Accueil
Séances plénières
Tables des matières
Biographies
Livres numérisés Bibliographie et liens
Note d’intention
Séance précédente Séance suivante
Congrès national de
Belgique
Séance du lundi 6 décembre
1830
Sommaire
1) Communication de pièces
adressées au congrès (notamment démission de de Trazegnies)
2) Interpellations sur les modifications
apportées à la loi relative aux distilleries indigènes et sur l’établissement
de la ligne de douanes du côté de
3) Proposition relative à la garde
civique. Rapport (de Rouillé, François (rapporteur))
4) Proposition relative aux
volontaires. Rapport (de Robaulx, François
(rapporteur), de Robaulx, Van Snick, de Robaulx, Nagelmackers, Ch. de Brouckere, Devaux, de Robaulx, Destouvelles, de Stassart)
5) Motion
d’ordre relative aux discussions sur le sénat (de Robaulx,
Devaux, Forgeur)
6) Motion
concernant le résultat du voyage de
M. Cartwright à La Haye (Le Grelle, de Robaulx)
(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique,
Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 1)
(page 354) (Présidence de M. le baron Surlet de Chokier)
La séance est ouverte à une heure et demie (P. V.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance ; la rédaction en est approuvée. (P. V.)
M. Surmont de Volsberghe et M. Wannaar informent le congrès qu'une indisposition les empêche d'assister
momentanément aux séances de l'assemblée. (J. B., 8 déc.)
______________________
M. le marquis de Trazegnies écrit que sa santé chancelante
l'empêchant d'assister régulièrement aux séances et au travail des sections, il
prie le congrès d'agréer sa démission, et d'appeler, pour le remplacer, le
suppléant qui lui avait été donné par le district de Charleroy, pour lequel il
avait opté. (U. B., 8 déc.)
M. le président
– Le congrès
accepte-t-il la démission? (Oui ! oui !) La commission chargée
d'examiner les procès-verbaux d'élection voudra bien se réunir pour s'occuper
du remplacement de M. de Trazegnies. (U. B., 8 déc.)
M. de Langhe – A quelle heure cette commission se réunira-t-elle ? (U. B., 8
déc.)
M. le président
– A neuf heures ; si
vous en faites partie, vous avertirez vos collègues.... (U. B., 8 déc.)
M. de Langhe – Je ne les connais pas tous. (U.
B., 8 déc.)
M. le président
– Je les connais encore
moins. (On rit.) Mais un avertissement suffira. Je préviens donc MM. les
membres du congrès qui font partie de cette commission qu'elle se réunira
demain à neuf heures. (U. B., 8 déc.)
______________________
M. Brabant, de Namur, présente au congrès
des observations sur l'établissement d'une école vétérinaire. (U.
B., 8 déc.)
M. le président
– Renvoi au bureau des
renseignements. (U. B., 8 déc.)
Une voix – Au comité des pétitions. (U. B., 8 déc.)
M. le président
– L'assemblée veut-elle
renvoyer au comité des pétitions ? (U. B., 8 déc.)
Ce renvoi est ordonné. (U. B., 8 déc.)
______________________
La réunion patriotique du
grand-duché de Luxembourg porte à la connaissance du congrès qu'elle a envoyé
au gouvernement provisoire une déclaration politique signée par la plupart des
habitants notables du grand-duché.
______________________
M.
Demoor, d'Ixelles, envoie des observations sur le projet de constitution présenté
le 27 octobre 1830. (P. V.)
M. le président
– A qui renverrons-nous
? (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx
– Au bureau des
renseignements. (U. B., 8 déc.)
M. de Langhe – Il vaudrait mieux renvoyer au comité des pétitions. (U. B., 8
déc.)
M. de Robaulx – Le renvoi au bureau des renseignements me semble plus
utile. Nous allons nous occuper de la constitution. Les écrits qui peuvent se
rattacher à cette matière se trouvant au bureau des renseignements, il sera
facile de les consulter. Si, au contraire, nous les renvoyons au comité des
pétitions, nous ne pourrons en avoir connaissance qu'à mesure des rapports qui
nous en seront faits, et par là nous pourrons nous trouver privés des vues
utiles qu'ils contiennent. (U. B., 8 déc.)
M. le baron de Stassart – Je ne partage pas les craintes du préopinant. Le
comité des pétitions, en examinant celles qui lui seront renvoyées,
s'empressera de rapporter celles qui s'occuperont des objets d'urgence, et
notre but se trouvera rempli. (U. B., 8 déc.)
(page 355) M. le président – Je vais consulter l'assemblée. (U. B.,
8 déc.)
- Le congrès ordonne le
renvoi à la commission des pétitions. (U. B., 8 déc.)
________________________
La majorité des électeurs de la
commune de Hautfays proteste contre un arrêté du gouverneur du grand-duché de
Luxembourg, qui annule les élections faites dans leur commune.
M. Lissart, ci-devant cultivateur du
Hainaut, présente des observations sur la marche à suivre par le congrès dans
toutes les grandes questions qu'il aura à décider.
M. Lapalière offre un moyen d'équiper
de suite les corps francs.
M. Waugermé, de Bruxelles, demande au
congrès qu'il lui plaise ordonner l'institution d'une commission pour
l'examiner et le nommer artiste vétérinaire.
Quinze entrepreneurs de messageries
demandent le rapport de l'arrêté du 28 janvier 1828 qui soumet les diligences
à un triple droit de barrière.
M. Dewattine-Cauvin, de
Leuze, présente des observations sur la loi de 1817, concernant la milice
nationale, et surtout contre la manière dont on interprète le paragraphe M. (P.
V.)
- Renvoi de ces pièces à
la commission des pétitions. (U. B., 8 déc.)
________________________
M. Chevron, architecte à
Liége, présente au congrès un modèle de monnaie. (P. V.)
- Renvoi au bureau des
renseignements. (J. F.,8 déc.)
________________________
M. Donville fait hommage
au congrès d'un recueil de Chansons patriotiques. (P. V.)
- Dépôt à la bibliothèque. (U. B., 8 déc.)
________________________
M. J. B. Kauffmann, négociant, fait
hommage au congrès d'un ouvrage intitulé : De l'industrie en Belgique; ce
qu'elle était sous le gouvernement des Nassau, et ce qu'elle peut devenir. (P.
V.)
- Dépôt à la bibliothèque. (U. B., 8 déc.)
________________________
M. Delecourt, avocat à Mons, envoie
au congrès un projet de constitution. (P. V.)
- Dépôt à la bibliothèque. (U. B., 8 déc.)
INTERPELLATIONS SUR LES MODIFICATIONS APPORTEES A
Un des secrétaires donne lecture d'une lettre par laquelle
M. Coghen, administrateur générai des finances, annonce qu'ayant été saisi
d'un refroidissement, à la suite de la cérémonie du 4 décembre, il est obligé
de garder le lit, et se trouve, par conséquent, dans l'impossibilité de se
rendre dans le sein de l'assemblée, pour y donner les explications demandées
par M. de Brouckere, dans la séance du 2, sur les distilleries et la ligne des
douanes du côté de
M. le président – M. Duvivier
est dans la pièce voisine; le congrès veut-il l'entendre? (Oui !) (P. V.)
M. de Robaulx
– M. de Brouckere est l'auteur de la proposition ; c'est à lui de savoir
si les explications de M. Coghen lui-même lui sont indispensables. (U. B., 8 déc.)
M.
Devaux – M. de Brouckere se contentera-t-il d'avoir affaire
avec M. Duvivier ? (U. B., 8 déc.)
M. Charles de Brouckere – Peu m'importe, pourvu qu'il
y ait un organe du comité des finances. (U. B., 8 déc.)
-
Le congrès décide que M. Duvivier sera entendu. (P. V.)
M.
Duvivier est introduit.
M. le président – L'ordre du
jour est la discussion de la proposition de M. de Brouckere , conçue comme suit
:
« Je
propose que le congrès national, faisant usage de l'article 12 du règlement ;
« Requière
la présence du commissaire général des finances, dans le plus bref délai
possible, afin d'obtenir de ce chef d'administration générale, des explications
sur les changements apportés à la loi du 26 août 1822 relative aux distilleries
indigènes, et sur l'établissement de notre ligne de douanes du côté de
M. Charles
de Brouckere a la parole. (J. F.. 8 déc.)
M. Charles de Brouckere – Messieurs, la décision
prise par l'assemblée m'autorise à ne plus vous entretenir de l'opportunité de
ma proposition, alors même que la mise à exécution vous distrait de travaux de
la plus haute importance.
