Brouckere, Delfosse, Rogier, Malou, Delfosse,
Malou, (+comptabilité de l’Etat) Rogier,
de Theux, (+comptabilité de l’Etat) Malou,
de Brouckere)
4) Motion d’ordre relative
à l’arrestation, par les autorités prussiennes, d’un officier polonais au
service de la Belgique (Verhaegen, Dechamps)
5) Projet de loi portant le
budget du département de l’intérieur pour 1846. Discussion des articles. Ecole de
médecine vétérinaire. Proposition de commission d’enquête (de
Renesse, Liedts)
(Annales
parlementaires de Belgique, session 1845-1846)
(Présidence de M. Liedts.)
(page 1354) M. de Villegas procède à l'appel nominal à une heure.
M. Huveners lit le procès-verbal
de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.
M. de Villegas présente
l'analyse des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le sieur Roelens, ancien receveur de
l'enregistrement à Poperinghe, prie la chambre de lui faire obtenir la place de
garde-magasin contrôleur du timbre, ou celle de surveillant aux ventes
publiques. »
- Renvoi à la
commission des pétitions.
« Les sieurs
d'Erckenteel frères, fabricants à Liège, demandent que les pâtes d'Italie
soient retranchées de la nomenclature des objets de première nécessité indiqués
dans la loi du 24 septembre 1845 si cette loi qui autorise la libre entrée de
ces denrées jusqu'au 1er juin prochain, devait être renouvelée. "
M. Delfosse. - Je demande le
renvoi de cette pétition à la commission permanente d'industrie avec prière de
faire un prompt rapport.
- Cette proposition
est adoptée.
________________
Par messages en date
des 12,13 et 14 mai, le sénat informe la chambre : 1° Qu'il a adopté le projet
de loi sur la comptabilité de l'Etat ; 2° Qu'il a pris en considération 26
demandes en naturalisation ordinaire.
- Pris pour
notification.
________________
M. Rodenbach informe
la chambre qu'une indisposition l'empêche de prendre part à ses travaux.
- Pris notification.
M.
Loos.
- J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur le projet de loi
modifiant la législation des sucres.
M. le président.
- Ce rapport sera imprimé et distribué.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Messieurs, je demanderai que ce projet de loi soit mis à l'ordre du jour à la
suite des objets qui s'y trouvent déjà portés. Après le budget de l'intérieur,
se trouve le projet de loi relatif au canal de Schipdonck et ensuite le projet
relatif au chemin de fer du Luxembourg. C'est assez dire qu'on aura tout le
temps d'examiner le rapport de la section centrale.
M. de Renesse. - Je prie M. le rapporteur de vouloir lire les
conclusions du rapport.
M. Manilius. - Vous aurez le
rapport dans deux ou trois jours.
M. de Renesse. - Il est important que les intéressés connaissent les
conclusions de la section centrale.
M. Manilius. - J'ai demandé la parole
pour me rallier à la proposition qu'a faite M. le ministre des finances.
Seulement je désire la rectifier un peu ; je demande que la discussion du
projet de loi sur les sucres soit fixée après celle des projets qui se trouvent
portés sur notre bulletin, qu'il soit entendu que ces projets composent les
objets déjà à l'ordre du jour dont a parlé M. le ministre.
M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, je désire aussi que le projet de
loi sur les sucres soit discuté le plus tôt possible. Mais la question est d'un
intérêt majeur et je demande qu'on laisse au moins à tous les membres le temps
de l'étudier, de l'examiner et de l'approfondir. Par ce motif, je demande
qu'avant de fixer le jour de la discussion, on attende que le rapport soit
distribué, pour que les membres puissent l'examiner et se prononcer en
connaissance de cause sur l'ordre du jour. Ce projet, messieurs, est trop
important et dans l'intérêt du trésor, et dans l'intérêt de la classe ouvrière,
et dans l'intérêt de l'industrie du pays. Il doit être mûri, examiné
attentivement, il ne faut rien précipiter.
M. le président.
- D'après la motion de M. le ministre des finances, il s'écoulera encore
plusieurs jours avant que la chambre n'ait à s'occuper de la loi sur les
sucres.
M. Osy. - Messieurs, nous
avons encore quelques jours à employer pour la discussion du budget de
l'intérieur ; le projet de loi relatif au canal de Schipdonck prendra plusieurs
jours ; il en sera de même du projet relatif au chemin de fer du Luxembourg. Je
ne crois pas qu'il y ait des motifs pour ne pas adopter la proposition de M. le
ministre des finances.
Certainement d'ici au
jour de la discussion, on aura tout le temps d'examiner le rapport,
M. Delehaye. - Je ferai une autre observation qui, je pense,
aura quelque influence sur votre décision ; c'est que si ce projet est très
important, il ne faut pas se dissimuler qu'à ce projet se rattachent toutes les
questions d'économie politique les plus majeures ; il ne faut pas perdre de vue
non plus que ces questions ne sont pas neuves pour la chambre, que toutes elles
ont été examinées par la chambre, il y a trois ans, et qu'elles ont été
développées par les partisans de l'industrie agricole, au nombre desquels je me
plais à compter l'honorable M. Eloy de Burdinne, ainsi que par les partisans de
l'industrie nationale, parmi lesquels je me compte.
Ainsi, messieurs, la
question n'est pas nouvelle. Vous aurez, comme on vient de le dire, plusieurs
jours avant d'en entamer la discussion ; vous aurez donc le temps non seulement
de lire le rapport, mais aussi de l'étudier.
Je pense dès lors que
la proposition de M. le ministre des finances doit être accueillie.
M. Dumortier. - Messieurs, le
projet de loi sur les sucres, comme vient de vous le dire l'honorable
préopinant, soulève de très graves questions : mais ce qui fait surtout la
gravité de ce projet, c'est qu'il s'agit ici d'établir des dispositions qui
peuvent être funestes à l'une ou à l'autre des deux industries rivales. Dans
cet état de choses, il va de soi que chacun de nous défendra probablement,
comme on l'a toujours vu, l'intérêt de sa localité.
M. de Tornaco. - L'intérêt national d'abord.
M. Dumortier. - Nous sommes
d'accord. L'intérêt national, nous le défendons tous. C'est notre devoir avant
tout. Mais il s'agit, dans la question des sucres, d'un impôt qui doit apporter
un bénéfice à l'un et un préjudice à l'autre, et dans de pareils cas les
localités ont bien le droit de faire entendre leur voix dans la chambre. Il
faut donc que les intéressés puissent connaître les dispositions que l'on
propose. Or, comment voulez-vous, si vous mettez immédiatement le projet à
l'ordre du jour, que nos commettants puissent connaître le projet qui est
présenté ?
On dépose un rapport, on ne nous donne pas
lecture des dispositions que l'on propose. Le rapport paraît assez
considérable, à en juger par le dossier de M. le rapporteur ; il faudra
probablement assez longtemps pour l'imprimer.
M. le président. - Il faudra deux
jours pour l'impression.
M. Dumortier. - Ce n'est donc que
dans trois jours que la presse pourra le faire connaître aux localités. Comment
voulez-vous qu'il leur reste un temps suffisant pour nous donner des lumières
sur ce projet, si la proposition que l'on vous fait est adoptée ?
Je
pense, quant à moi, qu'il serait plus sage, et c'est l'objet de la motion que
je fais, de voter l'impression et la distribution du rapport, et de ne fixer
qu'ensuite le jour de la discussion. Cette marche, messieurs, ne retardera en
rien les travaux de la chambre, et les intéressés auront le temps de prendre
connaissance du rapport. Je pense d'ailleurs que l'intention de M. le ministre
des finances est que ce projet soit connu des intéressés avant la discussion.
Je demande donc que
le jour de la discussion ne soit fixé qu'après la distribution du rapport,
c'est-à-dire que l'on suive la marche prescrite par le règlement. Je ne crois
pas que dans cette circonstance il y ait lieu de s'en séparer.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Les journaux ont déjà rendu compte du résultat des délibérations de la
section centrale. Acceptant pour un instant ce narré des travaux de la section
centrale, je dis que l'argument de l'honorable M. Dumortier se trouve écarté,
puisque la section centrale n'a pas fait d'amendement aux articles du projet,
sauf le rejet d'une seule disposition. Dès lors les intéressés connaissent le projet,
et ils l'ont si bien prouvé que des deux côtés ils ont réclamé avec vivacité.
Je désire que le
projet soit examiné avec maturité. Lorsque j'ai proposé de le mettre à l'ordre
du jour après les objets qui s'y trouvent déjà, j'ai fait remarquer que, d'après
la nature de ces objets, d'après les discussions que probablement ils
soulèveront, il s'écoulerait un temps suffisant pour qu'on pût examiner
mûrement la loi des sucres. Cependant, pour mieux résoudre encore l'objection,
je proposerai à la chambre de la mettre à l'ordre du jour à la suite des objets
qui s'y trouvent déjà, mais avec la réserve qu'il s'écoulera huit jours au
moins entre la distribution du rapport et la discussion.
Il me semble que
cette proposition ainsi modifiée est de nature à être accueillie par la
chambre.
- La proposition de
M. le ministre des finances, ainsi modifiée, est adoptée.
M. le président. - M. de Renesse
avait demandé qu'on fît connaître les conclusions de la section centrale.
M. Loos. - Messieurs, le
seul changement apporté au projet du gouvernement par la section centrale, est
la suppression de l'article 4. Mais l'ensemble du projet ayant été mis aux
voix, trois membres ont voté contre, deux ont voté pour et deux se sont abstenus.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DU DEPARTEMENT DE
L’INTERIEUR POUR L’EXERCICE 1846
Discussion des articles
Chapitre VII. -
Service de santé
Article premier
« Art. 1er.
Traitement et frais de bureau de l'inspecteur : fr. 9,700. »
M. le président. - D'après le
transfert fait à l'article 2, ce chiffre se trouve réduit de 2,400 fr., ce qui
le porte à 7,300 fr.
- Le chiffre de 7,300
fr. est mis aux voix et adopté.
« Art. 2.
Commissions médicales provinciales : fr. 46,300. »
(page 1355) M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux).
- Messieurs, comme je serai obligé de demander une augmentation à l'article de
l'instruction primaire, je propose ici une diminution de 6,800 fr. : ce qui
réduira le chiffre à 39,300 francs.
M.
Orban, rapporteur. - Je ferai remarquer à la chambre que l'article
premier a été voté avec le chiffre proposé par le gouvernement, tandis qu'il
existe un amendement de la section centrale, qui tend à réduire le chiffre, et
qui a été perdu de vue.
M. le président. - Effectivement,
l'amendement de la section centrale n'a pas été annoncé ; je n'en ai pas parlé,
parce que l'imprimé que j'ai sous les yeux ne semble pas indiquer la réduction
qui a été proposée par la section centrale.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Je ne m'oppose pas à ce que l'on discute
l'amendement de la section centrale.
- La chambre,
consultée, décide que la discussion sera rouverte sur l'article premier.
La parole est à M.
Orban.
M.
Orban, rapporteur. - Messieurs, je demande à la chambre la permission de
lui donner quelques explications sur le chapitre VII tout entier. Le chapitre
VII présente une augmentation de 56,000 fr. sur le chiffre qui a été volé dans
le budget de 1845. La section centrale n'a admis aucune des augmentations qui
constituent cette différence de 45,300 fr. Cependant la décision de la section
centrale ne s'applique pas de la même façon à la somme tout entière ; ainsi
elle a rejeté d'une manière définitive, d'abord l'augmentation du crédit
relatif à l'inspection du service civil de santé ; puis la somme de 7,000 fr.
demandée en plus pour l'académie royale de médecine ; et enfin l'un des littera
de l'article 2 concernant les droits de présence aux examens subis devant les
commissions médicales.
Messieurs, je pense
qu'il entre dans l'intention de la section centrale de maintenir ses
propositions, en ce qui concerne l'inspection du service civil de santé ; la
section centrale a cru que c'était là une création nouvelle, qui n'était
nullement justifiée.
Nous avons une
inspection du service militaire de santé ; mais aussi il existe un service
militaire de santé, des médecins attachés à l'armée, des hôpitaux, des
pharmacies dépendant de ce service ; on conçoit, dès lors, la nécessité d'une
inspection du service militaire de santé ; mais créer une inspection du service
civil de santé, alors qu'il n'existe pas de service civil de santé, c'est créer
une institution tout à fait utile et sans objet.
Une autre objection a
été faite contre l'article premier du chapitre VII ; on a trouvé peu régulier
que M. le ministre de l'intérieur créât des fonctions nouvelles, emportant une
augmentation de dépenses, sans autorisation préalable des chambres. On a pensé
que c'était là un système tout à fait abusif, parce que c'était préjuger
d'avance le vote que les chambres devaient émettre sur le traitement attaché à
ces fonctions, et que c'était exposer le Roi, qui avait signé l'arrêté, à voir
ses actes implicitement abrogés par un vote négatif de la part des chambres.
Messieurs, nous avons
cherché à nous rendre compte de ce que pouvait être l'inspection du service
civil de santé ; nous avons inutilement cherché au Moniteur l'arrêté qui
l'organisait ; depuis lors, je me le suis procuré, et je dois dire que je n'y
ai trouvé que des motifs pour persister dans l'opinion de la section centrale.
En effet, les
attributions de l'inspecteur du service civil de santé, telles qu'elles y sont
définies, sont tout à fait fictives. Ainsi, messieurs, l'inspecteur du service
civil de santé serait chargé de faire des enquêtes relatives aux maladies
épidémiques ou contagieuses qui pourraient éclater dans le pays. Mais, c'est là
l'une des attributions des commissions médicales provinciales et il est évident
qu'elle peut être plus utilement remplie par les commissions provinciales que
par un fonctionnaire siégeant à Bruxelles. Les commissions provinciales sont à
proximité des localités où il y a des enquêtes à faire, tandis que l'inspecteur
de service civil de santé devrait faire des voyages coûteux, et abandonner les
occupations importantes qui doivent le retenir dans la capitale.
La seconde
attribution confiée à l'inspecteur consiste à charger ce fonctionnaire de
donner son avis au ministre de l'intérieur sur toutes les questions médicales
ou d'hygiène publique qui peuvent se présenter. Il n'y a point là de quoi
justifier la création d'une place d'inspecteur du service civil de santé, car
le fonctionnaire auquel on voudrait confier ce soin, en lui donnant un titre
nouveau, en est déjà chargé en qualité de chef de bureau au ministère de l'intérieur,
où il doit traiter toutes les affaires de cette nature.
Ce serait donc, en
quelque sorte, mettre le chef de ce département dans la position de se donner
un avis à soi-même. Il paraît, du reste, rationnel, que si le ministre a besoin
de s'éclairer sur ces matières, il s'adresse, selon la gravité des cas, soit à
l'Académie de médecine, soit aux commissions médicales provinciales, plutôt
qu'à un employé de son département.
