Accueil Séances Plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Note d’intention

Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 14 mars 1848

(Annales parlementaires de Belgique, session 1847-1848)

(Présidence de M. Liedts.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1050) M. T'Kint de Naeyer fait l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Troye lit le procès-verbal de la séance d’hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. T'Kint de Naeyer présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le conseil communal de Louvain présente des considérations en faveur de quelques réformes politiques et appelle l'attention de la chambre sur plusieurs intérêts particuliers à la ville et à l'arrondissement de Louvain. »

M. Castiau demande que cette requête soit renvoyée à la commission des pétitions, avec invitation de faire un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Plusieurs habitants de Gand demandent la réforme parlementaire et la réforme financière. »

M. Delehaye. - Messieurs, cette requête présente un caractère d'urgence. Je proposerai de la renvoyer à la commission des pétitions, avec demande d'un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Plusieurs habitants de Westrem demandent que cette localité forme une commune séparée de Massemen. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


Il est fait hommage à la chambre, par M. Marichal, de 110 exemplaires d'une brochure intitulée : De la protection de l'agriculture en Belgique. »

- Dépôt à la bibliothèque et distribution à MM. les membres de la chambre.

Projet de loi approuvant le traité de commerce conclu avec le royaume des Deux-Siciles

Rapport de la section centrale

M. Mercier dépose le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi relatif au traité conclu entre la Belgique et le royaume des Deux-Siciles.

- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport ; elle fixera ultérieurement le jour de la discussion.

Projet de loi sur le cens électoral pour la nomination des conseillers communaux

Rapport de la section centrale

M. de Brouckere dépose le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi modifiant la loi du 30 mars 1836 en ce qui concerne le cens électoral.

- Ce rapport sera imprimé et distribué. La discussion du projet est fixée à la suite des objets qui se trouvent à l'ordre du jour.

Projet de loi sur la réorganisation des monts-de-piété

Discussion des articles

Chapitre III. Administration des monts-de-piété

Article 6

M. le président. - Nous en étions hier à l'article 6. M. Delfosse vient de déposer sur le bureau un amendement qui remplacerait le dernier paragraphe de l'article, dans le cas où la chambre adopterait la proposition d'après laquelle la commission administrative se composerait de 5 membres. Cet amendement est ainsi conçu :

« L'administration du mont-de-piété se renouvellera partiellement tous les deux ans. La première sortie sera de trois membres à désigner par le sort, la seconde de deux. Les membres sortants sont rééligibles. »

M. Delfosse a-t-il quelque chose à dire pour développer cette proposition ?

M. Delfosse. - Non, M. le président. C'est une conséquence de l'amendement que j'ai présenté hier.

M. le président. - Si personne ne demande la parole, je déclarerai la discussion close.

Je mettrai d'abord aux voix la suppression du premier paragraphe, qui est proposée par M. d'Anethan.

M. Tielemans (sur la position de la question). - Je ferai remarquer, M. le président, que mon amendement domine tous les autres. S’il est adopté, tous les autres viennent à tomber. Il faudrait donc commencer par mon amendement.

M. le président. - C'est juste. M. Tielemans propose de maintenir l'article 6 du projet du gouvernement.

- L'article 6 du projet primitif, repris par M. Tielemans, est mis aux voix et n'est pas adopté.

La chambre passe au vote de l'article 6 de la section centrale.

M. d'Anethan propose la suppression du paragraphe premier.

- Cette suppression est adoptée.

« § 2. ( § 1). L'administration se composera, non compris le bourgmestre ou l'échevin délégué qui en sera de droit président, de quatre personnes, notables nommées par le conseil communal. Un de ses membres sera choisi parmi les membres de l'administration du bureau de bienfaisance, un autre parmi les membres de l'administration des hospices ».

M. Delfosse propose cinq membres, au lieu de quatre.

- Cet amendement est adopté.

M. d'Anethan propose la suppression du mot « notables ».

- Cette suppression est adoptée.

« § 3. (§ 2). L'administration du mont-de-piété se renouvellera par moitié tous les deux ans. La première sortie sera réglée par la voie du sort. Les membres sortants sont rééligibles. »

M. Delfosse propose l'amendement suivant :

« L'administration du mont-de-piété se renouvellera partiellement tous les deux ans. La première sortie sera de trois membres à désigner par le sort, la seconde de deux. Les membres sortants sont rééligibles. »

- Cet amendement est adopté.

M. d'Anethan propose, comme paragraphe final, ce qui suit : « cette nomination se fera de la manière indiquée à l'article 84 de la loi communale. »

(page 1051) M. Rousselle. - Messieurs, l'intention de l'honorable membre est certainement d'appliquer à l'administration des monts-de-piété tout le n° 2 de l'article 84 de la loi communale. L'amendement ne rend pas cette idée. Le n°2 de l'article 84 règle les cas d'incompatibilité ; il règle aussi la révocation des membres ; l'honorable M. d'Anethan ne parle que de la nomination. Je propose de dire : « Le n° 2 de l'art. 84 de la loi communale sera applicable à l'administration des monts-de-piété. »

M. d’Anethan. - Je me rallie à cet amendement.

- L'amendement est mis aux voix et adopté.

L'article 6, dans son ensemble, avec les modifications qui ont été adoptées partiellement, est mis aux voix et adopté.

Article 7

La chambre passe à l'article 7, ainsi conçu :

« Art. 7. Seront soumis à l'avis de la députation permanente du conseil provincial et à l'approbation du Roi les délibérations des conseils communaux relatifs aux règlements organiques des administrations des monts-de-piété et les arrêtés réglant les objets suivants : Les conditions, le montant et le taux de l’intérêt des emprunts à faire par les monts-de-piété, le taux des intérêts à percevoir des emprunteurs, l’application des bénéfices, les frais d’administration, l’organisation du personnel, la formule du serment à imposer aux employés, la fixation des traitements et des cautionnements, le nombre et l'organisation des bureaux auxiliaires, le délai endéans lequel les gages non relevés pourront être vendus et les conditions de ventes. »

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je pense que la rédaction de cet article pourrait être améliorée. Je proposerai de substituer à ces mots : « Aux règlements organiques des administrations des monts-de-piété et les arrêtés réglant les objets suivants : » Ceux-ci : « Aux arrêtés organiques des administrations des monts-de-piété lesquels régleront notamment les objets suivants. »

Je pense aussi que ces mots « l'application des bénéfices » devraient être supprimés, puisque les articles 11 et 15 du projet règlent cette application ; il n'y aura donc pas lieu de s'en occuper dans les règlements organiques.

J'ai encore une observation à faire sur les mots : «La formule du serment à imposer aux employés» ; ces mots me paraissent aussi devoir être supprimés, sans cela il y aurait violation de l'article 127 de la Constitution qui porte qu'aucun serment ne peut être imposé qu'en vertu de la loi, laquelle en détermine la formule. La formule du serment devrait donc être indiquée dans la loi ; on ne peut pas renvoyer aux règlements organiques pour la déterminer. Si donc la chambre pense que le serment doit être exigé des employés des monts-de-piété, il faut insérer dans la loi la formule et l'on peut adopter celle de l'article 12 de l'arrêté du 31 octobre 1826.

Je proposerai dans ce cas un paragraphe spécial ainsi conçu : « Les employés des monts-de-piété prêteront entre les mains du bourgmestre de la commune avant d'entrer en fonctions, le serment de remplir fidèlement et loyalement leurs fonctions et de garder le secret sur toutes les opérations du mont-de-piété, sauf le cas où ils seraient appelés judiciairement à donner des renseignements sur ces opérations. »

Mais avant tout il y a une question à examiner, c'est celle de savoir s'il est nécessaire d'exiger ce serment ; les employés des bureaux de bienfaisance des hospices et des conseils de fabrique ne sont pas soumis au serment. Je ne sais pas s'il est nécessaire de l'exiger des employés des monts-de-piété. A la vérité ils doivent garder le secret sur les opérations ; mais l'article 378 du Code pénal est rappelé dans l'article 18 du projet, et cela suffît, je crois, pour que tous ces employés soient avertis qu'ils sont tenus à un secret rigoureux s'ils ne veulent pas encourir la pénalité comminée par la loi.

M. Delfosse. - J'avais demandé la parole pour proposer la suppression de la partie de l'article qui concerne le serment. Cette proposition vient d'être faite par M. le ministre de la justice ; mais M. le ministre de la justice demande que la loi fixe elle-même la formule du serment à imposer aux employés des monts-de-piété.

Il serait préférable de ne pas astreindre ces employés à la prestation d'un serment. Les employés des particuliers ne prêtent pas de serment. Les particuliers sont-ils plus mal servis par leurs employés que l'Etat par les siens ?

Il n'y a déjà que trop de serments à prêter en vertu des lois en vigueur. Pour l'honnête homme, le serment est inutile ; pour les autres, il est inefficace.

M. d’Anethan. - Toute la loi devant parler au présent, je pense qu'il faut, au commencement de l'article 7, dire « sont soumis », au lieu de : « seront soumis ».

Quant à la suppression des mots « formule du serment », demandée par M. le ministre de la justice, je pense qu'il y a lieu de l'admettre, l'article 127 de la Constitution ne permettant pas à la loi de déléguer au gouvernement le droit de régler la formule du serment. Mais la question de savoir si les employés du mont-de-piété doivent prêter serment, question soulevée par M. le ministre de la justice et traitée par l'honorable M. Delfosse, présente une certaine importance à cause de l'article 18 du projet de loi.

