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Congrès national de Belgique
Séance du mercredi 16 février 1831

(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles, Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 2)

(page 525) (Présidence de M. de Gerlache)

La séance est ouverte à midi et demi. (P. V.)

Lecture du procès-verbal

M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il est adopté. (P. V.)

Pièces adressées au Congrès

M. Liedts, secrétaire, présente l'analyse des pétitions suivantes :

Les bourgmestre et échevins de la ville de Herve demandent qu'il soit inséré dans la loi électorale que les électeurs de chaque district se réuniront au chef-lieu de leurs cantons respectifs.


Treize habitants de Namur prient le congrès de ne pas défendre la sortie des écorces de chêne.


Soixante habitants de Boussu déclarent adhérer au choix fait par le congrès du duc de Nemours.


M. La Croix, garde national à Toulouse, engage le congrès à proposer la réunion de la Belgique à la France.


Deux cent quatre-vingts habitants de Merchtem prient le congrès de maintenir définitivement la recomposition de leur administration communale. (J. F., 18 fév. et P. V.)


- Ces pièces sont renvoyées à la commission des pétitions. (P. V.)


M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit une lettre de M. de Bousies annonçant qu'une indisposition l'empêche de se rendre aux séances du congrès.


Pareille lettre est adressée au congrès par M. Collet. (U. B., 18 fév.)


- Pris pour notification. (P. V.) .


M. le président – L'ordre du jour est la suite de la discussion de la loi électorale, mais M. Surmont demande la parole. (J. F., 18 fév.)

Motion d'ordre relative à l'arrestation d'un imprimeur soupçonné d'orangisme

M. Surmont de Volsberghe – Messieurs, un événement extraordinaire dont j'ai failli être hier la victime, ainsi que mon honorable collègue, M. Rodriguez d'Evora y Vega m'oblige à monter en ce moment à cette tribune. Je m'abstiendrais de vous parler de moi en cette occasion, s'il ne s'agissait autant de l'ordre public que d'un outrage fait à des particuliers. D'un autre côté, les journaux ont publié divers rapports inexacts et m'ont fait tenir des discours auxquels je n'ai jamais pensé. Il importe donc de rectifier les faits.

Étant sortis hier de mon logement, nous nous dirigeâmes, M. Rodriguez et moi, vers la demeure de M. Plaisant. Arrivés près de l'hôtel de ville, nous y vîmes un rassemblement considérable de peuple. Ayant demandé quelle était la cause de cette réunion, on me répondit qu'on venait d'arrêter un imprimeur orangiste. Nous voulions continuer notre route, mais la foule était telle que nous ne pûmes passer et que nous prîmes une rue détournée pour nous rendre à notre destination. Arrivés près du Mannekenpis (on rit), nous entendîmes derrière nous divers cris. Ce fut M. d'Evora qui me les fit remarquer en me disant qu'ils s'adressaient à nous ; j'étais alors non loin de l'église du Bon-Secours et j'y entrai poursuivi par les cris : «Ce sont des orangistes !» Je demandai si c'était à nous que ces qualifications s'adressaient ; on nous répondit que oui et que nous avions voulu défendre et délivrer l'imprimeur arrêté. Il est inutile, messieurs, de vous faire sentir l'absurdité de prétendre que deux hommes sans armes eussent voulu en arracher un autre des mains d'une multitude de mille personnes environ. J'affirme ici que je ne savais rien de cette arrestation ; cependant les cris continuaient contre nous sous le portail de l'église, lorsqu'un officier de la garde civique nous prit sous sa protection et nous emmena, mais arrivés au coin de l'hôtel de ville, nous courûmes le danger de perdre la vie et nous fûmes assaillis de coups de pied et de poing.

