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Note d’intention
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Congrès national de
Belgique
Séance du mardi 16 novembre
1830
Sommaire
1) Pièces communiquées au congrès,
notamment
a) lettre de Van de Weyer
se solidarisant avec la décision préalable du gouvernement provisoire de
démission
b) message du comité central
chargeant Van de Weyer de faire rapport au
congrès sur sa mission à Londres (Destouvelles, Ch. de Brouckere),
c) refus de Vander Linden
d’Hooghvorst d’accepter le mandat de congressiste
2) Commissions de vérifications des
pouvoirs (Joos, Beyts)
3) Rapport de M. Van de Weyer sur
le résultat de sa mission à Londres (Van de Weyer, A. Rodenbach, Beyts, Werbrouck-Pieters, Van de Weyer, Jottrand, de Stassart, Trentesaux, Van de Weyer, Jottrand, Nothomb, Van de Weyer, de Robaulx, Van de Weyer)
4) Rapport sur la proposition
relative à l’inviolabilité des membres du congrès (Werbrouck-Pieters,
Ch. Vilain XIIII, Forgeur)
5) Nomination de questeurs
6) Motion d’ordre (interprétation
du règlement d’ordre sur le rôle des sections centrales)
7) Proposition sur l’indépendance
de
8) Proposition (C. Rodenbach) sur l’exclusion des
Nassau de tout pouvoir en Belgique
9) Proposition (Pirson) sur la
déchéance du Roi Guillaume et de ses descendants
10) Motion d’ordre relative au
projet de constitution (de Theux)
11) Ordre des travaux. Question de
la priorité à accorder à la proposition relative à l’exclusion des Nassau et à
celle relative à la forme du gouvernement (C. Rodenbach, Forgeur, de Robaulx, Lebeau, de Foere, Ch. le Hon, Pirson, Forgeur,
Le Grelle, Destouvelles, C. Rodenbach, de Stassart, d’Arschot, J.-B. Claes, de Stassart, Jottrand, Lebeau, Van de Weyer, d’Hanis van Cannart, de Robaulx, Destouvelles, Seron, Duval de Beaulieu, Van de Weyer)
(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de
Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844,
tome 1)
(page 149) (Présidence de M. le baron Surlet de Chokier)
La séance s’ouvre à une heure (P.V.)
M. Nothomb, secrétaire,
donne lecture du procès-verbal; il est adopté. (P.V.)
COMMUNICATION DE PIECES
ADRESSEES AU CONGRES
Il est fait hommage à l'assemblée,
par M. Van Ryckegem, imprimeur-libraire à Gand, d'un ouvrage intitulé: « De
l'administration de la justice dans le royaume des Pays-Bas, sous le ministère
de M. Van Maanen ».
- Dépôt à la bibliothèque. (P. V.)
_____________________
M. le président – Il est parvenu
au bureau une pétition d'un habitant de Bruges, en hollandais; elle contient
des observations sur le projet de constitution. Je propose le renvoi à la
future commission des pétitions. (U. B., 18 nov.)
M. Alexandre Rodenbach – Est-ce en hollandais
ou en flamand ? (U. B., 18 nov.)
M. le président – Je ne suis
pas assez philologue pour répondre à la question de l'honorable membre. (On
rit.) (U. B., 18 nov.)
Plusieurs voix – En flamand.
(C., 18 nov.)
- Renvoi à la commission des
pétitions. (P.V.)
_____________________
Il est donné
lecture d'une lettre de M. Van de Weyer, ainsi conçue:
« Au congrès national.
« Messieurs,
« Chargé par mes collègues
d'une mission à l'étranger, je n'ai pu signer l'acte par lequel ils déposaient
entre vos mains le pouvoir qu'ils avaient provisoirement exercé. J'adhère avec
d'autant plus d'empressement à cette première déclaration et à l'acceptation
des pouvoirs confirmés par le congrès national, que j'avais déjà, avant mon
départ, manifesté à mes collègues que je partageais leur opinion à cet égard.
« Agréez,
messieurs, l'expression de mon profond respect.
« SYLVAIN VAN DE WEYER. »
« Bruxelles, le 16 novembre
1830. » (A.)
- Pris pour
notification. (P.V.)
_____________________
M. le président : J'ai reçu
un message du comité central que je vais avoir l'honneur de vous communiquer.
« Bruxelles, 16 novembre 1830.
« Le
gouvernement provisoire de
« M. Van de Weyer, de retour
d'une mission en Angleterre, demande à communiquer au congrès un rapport sur
cette mission.
« Pour
le comité central,
« F. DE
COPPIN. » (U.B., 18 nov. et A.)
M. Destouvelles demande s'il faut que l'assemblée
se forme en comité secret. (U. B., 18 nov.)
M. Charles de Brouckere fait observer que le
gouvernement ne demandant pas le comité secret, c'est qu'il n'y a aucun
inconvénient à ce que ce rapport soit fait publiquement. (U.B., 18 nov.)
- L'assemblée décide que M. Van de Weyer sera
entendu en personne. (P. V.)
________________________
En attendant
qu'il soit introduit, on donne lecture d'une lettre de M. le baron Emmanuel Vander
Linden d'Hooghvorst, ainsi conçue:
« Bruxelles, 16 novembre 1830.
« Monsieur le président,
« Les
fonctions d'inspecteur général des gardes civiques m'obligeant à me porter sur
tous les points (page 150) de
« J'ai l'honneur d'être,
monsieur le président, avec une haute considération.
« M. VANDER
LINDEN D'HOOGHVORST. » (C., 18 nov.)
______________________
M. Roels,
premier suppléant du district de Furnes, et appelé à siéger en l'emplacement de
M. le baron de Serret, non acceptant, annonce à l'assemblée qu'une
indisposition l'empêche de se rendre au congrès, mais qu'il espère y être sous quelques
jours. (U. B. et C., 18 nov.)
______________________
M. Blomme,
député du district de Termonde, prévient M. le président qu'une affection de
cerveau l'empêche d'assister aux séances. (U. B., 18 nov.)
M. le président – Nous attendrons
que l'affection de cerveau de M. Blomme soit guérie. (On rit.) (U.B., 18 nov.)
M. de Muelenaere, rapporteur de la première
commission de vérification des pouvoirs, propose l'admission de M. Joos,
quatrième suppléant du district de Malines, en remplacement de M. de Pauw,
non-acceptant. (P. V.)
