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Congrès national de
Belgique
Séance du mercredi 12
janvier 1831
Sommaire
1) Constitution des bureaux de
sections
2) Communications des pièces
adressées au congrès
3) Projet de constitution. Titre
II. Des Belges et de leurs droits. Rapport de la section centrale sur les articles
additionnels relatifs au droit de résistance aux actes illégaux des
fonctionnaires et à l’abolition de la mort civile
4) Motion d’ordre (Van Meenen)
5) Proposition visant à
procéder sans délai dans les sections à l’examen du choix du chef de l’Etat
(proposition Constantin Rodenbach) (de Robaulx, A. Gendebien, F. de Mérode, Duval de Beaulieu, de Theux, Destriveaux, de Gerlache, Lecocq, H. de Brouckere, de Foere, de Pélichy van Huerne, Van Meenen, de Tiecken de Terhove,
Claes (d’Anvers), de Stassart, Maclagan
(orangisme), David, Raikem, Pirson, J. d’Hooghvorst, A. Rodenbach, Dehaerne, Helias d’Huddeghem, Rogier, Meeûs, Devaux)
(E. HUYTTENS, Discussions du
Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 2)
(page 102) (Présidence de M. le baron Surlet de Chokier)
La séance est
ouverte à une heure. (P.V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il
est adopté. (P. V.)
CONSTITUTION DES BUREAUX DE SECTIONS
Un
des secrétaires fait
connaître la formation des bureaux des sections pour le mois de janvier ; ils
sont composés ainsi qu'il suit :
Première
section : M. de
Langhe, président ; M. Théophile Fallon, vice-président ; M. Devaux,
secrétaire.
Deuxième
section : M.
Serruys, président ; M. de Behr, vice-président ; M. Henri de Brouckere,
secrétaire.
Troisième
section : M. Destouvelles,
président ; M. Fleussu, vice-président ; M. Le Bègue, secrétaire.
Quatrième
section : M. de
Gerlache, président ; M. le baron de Stassart, vice-président ; M. de Roo,
secrétaire.
Cinquième
section : M. le
chevalier de Theux de Meylandt, président ; M. Dumont, vice-président ; M.
Berger, secrétaire.
Sixième
section : M.
Trentesaux, président ; M. le comte d'Arschot, vice-président ; M. Jottrand,
secrétaire.
Septième
section : M. le
baron de Sécus (père), président ; M. le comte de Quarré, vice-président ; M.
Du Bus, secrétaire.
Huitième
section : M. Raikem,
président ; M. Claus, vice-président ; M. Claes (d'Anvers), secrétaire.
Neuvième
section : M. Charles
Le Hon, président ; M. Destriveaux, vice-président ; M. François, secrétaire.
Dixième
section : M.
Lefebvre, président ; M. le comte Duval de Beaulieu, vice-président ; M.
Wannaar, secrétaire. (P. V.)
Les
membres de la commission des pétitions pour le mois de janvier sont : MM.
Lebeau, Leclercq, François, Lehon, le baron de Pélichy van Huerne, d'Hanis van
Cannart, de Labeville, Claes (d'Anvers), Destriveaux et Blomme. (P. V.)
COMMUNICATION
DE PIECES ADRESSEES AU CONGRES
M. Liedts, secrétaire, présente l'analyse des pièces
suivantes :
La veuve
Dieudonné réclame la restitution des droits payés sur le vin indigène, avant la
date de l'arrêté du gouvernement provisoire.
Le
chevalier Le Lièvre de Staumont demande que le
congrès élise un prince indigène.
Quarante-huit
habitants de Charleroy demandent que
Vingt-deux
habitants de la commune de Famiolle, canton de
Philippeville, émettent le vœu que le congrès se décide pour Louis-Philippe
1er, roi des Français, qui régirait
Même demande de la part de cent vingt-quatre
habitants de Jemmapes, province de Hainaut.
Même demande de la part de cent à cent vingt habitants
de Charleroy.
Même demande de la part de soixante-cinq
habitants de Couillet, province de Hainaut.
Même demande faite par l'administration
communale d'Erpion, province de Hainaut.
M. Courtin présente
le souverain pontife comme roi des Belges.
Dix
habitants de Staden, district de Roulers,
demandent que l'arrêté du 8 octobre dernier soit (page 103) révoqué et que la nomination des régences du plat pays
appartienne au chef de l'État ou bien au gouvernement provincial.
M. le
baron de Saint-Genois Desmottes
demande un emploi d'un traitement de 1200 à 1500 florins, en considération de
ses services.
M. Lion-Coupienne, de Dinant, supplie le congrès d'aviser aux
moyens d'assurer la libre circulation des grains et farines.
MM.
Léonard Van Damme et I. de Clerck, arrêtés à Bruges,
au mois d'octobre dernier, demandent leur mise en liberté.
M.
d'Omalius présente des observations sur le choix du chef de l'État.
M. Fauquil, commandant de la garde urbaine de Soignies,
réclame des armes pour les gardes. (Jo F., H janvo,
et P. v.)
- Ces
pièces sont renvoyées à la commission des pétitions. (P. V.)
M. Jobart fait hommage à l'assemblée de
- Dépôt à la bibliothèque. (P. V.)
PROJET DE CONSTITUTION. TITRE II. DES BELGES ET DE LEURS DROITS.
RAPPORT DE
M. Fleussu fait le rapport de la section
centrale sur les propositions de MM. Thorn et de Robaulx, relatives au droit de
résistance aux actes illégaux des fonctionnaires, et sur celle de M. le baron
Beyts, relative à l'abolition de la mort civile.
- Ce
rapport sera imprimé et distribué. (P. V.)
M. Van Meenen
demande la parole pour
faire une motion d’ordre ; il rappelle qu'il a proposé vendredi un projet de
décret qui a paru urgent à l'assemblée ; nous voici à mercredi, et je n'en
entends pas parler. Je prie M. le président d'interpeller les membres de la
commission pour savoir quand le rapport pourra être fait. (E., 14 janv.)
M. Destriveaux – La commission s'est occupée de
l'examen de ce projet ; elle a posé les bases de son travail ; mais elle n'a
point eu le temps de le terminer. J'ai dû assister aux assemblées de trois
commissions par jour. (V. P., 14 janv.)
M.
le président – Le rapport sur la proposition de M. Van Meenen sera fait après-demain.
(V. P., 14 janv.)
PROPOSITION
VISANT A PROCEDER SANS DELAI DANS LES SECTIONS A L’EXAMEN DU CHOIX DU CHEF DE
L’ETAT (PROPOSITION CONSTANTIN RODENBACH)
M.
le président – L'ordre du jour appelle la suite de la discussion des conclusions de la
section centrale sur la proposition de M. Constantin Rodenbach relative au
choix du choix de l'État. La parole est à M. de Robaulx. (C., 13 janv.)
M.
de Robaulx – Messieurs, lorsqu'une nation, maîtresse de son sort, a confié à des
représentants le soin de lui indiquer un chef digne d'elle, toutes les
délibérations de l'assemblée qui tendent même à préparer ce grand œuvre, ont
quelque chose de grave et de solennel qui nécessite de chacun l'apport de son
tribut de lumières ; la question que nous traitons est de ce nombre.
Depuis
longtemps le congrès est occupé de l'examen d'un pacte fondamental qui doit
assurer à
Cependant
on a généralement senti que le choix du chef devait donner lieu à beaucoup de
soins, à beaucoup de recherches et de combinaisons préparatoires, parce que
tout ce qui tient au bonheur d'un pays ne saurait être trop mûrement pesé ; de
là, la nécessité de s'occuper simultanément de la constitution et du chef futur
de l'État, quoique ce dernier ne puisse être proclamé qu'après avoir accepté et
juré le pacte qui contiendra ses devoirs et ses droits.
Depuis que
le congrès a décidé que la monarchie constitutionnelle était ce qui convenait
le mieux à notre patrie, toutes les ambitions, même les plus désordonnées, ont
surgi tant à l'intérieur qu'à l'extérieur ; beaucoup de prétendants, fort
honnêtes gens d'ailleurs, mais peu capables de gouverner quatre millions
d'hommes, se sont mis sur les rangs, d'une manière plus ou moins directe, sans
faire attention que l'immodestie conduit droit au ridicule. C'est à vous,
messieurs, qu'il appartient de faire justice de pareilles prétentions.
Quelle que
soit la liste des candidats à la souveraineté belge, quels que soient les
titres que l'on fait valoir en faveur de certains princes, le congrès doit voir
les intérêts du pays sur un plus (page
104) large plan ; il ne doit pas se contenter de discuter les droits ou
titres de ceux qui se présentent ; il faut qu'il ne néglige pas de découvrir,
s'il se peut, le prince qui sera le plus digne, et en même temps qui apportera
au pays les plus grands avantages, surtout pour le commerce. Pour y parvenir,
il ne faut croire à l'avance à aucune exclusion ; il ne faut rejeter aucune
combinaison ; il ne faut rien décider, avant d'avoir par soi-même tout vu et
apprécié.
C'est,
messieurs, dans le but de préparer d'une manière officielle et certaine la
décision que vous devez porter que j'avais eu l'honneur de vous proposer (Note de bas de page : Voir la
séance du 7 janvier, page 44) de députer à Paris deux membres du congrès, et que la section centrale
a pris les conclusions qui vous sont soumises.
Ces
dernières conclusions tendent à ce que vous envoyiez à Paris et à Londres des
commissaires élus dans le sein du congrès, et chargés de prendre tous les
renseignements utiles pour éclairer et faciliter le choix du chef de l'État ;
c'est ainsi au moins que je l'ai compris.
Ma
proposition et celle de la section centrale ne me paraissent point susceptibles
de trouver de l'opposition, car elles ne sont offensives pour aucune opinion,
puisqu'elles tendent à acquérir des renseignements certains sur l'opportunité
ou l'inopportunité qu'il y aurait d'élire tel ou tel prince, et ici
remarquez-le bien, je n'en exclus aucun : par là, nous connaîtrons, par
nous-mêmes et pour nous-mêmes, les avantages ou les désavantages que produirait
telle ou telle élection.
Cependant,
la proposition de la section centrale a donné lieu à deux opinions contraires
qu'il faut soigneusement éviter, à mon avis.
D'abord,
ceux qui désirent la réunion à
Cette opinion
ne me paraît pas admissible, car pour offrir la couronne, il faudrait avoir
fait l'élection et s'être décidé définitivement, tandis que l'envoi des
commissaires doit être préalable à toute décision, puisqu'il doit la préparer.
Cette
démarche n'ayant d'autre objet que de prendre des renseignements et de
connaître l'opinion des puissances (sauf à n'y avoir que tel égard que l'on
voudra), il ne peut donc être pris par le congrès aucune résolution en faveur
de qui que ce soit avant le retour des ambassadeurs.
Il suit de
ce qui précède, que le seul point en discussion étant de savoir si l'on enverra
des commissaires prendre des renseignements à Paris et à Londres, tout ce qui a
été dit en faveur, soit des avantages que procurerait la réunion à
Un orateur
(M. Rogier) a paru mettre beaucoup d'importance à combattre la proposition et
les motifs qui l'ont dictée : je ne puis me dispenser de démontrer combien peu
ses raisonnements sont fondés.
Mais
avant, rappelons que depuis quelque temps, on ne sait trop quels protecteurs
ont inventé une ingénieuse combinaison qui consisterait à faire choix d'un
enfant de quinze ans, que l'on dit s'appeler Othon, fils du roi de
Bavière ; cette heureuse découverte (et c'en est une pour moi qui n'en avais
jamais ouï parler), aurait pour résultat de faire régner en sa place deux ou
trois gouvernements provisoires, pendant la minorité.
Cette
belle conception paraît avoir souri à quelques personnes si j'en juge par
l'empressement que l'on a mis à demander l'agrément de
J'avoue
que je m'explique difficilement cette tendresse toute paternelle pour le jeune
Othon, et surtout la célérité des courriers en sa faveur.
Bref,
Othon est candidat pour être chef de l'Etat en Belgique, et pour être mari de
mademoiselle d'Orléans, et tout cela à l'âge de quinze ans.