Nous étions loin de croire que dans la ville de (page 526) Bruxelles on pût être assommé sur une simple allégation. Aidés de l'officier auquel nous devons le témoignage de la plus vive reconnaissance, nous parvînmes à gagner le corps de garde de l'Amigo, où nous nous réfugiâmes et où nous restâmes trois heures sans pouvoir en sortir, et ce ne fut que sous la protection d'un commissaire de police, de M. le général d'Hooghvorst et d'un détachement nombreux de la garde civique, que nous pûmes nous échapper.

Voilà, messieurs, les faits tels qu'ils se sont passés. Permettez-moi de vous faire connaître comment le journal l'Émancipation les dénature. (Ici l'orateur lit ce journal, le dément phrase par phrase et déclare que tout l'article est mensonger.) Un autre journal a été jusqu'à dire que j'étais chez l'imprimeur Sacré, qui a été arrêté. J'avais porté au Courrier un article où les faits étaient exposés, mais cet article a été tronqué. (V. P., 18 fév.)

M. le baron Joseph d’Hooghvorst – Il est bon de faire observer que c'était un homme bien mis qui vous arrêta dans le portail de l'église. (J. B., 18 fév.)

M. Surmont de Volsberghe – Il avait un chapeau et une petite veste. (J. B., 18 fév.)

M. Constantin Rodenbach – Assez ! assez ! (J. B., 18 fév.)

On passe à la discussion du projet de loi électorale. (J. F., 18 fév.)

Projet de loi électorale

Discussion des articles

Titre IV. Des éligibles

Articles 41 et 42

« Art. 41. Pour être éligible à la chambre des représentants, il faut :

« 1° Être Belge de naissance ou avoir obtenu la grande naturalisation ;

» 2° Jouir des droits civils et politiques ;

» 3° Etre âgé de vingt-cinq ans accomplis ;

» 4° Etre domicilié en Belgique. »


« Art. 42. Pour être éligible au sénat, il faut :

« 1° Etre Belge de naissance ou avoir obtenu la grande naturalisation ;

« 2° Jouir des droits civils et politiques ;

« 3° Etre domicilié en Belgique ;

« 4° Etre âgé au moins de quarante ans.

« 5° Payer en Belgique au moins mille florins d'impositions directes, patentes comprises ;

« Dans les provinces où la liste des citoyens payant mille florins d'impôt direct n'atteindrait, pas la proportion de 1 sur 6000 âmes de population, elle sera complétée par les plus imposés de la province, jusqu'à concurrence de cette proportion de 1 sur 6000. » (A. C.)

M. de Robaulx observe que ces deux articles se trouvent déjà dans la constitution et qu'il serait inutile de les reproduire ici. (J. F., 18 fév.)

M. Henri de Brouckere demande la suppression des deux articles, et propose de dire simplement que les éligibles doivent avoir les qualités requises par la constitution. (J. F., 18 fév.)

M. Le Bègue et M. Raikem demandent que dans ce cas les articles de la constitution soient répétés ici en note. (J. F., 18 fév.)

- Des voix – C'est l'affaire du bureau. (J. F., 18 fév.)

- L'assemblée décide que les articles 41 et 42, qui ne peuvent être discutés puisqu'ils sont textuellement extraits de la constitution, seront insérés dans la loi électorale en lettres italiques ou avec guillemets et avec indication entre parenthèses du numéro des articles dont ils sont la copie. (P. V.)

Articles 43 et 44

« Art. 43. Tous les ans, du 15 avril au 1er mai, le conseil provincial dressera la liste des individus éligibles au sénat, conformément à l'article précédent. Cette liste contiendra, en regard du nom de chaque individu inscrit, la date de sa naissance et l'indication des lieux où il paye ses contributions.

« Les dispositions de l'article 2 de la présente loi sont applicables aux éligibles. » (A. C.)

M. Jean Goethals propose comme troisième paragraphe l'amendement suivant :

« Les listes ainsi formées seront immédiatement envoyées aux commissariats de district, où les électeurs pourront en prendre connaissance. » (A.)