Les
révolutions heurtent, froissent tant d'intérêts matériels qu'après le choc on
ne peut assez se hâter de les soutenir. Mais ici, messieurs, il ne (page 356) s'agit pas de relever une
industrie foulée par les événements, mais d'en conserver une demeurée debout,
intacte, au milieu de tant d'autres renversées.
Dans une
telle situation, les distilleries réclamaient-elles des encouragements
instantanés ? pouvaient-elles les premières exiger le redressement des
lois et la diminution de l'impôt ? Non ; et cependant, par son arrêté du 17
octobre dernier, le gouvernement a voulu animer d'une nouvelle vie une branche
d'industrie agricole. Mais si les distilleries n'avaient pas de titres à
l'obtention de faveurs, elles pouvaient exiger de n'être pas sacrifiées
froidement et après la victoire ; voilà cependant le résultat de l'arrêté
précité combiné avec la circulaire de l'administrateur des contributions, du
26 octobre ; résultat préjudiciable au trésor, fatal à l'agriculture.
Mon but,
messieurs, étant d'établir la nécessité d'annuler les mesures législatives
prises par le gouvernement provisoire, alors pouvoir omnipotent, relativement
aux distilleries, ou de changer la loi du 26 août 1822 pour la mettre en harmonie
avec l'arrêté du 17 octobre, j'ai communiqué hier à M. le commissaire général
des finances les points sur lesquels je désirais des éclaircissements. Ainsi
nous aurons les matériaux essentiels à l'assiette de l'impôt, et nous pourrons
prendre l'initiative, s'il en est besoin, sur un point de législation qui
réclame toute notre sollicitude.
Cette
discussion aura peut-être un autre avantage, celui d'éclairer M. le délégué du
commissaire général sur le choix de ses conseillers. Sous l'ancien
gouvernement, tous les projets de lois sur les accises étaient l'œuvre de
Belges, et tout se faisait dans l'intérêt de
L'impôt
sur les eaux-de-vie doit-il être diminué dans le moment actuel ?
Le résultat
de toute diminution d'impôts indirects est une augmentation de consommation,
et par là de produits. Or, je le demande avec confiance, est-ce alors que le
prix des grains est, exorbitant, alors que le prix de la journée de l'ouvrier
baisse par défaut de travail, alors que la circulation du numéraire est sans
activité, qu'il faut
encourager l'absorption des grains par les distilleries ? Est-ce agir avec
sagesse que de défendre, le même jour, la sortie des grains pour l'étranger,
et de donner une prime à la distillation intérieure ?
Loin de là, c'est
commettre deux fautes à la fois. Déjà le congrès a entendu le rapport d'une
pétition tendant à obtenir la fermeture momentanée des distilleries de grains
; le pétitionnaire est l'écho des cris qui retentissent depuis six semaines
dans les provinces. On leur répond par une diminution de l'impôt sur les
eaux-de-vie indigènes. - Ce qui était opportun et la seule chose opportune,
c'était d'éclairer le public alarmé par la cherté des grains. Il fallait lui
montrer que le prix des grains augmentant, le prix des eaux-de-vie indigènes
suivrait la même marche ; que partant la consommation diminuerait, que la
fabrication devancerait ce mouvement, parce que les approvisionnements
seraient mis en circulation ; il fallait lui prouver que le pays était
suffisamment pourvu de céréales, que le paysan n'avait pas encore battu ses
grains, que l'inquiétude même du public influait sur le détenteur, qu'il
craignait d'approvisionner les marchés ; enfin, lui expliquer que la fermeture
des distilleries, en augmentant le prix des eaux-de-vie, donnerait un aliment
tel à la fraude, que le pays se couvrirait de distilleries clandestines, et
qu'ainsi le remède serait pire que le mal. .
Aux conseils on a préféré les faits,
et l'on a voulu contenter tout le monde ; après avoir satisfait à quelques
exigences par une diminution d'accises, on a dédommagé le public par une prohibition
de sortie des grains et multiplié ainsi les erreurs. Les prix des grains
sont-ils tous et sur toutes nos frontières plus élevés que dans notre pays ?
C'est ce que pourra nous apprendre provisoirement M. le commissaire général
des finances ; en attendant une réponse catégorique, j'ai peine à le croire ;
notre dernière récolte n'a pas été favorisée du ciel. Si je ne me trompe, dans
le système de l'administration, la défense de sortie était inutile,
pernicieuse même, par une partie de nos frontières. Inutile, parce qu'on
n'exporte pas à perte ; pernicieuse, parce qu'on provoque ainsi des
représailles. Mieux valait-il, sans doute, rendre l'importation libre, surtout
du côté de
J'admets pour un moment que l'arrêté
du 17 octobre soit excusable, qu'il en résulte une diminution de 30. p. % sur
l'accise des eaux-de-vie ; et alors encore, abstraction de son influence sur le
prix des grains, la mesure prise au détriment du trésor n'aurait pas une grande
influence sur l'agriculture ; elle ne répondrait pas à son but. Ce n'est pas
dans ces temps d'agitation, quand des cris de guerre se font entendre, quand
l'ennemi occupe encore une partie du territoire, qu'on crée de nouveaux
établissements industriels ; ce n'est pas au moment où la matière première est d'une
cherté excessive qu'on ravive des fabriques en stagnation ; celles-là seules
qui sont en activité y demeurent ; elles y seraient demeurées sans modération
de l'impôt ; la mise hors d'effet des arrêtés illégaux du 19 juin 1827 et du
27 juin 1829 eût contenté momentanément les distillateurs.
Je viens d'émettre, messieurs,
quelques considérations d'intérêt général ; je descends aux spécialités et
vais m'occuper des effets des dernières mesures sur les distilleries. Pour être
mieux compris qu'à la séance de jeudi dernier, je suis obligé de vous
expliquer en peu de mots le mécanisme, le système de la loi du 26 août 1822.
D'après cette loi, le distillateur
est astreint à employer une quantité déterminée de farine par baril de matière
mise en macération ; de plus, il doit produire une quantité également
déterminée d'eau-de-vie pour laquelle il est passible de l'accise. Tout
excédant ou déficit de production devient une contravention ; et ainsi les
quittances de payement, les billets de transfert, les passavants sont
nécessaires pour prévenir et réprimer la fraude. Dans ce système, toutefois,
les distillateurs ne sont pas assujettis à une égale production ; ceux dont les
établissements sont qualifiés d'agricoles obtiennent une déduction de 20 p. %.
Cet exposé rapide suffit pour vous
démontrer que la loi du 26 août proscrit toute amélioration, tout
perfectionnement dans la distillation ; qu'elle fait du fabricant une machine à
production dont le mouvement n'est susceptible d'aucune variation, puisque,
sans cesse, il est obligé d'employer la même quantité de matière première, pour
reproduire toujours la même quantité de liqueur fabriquée.
Le système d'ailleurs est vicieux,
parce qu'il divise arbitrairement les distilleries en établissements
commerciaux et agricoles ; qu'il part de l'idée absurde qu'une classe de
fabricants ne retire pas, des matières macérées, toutes les substances
vineuses qu'ils peuvent obtenir, et que, comme conséquence de cette absurdité,
il impose dans la même proportion les distillateurs, soit qu'ils fassent usage
d'alambics de vingt ou de dix barils, pour modérer subitement l'impôt de 20 p.
0/0 en faveur des alambics de neuf barils quatre-vingt-dix-neuf litrons.
C'est, messieurs, cette différence énorme dans les produits exigés des deux
espèces de distilleries qui nécessite, légitime, en quelque sorte, la fraude.
Voyons jusqu'à quel point l'arrêté du
17 octobre, si loyalement interprété par l'administration, remédie aux vices
de la loi.
L'art 2 supprime la justification des
farines ; ainsi le distillateur est débarrassé d'une entrave ; il peut employer
la quantité de matière qu'il juge la plus convenable à la production, mais à la
production d'une quantité déterminée d'eau-de-vie, et cette quantité n'est
nullement en rapport avec la production habituelle.
L'art. 3 de l'arrêté fixe le taux de
production à cinq litrons de genièvre à dix degrés par baril net de matière
macérée, tandis qu'il est constant que l'on en obtient généralement plus de
sept. Aussi l'administration déclare que « les distillateurs de bonne foi
reconnaissent équitable le produit de sept litrons, d'autres soutiennent que
celui de cinq litrons est encore trop élevé ; l'administration a pensé, pour
concilier toutes les exigences, qu'elle pouvait faire la part de la fraude, en
réduisant le taux à cinq litrons. » Ailleurs elle dit en termes formels, «
qu'il ne faut verbaliser que pour des quantités d'une importance considérable.