- Ces
conclusions sont adoptées. (P. V.)
_______________________
Pendant ce rapport, M. Charles
Rogier, membre du gouvernement provisoire, s'approche du bureau et parle
successivement à tous les membres.
M. Van de Weyer entre dans la salle,
et s'assied au premier banc de gauche, entre MM. Charles Rogier et le baron de
Sécus, père.
_______________________
M. Coppieters, rapporteur
de la sixième commission de vérification des pouvoirs, propose l'admission de
M. le baron Beyts, suppléant du district de Bruxelles, en remplacement d'un des
quatre députés de Bruxelles optants ou non-acceptants. (P. V.)
- Cette admission est prononcée. (P. V.)
MM. Joos et
le baron Beyts sont successivement introduits. (U. B., 18 nov.)
M. le président – M. Van de
Weyer a la parole. (Profond silence.) (C., 18 nov.)
M. Van de Weyer
– Messieurs, je ne m'attendais point à vous exposer aujourd'hui le résultat de
ma mission ; si j'avais cru qu'il convînt au congrès de m'entendre dans cette
séance, j'aurais préparé un rapport des faits que j'ai à vous raconter. Je vous
prie donc d'avoir quelque indulgence pour le compte rendu improvisé que je vais
vous faire.
Arrivé en Angleterre le 4 novembre,
j'eus connaissance à Douvres du discours du trône ; la couleur hostile de ce
discours me fit prendre la résolution de suspendre toute démarche pendant deux
ou trois fois vingt-quatre heures, jusqu'à ce que l'opinion publique et celle
des membres du parlement se fussent prononcées sur ce discours. En attendant,
je vis plusieurs des membres les plus distingués de l'opposition ; je leur
racontai tout ce qui s'était passé en Belgique depuis notre glorieuse
révolution ; car, il faut le dire, messieurs, les faits avaient été dénaturés
de la manière la plus étrange. Cependant l'opinion publique ne tarda pas à se
manifester en notre faveur, et, trois jours après mon arrivée, le membre de la
chambre des communes qui s'était élevé avec le plus de force contre le discours
du trône, sir Hobhouse, m'introduisit auprès de lord Aberdeen. Après avoir
exposé à Sa Seigneurie l'état exact des faits, je lui posai nettement la
question de savoir si l'Angleterre avait pris une résolution définitive
relativement à nos affaires; il me répondit que l'Angleterre était résolue à
faire respecter les traités qui garantissaient la paix et la stabilité de
l'Europe, et qu'elle n'interviendrait point tant que ses intérêts et son
honneur ne seraient pas compromis.
Je dis alors à lord Aberdeen que
déclarer qu'on voulait maintenir les traités et ce qu'on appelait la stabilité
de l'Europe, c'était déclarer la guerre ; que la résolution des Belges était de
repousser toute intervention, soit diplomatique, soit par la force des armes,
et qu'en désespoir de cause, plutôt que de souffrir cette intervention,
Lord Aberdeen me répondit que les
grandes puissances agissaient d'accord avec
Ma mission était remplie, et je ne
cherchai pas à voir d'autres membres du cabinet anglais. Un de nos compatriotes
se rendit chez moi et me dit que le prince d'Orange, arrivé à Londres depuis
quelques jours, avait manifesté le désir de me voir ; je répondis que, comme
membre du gouvernement provisoire, je ne pouvais ni ne voulais avoir aucun
rapport avec le prince, mais que, comme citoyen d'un pays sur lequel sa famille
avait régné, je voulais bien me rendre chez lui pour recevoir les communications
qu'il avait à me faire.
Je me rendis le lendemain chez le
prince, et j'eus une longue conversation avec lui : il justifia sa conduite à
Anvers, et depuis qu'il avait quitté cette ville ; je lui exposai tous les
justes soupçons qu'avait fait naître son voyage à La Haye, et le prince m'ayant
demandé si je pensais qu'il eût quelques chances de régner en Belgique, je lui
répondis que, dans mon opinion personnelle, lui et tous les membres de sa
famille avaient à jamais perdu toute chance d'obtenir un pouvoir quelconque
dans notre pays, et que s'il m'interrogeait sur la question de savoir si les
Belges le recevraient avec plaisir, je lui répondrais que je ne croyais pas
qu’il fût de la prudence pour lui de remettre le pied sur notre sol. Alors le
prince me demanda si notre conversation serait rendue publique ; je lui dis que
j'étais résolu à ne rien cacher à mes concitoyens, et j'ajoutai que si la
conférence que j'avais eue avec lui avait besoin d'explication, elle serait
simple et digne ; que je répondrais à mes collègues que, dans la position où se
trouvait le prince, il m'avait semblé que c'était un devoir de délicatesse de
ne pas la refuser. Le prince entra dans de longs détails sur sa conduite à
Anvers, sur les demandes officielles qu'il avait faites à son père ; et nous
nous séparâmes. C'est la seule conférence que j'aie eue avec le prince
d'Orange, pendant mon séjour à Londres.
Je ne fis pas de nouvelles
démarches, je crus qu'il était de la dignité du pays que je représentais de ne
point solliciter d'audiences ; mais la même personne qui avait servi
d'intermédiaire entre moi et le prince d'Orange, me prévint que le duc de
Wellington avait l'intention de m'entretenir des affaires de
Je reçus, en effet, une lettre du
duc de Wellington conçue dans les termes les plus flatteurs, et par laquelle S.
G. m'annonçait qu'elle m'attendait le lendemain à trois heures.
Le duc de Wellington fut plus précis
et plus catégorique que lord Aberdeen sur le principe de non-intervention. M.
Hobhouse annonçait pour vendredi prochain une adresse à S. M. B., afin de
connaître la pensée de son gouvernement sur les affaires de
Lord Wellington me parla des
élections du congrès ; il applaudit à plusieurs choix qui lui semblaient porter
ce caractère de sagesse qu'il désirait voir présider aux délibérations de
l'assemblée nationale.
Par suite de ces conférences,
j'avais acquis la certitude que l'intention des grandes puissances n'était pas
d'intervenir; mais, comme cette certitude devait être rendue plus grande encore
par des déclarations publiques que par des assurances données dans des
conférences intimes, je me rendis chez M. Hobhouse pour insister auprès de lui
(page 152) sur la nécessité de
forcer le cabinet anglai à répéter à la face du peuple et devant l'Europe
entière la déclaration qui m'avait été faite, et c'est vendredi prochain que M.