Je crois que nous
devons d'autant plus résister à la création de cette charge nouvelle, que l'on
doit y voir l'origine d'autres dépenses qui nous seront proposées plus tard. Il
est évident qu'après avoir constitué l'inspection du service de santé, on
créera d'autres fonctionnaires pour compléter cette nouvelle branche d'administration.
C'est particulièrement pour ce motif que nous nous sommes opposés à cette
dépense nouvelle. Mais la section centrale s'est trouvée dans l'impossibilité
de formuler une proposition formelle sur l'article premier, relatif à cette
dépense, et voici pourquoi :
L'année
dernière le chapitre VII ne consistait qu'en deux articles, l'article premier
relatif au service civil de santé proprement dit, et l'article 2 relatif à
l'académie royale de médecine ; le traitement de l'inspecteur du service civil
de santé qui portait alors le titre de commissaire de ce service, qui
remplissait en réalité les fonctions de chef de bureau au ministère de
l'intérieur ; ce traitement, dis-je, était prélevé sur le premier de ces
articles, mais nous ignorons jusqu'à la concurrence de quelle somme. Il
faudrait donc, pour formuler une réduction, connaître quel était, l'année
dernière, le traitement de ce fonctionnaire et je proposerais de le maintenir
au même taux.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, le traitement était de 5,000 fr.
Je crois que toute la discussion est soulevée par cette seule cause que
l'emploi n'est pas parfaitement dénommé, n'est pas dénommé comme il devrait
l'être. Il est qualifié simplement d'inspection du service de santé, tandis que
ce fonctionnaire devrait porter le titre d'inspecteur ou d'administrateur chef
de division ; c'est-à-dire que indépendamment de la mission dont il est chargé
dans les provinces, il a son travail principal comme fonctionnaire adjoint à
l'administration centrale ; il est chargé de traiter toutes les questions
relatives au service de santé en ce qui concerne l'administration centrale ; la
première division ne traite ces questions que sous le point de vue financier, de
sorte que l'inspecteur du service de santé est subordonné, quant à la partie
financière au directeur de la première division.
Voilà, messieurs, ce
qui a donné lieu aux doutes élevés sur l'utilité de cet emploi. Il est certain
qu'il y a centralisation du service de santé, comme de toutes les autres
parties du service public.
La chambre n'ayant
pas eu communication antérieurement de l'arrêté dont il s'agit, je pourrai, si
elle le désire, lui en donner lecture...
Un membre. - Il se trouve au
Moniteur.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - En effet, il est inséré au Moniteur du 26
septembre de l'année dernière.
A la vérité, les
écritures de cette partie du service ne sont pas très considérables, mais le
travail du chef de service est un travail scientifique, un travail très
important ; il comprend toutes les questions qui se rattachant au service
sanitaire.
C'est
le même employé qui a été chargé, il y a quelques années, de faire la
statistique des sourds-muets, la statistique des aveugles et qui a rédigé à cet
égard un travail très remarquable. C'est encore lui qui a été chargé d'étudier
la question du travail dans les manufactures. Tout ce qui concerne l'hygiène
publique entre dans ses attributions. C'est un ancien fonctionnaire, qui, avant
d'entrer en fonctions, a dû faire de longues études, et il me semble dès lors
qu'un traitement de 6,000 fr. n'a rien d'exagéré, d'autant plus qu'il est
médecin et qu'il a dû renoncer à sa pratique. Vous savez, messieurs, que les professeurs
des universités, indépendamment de leur traitement, ont encore la permission de
pratiquer, ce qui leur procure un avantage considérable.
D'après ces
considérations, je pense, messieurs, qu'il n'y a pas lieu de revenir sur le
traitement qui a été fixé par mon prédécesseur.
M. Dumortier. - J'ai demandé la
parole, messieurs, pour appuyer le crédit demandé par M. le ministre de
l'intérieur. C'est un fait incontestable que le fonctionnaire dont il s'agit
est un homme d'un mérite réel. Il est d'ailleurs chargé d'une besogne
extrêmement importante, car l'administration du service de la santé publique,
dans un pays comme la Belgique, est certainement une choie qui mérite toute
l'attention de la chambre. Cet honorable fonctionnaire a dû renoncer à la
pratique de la médecine pour se consacrer exclusivement à ses fonctions ! C'est
lui qui, dans le temps, a dirigé toutes les mesures prises relativement au
choléra, et maintenant il est chargé de travaux considérables.
M. le ministre de
l'intérieur a fait connaître à la chambre que ce fonctionnaire, indépendamment
de sa besogne au ministère, est encore chargé des fonctions de secrétaire de
l'académie de médecine pour lesquelles il ne touche qu'une faible indemnité de
500 francs. Je pense, messieurs, que c'est encore là une chose qui mérite
d'être prise en considération.
Remarquez,
d'ailleurs, messieurs, que la création de l'inspectorat dit service de santé
est loin d'être nuisible au trésor public ; cette création peut au contraire lui
être très avantageuse. En effet, toutes les questions, quelque minime que soit
leur importance, sont renvoyées aujourd'hui à l'examen, soit des commissions
médicales, soit de l'académie de médecine.
Eh bien, chaque fois
que l'académie de médecine se réunit, il en résulte une forte dépense. Si mes
renseignements sont exacts, chaque fois que le gouvernement soumet une question
à l'académie de médecine, cela coûte 4 ou 500 fr.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Par jour.
M. Dumortier. - Il en est de même
des commissions médicales. Chaque fois que ces corps sont consultés, il faut
que neuf commissions médicales se réunissent ; il faut donc payer neuf fois les
frais de bureau, des frais de déplacement, des frais de séance. C'est encore la
une dépense considérable.
Or,
messieurs, je pense que par suite de la création de l'inspectorat du service de
santé, une quantité de ces petites questions, envoyées aujourd’hui à l'examen
de l'Académie de médecine ou des commissions médicales provinciales, pourront
être résolues sans être examinées par ces corps, et dès lors il y aura une
économie réelle à opérer sur l'article suivant du chapitre dont nous nous
occupons, article sur lequel porte principalement la majoration demandée et que
la section centrale évalue à 56,300 fr. C'est sur cet article-là, messieurs,
que nous devons faire des réductions, et non pas sur l'article dont il s'agit
en ce moment. Il n'est question ici que d'une somme très faible, et
l'inspectorat du service de santé, loin d'être une création nuisible au trésor
public, peut, au contraire, ainsi que je l'ai démontré, donner lieu à de
notables économies.
(page 1356) M. Orban, rapporteur. - Comme l'a dit
tout à l'heure l'honorable ministre de l'intérieur, l'inspecteur du service de
santé est en même temps chef de division au ministère de l'intérieur, et, en
cette qualité, il est chargé de traiter toutes les affaires relatives à
l'hygiène, à la police médicale, au service de santé ; en un mot, y a-t-il
maintenant utilité à lui donner un autre titre et une position spéciale pour
exercer les mêmes fonctions ? Je ne le pense pas ; je pense, messieurs, qu'il
n'est pas utile de rendre un employé du ministère de l'intérieur indépendant du
chef du département de manière qu'il puisse, comme cela aurait lieu d'après
l'arrêté qui institue l'inspecteur de santé, correspondre avec M. le ministre
d'un côté et de l'autre avec les commissions médicales. Je ne vois nullement
quel avantage il pourrait y avoir à créer ainsi un rouage de plus dans
l'administration, mais j'y vois un retard de plus dans l'expédition des
affaires.
Quant à moi, je
trouve à cela de très graves inconvénients, comme j'en verrais de très graves à
ce que le directeur de l'industrie et du commerce, le directeur des affaires
provinciales et communales, ou celui de l'instruction publique, devinssent des
fonctionnaires indépendants, des administrateurs spéciaux, correspondant avec
le ministre, au lieu d'être simplement les préparateurs de ses travaux.
L'on
a beaucoup parlé des services de cet employé, de la nécessité de le rétribuer
convenablement. Je n'ai pas l'honneur de le connaître, je suis tout à fait
disposé à accepter le témoignage favorable qui lui est rendu. Je dois seulement
faire observer qu'il jouit aussi de certains avantages en dehors de son
traitement. Ainsi, en sa qualité de secrétaire de l'académie de médecine,
fonctions que l'on a représentées comme étant en quelque sorte gratuites, il
touche une indemnité de 5 à 6,000 fr. qui lui sont alloués à titre de frais de
bureau. Je voudrais être éclairé également sur les avantages qui peuvent lui
être attribués en vertu de l'article 4 de l'arrêté relatif à l'organisation du
service de santé, qui lui conserve la surveillance et l'inspection de certains
établissements publics. Au surplus, en repoussant l'augmentation proposée, la
section centrale a été guidée par le désir d'empêcher la création d'une
institution sans objet, et elle n'a point voulu mettre obstacle à ce que les
services constatés fussent convenablement rétribuer.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, la question de savoir si
l'inspecteur du service de santé doit faire son travail dans les bureaux et
soumettre ses propositions au ministre comme les autres directeurs et chefs de
division, c'est une question d'organisation intérieure qui sera résolue lorsque
le règlement organique du département aura été rendu. J'ai déjà porté mon
attention sur ce point, mais cela ne touche en rien à la question du
traitement. Dans cette question, il s'agit uniquement d'une augmentation de
1,000 fr. accordée à de longs et honorables services, qui ont été précédés de
longues études.
Je n'ajouterai rien
aux considérations qui ont été développées par l'honorable M. Dumortier. Si le
fonctionnaire dont il s'agit touche une indemnité de 800 fr. comme secrétaire
de l'académie de médecine, il a de ce chef un travail très extraordinaire : il
est trésorier, archiviste et rédacteur des résolutions de l'académie.
- Le chiffre de 7,500
fr. demandé par le gouvernement, est mis aux voix ; deux épreuves sont
douteuses.
Il est procédé au
vote par appel nominal :
58 membres sont
présents.
29 adoptent.
29 rejettent.
En conséquence le
chiffre n'est pas adopté.
Ont voté l'adoption :
MM. de Meer de Moorsel, de Mérode, de Muelenaere, de Sécus, Desmaisières,
Desmet, de Terbecq, de Theux, d'Huart, Dubus aîné, Dumortier, Fallon, Henot,
Huveners, Kervyn, Lejeune, Malou, Scheyven, Sigart, Van Cutsem, Vanden Eynde,
Verwilghen, Zoude, Brabant, Clep, Coppieters, de Corswarem, de Garcia de la
Vega, de Haerne.
Ont voté le rejet :
MM. de Meester, de Renesse, de Roo, de Tornaco, de Villegas, Dubus (Albéric),
Eloy de Burdinne, Goblet, Jonet, Lesoinne. Liedts, Lys, Mast de Vries, Orban,
Osy, Pirmez, Rogier, Savart, Vandensteen, Veydt, Vilain XIIII, Biebuyck,
Castiau. David, de Baillet, de Bonne, de Breyne, de Brouckere, de La Coste,
Delfosse.
M. le président. - Aucune
proposition écrite n'a été transmise au bureau ; seulement il est résulté de la
discussion que le chiffre proposé par le gouvernement présentait une
augmentation de mille francs ; de sorte que le chiffre à mettre aux voix serait
de 6,500 fr.
- Ce chiffre est
adopté.
Article 2
« Art. 2.
Commissions médicales provinciales : fr. 39,500 fr. », par suite de
la réduction consentie par M. le ministre.
M.
Orban, rapporteur. - Messieurs, le chiffre de l'article 2 relatif aux
commissions médicales provinciales a également subi une augmentation
considérable que la section centrale n'a point trouvée suffisamment justifiée
par les développements figurant à la suite du budget.
Cependant elle ne l'a
pas rejetée d'une manière définitive ; elle a attendu pour s'éclairer d'une
manière plus complète la présentation du projet de loi annoncé tendant à
demander un crédit supplémentaire pour les dépenses arriérées des commissions
médicales provinciales.
Ce projet de loi a
été présenté depuis lors, et son adoption par la chambre prouve qu'il y a lieu
d'augmenter les sommes portées précédemment à ce chapitre de dépenses. Mais je
crois cependant qu'il y a lieu d'opérer quelques réductions sur les différents
littera de cet article.
Je prierai M. le
ministre de l'intérieur de vouloir bien s'expliquer et formuler lui-même les
réductions dont il croit ce littera susceptible. Il les a déjà indiquées dit-on
; mais, messieurs, parmi les littera de l'article 2, il s'en trouve un contre
lequel la section centrale avait soulevé des objections qui, je crois,
subsistent encore ; c'est le littera C relatif aux droits de présence aux
examens et réunions ordinaires des commissions médicales provinciales dont le
chiffre monte à 14 mille francs.
Jusqu'à ce jour les
droits de présence payés pour examen avaient été perçus directement par les
membres des commissions médicales qui y avaient droit, en vertu de l'arrêté
organique du 10 mai 1818.
On
vous propose de porter au budget une somme fixe, pour tenir lieu aux membres
des commissions médicales des droits d'examen qu'ils percevaient autrefois. Je
crois qu'il y aurait à cela un véritable inconvénient ; vous transformeriez en
un droit fixe sur le trésor public l'indemnité essentiellement variable à
laquelle les examinateurs ont droit, et qui doit être plus ou moins élevée,
suivant le nombre d'examens subis.
Je pense qu'il
vaudrait mieux maintenir l'ancien état de choses, continuer aux membres de ces
commissions le droit de percevoir un tantième sur les droits d'examen et de
faire disparaître l'article proposé au budget. Je ne vois aucun inconvénient à
persister dans la marche qui a été suivie jusqu'à présent et que l'on a trouvé
à tort, suivant moi, irrégulière et contraire aux principes de la comptabilité.
Pour moi, je ne vois pas d'irrégularité à ce que les membres des commissions
médicales, pas plus que des professeurs, touchent les droits d'examen auxquels
ils ont droit en vertu des lois existantes.
M. le ministre
de l’intérieur (M. de Theux). - S'il y a majoration, on a omis de vous dire
que le trésor aura, par suite de la mesure prise, une recette de 20 mille
francs.
Un membre. - Les
garantissez-vous ?
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Les ministres ne garantissent jamais les
recettes.
Le principe a été
consacré par la loi qui a régularisé la situation des finances des commissions
médicales provinciales sur le rapport de l'honorable M. Sigart.
M. Veydt. - Messieurs, comme vient de le faire observer M. le
ministre de l'intérieur, le principe a été consacré par la loi ayant pour but
de solder l'arriéré des commissions médicales provinciales. Du moins la
chambre, en votant ce projet, a reconnu qu'il valait mieux que la recette du
droit d'examen fût faite à l'avenir par l'Etat et que les membres des
commissions médicales fussent payés par le trésor, au lieu de l'être
directement sur le produit des examens.
Je pense donc qu'on
ne peut pas revenir à l'ancien mode.