»
C'est une véritable diminution
d'impôts qu'on a établie et une diminution de 30 p. %, pendant les six mois
d'hiver ; mais un dégrèvement masqué, et dont la jouissance doit s'acheter par
la fraude.
C'était le taux de l'accise, et non
de la production, qu'il fallait baisser ; alors on atteignait au moins un but.
Que, si indépendamment des prix, on voulait faciliter la fabrication, il était
indispensable de supprimer toute évaluation de produits et d'asseoir l'impôt
sur la capacité des appareils, sans s'inquiéter plus de la justification de la
liqueur que de celle des farines employées. Et pour cela, il fallait abolir les
passavants et les autres documents prescrits par la loi, ou entendre sainement
l'art. 4 de l'arrêté du 17 octobre, qui accorde le crédit à termes et sans
caution.
La circulaire du 26 octobre en a
autrement (page 358) décidé ; elle
se fonde sur l'art. 5, par lequel sont maintenues toutes les dispositions de la
loi, pour exiger que les distillateurs, jouissant d'un crédit à termes, ne
puissent effectuer aucun transport sans passavant.
Que doit-il résulter de
l'ensemble de ces mesures ?
Les distillateurs
qualifiés agricoles par l'art. 12 de la loi reconnaissent franchement qu'ils
obtiennent des excédants de produits. En vertu de l'article 41, ils doivent
représenter six litrons vingt-quatre centièmes par baril de matière mise en macération
; ce qu'ils produisent de plus circule, comme l'observe l'administration, sans
documents, au moyen de petits transports. La moyenne des excédants n'atteint
pas six décilitres sur la quantité précitée; tandis que, par suite de
l'arrêté, les distillateurs qui produisent sept litrons par baril de matière
macérée devront, au dire de M. l'administrateur, user de la même facilité pour
frauder deux litrons, c'est-à-dire quatre fois autant. Ainsi, en résumé, le
moyen d'exécution fourni par les agents du gouvernement, c'est de frauder 30 p.
% des produits fabriqués.
Il est inutile, messieurs, de vous
représenter combien est immoral le conseil de l'administration des
contributions, et quelles suites fâcheuses nous amènera un pareil antécédent.
La fraude est un métier auquel on se livre déjà sans répugnance ; beaucoup de
gens ne comprennent pas assez que frauder c'est voler l'État, ou la réunion
d'hommes qui constituent la société politique ; rendre la fraude obligatoire,
c'est la légitimer ; c'est en lever le seul frein moral qui retienne la
cupidité ; c'est créer une habitude perverse en faussant les idées du peuple ;
c'est, en un mot, le rendre forcément criminel.
Voilà donc la fraude devenue
légitime. Mais est-elle possible, cette fraude ? L'est-elle pour tous les
fabricants ? Le transport de l'eau-de-vie ne peut, conformément à l'arrêté et à
la circulaire ampliative et explicative, se faire légalement qu'accompagné de
passavants, et les passavants ne se délivrent que pour la quantité sujette à
l'impôt. Sur mille hectolitres que le distillateur peut produire, sept cents
seulement sont assujettis à l'impôt ; les trois cents autres doivent donc être
débités clandestinement. Là où la consommation est proportionnée à la
fabrication, l'écoulement clandestin se fera sans difficulté ; mais par contre
il sera impossible dans les localités où la fabrication surpasse la
consommation ; impossible dans la plupart des communes rurales ; impossible
surtout dans les petites villes qui comptent plusieurs établissements. Ainsi
les nombreuses distilleries de Hasselt sont menacées d'une ruine prochaine,
pendant que quelques fraudeurs prospéreront dans les grandes villes ; ainsi
les fabriques spécialement agricoles seront détruites au profit de quelques
spéculateurs.
Ne le
perdez pas de vue, messieurs, il faut faire sortir des magasins, transporter,
vendre clandestinement 30 p. %, du produit de la fabrication ; comment
cela est-il possible, quand l'acheteur est séparé du vendeur par une distance
de dix à douze lieues ? En vain dira-t-on que les commis ont l'ordre de ne
dresser des procès-verbaux de contravention que quand les excédants sont
considérables : trois cents barils sur chaque mille ne feront pas une bagatelle
au bout de l'année.
Le gouvernement
ne peut vouloir la destruction d'une branche d'industrie agricole aussi importante
que les distilleries ; l'arrêté du 17 octobre, quelque mauvais qu'il soit,
n'en est pas moins une preuve de ses bonnes intentions. Pour maintenir
l'existence de cette industrie avec celle de l'arrêté, il faudra tolérer que le
tiers au moins des eaux-de-vie circulent sans documents, c'est-à-dire sans
billets de transport, acquits de payement ou passavants, et dès lors à quoi bon
laisser subsister une formalité inutile ou destructive, suivant le plus ou le
moins de rigueur des employés des accises ?
Parce
qu'au dire de l'administration, le crédit permanent exige des passavants ? Mais
qu'on supprime le crédit permanent, ou bien qu'on ne l'accorde que pour des
quantités mises en entrepôt particulier et sans transfert ; le fabricant ne
sera pas lésé par cette mesure, le trésor public aura de meilleures garanties
pour le payement de l'impôt.
Parce
qu'encore les distillateurs eux-mêmes reconnaissent l'efficacité des expéditions,
pour servir d'empêchement, de moyens de découverte des fabrications
clandestines ? Et comment les employés reconnaîtront-ils les produits des
distilleries clandestines de ceux des autres fabriques ? Comment
préviendront-ils l'écoulement des premiers, alors qu'ils doivent user de
ménagement pour les derniers ; alors que l'administration même est forcée de
conseiller, de protéger les transports sans documents ? Le vrai moyen d'éviter
la production clandestine, c'est d'encourager l'industriel honnête, de le
débarrasser des tracasseries continuelles des employés, de le laisser travailler
comme il l'entend.
Parce
qu'en outre on n'improvise pas un système de finances ? Mais il ne faut que
trois mots pour remédier au mal. Il n'a fallu à l'administration qu'un petit
arrêté suivi d'une petite circulaire pour (page
359) substituer à la
loi du 26 août 1822 un système inexécutable, ou plutôt pour remplacer l'unité,
l'harmonie des dispositions existantes, par une confusion inconcevable et qui
décèle l'ignorance, sinon la perfidie. Que M. le délégué du commissaire général
veuille se rappeler ce que j'ai eu l'honneur de dire sur le choix de ses
conseillers ; qu'il aille aux informations pour découvrir quels sont les
distillateurs entendus par l'administration et dont les avis ont varié d'une
manière si étrange. Elle est bien nulle, ou, je le répète, bien coupable
l'administration qui a enfanté les commentaires sur l'arrêté du 17 octobre.
L'art. 3 de l'arrêté montre d'une
manière évidente que les grands distillateurs ont remporté la victoire, si
toutefois il y a eu débats, si tous ont été entendus. Cet article, en effet,
supprime toute classification, exige de tous les fabricants des droits
proportionnels à la capacité des appareils.
Quatre mots ajoutés dans l'exception
empruntée aux art. 12 et 41 de la loi, une bouillée par jour, placent
les plus petites distilleries sur la même ligne que les grandes. Les
distillateurs dont les alambics sont d'une capacité qui n'excède pas dix
hectolitres, font quatre bouillées par jour et jouissent d'une déduction de 20
p. % conformément aux dispositions précitées ; l'arrêté les prive du
bénéfice entier, à moins qu'ils ne consentent à ne faire qu'une
seule bouillée par jour, ou, en d'autres termes, à réduire une faculté industrielle
à 25 p. % de sa valeur réelle ; à entretenir le même établissement,
les mêmes ustensiles, pour produire plus péniblement une quantité trois fois
moindre de liqueur. - L'orateur renvoie pour ce point à une pétition des
distillateurs d'Ath.
La loi, je l'ai déjà fait pressentir,
est arbitraire dans la manière dont elle établit la déduction de 20 p. % ;
cette déduction même est trop élevée. Il faut reconnaître cependant que plus
les appareils sont grands, moins il en coûte proportionnellement pour obtenir
la liqueur ; ainsi, sans se jeter de nouveau dans une classification
arbitraire, la justice distributive exigeait qu'on accordât une remise de 4 p.
% aux distillateurs faisant usage d'alambics de dix hectolitres, et
au-dessous; une de 10 p. % quand la capacité de l'alambic ne dépasse
pas cinq hectolitres, sans restreindre aucunement le nombre des bouillées.
