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Congrès national de
Belgique
Séance du lundi 10 janvier
1831
Sommaire
1) Communications des pièces
adressées au congrès
2) Renouvellement des sections et
du bureau du congrès (Surlet de
Chokier)
3) Projet de constitution. Des ministres
(titre III, chapitre II, section 2). Rapport de la section centrale
4) Rapport sur une pétition
d’officiers hollandais détenus à Tournay comme prisonniers de guerre (de Gerlache, Duval de Beaulieu, de Robaulx, de Leuze, A. Rodenbach, Claus, A. Gendebien, Rogier, Brédart)
5) Projet de constitution. Du chef
de l’Etat (Titre III, chapitre II, section 1). Droit de déclarer la guerre et
de signer des traités (Le Bègue, Fransman, Le Bègue, d’Arschot, Van Meenen, Beyts, Fransman, Van Meenen, Lebeau, Van Meenen), droit
de sanction et de promulgation des lois, droit de veto royal (Wannaar,
Henry, Ch. Le Hon, Wannaar)
(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles,
Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 2)
(page 69) (Présidence de M. le baron Surlet de Chokier)
La séance
est ouverte à onze heures (P. V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il
est adopté. (P. V.)
COMMUNICATION DE PIECES ADRESSEES AU CONGRES
M. Van Snick demande un congé de quelques jours,
son père étant très dangereusement malade. (U. B., 12 janv.)
- Ce congé est accordé. (P. V.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, présente l'analyse des pétitions
suivantes :
M.
Rosseeuw demande que les droits d'entrée (page
70) sur le vin puissent se payer au moyen d'un crédit permanent.
Un grand
nombre d'habitants de Pâturages, de Hornu et de Wasmes demandent la réunion à
M. du
Bois présente de nouveau des observations sur les los-renten.
Un grand
nombre d'habitants de Corroy-le-Grand demandent que leur commune soit séparée
de celle du Vieux-Sarto
M. de
Mulder se présente comme candidat à la cour des comptes.
M.
Launée fait la même demande.
M.
Diepenbeek demande la révision de toutes les créances belges ajournées ou
rejetées par l'ancien gouvernement.
MM.
MartelIi et de Wolf demandent la suppression de tout salaire pour les autorités
communales.
Des
marchands de Dixmude réclament contre les droits de marché qu'on leur fait
payer. (J. F., 12 janv. et P.
V.)
-
Toutes ces pièces sont renvoyées à la commission des pétitions. (P. V.)
CONSTITUTION DES SECTIONS ET RENOUVELLEMENT DU BUREAU
L'ordre
du jour est le tirage des sections de janvier et le renouvellement du bureau. (C., 11 janv.)
Renouvellement des sections
M. le président – Nous allons procéder au tirage des
sections. (E., 12 janv.)
M.
le baron de Sécus (père) – Messieurs, la troisième section vient
de se réunir, et. elle a cherché à nommer un de ses membres pour faire partie
de la commission chargée de l'examen du projet de loi sur les fers. Il ne s'est
trouvé parmi nous aucun membre qui eût des connaissances spéciales sur cette
matière, en sorte que personne n'a voulu se charger de représenter la troisième
section à la commission. C'est dans cette circonstance que j'ai été chargé de
prier M. le président de faire cette nomination au nom de la troisième section. (U. B., 12 janv.)
M. le président – Vous venez d'entendre que la
troisième section s'en remet à ma discrétion ; j'ai encore moins qu'elle
connaissance sur la capacité de ses membres. L'assemblée veut-elle que je nomme
ce membre ? (E., 12 janv.)
De
toutes parts – Oui, oui. (E., 12 janv.)
M. Le baron Joseph d’Hooghvorst – Il
convient que toutes les sections fassent leur choix, pour éviter un double
emploi. (E., 12 janv.)
M.
le président – Que ceux qui sont d'avis que le président nomme ce membre de la commission
veuillent bien se lever. (E., 12 janv.)
- Presque
tons les membres se lèvent. (E., 12 janv.)
M. le président – En conséquence, je nomme M. Pirmez.
(E., 12 janv.)
On
procède, par la voie du sort à la formation des sections pour le mois de
janvier ; elles sont composées comme suit :
PREMIÈRE
SECTION.
MM. Annez
de Zillebeecke, Alexandre Rodenbach, de Rouillé, Fendius, de Robaulx, Théophile
Fallon, Wyvekens, Devaux, Huysman d'Annecroix, le baron Joseph d'Hooghvorst,
de Man, Olislagers de Sipernau, l'abbé de Foere , Pirmez, Forgeur, Seron,
l'abbé Vander Linden, Lebeau, de Langhe, l'abbé Verduyn.
DEUXIÈME
SECTION.
MM. de
Schiervel, Liedts, Jean-Baptiste Gendebien, de Lehaye, le baron d'Huart, le
comte Cornet de Grez, Vergauwen-Goethals, Lesaffre, le vicomte de Bousies de
Rouveroy, Serruys, Van Innis, Frison, le baron de Terbecq, Ooms, Henri de
Brouckere, l'abbé Corten, Janssens, Hippolyte Vilain XIIII, de Behr, Leclercq.
TROISIÈME
SECTION.
MM.
Beaucarne, Le Bègue, Gelders, Geudens, Pettens, le baron de Viron, Henri
Cogels, Allard, Gendebien (père), le comte de Bergeyck, Fleussu, l'abbé
Wallaert, Destouvelles, Buylaert, Nalinne, François Lehon, Van der Looy, l'abbé
Pollin, le baron Frédéric de Sécus, Marlet.
QUATRIÈMIE
SECTION.
MM. le
comte de Baillet, Mulle, de Selys Longchamps, de Gerlache, le baron de
Stassart, Hennequin , Maclagan, Bredart. Masbourg, le comte d'Ansembourg, le
baron de Meer de Moorsel, de Roo, Roeser, le baron Beyts, de Decker, Buyse-Verscheure,
Helias d'Huddeghem, Vandorpe, de Thier, Baugniet.
CINQUIÈME
SECTION.