Quant au nombre des
examens, il est diminué depuis la loi de 1835 sur le jury d'examen, cela est
vrai, mais il reste toujours aux commissions médicales les examens de
sages-femmes, de pharmaciens et de droguistes ; et la plus grande partie des
recettes provenait de ces examens. Dans le relevé que j'ai été à même de faire,
chaque commission percevait, en moyenne, 2,400 fr., dont les membres
prélevaient au moins la moitié.
Ces commissions sont
donc en déficit de 14 à 1,500 fr. par an. Si des mesures pour y obvier ne sont
pas prises, nous replacerons les commissions médicales dans la situation d'où
les a tirées le projet que la chambre a voté. Il faut accorder une somme de
180,000 fr. au moins pour les dédommager des sommes qu'elles ne recevront plus.
Il y a un autre point
sur lequel je dois appeler l'attention, ce sont les frais de route et de séjour
pour l'inspection des pharmacies que les commissions sont tenues de faire. Le
nombre de ces pharmacies et officines de campagne s'est considérablement accru
; il s'élève, en ce moment, à environ 1,500.
D'après
un arrêté du mois de mai 1818, les commissions médicales sont obligées à faire
ces visites. Le texte français de l'arrêté prescrit deux visites par an ; le
texte hollandais laisse la faculté d'en faire une ou deux. C'est dans cette
faculté qu'on trouve la cause de la différence des dépenses occasionnées à
l'Etat. Si toutes les commissions font deux visites, le chiffre en discussion
ne sera pas suffisant ; il y aura même un déficit considérable. J'appelle
l'attention de M. le ministre sur ce point. Pour rester dans les limites du
chiffre de 55 à 53 mille francs, il faudra se borner à une visite par an.
Le relevé des
différents littera me conduit au chiffre d'au moins 56,000 fr. Je ne pense pas
qu'on puisse voter une somme moindre, sans s'exposer de nouveau aux
inconvénients auxquels nous avons tout récemment remédié pour le passé.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je pense aussi
que deux visites ne sont pas nécessaires partout, qu'une suffit en général, et
qu'il ne faut la renouveler que pour les pharmacies qui ne sont pas trouvées
parfaitement en règle. C'est le seul moyen de les amener à l'état de perfection
désirable.
M. de Corswarem. - Messieurs, je conviens avec l'honorable M. Veydt et
avec l'honorable ministre de l'intérieur, qu'une inspection par an des
pharmacies de campagne serait suffisante, si elle était bien faite. Mais
jusqu'ici, messieurs, ces inspections se sont faites d'une manière très
superficielle, et il ne peut en être autrement, parce que les membres des
commissions médicales qui les font, en éprouvent un dommage considérable.
Ils reçoivent,
d'après les règlements en vigueur, les mêmes frais de route que les employés de
l'ordre administratif. Mais lorsque les employés de l'ordre administratif sont
en route, leur traitement court toujours, tandis que lorsque les membres des
commissions médicales sont en route, non seulement ils ne gagnent rien, mais
ils perdent. C'est pourquoi ils font leurs inspections de la manière la plus
expéditive pour être rentrés chez eux le plus tôt possible et pour que la perte
qu'ils éprouvent cesse.
(page 1357) Nous devons donc, si nous attachons quelque prix à ce
que les pharmaciens des campagnes soient pourvues des médicaments convenables,
fournir aux commissions médicales les moyens de faire des inspections
sérieuses. Nous ne pouvons exiger que les membres de ces commissions mettent de
l'argent de leur poche pour le service public.
Je crois donc que
pour le bon ordre de l'administration et par humanité en faveur de nos
concitoyens des campagnes, nous devons adopter le chiffre que propose M. le
ministre de l'intérieur.
M. le président.
- M. Orban, quel est le chiffre que vous proposez ?
M.
Orban, rapporteur. - Je propose de réduire de 14,000 fr., le chiffre du
gouvernement.
M. Sigart. - La loi que nous avons votée la semaine
dernière avait pour but :
1° De combler un
déficit ;
2° De changer un mode
vicieux de comptabilité.
La chambre n'a pas à
revenir sur ces questions. Elles sont réglées.
Mais la chambre est
libre de ne pas accorder la somme demandée par le gouvernement. Seulement il faut,
avant qu'elle ne se décide, qu'elle connaisse bien la conséquence de sa
décision.
C'est qu'il faudra
que le gouvernement supprime les visites de pharmacies d'une manière à peu près
complète : avec la somme pétitionnée par M. le ministre de l'intérieur, on ne
pourra faire qu'une visite générale par an et visiter deux fois un très petit
nombre d'officines mal formées. Il me semble que l'on ne peut moins faire, sans
danger pour la santé publique.
Je crois donc que la
chambre agira sagement en votant le chiffre du gouvernement.
- La discussion est
close.
Le chiffre de 39,500
francs proposé par le gouvernement est mis aux voix et adopté.
« Art. 3.
Encouragements et subsides : fr. 20,300. »
M. Dumortier. - J'avoue que je ne
comprends pas bien les propositions qui nous sont faites. Je vois que le
chiffre demandé pour tout le chapitre présente une forte augmentation sur celui
de l'année dernière et que la section centrale nous propose une réduction sur
l'ensemble. Mais la division de ce chapitre n'est plus la même qu'aux budgets
précédents, je voudrais donc avoir quelques explications.
M. le ministre
de l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, les chiffres de l'article 3 sont
aussi réduits qu'il est possible de l'être, sauf peut-être celui qui est
intitulé : « Encouragements de la vaccine ». Mais celui-là est
variable tous les ans. Peut-être au lieu de 14,000 francs pétitionnés, la somme
de 12,000 fr. serait-elle suffisante. Toutefois il n'y a à cet égard aucune
certitude.
Les autres littera
présentent des chiffres beaucoup trop minimes pour qu'il y ait quelque chose à
y réduire. Mais je dois faire remarquer à l’honorable M. Dumortier qu'il a
perdu de vue que les recettes directes opérées par les commissions médicales
seront faites à l'avenir au profit du gouvernement.
M. Veydt. - M. le ministre de l'intérieur pense qu'une somme de
12,000 fr. pour encouragement de la vaccine pourrait être suffisante ; il est toutefois
dans le doute. Je crois, messieurs, qu'il y a plutôt certitude à ce sujet. Les
personnes qui ont été chargées de ce service ont reconnu qu'avec la somme de
12,000 fr. on pouvait suffire aux frais des médailles à distribuer, à titre
d'encouragement.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Je consens à ce que le chiffre soit réduit à
12,000 fr.
M. Veydt. - Ce chiffre, messieurs, suffit à l'achat de 120 médailles
du prix de 100 fr. Je pense qu'une distribution d'un pareil nombre est une
large et belle récompense.
Ce mode
d'encouragement a d'ailleurs éveillé quelques réclamations ; il présente des
inconvénients, et je crois qu'il pourrait être remplacé par des mesures
meilleures. Je demande donc qu'en attendant que ces mesures soient introduites,
M. le ministre de l'intérieur veuille bien se contenter d'une somme de 12,000
fr. Il y a, comme on vous l'a dit, sur l'ensemble du chapitre pour le service
de santé, une augmentation tellement forte, que nous devons faire tout ce qu'il
est possible pour la diminuer.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - M. le ministre ayant consenti à la
diminution de 2,000 fr., le chiffre se trouve réduit à 18,300 fr.
- Le chiffre de
18,300 fr. est mis aux voix et adopté.
Article 4
« Art. 4.
Académie royale de médecine : fr. 25,000. »
M.
Orban, rapporteur. - Messieurs, cet article présente une augmentation de
7,000 fr. en faveur de l'Académie royale de médecine. La section centrale a
examiné les considérations invoquées par M. le ministre de l'intérieur pour la
justifier, et elle n'y a rien trouvé de concluant en faveur de son adoption.
Lorsque cette institution
fut créée, une somme de 15,000 fr. fut demandée aux chambres pour faire face à
ses dépenses. Depuis lors elle n'a subi aucune modification, aucun
accroissement, et il n'y a pas lieu dès lors à augmenter la somme qui lui est
consacrée.
Toutefois à l'époque
où l'allocation relative au service de santé ne formait au budget qu'un seul
article, qu'une somme globale, 3,000 fr. furent distraits du service de santé,
proprement dit, pour être affectés aux besoins de l'Académie. C'est lorsque la
section centrale chargée d'examiner le budget de 1844, a eu connaissance de ce
transfert, qu'elle a demandé la division de ce chapitre, pour empêcher qu'à
l'insu de la chambre, la dotation de l'Académie ne reçût de nouveaux
accroissements.
Je
pense que l'on peut maintenir le chiffre de l'année dernière, sans
inconvénient.
Si je suis bien
informé, l'Académie de médecine aurait exprimé à M. le ministre de l'intérieur
l'opinion, qu'il y aurait lieu de ne la consulter que lorsque les questions
auraient une certaine importance. En déférant à ce vœu, il y aurait lieu de
réduire plutôt que d'augmenter le nombre des séances et des convocations, et il
n'y aurait pas lieu de craindre l'insuffisance de l'allocation existante, dont
je propose le maintien.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Tous les ans il y a eu insuffisance du
chiffre alloué par l'Académie royale de médecine. Aussi cette académie, en
faisant son budget, avait réclamé une somme de 30,000 fr., et c'est par suite
des principes d'économie adoptés lors de la confection des budgets qu'on a
réduit les propositions de l'académie à 25,000 fr.
Ainsi que vous l'a
dit l'honorable membre, il y a eu une époque où l'on imputait sur d'autres
littera certaines dépenses de l'académie. Ainsi, on prenait jusqu'à 5,000 fr.
pour la rédaction de la pharmacopée.
Maintenant que c'est
un article spécialisé et pour éviter des demandes de crédits supplémentaires,
je pense que le chiffre de 25,000 fr. n'a rien d'exagéré. L'académie de
médecine est nombreuse, et les membres qui se rendent à ses réunions font des
sacrifices personnels bien supérieurs à la dépense que le gouvernement alloue.
C'est un fait que je constate. Un médecin qui doit se déplacer et qui ne reçoit
que des jetons de présence avec les frais de voyage et de séjour, est toujours
exposé à une perte.
Les membres de
l'académie de médecine font donc des sacrifices personnels. Il me semble qu'il
ne faut pas non plus lésiner sur les frais de ce corps. Puisqu'on l'a institué,
il faut laisser porter les fruits que l'on attend de l'institution.
- Le chiffre de
25,000 fr. est mis aux voix ; il n'est pas adopté. Le chiffre de 18,000 fr. est
adopté.
Chapitre VIII. -
Fêtes nationales
Article unique
« Article unique.
Frais de célébration des fêtes nationales ; fr. 30,000. »
- Adopté.
Chapitre IX. - Eaux
de Spa
Article premier
« Art. 1er. Traitement du contrôleur des jeux et
autres dépenses : fr. 2,220. »
M. de Renesse. - Il y a trois ou quatre mois, messieurs, que
la chambre a reçu une pétition d'un habitant de Spa, tendant à ce qu'une somme
fût prélevée chaque année sur le bénéfice net des jeux, en faveur de l'hospice
de Saint-Charles de cette ville. J'avais demandé alors qu'il fût fait rapport
sur cette pétition, avant la discussion du budget de l'intérieur. Je m'étonne
que ce rapport n'ait pas été présenté. Je demanderai une explication, à cet
égard, au président perpétuel de la commission des pétitions, à l'honorable M.
Zoude. D'après une lettre que je viens de recevoir de Spa, un membre de
l'administration communale de cette ville aurait dit qu'il ne serait pas donné
suite à la pétition dont il s’agit, que toutes les mesures étaient prises pour
qu'elle restât dans les cartons. Je ne crois pas cependant que la commission
des pétitions se soit laissé dominer par une influence occulte, je crois plutôt
que ce fera un oubli de l'honorable président et qu'il m'aura suffi de le lui
signaler pour que le rapport soit fait sans retard.
M.
Zoude.
- Le rapport était préparé ; les conclusions tendaient à l'ordre du jour, mais
je n'ai pas pu réunir un nombre suffisant de membres de la commission pour
qu'une résolution pu être prise. C'est la seule cause qui a empêché la
présentation du rapport à la chambre.
M. de Renesse. - Ce que le pétitionnaire demande se pratique dans
d'autres localités où il existe des jeux ; cela se fait notamment à
Aix-la-Chapelle et dans plusieurs villes des bords du Rhin, où il y a des jeux.
Je prierai M. le ministre de bien vouloir prendre encore en considération cette
requête, lorsqu'il s'agira du renouvellement du contrat de la firme des jeux de
Spa, renouvellement qui doit avoir lieu, je pense, en 1847.
J'ai une autre
observation à taire, messieurs, relativement à des dépenses que l'on fait à Spa
pour la restauration de quelques monuments et autres travaux, pour lesquels le
gouvernement accorde chaque année un subside assez marquant. Il paraît que
l'entreprise de ces travaux a été donnée de la main à la main, au lieu d'être
adjugée publiquement, et, d'un autre côté, la surveillance ne doit pas être
bien exercée quoique M. le ministre de l'intérieur, l'honorable M. Van de Weyer,
ail déclaré à la section centrale qu'elle était confiée à l'architecte du
gouvernement. Voici, en effet, messieurs, les renseignements que j'ai reçus à
cet égard :
«
Il est bien vrai que les travaux exécutés ici l'ont été d'après les plans et
sous la surveillance d'un architecte du gouvernement ; mais il est bon de vous
faire savoir, M. le comte, que ces travaux n'ont pas été mis au rabais, et
qu'ils ont été exécutés de telle sorte qu'une voûte d'accotement, faite sur la
rivière et contre toutes les règles de l'art, à notre hôtel des bains, menace
de tomber et d'entraîner avec elle l'habitation qui est dessus. Cette voûte
était à peine construite de quelques jours que l'architecte lui-même a dû y
faire placer un énorme pilier pour la soutenir, au lieu d'en ordonner la
démolition. C'est un exemple de la mauvaise exécution des travaux que l'on a
faits ici, et je pourrais en citer beaucoup d'autres. »
Je prie M. le
ministre de l'intérieur de bien vouloir faire examiner si, en effet, les
travaux sont mal exécutés et si l'entreprise a été donnée sans adjudication
publique.
(page 1358) M. David. - Il y a probablement ici une autre pétition
dont on m'a parlé vaguement à Spa.
Si j'en dis un mot
ici, c'est à propos de la demande de l'honorable comte de Renesse, qui concerne
l'application d'une partie du fonds de réserve sur les bénéfices des jeux à
certain hôpital.