Hobhouse fera sa motion..
Les
explications dans lesquels je viens d'entrer auront pour résultat, je l'espère,
de rassurer les esprits. J'ajouterai que j'ai rencontré la plus vive sympathie
pour notre belle cause parmi les membres les plus distingués de l'opposition
anglaise ; et je puis affirmer à l'assemblée que cette cause trouvera de chauds
partisans dans le sein du parlement. (Une triple salve de bravos accueille la fin de ce rapport.) (U. B., 18 nov.)
M. Alexandre Rodenbach – Je propose
de voter des remerciements à M. Van de Weyer. (C., 18 nov.)
M. le baron Beyts – Et au
gouvernement provisoire. (C., 18 nov.)
- Ces
remerciements sont votés par acclamation. (C., 18 nov.)
M. Werbrouck-Pieters – Dans le rapport
que vient de nous faire M. Van de Weyer, il n’a pas été question du port
d'Anvers; je demanderai à l'honorable membre s'il pense que la libre
navigation de l'Escaut soit accordée par les puissances. (U.
B., 18 nov.)
M. Van de Weyer – Lorsque les premières conférences de
Londres furent terminées, les grandes puissances firent partir pour
Du reste, la
libre navigation de l'Escaut ne me paraît plus être une question ; ce serait
renverser toutes les idées de droit public que de s’y opposer, et
l'intérêt des puissances de l'Europe est d'accord à cet égard avec le nôtre.
Je n'ai point voulu d'ailleurs demander à assister aux conférences; c'eût été
de ma part reconnaître aux autres puissances le droit de s'immiscer dans nos
affaires intérieures, et manquer totalement à ma mission. (Bravo !) (U.
B., 18 nov.)
M.
Jottrand – Je prendrai aussi la liberté de demander un
éclaircissement à l'honorable M. Van de Weyer. En parlant de son entrevue avec
le prince d’Orange, entrevue de personne privée à personne privée, comme il l'a
fait remarquer, le prince, a-t-il dit, expliqua son séjour à Anvers et son
départ de cette ville, sa conduite officielle à La Haye et en Belgique. M. Van
de Weyer a ajouté, si j'ai bien entendu, que le prince justifia sa conduite. (Murmures
dans l'assemblée.) Je désirerais savoir si M. Van de Weyer a voulu dire que les
explications données par le prince lui ont paru satisfaisantes, à lui M. Van de
Weyer... (Nouveaux
murmures ! l'ordre du jour ! l'ordre du jour !) (C., 18
nov.)
M. le baron de Stassart – Nous n'avons que
faire de la justification de « monsieur »
le prince d'Orange. (Hilarité.) Je demande l'ordre du jour. (Murmures,
agitation. (C., 18 nov.)
M. Charles de Brouckere – L'ordre
du jour. (U. B., 18 nov.)
M. Trentesaux – Quand on m'aura entendu.
Si j'ai bien compris M. Van de Weyer, il a voulu dire que le prince d'Orange
avait expliqué de son mieux les raisons de sa conduite ; c'est ainsi que j'ai
compris le mot « justifié ».
(U. B., 18 nov.)
M. Van de Weyer – J'ai dit que le
prince a cherché à expliquer sa conduite. Du reste, j'ai peu insisté ; la
position du prince m'imposait le devoir de délicatesse de ne pas insister, et
j'ai cru qu'il était convenable d'avoir, pour la situation où il se trouvait,
les égards que j'aurais eus pour tout autre. (U. B., 18 nov.)
M.
Jottrand. L'explication me suffit (murmures). Je crois que
l'assemblée pouvait avoir intérêt à s'éclairer sur la question que j'ai pris
la liberté de faire à notre honorable collègue. Dans tous les cas, je crois
avoir eu le droit de demander l'explication pour mon instruction personnelle. (C., 18
nov.)
M. de Robaulx demande la parole; elle est
à M. Nothomb. (U. B., 18 nov.)
M.
Nothomb – Je prendrai la liberté d'adresser, en ma qualité de député
du Luxembourg, une question à M. Van de Weyer analogue à celle de M.
Werbrouck-Pieters. Lord Wellington et lord Aberdeen savent-ils que le
gouvernement provisoire a pris possession du grand-duché et ont-ils manifesté
leur opinion à cet égard ? (C., 18 nov.)
M. Van de Weyer – Je n'ai pas demandé aux membres du
cabinet anglais s'ils avaient connaissance de la prise de possession du Luxembourg,
parce qu'il me semble que c'eût été leur faire une question indiscrète ; en
effet, les actes relatifs à cette prise de possession ont été publiés, et il
n'eût pas été convenable de demander à des ministres anglais s'ils avaient
connaissance d'un événement aussi important:
il était difficile, je crois, qu'ils n'en fussent pas instruits.
(page 153) Dans ma
conversation avec lord Aberdeen, S. S. lâcha le mot de Luxembourg, et je
m'empressai de lui dire qu'il devait avoir vu par nos actes, à l'égard de
cette province, que nous respections religieusement la foi des traités. La
réponse de lord Aberdeen fut tout à fait diplomatique : ce fut, messieurs,
un signe de tête. (U. B., 18 nov.)
M. de Robaulx – Au
rapport précis et lumineux que vient de faire l'honorable M. Van de Weyer, je
voudrais qu'il voulût bien ajouter quelques éclaircissements sur l'armistice
proposé par les diplomates assemblés en Angleterre. Je demande ces explications
si toutefois l'objet de la mission de l'honorable membre s'est étendu
jusque-là.
Vous le savez, messieurs, le
protocole qui nous a été communiqué tendait à ce qu'un armistice eût lieu pour
arrêter l'effusion du sang ; les termes de cette déclaration étaient de faire
retirer les Hollandais au delà de la ligne qui formait la séparation des deux
pays avant 1814 ; par là Maestricht et Anvers seraient évacués. Il est très
essentiel de connaître si cet armistice a été accepté, et quand il sera
exécuté, afin que la ville d'Anvers cesse enfin d'être sous le canon du général
Chassé, et que cet état de choses ne serve plus de prétexte aux peureux pour
dominer les discussions et empêcher les motions dans l'intérêt de la sûreté du
pays. (E.. 18 nov.)