M. Lebeau propose de dire : la députation permanente du conseil provincial, au lieu de : le conseil provincial. (A.)

- Cet amendement est adopté. (P. V.)

M. le baron Beyts demande de discuter l'amendement de M. Goethals à l'article 44. (J. F., 18 fév.)

M. Jean Goethals retire son amendement pour le représenter à l'article 44. (C., 18 fév.)

M. Jacques propose de dire au deuxième paragraphe :

« Les dispositions des articles 2, 3 et 4 de la présente loi sont applicables aux éligibles. » (P. V., et A.)

- Cet amendement est adopté ainsi que l'ensemble de l'article amendé. (P. V.)


« Art. 44. Chacun pourra prendre inspection de (page 527) la liste des éligibles au greffe du conseil provincial. » (A. C.)

M. Jean Goethals propose d'ajouter : et aux commissariats de district où elle sera également déposée. (A.)

M. de Tiecken de Terhove propose d'ajouter : « Ainsi qu'au secrétariat de chaque commune où elle devra être déposée. » (A.)

M. Jean Goethals se rallie à cet amendement. (C., 18 fév.)

M. Lebeau – Cela est inutile, le mémorial administratif est envoyé à chaque commune. (J. B., 18 fév.)

- L'amendement de M. de Tiecken de Terhove est adopté ainsi que l'article. (P. V.)

Article 5 et 45 :

« Art. 45. La liste ne portera que les noms des éligibles domiciliés dans la province.» (A. C.)

M. de Robaulx propose de consacrer pour les éligibles une disposition semblable à celle qui a été consacrée pour les électeurs par l'article 5 qui a été adopté dans la séance du 14 février. (U. B., 18 fév.)

M. Raikem propose l'addition suivante :

« Les incapacités prononcées par l'article 5 sont applicables aux éligibles. »

Cette disposition, dit-il, est nécessaire, car le Code pénal n'a pu interdire les droits politiques qu'à certains condamnés correctionnels, parce que la constitution de l'an VIII, sous l'empire duquel ce Code fut fait, avait déjà privé de ces droits le condamné à des peines afflictives ou infamantes. L'article 50 de la constitution ne s'oppose pas à mon amendement. (J. B., 18 fév.)

M. Van Snick – L'article 5 prive des droits politiques les accusés. On peut être accusé sur des indices ; ne faudrait-il pas faire une exception en leur faveur ? On pourrait également admettre les réhabilités ; leur rendre leurs droits est le seul moyen de laisser une porte ouverte au repentir. (J. B., 18 fév.)

M. Henri de Brouckere combat l'amendement de M. Raikem. La constitution n'a laissé au législateur que la faculté de déterminer les conditions pour être électeur, et non les conditions qu'il faut réunir pour être éligible. (C., 18 fév.)

M. Raikem – Cette observation n'est pas juste. La constitution abandonne au législateur le soin de déterminer les conditions requises pour exercer les droits politiques. Or, le droit électoral constitue un droit politique. Nous pouvons donc déterminer les conditions qui en confèrent l'exercice. (C.. 18 fév.)

M. Henri de Brouckere – Si la législature peut régler les conditions de l'exercice des droits électoraux, elle pourra, tous les ans, introduire des modifications aux qualités requises pour être électeur. Ainsi rien n'empêcherait que les chambres ne déclarassent, dans une de leurs prochaines sessions, que les fonctionnaires non honorablement démissionnés ne pussent participer aux élections. Or, où nous conduirait l'admission d'une semblable faculté ? (C., 18 fév.)

M. Van Snick propose le sous-amendement suivant :

« La mise en accusation mentionnée en l'article 5 n'est point comprise parmi les causes d'inéligibilité. » (A.)