Il y a effectivement,
messieurs, bien des gens à Spa qui pourraient aller, eux, à l'hôpital, ce sont
les hôteliers qui, à la suite du jeu, se trouvent dans la position de ne pas
être payés. (Interruption.) Oui,
messieurs, certainement, des hôteliers que l'on ne paye pas, que les joueurs ne
peuvent payer. (Interruption.) Je ne
vois pas, moi, messieurs, qu'un fonds de réserve sur les bénéfices des jeux ne
puisse pas tout aussi bien servir à indemniser ceux qui sont reconnus comme
maltraités par les escrocs que les escrocs. (Bruits sur plusieurs bancs.)
Un membre. - Cela n'est pas
possible.
M. David. - Mais je
désirerais, moi, que cela fut possible.
- L'article est mis
aux voix et adopté.
Article 2
« Art. 2. Frais de
réparation des monuments de la commune de Spa : fr. 20,000.3
M. de Brouckere. - Messieurs,
j'approuve l'allocation de 20,000 fr. portée à cet article, et je crois que la
chambre et le gouvernement font très bien d'employer tous les moyens en leur
pouvoir pour attirer les étrangers à Spa, mais je dois recommander au
gouvernement et à la chambre une autre localité qui jouit aussi de quelque
célébrité à cause de ses eaux. Je veux parler de Chaudfontaine.
Il est à remarquer
que lorsque la plupart des localités de la Belgique ont gagné à l'établissement
des chemins de fer, Chaudfontaine, au contraire, y a considérablement perdu.
Les étrangers n'y séjournent plus ; ils traversent Chaudfontaine et vont à Spa
où on se rend maintenant de Liège en une heure et demie. Il en résulte que
Chaudfontaine est à peu près oublié et l'on ne fait plus rien pour y attirer
les étrangers. Je désirerais que lorsqu'on accorde annuellement une vingtaine
de mille francs pour la commune de Spa, on voulût bien accorder aussi un
subside de 1,500 à 2,000 francs à la commune de Chaudfontaine.
Plusieurs membres. - Non ! non !
M. de Brouckere. - Je serais bien
aise que les personnes qui disent : non ! non ! expliquassent les motifs de
leur opinion. Si ces motifs sont fondés, je n'insisterai pas ; s'ils ne le sont
pas, je tâcherai de les réfuter.
M. Osy. - L'année dernière, il a pour ainsi dire été
décidé par la chambre que les jeux de Spa seraient maintenus aussi longtemps
qu'il existerait des jeux à Aix-la-Chapelle et sur le Rhin, parce que sans cela
Spa serait abandonné des étrangers. Cependant je n'aime pas à voir dans les
caisses du gouvernement le produit de semblables jeux. Je crois que le trésor
retire une somme de 80,000 fr. des jeux de Spa ; eh bien, je voudrais que l'on
décidât qu'à l'avenir cette somme sera entièrement consacrée à améliorer les
localités où il vient des étrangers. J'approuve donc la proposition de
l'honorable M. de Brouckere. Mais je vais plus loin, je voudrais, je le répète,
que tout le produit des jeux de Spa fût employé à des dépenses ayant pour but
d'attirer les étrangers dans le pays. Ce n'est pas là un revenu moral et je
voudrais qu'il fût employé dans le sens de la proposition de M. de Brouckere,
en attendant que l’on puisse, d'ici à quelques années, supprimer les jeux, lorsqu'ils
auront été supprimés chez nos voisins.
M.
le ministre des finances (M. Malou). - C'est une grande question que celle de
savoir s'il faut supprimer ou maintenir dans certaines limites les jeux
publics, mais je ne comprends pas trop la distinction de moralité que vient de
faire l'honorable M. Osy : il serait moral d’appliquer l'argent immoralement
obtenu à des œuvres de bienfaisance, mais on ne pourrait pas laisser tomber cet
argent dans les caisses de l'Etat. Si les jeux sont immoraux, il faut les
supprimer ; s'ils ne le sont pas, il ne faut pas être dégoûté de l'argent que
le trésor en retire.
M. de Garcia. - L'observation qui vient d’être faite par M. le
ministre des finances me dispense de répondre aux paroles de l'honorable M.
Osy. Mais je dirai un mot de ce que demande l'honorable M. de Brouckere pour
Chaudfontaine. Cette localité, dit-il, a tout perdu par l’établissement du
chemin de fer, et se trouve abandonnée par les étrangers et par les visiteurs
qui peuvent maintenant se rendre de Liège à Spa en 1
heure 1/2. Cette considération est-elle un motif réel d'accorder un subside ?
Mais, messieurs, s'il pouvait en être ainsi, il est une foule d'autres localités
qui ont perdu à l'établissement du chemin de fer. Il suffit de parcourir les
anciennes routes et notamment la route de Bruxelles à Namur pour s'en
convaincre. Ces localités ont perdu le passage et le séjour des voyageurs et le
motif invoqué par l'honorable préopinant leur serait aussi applicable qu'à
Chaudfontaine, c'est-à-dire que pour faire justice à tout le monde, il faudrait
dépenser des sommes énormes, il faudrait indemniser tous ceux qui demeurent le
long des anciennes routes et qui ont perdu complétement les ressources dont ils
jouissaient avant l'établissement des chemins de fer. Je crois, messieurs, que
c'est là une chose à laquelle le gouvernement ne peut rien faire. Ici, comme
dans tous les grands événements qui bouleversent les industries, il y en a qui
perdent et d'autres qui gagnent, et, dans ces circonstances, l'Etat ne peut
rien ; il doit laisser les uns jouir de leurs bénéfices et laisser les autres
subir leurs perles.
M. de Brouckere. - Je me suis bien
mal expliqué, et je le regrette, car si je m'étais mieux fait comprendre,
l'honorable M. de Garcia n'aurait point réfuté ce que je n'ai pas dit. Je
n'entends nullement qu'il faille accorder des indemnités ni à plusieurs ni à
une seule localité, du chef des pertes subies par l'établissement du chemin de
fer.
En parlant des pertes
essuyées par Chaudfontaine, j'ai voulu seulement citer un fait. Voici,
messieurs, mon argument, et je crois que l'honorable M. de Garcia n'aura rien à
y objecter : on fait figurer au budget une somme de 20,000 fr. dans le but
d'attirer les étrangers dans une de nos villes de bains ; c'est très bien, mais
je demande que l'on fasse quelque chose aussi pour une autre ville de bains qui
a tout autant de droit à la sollicitude du gouvernement que cette ville dont
nous nous occupons.
Et si elle est moins
considérable, moins importante, vous voyez aussi que je mets une grande
différence dans l'allocation que je réclame, puisqu'en appuyant une allocation
de 20,000 fr., dans l'intérêt de Spa, je ne demande que 1,500 à 2,000 fr., pour
Chaudfontaine. (Interruption.)
On me demande,
d'abord, s'il y a des jeux à Chaudfontaine ; non, il n'y a pas de jeux ; mais
si on veut y établir des jeux, Chaudfontaine ne demande pas mieux ; avoir des jeux
c'est un avantage.
Un membre. - Chaudfontaine
avait autrefois des jeux.
M. de Brouckere. - Qu'est-ce que
cela fait ? On a supprimé les jeux, on a bien fait, parce qu'on ne doit pas
établir des jeux à deux lieues d'une ville qui est le siège d'une université.
Mais parce que la commune de Chaudfontaine est privée de l'avantage d'avoir des
jeux, faut-il encore la priver d'une modeste allocation de l,500 à 2,000 fr. ?
On me dit encore que Chaudfontaine
n'a pas de monuments ; cela est vrai ; mais elle a au moins l'intention
d'établir une fontaine. A Chaudfontaine, il existe des bains, mais il n'existe
pas jusqu'ici de fontaine où les baigneurs aillent boire, comme cela existe
dans toutes les villes à bains de l'Allemagne ; la commune de Chaudfontaine
voudrait pouvoir établir une fontaine dans un pareil but ; mais elle n'a pas
les fonds suffisants et une allocation de 2,000 fr. au budget de cette année,
allocation répétée seulement une année, suffirait à l'établissement d'une
fontaine à Chaudfontaine.
Par
les motifs que je viens de développer, je proposerai à la chambre de libeller
l'article en discussion, ainsi qu'il suit :
« Frais de réparation
des monuments de Spa et subside extraordinaire à la commune de
Chaudfontaine : fr. 22,000 fr. »
- L'amendement est
appuyé.
Il fera partie de la
discussion.
M. de Renesse. - Je demanderai à M. le ministre de l'intérieur
si, lors du renouvellement de la ferme des jeux à Spa, il compte stipuler qu'il
y aura une certaine somme retenue sur le bénéfice net en faveur de l'hôpital de
cette ville. Il me semble que cette demande, émanée d'un habitant de Spa qui
s'intéresse en faveur de la classe pauvre de cette localité, mérite d'être
prise en considération. Je l'appuie de tout mon pouvoir.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - C'est une question à examiner, et sur
laquelle je ne puis pas me prononcer dès à présent.
M. de Brouckere. - Messieurs, je ne
m'oppose nullement à ce qu'on accorde une somme quelconque, sur le bénéfice net
des jeux de Spa, à l'hospice de cette ville ; mais il n'est pas nécessaire de
stipuler cela dans le contraire ; il faut que cette somme soit prise sur la
quote-part du gouvernement. L'honorable M. de Renesse ne paraît pas connaître
le contrat conclu avec les entrepreneurs de la ferme des jeux. D'après ce
contrat, il revient au gouvernement la moitié du montant des bénéfices,
défalcation faite de toutes les dépenses. C'est sur cette moitié qu'on paye le
contrôleur des jeux et qu'on prend les 20,000 francs que l'on donne à la
commune de Spa. Si, en outre, on veut prélever quelque chose en faveur de
l'hospice dont il s'agit, je n'y vois aucun inconvénient ; mais, je le répète,
c'est sur la part du gouvernement que cela doit être pris.
M. Mast de Vries. - J'avais demandé la parole pour faire observer
à l'honorable M. de Brouckere que, la commune de Chaudfontaine n'ayant pas de
monuments, le subside qu'il réclamait en faveur de cette commune ne pouvait
recevoir, comme à Spa, d'application.
D'après les
explications que l'honorable membre vient de donner, il s'agit d'établir une
fontaine à Chaudfontaine ; si réellement la commune est dans l'impossibilité de
supporter la dépense de cette fontaine, je ne veux pas m'opposer à l'allocation
d'un subside ; cependant je dois faire remarquer que c'est ici une question de
principe. S'il s'agit d'attirer, grâce à cette dépense, des étrangers à
Chaudfontaine, je dirai qu'il y a encore dans le pays d'autres villes à bains
qui viendront, à bon droit, réclamer des faveurs du même genre ; je citerai
Blankenberghe et surtout Ostende qui a demandé à pouvoir établir des jeux et
qui a éprouvé un refus.
M. de Renesse. - Le sieur Servais, dans sa pétition, demande qu'on
prélève en faveur de l'hospice de Spa, une certaine somme tant sur la part du
gouvernement que sur celle de la société ; cela se fait partout ailleurs. C'est
dans ce sens que j'appuie la pétition du sieur Servais.
M. de Brouckere. - Je ferai remarquer à l'honorable M. Mast de
Vries que je ne propose qu'un subside extraordinaire, et non pas permanent.
M. d’Huart, ministre d'Etat. - L'affaire n'est
pas instruite.
M. de Brouckere. - L'affaire n'est
pas instruite, me dit un membre du cabinet ; mais si M. le ministre veut passer
au ministère de l'intérieur, il pourra s'assurer que l'affaire est instruite.
Le département de l'intérieur a été entretenu de cette affaire, je puis
l'affirmer. Je suis loin de faire de ce chef le moindre reproche à M. le
ministre de l'intérieur, qui est depuis si peu de temps à la tête de ce
département.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - J'examinerai le
dossier de cette affaire, et je ferai, s'il y a lieu, une proposition au budget
prochain.
M. Lesoinne. - Messieurs, j'appuie la proposition de l'honorable M.
de Brouckere. Il s'agit de construire une fontaine dans une partie de la (page 1350) commune, qui est assez
élevée ; la population de cette partie de la localité est assez nombreuse, et
elle est privée d'eau.
Des
membres. - Ce n'est donc pas pour attirer des étrangers ?
M. Lesoinne. - Je demande le subside, non pour attirer des
étrangers, mais pour être appliqué à un objet d'utilité générale ; et si M. le
ministre de l'intérieur veut se donner la peine d'examiner le dossier, il verra
que le subside est destiné à l'établissement de celle fontaine qui est
indispensable aux habitants.
M. de Brouckere. - Je retire ma
proposition ; je la reproduirai l'année prochaine.
- La discussion est close.
L'article 2 est mis aux voix et adopté.
Chapitre X. -
Constructions d’hôtels provinciaux
« Art. 1er. Deuxième quart d'une
somme de 200,000 fr., pour frais de construction d'un hôtel pour
l'administration provinciale du Luxembourg, à Arlon :fr. 50,000. »
M. le ministre de
l'intérieur a proposé d'augmenter ce chiffre de 59,000 fr.
M. Osy. - Messieurs, l'année
dernière, l'on nous avait annoncé que le devis pour la construction d'un hôtel
destiné à l'administration provinciale du Luxembourg à Arlon, avait été
tellement bien dressé que la dépense n'excéderait certainement pas 200,000 fr.
; voilà déjà que cette année, indépendamment du deuxième quart, on vient
demander une majoration de 59,000 fr. Je demanderai si la section centrale a
examiné cette augmentation et sur quoi elle est fondée.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Messieurs, le dossier concernant cette
affaire a été déposé sur le bureau pendant la discussion ; je regrette qu'il
n'en ait pas pris connaissance. Il se trompe lorsqu'il suppose qu'il y a une
majoration de 59,000 fr. Il y a eu 21,000 fr. de dépenses imprévues. Maintenant
on propose de construire une façade en pierre de taille, ce qui amènerait peur
l'avenir une très grande économie dans les frais d'entretien. Il résultera de
là une dépense de 9,000 fr. qui, jointe aux 21,000 fr. que je viens d'indiquer,
formera l'excédant total sur le chiffre de 200,000 fr. annoncé l'année
dernière. Aujourd'hui, je demande au budget 109,000 fr., c'est-à-dire le
deuxième et le troisième quarts de la somme de 200,000 fr., plus les 9,000 fr.
dont je viens d'indiquer la destination. Les travaux sont tellement avancés,
qu'il y aura lieu cette année de payer le deuxième et le troisième quarts, et
non pas seulement le deuxième quart suivant la proposition primitive du budget.
L'année prochaine, on portera au budget le quatrième quart, plus les 21,000
fr., c'est-à-dire 71,000 fr. ; il n'y aura plus rien à porter de ce chef au
budget de 1848.
Il faudrait libeller
l'article de la manière suivante :
« Deuxième et
troisième quarts des frais de construction d'un hôtel pour l'administration
provinciale du Luxembourg, à Arlon : fr. 109,000. »
- L'article, ainsi
modifié, est adopté.
Article 2
« Art. 2.