Je n'ai pas épuisé tous les arguments
de l'administration en faveur des documents ; elle allègue en dernier lieu que
l'arrêté du 31 octobre sur les genièvres de Hollande, soumis aux mêmes droits
que les eaux-de-vie étrangères, exige le maintien des passavants.
Cette
assertion se complique par l'établissement d'une nouvelle ligne de douanes du
côté de
Si toutes
nos frontières sont indistinctement bien gardées, la libre circulation, loin
d'être préjudiciable aux distillateurs, est un de leurs vœux les plus ardents
; tous, à l'exception de ceux d'une ou de deux villes, se sont assez expliqués
sur ce point, il y a quelques mois.
Si nos
douanes vers
Ainsi,
quoi qu'il en soit des nouvelles douanes, la législation sur les distilleries
ne peut demeurer plus longtemps en vigueur, ou il faut en revenir à la loi
ancienne, sans modification aucune sur la justification des liqueurs
fabriquées, par visites, recensements, etc., non plus que sur la nécessité de
documents pour le transport ; ou il faut admettre la libre circulation et le
crédit à terme, avec l'arrêté du 17 octobre.
Pour
apprécier jusqu'à quel point la seconde proposition, préférable de beaucoup en
temps de paix, est exécutable en ce moment, je prie M. le délégué du
commissaire général de vouloir nous informer où en est l'organisation de notre
nouvelle ligne ? qui l'on a chargé de cette organisation ? si, au lieu de la
confier à un inspecteur général, on n'a pas chargé des employés subalternes
d'un travail important et qui exigeait de l'ensemble ? s'il ne serait pas
possible, au lieu de faire de nouvelles nominations, d'appeler à la frontière
une grande partie des commis de l'intérieur ? si, en joignant aux employés
devenus inutiles par la suppression de la mouture et de l'abatage, ceux qu'un
système de liberté rendrait inutiles dans les distilleries, la ligne du côté de
M. le président
– Si M. Duvivier est (page 360)
disposé à répondre, il
peut monter à la tribune. (U. B., 8 déc.)
M. Duvivier, délégué de l'administrateur général
des finances – Messieurs, la lettre que vous a communiquée M. le président vous
a fait connaître les motifs qui ont empêché M. l'administrateur général des
finances de se rendre au milieu de vous, pour y fournir les explications
demandées sur la proposition de M. de Brouckere. J'ai été chargé de le
remplacer, et ce n'est pas sans quelque appréhension de ma part. Je sens toute
la faiblesse de mes moyens, comparés à la haute intelligence du chef que je
viens suppléer. Mieux que moi il eût répondu aux questions de l'orateur que
vous venez d'entendre, mieux que moi il eût soutenu les actes de son
administration ; il s'agit, il est vrai, de divers points relatifs à mon
service, mais j'ai eu à peine le temps de rassembler quelques idées et de
réunir quelques documents indispensables, et cependant aujourd'hui même, à
l'instant, il faut être prêt à réfuter des objections dès longtemps préparées,
il faut discuter un travail fait dans le silence du cabinet, par un homme
entouré de tous les renseignements désirables, et possédant en matière de
distilleries des connaissances profondes. Toutes ces circonstances, messieurs,
me font sentir combien j'aurai besoin de votre indulgence, je dirai même de
votre bienveillance. Je réclame donc l'une et l'autre ; sans elles, il me
serait impossible de remplir la tâche qui m'est imposée.
Toutefois, avant d'entrer en matière,
je vous prie, messieurs, de vous reporter à la séance de jeudi dernier. Il y
fut question d'une note remise à M. Teuwens, d'où l'on pourrait induire contre
moi quelques préjugés défavorables. Je dois vous dire ce qui a donné lieu à la
remise de cette note et vous expliquer comment les choses se sont passées.
Il y a environ quinze jours que M.
Teuwens me fit l'honneur de venir me voir pour me parler des distilleries, de
l'arrêté du 1 7 octobre dernier, les concernant, et de la nécessité de le
révoquer, au moins en ce qui touche les distilleries de Hasselt. Il me remit,
sur ce sujet, une note officieuse. Je lui répondis que j'étais on ne peut plus
honoré de sa visite, et surtout des motifs auxquels je la devais. J'ajoutai
que, dans ma longue carrière administrative, je n'avais jamais éprouvé de
satisfaction plus vive que lorsqu'on m'avait mis à même de faire quelque chose
d'utile à mes administrés, et que, dans cette occasion surtout, je serais
heureux d'améliorer le sort des distilleries que je regarde comme une des
sources les plus précieuses de la prospérité publique. Je promis d'examiner la
note avec le plus grand soin ; je proposai en même temps à M. Teuwens de nous
revoir pour revenir sur cet objet, lui promettant de faire tout ce qui
dépendrait de moi pour arriver à une solution propre à concilier les intérêts
des distillateurs et ceux du trésor. Ma proposition fut acceptée. A quelques
jours de là, nous eûmes une seconde entrevue dans laquelle je lui rendis sa
note accompagnée de mes observations. Je le priai de les examiner, lui
réitérant le désir que j'avais de le voir souvent, et de profiter des
éclaircissements qu'un homme aussi versé que lui dans les connaissances pratiques
en matière de distillerie pouvait me donner. Depuis ce jour-la, je n'ai pas
revu M. Teuwens, et je ne dissimulerai pas que j'ai été péniblement affecté
lorsque j'ai appris que le résultat de nos communications officieuses était
passé de ses mains dans celles d'un autre membre du congrès, qui, en les
faisant connaître à l'assemblée dans la séance de jeudi dernier, leur a donné
un caractère officiel et public qu'elles n'auraient jamais dû avoir, puisqu'elles
n'avaient pour but que de proposer des objections à lever. Voilà ce qui
concerne la séance précédente, où il a été question d'une note confidentielle
entre M. Teuwens et moi.
Venant à l'objet en discussion, j'ai
l'honneur de prévenir l'assemblée que j'ai rédigé un mémoire concernant les
distilleries, qui s'étend depuis l'année 1804, époque de l'établissement des
droits réunis, jusqu'à ce jour. Je ne vous donnerai pas lecture entière de ce
rapport, ce serait beaucoup trop long et trop pénible. Il sera d'ailleurs
adressé à M. le président du congrès, et chacun de vous en pourra prendre
connaissance ; aussi me contenterai-je de vous en donner une analyse succincte.
Après avoir rapporté les points
principaux de son mémoire, M. Duvivier ajoute:
Je reviens maintenant à la note
communiquée au congrès par M. de Brouckere, et que j'ai eu tant de regret de
voir rendre publique. Dans cette note, on demande si les grandes distilleries
avaient droit à une protection. Messieurs, elles ont été l'objet de la sollicitude
de l'administration, parce que, la prospérité de ces établissements est intimement
liée à la prospérité du pays. Aussi a-t-on fait tout ce qu'il a été possible de
faire pour maintenir dans la prospérité les distilleries florissantes, et pour
améliorer la condition de celles dont la position était moins brillante.
Le prix des grains ne s'opposait-il pas à une diminution des droits
? Messieurs, le prix des grains n'est pas excessif, et la dernière récolte a
été très (page 361) abondante
en seigle ; les autres
céréales ont manqué, il est vrai, mais ce n'a pas été au point de craindre
qu'en maintenant l'action des distilleries il en résulterait une augmentation
notable dans les prix des grains. Au reste, ces prévisions sont confirmées par
ce qui se passe sous nos yeux. Depuis l'arrêté du gouvernement qui défend la
sortie des grains, les prix sont demeurés stationnaires. Mais, dit-on, vous
êtes obligé de convenir que cet arrêté était devenu indispensable, tandis qu'on
aurait pu s'en passer et laisser le commerce libre, si la distillation n'avait
pas été encouragée. On se trompe, messieurs, et ce n'est pas à cette cause
qu'il faut attribuer la nécessité où s'est trouvé le gouvernement de défendre
l'exportation des grains. L'arrêté qui la consacre était sollicité, poursuivi
par tant de monde, les gouverneurs des provinces eux-mêmes le demandaient avec
tant d'instance, qu'il n'a pas été possible de résister. Je ne citerai pour
exemple que la province de Liége, dont le gouverneur écrivait que si l'on différait
plus longtemps à défendre l'exportation, il ne répondait plus de la
tranquillité publique. Vous savez, messieurs, qu'il prit même l'initiative pour
en permettre la libre entrée, mesure qui au surplus a été confirmée par le
gouvernement. On a donc cru par cet arrêté calmer l'effervescence populaire
qui commençait à se développer; l'opération était commandée par cette seule
considération, et il s'agissait beaucoup moins de conserver ou d'acquérir plus
de matière, que de rétablir le calme moral. Déjà le chef-lieu et la province du
Hainaut avaient été le théâtre de quelques excès ; il fallait faire cesser ces
troubles ; on l'a fait, et certes il est évident pour tous, que le résultat
n'eût pas été le même si l'on se fût contenté de prohiber la distillation.