M. Van de Weyer – L'armistice
était en dehors de ma mission. Je l'ai déjà dit et je le répète je ne pouvais
assister aux conférences tenues à Londres. Ceci regarde le gouvernement
provisoire qui a reçu des communications à cet égard. (C., 18 nov.)
M. de Robaulx – Répondez alors comme
membre du gouvernement provisoire. (C., 18 nov.)
M. Van de Weyer
– Je suis de retour à Bruxelles depuis hier, et vous devez savoir mieux que
moi ce qui se passe en deçà du détroit. (C., 18 nov.)
M. Werbrouck-Pieters – Il faudra nous
adresser
au gouvernement provisoire. (C., 18 nov.)
M. Forgeur
rappelle qu'aux termes du règlement les communications avec le gouvernement
provisoire se font par message. (C., 18 nov.)
M. Destouvelles – L'assemblée doit prier M. Van de Weyer de rédiger
son rapport pour le faire imprimer. (Appuyé.)
(C., 18 nov.)
M. Van de Weyer – Je me ferai un devoir de me rendre
aux désirs de l'assemblée. (U. B., 18 nov.)
M. le président – L'ordre du
jour est le rapport de la section centrale sur la proposition de M. Werbrouck-Pieters,
relative à l'inviolabilité des députés (J. B., 18 nov.)
M. de Muelenaere fait ce
rapport. Il en résulte que la majorité des membres de la section centrale est
contre cette proposition. M. de Muelenaere finit en disant – Le rapport de la
section centrale doit-il se borner à un simple résumé des avis de toutes les
sections? ou bien doit-il être raisonné
et contenir des conclusions ? (C., 18 nov.)
M. Werbrouck-Pieters : J'ai dit
pourquoi je faisais ma proposition. Maintenant je calcule d'après le rapport
de la section centrale qu'elle ne sera pas adoptée, et pour épargner au congrès
une discussion inutile, je la retire. (Hilarité.)(V. P., 18 nov.)
M. le président: Ainsi la proposition sera considérée
comme non avenue. (V. P., 18 nov.)
M. le vicomte Charles Vilain
XIIII et M. Forgeur pensent que
la proposition ne peut plus être retirée ; que l'assemblée doit prendre une
résolution pour ou contre. (C., 18 nov.)
- L'ordre du jour sur la proposition de M.
Werbrouck-Pieters est mis aux voix et adopté à l'unanimité (P.
V.)
NOMINATION DE QUESTEURS
M. le président: Messieurs,
vous m'avez autorisé à nommer des questeurs pour tout ce qui a rapport aux
détails de l'administration intérieure de ce palais et de la salle de vos
séances ; je prie en conséquence MM. Barthélemy, de Baillet, Huysman
d'Annecroix et de Robaulx de se charger de ces fonctions. (V. P., 18 nov.)
MOTION D’ORDRE
Plusieurs membres – Il reste la
proposition de la section centrale. (C, 18 nov.)
M. de Muelenaere
– Je n'ai pas fait de proposition, mais la section centrale a élevé un
doute. (C., 18 nov.)
M. Le Hon – La
section centrale a soulevé une question d'ordre; c'est une interprétation du
règlement, il est urgent que nous nous en occupions. (C., 18
nov.)
M. Van Meenen – La
section centrale n'a pas fait de proposition dans les formes voulues ; je
m'offre au reste à déposer la proposition conformément au règlement. (C., 18
nov.)
M. Charles de Brouckere – Toute motion est
inutile ; la question est résolue par le règlement. La section centrale est
instituée pour faire un rapport ; lire les procès-verbaux de toutes (page 154) les sections n'est pas faire
un rapport, mais une lecture ; la section centrale devient inutile. (C.. 18
nov.)
M. Le Hon – Je partage
l'opinion du préopinant. C'est ainsi que procède la chambre des députés de
France. (C., 18 nov.)
M. le baron de Stassart est de
l'avis des préopinants. (Aux voix! aux voix!) (J. F., 18
nov.)
L'assemblée décide que la section
centrale doit toujours faire un rapport raisonné et prendre des conclusions.
(P. V.)
Un des secrétaires donne
lecture de la proposition de M. le comte de Celles, tendant à ce que le congrès
déclare l'indépendance du peuple belge, et qu'il ne se séparera pas avant
d'avoir consolidé la liberté de la patrie. (J. F., 18 nov.)
M. le comte de Celles développant
cette proposition – L'indépendance du peuple belge est un fait, le gouvernement
provisoire l'a déclaré ; mais il n'est pas inutile que le congrès national
fasse la même déclaration de la manière la plus solennelle. En 1814 on a
annexé
- La proposition de M. le comte de
Celles est renvoyée à l'examen des sections. (J. F., 18 nov.)
M. le président. Il va vous
être soumis une proposition de M. Constantin Rodenbach. (E., 18 nov.)
Un des secrétaires donne lecture de cette proposition
qui tend à ce que le congrès déclare tous les membres de la famille de Nassau
exclus à perpétuité de tout pouvoir en Belgique.
- Cette proposition est renvoyée à
l'examen des sections. (P. V.)
Un des secrétaires
donne lecture d'une proposition de M. Pirson, relative à la déchéance du
roi Guillaume et de ses descendants de tout droit au gouvernement de
La
proposition est renvoyée à l'examen des sections. (J. B., 18 nov.)
M. Jottrand demande à
changer la rédaction de la proposition de M. de Celles, et à dire que l'assemblée
confirme, en tant que de besoin, l'indépendance de
M. le comte de Celles – Je ne comprends pas qu'il puisse
être fait un amendement à une proposition renvoyée aux sections. (E., 18 nov.)
M. de Robaulx croit que,
d'après le règlement, on peut toujours faire des amendements. (C., 18 nov.)
M. Forgeur, Tout est consommé, la décision est prise, et on ne
peut plus y revenir. (C., 18 nov.)
M. Destouvelles et M. Henri de Brouckere demandent
le rappel au règlement. (E., 18 nov.)
M. Van de Weyer pense qu'il serait plus régulier
d'examiner d'abord la proposition, puis les amendements et sous-amendements ;
mais il s'agit d'aller vite, et un peu d'irrégularité ne nuit pas si elle nous
fait gagner du temps. (C., 18 nov.)
- L'assemblée passe outre. (C. 18 nov.)