Deuxième tiers d'une somme de 400,000 fr., pour la restauration du palais de
Liège : fr. 133,000. »
M.
Delfosse. - Je prie M. le ministre de l'intérieur de nous dire
s'il a pris quelque résolution pour la restauration du palais de Liège ; si je
ne me trompe, le bail de l'hôtel actuellement occupé par M. le gouverneur de la
province de Liège expire l'année prochaine, il est donc urgent de construire un
nouvel hôtel. D'un autre côté chaque jour de retard augmente les ravages que le
temps exerces sur cet ancien édifice, pour la conservation duquel j'aime à
croire que le gouvernement montrera une vive sollicitude.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Je suis aussi d'avis de la très grande
urgence de réparer le palais des anciens princes-évêques de Liége. Trois plans
m'ont été envoyés ; ils sont en ce moment soumis à l'avis de l'architecte Cluysenaar.
Dans peu de jours j'aurai son avis ; s'il est favorable, on mettra la main à
l'œuvre immédiatement. Mais dans tous les cas, la somme de 133,000 fr. ne sera
pas dépensée entièrement cette année, on fera tout ce qu'il sera possible de
faire.
M. Rogier. - J'attache
beaucoup de prix à la restauration intelligente de tous les beaux monuments du
pays. Il s'agit d'entreprendre la restauration de l'ancien palais des
princes-évêques de Liège, et je ne viens pas m'opposer en principe à la dépense
proposée, mais je demande s'il est nécessaire de porter un deuxième tiers de la
dépense au budget de cette année, quand le premier n'est pas dépensé. Je pense
que de ce chef il y aurait à retrancher du budget une somme de 133,000 francs.
Je doute fort, quelque célérité qu'on apporte à l'examen des plans, que l'on
puisse mettre la main à l'œuvre dans le courant de 1846.
Je vais plus loin, je
crains qu'après un examen plus attentif des plans, des devis et des localités
on n'arrive à ne rien faire du palais de Liège. Alors viendrait se réaliser la
prévision qui était dans quelques esprits à l'époque de la discussion relative
à la cession faite à l'abbé Habets de l'ancien hôtel du gouvernement
provincial. On craignait alors que le gouvernement provincial n'eût cédé sa
place à un établissement religieux sans qu'il eût devant lui l'assurance de
pouvoir s'installer dans le palais de Liège.
Le gouverneur ni le
gouvernement provincial ne seront placés dans l'ancien palais des
princes-évêques de Liège. Le gouvernement aura à fournir un autre local. C'est
là le résultat que quelques-uns d'entre nous avaient prévu ; nous verrons si
l'avenir nous donnera tort.
Quoi qu'il en soit, je crois que M. le ministre
reconnaîtra que le deuxième tiers porté au budget de cette année ne sera pas
nécessaire et qu'il peut en disparaître sans inconvénient, car déjà une somme a
été portée au budget de 1845, et je doute qu'elle soit entamée cette année.
Je fais d'ailleurs
mes réserves quant aux allocations qu'on pourrait demande à l'avenir en faveur
du monument dont il s'agit, si tant est qu'on eût la résolution bien arrêtée
d'en entreprendre la restauration. Ce n'est pas contre le monument que ma
proposition est faite ; je ne demande la suppression de l'allocation, que parce
que je la considère comme inutile aujourd'hui.
M. de Brouckere. - Messieurs, après
m'être entendu avec M. le ministre de l'intérieur, je crois devoir prendre la
parole pour donner quelques explications sur la question dont il s'agit.
Il n'y a jamais eu à
Liège d'hôtel spécialement affecté à l'habitation du gouverneur. L'année
dernière, la nécessité avait été reconnue d'accorder à Liège ce qui est donné à
tous les chefs-lieux de province, d'acquérir ou de construire un hôtel pour le
gouverneur. Après diverses éludes faites, l'on avait cru pouvoir décider que
l'habitation du gouverneur pourrait être établie au palais des anciens
princes-évêques de Liège.
Un architecte de
Bruxelles s'était rendu sur les lieux,
avait fait un plan et un devis, s'élevant à 400,000 fr. Le plan et le devis ont
été soumis à la section centrale du budget de l'intérieur. La section centrale
avait paru approuver le plan et la chambre, sur sa proposition, avait alloué le
premier tiers de la dépense projetée.
Mais, vous le savez,
le plan qui avait été approuvé à Bruxelles n'a pas rencontré le même accueil à
Liège.
Pour exécuter le plan
de l'architecte de Bruxelles, il fallait démolir une partie du palais des
anciens princes-évêques de Liège ; cette démolition avait excité quelque
mécontentement à Liège.
Le prédécesseur de M.
le ministre actuel ayant appris cela, s'est rendu sur les lieux, et il a trouvé
convenable de ne rien démolir de cet ancien monument. Ainsi le plan qui avait été
soumis à la section centrale, pour l'exécution duquel un premier tiers de la
dépense avait été voté, ce plan est complétement abandonné.
Depuis lors, des
études ont été faites à l'effet de savoir si l'on pourrait approprier l'ancien
palais des princes-évêques de Liège à l'habitation du gouverneur, d'une autre
manière ; les plans auxquels ont abouti ces études sont entre les mains du
gouvernement. Mais on a des doutes très sérieux que ces plans puissent être
réalisés convenablement. Dès lors, le libellé porté au budget n'atteindrait
plus le but qu'on se propose. En effet, il est ainsi conçu :
« Art. 2. Deuxième
tiers d'une somme de 400,000 francs allouée par la loi du 18 mai 1845 pour
pourvoir aux dépenses des travaux nécessaires pour la restauration du palais de
Liège, à l'effet d'y établir la demeure du gouverneur de la province ainsi que
les bureaux de son administration, et d'en faire le siège du conseil
provincial : fr. 133,000 fr. »
Si donc le
gouvernement reconnaissait que l'habitation du gouverneur ne doit pas être
établie au palais des anciens princes-évêques de Liège, que cette habitation
doit être placée ailleurs, ce libellé gênerait le gouvernement, car il serait
impossible d'employer les fonds destinés à la réparation et à l'appropriation
du palais des princes-évêques de Liège, il serait impossible d'employer ces
fonds à une construction dans une autre partie de la ville. Je ne sais pas à
quel parti s'arrêtera le gouvernement, je ne puis pas aller au-devant de sa
décision.
Je
tenais à faire ces observations parce que le gouvernement pourra se trouver
dans un très grand embarras d'ici à quelque temps ; on a loué un hôtel pour
l'habitation du gouverneur et un bâtiment pour les bureaux de l'administration
provinciale ; ces deux bâtiments sont loués de telle manière que l'hôtel habité
par le gouverneur et le bâtiment occupé par les bureaux, d'ici à deux ans,
peuvent être repris par les propriétaires. Je ne sais ce que ferait le
gouvernement s'il se trouvait privé de cet hôtel et du bâtiment occupé par les
bureaux.
J'engage le
gouvernement à s'occuper de cette affaire dans un bref délai, de manière à
pouvoir présenter une proposition à la chambre avant la clôture de la session,
car il est plus que temps de commencer les travaux si on ne veut pas s'exposer
à se trouver dans un très grand embarras.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux). - Je remercie
l'honorable préopinant de ses observations ; s'il était reconnu impossible
d'approprier l'ancien palais des princes-évêques de Liège pour y placer
l'habitation du gouverneur et les bureaux de l'administration provinciale, il
faudrait aviser à un autre moyen ; mais je ne désespère pas d'arriver au
résultat annoncé l'année dernière et pour lequel des fonds ont été votés.
Cependant, je ne prends pas la responsabilité de la non-réussite de ce projet ;
et s'il ne se réalisait pas je ferais en sorte que le logement du gouverneur
fût assuré jusqu'à ce qu'on ait pu avoir un local définitif.
Je crois dans tous
les cas qu'il est mieux de maintenir le chiffre tel qu'il est proposé, car la
somme votée l'année dernière ne peut plus être employée, d'après la loi de
comptabilité qui vient d'être votée par le sénat.
Je maintiens donc le
chiffre proposé.
M. de Brouckere. - Je pense que la
chambre ne s'est pas trompée sur la portée de mon langage. Je n'ai jamais dit
qu'on ne pouvait pas restaurer l’ancien palais des princes-évêques de Liège, de
manière à y établir la demeure du gouverneur et les bureaux de son
administration. J'ai fait dresser trois plans, le gouvernement peut le
déclarer, j'ai fait dresser trois plans ayant pour objet d'approprier le palais
de Liège à cet usage. Mais je doute qu'ils soient approuvés ; à Bruxelles, on
ne se prononce pas d'une manière favorable aux plans que j'ai transmis.
Ma
pensée est celle-ci : s'il y a moyen de restaurer le palais des princes-évêques
(page 1360) de Liége de manière à y
placer le logement du gouverneur et les bureaux de son administration., il faut
qu'on le fasse ; il ne faut se décider à construire ailleurs que quand il sera
constaté qu'on ne peut pas placer le gouvernement provincial dans ce palais
sans en démolir une partie ; ce que je ne proposerais pas.
M. le ministre fera
bien de s'occuper sans délai de cet objet, parce que s'il était reconnu que le
palais ne peut pas être approprié, il serait indispensable qu'une proposition
fût faite à la chambre avant la clôture de la session.
M. Delfosse. - J'espère, comme
l'honorable préopinant, qu'il sera possible d'approprier le palais de Liége au
logement du gouverneur et à l'établissement des bureaux de l'administration
provinciale. Si cela n'était pas possible, il faudrait bien faire choix d'un
autre emplacement ; mais ce ne serait pas là sans doute une raison pour
renoncer à la restauration du palais. Je ne puis admettre l'espèce de crainte
manifestée par l'honorable M. Rogier que la restauration du palais serait
abandonnée. Cet édifice est un des monuments les plus remarquables, non
seulement de notre pays, mais de l'Europe entière ; ce serait un acte de
vandalisme, ce serait une honte pour le gouvernement que de le laisser tomber
en ruine.
M. Rogier. - Messieurs, j'ai
précisément été dominé dans mon premier discours par la crainte de voir
abandonner le projet de restaurer le palais des princes-évêques de Liège, et,
tout en exprimant des doutes sur la nécessité de l’allocation pour 1846, j'ai
fait des réserves expresses pour l'emploi de l'allocation de 1845.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - On ne peut plus en disposer.
M. Rogier. - Voici, messieurs,
comment je considère la situation.
On a demandé une
première allocation pour restaurer le palais des évêques de Liège et pour y
placer l'hôtel du gouvernement provincial et les bureaux. Aujourd'hui, il
paraît à peu près démontré que ni l'hôtel du gouverneur provincial ni ses
bureaux ne seront placés au palais des évêques de Liège.
Il suit de là,
messieurs, que l'hôtel occupé précédemment par les bureaux du gouverneur, et
que l'on pouvait restaurer avec une somme de quelques mille francs, a été
abandonné, a reçu une autre destination, et que les bureaux de l'administration
provinciale sont à la veille de ne plus savoir où se placer. Voilà, messieurs,
le résultat du marché qui a été fait par M. le ministre des finances.
Aujourd'hui les
bureaux du gouvernement provincial ne sont pas au palais des évêques de Liége,
ils sont dans un local provisoire, d'où ils sont menacés de devoir sortir. Si
l'on avait restauré pour 20,000 fr. l'ancien local où étaient les bureaux de
l'administration provinciale, celle-ci ne serait pas dans la situation précaire
où elle se trouve, et on n'aurait pas eu des dépenses très considérables à
faire, si tant est qu'on soit obligé de bâtir un hôtel provincial tout entier.
Je dis donc qu'on a fait un très mauvais marché au point de vue du trésor.
Si, messieurs,
l'hôtel du gouverneur provincial n'est pas transporté au palais des évêques de
Liège, si les bureaux de l'administration n'y sont pas transportés, est-ce à
dire qu'il faut laisser dépérir ce palais ? Loin de moi une pareille idée. Je
crois qu'il faudra également aviser à la restauration de ce palais, soit que les
bureaux du gouvernement provincial y soient transférés, soit qu'on les place
ailleurs. Mais dans cette dernière hypothèse, c'est-à-dire si les bureaux du
gouvernement provincial n'y sont pas transférés, les dépenses de restauration
devront être moins élevées, qu'il y aura moins de travaux d'intérieur à faire,
la restauration pourra se borner à des travaux extérieurs.
Du
reste j'engage M. le ministre de l'intérieur à examiner de très près d'ensemble
de cette affaire. Je crois que l'on pourrait être entraîné dans des dépenses
très considérables sans obtenir de grands résultats. Voilà mon opinion quant à
l’établissement du gouvernement provincial dans le palais de Liège. Mais je
pense aussi qu'au moyen de dépenses non exagérées on peut arriver à une bonne restauration
de ce monument que pour ma part je recommande à toute la sollicitude de M. le
ministre de l'intérieur.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Messieurs, la question de savoir si l'on peut disposer encore des crédits
ouverts en 1845, me paraît résolue par les dispositions qui ont été votées
récemment. Un budget reste ouvert pour imputer, à raison d'engagements
contractés pendant la durée de l'exercice. Or, quant au palais de Liège, par
suite des doutes qui sont survenus sur le mode d'appropriation, on n'a pas,
pendant la durée de l'exercice, engagé la somme votée au budget do l'an
dernier.
M. Rogier. - On a voté une loi
spéciale.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Mais on n'a pas
engagé le crédit porté au budget. Autre chose est une loi de principe qui
décrète une dépense, autre chose est la loi qui autorise la dépense, qui porte
l'allocation, et dès lors, d'après les véritables principes en matière de comptabilité,
la somme votée l'an dernier, pour le palais de Liége, n'est plus à la
disposition du gouvernement. Elle doit rester comme fonds non dépensé.
Ces principes,
messieurs, ont été développés dans la discussion de la loi de comptabilité, et
je m'étonne que l'honorable membre qui a pris une large part à cette
discussion, paraisse les contester.
M. Rogier. - Je ferai observer
que c'est par une loi spéciale du 18 mai que le premier crédit a été alloué.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Qu'est-ce que cela fait ? La loi qui ouvre un crédit rattache toujours ce
crédit à un exercice, et dès lors il importe peu que ce soit par une loi
spéciale que le crédit ait été voté.
Je regrette,
messieurs, de devoir ajouter quelques mots sur une affaire qui a longtemps
occupé la chambre.
La chambre voudra
bien se rappeler que la vente qui avait été faite de la main à la main de
l'ancien hôtel provincial de Liège, avait pour résultat, dans notre pensée, de
rendre immédiatement possible l'appropriation des locaux du palais des
princes-évêques de Liège. Cependant aujourd'hui on vient invoquer les
manifestations qui se sont élevées contre cette appropriation pour juger un
acte qui était antérieur à ces obstacles. C'est absolument comme si j'avais pu
prévenir, lorsque j'ai voulu faciliter l'exécution d'un plan auquel toute la
ville de Liège s'intéressait, qu'une si grande émotion se serait manifestée,
que de si grandes difficultés se seraient élevées sur le mode d'appropriation.