Cet article commine une pénalité contre les employés du mont-de-piété qui révéleraient les noms des déposants. Je ne sais si, à cause de cette disposition, il ne convient pas d'exiger un serment des employés, de manière à les rendre plus circonspects et plus attentifs à la défense que leur fait l'article 18. Cette nécessité n'est pas la même pour les membres des commissions administratives de bienfaisance ; car aucune pénalité n'est comminée contre eux, en cas de révélation de secret, et on ne conçoit même guère quels secrets pourraient leur être confiés. Mais si l'on pense, et je crois qu'on a raison, qu'il est nécessaire de comminer une pénalité contre les employés du mont-de-piété qui violent le secret qui leur a été confié, il est peut-être nécessaire, sinon de leur imposer un serment politique dans le sens du décret de 1831, du moins de leur faire promettre de garder le secret qui leur a été confié.

J'avais pensé qu'en supprimant les monts « formule du serment » on pourrait adopter la disposition suivante qui rentre dans l'idée de M. le ministre de la justice ; et remplacer ainsi l'article 18 :

« Les employés et agents du mont-de-piété prêtent serment de garder le secret sur toutes les opérations de l'établissement. S'ils révèlent ces secrets, hors le cas où cette révélation est faite à la justice ou à la police, ils sont passibles des peines établies par l'article 378 du Code pénal. »

De cette manière on préviendrait les inconvénients qui pourraient résulter de l'article 18 interprété trop rigoureusement ; car de cette interprétation rigoureuse il pourrait résulter que les employés du mont-de-piété n'auraient pas la faculté de révéler à la justice des circonstances relatives à des dépôts et par suite à des crimes et délits de vol et d'escroquerie.

M. de Bonne. - Puisque nous sommes en train de demander des retranchements à cet article, je crois pouvoir en proposer un qui me paraît également utile. Plus les lois sont courtes, meilleures sont-elles et plus compréhensibles. Parmi les objets qui devront être réglés par les arrêtés royaux portant règlement d'administration, je vois les frais d'administration. Il me semble que l'administration communale et au besoin la députation permanente est plus à même d'apprécier la hauteur des frais d'administration. Dans ces frais d'administration sont compris des frais de bureau, de chauffage, d'éclairage et divers frais minimes qu'il me semble indigne de soumettre à l'approbation du gouvernement.

Vient ensuite l'organisation du personnel. Il me semble que l'administration municipale, les personnes qui seront nommées pour faire partie des conseils des monts-de-piété sont plus à même dans les localités de choisir ce personnel ; non que j'aie aucune défiance contre le gouvernement ; mais il me semble que, pour les places secondaires dans les établissements municipaux, c'est à l'autorité communale qu'il faut laisser les choix.

Elle est plus à même de choisir des hommes connus qui ont l'intelligence nécessaire pour remplir ces sortes de places.

Les cautionnements.

Il s'agit sans doute des cautionnements à donner par les receveurs et par les employés qui seront placés dans les établissements auxiliaires. Or, c'est encore la commune, ou le conseil d'administration du mont-de-piété qui est le plus à même d'évaluer le cautionnement qu'd est nécessaire de donner.

Dans tous les cas, le gouvernement ne court aucun danger, puisque c'est la commune qui est responsable. Comme la responsabilité pèse sur elle, elle est naturellement plus intéressée à faire un bon choix et à prendre des personnes qui seront propres à la place, et à évaluer les cautionnements qu'elles doivent donner. Sans cela, le gouvernement pourrait, d'une manière arbitraire, porter ce cautionnement à une somme trop forte ou à une somme trop faible, eu égard aux fonds que les employés auraient entre les mains, qu'ils seraient chargés de recevoir et de payer.

Il en est encore de même de l'organisation des bureaux auxiliaires. Une fois que les bureaux auxiliaires sont décrétés, il me semble que l'organisation doit appartenir à la commune. Elle procédera à cette organisation de la manière la plus économique, parce qu'elle est responsable, comme il a été établi dans les articles précédents, et qu'en dernière analyse, c'est elle qui doit payer ce qui peut manquer, en cas d'insuffisance pour subvenir aux frais.

Un dernier article, ce sont les conditions de vente. Je crois que les municipalités de chaque commune ou les administrations des monts-de-piété sont plus à même que le gouvernement de déterminer les conditions nécessaires pour faire des ventes utiles, des ventes productives. Les mêmes conditions ne seraient pas bonnes dans toutes les localités. Je crois que dans telle localité une condition serait bonne, qui ne le serait pas dans telle autre localité.

Par ces considérations je crois qu'il y a lieu de retrancher de l'article les mots : « les frais d'administration, l'organisation du personnel, la fixation des traitements et des cautionnements, le nombre et l'organisation des bureaux auxiliaires et les conditions de vente. »

Il me semble que ce sont là des détails dans lesquels le gouvernement ne devrait pas entrer, pour assurer la bonne gestion des monts-de-piété.

M. de Garcia. - Messieurs, tous les orateurs qui ont pris la parole sont d'avis qu'il faut retrancher de l'article 7 les mots suivants : « La formule du serment à imposer aux employés ». C'est avec raison, je crois, parce que cette partie de l'article 7 porte atteinte à un principe constitutionnel, qui veut qu'aucun serment ne puisse être imposé que par la loi. Il me semble d'ailleurs que, pour le cas actuel, il est fort inutile de recourir à cette mesure et de prescrire le serment aux fonctionnaires des monts-de-piété. Le serment est une mesure extrême dont on doit être fort sobre et à laquelle ou ne doit recourir que pour autant que les (page 1052) dispositions de la loi soient impossibles ou impuissantes. Il en est tout autrement dans l'hypothèse que nous discutons. La loi prononce des peines contre les fonctionnaires des monts-de-piété qui manqueraient à leurs devoirs.

Dès lors je ne vois aucun motif plausible d'imposer le serment aux fonctionnaires des monts-de piété.

Je désire donc que M. le ministre retire sa proposition qui formerait un paragraphe 2 de l'article 7 et dont le but est de soumettre ces fonctionnaires à la prestation d'un serment. D'après la manière dont s'est exprimé M. le ministre, en faisant cette proposition, j'ai la conviction qu'il n'y tient pas et qu'il la retirera sans peine.

Mais l'amendement de M. le ministre a une autre portée que celle du serment ; il tend à établir aussi les limites du secret qui sera imposé aux agents des monts-de-piété sur certains actes de leur administration. Mais ce point, selon moi, doit être renvoyé à la discussion de l'article 18 qui contient une disposition spéciale sur cet objet.

Sans doute, cet article, tel qu'il est formulé dans le projet de loi, ne recevra pas mon approbation, puisque, dans ses termes génériques, il aurait pour résultat de paralyser l'action de la justice dans les poursuites et les recherches qu'elle est appelée à faire pour découvrir les crimes et les délits. En imposant le secret vis-à-vis des agents de la police, on ôte incontestablement à cette dernière l'un des moyens les plus efficaces de découvrir les malfaiteurs.

Tout le monde le fait, les monts-de-piété sont généralement le refuge des objets volés, et dès lors il est important que la police puisse en tout temps faire des investigations dans les monts-de-piété, et obtenir tous les renseignements possibles sur les objets qui y ont été déposés et sur les individus qui ont fait les dépôts.

.D'après ces considérations, je crois que, quant à présent, il y a lieu de prononcer la suppression du serment pour les employés du mont-de-piété et de renvoyer le surplus de la proposition de M. le ministre à la discussion de l'article 18.

A ce sujet, je me permettrai une observation anticipée. Je pense que la proposition de M. le ministre, qui impose le secret sur toutes les opérations des monts-de-piété, est faite en termes trop absolus, et demande quelques modifications.

Ce mot « opérations » me paraît trop général. Frappé des inconvénients qui pouvaient résulter de l'article 18 du projet de loi, j'avais préparé un amendement à cet article.

Je pense que cet amendement remplira parfaitement le but que nous voulons atteindre et qui laissera à la police tous les moyens dont elle est en possession aujourd'hui, pour découvrir les crimes et les délits. Je demanderai à la chambre la permission de lui faire connaître dès à présent ma proposition. Elle consiste à rédiger l'article 18 de la manière suivante :

« Les employés ou agents des monts-de-piété qui auraient révélé à d'autres qu'aux officiers de police judiciaire le nom des personnes qui ont déposé ou qui ont fait déposer seront punis des peines portées dans l'article 378 du Code pénal. »

Je pense, messieurs, que cette rédaction est préférable à celle de M. le ministre de la justice ; car, je le répète, l’expression de M. le ministre qui impose le secret sur toutes les opérations du mont-de-piété, me paraît trop générale.

Un fonctionnaire peut parler de la situation du mont-de-piété, des bénéfices qui s'y font, etc., sans qu'il y ait aucun des inconvénients qu'on veut prévenir. Le but de la loi est uniquement d'empêcher les indiscrétions qui pourraient nuire au crédit de certains individus ou porter atteinte à leur réputation, en ce sens que l'on considère toujours comme une chose honteuse d'être dans la misère et de se trouver dans la nécessité de se dégarnir des objets auquel on tient le plus. Que ce soit là un préjugé ou non, le fait existe, est ainsi et chacun rougit que des faits de cette nature viennent au grand jour.

M. le président. - L'amendement de M. de Garcia sera discuté .avec l'article 18. La proposition de M. d'Anethan est également tenue en réserve.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Messieurs, nous sommes tous d'accord qu'il faut faire disparaître ces mots : « La formule du serment à imposer aux employés. » En ce qui concerne l'amendement de l'honorable M. de Garcia, il pourra être imprimé d'ici à la discussion de l'article 18. Quant à moi, je n'ai présenté mon amendement que pour le cas où la chambre voulût maintenir le serment. Mais je pense, comme les honorables MM. de Garcia et Delfosse, que le serment est tout à fait inutile et qu'en modifiant la rédaction de l'article 18, on aura satisfait à tout ce qui est nécessaire pour maintenir l'obligation des employés quant au secret, qu'ils sont tenus de garder.