L'honorable
M. Rogier nous a dit hier : Mais à quoi bon envoyer des commissaires à Paris ?
cette mission est inutile, le roi de France et le ministère se sont prononcés ;
vous le savez, ils ne veulent pas la réunion, ils ne veulent pas non plus vous
donner le duc de Nemours ; il n'est pas écrit, dit-il que le cabinet français
la recevra, cette mission.
Je réponds
que je n'ai vu aucune pièce officielle signée par les ministres français et
constatant les prétendus refus ; cela me conduit à me demander pourquoi dans
une circonstance aussi grave pas une seule note diplomatique signée n'a
été échangée.
D'ailleurs
la mission des élus du congrès pourra peut-être obtenir un autre résultat.
Je me hâte
de repousser une supposition que je qualifierais volontiers d'injurieuse, celle
que peut-être le cabinet ne recevrait pas la mission du congrès ; eh ! quel est
le motif d'une semblable prévision ? (page
105) Pourquoi les membres du congrès ne seraient-ils pas reçus, quand on
fait cet honneur à M. Rogier, secrétaire d'ambassade ?
Mais,
poursuit l'orateur auquel je réponds,
Je le
répète, je ne puis concevoir pourquoi l'on a mis tant de zèle pour le jeune
Othon, et j'avoue que je verrai avec plaisir que le fait soit éclairci ; mais
il est impossible que l'on puisse nous faire croire que dès l'instant qu'une
princesse française est l'épouse de notre chef, peu importe quel est le prince.
J'avoue que je ne conçois pas la portée de ce raisonnement ; et puis
d'ailleurs, si Othon n'a que quinze ans, il ne se mariera pas de suite, et qui
sait si dans deux ou trois ans mademoiselle d'Orléans le voudra encore par
elle-même ou par raison d'État ?
Une
objection bien puissante se présentait naturellement aux protecteurs d'Othon ;
aussi n'a-t-on pas pu l'éviter, mais comment y a-t-on répondu ?
Avec une
constitution presque républicaine, dit-on, peu importe le personnel du pouvoir
exécutif, que ce soit une régence ou non.
Eh quoi !
le congrès a rejeté la république par la raison qu'il n'y avait pas assez de
stabilité lorsque le pouvoir passait d'une main à l'autre, et vous lui proposez
une petite république pendant la minorité d'Othon !
Eh quoi !
vous nous dites qu'il faut sortir du provisoire, tandis qu'en effet vous nous
présentez de continuer le provisoire pendant trois ans.
Est-ce
bien sérieusement que l'on nous soumet le projet de confier l'avenir d'un pays
à un enfant, quand nous avons un si pressant besoin d'un chef expérimenté qui
organise enfin l'administration, et soit capable de se mettre à la tête de
l'armée pour aller terminer notre différend avec
Mais, nous
a-t-on ajouté, une régence qui s'appuierait sur une popularité indigène, une
régence mise à l'abri des attaques de la presse serait forte, elle ferait
cesser les partis.
Messieurs,
sans vouloir interroger quelle est cette popularité indigène, chose qui perce
du reste, je ne puis cependant m'empêcher de demander ce que l'on entend par
une régence mise à l'abri des attaques de la presse. Cela
voudrait-il insinuer quelque loi contre cette liberté ? Serait elle déjà de
trop ? Invoquerait-on aussi l'existence des partis contre elle ?
Conspire-t-elle aussi par hasard ? Je ne poursuis pas, je crains de m'être
trompé, je désire avoir mal entendu.
Voulez-vous,
dit l'orateur, une preuve que la candidature d'Othon n'est pas une combinaison
pour continuer le provisoire et flatter notre ambition, eh bien ! je vais vous
donner un moyen : dans l'acte de l'élection d'Othon, insérez que les membres du
gouvernement provisoire ne feront pas partie de la régence. C'est un service
que vous leur rendrez.
Je ne suis
pas partisan des exclusions : je verrais avec peine qu'il en fût prononcé
contre qui que ce fût, et surtout contre les hommes qui sont arrivés au pouvoir
dans des circonstances difficiles ; mais s'il est vrai qu'ils ne pensent pas à
prendre part à la régence, s'il est vrai que ce serait un service à leur rendre
que de les en exclure, il me paraît qu'ils peuvent fort bien se rendre ce service
à eux-mêmes, en le déclarant à l'avance. Mais cela ne m'empêchera pas de me
prononcer contre toute minorité.
A propos
de minorité, je ne puis passer sous silence une réflexion qu'ont fait naître
les communications diplomatiques et le discours auquel je viens de répondre,
c'est qu'il est étonnant que l'on ait poussé si loin le soin d'obtenir le refus
du duc de Nemours, que l'on semble avoir été jusqu'à recueillir ses paroles
mêmes ; il aurait déclaré que le fardeau de la couronne belge était au-dessus
de ses forces, et qu'il n'accepterait pas.
Cependant,
je remarque que le duc de Nemours est bien jeune pour tenir un pareil langage
et pour être consulté sur des questions politiques ; cela me fait un peu douter
du récit, et j'avoue que je ne serais pas fâché de voir prendre de nouveaux
renseignements à cet égard.
Mais je remarque en outre que l'on ne nous a
pas dit si le jeune Othon se croit capable de porter le fardeau de la couronne
belge ; il paraîtrait que l'on s'est peu occupé du soin de prendre son avis :
je suppose, quant à celui-ci, que d'autres accepteraient pour lui.
Quant au duc de Leuchtenberg, on nous le dit
exclu par
Je crois
difficilement à une pareille conduite de la part de Louis-Philippe ; elle
serait, à mon avis, bien impolitique, car s'il avait prononcé une telle
exclusion il donnerait la mesure de sa faiblesse, il prouverait à l'Europe que
son trône n'est pas encore bien affermi, il donnerait de l'importance (page 106) au parti s'il en existe un en
faveur de la famille de Napoléon : je crois d'autant moins à cette maladresse
du cabinet français que l'on remarque depuis peu de temps qu'il s'entoure de
toutes le notabilités de l'Empire.
D'ailleurs,
encore une fois, je n'ai vu aucun preuve d'un refus authentique ; et les
commissaires s'enquerront de cet objet comme de tout ce qui regarde les autres
candidats et les autres combinaisons : de là, nouveau motif pour voter en
faveur de la proposition qui offre le meilleur moyen de mettre une prompte fin
à l'état de choses actuel. (U. B., 14 janv.)
M.
Alexandre Gendebien – Messieurs, je crois devoir vous soumettre quelques
observations sur la question qui s'agite : je serai court ; car vos moments
sont précieux. Il s'agit de savoir si vous enverrez des commissaires à Londres
et à Paris. Je suis loin, messieurs, de m'opposer à une pareille mesure, et il
est de mon devoir de ne pas m'y opposer, à cause de la mission que j'ai remplie
moi-même. On croirait peut-être que mon opposition prend naissance d'un
amour-propre mal entendu, et je dois prévenir une semblable accusation, moi qui
ai su faire le sacrifice de mon opinion dans un autre temps.
Cependant
je crois devoir faire remarquer au congrès que si l'envoi de ses commissaires a
pour but de demander, soit la réunion pure et simple de
Je ne me
dissimule pas, messieurs, les embarras de notre position. Je sens tous les
inconvénients d'une régence ; mais il faut faire la part de la nécessité, et si
cette nécessité est telle que le parti que nous désirerions tous soit
impossible à prendre, il faut bien s'attacher au seul qui nous reste, une
régence. Ce n'est pas que je sois plus partisan du provisoire qu'un autre. Un
gouvernement provisoire commettra nécessairement des fautes, et jamais il ne
présentera les avantages d'un gouvernement définitif ; mais encore ici nous
devons faire la part de la nécessité. Puisque j'ai parlé de gouvernement
provisoire, je dirai qu'il faut être sobre de critiques pour des hommes qui ont
été portés au pouvoir malgré eux, qui s'en sont emparés dans les temps les plus
difficiles et au moment où il y avait danger à s'en saisir. Pour ma part, je
m'expliquerai franchement là-dessus. Arrivé à Bruxelles le 28 du mois d'août,
après les premiers événements, je fus chargé le même jour, par mes concitoyens,
d'une mission délicate à
Nous avons
commis des fautes. Mais qui n'en eût pas commis à notre place ? Le gouvernement
provisoire s'est installé à l'hôtel de ville, ayant pour tout mobilier une
table de bois blanc prise dans un corps de garde, et deux bouteilles vides,
surmontées chacune d'une chandelle. (On rit.)
Cela est
vrai, c'est ainsi. Nos ressources, la caisse municipale renfermait 10 florins
36 cents (nouveau rire), et c'est avec ces moyens que nous n'avons pas
désespéré de la victoire, que nous avons commencé à organiser en entier
l'armée, l'ordre judiciaire, l'administration civile, l'administration des
finances. Nous avons pu faire des fautes, mais des gouvernements qui ont
employé quinze ans pour le même travail n'ont pas su s'en préserver ; et
comment n'en aurions-nous pas fait, nous qui avons tout organisé en six
semaines et pour ainsi dire au milieu du champ de bataille ? L'élection du
congrès, l'installation du congrès, l'organisation de l'armée, la tranquillité
rétablie, la confiance que les provinces ont témoignée au congrès national et
au gouvernement provisoire, malgré les basses intrigues, malgré les infâmes
calomnies, fruits de quelques amours-propres froissés, de quelques ambitions
déçues ; calomnies trop absurdes pour nous atteindre, et auxquelles on ne
donnerait quelque consistance qu'en daignant les relever : voilà, messieurs,
quelle a été notre tâche et quoi qu'en disent quelques esprits chagrins, je
pense que nous avons fait quelque bien et peu de mal.
Je
reviens, messieurs, à l'objet en discussion. J'ai dit que je ne m'opposerais
pas à ce que des commissaires fussent envoyés à Londres et à Paris ; mais,
désirant que les conclusions de la section centrale ne soient adoptées qu'après
mûre délibération, je crois devoir vous dire ce que j'ai recueilli de la bouche
même du roi des Français. Il est peut-être peu parlementaire de faire
intervenir le nom du roi dans la discussion ; mais il s'agit d'un souverain
étranger, et ses paroles sont trop importantes pour que je ne croie pas utile,
nécessaire même de les rapporter. Lorsque je fus présenté à S. M. le roi des
Français, je lui demandai si, le cas arrivant où le congrès persisterait à
élire son fils pour roi des Belges, S. M. refuserait de nous l'accorder. Voici
la réponse de S. M. ; je crois me
rappeler ses propres paroles :
« M.
Gendebien, vous êtes père d'une famille à peu près aussi nombreuse que la
mienne, vous êtes donc dans une position à pouvoir, mieux que personne,
apprécier les sentiments qui m'agitent en ce moment. Il doit vous être facile
de comprendre combien il serait doux pour mon cœur, et flatteur pour un père,
de voir un de mes fils appelé au trône de
J'ai eu
l'honneur de conférer, presque chaque jour, avec M. le ministre des affaires
étrangères : je lui ai posé la question, je puis le dire, à satiété. J'ai
toujours reçu la même réponse. « Mais, lui ai-je dit enfin, si, malgré toutes
les protestations, si, malgré tout ce que je pourrais dire à mes concitoyens,
le congrès national persistait à élire le duc de Nemours, et l'élisait à une
très grande majorité ? - Eh bien ! m'a-t-il répondu, vous avez entendu les
paroles de S. M ; vos concitoyens ne pourraient s'attendre qu'à un refus. »
Maintenant,
c'est la crainte d'une guerre générale, la crainte d'être accusé d'ambition qui
empêchent S. M. Louis-Philippe d'accéder à nos vœux : mais, des événements
pourront faire changer la politique du cabinet de France, et, sous ce rapport,
l'envoi d'une commission peut être utile. Mais, si
Je crois
devoir maintenant relever l'opinion d'un de nos collègues, M. Jottrand, et je
le ferai, parce qu'on pourrait croire en Europe que cette opinion a quelque
consistance en Belgique. L'orateur auquel je fais allusion a dit que
Je ne
dirai que deux mots sur le choix du prince de Bavière : je pense que pour le
moment c'est le meilleur choix que nous puissions faire. Nous ne pouvons nous
dissimuler qu'il serait des partis plus avantageux pour
Quant aux
inconvénients d'une minorité, d'une régence, je ne les dissimule pas. Mais,
messieurs, entrons de sang-froid et sans passion dans l'examen des actes du
gouvernement provisoire, et, la main sur la conscience, avouons que s'il a fait
quelques fautes, les affaires n'ont pas marché si mal. Nous devons espérer
qu'une régence, calmant les inquiétudes, rassurera le commerce et l'industrie,
et tout marchera de la manière la plus satisfaisante.