M. le chevalier de Theux de
Meylandt fait la proposition suivante :
« Je demande que l'assemblée décide
qu'elle se réunira en sections pour examiner le projet de (page 155) constitution fait par la commission nommée par le
gouvernement provisoire ;
« Que
les rapports de chaque section ainsi que celui de la section centrale seront
imprimés et distribués ;
« Que deux
jours après la distribution de ces rapports, l'assemblée se réunira de nouveau
en sections ; que les procès-verbaux de cette nouvelle délibération et le
rapport de la section centrale seront également imprimés et distribués ;
« Que la
section centrale procédera ensuite, s'il y a lieu, à la rédaction d'un projet
de constitution sur lequel la discussion sera ouverte en séance publique,
article par article ;
« Que
la discussion publique ne commencera que cinq jours après la distribution du
nouveau projet. »
« B. DE
THEUX. » (C., 18 nov.)
- Cette proposition n'est pas
appuyée. (J. F., 18 nov.)
M. le président va mettre
aux voix l’ordre de discussion des propositions. (E., 18 nov.)
M. Constantin Rodenbach réclame la
priorité en faveur de sa proposition relative à l'exclusion des membres de la
famille d'Orange, sur celle relative à la forme du gouvernement; il pense que
cette priorité est exigée par des considérations morales et politiques; il
développe cette pensée. (E., 18 nov.)
M. Forgeur – Comme il
n'est pas dans mes principes, non plus que dans ceux de l'honorable préopinant,
je le présume du moins, de capter une vaine popularité, je demande la priorité
pour la première proposition, qui, logiquement parlant, oit avoir le pas sur
celle qu'on vous propose de discuter. En effet, vous aurez à décider quelle
sera la forme du gouvernement ; vous aurez à vous prononcer entre la république
et la monarchie : or, si vous vous prononcez pour la république, il est évident
que la décision de cette question emporte l'exclusion des Nassau et rend la
solution de la deuxième proposition tout à fait inutile. (Non !
non !) Je dis que l'exclusion comme chef héréditaire sera prononcée,
et si le chef de l'État est électif, de quel droit voudriez-vous, par avance,
limiter le choix des électeurs ? A Dieu ne plaise que j'aie la pensée d'appeler
jamais un prince de cette famille ! Mais je crois que nous n'aurions pas le
droit d'exclure par avance un homme, quel qu'il soit, du choix du peuple, et
que la question de l'exclusion de la famille d'Orange n'a d'utilité que dans le
cas de l'établissement d'une monarchie. (U. B.,
19 nov.)
M. de Robaulx – La question qui se présente ici
est grave ; vous le voyez, messieurs, on recule devant l'idée d'examiner les titres
de la famille de Nassau ; on veut auparavant décider si nous aurons une
république ou une monarchie. Si la même pensée vous anime, pourquoi ces retards
? Le sang qui a coulé en Belgique a rendu cette famille incapable, indigne de
la royauté comme de la présidence ; il faut qu'une décision solennelle le
proclame : plus de Nassau à jamais ! Alors le peuple belge sera en présence de
lui-même, et sans préoccupation délibérera sur son avenir. Alors nous n'aurons
plus à craindre les intrigues, les suggestions. On me suggère qu'on distribue
de l'argent ; je n'en sais rien, mais alors nous n'aurons plus rien à craindre
de ces moyens perfides. (U. B., 19 nov.)
M.
Lebeau – M. de Robaulx a développé une grande partie des arguments que je me
proposais de vous exposer. Si vous voulez que la question de monarchie et de
république soit résolue d'une manière qui lui soit propre, il faut écarter la
question de personne : lorsque cette question de dynastie sera résolue, un
puissant germe de défiance sera banni du pays ; alors nous pourrons procéder
sans préoccupation au choix de la forme de gouvernement qui convient le mieux à
nos mœurs, à nos habitudes, à notre position géographique : quelques-uns
d'entre nous ne seront plus placés dans la nécessité de sacrifier le désir de
la monarchie à la crainte de la guerre civile ; cette question vitale sera
dégagée d'éléments étrangers; vous aurez détruit un germe fécond et dangereux
de mécontentement, et les esprits, plus libres, se rapprocheront sans peine
pour fonder l'avenir de notre patrie. (U.
B., 19 nov.)
M. l’abbé de Foere s'oppose aux conclusions de M.
Forgeur. Il pense qu'en principe l'établissement d'une république n'emporte
pas l'exclusion de la famille déchue ; il faut que cette exclusion soit
solennellement prononcée. (E., 18 nov.)
M.
Charles Le Hon – Connaissant l'état des esprits au dehors, voyant l'agitation au dedans, je
ne puis qu'appuyer de toutes mes forces la priorité ; je demande que la
question de personne disparaisse. .
J'avais encore quelques observations à vous faire, mais le fil de mes
idées est interrompu. (U. B., 19 nov.)
M. le baron de Stassart –
Le préopinant est-il pour la priorité? (U. B., 19 nov.)
M.
Charles Le Hon Je ne croyais pas avoir été obscur à ce point. (On rit.) (U. B., 19 nov.)
M.
Pirson se prononce avec force pour la (page
156) priorité. (Aux voix! aux voix!) (U. B., 19 nov.)
M. Charles Le Hon – J'avais une
question à vous présenter : la citadelle d'Anvers est-elle evacuee ? (U. B., 19 nov.)
M. Forgeur – Je vis dans une atmosphère telle que
je suis étranger aux intrigues du dehors. Dans ce que j'ai dit, je n'ai vu
qu'une question de temps : j'ai pu ignorer que le pays était livré à des
intrigues dont je n'ai jamais eu vent. Quant à mes opinions, elles sont
connues. (L'orateur insiste sur ce mot. - Signes de
doute.) (E., 18 nov.)
Un membre – Si
j'habitais la province qu'habite M. Rodenbach, je voterais pour la priorité ; mais je
suis citoyen d'Anvers, et cette ville est menacée par le canon de la flotte, de
la citadelle et des forts : je demande que la priorité soit donnée à la
proposition de M. de Celles. (U. B., 19 nov.)
M.
Le Grelle – Je répondrai à un honorable préopinant, M. Charles Le
Hon, que la citadelle d'Anvers n'est pas évacuée… Quant à la proposition de M.
Rodenbach, je lui conteste la priorité, la regardant comme « intempestive », « inutile » et
« dangereuse ».