MM. le
chevalier de Theux de Meylandt, Thonus, Collet, David, le marquis de Rodes, le
baron de Leuze, l'abbé Andries, d'Martigny, de Tiecken de Terhove, Berger, Domis,
Dams, le baron (page 71) de Pélichy
van Huerne, Meeûs, Albert Cogels, Coppieters, le marquis Rodriguez d'Evora y
Vega, Fransman, d'Omalius, Dumont.
SIXIÈME
SECTION.
MM.
Charles Rogier, le baron Osy, Van de Weyer, de Ryckere, Goethals-Bisschoff, Henry,
Charles de Brouckere, Le Bon, le comte de Renesse, le baron Van Volden de
Lombeke, Trentesaux, Gustave de Jonghe, le comte d'Arschot, d'Hanis van
Cannart, Jacques, Delwarde, Peeters, Watlet, Jottrand, de Ville.
SEPTIÈME
SECTION.
MM. Van
Snick, Zoude (de Saint-Hubert), Nopener, le comte de Quarré, Du Bus, le comte
de Robiano, Thorn, Verwilghen, de Labeville, Speelman-Rooman, Barthélemy, de
Waha-Grisard, le marquis d'Yve de Bavay , le baron de Sécus (père) , Pirson,
Goffint, Constantin Rodenbach, Davignon, Van Hoobrouck de Mooreghem, Van der
Belen.
HUITIÈME
SECTION. (Note de bas de
page : Elle compte seulement dix-neuf membres ; le vingtième doit être M.
Roels, ou M. le vicomte Charles Vilain XIIII, les noms de ces deux honorables
députés ayant été omis, dans le tableau des sections).
MM. de
Sebille, Morel-Danheel, Camille de Smet, Claes (d'Anvers), Claus,
Werbrouck-Pieters, le baron de Coppin, Blargnies, d'Hanens-Peers, Eugène de
Smet, le comte de Celles, Nothomb, Dehemptinne, Lardinois, Surmont de Volsberghe,
Lecocq, le baron Surlet de Chokier, Raikem, de Coninck.
NEUVIÈME
SECTION (Note de bas de
page : Même observation que pour la huitième section).
MM.
Vandenhove, Deleeuw , Van Meenen, le baron de Liedel de Weil, Charles Le Hon,
de Muelenaere, Defacqz, le baron de Woelmont, Du Bois, François, Destriveaux,
l'abbé Verbeke, Jean Goethals, l'abbé Van Crombrugghe, Peemans, Le Grelle, le
comte Félix de Mérode, l'abbé Joseph de Smet, Béthune.
DIXIÈME
SECTION.
MM.
Teuwens, Thienpont, Charles Coppens, Lefebvre, le vicomte Desmanet de Biesme,
Simons, Barbanson, Cauvin, Alexandre Gendebien, le vicomte de Jonghe d'Ardoie,
le comte Duval de Beaulieu, Joos, l'abbé Boucqueau de Villeraie, de Nef,
Wannaar, l'abbé Dehaerne, le comte Werner de Mérode, le baron de Stockhem,
Blomme , Bosmans. (P. V.)
Renouvellement
du bureau du congrès national
M. le président annonce qu'on va passer au tirage au
sort des quatre bureaux chargés de dépouiller les scrutins qui vont être faits pour
la nomination du président, des deux vice-présidents et des quatre secrétaires.
Le sort
désigne pour le
Premier
bureau : MM.
Trentesaux, de Roo, Théophile Fallon, le comte de Quarré.
Deuxième bureau : MM. Berger, de Tiecken de Terhove, le
chevalier de Theux de Meylandt, Claus.
Troisième bureau : MM. le comte d'Ansembourg, Peeters,
Leclercq, Beaucarne.
Quatrième bureau : MM. le baron de Woelmont,
Dehemptinne, Wyvekens, de Rouillé. (U. no, fi jaDv 0)
M. de Gerlache,1er vice-président, remplace M. le baron Surlet de Chokier au fauteuil.
Nomination du président
On
procède au scrutin pour la nomination du président ; en voici le résultat :
Nombre
des votants : 137.
M. le
baron Surlet de Chokier a obtenu 104 suffrages.
M. de Gerlache, 29
M. Lebeau, 2
M. de Muelenaere, 1
M. le baron de Stassart
, 1
M. le
baron Surlet de Chokier, ayant réuni la majorité absolue des voix, est proclamé
président du congrès national. (P. V.)
Nomination des vice-présidents et des secrétaires
On
procède au scrutin pour la nomination des vice-présidents et des secrétaires.
Le
.dépouillement de ce scrutin donne le résultat suivant :
Nombre
des votants : 138.
1° Pour
la nomination des vice-présidents.
M. de
Gerlache a obtenu: 115 suffrages.
(page 72) M. le
baron de Stassart, 66 suffrages..
M. Charles Le Hon, 20
M. Raikem, 11
En
conséquence, MM. de Gerlache et le baron de Stassart sont proclamés
vice-présidents du congrès national. (P. V.)
2° Pour
la nomination des secrétaires.
M. le
vicomte Charles Vilain XIIII a obtenu 117 suffrages.
M. Liedts, 106
M. Henri de Brouckere, 103
M.
Nothomb, 94
M. Le
Bègue, 50
M. Frison,
8
M.
Wannaar, 5
Les autres
voix sont partagées entre un grand nombre de membres.
Les
quatre premiers sont proclamés secrétaires du congrès national. (P. V.)
M. le baron Surlet de Chokier monte au bureau et dit – Messieurs,
permettez-moi de vous exprimer ma vive et sincère reconnaissance pour le
témoignage de bienveillance et de confiance que vous venez de me donner pour la
troisième fois. Plaise à Dieu que je sois le dernier président que le congrès
national ait à nommer, et que, dans le courant de ce mois, c'est-à-dire, d'ici
au 11 février, il ait achevé ses importants travaux, et assuré nos institutions
constitutionnelles et le bonheur de la patrie ! (Vifs applaudissements.)
(U. B., 12 janv.)
PROJET
DE CONSTITUTION : DES MINISTRES (TITRE III, CHAPITRE II, SECTION 2).
RAPPORT DE
M. Raikem présente le rapport de la section
centrale sur la partie du titre III du projet de constitutions, relative aux ministres.
- L'assemblée ordonne l'impression et la
distribution de ce rapport. (P. V.)