Si nous
avions l'alternative de choisir entre un prince majeur, nous apportant des
avantages réels, et un prince mineur avec tous les inconvénients d'une régence,
il n'y aurait pas à balancer ; mais dans quelle position nous trouvons-nous ?
Vous le savez, messieurs ; je n'ai rien à vous dire de plus que ce que j'ai dit
à cet égard. Le prince Othon de Bavière réunit à l'assentiment de
Je me
résume, messieurs, et je finis comme j'ai commencé, en disant qu'il est loin
de ma pensée de m'opposer aux conclusions de la section centrale ; je les
appuie au contraire autant qu'il est en moi, mais je réserve mon vote jusqu'à
la fin de la discussion.
(Ce
discours, entièrement improvisé, a produit une vive impression sur
l'assemblée.) (U.
B., 14 janv.)
M. le comte Félix de Mérode monte à la tribune. (Attention
marquée.) – Messieurs, je suis tellement convaincu de l'urgence d'élire
pour chef de l'État le prince de Bavière, qui pourrait occuper, sans inquiéter
les puissances de l'Europe, le trône de
Je dois
vous l'avouer franchement, messieurs : avant le cruel bombardement de la plus
florissante de nos villes, je reportais souvent mes regards, si ce n'est sur
l'héritier d'un beau royaume divisé, du moins sur un de ses descendants ;
j'étais prêt, pour ma part, à reconnaître le dernier de ces jeunes princes,
parce qu'il ne pouvait maintenir sa légitimité future qu'en se reconnaissant
l'élu du peuple, à l'exclusion de ses deux aînés. Parmi mes collègues du
gouvernement, un seul partageait mon opinion ; tous les autres considéraient
comme un (page 109) malheur pour
notre patrie, comme le germe de révolutions nouvelles et inévitables, le retour
d'un prince d'Orange, quel qu'il fût. Cette nuit désastreuse où, du sommet de
l'édifice qui nous rassemble, j'ai vu les flammes dévorantes allumées par
Guillaume, s'élever dans les rues et consumer une ville belge (Note de bas de page : La ville
d'Anvers bombardée, dans la nuit du 27 au 28 octobre 1830, par le général
hollandais Chassé) qui
n'avait d'autre tort que d'être demeurée trop longtemps soumise à son sceptre ;
cette nuit effroyable, pendant laquelle je veillais en frémissant d'horreur et
d'indignation, m'a convaincu qu'il fallait rompre tous nos liens avec une
famille batave manifestement ennemie du peuple belge.
Trente-deux
décorations dignes des Hollandais, distribuées à ces braves meurtriers
d'enfants, de femmes, de vieillards brûlés dans leurs demeures ; à ces braves
qui, fuyant devant nos volontaires, s'étaient mis à l'abri derrière les murs
d'une citadelle, m'ont confirmé dans ma résolution définitive à l'égard des
princes d'Orange. Aucun Belge, ami de l'honneur national, ne pouvant désormais
accepter librement leur domination, faut-il donc livrer notre avenir à un
prince qui nous est inconnu, et auquel son âge ne permet pas encore de
s'occuper lui-même des soins du gouvernement ? Telle est, sous la forme
d'objection, la demande qu'adressent aux partisans du prince de Bavière ceux
qui, par crainte d'inconvénients inévitables, préfèrent reculer les difficultés
que de les résoudre.
Il serait
sans doute très désirable que le prince appelé au trône belge ne fût point
mineur. Mais, messieurs, depuis les premiers jours de la réunion du congrès,
nous cherchons inutilement le chef auquel rien ne manquerait selon nos vœux, et
personne ne l'a encore indiqué. Le sentiment fondé sur les défiances
réciproques des puissances nous faisait prévoir que tous les membres des
familles qui gouvernent les grands États de l'Europe seraient exclus par la
politique européenne, et nous venons d'en acquérir la certitude par des pièces
irrécusables. Nous sommes encore restreints dans nos choix par une sorte de
nécessité, généralement reconnue, d'adopter un prince catholique. Peut-être
l'eussions-nous trouvé plus avancé en âge dans les familles princières qui
jouissent en Allemagne d'une existence inférieure. Mais, messieurs, il importe
essentiellement que la royauté obtienne parmi nous la haute considération qui
doit lui appartenir, et nulle maison en Europe, après celles de Russie, de
Prusse, d'Autriche, de France et d'Angleterre, ne possède de puissance égale à celle
du roi de Bavière, qui joint à son rang distingué parmi les souverains
l'avantage précieux d'une popularité justement acquise.
Certain
nom, que je suis loin de rejeter par éloignement personnel, a été mis en avant
et semble à quelques-uns d'entre nous propre à rallier les intérêts intérieurs
et extérieurs. Le prince de Leuchtenberg, dit-on, ne doit inspirer aucune
défiance à
Si je
parais ici, messieurs, m'opposer à la réunion à
Après une
digression qui n'est pas étrangère au sujet important qui nous occupe, qu'il me
soit permis, messieurs, d'adresser quelques plaintes à cette assemblée sur
l'exigence qu'elle a montrée à l'égard d'un gouvernement qui méritait davantage
sa confiance : elle a obligé ce gouvernement, qui remplissait avec fidélité ses
devoirs et qui savait les comprendre, à livrer à une entière publicité des
documents que les convenances généralement admises parmi les nations
prescrivaient de communiquer avec réserve. Je suis fâché de le dire, mais je ne
saurais pas plus flatter les assemblées souveraines, que les monarques.
L'affaire délicate à traiter du choix d'un prince pour
M.
le comte Duval de Beaulieu – Messieurs, ce n'est point par défiance de motifs employés par
le gouvernement provisoire et le comité diplomatique, qu'on propose la
formation d'une section centrale du congrès et l'envoi de commissaires pris
dans son sein. C'est une adjonction nécessaire en cette importante circonstance
du choix du chef de l'État, pour satisfaire à la responsabilité de chaque
membre du congrès, pour éviter les interpellations semblables à celles qui ont
dû être faites. « En diplomatie, comme en galanterie, la prudence, le secret
même est le moyen d'avoir encore quelque chose à dire... On ne dit plus rien à
celui qui dit tout. »
La sagesse
et l'esprit calme du peuple belge doivent être démontrés... La sagesse du
congrès est aussi remarquable quand on pense au moment et aux circonstances de
la réunion. S'il y a eu quelque exagération, quelque élan trop prononcé, ne
doit-on pas l'attribuer à l'amour de cette séduisante liberté dans laquelle
ainsi qu'en une maîtresse adorée, les amants ne peuvent apercevoir aucune
imperfection.
Vous avez
à faire connaître aux cinq puissances représentées à Londres votre situation et
vos besoins.
Faible en
comparaison d'elles par l'étendue de son territoire et de sa population, la
nation belge peut néanmoins se faire écouter par son importance dans l'équilibre
de l'Europe ; elle fait pencher la balance du côté où elle se porte.
Et si,
comme il y a lieu de le croire, à cet équilibre européen est attachée la
question de la paix ou de la guerre, peut-être la tenez-vous en quelque sorte
en vos mains, peut-être est-ce à vous (page
111) de la décider en usant de votre droit, par le choix que vous avez à
faire du chef de cet État.
En
adoptant pour forme de gouvernement la monarchie constitutionnelle, vous avez fait
peut-être des sacrifices d'opinions au moins, au désir, à la situation d'États
voisins, à la sécurité de l'Europe.
II
doit vous être tenu compte à l'avance de ce que vous pouvez encore faire.
Si pour cette
sécurité elle réclame de vous des combinaisons, des exclusions, il faut qu'elle
établisse la vôtre d'une manière aussi immuable que possible.
Il le
faut, elle le peut, elle le doit, il est dans son intérêt de le faire.
Pour
être inoffensive et stable, il faut que
L'intérêt
du peuple est leur guide puissant. Toute barrière, toute digue se brise devant
le torrent de leurs besoins.
C'est
maintenant un fait trop évident. Sans doute il ne peut manquer d'être méconnu,
messieurs ; et dans ce moment toute précipitation dans le choix du chef de
l'État vous priverait peut-être d'immenses avantages, que dans leur
délibération les plénipotentiaires des cinq puissances préparent, il est
possible, en notre faveur, et dans leur intérêt même.
C'est avec
plus d'espérance que de crainte, messieurs, que j'ai lu les troisième et
quatrième paragraphes du protocole du 20 décembre dernier, qu'il me soit permis
de vous en donner lecture.
« Les
événements des quatre derniers mois ont malheureusement démontré que cet amalgame
parfait et complet que les puissances voulaient opérer entre ces deux pays n'avait
pas été obtenu, qu'il serait désormais impossible à effectuer, qu'ainsi l'objet
même de l'union de
« Unie
à
Si telle
avait été la pensée, le vœu des puissances : qu'auraient-elles fait ? Elles
auraient donné à
Il
devient indispensable, disent-elles ensuite, de recourir à d'autres arrangements pour
accomplir les intentions à l'exécution desquelles cette union devait servir de
moyen.
Ils
avaient été nobles, généreux, ces arrangements. A quelque exception, à quelque
incompatibilité près, le royaume des Pays-Bas réunissait de nombreuses sources
de prospérité, et vous n'auriez pas, messieurs, à vous occuper du choix d'un chef
de l'État, si celui auquel en étaient confiées les rênes, par une obstination
sans exemple, peut-être, rejetant toute observation, toute respectueuse
représentation, ne l'eût entraîné où il est, où toute sage prévision le voyait
à l'avance s'entraîner.
La
situation de
Toute
réunion nouvelle entre
N'est-il
pas d'autres peuples voisins et dont la sympathie nous promettrait plus de
bonheur ? Ne pourrions-nous point arriver à des limites naturelles et
rassurantes ?
Ne
travaillerait-on point, par des combinaisons qu'il ne m'est point donné de
prévoir, ni de repousser, à nous donner une félicité réciproque, base de toute
stabilité, base et résultat de toute prospérité industrielle, agricole et
commerciale ?
Quoi qu'il
en puisse être, messieurs, il paraît évident, qu'avant que vous puissiez
utilement procéder au choix du chef de l'État, il faut sans doute calculer les
besoins de
Il en est
d'imminents qui ne peuvent échapper à aucun œil : la délimitation convenable du
territoire ; la libre navigation de l'Escaut.
Sans
m'attacher à d'autres points. pour le moment, ceux-ci me semblent devoir être
déterminés.
Votre constitution
d'ailleurs est-elle achevée, ce contrat bilatéral ou synallagmatique, qui doit
vous lier et lier le chef de l'État à nous, est-il prêt à être présenté
maintenant à son acceptation ?
Est-ce
bien le simple choix du chef de l'État, (page
112) messieurs, qui est imminent ? Aurez-vous maintenant autre chose qu'un
nom ? Que ce soit Pierre, Paul ou Jean, celui que vous placerez sur le trône,
que nous importe ? ce sont les relations, les garanties qu'il apportera et qui
formeront en quelque sorte sa dot ; c'est là ce que je veux connaître ; c'est
là ce qui déterminera en fait l'indépendance réelle, le bonheur du
peuple belge, sa prospérité commerciale, industrielle et agricole, si vivement
réclamée en cet instant.
L'Europe
veut sa tranquillité, nous voulons aussi la nôtre, elle doit nous l'assurer !
Il ne me
suffit pas à moi, comme à un honorable préopinant, qu'une alliance ne présente
pas d'inconvénient. Je veux des assurances, des sûretés, des avantages, s'il
est possible.