Je n'entrerai pas
plus avant dans cette discussion. Mais je dis qu'il y a injustice à juger cet
acte à raison des difficultés qui sont survenues après qu'il a été posé. Ce
n'est pas ainsi qu'on doit juger cet acte. On doit voir le but du gouvernement,
les motifs qui l'ont porté à agir ainsi qu'il l'a fait et c'est de cette
manière que la chambre a jugé cet acte lorsqu'à une immense majorité elle l'a
approuvé.
L'honorable
membre dit qu'il est à peu près démontré que l'hôtel du gouvernement et les bureaux
de l'administration provinciale ne seront pas placés dans le local du palais
des princes-évêques de Liège. J'ai écouté ce qu'a dit tout à l'heure mon
honorable collègue, et il vous a déclaré que la possibilité de cette mesure
était à peu près démontrée. L'honorable ministre de l'intérieur a en effet
trois plans d'appropriation du palais des princes-évêques pour y placer les
bureaux et l'habitation du gouverneur. Ce palais, comme je le connais, se
compose d'immenses bâtiments environnant de toutes parts trois grandes cours.
Une partie est occupée par les tribunaux ; une autre partie n'est pas occupée ;
et d'après la connaissance que j'ai des localités, d'après les plans que j'ai
eus sous les yeux, puisqu'il s'agit de domaines, je conçois difficilement que
l'on arrive à démontrer l'impossibilité absolue d'établir dans un pareil
bâtiment les bureaux d'une administration provinciale et l'habitation du
gouverneur.
Quoi qu'il en soit,
cette question sera bientôt résolue, mais je demande à l'impartialité de l'honorable
membre de ne pas apprécier l'acte de vente de l'hôtel du gouvernement
provincial de Liège d'après les difficultés qui ont surgi sur le mode
d'appropriation du palais.
M. Delfosse. - Je ne veux pas
reproduire la discussion qui a eu lieu au sujet de la vente de l'ancien hôlel
du gouvernement provincial ; mais je ne puis laisser sans réponse ce que M. le
ministre des finances vient de dire que cet acte n'aurait été blâmé qu'à raison
de faits qui n'existaient pas à l'époque où il a été posé, de faits survenus
depuis.
M. le ministre des
finances sait fort bien que l'acte a été blâmé comme irrégulier et comme
onéreux pour le trésor. Au lieu de faire procéder à une adjudication publique,
comme c'était son devoir, M. le ministre des finances a cédé à main ferme et à
vil prix un immeuble important qui était la propriété de l'Etat. Les raisons à
l'aide desquelles on cherchait à justifier cet acte étaient des plus futiles ;
je l'ai prouvé dans le temps ; les torts de M. le ministre des finances sont
tout à fait indépendants des faits postérieurs à l'acte de vente.
M. le ministre des finances
(M. Malou). - L'honorable M. Rogier est venu dire que malgré
l'acte posé par le ministre des finances, il se pourrait que l'hôtel du
gouvernement provincial ne fût pas transféré au palais des princes-évêques.
J'ai répondu, ne voulant pas revenir sur toute la discussion antérieure, que
quand bien même il en serait ainsi, on était non recevable à critiquer cet
acte.
Je ne suivrai pas
l'honorable M. Delfosse sur un autre point. La chambre a jugé. La cause est
entendue. Une grande majorité a prononcé.
M. Rogier. - Mon intention
n'est pas de rouvrir la discussion sur un acte que j'ai blâmé dans le temps et
que je continue à blâmer. Mais cet acte se présentait naturellement à nos
souvenirs à l'occasion de la somme demandée pour la restauration du palais de
Liège. Nous repoussions le marché, dont on nous demandait la sanction, parce
que, dans notre opinion, les bâtiments de l'hôtel provincial auraient dû
continuer d'être occupés par les bureaux provinciaux et non pas être cédés à
vil prix à une association religieuse ou à toute autre. Voilà ce que nous
soutenions.
Aujourd'hui on nous
propose une nouvelle somme pour des travaux d'appropriation qui, dans notre
opinion, ne se feront pas. Nous avions bien le droit de regretter le marché
onéreux qui avait été passé par M. le ministre des finances, d'autant plus que
M. le ministre de l'intérieur lui-même reconnaît qu'il sera probablement dans
l'obligation de louer, d'ici à peu de temps, un nouveau local pour y placer les
bureaux du gouvernement provincial.
Il ne fallait pas
déplacer ces bureaux ; il suffisait de réparer les dégâts causés par
l'incendie. Les bureaux étaient bien où ils étaient ; ils auraient pu y rester
longtemps. Mais non, on les a déplacés pour accorder un avantage à un couvent
de femmes. Voilà la vérité toute pure.
Il arrive aujourd'hui
que le gouvernement provincial est dépouillé de ses locaux, qu'il se trouve sur
le point d'être mis à la porte, et qu'il ne sait pas encore où il se logera.
Nous avons eu le droit de qualifier sévèrement, comme nous qualifions encore
sévèrement, et non avec injustice, le marché qui a été conclu.
M. le ministre des
finances s'est étonné de la doctrine que j'ai professée en matière de
comptabilité, en présence d'une loi à la discussion de laquelle j'avais pris
une assez grande part.
Qu'il me soit permis
de dire à mon tour que je m'étonne de la doctrine que M. le ministre des
finances voudrait introduire, en ce qui concerne la disponibilité de certaines
allocations.
L'allocation dont il
s'agit n'a pas été accordée par un article du budget, (page 1361) elle a été accordée par la loi du 18 mai 1845. Je ne
pense pas que M. le ministre des finances puisse soutenir dire qu'à partir du
31 décembre 1845, cette allocation accordée par une loi spéciale n'est plus
disponible. Une pareille doctrine serait tout ce qu'il y a de plus
antigouvernemental. M. le ministre des finances n'y a pas pensé !
Comment ! Nous avons voté en 1845 une loi qui ouvre un crédit de trois
millions et demi pour construction du canal de Liége à Maestricht. Si, au 31
décembre de la même année, le ministère n'a rien imputé sur cette allocation, il
n'aurait plus le droit d'en disposer ultérieurement ! Cela n'est pas
possible ! II faut distinguer entre les allocations annuelles portées au
budget et les allocations spéciales accordées par des lois spéciales. Il est
évident qu'une allocation votée par une loi spéciale ne s'éteint pas avec
l'exercice durant lequel elle a été votée.
Si une allocation
spéciale était votée par une loi spéciale dans les derniers jours de l'année,
d'après le système de M. le ministre, qu'arriverait-il ? Qu'on aurait voté une
loi sans effet, un crédit qui disparaîtrait quelques jours après son ouverture.
Evidemment,
les allocations accordées par une loi spéciale vont au-delà de l'année où elles
ont été votées.
La doctrine professée
par M. le ministre des finances me paraît tout à fait inadmissible.
Revenant à l'article
en discussion, si le ministère ne consent pas à ce que le budget de 1846 en
soit dégrevé, je n'insiste pas pour en demander la suppression. Mais je
préviens la chambre qu'elle votera une allocation qui, j'en ai l'assurance,
restera une lettre morte.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux). - Je ne veux pas rouvrir un débat terminé par
un vote de la chambre. Cependant je ne puis m'empêcher de faire cette
observation : le gouvernement, dans toute cette affaire, n'a voulu faire
plaisir ni à M. Habets, ni à l'institution qu'il dirige. Il avait hâte de
pourvoir aux besoins de la province de Liége. C'est pour cela qu'il a statué
d'urgence. Sur les réclamations qui se sont élevées contre les changements
projetés au palais des anciens princes-évêques, la gouvernement a abandonné son
plan primitif, et en a fait étudier un nouveau. Je suis persuadé que si le
gouvernement avait été prévenu à temps du désir de l'administration communale
de Liége d'obtenir l'élargissement de certaines rues, il aurait réservé une
fraction de terrain à cet effet, et jamais on n'aurait entendu parler de cette
affaire dans la chambre. La proposition, lorsqu'elle a été discutée au
commencement de cette session, aurait été votée sans aucune opposition.
Pour
en revenir à la question en discussion, je n'ai pas dit qu'il fût impossible
d'appliquer le crédit au palais de Liège ; mais je n'ai pas dit que ce fût possible.
Je n'ai pas examiné l'affaire.
Dans tous les cas, je
ne pense pas qu'il y ait de difficulté à prolonger le bail pour l'emplacement
du gouvernement provincial et des bureaux.
Cette affaire, qui
est réellement urgente, sera traitée comme telle.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Voici les termes de l'article 2 de la loi sur la comptabilité de l'Etat :
« Art. 2. Sont seuls
considérés comme appartenant à un exercice les services faits et les droits acquis
à l'Etat et à ses créanciers pendant l'année qui donne sa dénomination à
l'exercice.
« L'exercice commence
le 1er janvier et finit le 31 décembre de la même année.
« Toutefois, les
opérations relatives au recouvrement des produits, à la liquidation et à
l'ordonnancement des dépenses, pourront se prolonger jusqu'au 31 octobre de
l'année suivante. »
Et la discussion est
encore très présente à ma mémoire ; il a été expressément entendu (ce que
d'ailleurs les termes indiquent), que l'exercice restait ouvert, non pour
engager des sommes, mais pour liquider en raison des engagements contractés
pendant la durée de l'exercice.
Si l'on se départ de
cette règle, il arrivera que les comptes de l'Etat ne seront jamais réglés.
Ce principe que
consacre la loi de comptabilité a été constamment suivi par le gouvernement,
depuis 1830, par l'honorable membre lui-même, lorsqu'il était ministre, j'en
suis convaincu.
Y a-t-il une distinction à faire entre les crédits
portés au budget et les crédits alloués par des lois spéciales ? Oui, il y a
parfois une distinction à faire. Ainsi lorsqu'une loi qui décrète un grand
ouvrage d'utilité publique ne porte pas sur un exercice déterminé, cette règle
peut ne pas être appliquée. Mais il n'en est pas de même pour les crédits supplémentaires
comme vous en votez souvent, crédits qui se rattachent à un exercice ; c'est ce
qui a eu lieu pour le crédit concernant le palais de Liège. De là, il résulte
que si l'on n'a pas pris d'engagements sur le crédit voté l'an dernier, cette
somme reste indisponible, et qu'il faut maintenir au budget le nouveau crédit
qui est demandé.
M. de Brouckere. - Les locaux pour
le gouvernement provincial n'ont pu être obtenus que pour trois ans, et avec la
condition que, si l'hôtel était vendu, il devrait être évacué six mois après la
notification.
Il est un autre point
qu'on ne doit pas perdre de vue et sur lequel j'appellerai l'attention du
gouvernement, c'est que le gouvernement provincial n'a renoncé aux droits qu'il
prétend avoir sur l'ancien hôtel, qu'en vue du plan qui entraînait plus ou
moins la réparation du palais. Si donc on se décide à bâtir ailleurs, il faudra
l'assentiment du conseil provincial. Rien n'est décidé. Mais il est
indispensable de prendre, dans un bref délai, une décision quelconque, afin que
la décision soit soumise dans le courant de cette année aux chambres et au
gouvernement provincial.
- L'article 2 du
chapitre X est mis aux voix et adopté.
MOTION D’ORDRE
M.
Verhaegen. - Depuis plusieurs
jours je me proposais de faire à M. le ministre des affaires étrangères une
interpellation que son absence m'a forcé d'ajourner. Aujourd'hui que M. le
ministre est à son banc je m'empresse de lui demander des renseignements sur la
voie de fait dont un de nos officiers vient d'être l'objet de la part du
gouvernement prussien.
Nous lisons dans la
« Gazette de France’ :
« Zawiska, officier
de cuirassiers polonais au service de Belgique, a été plus malheureux que les
autres officiers polonais repoussés de la frontière prussienne. Il avait pu
pénétrer en Saxe ; mais arrêté là il a été chargé de chaînes, traîné à pied par
les gendarmes jusque sur le territoire prussien et là remis aux autorités
prussiennes de Frédéric-Guillaume IV ; celui-ci le livrera sans doute aux
Russes comme natif de Radow, possession impériale, et peut-être à l'heure qu'il
est la victime a-t-elle expiré.
« Si
le fait est vrai, c'est un acte de tyrannie exercée par des puissances amies
sur un officier de l'armée belge, dont les intentions ont pu, tout au plus,
être suspectées ; car il n'a pas été trouvé ou arrêté les armes à la main, ni à
la tête d'un corps d'insurgés polonais ; il paraît au contraire que ce jeune
officier était allé voir sa famille dans la Saxe longtemps avant
l'insurrection.
« Nous avons des
représentants en Allemagne pour protéger les nôtres ; ils ont dû instruire le
gouvernement sur le sort d'un officier faisant partie de l'armée belge. »
Je viens donc prier M. le ministre des affaires
étrangères de nous donner des explications sur ce point.
M.
le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps). - Je demanderai à
l’honorable membre d'ajourner ma réponse à lundi. Je pourrais lui faire une
réponse immédiate, mais elle serait moins complète que celle que je pourrai lui
faire lundi.
M. Verhaegen. - Soit, à lundi !
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DU DEPARTEMENT DE
L’INTERIEUR POUR L’EXERCICE 1846
Discussion des articles
Chapitre XI. - Ecole
de médecine vétérinaire
Article premier
M. le président. - La discussion
est ouverte sur l'article premier du chapitre XI « Ecole de médecine
vétérinaire et d'agriculture de l'Etat. Jury d'examen : fr. 153,500. »
M. de Renesse. - Messieurs, l'année dernière, lors de la discussion
du budget de l'intérieur, de vifs débats ont été soulevés à l'égard de l'école vétérinaire
de l'Etat. Un rapport du jury d'examen de 1844 avait dépeint l'état de cet
établissement d'utililé publique sous des couleurs si sombres, que plusieurs de
nos honorables collègues et moi, nous avons cru devoir prendre la défense de la
plus grande partie du corps professoral qui, malgré ses vives instances,
n'avait pu obtenir communication du rapport du jury d'examen, afin de pouvoir
se défendre des allégations avancées contre cette institution, dont plusieurs
professeurs avaient été les fondateurs et se croyaient attaqués dans leur
honneur. Pour mettre plusieurs honorables membres de la chambre qui, l'année
dernière, ne siégeaient pas dans cette enceinte, au courant de toute cette
malheureuse affaire de l'école vétérinaire de l'Etat, j'aurai l'honneur de
donner lecture à la chambre d'un extrait du jury d'examen qui se trouve dans le
discours prononcé, à cette occasion, par le rapporteur de la section centrale,
l'honorable M. Maertens ; il est ainsi conçu :
« L'école vétérinaire
et d'agriculture de l'Etat, dans les conditions d'hommes et de choses où se
trouve cet établissement, ne répond pas au but de son institution.