« Intempestive »,
puisque
ce ne sera qu'après que les devoirs et les prérogatives du chef de l'État
auront été tracés dans la constitution que le congrès national est appelé à
donner au peuple belge, que nous pourrons nous occuper du choix du chef ou des
chefs de l'État. Jusqu'à ce jour mémorable, aucune exclusion ne me paraît
devoir être prononcée ; agir autrement, serait s'exposer au juste reproche
d'avoir substitué la précipitation, la légèreté, la passion, au calme, à la
sagesse et à la maturité qui devront nous guider dans une aussi importante, une
si solennelle délibération.
Si tous les membres de la famille
d'Orange doivent renoncer à régner sur nous, proclamons-le, non
dans ce moment, où, à peine réunis, l'expression de nos sentiments pourrait
être envisagée par l'Europe comme un effet de haine et d'exaltation, mais après
quelques jours, lorsque, ayant élevé, dans une constitution toute libérale, un
monument durable de sagesse et de prévoyance, nous aurons acquis des titres à
l'estime de la nation et de la postérité.
Ce n'est point, messieurs, que mon
opinion soit liée à la conservation d'un membre de la famille d'Orange ; je
n'ai pris à cet égard aucun engagement, ni avec les électeurs qui m'ont honoré
en me faisant asseoir parmi vous, ni avec moi-même. Entré dans cette auguste
enceinte, plein d'indépendance et de liberté, je me réserve de former, de mûrir
mon opinion par le concours de toutes vos lumières, et de n'obéir, en votant,
qu'à ma seule conviction.
Je crois que la proposition est
« inutile », parce
qu'en procédant au choix du chef ou des chefs de État, le congrès national
prononcera de fait l'admission ou l'exclusion de la famille d'Orange.
Enfin,
messieurs, la proposition de M. Rodenbach me paraît « dangereuse », parce qu'elle est
susceptible de nuire en quelque sorte au succès des négociations si
heureusement entamées à Londres, et qu'elle pourrait en même temps élever un
obstacle à la prochaine évacuation de la citadelle d'Anvers, que les troupes
hollandaises occupent malheureusement encore. Songez, messieurs, aux
souffrances inouïes que mes concitoyens ont éprouvées ; songez à l'horrible
embrasement de cette cité, jadis opulente, et de son vaste entrepôt, dont les
ruines et les débris fument encore ; songez qu'au moment où vous siégez en
paix sur vos bancs honorables, des milliers de fugitifs errent sans pain, sans
asile ; songez enfin que toute la population anversoise réclame de vous le
repos et la liberté, dont elle ne jouira jamais, tant que d'inexorables soldats
pourront, en conservant la citadelle, tenir suspendue sur sa tête l'épée de Damoclès.
(U. B., 19 nov.)
M. Destouvelles – Comme député du Limbourg, je
viens vous faire la même demande : cent cinquante bouches à feu menacent la
malheureuse ville de Maestricht et demain peuvent être tournées contre ses
habitants ; et, dans une semblable position, vous iriez, par une déclaration
prématurée, compromettre le sort des habitants de toute une cité !
Dans quelques jours peut-être,
Maestricht sera évacué : ce délai ne nuit en rien à la question, qui n'est pas
d'urgence, et tôt ou tard les suffrages de cette assemblée feront justice à qui
il appartient. Mais, je le répète, Cent cinquante bouches à feu menacent
Maestricht, et il est de mon devoir de prévenir les calamités qui pourraient
suivre votre résolution. Je le sais, je ne représente pas ici une province,
néanmoins je dois prendre en considération l'état de celle à laquelle
j'appartiens. Le mandat que j'ai reçu ne doit pas être une source de malheurs
pour mes mandataires. D'ailleurs l'ajournement ne préjuge rien ; ce n'est
qu'une haute mesure de sagesse. (U. B., 19 nov.)
M. Constantin Rodenbach dit quelques mots en faveur de la
priorité. (U. B, 19 nov.)
M. Nothomb –
Quatre propositions vous sont soumises ; la première est relative à
l'indépendance de
M. le baron de Stassart – Après les mémorables
journées de Bruxelles, après tous les prodiges de courage et de patriotisme qui
ont signalé notre glorieuse révolution, comment révoquer en doute ce que peut
l'héroïsme du peuple belge ? Namur n'a-t-il pas présenté le spectacle d'une
garnison de 3,500 hommes, désarmée par quelques bourgeois, et ces bourgeois ne
se sont-ils pas rendus maîtres, en moins de vingt-quatre heures, d'un
château formidable ? Les Anversois et les habitants de Maestricht sont également
Belges ; ils se montreront dignes de ce nom ; ils sauront se débarrasser aussi
de leurs oppresseurs et de leurs citadelles. Gardons-nous seulement d'imprimer
un caractère de mollesse à leurs résolutions. Ah! si les forteresses dont on
nous parle ont des vivres pour six semaines, pour six mois, faudra-t-il que nos
anxiétés, que les incertitudes de notre avenir se prolongent ? On vous a dit
que l'exclusion des Nassau pouvait nuire aux négociations diplomatiques... Je
pense le contraire ; il est indispensable d'ailleurs que l'Europe sache
positivement que nous ne voulons plus des Nassau et qu'aucune puissance sur la
terre ne pourra nous en imposer le joug. (Vifs
et nombreux applaudissements.) (J. B, 18
nov.)
M. le comte d’Arschot – Il nous a été donné communication
de négociations diplomatiques ; nous comptons sur un armistice, sur une
évacuation complète du territoire ; pourquoi ne pas
attendre les résultats de ces négociations que nous pourrons connaître dans
quelques jours ? Les habitants d'Anvers ne peuvent rien contre la citadelle ;
ils ne feraient que des tentatives inutiles. Le courage ne suffit pas ; un
homme du plus grand courage, M. Charles Rogier, a reconnu son impuissance dans
les journées d'octobre. Ne nous exposons pas à verser des larmes de rage et
d'impuissance, pour n'avoir pas su différer de quelques jours. Rien
d'ailleurs n'est préjugé. La question reste entière, nous n'en compromettrons
pas la solution, et nous sauverons deux villes qui doivent passer en notre
possession. (U. B., 19 nov.)
M. Claes (d’Anvers) répond à
M, de Stassart qu’apparemment il ne connaît point la citadelle d'Anvers, que
loin d'être à la veille de se rendre faute de vivres, elle peut se ravitailler
par l'Escaut, de manière à tenir des années. L'orateur insiste sur le danger
que courent les habitants; et il pense qu'il convient d'attendre que les
troupes hollandaises se retirent en vertu d'un armistice. (J. B., 18 nov.)