M. François demande que les sections nomment sans
retard leurs rapporteurs pour la loi des distilleries. (C., 11 janv.)
M.
le président – Messieurs, avant de passer à la discussion qui est à l'ordre du jour, je
demanderai à l'assemblée si elle veut entendre un rapport que M. de Gerlache
est prêt à lui faire sur la pétition des officiers hollandais détenus à Tournay
comme prisonniers de guerre. (U. B., 12 janv.)
M.
Lebeau – Il a été décidé qu'une séance du soir, par semaine, serait consacrée aux
pétitions. (U. B., 12 janv.)
M. le président
– Celle-ci, par son
importance, mérite une exception. Les pétitionnaires s'y plaignent d'un déni de
justice. (U. B., 12 janv.)
M. de Robaulx – Il y a une pétition présentée par des
volontaires, détenus en prison, qui mériterait aussi une exception, aussi bien
que celle des officiers hollandais. (U. B., 12 janv.)
M. Devaux – En marchant ainsi d'exception en exception,
nous n'en finirons jamais. (U. B., 12 janv.)
M. le président
– Je vais consulter
l'assemblée ; elle fera ce qu'elle jugera convenable. (U. B., 12 janv.)
- Le congrès décide qu'il entendra le rapport.
(U. B., 12 janv.)
M. de Gerlache – Messieurs, plusieurs officiers
hollandais, détenus à Tournay, exposent que, le 26 septembre, ils ont remis à
la garde bourgeoise la citadelle de Mons, Aussitôt après, ils se sont rendus sur
la grande place de cette ville où personne ne les a inquiétés, et la régence
les a fait loger à l'hôtel de ville. Personne ne les considérait comme
prisonniers de guerre, et ils ne pouvaient l'être en effet ; car ils n'avaient
pas été pris les armes à la main. Cependant le Courrier des Pays-Bas du
1e octobre, portant un ordre du gouvernement provisoire (Note de bas de page : Cet ordre
porte la date du 29 septembre ; il est conçu en ces termes : «Comité central.
Le gouvernement provisoire ordonne à M. le commandant de la ville de Mons de
considérer comme prisonniers de guerre tous les officiers hollandais, de les
mettre sous due garde tout en les traitant avec humanité el bienveillance, de
les garder comme otages. Bruxelles, 29 septembre 1830. DE POTTER, ROGIER, VAN
DE WEYER) vint leur
apprendre qu'ils étaient prisonniers de guerre, et qu'ils seraient gardés en
otage jusqu'au moment où il n'y aurait plus de Belges au pouvoir des
Hollandais. Les pétitionnaires prétendent que depuis longtemps cette condition
s'est accomplie ; ils demandent en conséquence au congrès d'intervenir en leur
faveur, et de donner des ordres pour faire cesser leur captivité.
A cette
pétition est jointe une lettre de la régence (page 73) de Mons, d'où il résulte qu'en effet la citadelle de Mons
fut rendue sans coup férir, et que s'il ne fut fait aucune convention entre
ceux qui ouvrirent les portes et les bourgeois, ce fut à cause de l'anarchie
qui régnait en ce moment dans la ville. Il résulte encore de cette lettre que,
si l'on retint les officiers hollandais, ce ne fut que dans le but de les faire
servir d'otages jusqu'à ce que les députés qui étaient à
A cette
lettre on a joint le procès-verbal de la prise de possession de la citadelle de
Mons, qui confirme les faits avancés par la régence.
Voilà,
messieurs, en quel état se présentait la question, lorsque la pétition vous fut
soumise pour la première fois. Vous savez qu'elle fut renvoyée à M.
l'administrateur général de la guerre ; je vais vous faire connaître sa
réponse. Il faut vous dire que, sur le renvoi qui lui avait été fait de la
pétition, M. l'administrateur de la guerre a cru devoir consulter M. le
commandant militaire de la province de Luxembourg, qui était en garnison. à
Mons, le 26 septembre : c'est le rapport de ce dernier que je vais mettre sous
vos yeux (Note de bas de
page : Ce rapport est inédit ; nous le publions textuellement) ; car, du reste, M.
l'administrateur général de la guerre ne nous a pas donné son avis sur la
question.
« A
monsieur le commissaire général de la guerre.
« Arlon, le 13 décembre 1830.
« Monsieur
le commissaire général,
« J'ai
l'honneur de vous renvoyer la pièce jointe à votre dépêche du 30, n° 17, relative
aux officiers d'artillerie hollandais actuellement détenus comme prisonniers de
guerre à Tournay, et de vous transmettre en même temps les observations que
vous m'avez fait celui de me demander.
« Le
retranchement de la garnison de Mons dans l'arsenal de cette place dès le
commencement de septembre ;
« L'établissement
de barricades ou blockhaus à toutes les portes et dirigées contre les habitants
;
« La
fusillade des citoyens, dans la soirée du 28 septembre, à la porte de Nimy, où
plusieurs furent blessés ou tués ;
« L'envahissement
nocturne de la maison de ville et l'enlèvement par l'autorité militaire du
drapeau national pour y établir avec un grand appareil le quartier général au
milieu de toute la garnison campée derrière deux pièces d'artillerie, braquées
au milieu de la place, et qu'on prétendait chargées à mitraille, tandis que
plusieurs autres l'étaient sur les remparts dans la direction les rues
principales ;
« Le
désarmement qui s'ensuivit, d'après les ordres de l'autorité militaire, des
gardes urbaines et communales ;
« La menace de
garnir d'artillerie le château de Mons pour foudroyer la ville ;
« Celles plusieurs
fois répétées de déclarer la place en état de siège :
« Et
en dernier lieu l'ordre donné le 29 au matin, au moment de la débâcle des
miliciens, d'amener encore deux pièces d'artillerie sur la place, et dont les
instances d'un officier subalterne belge ont seules empêché l'exécution, bien
qu'ordonnée à deux reprises différentes par l'officier supérieur qui se
trouvait à l'arsenal, et qui en avait reçu l'injonction de la place ;
« Tous
ces faits réunis semblent prouver assez clairement que la garnison, ou plutôt
ses chefs, se regardèrent comme en état d'hostilité ouverte avec les habitants,
et qu'en dernière analyse la résolution de ce conflit devait, à moins d'une
capitulation contraire, mettre le vaincu à' la merci du vainqueur, ou en
d'autres termes en faire son prisonnier de guerre.