M. Anspach. - Messieurs, les établissements des monts-de-piété étant admis, l'article 7 me semble résumer à lui seul tout ce qu'il y a d'important dans la question. En effet, messieurs, les conditions, le montant et le taux de l'intérêt des emprunts à faire par les monts-de-piété, le taux des intérêts des emprunteurs, tout cela s'y trouve ; mais tous ces règlements sont encore à faire, et je ne veux pas que l'on puisse croire que la chambre approuve l'esprit dans lequel est rédigé le projet de la section centrale. Cette expression ne rend pas bien ce que je veux dire, c'est plutôt le point de départ de la section centrale, qui repose sur cette opinion que les monts-de-piété doivent se suffire à eux-mêmes.

M. le rapporteur, dans ses observations générales, dit que la section centrale, pénétrée, etc. Mais elle a remarqué qu'il serait impossible, dans la situation actuelle de quelques-uns de ces établissements, d'abaisser le chiffre qui constitue aujourd'hui le maximum de l'intérêt à percevoir des déposants. C'est précisément contre cette opinion que je veux protester, et c'est ce qui m'a engagé à demander la parole.

Les monts-de-piété sont des établissements de bienfaisance dont l'administration est en quelque sorte communale, puisque le résultat de leurs opérations vient toujours, au moins quant à Bruxelles, augmenter ou diminuer les charges que l'administration générale des hospices et de la bienfaisance fait peser sur la ville.

Je fais cette observation, parce que je n'admets pas que les monts-de-piété puissent donner un bénéfice quelconque, alors même que ce bénéfice vient en déduction de ce que doivent fournir aux établissements de bienfaisance la province et ta commune. C'est en leur nom que je les repousse ; je ne veux pas que l'on puisse faire des bénéfices sur des malheureux en les pressurant par un intérêt usuraire ; je ne veux pas qu'on puisse faire des bénéfices sur la misère la plus profonde, sur les besoins les plus pressants, sur les angoisses d'une famille à la veille de manquer de pain. Et vous voudriez encore augmenter tout ce qu'il y a d'horrible dans cette position ! Non, messieurs, cela n'est pas possible.

Je sais bien tout ce qu'on va me dire sur ce qui se passe en fait dans les monts-de-piété, que les dépôts ne servent en grande partie qu'à fournir de l'argent qu'on dépense pour des fêtes, pour des kermesses, pour le carnaval, que c'est pour ces occasions qu'on les voit affluer de toutes parts. Je sais tout cela ; aussi n'est-ce pas pour ces sortes de dépôts que je parle (quoique je ne voie pas quel mal il y aurait à ne pas augmenter encore ces sortes de dépenses par un intérêt usuraire), mais les dépôts pour lesquels je parle sont ceux qui sont occasionnés par un accident, par une maladie du chef de famille qui, l'empêchant de travailler, le privant de tout salaire, le force à avoir recours à ce moyen pour procurer du pain à sa femme et à ses enfants ; voilà la véritable destination des monts-de-piété. Supposez maintenant que cette catégorie d'emprunteurs ne fasse que la moitié, que le quart des dépôts, moins encore si vous le voulez, n'est-ce pas plus que suffisant pour prouver à tout le monde qu'un intérêt usuraire sur des personnes qui sont dans celle position est une véritable barbarie ? M. le rapporteur pose en règle générale que les monts-de-piété doivent se suffire à eux-mêmes ; mais c'est cette opinion que je nie ; je la crois fausse, tout à fait contraire à l'esprit dans lequel ces institutions ont été créées ; les monts-de-piété étant des établissements de bienfaisance, et c'est par là que j'ai commencé, doivent mériter leur nom en faisant le plus de bien possible avec des fonds pris sur les contributions communales, provinciales et générales, et non pas en bénéficiant sur l'argent emprunté par le malheureux qui l'emprunte souvent pour se procurer du pain.

Mais alors, me dira-t-on, au lieu de rapporter quelque chose, les monts-de-piété vont être une charge qui nous coûtera de l’argent. Eh ! vraiment oui, ils coûteront une certaine somme et je voudrais bien savoir comment vous pourriez exercer la bienfaisance sans qu'il vous en coûtât une obole, ce moyen serait précieux surtout dans ce moment où nous avons tant de malheureux à secourir.

Je ne formule aucun amendement à l'article 7 parce que les considérations que je viens de vous présenter ne portent que sur ce qui constituera les règlements organiques des monts-de-piété, soumis à la commune, à la députation permanente de la province et enfin approuvés par le gouvernement. Mais je demande à MM. les ministres qu'ils veuillent bien les prendre en considération pour le moment où ils auront à statuer définitivement sur ces mêmes règlements.

M. Dedecker. - Messieurs, il y a dans le fond des considérations que vient de présenter l'honorable préopinant quelque chose qui m'étonne et qui m'afflige, c'est qu'il paraît croire que la section centrale et son rapporteur principalement (car il l'a mis en cause à différentes reprises) n'éprouve pas aussi vivement que lui le désir de venir en aide à la classe ouvrière, aux malheureux qui sont obligés de recourir aux monts-de-piété. La différence qu'il y a entre l'honorable membre et moi, qu’il me permette de le dire, c'est que, ne connaissant pas le régime intérieur des monts-de-piété, il n'apprécie pas ces institutions comme elles méritent de l'être. Il ne connaît pas le mécanisme de l'institution des monts-de-piété, tandis que je crois avoir le droit de dire que je l'ai quelque peu étudié.

L'honorable membre en est encore à croire que l'intérêt perçu par les monts-de-piété est usuraire. C'est là un préjugé, que vient dissiper une juste appréciation des opérations de ces établissements. Dans la condition actuelle des monts-de-piété, on ne peut pas appeler usuraire l’intérêt que les monts perçoivent. Ils ne font réellement que rentrer dans les avances qu'ils sont obligés de faire aujourd'hui ; sous le poids des charges nombreuses qui les grèvent, les monts-de-piété ne peuvent pas prêter à un intérêt moindre que celui auquel ils prêtent. S'ils n'avaient pas des gages de grande valeur, ils devraient même augmenter beaucoup le taux de l'intérêt actuel. C'est là un mal que je regrette autant que l'honorable préopinant. C'est principalement dans le but de détruire ce mal que nous proposons d'enlever la principale charge qui incombe aujourd’hui aux monts-de-piété, par la consécration des bénéfices annuels à la constitution d'une dotation ; car c'est ainsi qu'on arrivera à pouvoir diminuer l'intérêt perçu sur les emprunteurs.

C’est dans ce sens que la section centrale a été amenée à dire qu’avec leurs charges actuelles, certains monts-de-piété sont dans l'impossibilité d'abaisser l'intérêt qu'ils perçoivent aujourd’hui, à moins qu’on ne veuille (page 1053) les constituer en perte ; or je ne pense pas qu'une seule administration communale y consente.

Je ne vois pas où l'honorable membre a puisé le motif du reproche qu'il adresse à la section centrale de vouloir, non seulement maintenir l'intérêt actuel, mais encore l'augmenter. Le but de toutes les modifications admises par la section centrale est précisément d'arriver à l'abaissement successif du taux de cet intérêt.

L'honorable membre ne croit pas que la majeure partie des engagements faits aux monts-de-piété ont pour causse la dissipation et la débauche. L'expérience malheureusement ne le prouve que trop. Mon assertion se justifie par ce seul fait : c’est que les engagements, pendant les mois de juin, juillet et août sont de moitié supérieurs aux engagements faits dans les saisons les plus rigoureuses.

Qu’à côté de cette classe d'individus qui forment la majorité de la clientèle des monts-de-piété, il y ait des pauvres réellement malheureux qui recourent aux monts, cela est hors de doute ; à ceux-là, toute la sympathie du gouvernement et de la législature ; et c'est dans l'intérêt de celle classe de pauvres respectables que j'aurai l'honneur de proposer, comme je l'ai déjà fait en section centrale, l'institution d'une caisse de prêts gratuits.

Le mot « bénéfices » effarouche l'honorable préopinant. Mais ce ne sont pas là des bénéfices prévus, certains. L'administration d'un mont-de-piété n'a pas l'intention préconçue de faire un bénéfice. Ne connaissant jamais d'avance et avec certitude quel sera le résultat des opérations de l'année, il est bien obligé de faire en sorte qu'en tout cas l'administration ne soit pas en perte ; et comme on ne sait pas quel sera le chiffre des capitaux qu'on utiliserait, ou le chiffre des sommes qui resteront sans emploi, il est impossible de prévoir, au commencement de la saison, quelle sera, à la fin de l'année, la balance totale.

J'arrive maintenant aux considérations qui ont été présentées relativement à l'article 7 par l'honorable M. de Bonne. L’honorable membre voudrait rayer de cet article certains points qui y sont désignés comme susceptibles d'entrer dans un règlement organique des monts-de-piété. Eh bien, pour ma part, je crois que ce sont précisément ces différents points que je vais passer en revue, lesquels exigent l'intervention d'une direction générale et uniforme, de nature à amener l'ordre et l'unité dans l'administration de nos monts-de-piété. C'est au moyen de l'anatomie comparée de ces institutions qu'on parviendra à détruire les anomalies choquantes qui existent, anomalies qu'on peut et qu'on doit faire disparaître dans l'intérêt, non seulement de l'administration, mais aussi de la classe pauvre.

Ainsi, d'abord, quant aux frais d'administration, si vous laissez la fixation de ces frais au conseil communal ou à la députation permanente, vous perpétuez des anomalies qui existent aujourd'hui. Aujourd'hui des monts-de-piété coûtent beaucoup plus que d'autres, proportion gardée de leurs opérations respectives.

Il faut donc que le gouvernement central puisse contrôler l'administration d'un mont-de-piété par celle d'un autre, il faut qu'il puisse engager les administrations moins clairvoyantes que d'autres, à suivre l’exemple de ces dernières, afin d'arriver à réduire les dépenses nécessaires à leur plus simple expression. Et qu'on veuille bien m'en croire, ce n'est pas ici une question de défiance à l'égard de l'autorité communale, c'est une question de bonne administration.