M. le baron de Stassart – Je
crois n'avoir pas été compris par l'honorable préopinant. Je n'ai point dit
que les forteresses capituleraient faute de vivres ; j'ai manifesté la crainte,
au contraire, que, par des approvisionnements considérables, elles ne
prolongeassent l'état actuel des choses ; il ne s'agirait plus alors d'exposer
une ou deux villes, mais bien de sacrifier la patrie tout entière.
Pénétrons-nous enfin de la célérité qu'exige notre réorganisation sociale. Nul
doute que les troupes hollandaises ne se retirent, si le congrès national, dans
cette circonstance, se prononce avec la vigueur convenable ; si nous paraissons
les craindre, au contraire, elles prolongeront leur séjour pour faire revivre
des espérances et favoriser des manœuvres qu'il nous importe de déjouer. -
L'orateur, après avoir donné quelques autres développements à son opinion,
insiste pour que la priorité soit accordée à la proposition d'exclure les
Nassau. (On applaudit. - Bruit.) (J.
B., 18 nov.)
M. le président
demande le silence – J'espère, dit-il, que l'on ne me forcera jamais par
le tumulte à lever la séance, comme j'y
suis autorisé par le règlement. C'est surtout aux tribunes que je recommande la
tranquillité. (V. P., 18 nov.)
M. Jottrand – Je crois que, pour ce qui regarde Anvers et Maestricht, le mal est déjà
fait, si toute fois l'on doit redouter quelque mal, pour ces deux - villes,
d'une décision quelconque de cette assemblée. Si l'ennemi a l'intention de
faire dépendre le sort de ces deux villes de ce qui se passera ici, (page 158) les
discussions actuelles auront déjà produit l'effet qu'on semble redouter. Pour
ma part, je pense que la question d'Anvers et de Maestricht est inutile à
examiner. Mais examinons si les partisans de la république ne seraient pas ceux
qui voudraient tirer le plus grand parti des résultats qu'on attend de la discussion
sur la proposition de M. Rodenbach. Ils auraient peut-être alors, dans leur
opinion, meilleur marché de la question monarchique. Je pense donc qu 'il vaut
mieux discuter la question de la forme du gouvernement avant celle de
l'exclusion de la maison d'Orange. (U. B., 19 nov.) .
M. Lebeau – Je demande
la priorité; il me paraît d'autant plus naturel de la demander, que maintenant
l'effet que pourra produire notre décision ne sera pas autre que celui que
produira cette discussion.
Peut-être, si la proposition n'avait
pas été émise, il aurait été utile de l'ajourner ; mais maintenant je vote
pour qu'elle soit immédiatement résolue. Elle tend à convertir le général
Chassé en un rebelle, en un brigand qui n'a plus de droit que celui d'un
forban. Ne voyez-vous pas que l'on s'appuie sur l'espèce d'incertitude qui
existe encore sur les espérances des Nassau, pour conserver ces deux
forteresses ? C'est un prétexte qu'il faut détruire.
Quant à la crainte d'un nouveau
bombardement, elle me paraît chimérique. (M. Lebeau termine avec beaucoup de
force cette improvisation.) (U. B., 19 nov.)
M. Van de Weyer – Je ne crains pas de
nouveaux désastres ; l'incendie d'Anvers a été un acte de vengeance qui ne peut
se renouveler et qui a excité l'indignation même dans l'âme des diplomates. Si
le roi de Hollande exterminait Anvers, il se placerait hors de l'humanité et
romprait les derniers liens qu'il peut avoir avec l'Europe. Je dirai un mot
sur l'imputation de mauvaise intention que j'ai entendu faire; de pareilles accusations
rendent les discussions parlementaires impossibles. Personne ne doit être
supposé animé de mauvaises intentions. (U. B., 19 nov.)
M. d’Hanis van Cannart craint
d'exposer Anvers à un nouveau bombardement et veut attendre la
conclusion de l'armistice. (U. B., 19 nov.)
M. de Robaulx – Il me sera
facile de répondre aux moyens employés contre la priorité réclamée ; en
effet, les adversaires de cette priorité qui demandent à ajourner la question
d'exclusion ont pris eux-mêmes le soin de réfuter leurs propres objections ;
ils disent qu'il serait dangereux de prononcer l'exclusion tant qu'Anvers et
Maestricht ne sont pas en notre pouvoir ; et plus loin ils nous disent que ces
forteresses sont si bien approvisionnées que dix ans de siége ne pourraient
les réduire par la force.
Il suit de là que si les
commandants de ces forteresses s'aperçoivent que le congrès craint leurs
menaces, ils se maintiendront et nous donneront la loi.
Je ne partage pas les prévisions sinistres que
l'on veut nous faire envisager. Il ne faut pas croire que les commandants des
forteresses rendent Anvers et Maestricht responsables de nos délibérations ;
l'humanité répugne à de pareilles suppositions. Ce sont des raisonnements
dictés par la peur. (E., 19 nov.)
M. le président – Je prie
l’honorable orateur de ne pas supposer que le sentiment de la peur entre pour
quelque chose dans les délibérations de l’assemblée. (U. B., 19 nov.)
M. de Robaulx – Eh bien, je dis que ce sont des
raisonnements dictés par la crainte, et une crainte mal fondée, ce qui revient
au même.
Avant de finir, je dois répondre à
un honorable préopinant (M. Jottrand), qui a insinué que si on déclarait les
Nassau déchus et exclus du gouvernement futur de
Je signale cette objection, parce
qu'elle signifie que celui qui l'a faite pense à la possibilité de l'élection
des Nassau, ce qui me fortifie dans l'opinion qu'il faut détruire cette
possibilité. (E., 19 nov.)
M. Destouvelles – Je ne partage pas la sécurité de
M. Van de Weyer ; le roi de Hollande peut et doit tenter un dernier coup de
désespoir. Nous ne perdons rien à attendre quelques jours, nous avons tout à
gagner. Vous établiriez la constitution sur les ruines fumantes de deux villes
; je ne veux pas la responsabilité de ces désastres, je vous la laisse tout
entière. Je ne fais pas d'appel aux passions ; je veux temporiser, je veux sauver
deux provinces en ajournant de quelques jours une décision qui me paraît
certaine au fond. (Aux voix ! aux voix !) (U. B., 19
nov.)