« En
effet, aussitôt la débandade des miliciens belges, la garde urbaine qui, comme
il est dit plus haut, avait été militairement désarmée, s'est instantanément
reconstituée ; en s'emparant des armes jetées par les miliciens ou prises sur
les Hollandais (car celles qui se trouvaient encore dans les magasins avaient
été brisées, ou démontées la veille même, par ordre supérieur et les batteries
jetées dans des puits et des latrines, d'où elles ont été retirées depuis), en
même temps elle s'est emparée des postes aux portes de la forteresse, à
l'arsenal, aux magasins et à l'hôpital militaires, et de la maison de ville, où
la plus grande partie des officiers supérieurs de l'ex-garnison s'était réunie.
La consigne fut donnée de les y retenir, aux magasins de n'en rien laisser
détourner, aux portes de n'en laisser sortir ni officier ni soldat hollandais
non plus que les commissaires que le général commandant et la régence, sous son
influence sans doute, voulaient envoyer au prince Frédéric, et qui, malgré
toutes leurs instances pour sortir des portes, furent forcés de se retirer par
la garde de la porte de Nimy, où ils s'étaient présentés vers les dix heures du
matin.
« Dans le courant de cette même journée,
tous les officiers et soldats hollandais, hors le peu qui momentanément sut se
mettre à l'abri des recherches (page 74)
actives de la garde urbaine, furent ou réunis à la maison de ville, sous la
surveillance de cette garde, et entretenus aux frais de la ville, ou déposés à
la caserne de la manutention, et nourris aux frais de l'État. Le lendemain, 30
septembre, le nouveau commandant supérieur de la forteresse et non la régence
(comme le dit la requête) reçut du gouvernement provisoire l'ordre ci-joint en
copie. Depuis lors ces messieurs, aussi bien que leurs troupes, ont continué
d'être considérés et traités comme prisonniers de guerre : les premiers,
transférés à Tournay par ordre supérieur,
y reçoivent un traitement mensuel, ce que je ne pense pas qu'on
accorde aux otages proprement dits ; les autres, les vivres de campagne, y
compris la ration de genièvre : hebdomadairement leur linge est blanchi, 80
chemises ont été distribuées à ceux qui en manquaient et à tous leur prorata de
100 florins, que le gouvernement a accordé pour leurs menus besoins.
« Je
crois devoir borner à ce simple narré des faits les observations que le
département de la guerre m'a fait l'honneur de me demander sur la pétition de
MM. les officiers d'artillerie hollandais, détenus à Tournay comme prisonniers
de guerre, laissant à sa sagesse d'en tirer les conséquences que de droit.
« Je
suis avec un respectueux dévouement,
« BUZEN.
»
Enfin, un
ordre du gouvernement provisoire, en date du 29 septembre, enjoint à M. le
commandant de Mons de considérer les pétitionnaires comme prisonniers de
guerre, de les traiter avec humanité, mais de les garder comme otages, en
exerçant sur eux une surveillance sévère.
M.
l'administrateur de la guerre s'étant abstenu de nous donner son avis, nous
nous trouvons aujourd’hui dans la même perplexité que le premier jour. En
effet, si l'on en croit le rapport de M. le commandant militaire d'Arlon, les
pétitionnaires sont prisonniers de guerre. Si au contraire on s'en rapporte à
la régence de Mons, on ne peut les considérer que comme des otages. Sous ce
dernier rapport, les officiers disent qu'aucun Belge n'étant plus détenu en
Hollande, on ne saurait les retenir plus longtemps sans injustice. Mais ce fait
est-il bien exact ? C'est ce que nous ne savons pas. Dans ces circonstances,
votre commission pense qu'il faut laisser au pouvoir exécutif le soin de
décider la question ; elle a par conséquent l'honneur de vous proposer le
renvoi de la pétition à M. l'administrateur général de la guerre, afin qu'après
avoir consulté le gouvernement provisoire, il soit statué définitivement sur le
sort des pétitionnaires. (U. B., 12 janv.)
M.
le comte Duval de Beaulieu parle en faveur des officiers détenus à Tournay. Il invoque
les termes de la proclamation du gouvernement provisoire en date du 26
septembre, où il est dit : « Que tous les Hollandais qui sont dans vos rangs en
sortent et rentrent dans leurs foyers : la nation belge est assez forte et trop
généreuse pour user de représailles. » D'après cela, dit l'orateur, les
officiers hollandais ne devaient pas s'attendre à perdre la liberté. (U. B., 12
janv.) (Note de bas de
page : Nous croyons qu'il n'est pas sans
intérêt de reproduire ici celle proclamation, l'un des premiers actes du
gouvernement provisoire qui venait seulement de se constituer ; elle fut
publiée au milieu des combats du 26 septembre, journée qui devait assurer au
peuple belge la victoire sur les troupes hollandaises :
«
PROCLAMATION.
« Braves
militaires belges !
« Depuis
trop longtemps vous êtes sacrifiés à la jalousie des Hollandais, qui, non contents
de s'emparer de tous les grades, saisissent toutes les occasions de vous
humilier, de vous maltraiter. Le régime odieux de partialité et d'injustices de
toute espèce qu'ils ont fait peser sur
« Que
tous les Hollandais qui sont dans vos rangs en sortent et rentrent dans leurs
foyers ; la nation belge est assez forte et trop généreuse pour user de
représailles.
« Braves
soldais, continuez de vous ranger sous nos drapeaux ; le nom de Belge ne sera
plus un motif d'injustice, il deviendra un titre de gloire !
« Bruxelles,
26 septembre 1830.
« Baron
Vander Linden d'Hooghvorst ; Ch. Rogier, avocat à la cour de Liége ;
Comte Félix de Mérode ; Gendebien, avocat à la cour de Bruxelles ; Sylvain
Van de Weyer, idem; Jolly, ancien officier du génie ; J.
Vanderlinden, trésorier ; Baron F. de Coppin, secrétaire ; J.