M. Delwarde – Il résulte des dispositions de la constitution que ce n'est que la condamnation à des peines qui peut priver un éligible de ses droits politiques. Les faillis n'ont pas toujours encouru des peines, cette qualité ne peut donc les priver des droits politiques ; il faut les distinguer des banqueroutiers. Souvent le failli trompe ses créanciers ; le législateur a été obligé de faire des règles générales. (J. B., 18 fév.)

M. Raikem – Que l'on intercale dans mon amendement les mots : sauf la mise en accusation. (C., 18 fév.)

M. de Robaulx propose, pour couper court à toute difficulté, de retrancher à l'article 5 les mots : ou ceux qui se trouvent en état d'accusation. (C., 18 fév.)

M. Van Meenen – J'appuie d'autant plus l'opinion de M. de Robaulx, que sous l'ancien gouvernement on avait organisé un système de poursuites et d'accusations, dans la vue de faire frapper des gens d'incapacité. (J. B., 18 fév.)

- La proposition de M. de Robaulx est adoptée ; par conséquent l'amendement de M. Van Snick et le sous-amendement de M. Raikem tombent. (C., 18 fév.)

M. le baron Beyts – Puisque nous sommes à l'article 5, il y aurait encore une amélioration à faire pour que la réhabilitation puisse avoir lieu. (J. F., 18 fév.)

M. Raikem – L'intention de l'assemblée en adoptant l'article 5 ne peut avoir été d'exclure les réhabilités. (J. B., 18 fév.)

M. Lebeau – Un principe généralement reconnu maintenant, c'est que le condamné doit rentrer dans le sein de la société après avoir subi sa peine, si l'on ne veut pas qu'il considère pour toujours cette société comme son ennemie. (J. B., 18 fév.)

M. Raikem – D'après ce raisonnement, avoir (page 528) fini sa peine serait une véritable réhabilitation. (J. B., 18 fév.)

M. de Robaulx Les condamnés ne doivent pas être admis par cela seul que leur peine est finie, mais il faut encore qu'ils soient réhabilités. Les lois existantes exigent pour cette réhabilitation des garanties suffisantes. (J. B., 18 fév.)

M. Van Meenen propose une nouvelle rédaction de l'article 5 :

« Ne peuvent être électeurs ni en exercer les droits les condamnés à des peines afflictives ou infamantes, ni ceux qui sont en état de faillite déclarée ou d'interdiction judiciaire. » (J. F., 18 fév.)

- L'article ainsi amendé est adopté. (P. V.)

On revient à l'article 45. (U. B., 18 fév.)

M. Van Snick propose l'addition suivante au premier amendement de M. Raikem :

« Néanmoins l'incapacité prononcée contre les personnes condamnées à des peines afflictives et infamantes cessera par la réhabilitation du condamné. » (A.)

M. de Robaulx – La réhabilitation assimilant le condamné aux autres citoyens, elle le fait jouir des droits politiques. Il est inutile d'en parler ici. (J. B., 18 fév.)

- L'amendement de M. Van Snick est rejeté. (P. V.)

Celui de M. Raikem est mis aux voix et adopté. (P. V.)

M. Raikem demande que la disposition concernant les incapacités soit placée immédiatement après l'article 42. (J. B., 18 fév.)

- Cette proposition est adoptée ; en conséquence la disposition formera un article 45 nouveau. (P. V.)

L'article 45 est ensuite mis aux voix et adopté. (P. V.)

Articles 46 et 47

L’assemblée passe à l'art. 46 ainsi conçu :

« Art. 46. Les dispositions des articles 11, 12 et 13 du présent décret sont applicables aux réclamations qui pourront être faites contre les listes des éligibles.»

- Adopté. (A. C., et P. V.)


« Art. 47. La liste, par ordre alphabétique, sera affichée dans la salle lors de l'élection. Il y sera joint l'observation que les habitants des autres provinces, payant le cens de mille florins et âgés de quarante ans, sont aussi éligibles, et que l'élection commence par le sénat. »

- Adopté. (A. C., et P. V.)