Quant à l'organisation du personnel, le gouvernement est seul dans la position d'indépendance nécessaire pour traiter les questions que cette organisation-soulève. Dans les villes, l'autorité communale, la députation permanente, par suite d'influences locales, de relations personnelles, n'osent souvent pas introduire les améliorations qui sont nécessaires dans l'organisation du personnel. Ici encore, j'aime mieux l'impulsion libre et indépendante du gouvernement ; j'aime mieux que, par suite de la comparaison faite entre les divers établissements, le gouvernement puisse engager les administrations à se modeler l'une sur l'autre, à se perfectionner l'une par l'autre.

Les mêmes réflexions peuvent s'appliquer à la fixation des traitements. C'est là, en effet, une question encore plus susceptible de se ressentir des influences locales ou personnelles. Même observation pour les cautionnements.

L'honorable M. de Bonne voudrait laisser aussi en dehors de la rédaction des règlements organiques « le nombre et l'organisation des bureaux auxiliaires. » Mais qu'on veuille bien remarquer que c'est là une partie de l'administration des monts-de piété toute neuve ; c'est surtout la première organisation de ces bureaux qui exige une action centrale. Déjà des essais heureux ont été tentés. Je suis persuadé que le gouvernement, connaissant parfaitement l'organisation de ces bureaux auxiliaires établis dans la ville de Liège, pourra en faire établir plus économiquement et plus convenablement dans d'autres villes. D'ailleurs, nous savons tous qu'il existe des commissionnaires jurés, non seulement dans les villes, mais aussi dans les communes voisines des villes où existent aujourd'hui des monts. L'organisation des bureaux auxiliaires appelés à remplacer ces commissionnaires, n'est donc pas une affaire purement communale.

Et puis, il ne faut pas croire que chaque mont-de-piété ne desserve que la ville où il est établi ; il dessert encore les villes et communes voisines ; eh bien, pour les succursales ainsi établies dans les communes voisines, que deviendra l'attribution que l'honorable M. de Bonne veut accorder exclusivement au conseil communal ?

Pour les ventes il y a encore une masse d'usages qu'il faudrait abolir ou changer ; c'est l'un des points les plus susceptibles de perfectionnement. Dans certaines villes il existe encore un droit spécial sur les ventes : je ne sais pas sur quoi on le fonde ; if n'existe pas dans les autres villes. C'est un point sur lequel il devrait y avoir uniformité.

Il y a ensuite à voir s'il ne faut pas accorder à certains pauvres la faculté de faire vendre leur gage avant l'expiration du délai fixé par les règlements ou après. De puissantes considérations militent tantôt en faveur de l'un, tantôt en faveur de l'autre système.

L'arrêté du 31 octobre 1826 stipule la présence des autorités communales aux ventes ; c'est une garantie essentielle. Jusqu'à présent cette prescription est généralement négligée ; l'autorité communale n'est pas suffisamment représentée à ces ventes, et n'exerce en réalité aucune espèce de contrôle sérieux. Cependant, si l'on veut prévenir les collisions entre certains employés, entre les priseurs et les fripiers qui viennent à la vente ; si l'on veut prévenir le compérage, il faut exiger la présence d'une personne capable de représenter efficacement et dignement l'autorité.

Cela a toujours été prescrit par les règlements ; mais, jusqu'à ce jour, cette partie des règlements n'a pas été exécutée convenablement ; aussi l'action de l'autorité a-t-elle été nulle. Une autre question qui se rattache aux ventes, c'est la publicité à donner au résultat des ventes. Aujourd'hui les boni ou excédants auxquels peuvent avoir droit les déposants dont les gages ont été vendus ne sont pas réclamés parce qu'on ne donne pas une publicité suffisante à l'existence de ces excédants.

Je voudrais que les malheureux dont les gages ont été vendus plus cher que le prix d'engagement et qui ont des boni à recevoir fussent avertis par une publicité qui les mît à même de venir les réclamer.

Messieurs, je demande donc la mention de tous ces points que je viens de passer en revue dans l'article 7 ; car il faut qu'ils soient décidés par les règlements organiques et soumis, par conséquent, à l'approbation de l'autorité centrale, si on veut améliorer foncièrement, efficacement l'administration des monts-de-piété.

M. d’Anethan. - Je n'ai que peu de choses à ajouter aux observations présentées par M. Dedecker en réponse à celles de MM. de Bonne et Anspach.

Je me bornerai à quelques courtes observations sur les points traités par ces honorables membres. Comme l'a dit l'honorable M. Dedecker, il est désirable, c'est le but de la loi, d'établir l'uniformité entre les différents monts-de-piété. Cette uniformité ne peut s'établir que par des règlements organiques soumis à l'autorité centrale. Les amendements de M. de Bonne empêcheraient d'atteindre ce but, et, bien plus, ils rendraient en cette matière le conseil communal omnipotent ; l'honorable membre, en effet, ne propose même pas de soumettre les délibérations du conseil communal à l'avis de la députation permanente.

Je ne pense pourtant pas que l'honorable membre veuille aller jusque-là et dans ce cas, il devrait sous-amender sa proposition. S'il pense que certaines clauses de l'article 7 ne sont pas assez importantes pour être soumises à l'autorité royale, au moins qu'il les soumette à l'approbation de la députation. Quant à moi, je suis d'avis que les points que M. de Bonne propose de retrancher sont d'une importance assez grande pour être maintenus.

Ces points touchent à l'organisation économique des monts-de-piété ; or, il ne faut pas perdre de vue les idées d'économie qui ont guidé le gouvernement dans la présentation du projet ; il convient donc de maintenir toutes les dispositions de l'article 7, et de permettre ainsi au gouvernement, grâce à la fixation du personnel et des traitements, etc., de donner aux monts-de-piété cette administration économique, à l'aide de laquelle on pourra réduire les intérêts, et faire produire à ces établissements tous les avantages qu'on est en droit d'en attendre.

Je ne vois aucune utilité et je vois de grands inconvénients à l'adoption de la proposition de M. de Bonne.

L'honorable M. Anspach s'est étonné que dans le rapport de la section centrale on ait parlé de bénéfices et qu'on ait supposé la possibilité pour les monts-de-piété de se suffire à eux-mêmes ; l'honorable membre a semblé croire que cette opinion indiquait la pensée de maintenir un intérêt très élevé dans les monts-de piété au détriment du petit commerce et des individus qui sont forcés de déposer des objets dans ces établissements.

Comme l'a dit l'honorable M. Dedecker, c'est le contraire qui doit arriver ; les dispositions qui vous sont soumises doivent avoir pour résultat évident de permettre la réduction des intérêts. Aujourd'hui les monts-de-piété sont forcés de recevoir toutes les sommes qui leur sont envoyées par les administrations de bienfaisance ; ils sont forcés de les recevoir sans en avoir aucun besoin et doivent néanmoins dans tous les cas en payer l'intérêt légal quand bien même ils ne pourraient eux-mêmes placer ces sommes qu'à un intérêt moindre.

Il en résulte pour les monts-de-piété l'obligation de demander aux emprunteurs sur gages un intérêt élevé, ce qui n'aura plus lieu, quand ils ne seront plus obligés de recevoir sans utilité pour eux des sommes considérables des hospices ou des établissements de bienfaisance ; veuilles bien le remarquer : aujourd'hui quand les bureaux des hospices et de bienfaisance ont une somme momentanément disponible, en attendant un placement, ils la déposent au mont-de-piété qui doit en payer les intérêts, et la restituer à la première demande.

M. le ministre propose de rayer de l'article les mots : « application des bénéfices ; » M. le ministre pense que ces mots sont inutiles parce que cette application est réglée par d'autres articles de la loi, notamment par l'article 11. Je pense qu'il n'y a pas d'inconvénient à cette suppression. (page 1054) Toutefois, je dois expliquer dans quel sens ces mots ont été introduits dans l'article 7. L'article 7 suppose la possibilité de bénéfices, l'article 11 dit que les bénéfices qui pourront être faits serviront en premier lieu à la constitution de la dotation des monts-de-piété ; quand cette dotation, qui sera déterminée par les règlements organiques, sera complète, le surcroît servira à rembourser les capitaux empruntés.

Telle est la destination établie ; maintenant la dotation résultant des bénéfices devra être appliquée, l'article 7 s'occupe de cette application et renvoie aux règlements organiques pour déterminer comment elle se fera. Voilà l'explication des mots de l'article 7. Mais comme pour faire ces applications on devra se régler d'après les principes qui régissent les établissements publics, il n'est pas indispensable de maintenir cette mention dans l'article 7.

M. Anspach. - J'ai demandé la parole, parce que je tiens à déclarer à l'honorable rapporteur que je n'ai rien voulu dire qui pût lui être désagréable. Chacun connaît les sentiments éclairés de charité qui l'animent ; loin de moi l'idée de les révoquer en doute. J'avoue humblement que je ne suis pas aussi au fait que l'honorable rapporteur de ce qui se passe dans l'intérieur des monts-de-piété. Je n'ai pas, comme lui, approfondi l'organisation de ces établissements.

Il a fait sur cette matière un ouvrage qui est très apprécié. Sous ce rapport, je ne puis non plus prétendre à entrer en parallèle avec lui.

Mais la question de savoir si les monts-de-piété doivent se suffire à eux-mêmes en faisant payer des intérêts usuraires aux personnes qui viennent y prendre de l'argent n'exige pas des connaissances spéciales ; elle est, je crois, de ma compétence. Je persiste à cet égard dans l'opinion que j'ai exprimée.

- M. Delfosse remplace M. Liedts au fauteuil.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je ne m'occuperai pas de l'amendement de l'honorable M. de Bonne. Je ne pourrais que répéter ce qui a été dit par les honorables MM. Dedecker et d'Anethan. Je ne pense pas que cet amendement doive être adopté, ni qu'il y ait lieu de faire, comme le propose l'honorable membre, deux catégories de règlements, approuvés les uns par le gouvernement, les autres par la députation permanente.