Nicolay, secrétaire, avocat à la cour de Bruxelles. » (C., 29 sept.))
M. de Robaulx s'étonne que M. l'administrateur
général de la guerre se soit abstenu de donner son avis ; il vote pour que la
pétition lui soit renvoyée, avec invitation de faire un rapport au congrès et
de donner son avis sur la question. (U. B., 12 janv.)
M.
le baron de Leuze – J'appuie l'opinion émise par M. Duval, et, en tout cas, je
pense que dans le doute nous devons être généreux. (U. B., 12 janv.)
M. Alexandre Rodenbach
– Généreux ! pour des hommes qui ont répandu le sang de nos frères ? Non. Je
les considère comme prisonniers de guerre ; le sang a coulé à Mons !.... (U.
B., 12 janv.)
M. le baron de Leuze
– Nous devons être
généreux avec tout le monde. (U. B., 12 janv.)
M. Alexandre Rodenbach – Non pas avec
les assassins ! (U. B., 12 janv.)
M.
Claus – Messieurs,
je suis membre de la régence de Mons, et je puis affirmer que jamais les
officiers ne se sont trouvés en opposition avec le peuple. Dans les premiers
moments, toute la troupe faisait cause commune, et les Belges comme les
Hollandais se sont précautionnés contre les attaques des bourgeois ; mais, dès
que la scission a été opérée entre les Belges et les Hollandais, il n'y a eu
aucun acte d'hostilité de la part de ces derniers.
Quant à ce que vient de dire M. Alexandre Rodenbach, que le
sang avait coulé à Mons, voici ce qui s'est passé : Les habitants se sont
portés à la porte de Nimy pour désarmer les militaires ; les bourgeois ont tiré
les premiers, et naturellement la troupe a riposté ; mais je puis dire, et tout
le monde à Mons peut attester ce fait, qu'il n'y avait dans ce moment qu'un
seul officier hollandais sur le lieu du combat. Je fais valoir ces faits dans
l'intérêt de la vérité ; je n'en ai pas d'autre à la question, et j'appuie
l'opinion de M. Duval de Beaulieu. (U. B., 12 janv.)
M. Alexandre Rodenbach
– L'honorable préopinant a dit que les bourgeois avaient tiré les premiers et
que les troupes avaient riposté. Il y a donc eu guerre, et tout ce qui était
pris de part ou d'autre était prisonnier de guerre. Le rapport du commandant du
duché de Luxembourg, militaire recommandable, a dit que le sang a coulé ; il
doit le savoir, puisqu'il y était, et qu'il l'affirme. (U. B., 12 janv.)
M. Claus – Je ne crois pas qu'il y eût un seul
soldat hollandais à Mons ; il n'y avait que des miliciens de la province. (U.
B., 12 janv.)
M. Alexandre Gendebien,
membre du gouvernement provisoire – Lorsque les pétitionnaires ont été
faits prisonniers, l'état de guerre entre
Il reste
la proclamation du 26 septembre, faite par le gouvernement provisoire, dans
laquelle on voit une phrase portant injonction aux Hollandais de quitter les
rangs de l'armée. Or, les pétitionnaires ont-ils abandonné les drapeaux d'eux-mêmes
? Non. Et si les soldats belges ne s'étaient pas séparés d'eux, n'en doutez
pas, la ville de Mons aurait été mise à feu et à sang. Ainsi, messieurs, je le
dis sans vouloir préjuger la décision qui pourra intervenir sur le renvoi
proposé par la commission, il y aurait lieu de considérer d'ores et déjà les
pétitionnaires comme prisonniers de guerre.
Si
M. De Lehaye
– Les hostilités n'ont
pas même cessé ; samedi dernier, les Hollandais sont venus attaquer nos postes
en Flandre. (J. F., 12 janv.)
M. le baron de Leuze
– Il ne faut pas voir si
les Hollandais ont été barbares, mais si les prisonniers l'ont été. (J.
B., 12 janv.)
M. de Gerlache – Il me semble que nous n'avons rien de
mieux à faire que d'adopter les conclusions de la commission. (C., 11 janv.)
M. Alexandre Rodenbach – Les
pétitionnaires se sont battus, ils sont prisonniers de guerre, c'est un fait
matériel. (U. B., 12 janv.)
M. Alexandre Gendebien
– Mes voisins m'assurent
que dans quelques villages aux environs de Maestricht, des paysans, pris par
les Hollandais, ont été massacrés sous prétexte qu'ils avaient servi comme
volontaires six semaines auparavant. (U. B., 12 janv.)
M. Alexandre Rodenbach – Je demande que
le congrès décide d'ores et déjà s'ils sont ou non prisonniers de guerre. (U.
B., 12 janv.)
M.
Charles Rogier – Je demanderai à dire un seul mot en réponse à M. Claus. Je ne
sais pas s'il y avait des Hollandais à la porte de Nimy, mais je sais qu'en
arrivant à Mons, je vis des soldats hollandais blessés. Maintenant
permettez-moi de vous faire remarquer que le congrès perd un temps précieux à discuter
une question sur laquelle il pourrait s'en rapporter au pouvoir exécutif. (Appuyé
/ appuyé/) (U. B., 12 janv.)
M. Brédart fait valoir quelques
nouveaux faits pour prouver qu'il y avait guerre quand on a pris les officiers
de Mons. (C., 12 janv.)
- Les
conclusions de la commission des pétitions sont mises aux voix et adoptées. (P.
V.)
DISCUSSION DES ARTICLES DU PROJET DE CONSTITUTION. DU CHEF DE L’ETAT
(TITRE III, CHAPITRE II, SECTION I)
L'ordre
du jour est la suite de la discussion de la sect. 1e, chap. II, titre III du
projet de constitution : Du chef de l'État. (U. B., 12 janv.)
Article 44
« Art. 44.
Le chef de l'État commande l'armée, déclare la guerre, fait les traités de
paix, d'alliance et de commerce. Il en donne connaissance aux chambres,
aussitôt que l'intérêt et la sûreté de l'État le permettent, en y joignant les
communications convenables. Les traités de commerce ne peuvent avoir d'effet
qu'après avoir reçu l'assentiment des chambres.