C'est au
moyen de ce que d'autres ne peuvent vouloir que souvent des conditions
favorables sont obtenues.
Votre
force, votre pouvoir à l'égard des nations, messieurs, est dans celui que vous
avez encore de nommer un chef à l'État : ne leur faites pas un nouveau
sacrifice sans être certains des résultats que vous obtiendrez : le droit de
nous choisir un souverain, vous l'avez conquis ! il a été reconnu ! vous saurez
le maintenir !
Vous
saurez le maintenir par tous les moyens qui appartiennent à une nation noble,
généreuse, sensible à l'honneur.
Vous avez
vu le 24 novembre ce qu'a produit dans cette enceinte la seule idée
d'intervention étrangère.
Vous
trouverez de l'écho chez le peuple belge ; vous choisirez qui bon vous
semblera, il sanctionnera et votre choix et son indépendance ; il soutiendra et
ses droits et les vôtres.
On ne peut
pas plus exclure un prince, que vous en imposer un, si vous avez
le sentiment de votre dignité.
Mais loin
de moi toute exagération : vous pouvez, messieurs, vous devez même consentir à
des sacrifices moyennant qu'on vous en fasse pour l'intérêt du pays.
Vous
pouvez, vous devez consentir à des combinaisons utiles ou agréables à vos
voisins, pourvu qu'en échange elles le soient à vous-mêmes, que vous y trouviez
des garanties certaines du bonheur futur de notre patrie. Vous ne pouvez vous
laisser aller à des impulsions : vous êtes des mandataires responsables. (C.,
supp., 14 janv.)
M.
le chevalier de Theux de Meylandt – Quelques orateurs ont parlé d'une
manière fort inconvenante du prince Othon. Ce n'est point répondre à ses
adversaires que de rejeter des injures ou de grosses plaisanteries à la tête.
Le prince Othon nous convient sous tous les rapports, et il ne sera pas si
difficile de trouver de bons régents.
L'orateur
parle de la nécessité de réclamer, les armes à la main, la liberté de l'Escaut
et la possession du Luxembourg. Il pense que le choix immédiat d'un roi
avancera la solution des questions qui préoccupent les esprits. Il s'oppose à
ce que l'on consulte les cabinets de Londres et de Paris sur le meilleur choix
à faire. On connaît les intentions de l'Angleterre et de
M.
Destriveaux – On a entendu beaucoup d'orateurs. Je renoncerai à la parole, si on veut
prononcer la clôture de la discussion. ( Oui ! oui ! Non ! non ! Parlez !
parlez.) (U. B., 14 janv.)
M. le président – Il y a encore dix-sept orateurs
inscrits. (J. B., 14 janv.)
M. Destriveaux – Messieurs, si j'ai le malheur de
fatiguer l'assemblée, elle s'est imposé à elle-même la
loi d'être indulgente à mon égard.
(Après ce
court exorde, l'orateur pose la question qu'il s'agit de décider ; il parcourt
une à une les diverses objections faites contre le projet de décret, les
réfute, et conclut à l'adoption.) (U. B., 14 janv.)
M.
de Gerlache – Messieurs, la note diplomatique du 20 décembre, qui vous a été
communiquée le 3 janvier, porte : « Unie à
« La
conférence s'occupera conséquemment de discuter et de concerter les nouveaux
arrangements les plus propres à combiner l'indépendance future de
Ainsi,
quand on vous a dit, avec trop de candeur peut-être, que les puissances avaient
reconnu l'indépendance pure et simple de
Aujourd'hui,
et pour nous faire prendre une résolution précipitée, on nous parle du malaise
général, de l'impatience de la nation, des complots qui menacent l'État et le
gouvernement. Pour les masses, dit-on, la révolution n'est pas close tant que
nous n'avons une forme de gouvernement stable, tant que nous n'avons jeté les
yeux sur un prince qui plaise au peuple et à l'armée. Je réponds que la
question n'est point là. Ce n'est ni la promulgation de votre constitution, ni
la présence d'un prince qui satisferont le peuple, et vous tireront d'embarras.
Après tout, ce doit être là le moindre de vos soins, car il ne dépend que de
vous de hâter l'achèvement de votre constitution et de choisir un chef. C'est
l'incertitude de notre avenir et la fausseté de notre position qui nous tuent.
Si l'Escaut n'est bientôt ouvert, vous n'avez d'autre parti à prendre que de
vous jeter dans les bras de
Cependant,
je le répète, il faut l'intervention amicale ou armée des grandes puissances
pour exécuter l'armistice qu'elles nous ont fait conclure, parce que le roi de
Hollande, soumis aux volontés d'Amsterdam et de Rotterdam, n'y consentira
jamais volontairement, et que vous n'avez point de flotte pour l'y forcer. La
séparation de
Les
conditions qu'exigent nos ennemis sont pour eux les honneurs de la guerre et
les profits du commerce ! C'est une question de vie ou de mort pour
Or je vous
demande à quoi servira l'élection d'un roi pour décider de telles questions ?
Si ce roi est homme de cœur, il voudra connaître lui-même les charges qu'on
nous impose pour savoir s'il peut régner sur nous avec honneur. S'il ne s'en
enquiert point, s'il accepte une couronne à tout prix, je crois qu'il importe
peu à la nation belge d'avoir un tel chef.
Sans une
autre situation, je ne vois donc pas ce que produirait l'élection précipitée
d'un souverain, si ce n'est de compliquer de plus en plus nos affaires. Le
peuple s'en amuserait un instant ; il s'en réjouirait, et cela durerait autant
que durent toutes les illusions de la vie. Sous ce rapport j'ai peu de chose à
dire sur le prince Othon de Bavière, parce que je ne devine pas en quoi la
présence d'un roi de quinze ans, avec une régence ou un régent, pourrait
avancer nos affaires. Ce prince, comme on vous l'a dit, ne peut accepter notre
constitution et se marier avec une fille de Louis-Philippe que dans deux ou
trois ans ; ainsi, (page 114)
pendant deux ou trois ans, nous serions sans garanties au dedans, et pour ces
institutions que nous avons rendues libérales comme à plaisir, et au dehors
pour cette union avec
On vous a
parlé de déférer tout uniment la couronne à Louis-Philippe, à condition de lui
faire accepter notre constitution. Mais, messieurs, souvenez-vous des termes
précis de l'une des lettres (note de bas de page : voir page 62) qui vous ont été lues samedi dernier : « Nous avons
demandé ce que le ministère ferait si
En effet,
si, poussée par une aveugle ambition,
Et après
tout, avons-nous intérêt, messieurs, à vouloir la réunion à
Je conçois
que le prince d'Orange plaise aux souverains pour roi de
Je n'ai
rien dit de l'envoi de nouveaux députés à Londres et à Paris ; car j'avoue que
je n'en vois pas la nécessité. Comme l'ont observé quelques-unes des sections,
la nomination du souverain tient à la constitution même ; et à cause de cela,
ce n'est pas seulement au gouvernement provisoire, c'est au congrès qu'il
appartient de s'en occuper, et de faire connaître ses intentions aux
puissances. Mais d'après les motifs que je viens d'exposer, il me semble qu'il
ne peut être question, quant à présent, de cette nomination, que d'une manière
fort indirecte, et qu'il y a quelque chose de plus pressé.
Je
m'oppose en conséquence, autant qu'il dépend de moi, à ce qu'on s'occupe
immédiatement de l'élection d'un chef, parce que cela me semble prématuré, et
parce que je me méfie de la véhémence ou de l'impatience comme de
l'enthousiasme d'une grande assemblée, ainsi que je vous le disais lorsque fut
votée l'exclusion de la famille des Nassau. Je crois qu'avant de prendre une résolution
définitive, vous devez attendre une réponse de Londres et une explication
catégorique de la note du 20 décembre et du protocole du 17 novembre qu'on ne
nous a point encore fait connaître. (C., supp., 14 janv.)
M. Lecocq – Messieurs, plus on réfléchit sur la
nature et l'ensemble des communications qui nous ont été faites hier, et plus
on se sent porté à croire que l'obstacle au choix du duc de Leuchtenberg est un
obstacle insurmontable.
Ne nous
faisons donc plus illusion et n'allons plus caresser une idée que la majeure
partie d'entre nous avait accueillie déjà avec l'espérance d'y trouver la fin
du provisoire.
Pour mon
compte, je me proposais de la défendre cette idée de salut, mais je
renonce facilement à de vaines paroles.
Cependant,
et comme une matière d'aussi haute importance doit être épuisée à fond,
j'adopte très volontiers l'opinion de l'honorable député de Liége, qui siège à
gauche ici près (M. Lebeau), pour que la question soit représentée de nouveau
sous toutes ses faces au roi Louis-Philippe par les députés mêmes du congrès.
En
m'exprimant ainsi, c'est dire que je voterai aujourd'hui sur les conclusions de
la section centrale, tout autrement que je n'eusse voté avant les
communications diplomatiques.
Mais je dois
déclarer dès à présent que l'art. 3 de ces conclusions me paraît devoir être
modifié en ce sens que les députés ne seraient pas chargés de traiter, mais
seulement de voir, sonder, prendre des renseignements sur les faits, sur les
possibilités, entrer dans des explications pour bien faire connaître la
situation et le caractère du peuple belge, ainsi que ses dispositions bien
prononcées à courir toutes les chances pour sortir honorablement de la crise :
cette dernière considération sera, n'en doutez pas, messieurs, profondément
méditée par les diplomates des cinq puissances.
La liste
des éligibles n'est pas épuisée.
Certes le
peuple belge n'est pas fait pour tendre des mains suppliantes, pour aller de
cour en cour mendier un roi ; non, mais il peut, sans avoir à rougir, consulter
sur son choix les membres de la grande société européenne dans laquelle il
vient d'être admis.
Mais un
État n'est pas comparable en tout à une famille qui peut quelquefois s'isoler sans
inconvénient : un État a nécessairement des relations extérieures à ménager ;
tous sont plus ou moins dépendants l'un de l'autre.
Cette
vérité vous a été trop éloquemment démontrée dans nos précédentes séances pour
m'y arrêter aujourd'hui.
Rien
d'indépendant sur la terre, s'écriait hier l'honorable député de Philippeville
(M. Seron).
Ainsi donc
rien jusque-là dans nos démarches qui ne soit digne de la nation que nous avons
l'honneur de représenter ; cependant prenons-y garde, nous touchons aux limites
extrêmes des convenances, ne les passons pas ! au delà se trouvent
l'humiliation et la honte.
Consulter, oui …
Mais obéir, jamais ! Et où serait l'indépendance si nous devions fléchir devant
toutes les exigences ?
A des
conditions humiliantes le Belge indigné briserait lui-même les tables de la
loi, et, préférant le danger de l'anéantissement politique à une (page 116) existence octroyée, il
se lancerait, en désespoir de cause, au-devant de tous les hasards ; l'Europe
entière serait compromise.
D'ailleurs,
après tant de calculs diplomatiques trompés, après avoir épuisé toute la
prudence des hommes, pourquoi ne pas s'abandonner, pour quelque chose du moins,
à une providence divine, en suivant un instinct qui peut nous pousser au
bonheur ?
Ce
langage, nos députés sauront le faire comprendre aux puissances de la terre.
Alors
qu'une révolution est complète, alors que toutes les classes y ont été
entraînées, il n'y a plus à revenir sur ses pas sans exposer la société à de
nouveaux orages, aux réactions plus ou moins éloignées.
Telle est
l'opinion de ceux-là même qui, appréciant tout ce qu'une révolution matérielle,
quelque légitime et heureuse qu'elle soit, entraîne de funeste pour les
existences privées, ne voulaient qu'une révolution morale, ne travaillaient
qu'à une révolution morale ; et nous étions de ce nombre.
Maintenant
notre position a des nécessités qu'il faut subir, qu'il faut savoir embrasser
avec toutes leurs conséquences.
La
résolution unanime des cinq grandes puissances, anéantit, entre autres projets,
celui que j'appellerai anti-belge, d'une réunion à un grand empire
voisin, même d'une union telle qu'elle est conçue ; il ne peut plus en être
question, à moins de vouloir un incendie dont nous serions les premières
victimes.