On nous fait une autre question. Les
frontières sont-elles gardées ? Nous voici arrivés à un point important de la
discussion. Il s'agit de savoir s'il faudrait gêner la circulation à
l'intérieur.
Si la chose était nécessaire, ce ne
serait que dans ce moment; dans les circonstances ordinaires, il y aurait
danger réel, nombre de distillateurs en sont convenus. Sans doute que lorsque,
à la suite des événements de septembre, quantité de distillateurs n'ont pas
voulu permettre aux employés de l'administration d'inspecter leurs établissements,
une masse énorme de genièvre a été introduite sans avoir payé aucun droit, et
une grande quantité de spiritueux a été refoulée dans l'intérieur, parce qu'on
ne pouvait exiger que les transports fussent ouverts. Mais aujourd'hui que
l'état des frontières du côté de
Quant à la ligne des douanes, on a demandé
d'après quel principe elle a été établie ? quels sont les employés qui l'ont
tracée ? comment s'y est-on pris ? Messieurs, il existait à cet égard de
précieux éléments, non pas dans le département des finances lui-même, mais dans
les mains des employés qui, en 1814, avaient été chargés d'établir la ligne du
nord. On avait d'ailleurs pour antécédent la ligne de l'empire français,
lorsque ses limites arrivaient jusqu'à
M. Charles de Brouckere – Messieurs, je suis pleinement
satisfait des explications qui viennent de nous être données relativement à la
ligne des douanes. Je ferai seulement observer qu'on n'a pas répondu à ce que
j'ai dit de la commune de Lommel. (U. B., 8 déc.)
M.
Duvivier, délégué
de l'administrateur général des finances – C'est un oubli de ma part ; puis-je
m'expliquer sur ce point ? (U.B., 8 déc.)
M. le président – Très fort. (U. B., 8 déc.)
M. Duvivier, délégué de l'administrateur général
des finances – J'avais oublié de parler de la commune de Lommel ; mais
j'affirme, et l'assemblée peut m'en croire, qu'aujourd'hui même j'ai vu le
bourgmestre de cette commune, et que, dès demain, cette affaire sera terminée.
Nos intentions sont pures, messieurs ; nous y allons bon jeu, bon argent. (On
rit.) L'erreur qui avait été commise est expliquée par les détails
historiques que l'honorable M. de Brouckere lui-même vous a donnés. Cette
commune ayant appartenu tantôt à Pierre, tantôt à Paul (on rit), on n'a
su à qui la donner. Mais, je le répète, dès demain tout sera terminé. (D. B., 8
déc.)
M. Charles de Brouckere – Je suis pleinement satisfait des
explications que vous venez d'entendre sur les douanes ; je prends cependant
la parole pour deux motifs : d'abord, pour un fait personnel ; en second lieu,
pour relever une erreur échappée à M. Duvivier. Il s'est plaint que des
documents qu'il regardait comme confidentiels soient devenus publics ; si mon
intention eût été de nuire à M. Duvivier, les explications que je lui aurais
donné l'occasion de fournir étant si satisfaisantes, j'aurais mal réussi dans
mon projet. Mais telle ne fut jamais ma pensée ni celle de M. Teuwens ; il
n'approuvait pas l'arrêté du 17 octobre, car il avait adressé à M. le
gouverneur du Limbourg un mémoire contre cet arrêté, et M. le gouverneur lui
donna la lettre d'introduction suivante, pour M. l'administrateur des finances.
(L'orateur donne lecture de cette lettre.)
Une pétition des distillateurs d'Ath,
que je viens de remettre sur le bureau, prouve que nous n'étions pas les seuls
qui blâmions cet arrêté ; un nouvel arrêté nous est annoncé, il portera peut-être
remède au mal.
Du reste, j'ai dit que l'arrêté du 17
octobre était fait dans l'intérêt des grandes distilleries, et cela ne pouvait
guère être autrement, car M. Duvivier nous a dit lui-même qu'il avait été
publié après avoir pris l'avis de cinq grands distillateurs.
L'erreur
que je voulais relever est relative à ce qui a été dit de l'arrêté défendant
l'exportation des grains, sollicité, selon le préopinant, par le gouverneur
lui-même; je puis me tromper moi-même, quant à la province de Liége ; mais si
le gouverneur réclamait avec instance, c'était plutôt pour obtenir la libre
entrée des grains que pour en empêcher la sortie. (U. B., 8 déc.)
M.
Duvivier, délégué de l'administrateur
général des finances – Messieurs, j'ai été exact dans ce que j'ai dit, et je
pourrais le prouver par la correspondance du gouverneur. Elle est aujourd'hui
au comité de l'intérieur, mais elle avait d'abord mal à propos été adressée au
comité des finances ; je l'ai vue, le gouverneur disait en propres termes: Donnez-nous
un arrêté pour empêcher l'exportation. On souscrivit à sa demande, pour
calmer les inquiétudes et prévenir les dangers dont on était menacé. Puisque
j'ai eu occasion de remonter à la tribune, je n'en descendrai pas sans avoir
émis le vœu, comme l'a déjà fait M. de Brouckere, qu'une commission mixte soit
nommée pour examiner la législation relative aux distilleries ; il faudrait
qu'elle fût composée de gens appartenant au commerce des grains, de quelques
distillateurs, qui ne laissent pas de nous mettre dedans toutes les fois qu'ils
le peuvent (hilarité générale), et des officiers supérieurs de l'administration.
(U. B., 8 déc.)
M. Van Hoobrouck de
Mooreghem – Notre honorable collègue, M. Charles de Brouckere,
venant de proposer le rapport ou une modification à l'arrêté du gouvernement
provisoire du 17 octobre dernier, relatif aux distilleries d'eaux-de-vie de
grain, qui établit pour toutes celles dites agricoles, à quelque catégorie
qu'elles appartiennent, un taux moyen de production de liqueur en remplacement
de l'article fixé par la loi du 26 août 1822, art. M, je crois remplir ici le
vœu de tous les distillateurs agricoles de
Ma
demande est motivée sur ce que la déduction de 20 p. % n'étant accordée par
l'arrêté du 17 octobre qu'aux distilleries ayant des chaudières de la
contenance de dix barils bruts, et en dessous, et n'effectuant qu'une bouillée
par jour, la plupart de ces distilleries n'ayant que des chaudières de trois
hectolitres, terme moyen, il en résulte que celles-ci ne peuvent guère obtenir de
(page 363) leurs
chaudières que le tiers de ce que produisent les plus grandes, et aussi, par
conséquent, le tiers du résidu destiné à l'engrais de leur bétail. Ainsi pour
appliquer cette observation à tel établissement, qui était destiné à nourrir
et à engraisser quarante-cinq à cinquante têtes de bétail, et qui chôme depuis
cinq ans, grâce à la législation hollandaise, cet établissement, en vertu de
l'arrêté précité du gouvernement provisoire du 17 octobre, ne pouvant
entretenir que dix têtes de bétail tandis qu'il est construit pour en contenir
cinquante, et ne pouvant ainsi fumer que dix bonniers d'une ferme qui en
contient quarante-cinq, je demande, au nom des distillateurs, spécialement des
deux Flandres, que dans la nouvelle disposition transitoire que M. Duvivier
vient de nous promettre et en attendant une loi nouvelle, qu'il soit statué
qu'entre autres dispositions toutes les chaudières de trois à quatre
hectolitres, pour être au niveau des plus grandes qui dans une seule bouillée
obtiennent des produits doubles, triples, quadruples, puissent renouveler leurs
bouillées trois fois par jour, sous la condition sans doute de payer
proportionnellement la taxe sur le pied nouvellement établi. (J. F., 8 déc..)
M. le président – Quelqu'un
demande-t-il la parole ? (U. B., 8 déc.)
M. Alexandre Rodenbach appuie
fortement les observations de M. Charles de Brouckere. Le commerce, dit-il,
doit être libre; il nous faut de la liberté en tout et pour tous. Point
d'entraves : le genièvre et toutes les boissons doivent pouvoir circuler dans
l'intérieur de
Il n'y a
pas longtemps, plus de deux cents pipes de genièvre de Hollande ont été
introduites en Flandre sans payer aucun droit ; en tolérant ainsi la fraude et
en n'exécutant point la loi, on enfonce le poignard dans le sein de cette
industrie belge, qui mérite à tous égards une protection large de la part du gouvernement.