« Néanmoins,
nulle cession, nul échange, nulle adjonction de territoire ne peut avoir lieu
qu'en vertu d'une loi.
« Dans tous les cas, les articles secrets d'un traité ne
peuvent être destructifs des articles patents. » (A. C.)
M. Le Bègue propose l'amendement ci-après :
« Le chef de l'État commande l'armée, déclare la guerre, fait des traités
de paix, d'alliance et de commerce, avec l'assentiment des deux
chambres. »
M.
Fransman présente
l'amendement suivant :
« Le
chef de l'État commande l'armée.
« Le
droit de déclarer la guerre, de faire la paix, les traités d'alliance et de
commerce, appartient au pouvoir législatif.
« Le soin de veiller à la sûreté extérieure de l'État,
de maintenir ses droits, d'entretenir les relations politiques au dehors, de
conduire les négociations, en choisir les agents et faire les préparatifs de
guerre, appartient au chef de l'État. » (A.)
M.
Le Bègue renonce
à son amendement pour se rallier à celui de M. Fransman qui a le même but. (P.
V.)
- L'amendement de M.
Fransman est appuyé. (C., 12 janv.)
M.
Fransman le
développe dans un long discours, qui excité fréquemment l'impatience et les
murmures de l'assemblée. Plusieurs fois M. le président agite la sonnette ou
réclame le silence, sans pouvoir l'obtenir ; ce qui n'empêche pas l'orateur de
poursuivre. Vers la fin de son discours l'honorable député ayant dit : « Je me
permettrai encore une observation.»- Non ! non ! se sont écriés trente ou
quarante membres de l'assemblée. L'orateur termine néanmoins son discours, en
ramasse ensuite les feuillets épars, et descend de la tribune. (U. B., 12
janv.)
M. Le Bègue –
Messieurs, la constitution
qui nous occupe garantira si bien les intérêts matériels qu'il sera impossible
au chef de l'État de porter atteinte aux moindres propriétés du moindre
citoyen. Mais lorsqu'il s'agit de la plus précieuse des propriétés, celle de la
vie, la loi offrira-t-elle moins de garantie contre la volonté arbitraire de ce
même chef ? La proposition de lui enlever la prérogative de déclarer la guerre
est une innovation constitutionnelle, dont il nous serait glorieux de donner
l'exemple. On sait que les guerres ne sont le plus souvent que des querelles
excitée par les passions subalternes d'ambitieux ministres.
(page 77) L'orateur s'en réfère à la
sagesse de la chambre pour le sort de l'amendement. (J. F., 12 janv.)
De
toutes parts – Aux voix ! aux voix ! (U. B., 12 janv.)
M. le comte d’Arschot rappelle que le vote sur l'armée est
annuel et que, par conséquent, le roi ne dispose pas plus de nos vies que de
nos écus. (C., 11 janv.)
M. le président – Messieurs, vous avez entendu les
développements de l'amendement de M. Fransman. (U. B., 12 janv.)
Plusieurs
voix – Nous
ne l'avons pas entendu. (U. B., 12 janv.)
M. le président – Ce n'est pas ma faute. (Hilarité
générale et prolongée.) (U. B., 12 janv.)
- On
met aux voix l'amendement de M. Fransman. (U. B., 12 janv.)
Cet amendement est
rejeté. (P. V.)
M.
Fransman et M. Le Bègue seuls se sont levés pour le soutenir. (U. B., 12 janv.)
M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire
– Voici un amendement de
M. Van Meenen : Au lieu de dire : «. Le chef de l'État commande
l'armée, » l'amendement porte : « commande les forces de terre et de mer ». (U. B., 12 janv. et A.)
- Cet amendement est adopté sans discussion.
(P. V.)
M. Van Meenen
propose ensuite de
remplacer la troisième phrase du premier alinéa de l'art. 44, par celle
ci-après : « Les traités de commerce et ceux qui pourraient grever l'État,
ou lier individuellement des Belges, n'ont d'effet qu'après avoir reçu
l'assentiment des chambres. »
Il
pense que la nation doit être entendue chaque fois qu'il s'agit de son intérêt,
soit commercial, soit autre, et de l'intérêt de quelques citoyens. (C., 11
janv. et A.)
M.
le baron Beyts demande qu'on ajoute à l'article les concordats avec Rome, qui doivent
aussi être conclus de l'assentiment de .la nation. (C., 11 janv.)
M.
Fransman soutient
que ce n'est pas le lieu de parler des concordats, parce que l'art. 12 de la
constitution devant régler s'il sera permis à l'État d'intervenir dans les
affaires du culte, c'est une question de savoir s'il pourra concourir à un
concordat. (U. B., 12 janv.)
M. le baron Beyts
repousse cette
objection, en disant que l'art. 12 n'est destiné qu'à régler les affaires
intérieures du culte, tandis qu'un concordat appartient aux relations
extérieures de l'État. (U. B., 12 janv.)
M. Van Meenen – Ou un concordat grèvera nos intérêts
matériels, ou il ne les grèvera pas. Dans le premier cas, dans le mot traités
de mon amendement se trouvent compris les concordats.. Dans le second cas,
le sous-amendement de M. Beyts est inutile. (U. B., 12 janv.)
M. Alexandre Rodenbach – En
- Le
sous-amendement de M. le baron Beyts est mis aux voix. M. le baron Beyts seul
se lève pour le soutenir. (On rit.) (U. B., 12 janv.)
On
met aux voix l'amendement de M. Van Meenen. (U. B., 12 janv.)
M. Le Grelle – Je demande la division. (U. B., 12
janv.)
M. Destouvelles propose d'ajourner le vote sur
l'amendement qui mérite d'être réfléchi. (Non 1 non 1) (U. B., 12 janv.)
M. Jottrand combat la division demandée par M. Le
Grelle. (U. B., 12 janv.)
M. Le Grelle – Je trouve que les mots : lier
individuellement les Belges, sont trop vagues. (U. B., 12 janv.)
M.
Lebeau – Les mots : grever l'État, sont tout aussi vagues, et l'entier
amendement de M. Van Meenen est une véritable superfétation. Je vote contre.
(U. B., 12 janv.)
M.
le baron Beyts – Je propose au lieu de : grever l'État, de dire : ne pourra
reconnaître des dettes à charge de l'État. (U,
B., 12 janv.)