Mais je dois donner une explication sur la suppression des mots : « l'application des bénéfices ». Je craindrais, s'ils étaient maintenus, qu'on ne pût en inférer que les règlements pourraient modifier l'application des bénéfices déterminée par les articles 11 et 15. Or certainement telle n'a pas été l'intention de l'auteur du projet.

L'honorable M. d'Anethan a expliqué dans quel but ces mots ont été insérés à l'article 7. C'était pour indiquer de quelle manière l'emploi des fonds de la dotation pourrait être fait ; mais je crois qu'il ne serait pas possible de déterminer dans un règlement un mode uniforme d'emploi ; car ce mode peut varier suivant les circonstances. Lorsque l'administration aura des fonds à placer, elle fera des propositions au conseil communal qui les examinera, et statuera, sauf l'approbation du gouvernement ; mais il serait impossible de poser dans un règlement organique des règles fixes pour l'emploi des fonds de la dotation.

M. de Bonne. - Si par règlements organiques on entend simplement l'ordre dans lequel les monts-de-piété seront constitués, sans que cela puisse s'appliquer aux prêts, aux employés, à tout ce qu'il faudra faire pour qu'ils puissent fonctionner, je le comprends. Mais si par les mots règlements organiques on entend que, chaque année, il faudra soumettre au gouvernement une espèce de budget, je ne puis le comprendre ni l'admettre. Les frais d'administration se trouvent compris dans l'article que nous discutons ; je dis que les frais d'administration ne peuvent entrer dans un règlement organique.

Je conçois un règlement organique qui dirait : « Quant au personnel, il y aura un receveur, deux employés pour recevoir les gages, deux pour les rendre, enfin, il y aura tel nombre d'employés. Quant aux traitements, tel employé aura telle somme, tel autre aura une somme moindre. Quant au cautionnement, ils seront de telle et telle somme. »

L'organisation des bureaux auxiliaires constitue dans cet article une superfétation, attendu qu'il en est parlé à l'article 5. D'après cet article, lorsqu'on demandera à établir des bureaux auxiliaires, le gouvernement pourra en autoriser la création.

Il est donc inutile de les mentionner dans l’article en discussion. Les bureaux auxiliaires seront organisés par la décision du gouvernement qui en fixera le nombre.

Je reviens au premier point, aux frais d'administration. Je ferai remarquer que ces frais changent tous les ans. Telle année, le chauffage sera à un taux élevé ; l'année suivante, le prix sera moindre ; l'éclairage également. Il faudra que le gouvernement entre dans de tels détails ! Mais n'est-ce pas indigne de cette autorité supérieure ?

Pour les conditions de vente, on veut de l'uniformité. Mais je ne vois pas en quoi le défaut d'uniformité peut être préjudiciable aux monts-de-piété. Evidemment l'autorité locale sera mieux à même de savoir quelles sont les conditions les plus favorables. Ce n'est pas au centre du gouvernement que cette connaissance sera aussi grande. Puis il faudra que le gouvernement écrive. C'est augmenter la besogne. Pour cette centralisation, il faudra plus d’employés même au gouvernement.

Quant à l'observation qu'a faite l'honorable M. d'Anethan, que je laissais une liberté très grande au conseil communal, je conçois qu'il serait utile (et si la suppression que j'ai demandée avait quelque chance d'être admise, j'en ferais la proposition) de soumettre le tout à l'examen de la députation permanente. Cette uniformité qu'on veut établir n'existe pas pour beaucoup d'administrations. Par exemple, c'est l'administration ; communale qui examine les budgets de l'administration de la bienfaisance et des hospices, et l'on sait que les budgets et le personnel sont bien plus considérables dans ces administrations que dans celles des monts-de-piété.

Dans certains cas, le tout est soumis à l'examen de la députation permanente. Ces établissements sont cependant tout aussi importants que les monts-de-piété, pour ne pas dire plus. Comme la commune doit fournir les fonds nécessaires au mont-de-piété, soit par elle-même soit par les administrations de bienfaisance qui sont sous sa tutelle et aux besoins desquelles elle doit subvenir, il me semble que l'administration communale devrait conserver une petite part dans la gestion et dans l'organisation des monts-de-piété.

Je bornerai là mes observations. Si l'approbation de la députation permanente pour les décisions du conseil communal pouvait faire accepter le retranchement que j'ai proposé, j'en ferai la motion.

M. Dedecker, rapporteur. - Messieurs, l'honorable préopinant demande ce qu'il faut entendre par règlements organiques. Il est clair que par règlements organiques, on entend la constitution première et générale des monts-de-piété, et les modifications dont elle est susceptible.

Mais quant à l'examen annuel de la situation des monts-de-piété, cela ressort à l'article 8 ; c'est une question de budget, et les budgets seront annuellement soumis au visa de la députation permanente qui les transmettra au gouvernement.

Il est évident que les règlements organiques n'entrent dans aucun détail. Ils disent, par exemple, d'après les besoins et l'étendue des opérations d'un mont-de-piété, pour tel établissement, il faut autant d'employés à un tel traitement, à un tel cautionnement. Mais les questions de détail, la partie vraiment administrative et non constitutive, est du ressort du conseil communal.

M. Tielemans. - La suppression des mots : « la formule du serment à prêter par les employés « paraît généralement admise. La question de savoir si les employés seront dispensés du serment paraît également résolue d'une manière affirmative.

J'accepte volontiers, messieurs, la suppression des serments qui ont un caractère essentiellement politique ou administratif. Mais parmi les employés des monts-de-piété, il en est un dont le serment me paraît nécessaire : c'est l'appréciateur, c'est celui qui remplit le rôle d'expert, de taxateur ; l'appréciateur est juge en quelque sorte entre le mont-de-piété qui reçoit les gages et l'emprunteur qui les dépose ; c'est lui qui fixe la somme qui sera donnée à l'emprunteur par la caisse du mont-de-piété, eu égard à la nature du gage déposé.

Cet employé remplit donc le rôle qu'un expert remplit en justice ordinaire, et notre droit commun veut que tout expert prête serment. Je crois donc qu'il serait sage de faire une exception pour l'appréciateur ; il n'y a aucune raison pour sortir du droit commun à son égard. Au contraire, le serment sera une garantie d'impartialité dans l'exercice de ses fonctions.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Je ferai remarquer que la question pourra se représenter lors de la discussion de l'article 18. Si l'honorable M. Tielemans veut alors présenter un amendement, il sera discuté en même temps que celui de l'honorable M. de Garcia.

- La discussion est close.

Les amendements présentés par M. le ministre de la justice sont successivement mis aux voix et adoptés. L'article ainsi modifié est adopté.

Article 8

« Art. 8. Une copie des budgets et des comptes du mont-de-piété approuvée par le conseil communal, conformément à l'article 79 de la loi du 30 mars 1836, sera adressée à la députation permanente, qui la transmettra au gouvernement avec ses observations. »

- Adopté.

Article 9

« Art. 9. Le gouvernement fera inspecter les monts-de-piété aussi souvent qu'il le jugera nécessaire. «

La section centrale propose la rédaction suivante :

« Art. 9. Le gouvernement pourra faire inspecter les monts-de-piété lorsqu'il le jugera nécessaire. »

M. le ministre de la justice (M. de Haussy) déclare se rallier à cette rédaction.

- L'article, tel que le propose la section centrale, est adopté.

Chapitre IV. Dotations. Emploi des bénéfices et intérêts

Articles 10 et 16

« Art. 10. Les administrations publiques de bienfaisance continueront, autant que possible, à fournir, à l'intérêt légal, les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété, dans la proportion à déterminer par la députation permanente, le conseil communal entendu.

« En cas d'urgence et d'insuffisance momentanée de la caisse des établissements de bienfaisance, la caisse communale est autorisée à pourvoir provisoirement aux besoins du mont-de-piété. »

La section centrale propose de rédiger cet article comme suit :

« Art. 10. Les administrations publiques de bienfaisance continueront à fournir, dans la mesure de leurs ressources et aux conditions les plus favorables, les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété.

M. le président. - Le gouvernement se rallie-t-ii à la proposition de la section centrale ?

(page 1055) M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - Oui, M. le président.

M. Malou. - Le vote que la chambre a émis sur l'article 6, et les discussions qui ont précédé, démontrent que l'on a voulu autoriser les monts-de-piété à posséder des propriétés. Je demanderai que pour lever tout doute, s'il pouvait en exister à cet égard, et pour rester conséquent avec ce vote, on ajoute à l'article 6 les expressions que la législature a employées lorsqu'il s'est agi de nos écoles primaires.

L'article 23 de la loi relative à l'instruction primaire commence par ces mots : « à défaut de fondations, donations ou legs qui assurent le service de l'instruction primaire, la commune y pourvoira. » Je demande qu'à l'article 10 on dise : « A défaut de fondations, donations ou legs, les administrations publiques de bienfaisance...» ; le reste comme à l'article de la section centrale.

M. d’Anethan. - J'ai demandé la parole en quelque sorte pour une motion d'ordre, pour prier la chambre de décider que l'on discutera l'article 16 en même temps que l'article 10. Ces deux articles sont relatifs aux moyens à employer pour fournir la dotation des monts-de-piété ; la section centrale n'étant pas d'accord avec le projet primitif du gouvernement, pour discuter les deux systèmes, il est indispensable de réunir les deux articles dans une même discussion.

Je désirerais savoir, avant d'expliquer comment le projet primitif a été conçu et pourquoi il me semble devoir être maintenu, si M. le ministre de la justice se rallie à la modification proposée par la section centrale à l'article 16 ; à moins cependant que M. le ministre ne préfère entendre, avant de se prononcer, les développements dans lesquels je désire entrer pour établir les motifs que j'ai eus en présentant le projet.

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - J'entendrai d'abord vos développements.