Article 48 : déclaration d'option électorale en cas d'élections multiples

« Art. 48. Le député élu par plusieurs districts électoraux sera tenu de déclarer son option à la chambre, dans les huit jours d'ouverture de la session qui suivra l'élection double ; à défaut d'option dans ce délai, il sera décidé, par la voie du sort, à quel district le député appartiendra. » (A. C.)

M. Fleussu propose les dispositions additionnelles suivantes :

« Celui qui aura été élu en même temps sénateur et membre de la chambre des représentants, devra, dans le même délai, adresser sa déclaration d'option aux chambres.

» Il en sera de même de celui qui, déjà membre de la chambre des représentants, sera élu sénateur, et réciproquement. » (P. V., et A.)

M. Jean Goethals présente un amendement conçu en ces termes :

« Le député élu soit à la chambre des représentants, soit au sénat, par plusieurs districts électoraux, sera tenu de déclarer son option dans les trois semaines qui suivront l'élection double, et il en donnera connaissance au gouverneur de la province, qui ordonnera les mesures nécessaires pour son remplacement. » (A.)

M. Brédart propose de remplacer l'article 48 par une disposition ainsi conçue :

« Le député élu par plusieurs districts électoraux sera censé élu : 1° par celui où il a son principal domicile ; 2° par celui où il a obtenu le plus de voix, s'il n'est domicilié dans aucun d'eux. (A.)

M. de Robaulx – Ainsi eût-il moins de voix dans le district où il a son domicile, il y sera cependant élu. C'est un moyen de faire tomber ceux qui obtiendraient des voix dans d'autres districts, où l'on fera courir le bruit que le candidat sera élu dans le district où il a son domicile. (J. B.. 18 fév.)

M. Fleussu développe son amendement, destiné, dit-il, à combler une lacune de l'article 48. (E., 18 fév.)

M. de Robaulx fait observer que, si le député est tenu d'opter dans les huit jours de l'ouverture de la session, il pourra arriver que, la vérification des pouvoirs n'étant pas faite, il se trouve avoir opté pour un district dont les élections seront ensuite annulées.

L'honorable membre, pour parer à cet inconvénient, propose de dire que l'option devra être faite « dans les huit jours qui suivront la vérification des pouvoirs, » au lieu de : dans les huit jours d'ouverture de la session qui suivra l'élection double. (U. B., 18 fév. et P. V.)

M. Jean Goethals et M. Brédart retirent leurs amendements. (P. V.)

- L'article amendé par M. de Robaulx est adopté. (P. V.)

On met aux voix la disposition additionnelle de (page 529) M. Fleussu ; elle est également adoptée. (P. V.)

Dispositions générales

Article 49

« Art. 49. En cas de vacance par option, décès, démission ou autrement, le collège électoral qui doit pourvoir à la vacance sera réuni dans le délai d'un mois. » (A. C.)

M. De Lehaye propose de nommer autant de suppléants que de députés à élire. (A.)

M. Jean Goethals présente l'amendement suivant :

« Dans les élections pour l'une et l'autre chambre, les bulletins porteront sur un nombre de candidats double de celui des députés à élire. Les élus qui auront obtenu le plus de voix après les députés seront proclamés suppléants.

« En cas de vacance par option, décès, démission ou autrement, il sera pourvu au remplacement du député, par l'appel et l'admission du suppléant qui aura obtenu le plus de suffrages. » (A.)

M. Destouvelles déclare que la question des suppléants a été déterminée par la commission chargée de rédiger le projet de loi, et qu'elle a été rejetée. Il pense cependant qu'il y a des inconvénients à ne pas les admettre. (E., 18 fév.)