Du reste
il vous a été démontré à cette tribune combien il y avait à rabattre des
avantages que la réunion présente à quelques esprits ; combien il y avait à
rabattre des analogies tant vantées, de quelque part, entre les deux peuples.
Le Belge
doit rester LUI.
Messieurs,
avant de terminer j'éprouve le besoin de m'expliquer, mais en très peu de mots,
sur la question de minorité : mon opinion se rattache aux instructions qui
peuvent être données à nos députés.
Cette
opinion n'est plus celle que j'avais émise dans une section ; je reste
convaincu, après des réflexions très mûres et après tout ce que j'ai entendu
dans cette discussion importante, qu'une régence ne peut convenir à une
monarchie au berceau.
Ce
serait passer d'un premier provisoire à un second.
Une
minorité ! une régence ! c'est la mort dans les langes : c'est reculer
seulement l'époque de notre absorption politique, et peut-être y a-t-il au
dehors quelques arrière-pensées à ce sujet.
Eh quoi ! nous aurons voté dans notre conscience (sans haine comme
sans crainte) une exclusion nécessaire à nos yeux pour assurer la paix
publique, pour conjurer la guerre civile, et nous nous prêterions à une mesure
qui peut, par sa nature de faiblesse, remettre bientôt tout en question ! Non !
et si nos destinées ne veulent pas une indépendance fixe, durable, glorieuse,
qu'elles se prononcent de suite ! quelques mois de plus d'une existence
péniblement prolongée ne doivent pas nous séduire.
Si ces
sentiments se trouvaient partagés par une forte majorité, il serait utile de
s'en faire un moyen auprès des puissances, il importerait peut-être au succès
de notre cause de ne leur laisser aucun doute à cet égard.
Ainsi
point de minorité !
Ce qu'il nous faut, on l'a dit avant moi, c'est
un définitif ; c'est un prince majeur, un prince capable de régner lui-même, un
prince qui puisse de suite parler à son peuple, le comprendre et en être
compris ; un prince enfin qui puisse se présenter à nos phalanges, se mettre à
leur tête, et, s'il devient nécessaire, conduire encore le Lion belgique à la victoire.
Messieurs,
un écrivain étranger s'extasiait, il y a quelques jours, devant le spectacle
majestueux d'un peuple vivant dans l'ordre depuis quatre mois, quoique,
disait-il, sans gouvernement, sans lois et sans roi.
Nous
n'admettons pas ces expressions dans toute leur valeur grammaticale, mais
toujours est-il que notre position, extraordinaire dans l'histoire des nations
civilisées fait un honneur indicible aux mœurs, au caractère du peuple belge,
ajoutons à son bon sens, c'est-à-dire, à une profonde raison naturelle qui le
distingue de tant d'autres.
Le calme
qui règne autour de nous, tandis que l'on discute des intérêts d'un ordre aussi
élevé, répond noblement à de perfides accusations.
Le
peuple attendra avec confiance les résultats de nos travaux.
Les
dissensions auxquelles nous nous sommes livrés forment, pour ainsi dire, une
adresse à la nation, un ordre du jour à l'armée.
Je voterai
pour les conclusions de la section centrale sous les modifications que j'ai eu
l'honneur de vous proposer, et de celles qui pourraient être proposées par
d'autres.
Il est
bien entendu que les commissaires n'agiront que de commun accord avec le
gouvernement qui nous a sauvés de l'anarchie, et à qui nous nous (page 117) plaisons à exprimer notre
reconnaissance chaque fois que l'occasion s'en présente : enfin ce n'est point
par défiance que j'appuie les conclusions : loin de moi cette pensée ; mais
c'est pour ne pas apporter dans le grand œuvre une précipitation qui pourrait
être blâmée ; c'est parce qu'il me reste l'espoir d'obtenir par des organes
spéciaux quelques nouvelles ouvertures, quelques combinaisons nouvelles propres
à servir nos vrais intérêts, et dans tous les cas la double mission servira
d'abord l'esprit public.
La
connaissance de l'opinion de l'Angleterre que nous attendons à chaque instant,
aurait pu être d'un grand poids pour moi, et influer sur l'avis dans lequel je
dois persister au moins jusque-là, en faveur des conclusions de la section
centrale dans le sens que j'ai déclaré les entendre. (C., supp., 14 janv.)
M. Henri de Brouckere – Messieurs, je ne comptais point
prendre la parole dans la discussion qui vous occupe aujourd'hui ; mais la
plupart des orateurs que vous avez entendus hier, s'étant prononcés en faveur
des conclusions de la section centrale, je me suis fait inscrire, décidé que
j'étais à voter contre ces conclusions, afin de vous expliquer ma pensée. Je
serai d'autant plus court, que quelques-unes des considérations que je voulais
vous soumettre vous ont été présentées par les honorables collègues qui m'ont
précédé à cette tribune.
A peine
étions-nous réunis ici que, par deux décrets successifs, nous proclamâmes
l'indépendance de
Les
opinions les plus divergentes ont été professées, et chacun a donné à cette
grande question la solution qu'il croyait la plus propre à assurer notre
bonheur.
Les uns se
sont prononcés pour la réunion de
Cependant
le gouvernement provisoire et le comité diplomatique se mirent en mesure de
recueillir les renseignements nécessaires pour éclairer notre choix, pour
empêcher que l'incertitude où nous eussions été sur l'opinion des puissances voisines ne
nous fît prendre un parti qui eût mis obstacle à toute relation d'amitié avec
elles, ou à l'exécution duquel elles auraient cru devoir s'opposer par la
force.
En cela le gouvernement provisoire et le comité diplomatique
ont noblement rempli leur devoir, et au lieu de leur en adresser des reproches,
nous devrions leur offrir des remercîments bien mérités. Car cette fierté que
l'on voudrait affecter, en agissant comme si nous pouvions vivre seuls, isolés
d'avec nos voisins, comme si nous pouvions arrêter par des forces imposantes
leurs projets d'opposition ou d'envahissement, peut bien flatter
l'amour-propre, peut même aveugler un instant ; mais les yeux sont bientôt
dessillés, et l'on est forcé de convenir que choisir pour nous gouverner un
prince que les grandes puissances, que
Quel a été le résultat des renseignements pris par le
gouvernement provisoire et par le comité diplomatique ?
Nous avons appris que de la réunion de
Cependant, messieurs, le temps nous presse ; de toutes parts
les habitants paisibles et bien pensants, et c'est le plus grand nombre, nous
sollicitent, nous conjurent de décider du sort de
Que nous propose la section centrale ? d'envoyer à Paris et à
Londres des commissaires pris dans (page 118) le sein
du congrès. Si je croyais qu'il fût possible que cette mesure obtînt quelque
résultat, j'y applaudirais de toute mon âme. Mais que feront-ils ces
commissaires ? A Paris, on leur répétera ce que l'on a dit au commissaire du
gouvernement provisoire ; car je ne pense pas qu'on pousse les soupçons au
point de révoquer en doute la véracité de ce qu'il est venu nous rapporter à la
tribune. Mais, dit-on, nous connaîtrons officiellement le refus du roi des
Français. Eh ! messieurs, que voulez-vous de plus officiel, de plus positif,
que ce que contient la lettre écrite hier au comité diplomatique par l'envoyé
français ? « J'ajouterai, M. le comte (tel est le langage de M. Bresson), que
S. M. ayant à plusieurs reprises manifesté l'intention de ne consentir ni à la
réunion de
Quant aux
commissaires que nous enverrions à Londres, tout ce qu'ils verraient, tout ce
qu'ils entendraient serait, non dans notre intérêt, mais bien dans celui de
quelque prince anglais ou même du prince d'Orange, qu'il ne tient pas à
l'Angleterre de nous imposer. Ainsi, messieurs, l'envoi de commissaires à Paris
et à Londres serait totalement inutile, et en cela je me trouverai même
d'accord avec quelques membres de cette assemblée qui ne se disposent à adopter
les conclusions de la section centrale, que pour gagner du temps ; je dirai
même qu'il y aurait dans cet envoi impolitique et inconvenance.
Mais je ne
vois pas, messieurs, je l'avoue, l'avantage qu'il y aurait pour nous à gagner
du temps ; est-il probable que
dans huit, que dans quinze jours nous en saurons plus qu'aujourd'hui ? Si deux
mois ne nous ont pas suffi pour nous fixer, quelques jours de plus ne nous
éclaireront pas davantage.
Prenons donc un parti ;
et, qu'il me soit permis de le dire, cette régence dont on nous fait si peur ne
m'effraye pas tant. En vain, nous dit-on que c'est retomber dans le provisoire
dont nous voulions sortir, que c'est prolonger le malaise qui nous tourmente.
Non, messieurs, c'est une erreur. Ce n'est point de voir le pouvoir en des
mains qui dans peu peut-être ne le posséderont plus, que tout le monde est
fatigué : ce qui nous fatigue, ce qui nous tue, pour me servir de cette
expression, c'est l'incertitude sur notre avenir, c'est le manque
d'institutions stables, c'est le défaut de relations, de traités de commerce
avec nos voisins, c'est cet état de guerre qui inquiète, qui désole, qui ruine
plusieurs de nos provinces, et je puis en parler, moi, député par un des
arrondissements de la province de Limbourg, que la guerre fait tant souffrir.
Choisissez un chef ; que les rênes du gouvernement lui soient remises, ou que
provisoirement elles soient confiées à un régent ; pourvu que nous conservions
la paix avec les grandes puissances, la crise est terminée,
M. le président – La parole est à M. l'abbé de Foere.
(J. F., 13 janv.)
De toutes parts – La clôture ! la clôture ! (Bruit.) (J. F.,
13 janv.)
M. l’abbé de
Foere quitte
sa place et se dirige vers la tribune (J. F., 13 janv.)
Nouveaux cris – La clôture ! Non ! (J. F., 13
janv.)
M. De
Lehaye – M. le président, je demande la clôture et dix membres
l'appuient ; elle doit donc être mise aux voix. (J. F., 13 janv.)
M. Raikem réclame la parole. Il demande que
l'on se renferme exclusivement dans la question de savoir si on enverra des
députés à Londres et à Paris. (C., 13
janv.)
M. Devaux parle contre la clôture. Il lui
paraît qu'on ne saurait trop éclaircir la question du choix du chef de l'État. (Appuyé.) (C., 13 janv.)
(page 119) M.
Pirson – Je demande la parole contre la clôture. Messieurs, je
m'oppose à ce que la clôture soit prononcée parce que j'ai encore quelque chose
à dire. (Hilarité générale.) Attendez, messieurs, attendez. J'ai quatre
mots à dire seulement qui me paraissent très intéressants. (On rit de
nouveau.) (U. B.. 14 janv.)
Une voix – Demain vous aurez la parole. (C.,
13 janv.)
M. Henri de Brouckere – Il y a encore beaucoup d'orateurs
inscrits. Je demande qu'il y ait une séance ce soir (Non ! non !), pour
en épuiser la liste. Après quoi, si vous craignez de n'être pas assez calmes,
on pourra renvoyer la décision à demain. (Oui ! oui ! Non ! non !) (U.
B.,u'janv.)
M. le président – Je vais mettre aux voix la clôture.
(U. B., 14 janv.)
- La clôture de la discussion est rejetée. (U. B., 14 janv.)
M. l’abbé de
Foere monte
à la tribune – Messieurs, je prends la parole pour combattre les conclusions de
la section centrale, uniquement sous le rapport du principe, d'autres orateurs
les ayant réfutées sous d'autres points de vue.