« Telle est l'opinion
unanime du jury, elle résulte de l'ignorance des élèves, lesquels n'ont pu être
interrogés que sur une faible partie du programme. Ce programme n'est qu'un
grand mensonge, une déception. Répondu et affiché partout, il a déterminé un
grand nombre de familles à envoyer leurs enfants à l'école vétérinaire et
agricole de Bruxelles, dans l'espérance de leur voir acquérir les connaissances
promises avec tant d'emphase. Ces familles se sont imposé des sacrifices en
pure perte ; car, d'un côté, l'enseignement agricole n'y existe pas, et, d'un
autre côté, sous le rapport de l'instruction vétérinaire, cet établissement ne produira
que des sujets augmentant le nombre déjà trop grand d'empiriques, fléau des
campagnes. »
Le rapport continue
et porte :
« M. le ministre a
recommandé de la sévérité dans la délivrance des diplômes, en faisant remarquer
au jury que, dans l'intérêt de l'agriculture, on ne devait délivrer ces titres
qu'aux personnes qui sont réellement dignes de les obtenir.
« Le jury n'a pu se
conformer à cette recommandation, parce qu'en déployant une apparence de
sévérité, il n'aurait obtenu aucune réponse. Par conséquent, il a dû se borner
à interroger les candidats sur les premiers éléments de quelques cours du
programme. »
« Et encore, comme je
l'ai dit plus haut, sur seize candidats qui se sont présentés, trois seulement
ont obtenu le diplôme.
« Plusieurs élèves ont
déclaré oralement et par écrit que des cours n'avaient point été donnés ou ne
l'avaient été que d'une manière incomplète et souvent irrégulière. Les examens
confirmaient ces déclarations.
« L'enseignement
repose moins sur la théorie que sur la routine.
« Tous les élèves
sont étrangers aux notions les plus vulgaires d'anatomie pathologique. On n'a
jamais enseigné le cours important sur lequel repose l'étude de la physiologie
et de la pathologie. »
« Voilà pour les
connaissances ; voyons maintenant ce qui en est du régime de l'école :
« Le jury a visité
l'établissement. Il n'est clos de nulle part, et cette absence de clôture a des
conséquences sérieuses sur la discipline.
« La malpropreté, le
désordre semblent y avoir fixé leur domicile (les écuries et la pharmacie
exceptées) ; il n'y a ni direction, ni subordination, tout flotte au hasard.
Des faits matériels, les inconvénients passent dans (page 1362) l'ordre intellectuel. L'esprit des élevés s'en ressent,
ainsi que leurs études ; leurs réponses l'ont prouvé.
« On voit à regret un
cabaret établi dans une institution scientifique, comme un appel, une
provocation aux plus funestes habitudes : la paresse, l'ivrognerie, le jeu.
« Les collections
scientifiques se bornent aux objets d'histoire naturelle que le gouvernement a
donnés à l'école ; aucune préparation anatomique ne s'y trouve.
« "Malgré
l'active surveillance du jury, les réponses aux questions écrites ont été
glissées frauduleusement dans la salle où étaient renfermés les
candidats. »
« Passons maintenant
à la manière dont les cours sont donnés :
« Physique et chimie.
Absence complète de connaissances et de moyens de les acquérir dans
l'établissement. Les élèves en ignorent les premiers éléments : leurs réponses
ont révélé leur incapacité de la manière la plus déplorable.
« Botanique. Les
questions les plus élémentaires n'ont pu être résolues par les élèves. Le
jardin se trouve dans un désordre complet, les plantes manquent d'étiquettes,
leur classification est vicieuse.
« Anatomie. Tous
les élèves ont montré une faiblesse désespérante sur ce cours important.
« Physiologie. Les
réponses des élèves ont prouvé qu'ils étaient étrangers à une partie de la
physiologie ; ils ont été presque tous dans l'impossibilité de donner une
explication satisfaisante sur les autres parties. Aucun n'a obtenu vingt points
sur le maximum fixé à quarante.
« Pathologie
générale et spéciale. C'est
particulièrement sur ces deux cours que le jury a été frappé de l'ignorance des
élèves. Ils ne connaissent pas seulement la valeur des expressions reçues en
pathologie. Ils n'ont aucune notion de la thérapeutique générale ou spéciale.
Il est tel des élèves qui, après avoir passé cinq ou six années à l'école, se
trouve à peine au niveau du plus grossier empirique. »
Et le rapport conclut
en disant :
« II paraît que
toutes leurs connaissances se bornent à savoir forger des fers et à ferrer des
chevaux, au simple métier de maréchal.
« En présence de cet
état de choses, le gouvernement ne peut rester inactif sans se rendre complice
d'une mystification scientifique, qui dure depuis trop longtemps. »
Il est évident,
messieurs, lorsqu'un établissement de l'Etat, sous la surveillance immédiate du
gouvernement, situé à la porte de Bruxelles, est attaqué pour des faits aussi
graves, d'où il résulterait qu'il n'y aurait ni direction ni subordination, que
tout est en désordre, malpropre, flotte au hasard, et que tous les cours (ceux
des deux professeurs qui faisaient partie du jury exceptés) ne sont pas ou sont
très mal enseignés, que le directeur de cet établissement et huit autres
professeurs n'ont pu rester calmes. Ils devaient à leur honneur, au mandat
qu'ils tenaient du gouvernement lui-même, de demander formellement une
contre-enquête faite au grand jour, par des hommes compétents et impartiaux,
ils s'adressèrent à M. Nothomb, ministre de l'intérieur, pour obtenir
communication du rapport du jury d'examen, afin d'être en état de le réfuter ;
cette communication ne leur fut pas donnée : il semblait que l'on voulait bien
les condamner sans les entendre. C'est alors que, par pétition adressée à la
chambre et signée par MM. Decamp, directeur, A. Thiernesse, Brogniez, Graux,
Bech, Delcourt, Héger, Scheidweiler, Froidmont, professeurs, cette grande
majorité du corps professoral et le directeur réclamèrent l'intervention de la
chambre pour obtenir une contre-enquête faite au grand jour, et être mis en
état de répondre aux attaques dirigées contre eux.
Pendant la
discussion, M. le ministre de l'inférieur, n'ayant pas répondu formellement aux
observations faites par plusieurs de nos honorables collègues et par moi, je
crus devoir proposer à la chambre de vouloir ordonner une enquête parlementaire
; mon but principal était, que tout ce qui avait rapport à l'école vétérinaire
de l'Etat fût examiné sérieusement, que les professeurs, le directeur, fussent
entendus, et pussent se défendre des assertions écrites contre eux et leurs
cours ; ma demande était d'autant plus fondée, que M. le ministre de
l'intérieur d'alors n'avait pas cru devoir examiner, par lui-même, la véritable
situation de cet établissement ; qu'il l’avait constamment ajournée, quoique
depuis plusieurs mois, il dût avoir connaissance du rapport du jury d'examen ;
qu'il n'avait rien fait pour faire cesser la zizanie, la division entre les
professeurs de cet établissement, dont deux étaient ouvertement soutenus par M.
le directeur de l'agriculture, tandis que les huit autres professeurs et le
directeur de l'école vétérinaire étaient en opposition avec la direction
supérieure de l'agriculture, dont ils croient avoir à se plaindre.
Ma proposition
d'enquête était ainsi conçue : « J'ai l'honneur de proposer de n'allouer à
l'article premier, chapitre X, qu’un crédit de dix mois, 124,580 fr., et de
nommer dans le sein de la chambre une commission d'enquête chargée de
rechercher les causes de la décadence de l'école vétérinaire de l'Etat, et les
moyens à employer pour parer aux inconvénients qui existent actuellement. »
L'honorable M.
Nothomb, pour repousser ma proposition, disait que la chambre ne devait pas
faire de l'administration, qu’il fallait laisser agir librement le ministre de
l'intérieur, qu'il voulait faire l'enquête par lui-même, qu'il croyait que
l'intervention très forte, très directe du chef du département était ici
nécessaire. Certes, il n'entrait pas dans mes intentions de faire faire
inutilement à la chambre de l'administration. Si, au département de
l'intérieur, l'on avait administré avec soin les intérêts de l'école
vétérinaire de l'Etat, si l'on avait agi impartialement envers le corps
professoral, si l'on avait consenti à ce que les professeurs pussent se
défendre des allégations dirigées contre eux, si on avait voulu les entendre
avant de les condamner, je n'aurais pas cru devoir proposer une enquête
parlementaire. Plusieurs de nos honorables collègues ayant soutenu avec force
ma proposition, l'honorable ministre de l'intérieur, M. Nothomb, prit
l’engagement formel envers la chambre de faire une enquête contradictoire ; il
déclara qu'il la ferait dans l'intervalle des sessions, qu'il en rendrait
compte à la chambre, et que le crédit pour 1845 à 1846 ne serait pas demandé,
sans que la question fût été complétement éclaircie.
La majorité de la
chambre, ayant foi dans l'engagement ministériel, se prononça contre l'enquête
parlementaire ; elle fut repoussée par 35 suffrages contre 300 et une
abstention, et probablement elle eût été adoptée malgré M. le ministre de
l'intérieur, si elle n'avait été mise aux voix à 5 heures du soir, où déjà
plusieurs représentants avaient quitté la séance.
D'après la promesse
formelle de M. le ministre de l'intérieur, la chambre devait espérer qu'au
commencement de la session actuelle, le département de l'intérieur aurait remis
à la chambre une enquête contradictoire, pour que les membres de la représentation
nationale pussent obtenir des éclaircissements sur la situation de l'école
vétérinaire, sur les faits cités à charge du directeur et de plusieurs
professeurs de ces établissements. Pour prouver à cet égard que toute la
chambre voulait une pareille enquête, elle n'avait alloué pour les dépenses de
l'école vétérinaire, que le crédit nécessaire aux dix premiers mois de l'année
1845. Néanmoins, malgré ce vote formel de la chambre, il paraît que l'on n'en
tînt aucun compte ; plusieurs mois de la session se passèrent, sans qu'aucun
rapport fût présenté. D'après l'ensemble de la discussion qui a eu lieu l'année
dernière, il résulte évidemment que M. Nothomb avait pris l'engagement de faire
une enquête contradictoire, il avail déclaré positivement qu'il voulait la
faire personnellement, qu'il consulterait les professeurs sur les faits qui les
concernent.
Sous la date du 10
mai 1845, M. Nothomb institua une commission ; il paraît qu'elle n'a pas eu
mission de faire une enquête contradictoire, car jusqu'ici, les professeurs qui
s'étaient adressés à la chambre et au gouvernement pour demander une enquête au
grand jour, n'ont pas été entendus par cette commission ; ils n'ont pu donc se
disculper des faits allégués à la charge de l'école vétérinaire, et sur leur manière
de donner leurs cours qui avait été critiquée. Aussi, par leur nouvelle
requête, adressée à la chambre sous la date du 13 mars dernier, MM. les
professeurs de l’école vétérinaire croient devoir itérativement demander que
l'enquête ordonnée par la chambre ait lieu.
Le département de l'intérieur n'a, ainsi,
nullement satisfait à la promesse formelle d'éclairer complétement la chambre
sur la situation réelle de l'école vétérinaire de l'Etat ; il n'a tenu aucun
compte du vote de la chambre, qui n'avait alloué que le crédit nécessaire aux
dix premiers mois de 1845, afin d'obliger le gouvernement à faire une enquête
contradictoire, et de la présenter à la représentation nationale au
commencement de la session actuelle ; c'est, du moins, ainsi que l'on doit
interpréter le vote à la chambre ; j'en appelle au souvenir de tous les
honorables collègues qui ont assisté l'année dernière à la discussion du
chapitre de l'école vétérinaire de l'Etat ; tous voulaient une enquête
contradictoire, aussi bien ceux qui votèrent pour l'enquête administrative, que
ceux qui donnèrent leur assentiment à ma proposition d'enquête parlementaire.
D'après l'extrait du
rapport de la commission, nommée par M. Nothomb le 10 mai 1845, il paraît que,
réellement, cette commission n'a pas fait une enquête contradictoire ; elle
déclare s'être abstenue, autant qu'elle a pu le faire, de toucher au passé de
l'école et de réveiller ainsi ces questions personnelles que de fâcheux débats
y ont naguère excitées ; sa mission était plus haute et ses devoirs moins
pénibles. Appelée par la confiance du gouvernement à pourvoir aux besoins de
l'avenir, elle avait d'autant mieux le droit de négliger le passé, que de ses
propositions mêmes devait ressortir la condamnation qu'il mérite.
Ma proposition d'enquête
parlementaire ayant surtout eu pour but de rechercher les causes de la
décadence de l'école vétérinaire de l'Etat, et de la scission qui existe parmi
le corps professoral, j'ai lieu de m'étonner qu'au département de l'intérieur
l'on n'ait pas cru devoir donner une mission spéciale à cette commission, de
faire une enquête contradictoire sur les faits allégués à la charge de la
plupart des professeurs et du directeur de cet établissement d'utilité
publique, et de les entendre dans leurs explications, suivant la promesse
formellement faite, l'année dernière, par l'honorable M. Nothomb, qui a
formellement déclaré qu'il entendrait lui-même les professeurs, qu'il ferait
une enquête contradictoire, qu'il voulait que la question fût complétement
éclairée.
Puisqu'il résulte
clairement de tout ce que j'ai cru devoir énoncer à la chambre sur cette
malheureuse affaire de l'école vétérinaire, que le département de l'intérieur
ne s'est nullement conformé au vote de la chambre, d'où il résultait,
évidemment, qu'une enquête contradictoire administrative devait être faite sur
toutes les questions soulevées l'année dernière, lors de la discussion du
budget de l'intérieur, à l'égard de la situation de l'école vétérinaire et des
causes qui ont amené la scission entre les professeurs de cet établissement
sous la surveillance immédiate du département de l'intérieur, je crois, dans
l'intérêt de la vérité, de la moralité, du pays et de l'administration, devoir
renouveler ma proposition de nommer, dans le sein de la chambre, une commission
d'enquête qui rechercherait les causes de la décadence de l'école vétérinaire
de l'Etat, indiquerait les moyens d'y remédier et aurait mission spéciale
d'entendre le directeur et tous les professeurs de cet établissement, sur les
faits allègues à leur charge par le jury d'examen de 1844.
|J espère que ma
proposition sera accueillie avec faveur par la chambre ; (page 1363) M. le ministre de l'intérieur lui-même doit demander,
que le plus grand jour soit répandu sur cette malheureuse affaire de l'école
vétérinaire ; elle n'a eu que trop de retentissement, il doit désirer qu'il ne
plane aucun soupçon de partialité et de favoritisme sur la conduite
administrative de l'un des fonctionnaires de son département ; l'administration
supérieure du pays ne doit craindre aucune investigation de la représentation
nationale, si ses actes sont conformes à la justice, et aux véritables intérêts
de la nation ; elle doit demander, au contraire, que les chambres examinent
avec la plus sérieuse attention tous les faits qui pourraient être suspectés de
partialité ou d'arbitraire ; elle ne doit pas désirer de couvrir d'un
voile les mystères d'une malheureuse affaire, qui a porté le trouble et la
désunion parmi le corps professoral d'un établissement d'utilité publique, pour
lequel le pays avait fait des sacrifices considérables.