M. De Lehaye – Les suppléants ne sont jamais que les élus du parti qui forme la minorité. (J. B., 18 fév.)

M. Van Snick – La constitution n'a pas décidé qu'il y aurait des suppléants. (J. B., 18 fév.)

M. Jean Goethals – Les plus dignes remplaceront successivement les députés. (J. B., 18 fév.)

M. Destouvelles – Dans les élections pour le congrès, la plupart des électeurs se sont retirés après l'élection des députés effectifs. D'un autre côté, si vous les réunissez à des époques trop rapprochées, vous aurez de la peine à les rassembler. Je livre le pour et le contre à vos méditations. (J. B., 18 fév.)

M. Destriveaux oppose à la proposition de M. de Lehaye l'article 10, qui repousse l'élection des suppléants, et demande la question préalable. (C., 18 fév.)

M. De Lehaye – J'observerai sur l'amendement de M. Goethals que ce n'est pas la place que le candidat occupe sur la liste, mais le nombre de voix qu'il a obtenu, qu'il faut consulter. (J. B., 18 fév.)

M. Van Meenen parle contre la question préalable. L'article 10, dit-il, concerne le cas où la liste des députés et des suppléants est épuisée. (C., 18 fév.)

M. de Robaulx demande la question préalable en vertu de l'article 26 de la constitution. (J. B., 18 fév.)

M. le chevalier de Theux de Meylandt, rapporteur, est entendu. (J. F.,18 fév.)

- La question préalable est mise aux voix et adoptée. (P. V.)

L'article 49 est adopté. (P. V.)

Article 50

« Art. 50. Lorsque les chambres sont réunies, elles ont seules le droit de recevoir la démission de leurs membres ; lorsqu'elles ne sont pas réunies, la démission peut être notifiée au ministre de l'intérieur.

« De même, la déclaration d'option peut être envoyée au ministre de l'intérieur par le député élu dans plusieurs districts. » (A. C.)

M. de Robaulx demande la suppression du dernier paragraphe. (U. B., 18 fév.)

- Cette suppression est ordonnée ; le reste de l'article est adopté. (P. V.)

Article 51

« Art. 51. Dans toutes les villes non comprises au présent tableau, le cens électoral sera le même que celui pour les campagnes des provinces auxque1les elles appartiennent. (A. C.)

M. Lebeau propose de s'occuper du tableau du cens de l'électeur, avant de discuter cet article.

- Cette proposition est adoptée. (U. B., 18 fév.) (P. V.)

Tableau du cens de l’électeur

« 1 ° Brabant méridional.

« Les campagnes, 40 florins.

« Bruxelles, 100

« Nivelles, 50

« Louvain, 75

« Tirlemont, 60

« Diest, 50

« 2° Limbourg.

« Les campagnes, 30

« Maestricht, 60

« Tongres, 40

« Hasselt, 40

« Saint-Trond, 40

« Ruremonde, 40

« 3° Liége.

« Les campagnes, 35

« Liége, 80

« Verviers, 50

« Huy, 40

« 4° Flandre orientale.

« Les campagnes, 40

« Gand, 100

« Lokeren, 55

(page 430) « Saint-Nicolas, 50 florins.

« Alost, 50

« Renaix, 50

« 5° Flandre occidentale.

« Les campagnes, 40

« Bruges, 75

« Courtrai, 60

« Ypres, 50

« Ostende, 50

« Thielt, 50

« Roulers, 50

« 6° Hainaut.

« Les campagnes, 40

« Mons, 65

« Tournay, 65

« Ath, 50

« Charleroy, 50

« Soignies, 50

« 7° Namur.

« Les campagnes, 30

« Namur, 50

« 8° Anvers.

« Les campagnes, 40

« Anvers, 100

« Malines, 50

« Lierre, 45

« Turnhout, 45

« 9° Luxembourg.

« Les campagnes, 30

« Luxembourg, 40.» (A. C.)

M. Charles de Brouckere – Je propose de fixer un cens uniforme pour tout le pays, sauf, après avoir déterminé le taux, à insérer dans la loi que, dans les arrondissements où il n'y aurait pas un électeur sur cent âmes de population, on appellerait les plus imposés pour atteindre cette proportion. (A.)