- La discussion est close. (E.. 18 nov.)
M. le président prévient
l'assemblée qu'il va mettre aux voix la question de priorité entre la
proposition relative à la forme du gouvernement, et celle ayant pour objet
l'exclusion des Nassau. (E., 18 nov.)
M.
Seron demande que la question soit ainsi posée : Donnera-t-on
la priorité à l'exclusion ? (E., 18 nov.)
(page 159) M. le comte Duval de Beaulieu appuie la question posée par
M. Seron. (E., 18 nov.)
M. Van de Weyer trouve que la question
a été nettement posée par M. le président. (E., 18 nov.)
- L'assemblée décide qu'elle votera sur la
question telle qu'elle est posée par M. Seron. (E., 18 nov.)
L'obscurité est complète on a placé quelques lumières sur le bureau.
M. le président – Nous ne
pouvons procéder par assis et levé, je ne vois plus personne. (U. B., 19
nov.) .
- On procède à l'appel nominal: 174 membres y
répondent ; 77 votent pour la
priorité, 97 contre.
En conséquence, la priorité réclamée
en faveur de la proposition sur l'exclusion des Nassau est rejetée. (P. V.)
(Mouvement marqué de surprise dans une portion
de l'assemblée et aux tribunes publiques.)
Ont voté pour : MM. l'abbé Andries, Barbanson, Beaucarne, de Behr, Béthune, le
baron Beyts, Blargnies, Bredart, Buylaert, Buyse-Verscheure, le
comte de Celles, Charles Coppens, le baron de Coppin, l'abbé Corten, l'abbé Van
Crombrugghe, David, Defacqz, l'abbé Dehaerne, de Decker, Deleeuw-Dupont, de Lehaye, de Man, le vicomte Desmanet de Biesme,
Eugène de Smet, l'abbé J. de Smet, Destriveaux, Devaux, Du Bus, Théophile
Fallon, l'abbé de Foere, François, Fransman, Alexandre Gendebien,
Jean-Baptiste Gendebien, Geudens, Goethals-Bisschoff, Goffint, Helias
d'Huddeghem, Henry, Van Hoobrouck de Mooreghem, le baron d'Huart, Jacques, de
Labeville, Le Bon, Lebeau, Van der Looy, Marlet, Masbourg, le baron de Meer de
Moorsel, Mulle, le comte Werner de Mérode, le comte Félix de Mérode, Morel-Danheel,
l'abbé Wallaert, de Nef, Nalinne, Ooms, Pirson, Peeters, l'abbé Pollin, Raikem,
de Robaulx, Constantin Rodenbach, Alexandre Rodenbach, Charles Rogier, Seron,
Speelman-Rooman, le baron de Stassart, de Thier, Trentesaux, Vandorpe, l'abbé
Verbeke, l'abbé Verduyn, Vergauwen-Goethals, Verwilghen, Wannaar, Van de
Weyer.
Ont voté contre: MM. le comte d'Arschot, Allard, le comte d'Ansembourg,
le comte de Baillet, Baugniet, Van der Belen, le comte de Bergeyck , l'abbé
Boucqueau de Villeraie , le vicomte de Bousies de Rouveroy, Henri de Brouckere,
Cauvin, Jean - Baptiste Claes, Claus, Henri Cogels, Albert Cogels, Collet, de
Coninck, Coppieters, d'Hanis van Cannart, Dams, de
Ryckere, Delwarde, Camille de Smet, Destouvelles, de Ville, Domis, Du Bois,
Dumont, le comte Duval de Beaulieu, Fendius, Fleussu, Forgeur, Gelders,
Gendebien (père), d' Hanens-Peers, Dehemptinne, Rennequin, le baron Joseph
Vander Linden d'Hooghvorst, Huysman d'Annecroix, Janssens, Gustave de Jonghe,
le vicomte de Jonghe d'Ardoie, Jottrand, Joos, de Langhe, Le Bègue, Leclercq,
Le Grelle, François Lehon, Charles Le Hon, Lesaffre, le baron de Leuze, le
baron de Liedel de WeIl, Liedts, Maclagan , Van Meenen, de Muelenaere,
Nagelmackers, Nopener, Nothomb, Olislagers de Sipernau, le baron Osy, le baron
de Pélichy Van Huerne, Peemans, Pirmez, Pettens, le comte de Quarré, le comte
de Renesse, le marquis de Rodes, le marquis Rodriguez d'Evora y Vega, Roeser,
de Roo, de Rouillé, de Sebille, de Schiervel, le baron Frédéric de Sécus, de
Selys Longchamps, Serruys, le baron de Stockhem, le baron Suri et de Chokier,
le baron de Terbecq, de Tiecken de Terhove, le chevalier de Theux de Meylandt,
Thienpont, Thorn, le marquis de Trazegnies, Van Innis, Van Snick, Vander
Linden, Hippolyte Vilain XIIII, le vicomte Charles Vilain XIIII, le baron de
Viron, Werbrouck-Pieters, le baron de Woelmont, Wyvekens, le marquis d'Yve de
Bavay, Zoude (de Saint-Hubert).
Absents: MM.
Barthélemy, Blomme, Charles de Brouckere, le comte Cornet de Grez, Davignon, de
Gerlache, Jean Goethals, Kockaert, Lardinois, Lecocq, Orban, le comte de
Robiano, Roels, le baron de Sécus (père), Simons, Surmont de Volsberghe,
Teuwens, Vandenhove, le comte Vilain XIIII, l'abbé Verbeke, Watlet. (U. B., 19
nov., et J. F., 18 et 23 nov.)
- Quelques explications s'engagent
pour savoir si la proposition de M. le comte de Celles sera mise en discussion
avant celle de M. Constantin Rodenbach relative à la forme du gouvernement. (E.. 18 nov.)
M. Van de Weyer – Je réclame la priorité en faveur de la
proposition relative à l'indépendance. (U. B., 19 nov.)
M. Nothomb et
M. Trentesaux disent quelques
mots dans ce sens. (U. B., 19 nov.)
M. Rodenbach ne s'oppose
pas à ce que la proposition de M. le comte de Celles ait la priorité. (E. 18 nov.)
- L'assemblée décide que la priorité sera
accordée à cette proposition, et fixe la réunion publique à demain, à une
heure.
Il est cinq heures et demie ; la séance est
levée. (P. V.)