Vous avez
conféré le pouvoir exécutif au gouvernement provisoire. Ce pouvoir exécutif,
qui est votre ouvrage, a institué un comité diplomatique. Non seulement vous
vous êtes opposés à cette institution, mais vous l'avez accueillie et adoptée
avec des applaudissements. Quelles sont maintenant les intentions de la section
centrale ? De créer une juxtaposition, ou de distraire le pouvoir diplomatique
du pouvoir exécutif, alors que l'on n'a pas même cherché à prouver que le
pouvoir diplomatique n'est pas une branche du pouvoir exécutif. Les conclusions
de la section centrale ont pour objet d'envoyer à Paris et à Londres des
ambassadeurs extraordinaires qui ne seraient nommés, ni par le pouvoir
exécutif, ni par le comité diplomatique, et qui ne recevraient ni de l'un ni de
l'autre leurs instructions. Si vous adoptiez, messieurs, cette mesure
excentrique, vous détruiriez votre propre ouvrage ; vous porteriez l'anarchie dans
vos propres institutions ; vous consacreriez une confusion de pouvoirs dont
l'histoire n'offre pas d'exemple.
Quel
serait l'effet de cette mesure anarchique ? Vous fourniriez à
Dans quel
temps se propose-t-on d'avilir ainsi le gouvernement provisoire ? Dans un temps
où il faudrait l'investir d'une confiance, d'une protection et d'une force
toute particulière ; dans un temps où les factions s'agitent de toutes parts
contre lui ; où nous sommes à la veille d'une guerre à mort contre
Examinons
maintenant l'effet que cette mission singulière doit produire sur les
conférences de Londres. Croyez-vous de bonne foi, messieurs, que les diplomates
admettent des envoyés qui auront reçu leur mission d'une assemblée délibérante
? L'histoire ne me fournit aucun exemple d'une mission aussi extraordinaire.
Je ne
pense pas que la diplomatie consacre une nouveauté de cette mesure. Qu'on ne
m'objecte pas que nous nous trouvons dans une position qui sort de l'ordre
régulier des relations politiques, c'est une erreur. Nous avons un
gouvernement, quoique provisoire, qui est régulièrement constitué, et avec
lequel les puissances étrangères sont en relation. Que l'on n'allègue pas non
plus que cette mission, émanée du congrès même, produirait peut-être plus
d'effet sur les puissances alliées. Ce changement de scène et d'acteurs ne serait
qu'un pur incident qui ne pourrait rien contre des principes arrêtés, contre
des résolutions privées.
Je voterai contre les conclusions de la section
centrale. (C., 13 janv.)
(page 120) M.
le baron de Pélichy van Huerne – Messieurs, la question qui nous occupe est, si je ne
me trompe, non celle du chef de l'État, mais de savoir si on enverra ou si on
n'enverra pas des commissaires, choisis dans le sein du congrès national, aux
cours de Paris et de Londres.
Quant à
moi, messieurs, ne me rangeant pas à l'opinion de la section centrale, je pense
que cette démarche est tout à fait inutile ; et en effet, quel serait le rôle
que joueraient à la cour de France nos envoyés ? Quel serait le langage qu'ils
y tiendraient ? Diront-ils au roi des Français : Sire, vous venez de nous
déclarer, par l'organe de votre ministre des affaires étrangères, que, malgré
l'attachement que vous nous portez sincèrement, malgré la plus grande somme de
prospérité que vous nous souhaitez, il vous est de toute impossibilité
d'accéder à nos désirs pour ne pas compromettre le repos et la tranquillité de
vos Etats. Cependant, sire, vous le devez : l'amour des Belges le demande,
l'opinion de votre peuple l'exige.
Ce
langage, certes, ne serait pas favorablement accueilli ; il ne serait non plus
celui d'un peuple qui cherche l'alliance d'un autre peuple. Il nous couvrirait
de ridicule et nous priverait, sans aucun doute, de l'amitié, de l'intérêt que
cette cour porte à notre régénération. Elle répondrait : Je veux bien être
votre ami, mais je ne veux pas hasarder le bonheur de mes sujets ; je ne crains
pas la guerre, mais je ne veux pas non plus en être le moteur.
Ne nous
exposons donc pas à perdre cette alliance, si nécessaire au bien-être matériel
de notre pays ; renonçons à cette ambassade qui ne nous conduirait qu'à la
confirmation d'un refus.
Quant à la
cour de Londres, je pense que ce serait non seulement inutile, impolitique,
mais même nuisible à nos intérêts. Cette démarche jetterait sur nos envoyés une
espèce de défiance que nous devons chercher à éviter ; elle pourrait nuire à
l'influence qu'ils ont peut-être déjà acquise ; elle ne serait même pas digne
d'une nation généreuse.
Nous avons
mis notre confiance dans le gouvernement provisoire lorsque nous lui avons de
ce chef confirmé le pouvoir exécutif ; il faut la lui continuer, il faut
l'augmenter en lui donnant les instructions nécessaires pour sonder, par ses
envoyés, les grandes puissances, tant sur le choix du chef de l'État, que sur
l'étendue de notre territoire, notre commerce, et les autres avantages qui
pourraient résulter de notre non-réunion à
Persuadé
que toute autre conduite serait au détriment de la nation belge, je voterai
contre les conclusions de la section centrale. (U. B., 14 janv.)
M. de
Tiecken de Terhove, remarquant l'impatience de l'assemblée,
renonce à la parole. (J. F., 14 janv.)
M. le président
consulte l'assemblée
pour savoir s'il y aura séance ce soir. (Non ! non !) (U. B., 14 janv.)
M. Raikem – Comme la question est très simple,
qu'il ne s'agit pas de savoir qui sera roi, mais seulement s'il faut envoyer
des commissaires, on pourrait entendre les orateurs inscrits et voter demain
matin. (C'est cela !) (J. F., 14 janv.)
M.
Charles Rogier – Si on termine la discussion aujourd'hui ou demain, je demande
que la première séance soit consacrée à la discussion du projet sur la
mobilisation de la garde civique. (U. D., 14 janv.)
M. Destouvelles –
Beaucoup de sections
ne s'en sont pas encore occupées. (U. B., 14 janv.)
M. le président engage les sections à s'occuper de la
loi sur la mobilisation de la garde civique, pour que la discussion puisse
avoir lieu prochainement. (U. B., 14 janv.)
M. le baron Beyts – Demain nous pouvons avoir des
nouvelles de Londres ; je propose de remettre la discussion à demain. (J. B.,
14 janv.)
- L'assemblée décide
qu'il y aura séance ce soir, à sept heures. (C., 13 janv.)
Il est quatre heures et
demie ; la séance est suspendue ; elle est reprise à sept heures et demie. (P.
V.)
M.
le président – La parole est à M. Van Meenen. (U. B., 14 janv.)
M. Van
Meenen – Messieurs, je crois que quelques points n'ont pas été
traités. J'éviterai de rentrer dans ceux déjà éclaircis par d'honorables
orateurs. .
Je
combattrai les conclusions de la section centrale, et resterai dans la question
dont on s'est généralement écarté : beaucoup d'orateurs paraissent déjà fixés
sur le but de la discussion, d'autres désirent de nouveaux renseignements ; je
crois qu'il n'en est pas besoin, et qu'on sait tout ce qu'on peut savoir à ce
sujet.
Les
partisans de
Une autre
combinaison dont on nous a parlé, est Othon de Bavière. Ainsi c'est une
minorité qu'on vous propose, c'est-à-dire, le plus grand des inconvénients de
la monarchie. J'espère qu'elle serait repoussée unanimement, si jamais elle
obtenait les honneurs d'une discussion sérieuse. Il est vrai que, pour vous la
rendre plus agréable, on vous a présenté dans le lointain son union avec une
princesse de France, et la prompte reconnaissance des puissances. Si l'on a
fixé la majorité des princes à dix-huit ans, c'est qu'on a cru les
inconvénients d'une régence si grands, qu'on a préféré s'exposer aux
extravagances possibles d'un jeune fou, que de subir ces inconvénients pendant
un long espace de temps.
Ce que je
vois de plus probable dans cette combinaison, qui nous est tombée ici comme une
bombe, et l'on ne sait d'où, c'est que chacune des puissances y a un intérêt
privé et caché que nous connaîtrons lorsque nous en serons la victime. Je ne
vois aucun motif qui puisse plaider en faveur de ce prince, si ce n'est la
quasi-légitimité, parce qu'il est de sang royal : je ne veux pas plus de
quasi-légitimité que de légitimité, si c'est là tout son mérite.
Le prince
de Leuchtenberg excite ma vive sympathie. C'est un nom cher à l'honneur, à
l'armée, à l'histoire. Il peut nous apporter des relations favorables avec
(Après une
longue improvisation où il démontre l'inutilité d'envoyer de nouveaux
ambassadeurs à Londres et à Paris, M. Van Meenen conclut contre les
propositions de la section centrale ; mais il consentira, quoiqu'il le juge
inutile aussi, à ce qu'on adjoigne au comité diplomatique quatre membres du
congrès.) (U. B, 14 janv.)
M. de Tiecken de Terhove – Dans la dernière séance du comité
général, quelques membres de cette assemblée ont voulu nous montrer des
factions partout ; il nous ont dit que ces factions se remuent, s'agitent,
conspirent ; que la tranquillité, l'ordre public, seraient compromis ; que des
désordres graves, de nouveaux bouleversements, l'anarchie même, pourraient en
être la suite ; que pour prévenir tous ces maux dont nous sommes menacés, il
fallait au plus tôt sortir de cet état provisoire qui nous tue, et procéder
immédiatement à l'élection d'un chef de l'État. Ce tableau qu'on nous a fait de
la situation du pays est bien sombre, sans doute ; et cependant, messieurs,
vous l'avouerai-je, il ne m'a pas effrayé ; il n'a pas fait, à ce qu'il m'a
paru, plus d'impression sur la grande majorité de cette assemblée. Et pourquoi
? parce que je l'envisage, ainsi que beaucoup de mes honorables collègues,
comme un tableau dont les ombres ont été fortement rembrunies, comme un tableau
qui nous présente plutôt des fantômes, enfants d'imaginations craintives, que
des objets réels. Si on me parlait d'une faction qui s'agite et se remue dans
l'ombre, j'y croirais ; cette faction, messieurs, c'est celle qui veut nous remettre
sous le joug des Nassau ; son but est connu. Quoique faible, peu nombreuse et
ne trouvant d'appui que dans quelques grands égoïstes ennemis de leur patrie,
soutenus par l'étranger, elle se remue, elle s'agite ; mais ayant la masse de
la nation à combattre, elle ne réussira pas. Cependant, qu'on la surveille,
qu'on l'observe, et si elle osait sortir de l'ombre à laquelle elle est
condamnée, les lois sont là pour en faire justice. Hors de là, messieurs, où
sont les factions ? où sont les conspirateurs ? je ne les vois nulle part ; je
ne vois que des hommes d'opinions différentes, mais ayant tous le même but, le
bonheur, la prospérité de notre belle patrie. Sans doute, il y a du mouvement,
de l'agitation, de l'inquiétude même. Eh ! messieurs, quand un peuple attend de
nouvelles institutions, un gouvernement nouveau, un chef de l'État, ce peuple
devrait être bien indifférent, bien apathique, s'il ne montrait ce désir
inquiet de connaître ses destinées futures : de là ce mouvement, cette
agitation, que quelques membres de cette assemblée nous ont signalés comme
l'effet de mouvements séditieux.
Je le
répète, messieurs, je ne vois, je ne connais (page 122) qu'une seule faction ennemie, c'est la faction orangiste
; tant qu'elle verra le château d'Anvers et la ville de Maestricht au pouvoir
des Hollandais, et je le dirai, elle conservera quelque espoir. Je pense donc,
messieurs, qu'il est nécessaire, qu'il est urgent que le gouvernement
provisoire prenne enfin toutes les mesures en son pouvoir pour nous délivrer de
leur présence ; s'il le peut au moyen de négociations, par les voies
diplomatiques, tant mieux ; mais le roi de Hollande, dont le caractère tenace
nous est connu, sera-t-il disposé à entrer en négociation pour nous céder, sans
coup férir, des points si importants ? pour moi, je n'y crois pas. Nous ne
pouvons certes pas nous bercer non plus du vain et je dirai ridicule espoir que
M.