M. l’abbé de Foere propose, en remplacement du tableau, l'article suivant :

« Le cens électoral est fixé, pour tous les contribuables, à 20 florins. » (A.)

M. Alexandre Rodenbach demande que le cens soit fixé à 20 florins pour tous les électeurs des campagnes. (P. V., et A.)

M. l’abbé de Foere – En thèse générale, les révolutions se font contre les privilèges et les exceptions. Elles ont leur principe dans le sentiment heurté de la justice distributive. Appelés par notre mandat à organiser, à consolider la révolution, en méconnaîtrons-nous les résultats naturels : l'égalité de tous devant la loi et l'admissibilité de tous aux emplois ? Que devient cette égalité, que devient cette admissibilité, que devient la constitution elle-même là où le grand nombre est frustré des droits politiques ? Quoi ! vous établissez un principe et vous reculez devant ses conséquences, et non contents d'exclure du bénéfice légal les citoyens qui ne payent pas 20 florins de contribution, vous voulez, en élevant ce minimum, écrire dans la loi un privilège d'autant plus odieux qu'il devient plus exclusif ?

Dans plusieurs grandes villes d'Angleterre, le droit électoral est exercé par tous les contribuables, quelle que soit la quotité de leurs contributions ; dans les comtés, les Anglais sont électeurs, quand ils justifient d'un revenu de 40 schellings ; et la nation veut encore agrandir le cercle électoral dans les localités où d'anciens privilèges l'avaient resserré ! En France, où les libertés publiques n'ont jamais été que des dérisions, la masse des citoyens libres tend à reconquérir les droits politiques, et les hommes de la résistance s'y opposeront vainement, parce que toute résistance contre la justice finit par être brisée.

Et vous, messieurs, au milieu de ce mouvement électoral, vous prétendriez rétrograder vers les anciens abus, contre lesquels la société moderne réclame de toutes parts !

Comment persuader, en principe général, que des électeurs, payant 49 et 99 florins, ne soient pas aussi Belges que ceux à 50 ou 100 ?

Messieurs, la justice n'a pas toujours présidé à nos délibérations ; tantôt la peur d'inconvénients inséparables de toute institution humaine, tantôt des comparaisons avec des États plus ou moins absolus, tantôt des souvenirs gothiques nous ont fait subordonner les éléments de la justice à des intérêts secondaires. Je descendrai néanmoins, pour mieux vous convaincre, à des considérations d'opportunité.

On ne peut se dissimuler les dangers de la patrie ; il faut donc rallier tous les citoyens à sa défense. Est-ce en distribuant la nation en privilégiés et en ilotes qu'on y réussira le mieux ? Espérez-vous sérieusement que des contribuables ravalés à ce point continueront à payer et à se battre pour le maintien de leur esclavage ? Au jour du péril, les petits contribuables ont exercé au prix de leur sang le privilège des dangers, et vous leur contesteriez le droit commun !

De tout temps la tendance du despotisme a été d'isoler un grand nombre d'existences sociales, d'opprimer une classe par l'autre et de partager l'espèce humaine en deux parts, dont l'une est condamnée à tracer comme le bœuf un sillon uniforme. Cette politique, messieurs, sera-t-elle la vôtre ?

(page 431) Si nous voulons développer l'esprit public, il nous faut une loi d'élections large et libérale. En vain voudriez-vous rester stationnaires, vous ne ferez abdiquer à personne sa prétention au droit de cité.

Ici, je rencontre les craintes et des grands propriétaires et des hommes timides qui, bien que justes et probes, craignent de se rallier de prime abord à une réparation réelle et complète des abus. J'opposerai aux résolutions incertaines l'autorité de l'exemple.