- La chambre décide que la discussion s'établira en même temps sur l'article 10 et sur l'article 16. L'article 16 est ainsi conçu :

« Le conseil communal, dans chaque commune où il existe un mont-de-piété, est tenu de porter annuellement à son budget de dépenses, la somme nécessaire pour combler le déficit de cet établissement.

« Si ses ressources sont insuffisantes à cet effet, et si ni la province ni l'Etat n'y suppléent par des subsides, le mont-de-piété sera supprimé, et il sera, agi conformément aux règles posées dans l'article 3. »

La section centrale propose la rédaction suivante :

« L'administration du bureau de bienfaisance et celle des hospices, dans chaque commune où il existe un mont-de-piété, sont tenues de combler, le cas échéant et à titre d'avance, le déficit de cet établissement.

« Si leurs ressources sont insuffisantes et que la commune n'y supplée par des subsides, le mont-de-piété sera supprimé, et il sera agi conformément aux règles posées dans l'article 3. »

M. d’Anethan. - Messieurs, l'article 10 porte : « Les administrations publiques de bienfaisance continueront, autant que possible, à fournir, à l'intérêt légal, les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété, dans la proportion à déterminer par la députation permanente, le conseil communal entendu. » C'est la rédaction du projet primitif. La section centrale propose de dire que les administrations dont il s'agit continueront à fournir les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété, dans la mesure de leurs ressources et aux conditions les plus favorables. Ainsi, messieurs, ce sont, en premier lieu, les administrations publiques de bienfaisance qui sont tenues, autant que possible, suivant le projet du gouvernement, et dans la mesure de leurs ressources, d'après la proposition de la section centrale, à fournir les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété.

Ce sont donc les fonds de ces administrations qui forment la première base de la dotation des monts-de-piété.

Le deuxième paragraphe porte : « En cas d'urgence et d’insuffisance momentanée de la caisse des établissements de bienfaisance, la caisse communale est autorisée à pourvoir provisoirement aux besoins de mont-de-piété. »

Ainsi, le premier paragraphe s'occupe de la dotation permanente de l'établissement ; le deuxième paragraphe s'occupe de ce qui peut arriver dans un moment d’urgence ou d'insuffisance momentanée. Dans ce cas, c'est au conseil communal de pourvoir aux besoins de l'établissement.

Il y a là, messieurs, un système complet. D'abord obligation pour les administrations publiques de bienfaisance, de fournir des fonds, si elles en possèdent et, en deuxième lieu, en cas d'urgence si les fonds de ces établissements font défaut, faculté pour l'administration communale de pourvoir à cette insuffisance momentanée. Voilà ce qui est établi par l'article 10. L'article 16 prévoit un autre cas. L'article 16 suppose le mont-de-piété établi et les administrations de bienfaisance dépourvues de ressources suffisantes pour pourvoir à ses besoins, non pas en cas d'urgence, non pas en cas d'insuffisance momentanée, mais d'une manière permanente.

Pour ce cas le conseil communal est obligé de porter à son budget annuel la somme nécessaire pour couvrir le déficit de l'établissement, en un mot, pour lui permettre de subsister, et si la commune ne peut pas porter cette somme à son budget, si d'un autre côté la province et l'Etat refusent d'accorder des subsides, alors l'établissement doit être supprimé. Vous le voyez, messieurs, ces deux articles, 10 et 16, établissent un système complet : si les établissements de bienfaisance ont des ressources suffisantes, le conseil communal n'intervient qu'en cas d'urgence, en cas d'insuffisance momentanée ; si, au contraire, les établissements de bienfaisance ne peuvent pas fournir des fonds ou n'en fournissent pas suffisamment, le conseil communal est obligé de porter annuellement au budget une somme de......pour remplir le but qu'il s'est proposé en demandant l'érection du mont-de-piété. Que fait la section centrale ?

Elle admet à l'article 10 l'obligation pour les hospices et les bureaux de bienfaisance de fournir des fonds, et l'obligation pour les communes, en cas d'insuffisance, de pourvoir au déficit ; et ensuite à l'article premier la section centrale propose de dire :

« L'administration du bureau de bienfaisance et celle des hospices, dans chaque commune où il existe un mont-de-piété, sont tenues de combler, le cas échéant et à titre d'avance, le déficit de cet établissement. »

« Si leurs ressources sont insuffisantes et que la commune n'y supplée par des subsides, le mont-de-piété sera supprimé, etc. »

Ainsi, messieurs, d'après l'article 16 de la section centrale on impose à l'administration des hospices et au bureau de bienfaisance une obligation qui, à leur défaut, est imposée à la commune, tandis que la section centrale avait admis elle-même par l’article 18 qu'en cas d'insuffisance momentanée, ce serait à la commune à combler le déficit.

L'article 16, tel que la section centrale l'a proposé, ne pourrait donc pas subsister avec l'article 10.

Je ne pense pas, messieurs, que ces changements puissent être admis tels qu'ils ont été proposés par la section centrale ; je crois que le système primitif du gouvernement est infiniment préférable, qu'il maintient les positions telles qu'elles résultent de la nature des choses, et des devoirs des diverses institutions.

Quant à la rédaction même des articles 10 et 16 du projet de la section centrale, j'ai une observation à faire. D'après le projet primitif, les administrations publiques devaient fournir les fonds dans la proportion déterminée par la députation permanente du conseil provincial, le conseil communal entendu. D'après les observations qui ont été faites et les amendements qui ont été adoptés, il faudrait ici intervertir les mots et dire : « déterminée par le conseil communal sur l'avis de la députation permanente ». Mais la section centrale n'indique aucune autorité qui serait appelée à fixer la proportion dans laquelle les fonds devront être fournis. Eh bien, je demande comment coordonnera l'action des différents établissements. Quelle autorité dira quels fonds chacun devra fournir ? Quelle autorité en fixera la quotité ? Le bureau de bienfaisance, par exemple, pourra refuser de fournir des fonds au mont-de-piété ; il pourra prétexter d'autres obligations à remplir envers d'autres malheureux. Les hospices pourront opposer le même refus, alléguant des travaux à faire, des secours plus nombreux à fournir aux malades, etc. Il pourra donc surgir entre les divers établissements des conflits tels qu'aucun fonds ne serait fourni au mont-de-piété. Lorsque deux établissements sont appelés à concourir à une même œuvre, il faut nécessairement qu'une autorité quelconque désigne la part d'intervention de chacun.

Je viens maintenant, messieurs, à l'article 16. D'après cet article tel qu'il avait été proposé, on admet pour la province et l'Etat, la possibilité de donner des subsides pour maintenir les monts-de-piété. J'ignore pour quel motif la section centrale a rayé de l'article 16 l'intervention éventuelle de l'Etat et de la province. La suppression de cette disposition, qui n'est qu'une simple faculté, peut, dans certains cas, avoir pour conséquence la fermeture d'un mont-de-piété qu'il serait facile de soutenir dans l'intérêt de la classe pauvre, à l'aide d'un subside momentané.

L'article 16 me fournit l'occasion de renouveler une objection que j'ai faite, quand j'ai combattu l'amendement proposé par l'honorable M. Tielemans, au sujet de la suppression des monts-de-piété. Je disais qu'il ne fallait pas, pour la suppression des monts-de-piété, exiger l'initiative du conseil communal ; qu'il pouvait se présenter des circonstances, où sans cette initiative, et malgré le silence même du conseil communal, il devenait indispensable de fermer le mont-de-piété. L'article 16 est une preuve de cette nécessité. Il suffit, en effet, que les ressources de la commune soient insuffisantes, et que la province et l'Etat refusent des subsides, pour que l'établissement doive être fermé.

Maintenant si le conseil communal ne veut pas prendre la délibération dont il s'agit dans l'amendement introduit à l'article 3, et peut-être sera-t-il engagé à ne pas la prendre, dans l'espoir d'obtenir plus tard un subside, soit de l'Etat, soit de la province, je demande si, dans ce cas, on ne pourra pas suppriment le mont-de-piété. On ne le pourra pas, d'après l'amendement adopté, et l'article 16 restera sans exécution. Il est donc nécessaire d'introduire dans l'article 16 un paragraphe qui pourrait être ainsi conçu :

« Dans ce cas, le mont-de-piété pourra être supprimé par arrêté royal, si le conseil communal ne prend aucune délibération à cet égard. »

Alors disparaîtraient les inconvénients de l'amendement de M. Tielemans que j'avais signalés et les motifs qui m'avaient engagé à le combattre à l'article 3 viendraient à disparaître complètement.

- L'amendement de M. d'Anethan est appuyé.

M. Dedecker, rapporteur. - Messieurs, l'erreur dans laquelle l'honorable M. d'Anethan me paraît verser consiste en ce qu'il n'a pas distingué la différence qui existe entre le premier paragraphe de l'article 10 et le premier paragraphe de l'article 16. Ces deux paragraphes s'appliquent à des cas différents.

Le deuxième paragraphe de l'article 10 s'applique au cas d'urgence et d'insuffisance momentanée. Ainsi, par suite d'une maladie contagieuse, d'un chômage, d'un incendie, etc., il peut, arriver que l'administration d'un mont-de-piété (page 1056) ait instantanément besoin de fonds. En ce cas, les administrations publiques de bienfaisance doivent d'abord être appelées à les fournir d'urgence ; mais ces administrations ne pouvant, pour le moment, pas intervenir, la caisse communale doit pourvoir momentanément à ces besoins.

Dans le premier paragraphe de l'article 16, il s'agit, non d'un déficit d'urgence, mais d’un déficit qui se produit à la fin de l'année et qui peut se reproduire même pendant deux ou trois ans de suite. Evidemment il faut que ce soient les administrations de bienfaisance qui interviennent pour fournir les fonds nécessaires pour que le mont ne soit pas en perte. C'est une espèce de supplément de capital à fournir ; et si ces administrations ne sont pas en mesure de le fournir, c'est à la commune à intervenir ; et, lorsque la commune ne peut pas combler ce déficit pour ainsi dire normal, alors le mont-de-piété doit être supprimé, comme n'ayant pas des conditions de durée.