Claes (d’Anvers) – La question qui nous occupe est simple, si nous la réduisons
aux termes dans lesquels elle a été posée par la section centrale ; il s'agit
de savoir si nous enverrons à Paris et à Londres des commissaires pour prendre
conseil sur le choix du chef de l'État. Les orateurs auxquels je succède n'ont
point borné leurs discours à l'examen de cette question préliminaire, ils sont
tous entrés dans la question de fond, c'est-à-dire celle du choix d'un
souverain. C'est ainsi que des partisans d'une réunion à
Plusieurs membres de la
droite – De
glorieuse mémoire ! A l'ordre ! (U. B., supp., 14 janv.)
M. Claes (d’Anvers)
répète la phrase : il
est violemment interrompu par plusieurs députés siégeant au côté droit. (U. B.,
supp., 14 janv.)
M. Charles Rogier
– Je ne comprends
rien à une pareille interruption ; M. Claes ne fait qu'émettre une opinion
historique, et certes il en a le droit. (U. B., supp., 14 janv.)
M. Claes (d’Anvers)
– Je crois avoir entendu
un orateur dire, que le règne de Marie-Thérèse était d'odieuse mémoire. (U. B.,
supp., 14 janv.)
Les mêmes membres – Non, non, glorieuse. (U. B.,
supp., 14 janv.)
M. Claes (d’Anvers)
– Du reste, ceci est
hors de la question ; mais ma mémoire est fidèle, et je crois être sûr qu'un
orateur a dit : Marie-Thérèse d'odieuse mémoire, dont le règne fut un règne de
prêtres, (Nouvelle explosion à droite, plus violente que les précédentes.)
(U. B., supp., 14 janv.)
M. Lebeau – Nul n'a le droit d'interrompre ; je
demande que M. le président rappelle à l'ordre les interrupteurs. (Nouveau
tumulte.) (U. B., supp., 14 janv.)
M.
Deleeuw – L'orateur a le droit d'être entendu ; M. le président
doit rappeler à l'ordre ceux qui l'interrompent. (U. B., supp., 14 janv.)
M.
le président fait de vains efforts pour apaiser les partisans de Marie- Thérèse ; le
tumulte continue encore quelques minutes. (U. B., supp., 14 janv.)
M. Claes (d’Anvers)
reprend son discours en
ces termes – Les préopinants se sont attachés principalement à démontrer la
nécessité d'envoyer des commissaires à Paris ; je crois qu'il est au moins
aussi urgent d'en envoyer à Londres. Il est des questions commerciales et
politiques, qui se résoudront certainement à Londres : ainsi Java appartenait
au royaume des Pays-Bas, il s'agit de savoir aujourd'hui si
A Paris,
d'un autre côté, on a discuté la question de l'élection de deux princes
seulement : un mineur, c'est le prince Othon de Bavière ; un majeur, le duc de
Leuchtenberg. Quant au premier, je crains trop les inconvénients d'une régence
pour voter pour lui autrement qu'en désespoir de cause, et s'il n'y a pas
d'autre moyen de maintenir la paix avec les cinq grandes puissances. Quant au
duc de Leuchtenberg, ce choix conviendrait à
Du reste,
il est encore d'autres princes que l'on pourrait appeler au trône. Un orateur
s'est flatté que l'élection du prince de Bavière, déterminerait
M.
le baron de Stassart – Messieurs, la diplomatie est chose mobile de sa nature...
M. Maclagan – Nous avons beau discuter
ici, c'est ailleurs que notre sort se décidera. Souvenez-vous de notre 1790.
Les souverains ne consultèrent pas nos intérêts, mais les leurs. Il est une
combinaison qui concilierait tous les intérêts et rétablirait nos relations
commerciales avec
Voix
nombreuses – De
qui parlez-vous ? (J. F., 14
janv.)
(page 124) M. Maclagan –
Du prince d'Orange ! (A ces mots une violente explosion de cris : A l'ordre ! bas ! part de
tous les points de la salle ; le tumulte se prolonge pendant plusieurs minutes
avec une force toujours croissante ; le congrès n'avait jamais présenté un
tel caractère d'irritation. M. de Gerlache, dit l'orateur, a développé
ce matin la même opinion. (Non ! non ! à bas ! à l'ordre !) (U. B., supp., 14 janv.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII – A l'ordre ! Un décret du congrès... (Le bruit est
tellement fort que la voix éclatante de l'honorable membre en est
totalement couverte.) (U. B., supp., 14 janv.)
M. Alexandre Rodenbach, M. le chevalier de Theux de
Meylandt, M. Charles Rogier
parlent au milieu du bruit. (U. B., supp.,
14 janv.)
M.
le président agite vainement la sonnette. Après plusieurs essais infructueux, il
obtient un moment de silence et dit : Je rappelle à M. Maclagan qu'un décret du
congrès a prononcé l'exclusion à perpétuité de la famille des Nassau, et qu'il
manque à l'ordre en demandant le rappel d'un membre de cette famille.
(Une
triple salve d'applaudissements accueille les paroles de M. le président ;
cependant, un instant
après, le tumulte recommence, et quelques membres adressent de vives
interpellations à M. le président.) (U. B., supp., 14 janv.)
M.
le président d'une voix forte – Je connais mon devoir et je le ferai ; j'ai rappelé M.
Maclagan à l'ordre, c'est à vous à décider si ce rappel à l'ordre sera inséré
au procès-verbal. (U. B., supp., 14 janv.)
De toutes parts – Oui ! oui ! (U. B., supp.,
14 janv.)
- M.
Maclagan descend de la tribune. (C., 13 janv.)
M.
le chevalier de Theux de Meylandt et M.
Alexandre Rodenbach demandent la parole. (U. B., supp., 14
janv.)
M. le président – J'ai rappelé M. Maclagan à l'ordre,
vous avez décidé que ce rappel à l'ordre serait inséré au procès-verbal : tout est
dit. (U. B., supp.. 13 janv.)
M. Maclagan remonte à la tribune et demande à expliquer sa
pensée, en lisant la dernière phrase de son discours. (U. B., supp., 14 janv.)
M. le président lui accorde la parole. (U. B.,
supp., 13 janv.)
M. Maclagan – Il n'y a entre nous et cette famille qu'un
décret du congrès ; que ce décret soit rapporté. (Non ! non ! Nouvelle
explosion de cris et de huées.) (U. B., supp., 14 janv.)
M. Alexandre Rodenbach – Jamais nous ne
rappellerons cette famille maudite et assassine. (Bravo ! bravo !) (U.
B., supp., 14 janv.)
M. le baron de Stassart
– Vous insultez le
peuple et le congrès ! (J. F., 14 janv.)
Un autre membre – D'où sort cet homme ? (J. F., 14
janv.)
Plusieurs
voix – C'est
un Anglais ! que vient-il faire ici ? nous vendre ? (J. F., 14 janv.)
Un membre – Qu'il nous amène son prince d'Orange
! Mille poignards le frapperaient, s'il osait souiller le sol de
-
L'orateur descend de la tribune au milieu des huées. (Longue agitation.
Tumulte.)(J. F., 14 janv.)
M.
David monte
à la tribune (Les murmures qui ont accueilli la proposition de M. Maclagan
l'empêchent un moment de se faire entendre) – Messieurs, la situation géographique de
C'est par
l'impulsion de cette force des choses que les habitants de Verviers, dont j'ai
l'honneur d'être le bourgmestre, vous ont adressé, messieurs, une pétition pour
solliciter la réunion de
Cependant
quelques membres de cette assemblée, de même qu'un journal de Bruxelles qui,
semblable au caméléon, change souvent de couleurs, se sont permis de dire que
ces vœux n'étaient pas patriotiques, qu'ils étaient des mauvais citoyens et des
égoïstes ceux qui les avaient formés.
Eh bien !
messieurs, je viens déclarer à cette tribune que ces mêmes vœux, je me fais
gloire de les partager avec mes concitoyens, que je suis intimement convaincu
(et tout vrai patriote, faisant (page
125) abnégation de tout intérêt personnel, désirant pour sa patrie un
bonheur stable et immuable, sera de mon avis) ; je déclare, dis-je , qu'ils
sont plus sensés, qu'ils sont bien plus dans les fais principes politiques,
ceux qui forment ces vœux, que ceux qui veulent nous donner un enfant pour roi,
étayé par une faible régence.
L'éternel
refrain, la seule objection banale des adversaires de cette réunion, c'est la
menace d'une guerre générale.
Mais,
messieurs, cette guerre, ne voyez-vous pas qu'abstraction faite même de cette
réunion, elle est inévitable, elle est imminente ?
Cette
guerre, ce sera encore la force des choses ou plutôt la raison du siècle qui
l'amènera.
La raison
du siècle, c'est la souveraineté des peuples : ne fait-elle pas chanceler sur
leurs trônes tous les rois absolus ? Croyez-vous qu'ils ne feront pas de
nouveaux efforts pour s'y raffermir ?
Ces
efforts, ce sera la guerre de ce qu'on appelle la légitimité contre la liberté,
de la tyrannie contre la souveraineté des peuples ; elle sera terrible, mais de
courte durée : les peuples en sortiront vainqueurs.
Je
voterai pour les conclusions de la section centrale. Envoyons au roi des
Français une députation choisie dans le sein du congrès, et que sa mission ait
pour but de demander, si la réunion de
M. Raikem, rapporteur – Messieurs, depuis six jours la
section centrale vous a fait son rapport sur la proposition de M. Constantin
Rodenbach, relative au choix du chef de l'État.
Les
conclusions du rapport tendent à ce que le congrès nomme des commissaires pris
dans son sein, chargés de se rendre à Londres et à Paris. L'objet de leur
mission est désigné.
La
discussion a été ouverte sur les conclusions du rapport.
La seule
question est donc celle de savoir si le congrès nommera ou non des
commissaires. Les autres questions me semblent prématurées.
Ce
n'est donc pas encore le moment de discuter plusieurs questions déjà traitées à
l'avance.
1°
Ferons-nous un appel à la nation française, et nous déclarerons-nous partie
intégrante de son territoire ?
2°
Porterons-nous la couronne de
3°
Appellerons-nous un prince de son sang ?
4° Notre
choix se portera-t-il sur le fils de celui qui fut toujours fidèle à son père
adoptif, lorsque la fortune et les siens l'abandonnaient ?
5° Ne
reculerons-nous pas devant une minorité ?
Toutes ces
questions sont graves ; elles touchent à nos plus chers intérêts. Mais ce n'est
pas ici leur place.
Cependant,
je le reconnais, un orateur a été conséquent lorsqu'il a traité la question du
choix du chef de l'État ; et c'est ce que nous devions attendre du talent
éminent qui le distingue. L'honorable M. Blargnies a émis le vœu que les
commissaires fussent chargés d'offrir au roi Louis-Philippe le sceptre de
A mon
avis, c'est là procéder au choix du chef de l'État.
Je suis
loin de m'opposer à ce qu'on procède à ce choix ; mais on doit nous annoncer
d'avance quel sera le jour où l'on s'occupera d'un objet aussi important.
Dans
ce moment, je me borne à discuter les conclusions de la section centrale.
Et d'abord
je me fixe sur notre position à l'époque où la section centrale a délibéré, et
sur notre position actuelle.
Nous
devons en convenir, lors de l'examen de la section centrale, nous n'avions pas des
notions aussi exactes que celles qui nous sont parvenues depuis.
Depuis,
nous avons connu la pensée du cabinet français. Vous connaissez maintenant les
pièces qui sont parvenues au comité diplomatique. Vous avez entendu notre
honorable collègue, M. Gendebien ; il ne peut nous être suspect ; personne ne
peut nous inspirer une plus grande confiance : et ne peut-on pas dire que
l'obscurité qui pouvait exister auparavant est maintenant dissipée ? Que
pourraient nous apprendre des commissaires envoyés à Paris, que nous ne
sachions déjà ? Je concevrais cette mission, s'il s'agissait d'offrir au roi
Philippe, soit la couronne de
D'un autre
côté, la mission à Londres n'est-elle pas également dangereuse ? Et si les
grandes puissances tiennent à des traités que la force des (page 126) choses a détruits, n'est-il
pas à craindre qu'elles ne manifestent un vœu que nous ne devons ou ne pouvons
accueillir ?
Une
mission du congrès n'est-elle pas un acte trop solennel, pour qu'elle ne soit
pas chargée de porter une couronne ? Qu'on réfléchisse sur l'importance de la
démarche. Si elle est inutile, elle sera par là même nuisible.