M. Lebeau – C'est inutile, parce que les chambres
votent le budget, et que par conséquent on ne peut grever l'État sans leur assentiment
; et quand le roi reconnaîtrait une dette de vingt millions, il ne pourrait en
grever l'État, parce qu'on lui refuserait les subsides ; il n'y aurait pas même
lieu à la responsabilité ministérielle, car on ne poursuivrait pas dans ce cas
un ministre comme coupable de concussion, mais comme fou. (U. B., 12 janv.)
M. le baron Beyts
répond que le roi
peut transiger et obliger l'État. (Aux voix ! aux voix !) (U.
B., 12 janv.)
- On
met aux voix la division proposée par M. Le Grelle ; elle est rejetée. (U. B.,
12 janv.)
L'amendement
de M. Van Meenen est mis aux voix : la
première épreuve est douteuse ; il est adopté à la contre-épreuve. (P. V.)
M.
Van Meenen propose un troisième amendement qui consiste à placer entre les 2e et 3e
alinéa de l'article une disposition ainsi conçue :
« Nulle force étrangère ne peut être admise
au service de l'État, en occuper ou en traverser le (page 78) territoire, qu'en vertu d'une loi expresse. » (A.)
M. Raikem, rapporteur, fait observer que cet amendement se
rapporte au titre V de la constitution : De la force armée, (U. B., 12
janv.)
- La
discussion de cet amendement est ajournée (U. B., 12 janv.)
M. Devaux fait sur l'article des observations
de rédaction qui sont adoptées. (C., 11 janv.)
- L'article
44 amendé est mis aux voix et adopté en ces termes :
« Le
chef de l'État commande les forces de terre et de mer, déclare la guerre, fait
les traités de paix, d'alliance et de commerce ; il en donne connaissance aux
chambres aussitôt que l'intérêt et la sûreté de l'État le permettent, en y
joignant les communications convenables.
« Les
traités de commerce et ceux qui pourraient grever l'État ou lier
individuellement des Belges, n'ont d'effet qu'après avoir reçu l'assentiment
des chambres.
« Nulle
cession, nul échange, nulle adjonction de territoire ne peut avoir lieu qu'en
vertu d'une loi.
« Dans
aucun cas les articles secrets d'un traité ne peuvent être destructifs des
articles patents. » (P. V.)
« Art.
45. Le chef de l'État sanctionne et promulgue les lois. » (A. C.)
M. Wannaar propose un paragraphe additionnel ainsi
conçu :
« Le
refus de sanction du chef de l'État n'est que suspensif : lorsque les deux
législatures qui suivent celle qui aurait adopté la loi, ont successivement
représenté la même loi, le chef de l'État est censé avoir donné la sanction.
-
L'honorable membre développe son amendement au milieu des conversations
particulières et des murmures d'impatience de l'assemblée. (U. B., 12 janv., et
A.)
M. Henry propose l'amendement
suivant : « Le chef de l'État sanctionne et promulgue la loi, ou y appose
son veto, Ce veto est suspensif. II cesse, et la sanction est
obligée, si la même loi est reproduite et adoptée à la législature subséquente
par la majorité des trois quarts. » (A.)
M. le président donne la parole à M. Henry pour
développer son amendement. (E., 12 janv.)
M. Henry – Messieurs, l'amendement que j’ai
l'honneur de vous proposer n'est que la reproduction de l'art. 40 du projet de constitution
de MM. Forgeur, Barbanson, Fleussu et Liedts. Cette disposition m'a paru sage
et digne de figurer dans notre constitution. Pour se faire, messieurs, une
juste idée de la nature et de l'étendue de la sanction des lois, il faut
s'attacher particulièrement à considérer le but qu'on se propose d'atteindre
par cette prérogative accordée au pouvoir exécutif. Car il ne suffit pas de
poser des principes, il faut savoir pourquoi on les pose, et il faut examiner
si des causes d'intérêt général n'exigent pas qu'ils subissent des
modifications.
C'est une
vérité reconnue que les masses ont, en général, une aptitude remarquable à
saisir et à discuter une pensée déjà posée, à discerner ce qu'il y a de vrai ou
de faux dans son énoncé, a saisir d'une manière claire l'ensemble de ses
parties, et à en apprécier l'esprit et la lettre d'un coup d'œil sûr et
infaillible. Mais, lorsqu'il s'agit de concevoir et de disposer cette pensée
dans tous ses rapports de justice, de convenance et d'utilité générale, elles
sont peu capables de remplir cet objet avec la certitude et la perfection
requises. Un homme, au contraire, placé au centre de l'administration, habitué
à suivre la marche des affaires, et possédant une quantité de faits
d'expérience qui s'enchaînent et s'éclairent les uns par les autres, peut
quelquefois se tromper sur la justesse d'une pensée, quant à son essence, mais
bien rarement quant à ses rapports généraux et a son application. La vérité ou
la fausseté du fond d'une pensée législative ne peuvent guère échapper à une
masse ; mais les rapports d'ensemble et d'application lui échappent souvent,
parce que chacun des membres voit la chose dans un cercle plus resserré. C'est
sous ce point de vue, ce me semble, messieurs, que la sanction des lois a été
accordée au pouvoir exécutif ; c'est parce qu'étant plus à même que le pouvoir
législatif de saisir les rapports d'une loi dans son ensemble et dans la
possibilité de son application, il peut quelquefois, par un veto salutaire,
arrêter les funestes effets des lois qui, abstraction faite de leur
application, pourraient paraître ne présenter aucun fâcheux résultat.