Quant à une nouvelle loi sur les distilleries, pour en faire une bonne, il faudrait réunir au moins
une cinquantaine de distillateurs des diverses provinces de
M.
Duvivier, délégué
de l'administrateur général des finances – Nous attendons des procès-verbaux
contre les fraudeurs ; cela est indispensable pour poursuivre et pour
emprisonner. (U. B., 8 déc.)
M. Alexandre Rodenbach
– Il faut que le gouvernement fasse connaître à la frontière que la loi
sera exécutée avec rigueur et sévérité. La loi punit la fraude par la prison ;
des procès-verbaux sont dressés, il est vrai mais on ne leur donne aucune
suite, on les jette dans les cartons où on les oublie : ce n'est pas ainsi
qu'on peut arrêter la fraude. Qu'on exécute la loi, rien que la loi ; je ne
veux pas qu'on vexe les fraudeurs, mais je veux qu'on les punisse. (U. B., 8
déc.)
M. Duvivier, délégué de l'administrateur général
des finances – Mais encore faut-il pour arrêter un homme et lui mettre la main
sur le collet... (Rire général.) (U. B., 8 déc.)
M. Alexandre Rodenbach
– J'ai dit... (Plusieurs voix. Assez! assez!) (U. B., 8 déc.)
M. Duvivier, délégué de l'administrateur général
des finances – Quand des procès-verbaux nous parviendront, les fraudeurs ne
seront pas épargnés. (U. B., 8 déc.)
M. Alexandre Rodenbach
– Il faut, je le répète, exécuter la loi. L'ancien gouvernement ne le faisait
pas : jamais on ne punissait la fraude par la prison ; on laissait courir les
fraudeurs, et on se contentait d'arrêter la marchandise. (U. B., 8 déc.)
M. le président
– Quelqu'un demande-t-il
la parole ? (Silence,)
- Il est donné acte à M.
Duvivier des explications qu'il a données. (U. B., 8 déc.)
M. Duvivier se retire.
M. le président – L'ordre du jour est la discussion sur
la proposition de M. de Rouillé relative à la garde civique, et sur celle de M.
de Robaulx concernant les volontaires.
M. François a la parole. (C., 8
déc.)
M. François – Voici, messieurs, en quoi consistait la proposition de M. de
Rouillé.
« Je propose au congrès de décider,
qu'il sera nommé une commission chargée de rédiger le plus tôt possible un
projet de loi sr l'organisation de la garde civique, sans que cela puisse
entraver la discussion sur la constitution. »
Les opinions des sections ont été
partagées sur cette proposition. Trois ont été d'avis de l'adopter. Quatre se
sont prononcées, non pas pour le rejet, mais pour l'ajournement. Une autre a
pensé que ce n'était pas le moment de discuter une pareille loi, et que les
dispositions prises par le gouvernement provisoire pouvaient suffire
jusqu'après la constitution. Cette opinion est fondée sur une erreur de fait.
Ces dispositions ne forment pas effectivement un tout complet ; par exemple,
il n'y a rien de décrété sur les dispositions pénales, en sorte que les fautes
les plus graves dans la discipline pourraient être commises et rester impunies
; et aujourd'hui le gouvernement provisoire n'a plus qualité pour les décréter.
Une dernière section a aussi été
d'avis de l'ajournement jusqu'après la constitution, se fondant sur ce que le
gouvernement provisoire pourrait prendre des mesures pour assurer le service.
Le gouvernement peut-il, en effet, assurer à la garde civique une existence et
une organisation satisfaisantes ? Non, car les arrêtés rendus jusqu'à ce jour
sont insuffisants, et le gouvernement provisoire ne peut plus en faire de
nouveaux, puisqu'il n'est plus en possession du pouvoir législatif. Votre section
centrale a pensé qu'il était urgent d'assurer par une loi l'organisation de la
garde civique, qui doit être le soutien et la garantie la plus assurée de
votre liberté tant à l'intérieur qu'à l'extérieur : elle pense aussi que le
travail relatif à cette loi pourrait se faire sans entraver la constitution ;
elle vous propose en conséquence d'adopter la proposition, et de nommer dans
les sections une commission de dix membres pour la convertir en projet de loi.
(U. B., 8 déc.)
M. le président consulte l'assemblée, qui adopte les
conclusions de la commission à une immense majorité. Ainsi, les sections nommeront
chacune un membre pour former la commission chargée de présenter un projet de
loi sur la garde civique. (U. B., 8 déc.)
M. François – Voici la proposition faite par M. de Robaulx :
« Je propose au congrès de décider
que le gouvernement provisoire sera invité à lui proposer les mesures
nécessaires pour régler le sort et l'organisation des compagnies volontaires
belges. »
. Les 5e et 7e
sections n'ont point envoyé de rapport.
Les 2e, 4e et 5e
sont d'avis d'ajourner l'adoption de la proposition : la 2e', parce
qu'elle pense qu'il n'y a pas urgence pour le moment, et à cet égard, je ferai
observer que l'urgence a été déclarée par le congrès dans la dernière séance ;
la 4e, parce que l'organisation des volontaires rentrera dans
l'organisation de l'armée, et qu'il sera temps de s'en occuper lorsqu'on
s'occupera de cette dernière, avec d'autant plus de raison que, par un arrêté
du gouvernement provisoire, les officiers volontaires sont assimilés aux
officiers de l'armée ; la 5e enfin, parce qu'elle croit que le
gouvernement provisoire peut prendre, à l'égard des volontaires, toutes les
mesures qu'il jugera convenables, et qu'il est conséquemment inutile que le
congrès s'en occupe. Les 1e, 6e, 8e, 9e
et 10e sont d'avis d'adopter la proposition.
Votre section centrale a
l'honneur de vous proposer l'adoption de la mesure sollicitée. (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx
– Je demande la parole. (U. B., 8
déc.)
Plusieurs voix
– Il n'y a pas d'opposition, pourquoi
parleriez-vous? (C.. 8 déc.)
M. le président
– L'assemblée adopte
t-elle la proposition ? (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – Comme auteur de la proposition, j'ai le droit de
prendre la parole ; on y a d'ailleurs fait un amendement auquel j'adhère, et (page 365) sur lequel j'ai besoin de
donner des explications. (U. B., 8 déc.)
M. le président
– Déposez cet
amendement. (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx, après avoir déposé l'amendement sur le bureau, monte
à la tribune et s'exprime ainsi – Messieurs, j'ai cru devoir soumettre une
proposition ayant pour but de demander au gouvernement provisoire de faire
une loi pour fixer définitivement le sort des volontaires belges. La question
examinée dans les sections, les unes ont pensé qu'il n'y avait pas urgence ;
les autres, que le gouvernement provisoire pouvait prendre les mesures
nécessaires, sans nous présenter un projet de loi ; la majorité a été d'avis de
l'adoption de ma proposition ; la dixième section a même renchéri sur moi, en
proposant un amendement dont M. le rapporteur ne vous a pas parlé, et dont je
dois vous donner connaissance ; le voici : « Le gouvernement provisoire sera
également invité à prendre les mesures nécessaires pour pourvoir aux besoins
urgents des volontaires. » Remarquez, messieurs, qu'on veut charger le
pouvoir exécutif de satisfaire aux besoins des volontaires : ils sont, en
effet, dans l'état de dénuement le plus complet sur certains points : sur
d'autres, ils sont un peu mieux ; il est temps de songer à les traiter d'une
manière uniforme. L'urgence de fixer leur sort est manifeste. Partout des
plaintes s'élèvent sur la manière dont ils sont traités : jusqu'ici ces plaintes
n'ont pas été écoutées par le gouvernement provisoire ; il faut que ces
malheureux trouvent un refuge dans le congrès. Ne l'oublions pas, messieurs, ce
sont les volontaires qui ont fait la révolution, ils ont le droit d'être
écoutés. Pendant deux mois, ils ont vécu à leurs frais ou aux dépens des communes
auxquelles ils appartenaient ; ce n'est que depuis l'ouverture du congrès qu'on
leur a fourni la solde, l'habillement et les munitions de guerre. On ne pouvait
pas exiger d'eux un service plus long, réduits à leurs propres ressources. La
nation leur doit l'équipement, la solde, les provisions de bouche. Les
volontaires en grande partie sont encore en face de l'ennemi ; à l'époque
actuelle, au mois de décembre, ils sont dans des marais, dans des bruyères,
dans des lieux humides et malsains, en proie à tous les besoins, à toutes les
souffrances ; il est urgent de leur envoyer des provisions. Selon les rapports
qui m'ont été faits, ils n'ont ni souliers, ni chemises, ni blouses, ni pantalons.