Si nous
voulons
M. Deleeuw renonce à la parole. (U. B., supp.,
14 janv.)
M. Pirson – Malgré
l'énergie de mon caractère, je ne monte à cette tribune qu'avec émotion.
J'avais deviné juste en prévoyant qu'on enclaverait
M. le baron Joseph d’Hooghvorst – J'ai habité deux ans en Bavière et j'ai acquis, pendant ce séjour, la
certitude qu'un prince de la famille qui gouverne ce pays serait un excellent roi.
Je n'oublierai jamais les bontés dont j'ai été comblé par le roi de Bavière ;
mais une considération plus puissante que la reconnaissance, l'intérêt de ma
patrie, m'oblige à suspendre mon vote.
Je ne
crois pas nécessaire d'envoyer des commissaires à Paris, mais seulement à
Londres, où sont réunis les plénipotentiaires des cinq grandes puissances ; si
le choix du prince Othon est approuvé par eux, je lui donnerai ma voix. (U. B.,
supp., 14 janv.)
M. le président – La parole est à M. Alexandre
Rodenbach. (U. B., supp., 14 janv.)
M. Alexandre Rodenbach – Je partage
entièrement les opinions de MM. Henri de Brouckere et Raikem, mais je suis
encore trop agité pour pouvoir parler ; je renonce à la parole. (Hilarité.)
(U. B., supp., 14 janv.)
M. l’abbé Dehaerne
– Messieurs, lorsque, après la chute de Napoléon, nous relevâmes la tête,
croyant enfin avoir acquis le droit d'être Belges, nous étions loin de penser
que les puissances alliées méditaient de nouveaux projets d'asservissement, et
qu'elles ne nous affranchissaient du joug de
Eh !
messieurs, n'y a-t-il pas déjà quelque chose de déshonorant d'aller mendier de
cour en cour un souverain, et d'avouer, à la face de l'Europe, que
Mais il ne
suffit pas, dit-on, de consulter l'honneur national dans la question importante
qui nous occupe, il faut encore avoir égard aux intérêts du pays. Sans doute,
messieurs, et je croirais moi-même trahir mon mandat, si je ne tâchais de
concilier les intérêts de ma patrie avec la gloire du nom belge. Mais je
soutiens, moi, que nos intérêts sont liés avec ceux des peuples, et non avec
ceux des souverains ; je soutiens que si nous restons fidèles au grand principe
de liberté, si nous repoussons avec courage toute intervention de la part des
puissances, nous nous ferons respecter par les autres nations, nous entrerons
en relations avec elles, parce que les besoins réciproques nécessiteront ces
relations, et que nous ne permettrons pas que les puissances viennent les
traverser. Et savez-vous, messieurs, si la combinaison du prince Othon de
Bavière, ou telle autre qu'on vous présentera, sera dans les intérêts de
C'est en
désespoir de cause, disent beaucoup de partisans d'un prince indigène, que nous
renonçons à ce parti. Mais, messieurs, d'où vient votre faiblesse ? N'est-ce
pas de ce que vous n'osez pas vouloir ? il y a un mois ou trois semaines, vous
vous croyiez les plus forts, et avec raison. Quelle différence y a-t-il entre notre
position d'aujourd'hui (page 128) et
celle d'alors ? Qu'était-ce au commencement que ce parti diplomatique ?
C'étaient tout bonnement quelques hommes qui croyaient sans doute servir leur
pays en le livrant à l'influence des cours étrangères. Ce parti, messieurs,
n'est fort que de votre faiblesse. Vous n'avez qu'à résister aux insinuations
diplomatiques, vous n'avez qu'à repousser toute intervention pour faire fondre
ce parti, et même pour l'attirer à vous en désespoir de cause ; car il est
certain que la diplomatie est l'ennemie de
Il serait
inutile, messieurs, après tout ce que j'ai eu l'honneur de vous dire, d'ajouter
que je voterai contre les conclusions de la section centrale. Car, si les
intérêts de la patrie et la gloire nationale exigent, comme j'en suis
convaincu, que nous choisissions un chef indigène, l'ambassade qu'on nous
propose est non seulement inutile, mais même contraire au bien du pays. Au lieu
d'envoyer des commissaires à Londres et à Paris, rompons de notre côté cet
armistice qui est tout à fait dans l'intérêt de
M.
Helias d’Huddeghem – Messieurs, l’envoi de commissaires ne me paraît propre qu'à
prolonger nos incertitudes et à nourrir les espérances des partis. Le peuple
a-t-il consulté les cabinets pour faire sa révolution ? ne les consultons pas
pour nous reconstituer. Apprendrons-nous autre chose que ce que nous avons
appris par nos ambassadeurs actuels ? Et nos ambassadeurs actuels, membres de
notre assemblée, doivent-ils être mis sous la tutelle des collègues que nous
enverrions après eux ? Si nos diplomates ont encouru votre défiance, que ne les
rappelle-t-on ? A quoi d'ailleurs tendrait la nouvelle mission ? Veut-on
demander à Londres si les grandes puissances consentiraient à la réunion de
Tous les
Etats de l'Europe ont un intérêt direct à maintenir la paix, et un intérêt plus
direct encore à ne pas soulever contre eux l'opinion, reine du monde. C'est
l'opinion qui déconcerte les calculs des ambitieux, et les Belges peuvent s'en
rapporter à elle pour le triomphe de leur cause. Le droit de se constituer, le
droit de se choisir librement un chef ne peut leur être ravi ; aucun gouvernement
ne peut le leur contester. (J. F., 14 janv.)
M. le président – La liste des orateurs inscrits est
épuisée. (J. B., 14 janv.)
M.
Charles Rogier – Messieurs, au point où est arrivée la question, il me semble
facile de la résoudre. Il s'agit en effet de savoir si nous enverrons à Paris
et à Londres des commissaires chargés, au nom du congrès, de consulter les
puissances sur le choix de notre chef futur.
Quant à la
première démarche, celle d'envoyer des commissaires à Paris, je crois qu'il a
été surabondamment démontré qu'elle serait à la fois inutile et contraire à
notre dignité. Nous n'arriverions qu'à ce résultat, de placer le roi des
Français dans une position embarrassante et qui l'obligerait à faire une
déclaration publique et solennelle des intentions qu'il a déjà manifestées dans
une conversation intime et particulière.
Quant à
l'envoi de commissaires à Londres, je dis qu'il est inutile aussi, car déjà
deux membres du congrès, MM. Van de Weyer et Hippolyte Vilain XIIII ont une
mission auprès des envoyés des cinq grandes puissances : si c'est votre désir,
vous pouvez rappeler ces deux honorables membres ; mais si vous les croyez
incapables de vous faire de faux rapports et de trahir la confiance de la
nation, attendez le résultat de leur mission. (Bien ! bien ! Aux voix !)
D'ailleurs,
messieurs, remarquez que les orateurs qui ont appuyé la nomination de ces
commissaires (page 129) n'ont
nullement fixé leurs attributions. On se sentait embarrassé pour déterminer
leur mission, car on connaissait déjà l'avis de
Du
reste, si le choix du congrès doit être tel, qu'il ne pourra pas obtenir l'assentiment
des puissances de l'Europe, je me réunirai à l'opinion de M. Dehaerne, et je
voterai pour l'élection d'un prince indigène ; si alors deux ou trois
puissances ne nous tenaient pas parole, et violaient le principe de la
non-intervention, nous appellerions
M.
Meeûs croit que les envoyés du gouvernement provisoire suffisent
et qu'on peut leur envoyer des instructions spéciales. Il ne veut pas de
minorité, ni de régence ; en règle générale, mais avec la possession du
Luxembourg et la liberté de l'Escaut, il s'accommoderait encore du prince
Othon. (C., 13 janv.)
M.
Devaux – Messieurs,
cette séance a prouvé que si nous ne sommes pas d'accord sur ce que nous
voulons, du moins nous sommes unanimes sur ce que nous ne voulons pas. (Bravo
!) L'union n'est pas rompue ; quoi qu'on en dise, elle existe encore contre
nos ennemis communs. Il me semble, messieurs, que la question a été un peu
rétrécie ; on ne nous a présenté d'autre alternative qu'un prince français, le
duc Auguste de Leuchtenberg, ou le prince Othon de Bavière ; je crois
cependant qu'il est d'autres princes qui pourraient également nous convenir, et
sur lesquels on a passé légèrement peut. être ; et parmi ceux-là, je citerai le
prince de Saxe-Cobourg. Je sais la prévention qui existe dans cette assemblée
contre un prince anglais ; je sais que tout ce qui tient à l'industrie se
soulève contre un pareil choix : mais on oublie que le prince de Saxe-Cobourg
n'est Anglais que par alliance, et que s'il s'alliait à
L'opinion
générale est encore défavorable à ce prince parce qu'elle se prononce en faveur
d'un prince catholique. La manière dont j'ai voté sur les questions, mi-parties
politiques, mi-parties religieuses, qui ont été soumises à l'assemblée, me
donne le droit d'exprimer mon opinion librement sur ce sujet. J'ai pensé alors
que la loi ne devait être ni catholique ni anticatholique, mais seulement juste
et libérale ; et dans le même sens, je ne puis concevoir l'exclusion d'un
prince non catholique : s'il est catholique, c'est bien ; s'il ne l'est pas,
c'est bien encore, et je dirai plus, si dans l'élection il pouvait y avoir une
préférence, elle devrait être pour un prince non catholique ; car, d'après les
bases de notre future constitution, il n'y a plus qu'une oppression à redouter,
c'est celle de la majorité. Toute notre organisation politique repose en effet sur
le système électif, et le système électif est le règne de la majorité. La
majorité étant catholique chez nous, il serait peut-être à désirer que le chef
du pouvoir exécutif ne le fût pas.
Je crois
cependant que c'est cette considération de religion qui a fait exclure
plusieurs autres princes allemands qui auraient pu nous convenir, et je pense
que nous ne sommes pas assez éclairés sur tous les candidats, pour faire notre
choix avec parfaite connaissance de cause.
Je crois
que la nomination de commissaires qui seraient envoyés à Paris, nous exposerait
à l'humiliation d'un refus ; mais comme je trouve que la question n'est pas
assez éclaircie, quant aux princes étrangers que nous pourrions élire, je
demande que, suivant les conclusions de la section centrale, on nomme quatre
commissaires, non pour partir par la poste, mais pour diriger, de concert avec
le comité diplomatique et le gouvernement provisoire, les démarches à faire
pour le choix du chef de l'État.
Je
viens de dire ce qu'il faut faire si nous croyons devoir élire un prince
étranger ; mais dans mon opinion (cette opinion il y a déjà longtemps que je
l'ai exprimée), nous devons choisir un prince indigène : s'il en est autrement,
notre indépendance ne sera pas complète ; nous serons gouvernés par un prince
qui arrivera au milieu de nous sans nous comprendre, et sera comme un élément
hétérogène dans notre organisation future. Ce choix d'un prince étranger
entraîne d'ailleurs mille inconvénients, au lieu de nous permettre de sortir
avec rapidité de la position fausse (page
130) où nous nous trouvons ; les entraves se multiplient autour de
nous, et nous sommes entraînés dans d'interminables lenteurs.
L'élection d'un prince indigène est le moyen le plus sage de
déjouer les intrigues qui peuvent être ourdies contre nous, le moyen le plus
digne de consolider notre révolution : les puissances étrangères n'ont aucun
motif d'intervenir pour empêcher ce choix ; elles en avaient bien davantage
pour s'élever contre le principe de notre révolution. Ne nous faisons pas
illusion, messieurs, ce n'est pas le prince indigène qu'elles redoutent, c'est
l'exemple que nous avons donné à leurs peuples. (U. B., supp., 14 janv.)
- On demande la clôture. (U. B., supp.. 14 janv.)
M. Van Meenen
– La clôture serait une injustice envers les membres non présents qui se
sont proposé de parler demain. (J. B., 14 janv.)
- La clôture est rejetée. (J. B., 14 janv.)
La séance est levée à dix heures et demie. (P. V.)