La section centrale n'a voulu faire intervenir ni l'Etat, ni la province, parce que ce système pourrait mener extrêmement loin et parce que les monts-de-piété sont, sinon exclusivement, du moins avant tout, d'intérêt communal. Il faut par tous les moyens possibles assurer le maintien des monts-de-piété ; mais si leur existence devient une charge et une charge pour ainsi dire permanente pour la commune, la section centrale n'a pas osé décider qu'il convient de les maintenir à tout prix.

Dans le premier paragraphe de l'article 10, la section centrale a proposé la suppression de ces mots : « et dans la proportion à déterminer par la députation permanente du conseil provincial, le conseil communal entendu. » J'avoue qu'en section centrale j'avais demandé le maintien de ces mots. Je crois, en effet, qu'il peut se présenter entre l'administration des hospices et le bureau de bienfaisance des conflits qui rendent l'intervention de la commune nécessaire, à l'effet de fixer la part respective de chacune de ces administrations.

M. Tielemans. - Messieurs, je propose d'ajouter à l'amendement de l'honorable M. d'Anethan ces mots :

« Il sera nommé par le même arrêté un commissaire liquidateur. »

Vous comprenez, messieurs, qu'en cas de suppression du mont-de-piété, il y a toutes sortes d'intérêts qui doivent se liquider et qui peuvent se trouver en conflit. Cette liquidation ne peut être faite ni par le conseil communal, ni par les hospices, ni par le bureau de bienfaisance ni par le mont-de-piété, s'il a des fonds particuliers. Je propose donc la nomination par le gouvernement d'un commissaire liquidateur.

- Ce sous-amendement est appuyé.

M. d’Anethan. - Messieurs, je crois que l'honorable M. Dedecker ne m'a pas bien compris et, qu'il me permette de le lui dire, je crois qu'il ne comprend pas bien lui-même l'article 10 de la section centrale. Je demande la permission de répéter ce que j'ai dit en expliquant de nouveau ma pensée. Nous sommes d'accord avec l'honorable membre que les administrations publiques de bienfaisance aux termes du premier paragraphe de l'article 10, doivent être les premières appelées à fournir les fonds. Maintenant en cas d'urgence et d'insuffisance momentanée, qui subvient aux besoins du mont-de-piété ? C'est l'objet du paragraphe proposé par le gouvernement et adopté par la section centrale. C'est la commune qui est autorisée mais non obligée à intervenir. On conçoit que dans ce cas on ne puisse pas obliger la commune à fournir les fonds.

La commune a, il est vrai, demandé l'érection du mont-de-piété, mais elle a compté sur les fonds des hospices et des bureaux de bienfaisance, elle savait que ces fonds étaient suffisants au moment de la création de l’établissement, elle ne pouvait pas prévoir une insuffisance momentanée ; aussi la loi s'est-elle gardée de dire que dans ce cas la commune devrait forcément fournir les fonds nécessaires. Nous sommes donc d'accord, qu'en cas de gêne momentanée, c'est aux communes qu'il faut s'adresser.

L'article 16, je le répète, ne s'occupe pas d'une gêne momentanée, mais il prévoit le cas où la commune aurait demandé l'érection d'un mont-de-piété, après avoir reconnu que les hospices ne pouvaient donner qu'une somme insuffisante et avoir pris ainsi implicitement l'engagement d'y suppléer pour permettre an mont-de-piété d'entamer et de continuer ses opérations. Voilà la position à laquelle l'article 16 fait allusion.

Il ne s'agit pas là d'une gêne momentanée, mais d'une obligation permanente pour la commune qui a demandé l'érection du mont-de-piété, d'une obligation à laquelle le conseil communal doit annuellement satisfaire.

Maintenant que fait la section centrale ? Elle abandonne complètement ce système, elle ne se préoccupe pas de cette position dont je viens de parler, elle prévoit de nouveau ici le cas d'un déficit momentané, elle dit, en effet, au premier paragraphe : L'administration du bureau de bienfaisance et celle des hospices dans chaque commune où il existe un mont-de-piété, sont tenues de combler, le cas échéant et à titre d'avance, le déficit de cet établissement.

Ainsi, il s'agit bien d'un cas qui se présente accidentellement, et pour ce cas l'administration des hospices est obligée de combler le déficit, Mais, ne l'oublions pas, cette obligation est déjà imposée à la commune par le paragraphe 2 de l'article 10, que la section centrale a elle-même adoptée. Veuillez remarquer, en outre, que d'après l'article 16 de la section centrale l'administration de bienfaisance doit donner cette somme à titre d'avance. Je ne comprends pas ce que signifie cette disposition ; car c'est toujours à titre d'avance et jamais comme don que cette administration doit fournir des sommes au mont-de-piété, puisque les cas de remboursement sont prévus et réglés.

Sous aucun rapport, la disposition de l'article 16, proposée par la section centrale, ne me paraît pouvoir être maintenue ; quant à la faculté pour la province et pour l'Etat de suppléer, je pense qu'il faut la conserver ; c'est, du reste, en concordance avec nos lois organiques ; nous l'avons admise pour les enfants trouvés dans la loi de 1834, et pour les dépôts de mendicité dans la loi de 1835 ; les provinces et l'Etat peuvent intervenir par des subsides pour aider la commune à remplir ses obligations, Ce principe étant admis dans ces lois de bienfaisance, pourquoi le rejeter dans la loi dont nous nous occupons maintenant ?

M. le ministre de la justice (M. de Haussy). - D'après les explications données par l'honorable M. d'Anethan et l'honorable rapporteur, je crois que la rédaction primitive des articles 10 et 16 du gouvernement devrait être maintenue. Suivant l'article 10, c'est aux administrations de bienfaisance à fournir les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété et en cas d'urgence et d'insuffisance momentanée, la commune peut y pourvoir provisoirement à titre d'avance. L'article 16 prévoit le cas au contraire où il ne s'agit plus d'un défaut momentané, mais d'un déficit permanent résultant de l'insuffisance des ressources des établissements de bienfaisance. Dans ce cas c'est à la commune qui a été autorisée à ériger le mont-de-piété à combler ce déficit ; toutefois si ses ressources sont insuffisantes la commune le justifiera et elle pourra prendre une résolution pour la suppression de l'établissement.

Aux termes de l'article 3, cette délibération sera soumise à l'approbation du gouvernement. Tout marche bien dans ce système, tandis que dans celui de la section centrale, l'article 16 fait en quelque sorte double emploi avec le paragraphe 2 de l'article 10, car il ne s'applique également qu'à un déficit momentané qui doit être couvert par les administrations de bienfaisance, et à titre d'avance ; or, je ne pense pas que telle ait été la pensée de la section centrale.

Au reste, M. le rapporteur pourrait nous donner à cet égard des explications ultérieures.

M. de Bonne. - Je viens appuyer le projet de la section centrale en ce qui concerne le conseil communal. Dans le projet primitif le conseil communal était seulement entendu ; c'était la députation permanente qui déterminait les fonds à donner au mont-de-piété.

Il me semble que le mont-de-piété étant une institution communale dotée par la commune, qui doit pourvoir à ses besoins en cas de nécessité et supporter les pertes, c'est à elle, à son conseil à déterminer les fonds nécessaires à ses opérations, à fournir par les administrations publiques de bienfaisance. A cet égard, je demanderai ce qu'on entend par administrations publiques de bienfaisance.

Cette demande est justifiée par l'article 16, auquel je reviendrai tout à l'heure. S'il s'agit seulement des administrations de bienfaisance, rien de plus simple, c'est l'administration communale qui y pourvoit. Mais si on entend fixer les proportions des fonds à fournir par les hospices, c'est impossible. Les fonds qu'a l'administration des hospices constituent un patrimoine, une dotation ; il n'est pas possible de les aliéner. Ce serait les aliéner que les placer au mont-de-piété, avec le risque de supporter les pertes qui pourraient arriver. Les hospices peuvent bien placer des fonds à intérêt au mont-de-piété, sans participer au bénéfice qui ne revient qu'au bureau de bienfaisance ; mais jamais le capital ne peut leur être enlevé. Le motif en est très simple : c'est que, quoique depuis quelques années, on ait fait très peu de donations aux hospices, il en serait fait encore moins, parce que les donateurs diraient : Les donations que nous ferions aux hospices leur seraient enlevées.

Les mots « et celle des hospices » doivent donc disparaître de l'article B.

Qu'on dise que les administrations des hospices seront tenues de placer à intérêt des fonds au mont-de-piété, rien de plus simple. Mais il est impossible, comme j'ai eu l'honneur de le faire observer hier, qu'ils soient tenus à aucune perte.

M. Rousselle. - Je crois que les expressions qui se trouvent dans le projet de loi doivent être maintenues. L'honorable membre est, ce me semble, dans l'erreur, lorsqu'il dit que les hospices ne possèdent que des biens de fondation. Les hospices et les bureaux de bienfaisance ont des revenus sans affectation qui peuvent être assignés à tous les besoins de la bienfaisance dans les localités.

Evidemment les biens provenant de fondations, pas plus du bureau de bienfaisance que des hospices, ne peuvent être appliqués aux monts-de-piété, si ce n'est pour en tirer un revenu, mais sans être soumis aux risques de perte qu'il peut y avoir.

Je pense donc que les termes du projet de loi doivent être maintenus.