D'après ces
considérations, je dois persister dans ma résolution de proposer à la chambre
la nomination d'une commission d'enquête parlementaire ; j'appuierai une
pareille proposition, ou la ferai moi-même, chaque fois qu'il me paraîtrait que
le gouvernement s'abstiendrait d'administrer avec force et impartialité les
établissements d'utilité publique confiés à ses soins et à sa direction.
Dans une séance
précédente, un honorable membre de la chambre a supposé que M. le commissaire
du Roi auprès de l'école vétérinaire de l'Etat se serait abstenu de remplir ses
devoirs et d'adresser au département de l'intérieur des rapports sur cet
établissement. Pour prouver à la chambre que cette assertion est erronée, j'ai
cru devoir me rendre auprès de M. le commissaire du Roi, afin de lui demander
quelques renseignements sur les rapports qu'il a eus, depuis 1840, avec l'école
vétérinaire, et sur ses relations, à cet égard, avec le département de
l'intérieur ; cet honorable haut fonctionnaire m'a montré un dossier volumineux
contenant un assez grand nombre de rapports et lettres qu'il a adressés au
département de l'intérieur, soit pour faire des propositions utiles à cet
établissement, soit pour faire des objections sur des mesures que l'on voulait
y prendre ; il m'a formellement déclaré que s'il n'a pas rempli aussi utilement
qu'il l'eût désiré le mandat dont il avait été honoré, c'est parce qu'il avait
été entravé dans l'exercice de ses fonctions ; à plusieurs reprises, il a
réclamé auprès du département de l'intérieur de vouloir, après l'avoir entendu,
déterminer convenablement ses attributions et sa qualité de commissaire du
gouvernement pour les affaires et établissements qui concernent l'agriculture
et spécialement le haras et l'école de médecine vétérinaire et d'agriculture,
et d'empêcher que désormais il soit mis aucune entrave à ce qu'il puisse les
remplir.
Si on voulait
contester cette assertion, M. le commissaire du Roi m'a prié de déclarer à la chambre
qu'il s'adresserait à M. le ministre de l'intérieur pour obtenir l'autorisation
ou pour pouvoir publier les rapports qu'il a adressés, depuis 1840, au
département de l'intérieur, ou pour les déposer sur le bureau de la chambre. Il
désire que la chambre fasse une sérieuse investigation sur tout ce qui a
rapport à l'école vétérinaire : il ne la craint nullement, quant à son
administration antérieure de cet établissement de l'Etat.
Malgré ses rapports
et ses démarches personnelles surtout auprès de l'un des prédécesseurs de M. le
ministre de l'intérieur actuel, M. le commissaire du Roi, voyant que l’on ne
tenait aucun compte de ses avis et propositions relatives à l'école
vétérinaire, crut devoir écrire à l'honorable M. Nothomb, si, au département de
l'intérieur, l'on jugeait les fonctions de commissaire du gouvernement
inutiles, d'en proposer la suppression au Roi ; que si, au contraire, M. le
ministre les croyait nécessaires, il lui demandait de faire cesser les entraves
qui l'empêchaient de les remplir ; par la réponse écrite de la main de M.
Nothomb, cet honorable ministre disait à M. le commissaire qu'il regardait ses
fonctions comme tellement nécessaires, qu'il avait l'intention d'établir de
pareilles fonctions pour d'autres services ; qu'il viendrait lui-même visiter
l'école vétérinaire, y réintégrer M. le commissaire, et l'y faire reconnaître
de nouveau ; M. le ministre semblait ainsi reconnaître que M. le commissaire du
gouvernement avait été écarté de fait, que l'on entravait ses fonctions, puisque
M. le ministre déclarait lui-même, dans sa lettre, qu'il voulait le réintégrer
et l’y faire reconnaître de nouveau.
Cependant, malgré ces
différentes démarches de M. le commissaire du Roi, rien n'a été fait à cet
égard, et d'autre part, il n'a plus été consulté sur les affaires qui
concernent l'agriculture.
D'après
ces déclarations qui, au besoin, peuvent être prouvées par des rapports et des
lettres, il me semble que l'on ne peut reprocher, avec quelque fondement, à M.
le commissaire du gouvernement de n'avoir pas rempli ses fonctions aussi
utilement que possible ; si au département de l'intérieur on eût voulu que M.
le commissaire pût exercer ses fonctions, l'on aurait dû le consulter sur
toutes les mesures à prendre, soit à l'égard de l'école vétérinaire, ou sur
tout ce qui avait rapport à l'agriculture ; mais il semblait d'après les
expressions mêmes de M. Nothomb, que ce ministre avait lui-même reconnu dès le
principe que c'était un parti-pris de l'écarter.
Je laisse à juger à
la chambre, si M. le commissaire du Roi pouvait encore utilement exercer ses
fonctions auprès de l'école vétérinaire de l'Etat, lorsqu'au département de
l'intérieur l'on faisait si peu de cas de ses rapports, que l'on n'y donnait
presque pas suite ni réponse et qu'on cherchait à entraver ou à empêcher sa
surveillance.
M. Liedts. - Je ne veux pas
prendre parti dans cette lutte engagée entre les professeurs d'une part et les
membres du jury d'examen d'autre part. Je ne veux pas non plus m'opposer à la
demande soumise en ce moment à la chambre par l’honorable M. de Renesse. Mais
le corps professoral, par une pétition toute récente, vient de s'adresser à la
chambre. Cette pétition a même été imprimée et distribuée aux membres. A chaque
page, on semble insinuer que jusqu'en 1840, l'école avait été florissante,
qu'elle ne doit l'état de décadence où elle se trouve qu'aux actes posés depuis
cette époque.
Je n'ai pas à
rechercher ce qui a été fait par celui qui m'a succédé au département de
l'intérieur. Mais vous devez comprendre qu'il m'importe d'établir que les actes
de mon administration n'ont pu avoir l'influence désastreuse qu'on paraît leur
attribuer. Vous verrez même qu'ils m'ont été inspirés par trois des principaux
membres du corps professoral qui s'adresse en ce moment à la chambre.
Constatons avant tout
que cet état de décadence dont se plaignent aujourd'hui les pétitionnaires, ils
s'en plaignaient déjà avant mon entrée aux affaires. En effet, plusieurs fois
trois des signataires de la pétition sont venus me trouver pour me signaler les
abus de l'organisation à cette époque.
Je les ai priés
d'indiquer par écrit ce qu'ils croyaient convenable de faire pour mettre un
terme aux abus qu'ils me signalaient. Je me félicite de leur avoir demandé
cette note ; elle est écrite de la main de l'un d'entre eux.
Dans l'opinion de ces
professeurs, l'école, au lieu de répondre au but de sa création, peuplait le
pays d'empiriques et de charlatans.
« Les abus,
disaient-ils, sont bien reconnus aujourd'hui ; ils sont préjudiciables :
« 1° Aux jeunes
gens mêmes ainsi complaisamment reçus, parce qu'on leur fait perdre un temps
précieux qu'ils emploieraient à se procurer un état mieux approprié à leurs
facultés ;
« 2° Aux parents
qui sont entraînés, sans le savoir, dans des dépenses en pure perte par la
fausse persuasion que leurs enfants n'auraient pas été admis, si on ne leur
avait pas reconnu les dispositions suffisantes ;
« 3° Au pays en
le peuplant de plus en plus d'empiriques ou charlatans, parce que parmi ces
hommes qui n'ont fait qu'effleurer la science, il en est toujours qui exercent
;
« 4° Aux
vétérinaires instruits et d'un mérite réel, parce que ces ignorants, dignes
émules des bergers et des maréchaux, ne sauraient que jeter de la défaveur sur
eux, en prostituant l'honorable et modeste profession qu'aucune loi ne défend
encore d'exercer. »
Quanta la source du
mal, ils indiquaient surtout l'existence d'un maître omnipotent, ce sont leurs
expressions, qui à leurs yeux dénaturait l'institution.
Voici comment ils
s'expliquaient au sujet de cet homme auquel ils semblent maintenant unis d'une
manière si intime.
Après avoir dit ce
qu'était l'école à son origine, ils ajoutaient : « Malheureusement la funeste
influence d'un commissaire moins capable qu'obstiné devait bientôt se faire
sentir, etc., etc., » et plus loin « comment, se demandent-ils, expliquer les
rigueurs vexatoires et l'acharnement avec lequel ces professeurs (les
fondateurs) ont été persécutés sans relâche par un homme qui n'a su que
s'arroger une souveraineté despotique sur l'institution principale que possède
l'agriculture, etc. »
Eh bien ! Je vous le
demande, si j'avais épousé leur haine, cet homme eût-il été conservé à l'école
? Non sans doute. Mais j'ai fait la part de l'exagération : j'ai restreint les
attributions de cet homme dans un cercle plus étroit. Je n'ai pas voulu priver
l'école et le pays de l'expérience de cet homme qui m'était présenté sous des
couleurs si défavorables par les auteurs de la note.
Poursuivons.
Dans leur pétition à
la chambre, ils disent (page 6) :
« Craignant,
bien à tort, que l'école ne produisît trop de vétérinaires pour les besoins du
pays, on voulut en restreindre le nombre, et, pour y parvenir, on commença par
rendre l'examen d'admission plus sévère que par le passé. »
Voilà le langage
d'aujourd'hui. Que disaient-ils en 1840 ? En 1840, ils disaient :
« Pourquoi a-t-on
voulu admettre tout ce qui s'est présenté après un simulacre d’examen ? Au lieu
de s'attacher à grossir on ne sait trop dans quel but le nombre des élèves, en recevant
des sujets qui savaient à peine lire et écrire et qui conséquemment se
trouvaient dans l'impossibilité de suivre avec fruit les études principales,
n’eût-il pas été plus rationnel de soumettre les aspirants à des examens
préalables, d'une étendue convenable comme on le faisait dans les premières
années ? «
En effet, c'était le
langage de la raison qu'ils parlaient à cette époque ; ils disaient qu'il était
inouï qu'un jeune homme apprît à lire et à écrire, en même temps qu'il apprend
les sciences naturelles et physiques.
C'est ce qu’ils font
ressortir plus loin en ces termes :
« N'est-ce pas,
en effet, un contraste choquant que de voir les éléments de l'instruction
primaire marcher de front avec les études des sciences physiques, naturelles et
médicales ? »
Vous le voyez donc,
on demandait que les conditions d’admissibilité fussent rendues plus rigoureuse
; ; et ils en donnaient des motifs qui rendaient toute objection impossible.
Ai-je été trop loin
dans les conditions d'admissibilité ? Ai-je exigé, comme on l'a insinué l'an
dernier, des conditions plus rigoureuses que celles exigées pour l'admission
dans les universités ? J'ai demandé les notions qu'on acquiert dans
l'instruction primaire, j'ai exigé que l'on connût les principes fondamentaux
de la langue, soit flamande, soit française, que l'on connût l'histoire, et la
géographie du pays, ce qu'on acquiert encore dans les écoles primaires, et
enfin l’arithmétique complète.
Les candidats
vétérinaires seuls devaient être interrogés sur l'algèbre, jusqu'aux équations
du 2ème degré.
Je le demande,
sont-ce des conditions exagérées ?
(page 1364) Aujourd'hui les professeurs trouvent que le programme,
existant avant 1840, était une œuvre complète, irréprochable, me font un grief
d'en avoir distrait le cours de dessin. Il est vrai qu'on l'avait rendu
obligatoire quand je suis arrivé au département de l'intérieur. Je ne conteste
pas que le dessin ne puisse pas être utile à un médecin vétérinaire ; mais je
ne comprendrais pas qu'on l'exigeât pour la médecine vétérinaire, quand on n'en
fait pas une obligation pour la médecine humaine. J'ai donc pensé qu'il
suffisait de rendre le cours facultatif.
Là encore j'ai pour
moi l'avis de trois professeurs, qui aujourd'hui critiquent si amèrement cette
mesure. Car, que disaient-ils ? Le voici :
« Rien de plus
monstrueux que le programme imposé chaque année. On y trouve des inutilités
onéreuses à l'Etat et qui sembleraient avoir été placées là pour empêcher les
cours essentiels d'être profitables. »
Ces cours dont on
réclamait la suppression, comme inutiles pour l'établissement, c'était
notamment le cours de dessin qui n'existait pas dans l'institution primitive.
Encore une innovation
contre laquelle ils se récrient aujourd'hui, c'est la nomination d'un
professeur comme inspecteur des études. Par-là, disent-ils, nous sommes exposés
à une espèce d'espionnage. Nous sommes soumis au contrôle soupçonneux d'un
collègue, notre égal. Eh bien, avant mon entrée aux affaires, l'un des
signataires de la pétition disait au ministre :
« Afin d'établir
tout d'un coup l'école vétérinaire, etc. sur une base solide, il conviendrait,
je crois, que M. le commissaire procédât d'abord à la nomination d'un
inspecteur des études, qui par sa connaissance, sa probité, etc., pourrait
diriger convenablement les professeurs dans leurs attributions, ayant soin
d'éviter tout conflit à cet égard.
« En le
choisissant parmi les professeurs de l'école on épargnera de nouveaux frais à
l'Etat ; et je pense que M. le commissaire trouvera le moyen d'y pourvoir sans en
sortir ; quoique je ne voie guère que M. Gaudy qui réunisse les qualités
ci-dessus. »
Notez que c'est
précisément le professeur qui a été choisi pour remplir les fonctions
d'inspecteur. Je ne pousserai pas plus loin la comparaison entre leur langage
d'aujourd'hui et celui d'autrefois ; je m'abstiendrai même de qualifier la
conduite que ces trois professeurs tiennent en cette circonstance. Mais il est
bien difficile pour eux de sortir de ce dilemme : ou ils ont voulu tromper la
religion du ministre en 1840, ou ils veulent tromper celle de la chambre
aujourd'hui.
Quant à moi, vous
comprenez qu'après ce qui s'est passé, il m'est impossible de m'opposer à une
enquête.
J'y aurais été opposé
si la pétition n'avait pas été adressée à la chambre, parce que je prévois que
cette investigation, en revenant sur le passé, ne fera qu'envenimer la
querelle, sans faire aucun bien à l'école. Mais les actes de mon administration
ayant été critiqués par ceux-là même qui les ont conseillés, je ne puis
m'opposer à une enquête.
- La séance est levée
à 4 heures et demie.