Bien plus, ils manquent d'armes : oui, messieurs, ils manquent d'armes, et l'on
m'a dit que sur un point cent quatre-vingts hommes n'avaient, pour faire leur
service, que quarante fusils. Je le répète, il est urgent de leur envoyer tout
ce dont ils ont besoin. Sont-ils blessés, on les envoie à l'hôpital.
Pensez-vous qu'en sortant on leur accorde quelque secours ? Détrompez-vous,
messieurs : je tiens d'un membre de la commission des secours à accorder aux
blessés, qu'on ne leur accorde rien ; lorsque ces infortunés font des
réclamations, on les promène de bureau en bureau ; s'ils obtiennent quelque
chose, c'est à force d'importunités, le plus souvent ils ne peuvent rien
obtenir. Alors le dégoût s'empare d'eux ; ils partent réduits, pour retourner
dans leurs foyers, à prendre leur part dans le tronc de l'aumône, ce tronc que
vous voyez à la porte des hôpitaux : ils tiennent leur premier secours de la
charité publique ! Élèvent-ils des plaintes, on les menace du licenciement.
C'est afin de les affranchir de cette crainte que j'ai demandé une loi qui fixe
leur sort. Je ne veux pas qu'on puisse les licencier. Si on le pouvait, voyez
quelle serait leur triste situation. Ils ont abandonné leur état, leur famille
; ils sont aujourd'hui sous les drapeaux ; ils ont gagné des grades en
combattant vaillamment pour notre défense; renvoyez-les, la misère la plus
profonde devient leur partage : tel serait le prix de leurs glorieux services.
Il n'en sera point ainsi ; je ne veux pas qu'il puisse dépendre du gouvernement
provisoire de leur enlever leurs grades, ou de les priver d'une pension
convenable à l'emploi qu'ils occupent. C'est bien assez du dénuement et de
l'état d'incertitude où on les a laissés jusqu'à ce jour. C'est ce dénuement,
cette incertitude qui sont cause de leur retour chez eux. Quelques-uns ont
demandé pour prix de leur sang quelque place dans les finances et dans les
emplois les plus subalternes ; On les a repoussés inhumainement, tandis que, à
mérite égal, ils auraient dû obtenir la préférence. Est-ce indifférence ?
est-ce inertie de la part du gouvernement ? Que ce soit l'une ou l'autre, il
faut en finir. La révolution faite par les volontaires ne doit point leur être
étrangère dans ses résultats ; que la nation leur paye sa dette ; il est temps
d'encourager ceux qui ont combattu pour elle. L'Europe est en armes ;
M. Van Snick – Messieurs, si le tableau affreux
qu'on vient de faire de l'état des volontaires est exact, on ne peut rien
comparer à l'inertie du département de la guerre : hâtons-nous d'éclaircir de
pareils faits. Depuis longtemps on nous promet des rapports sur notre situation
; il est urgent et très urgent de les entendre; qu'on nous les fasse au plus
tôt. Je demande qu'un message soit envoyé au gouvernement provisoire pour qu'il
vienne nous donner des explications sur l'armée et sur les volontaires. (U.
B.. 8 déc.)
M. le président
– La section centrale
est d'avis d'adopter la proposition de M. de Robaulx; l'assemblée est-elle du
même avis? (U. B.. 8 déc.)
Plusieurs voix
– Et l'amendement ? Il faut mettre aux
voix l'amendement. (U. B.. 8 déc.)
M. de Robaulx
– Si l'assemblée veut le
permettre, je parlerai sur la position de la question. J'ai fait une proposition
pour que le gouvernement nous présentât une loi fixant le sort des volontaires.
La 10e section a ajouté à ma proposition un amendement tendant à
faire donner immédiatement aux volontaires les secours dont ils ont besoin ; il
faut d'abord mettre ma proposition aux voix, puis viendra l'amendement. (U. B.,
8 déc.)
M. Nagelmackers – La section centrale propose l'adoption
de la proposition ; il faut d'abord voter là-dessus. Quant à la disposition
ajoutée par la 10e section, ce n'est point un amendement, mais une
proposition nouvelle, qui n'a pas été faite suivant les formes voulues par le
règlement, que les sections n'ont pas pu examiner, et que par conséquent on ne
peut pas mettre aux voix. (U. B., 8 déc.)
M. le président – Nous allons être tous d'accord. M. de
Robaulx a fait une proposition qu'il s'agit d'adopter ou de rejeter. Votons
d'abord sur ce point ; la discussion s'ouvrira ensuite sur l'autre, et l'on
verra ce qu'il y a à faire. (U. B., 8 déc.)
Plusieurs voix
– Mais si c'est un amendement, il faut
d'abord voter sur l'amendement. (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – Voulez-vous maintenant une loi pour fixer le sort des
volontaires ? Voilà d'abord une question qu'il faut résoudre. Voulez-vous que
le gouvernement soit tenu de parer sans délai à leurs besoins ? C'est encore
une autre question sur laquelle vous devez vous prononcer. (U. B., 8 déc.)
M. Théophile Fallon – M. de Robaulx a fait une proposition ; la 10e section l'a
amendée, votons d'abord sur l'amendement. (U. B., 8 déc.)
M. Charles de Brouckere – On se trompe en disant que la proposition
de M. de Robaulx a été amendée. La disposition ajoutée par votre 10e
section n'est vas un amendement, car elle ne modifie en rien la proposition
principale ; c'est une proposition supplémentaire que je suis d'avis d'écarter
par l'ordre du jour. Vous ne pourriez l'adopter sans inconvénient : car,
demander au gouvernement qu'il vienne au secours des volontaires, c'est
décider qu'il n'a pas rempli son devoir à leur égard, c'est le condamner, et le
condamner sans l'entendre, ce qui serait souverainement injuste. Je
demanderai donc qu’avant de s'occuper d'une pareille proposition, le ministre
de la guerre soit entendu. Je voterai, en attendant, pour la proposition de M.
de Robaulx, parce qu'il n'existe pas de loi pour les volontaires, et que je crois
qu'il en faut une. (U. B., 8 déc.)
M. Devaux – Je suis entièrement de l'avis de (page 367) M. de Brouckere, et je n'ajouterai qu'un mot pour prouver
l'inopportunité de la proposition supplémentaire. On veut que nous demandions
au gouvernement provisoire qu'il vienne au secours des volontaires. Il serait
au-dessous de l'assemblée de demander quelque chose au gouvernement. En nous
réside le pouvoir ; nous pouvons donner des ordres, faire des lois ; le
gouvernement est là pour les exécuter : mais, je le répète, il serait au-dessous
de la dignité du congrès de lui rien demander. (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx
– C'est une hérésie
qu'on met en avant. Nous pouvons demander au gouvernement tout ce que nous
voudrons sans quitter le rôle qui nous convient ; dans ce cas particulier, si
nous savons qu'on n'a pas pourvu aux besoins des volontaires, nous avons le
droit de le dire et de stimuler le zèle du gouvernement; nous pouvons l'inviter
à fournir aux volontaires ce qu'il leur faut, et... (U. B., 8 déc.)
M. le comte d’Arschot – Je demande le rappel au règlement ; c'est au moins la
cinquième fois que M. de Robaulx prend la parole sur l'objet en discussion. (Hilarité
générale.) (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – Je suis l'auteur de la proposition, j'ai le droit de
réfuter les objections ; ce n'est pas avec des fins de non-recevoir, des moyens
dilatoires, que l'on peut décider des questions de la plus haute importance.
Ici on fait trop souvent usage de ces moyens. (Sensation.) (E.,
8 déc.)
M.
Liedts,
secrétaire, donne
lecture de la proposition de M. de Robaulx ; elle est adoptée presqu'à
l'unanimité. (U. B., 8 déc.)
M. le président
– Voici maintenant
l'amendement de la dixième section que M. de Robaulx a fait sien :
« Le gouvernement provisoire sera
également invité à prendre des promptes mesures pour pourvoir aux besoins urgents
des volontaires. »
L'amendement est-il appuyé ? (U.
B., et C., 8 déc.)
M. le baron de Stassart – Je demande qu'on ajoute: « pour
autant qu'il en existe. » (Oh! oh! Rumeurs.) (U. B., 8 déc.)