Le motif
de la sanction royale une fois défini, il s'agit maintenant d'en apprécier
l'étendue. Cette sanction sera-t-elle illimitée, ou, en d'autres termes, le veto
sera-t-il absolu ? Ayant fait connaître le motif de la sanction, il me
semble que j'ai, par là même, fait à peu près connaître aussi quelle devait en
être l'étendue. Puisque la sanction n'est accordée, suivant moi, au pouvoir
exécutif que parce qu'il est plus à même que le pouvoir législatif de juger des
effets d'une loi (page 79) dans son
application, et de voir jusqu'à quel point cette application peut être
avantageuse ou nuisible, il me semble que le veto ne peut être absolu ;
car, partant de ce principe, que fait le pouvoir exécutif en apposant son veto
? Il déclare que la loi dont on réclame la sanction lui est parvenue, et
qu'il a des observations à présenter au corps législatif, pour lui faire
envisager que la loi dont on demande la sanction est entachée de tel ou tel
vice, présente tel ou tel inconvénient, et que, conséquemment, il ne peut
accorder cette sanction. C'est un appel qu'il fait à la nation souveraine, par
lequel il l'engage à prendre en considération les circonstances qui lui sont
échappées lors de la confection de la loi ; mais si, ensuite de cet appel, le
corps législatif persiste néanmoins dans sa première résolution, s'il juge et
s'il décide à une grande majorité qu'elle est favorable et conforme aux
intérêts du pays, alors on doit présumer que ce corps a mûrement examiné et
pesé les motifs pour lesquels le chef de l'État croit la loi inadmissible, et
qu'il est conséquemment de l'intérêt général que cette loi reçoive son exécution.
Il serait
injuste alors que la sanction pût être de nouveau refusée, puisque la nation
aurait parlé par ses représentants et déclaré de la manière la plus solennelle,
en persistant dans sa première détermination, que la loi était dans ses
intérêts.
Le veto
ne doit donc être que suspensif. S'il en était autrement et que le veto pût
être absolu, les assemblées législatives dégénéreraient et se transformeraient
en assemblées consultatives, et le chef de l'État serait seul législateur. La
nation se trouverait à la merci de son caprice et de son despotisme, puisqu'il
pourrait, par le seul effet d'une volonté dont il ne serait pas même tenu de
donner les raisons, paralyser la puissance législative et détruire sa volonté
pour y substituer la sienne. Le pouvoir législatif serait attaqué dans son
essence, puisqu'il y aurait concentration du pouvoir exécutif et du pouvoir
législatif, et que la confusion de ccs deux pouvoirs amène inévitablement le
despotisme.
Mais,
dit-on, et c'est dans le rapport de la section centrale que je puise cette
objection, si le veto n'était que suspensif, il ne serait pas vrai de
dire que le chef de l'État participerait dans tous les cas au pouvoir
législatif. Les chambres exerceraient seules cette autorité, lorsque le terme
du veto serait expiré.
Cette
objection me touche peu, car, en supposant même qu'après l'expiration du terme
du veto, toute participation au pouvoir législatif fût retirée au chef
de l'Etat, quel inconvénient cela pourrait-il présenter ? Je n'en vois aucun.
Le vide de l'objection me paraît d'autant plus grand, qu'elle repose sur une
base qui me paraît tout à fait fausse. Elle repose sur l'idée que la
prérogative de la sanction se rattache à la part que prendrait le chef de
l'État dans le pouvoir législatif. Mais c'est là, si je ne me trompe, une
erreur très grave. La prérogative de la sanction ou du rejet de la loi,
accordée au pouvoir exécutif, est plutôt un acte d'administration qu'un acte du
pouvoir législatif.
Ce n'est
pas comme participant à ce pouvoir que le chef de l'État donne ou refuse sa
sanction, c'est plutôt comme administrateur. J'en puise la preuve dans la
pratique même des gouvernements constitutionnels.
Dans tous
les gouvernements de cette nature, ne voyons-nous pas que le pouvoir exécutif a
le droit de sanctionner ou de rejeter une loi, tandis qu'il n'a pas le droit de
la modifier ? Cependant, si ce droit lui est refusé, ce ne peut être que parce
que le droit de sanctionner ou de rejeter ne dérive pas du pouvoir législatif ;
car il serait assez étonnant, pour ne pas dire bizarre, qu'on pût rejeter une
loi purement et simplement, et qu'on ne pût la modifier dans aucune de ses
parties. Je ne vois pas quel motif il peut y avoir d'ôter au pouvoir exécutif
le droit de modifier une loi adoptée par les deux chambres, du moment que c'est
comme législateur que vous lui donnez le pouvoir de la rejeter. Celui qui peut
le plus doit pouvoir le moins. Mais cette bizarrerie disparaît lorsque l'on
considère la sanction comme acte d'administration, parce qu'alors le pouvoir exécutif
n'exerçant pas la prérogative de la sanction comme émanation du pouvoir
législatif, il devient tout naturel qu'il ne puisse modifier la loi, puisqu'il
ne participe pas dans ce cas à la législation. (U. B., fi j_uv.)
M. le président – Voici un second amendement de M.
Wannaar, au cas que son premier ne passe pas. (Hilarité générale.) M.
Lebeau avait demandé la parole. (U. B., 12 janv.)
M. Lebeau – J'y renonce. (U. B., 12 janv.)
M. Charles Le Hon
et M. Van Meenen demandent la parole.(U. B., 12
janv.)
M. Lebeau – J'avais renoncé à la parole pour abréger
et en finir sur cette question ; mais si on ne veut pas voter immédiatement sur
les amendements et qu'on accorde la parole à quelqu'un, je conserve mon tour.
(U. B., 12 janv.)
M.
Charles Le Hon – Je ne tiens pas à prendre la parole sur une question que je
n'aborderais pas sans embarras, depuis que le premier génie de la tribune des
temps modernes a jeté sur cette question les vives lumières de son éloquence. (Aux
voix ! aux voix !) (U. B., 12 janv.)
M. le président – Voici le deuxième amendement de M.
Wannaar:
« Il
aura un délai de vingt jours pour user de cette prérogative, passé lequel
temps, s'il ne s'est pas prononcé, son silence sera regardé comme une sanction
réelle. «
Cet amendement
est-il appuyé? (Personne ne se lève.) Il n'est pas appuyé, ainsi nix.
(Hilarité générale.) (U. B., 12 janv. et A.)
- Le
premier amendement de M. Wannaar et celui de M. Henry sont successivement mis
aux voix leurs auteurs seuls se lèvent pour les soutenir (Rire général.)
Ils sont
rejetés. (U. B., 12 janv. et P. V.)
L'article
40 est adopté tel qu'il est. (P. V.)
Il est
quatre heures et demie; la séance est levée. (P. V.)