M. Loos. - Je crois également que la rédaction de la section centrale doit être maintenue, à moins qu'il n'y ait malentendu sur la portée de l'article 16 proposé par le gouvernement. L'honorable M. d'Anethan a fait observer qu'il y avait malentendu ; et d'après la manière dont il s'est expliqué, je crois qu'il a raison. La section centrale a considéré que le déficit dont parle l'article 16 serait le résultat d'un compte annuel soldant par une perte, qui devrait être supportée à titre d’avance par l'administration du bureau de bienfaisance et des hospices. Je crois que c'est ainsi que la section centrale a compris la disposition du projet. Cependant les explications que l'honorable M. d'Anethan vient de donner font naître quelques doutes dans mon esprit sur les intentions des rédacteurs du projet du gouvernement. La section centrale s'est dit que s'il y avait déficit, si à l'expiration d'une année les opérations du mont-de-piété venaient à produire un compte en perte, les deux administrations couvriraient momentanément le déficit qui pourrait être (page 1057) comblé plus tard par les opérations de l'année suivante. C'est par ce motif que la section centrale a dit « à titre d'avance ».

Si elle s'était trompée, on pourrait revenir sur cette disposition dans le sens indiqué par l'honorable M. d'Anethan. Mais je ne pense pas que ce soit nécessaire : car il faut toujours prévoir le cas de la clôture d'un exercice en perte. Je pense donc que la rédaction de la section centrale, pour l'article 7, peut être maintenue.

A l'article 10 la section centrale vous propose de dire que « les administrations publiques de bienfaisance continueront à fournir, dans la mesure de leurs ressources et aux conditions les plus favorables, les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété ». La rédaction du gouvernement voulait faire déterminer cette participation par la députation permanente. Or, qu'arrivera-t-il ? C'est qu'une administration de bienfaisance aura, je suppose. 10,000 fr. en caisse, l'autre n'aura que 2,000 fr. Cependant la députation permanente leur enjoindra de contribuer par parts égales, comme c'est leur habitude, aux besoins du mont-de-piété. Mais si l'une des administrations n'a pas les fonds, la décision de la députation sera sans effet. Il vaut donc mieux rester dans les termes de l'article. La disposition, dans ces termes, est plus réalisable dans la pratique.

Lorsqu'il y aura insuffisance de ressources, l'administration du mont-de-piété s'adressera à l'administration du bureau de bienfaisance, ou à l'administration des hospices, ou à toutes les deux à la fois. S'il arrive que ni l'une ni l'autre n'ont les fonds nécessaires pour subvenir aux besoins du mont-de-piété, on s'adressera soit à la commune, soit aux particuliers qui savent bien qu'ils ne courent aucun risque en prêtant au mont-de-piété, et qu'ils rentreront dans leurs avances au bout de très peu de temps.

Je demanderai donc que la rédaction de l'article 10 et de l'article 16 proposée par la section centrale soit conservée.

M. d’Anethan. - Messieurs, je suis parfaitement d'accord avec l'honorable M. Loos ; lorsqu'il y a insuffisance, fût-elle seulement momentanée, le mont-de-piété peut s'adresser aux administrations publiques de bienfaisance. Mais nous n'ayons pas besoin pour cela de l'article 16. L'article 10 ledit d'une manière positive et générale. Les administrations publiques de bienfaisance continueront autant que possible à fournir, à l'intérêt légal, les fonds nécessaires aux opérations des monts-de-piété. Cet article est général ; en toutes circonstances, le mont-de-piété peut s'adresser aux administrations publiques de bienfaisance, en toutes circonstances le mont-de-piété peut leur demander les fonds qui lui sont nécessaires. Mais il peut arriver qu'il y ait insuffisance dans la caisse des établissements de bienfaisance et dans la caisse du mont-de-piété. Le paragraphe de l'article 10 prévoit ce cas, auquel l'honorable M. Loos faisait également allusion. Alors il faut bien s'adresser à la commune, et la commune, comme je le disais tantôt, n'est même pas obligée de fournir des fonds, elle est seulement autorisée à en fournir.

Que décide l'article 16 de la section centrale ? Il va beaucoup plus loin ; non seulement on permet de s'adresser en cas de gêne momentanée aux établissements de bienfaisance pour solliciter un secours ; mais on leur impose l'obligation de combler, le cas échéant, le déficit, et on leur impose cette obligation après qu'ils ont déjà une première fois rempli le devoir dont les a chargés le conseil communal. Or, ce n'est pas l'administration de la bienfaisance qui a demandé la création du mont-de-piété ; ce n'est pas elle qui a examiné quelles étaient les ressources du mont-de-piété, s'il pouvait subsister ; c'est le conseil communal qui a dû se livrer à cet examen. Si maintenant le conseil communal s'est trompé, s'il a pensé à tort qu'il y avait des ressources suffisantes, c'est au conseil communal et non à l'administration de la bienfaisance à réparer cette erreur.

L'administration de bienfaisance est autorisée à le faire, si elle a des fonds disponibles ; mais elle ne peut y être tenue, si l'insuffisance provient d'un vice de calcul qu'aurait fait l'administration communale.

Ainsi je pense qu'on ne peut admettre la disposition de l'article 16, qui établirait, à charge de l'administration de bienfaisance, une obligation beaucoup plus forte que ne le veut l'article 10.

Je pense donc, messieurs, que quand le cas d'insuffisance se présentera, ce sera au conseil communal à aviser, si toutefois l'administration de la bienfaisance ne veut pas donner les fonds.

L'honorable M. Loos maintient le retranchement proposé par la section centrale. Il dit : Mais il peut se présenter des cas où l'administration des, hospices n'a que 2.000 fr. en caisse, tandis que le bureau de bienfaisance en aura 10,000. Si c'est le conseil communal qui doit déterminer la proportion dans laquelle les versements auront lieu, il pourra arriver que le conseil communal ordonne à l'administration, qui n'a que 2,000 fr. en caisse, d'en verser 10,000.

Messieurs, il est évident que le conseil communal aura soin de s'assurer de l'état de la caisse et qu'il tiendra compte de cet état dans sa décision.

Mais il est important de maintenir la répartition à faire par le conseil communal, parce qu'il peut se rencontrer des cas où les établissements de bienfaisance se refuseraient à remplir leurs obligations et l'autorité supérieure doit alors les forcer d'y satisfaire. Le contraire peut également arriver. Supposons que les administrations de bienfaisance veuillent placer au mont-de-piété des fonds qu'elles ont, ce qui constitue un placement très avantageux. Il faut bien que l'administration communale dise : Vous avez toutes deux, par exemple, 10,000 fr. à placer ; vous n'en placerez chacune que 5,000 puisque le mont de-piété n'a besoin que de 10,000 fr.

Il faut nécessairement que l'on puisse d'un côté vaincre le mauvais vouloir des administrations de bienfaisance, si elles se refusaient à donner les fonds nécessaires, et d'un autre côté empêcher qu'elles ne donnent plus que la somme dont le mont-de-piété a besoin ; et c'est le cas qui arrive le plus souvent, car les administrations des hospices, trouvant un placement favorable dans les monts-de-piété, sont toujours disposées à verser leurs fonds dans les caisses de ces établissements.

M. Loos. – Il me semble que nous ne nous entendons pas encore sur la portée de l'article 16.

L'honorable d'Anethan persiste à voir dans le mot « déficit » une insuffisance permanente de ressources pour le mont-de-piété.

La section centrale, ainsi que je l'ai dit, y a vu tout autre chose. Elle y a vu une perte provenant d'un exercice annuel, et cette perte produisant dans la caisse du mont-de-piété un déficit qu'il faut combler, il restait à savoir qui aurait payé cette perte. Or, le projet en discussion attribuant à l'administration des bureaux de bienfaisance et aux hospices les bénéfices éventuels des opérations du mont-de-piété, après que la dotation aura été formée, la section centrale a cru devoir leur attribuer aussi l'obligation de combler, provisoirement et à titre d'avance, la perte qui serait résultée des opérations d'un exercice

En écoutant l'honorable M. d'Anethan, j'ai remarqué qu'il voyait dans le mot « déficit » tout autre chose. Il y a vu une insuffisance permanente de capitaux pour pourvoir aux opérations des monts-de-piété.

Il s'agirait donc de nous mettre d'accord sur ce point ; s'agit-il d'une perte à combler, perte ayant produit un déficit dans la caisse du mont-de-piété, ou s'agit-il d'une insuffisance permanente de capitaux, à laquelle il faut pourvoir ? Quant à moi, je persiste à croire qu'on n'a eu en vue qu'un exercice en perte ; et, dans ce cas, nous avons pensé que c'était aux administrations de bienfaisance à combler le déficit.

Quant à la suppression que la section centrale vous propose pour l'intervention du conseil communal relativement aux avances à faire aux monts-de-piété pour le besoin de ses opérations, l'honorable M. d'Anethan m'a répondu qu'avant de prendre une décision, le conseil communal pourra toujours s'assurer des ressources des deux administrations. Mais voici ce qui arrive dans la pratique : l'honorable M. Dedecker vous l'a déjà dit tout à l'heure. Un besoin imprévu se déclare par suite d'un événement quelconque. L'honorable M. Dedecker a supposé un événement malheureux. Mais je dirai que ce sont plutôt les événements heureux qui atteint beaucoup de déposants aux monts-de-piété.

Il se présente une kermesse, un bal, une fête populaire quelconque ; le mont-de-piété est assailli de déposants.

Eh bien, qu'à la suite de circonstances semblables les ressources du mont soient épuisées, on ne peut pas réunir immédiatement le conseil communal ; il faut donc que d'une manière permanente celui qui est chargé de la gestion de l'établissement sache où il peut s'adresser pour avoir des fonds lorsqu’il en a besoin.

Ces besoins de fonds, qui naissent presque inopinément, cessent de la même manière, c'est-à-dire que si l'administralion du mont-de-piété a besoin de 10,000 fr. une semaine, il est très possible qu'il soit en état de rembourser ces 10,000 fr. la semaine suivante. Or il serait très onéreux de devoir garder ces fonds lorsqu'il n'en aurait plus besoin.

Par ces considérations, messieurs, je demanderai le maintien de la disposition du projet primitif.

- La séance est levée à quatre heures et demie.