M. le président – Le sous-amendement est-il appuyé ? (Oui
! oui !) (U. B.,8 déc.)
M. de Robaulx
déclare qu'il l'adopte.
(J. F., 8 déc.)
M. Destouvelles – Je crois qu'il serait plus convenable
d'envoyer au gouvernement un message pour lui faire connaître les plaintes qui
s'élèvent de toutes parts touchant les volontaires, et pour qu'il nous fournît
des explications sur leur véritable situation. Un article du règlement fixe la
manière dont le message pourrait être envoyé ; je demande qu'on s'y conforme et
non pas que l'on condamne le
gouvernement sans l'avoir entendu. (Marques nombreuses d'assentiment.) (U.
B., 8 déc.)
M. le baron de Stassart – J'appuie la proposition du
préopinant. On ne peut en effet condamner le gouvernement sans l'entendre ; et
c'est pour cela que je demandais, si l'on adoptait la proposition
supplémentaire de M. de Robaulx, d'y ajouter mon sous-amendement. (U. B., 8
déc.)
M. le président – M. Destouvelles est prié de vouloir
bien rédiger sa proposition et de la remettre sur le bureau. (U. B., 8 déc.)
M. Destouvelles rédige sa proposition et il en donne
lecture ; elle est ainsi conçue:
« Le congrès national décide qu'il
enverra un message au gouvernement provisoire, à l'effet d'obtenir de lui un
rapport qui nous fasse connaître la véritable situation des volontaires. » (U.
B., 8 déc.)
M.
Van Snick – Et de l'armée. (U. B., 8 déc.)
M. le président – Nous sortirions de la proposition de
M. de Robaulx. (U. B., 8 déc.)
- La proposition de M. Destouvelles est mise aux voix et adoptée.
(P. V.)
M. le président à M. de Robaulx – Êtes-vous
satisfait ? (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – Le gouvernement saura bien ce que cela veut dire. (U.
B., 8 déc.)
M. le président – Messieurs, vous avez entendu, samedi,
le rapport de M. Devaux relatif au sénat. Ce rapport a été distribué ;
l'avez-vous reçu ? (Oui! oui!) Je dois vous demander quand et à quelle
heure vous voulez vous assembler pour la discussion. (U. B., 8 déc.)
Une
voix – La
discussion aura-t-elle lieu en séance publique ? (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – J'ai demandé que ce fût en séance publique ? (U. B., 8 déc.)
M. le président – Je vais mettre la question aux voix.
(Plusieurs voix: C'est décidé.) Ou a élevé des doutes (Non! non!) On
a élevé des doutes sur l'épreuve qui eut lieu dans le comité secret de samedi
; je ne veux pas qu'on puisse me reprocher d'avoir surpris une décision du congrès
; je serais très sensible à un pareil reproche. (U. B., 8 déc.)
Un
grand nombre de voix – On ne vous le fait pas; la question a été décidée. (U. B., 8 déc.)
M. le président – J'espère que vous me (page 368) ferez la grâce de m'entendre.
Il suffit du doute le plus léger, pour que je veuille qu'il soit levé, au moins
pour mon compte personnel. Je vais donc consulter l'assemblée (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – Je demande la parole. C'est moi qui, dans là dernière
séance, ai élevé des doutes, non pas sur la position de la question, mais sur
la légalité de la proposition qui nous était faite, tendant à nous enlever les
garanties de la publicité. Je n'ai, en aucune manière, entendu élever des
doutes sur les intentions de M. le président ; j'insiste, au surplus, pour que
la discussion ait lieu en séance publique. (U. B., 8 déc.)
M. le président
– Demain, à dix heures,
nous nous réunirons en comité secret. Je ferai observer que, d'après le
règlement, si un membre démontre que la discussion doit avoir lieu en séance publique,
le congrès pourra décider la question, et le public sera aussitôt admis dans
les tribunes. (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – Je demande que l'on décide aujourd'hui même que la
séance sera publique. (U. B., 8 déc.)
M.
Devaux – Messieurs,
on dénature ma proposition, ici et ailleurs. En proposant de discuter d'abord
en comité général, je n'ai pas entendu exclure la publicité de nos séances. Je
veux de la publicité en tout, je l'aime autant que qui que ce soit ; j'ai fait
mes preuves à cet égard. J'ai demandé que la discussion préparatoire eût lieu
en comité secret, parce qu'il y a dix systèmes différents sur la question du
sénat, sur lesquels il est nécessaire de s'entendre. Quand le jour de la publicité
sera venu, les opinions se seront fondues, elles seront arrêtées définitivement
; on saura ce qu'il faut attaquer, ce qu'il faut défendre, et la discussion
n'en sera que plus courte et plus facile. Qu'ai-je voulu, en un mot ? Une
discussion préparatoire qui ne liât personne, dans laquelle seulement il
s'agirait de fixer les difficultés et de s'entendre sur la manière de les
lever. Je ne veux pas, à proprement parler, une réunion générale ; vous pouvez
la considérer comme une invitation que vous fait la section centrale pour vous
joindre à elle ; elle a le droit de vous dire : Venez avec nous préparer les
éléments de la discussion publique, libre à chacun de se refuser à son
invitation. Le jour de la publicité arrive, je veux qu'une discussion large
puisse s'établir : la marche que je propose nous fera atteindre ce but.
L'assemblée a déjà décidé qu'elle se réunirait en comité secret ; la consulter
maintenant, serait remettre en question ce qui a été décidé. A ce propos je
ferai remarquer que l'article du règlement, cité par M. le président, ne peut
s'appliquer au cas qui nous occupe. Sans doute, lorsque M. le président, usant
du pouvoir que lui défère cet article, ordonne que le congrès se formera en
comité secret, le congrès, sur l'observation d'un de ses membres, peut décider
que la séance redeviendra publique ; mais ici la question a été décidée. Le
congrès a prononcé lui-même qu'on discuterait préparatoirement en comité
général: on ne peut revenir sur cette décision. (U. B.. 8 déc.)
M. Forgeur – Je ne m'oppose pas au comité secret,
mais une fois assemblés, nous aurons à examiner si le congrès veut consacrer
une, deux, trois séances ou plus, en comité secret, ou s'il veut discuter en séance
publique : quoi qu'on en ait dit, le congrès peut se décider pour l'une ou
l'autre de ces deux alternatives ; c'est une question de majorité ; la majorité
est toujours libre de revenir sur ses décisions : j'élève donc la voix pour
annoncer que demain je combattrai l'opinion de l'honorable M. Devaux, en
démontrant la nécessité d'une discussion en séance publique. Si nous nous
réunissons en comité secret, il est donc bien entendu que la question pourra
être discutée, et que le congrès pourra la décider comme il vaudra. (U. B.. 8 déc.)
M. le président – L'article du règlement est formel. A
demain donc, à dix heures, comité général. (U. B., 8 déc.)
M. le président
– M. Gérard Le Grelle a
déposé une proposition dont il va vous être donné lecture:
« M. le président, ayant appris que
M. Cartwright est de retour de La Haye, j'ai l'honneur de proposer au congrès
d'envoyer un message au gouvernement provisoire, pour qu'il nous fasse connaître,
dans la séance de demain, le résultat de son voyage.
« GÉRARD LE GRELLE. » (U. B., 8
déc.)
Cette proposition est
appuyée par un grand nombre de membres ; M. Le Grelle est invité à la
développer. (J. F., 8 déc.)
M. Le Grelle – Messieurs, je suis arrivé ce matin
d'Anvers ; j'ai acquis pendant mon séjour dans cette ville la triste certitude
que
M. le président – Je pense que l'assemblée ne veut pas
suivre pour cette proposition la marche tracée par le règlement ; vous savez
que lorsqu'une proposition est faite, elle doit être appuyée par cinq membres,
après quoi elle est renvoyée à l'examen des sections. (U. B., 8 déc.)
M. de Robaulx – Nous ne sommes pas liés par cet article, et il est des
cas où l'on sent qu'il faut que nous puissions passer outre ; tel est celui où
nous nous trouvons. (U. B., 8 déc.)
M. le président – L'assemblée veut-elle adopter la
proposition de M. Le Grelle ? (U. B., 8 déc.)
- Le congrès se prononce
pour l'affirmative.
M. le président
– Il sera donc envoyé un
message au gouvernement pour l'inviter à faire connaître le résultat du voyage
de M. Cartwright. La section
centrale est priée de se réunir ce soir à sept heures. (U. B., 8 déc.)
- Il est quatre heures et
demie; la séance est levée. (P. V.)