C'est un fait digne de remarque qu'à l'exception de Wyndham, il n'est, en Angleterre, aucun homme d'État qui ne se soit plus ou moins déclaré partisan de la réforme parlementaire, et que tandis que parmi nous on craint que l'action populaire compromette la sécurité des fortunes, en Angleterre, le riche croirait exposer ses propriétés s'il contestait au petit contribuable l'imprescriptible droit du citoyen ; et la raison en est bien simple. Que disent, dans les assemblées populaires, les défenseurs de l'équité aux vivants d'abus : Ou abandonnez vos bourgs et vos dîmes, ou résignez-vous au sacrifice de votre argent et de vos châteaux.

La grande propriété et l'épiscopat anglican commencent à comprendre qu'il s'agit de renoncer à des prétentions insoutenables, et les incendies qui désolent l'Angleterre achèvent la démonstration. Craint-on que les prolétaires ne se livrent à un pillage général, qu'on leur fasse, de tous les contribuables associés dans l'action politique, une barrière protectrice de l'ordre et de l'État ?

La qualité de Belge n'est qu'une vaine dénomination pour qui n'a pas le droit de cité…

Après une apologie étendue et animée des institutions de la Grande-Bretagne, l'orateur termine en ces termes – De quelque côté donc que j'envisage la question du cens, je vois qu'il est juste, utile, nécessaire que tous les contribuables exercent les droits électoraux. Mais puisque vous avez posé des bornes qui ne peuvent être dépassées, je vous propose d'admettre au moins les contribuables à 20 florins. Si la constitution avait été soumise dans son ensemble à notre adoption, je l'aurais rejetée à cause de l'article excluant ceux qui participent aux charges de l'État pour moins de 20 florins ; car jamais je ne composerai avec l'injustice. (J. F., 18 et 21 fév.)

M. Lebeau – Je suis surpris que M. le président n'ait pas rappelé à l'ordre l'orateur qui descend de la tribune ; après s'être servi d'expressions peu parlementaires, il a manqué ouvertement à l'assemblée ; il a dit que son amendement était d'une justice évidente, et cependant qu'il prévoyait qu'il serait repoussé par ses collègues... (J. F., 18 fév.)

M. le président – Ce n'est pas ainsi que j'ai compris les paroles de M. de Foere. (J. F., 18 fév.)

M. Lebeau – M. de Foere veut nous mener au suffrage universel, son système ferait reculer Hunt et Cobbett. En établissant un cens quelconque, quand il serait de cinquante cents, il transige avec son principe, car ceux qui payent ce cens forment une aristocratie à l'égard de ceux qui ne payent rien. Il faut bien que l'on s'arrête quelque part. Ceux qui n'ont pas étudié superficiellement les élections anglaises, savent que la manière dont s'y obtiennent les suffrages sont un véritable scandale. Il est tel membre qui a avoué en plein parlement avoir acheté pour 50.000 francs de suffrages. En Angleterre, les élections sont aristocratiques, précisément parce qu'elles descendent jusqu'à 40 schellings, car les électeurs sont à merci de la grande propriété. Si vous réduisez le cens à 20 florins dans les campagnes, vous établissez un privilège en leur faveur, vous placez les villes dans une position tout à fait exceptionnelle. Vous aurez de plus une influence nobiliaire et cléricale. En France, ceux qui sont à la tête du mouvement ont déclaré que quand le cens serait réduit à 200 francs, ils considéreraient la révolution comme consommée. (J. B., 18 fév.)

M. l’abbé de Foere demande la parole pour un fait personnel et pour répondre à quelques arguments de M. Lebeau – L'honorable membre a cru devoir exprimer son étonnement de ce que M. le président ne m'a pas rappelé à l'ordre, lorsque j'ai dit que, malgré l'évidente justice sur laquelle mon amendement était fondé, je le proposais sans confiance aucune qu'il serait adopté. Il en a conclu que j'avais manqué à la dignité de l'assemblée. Si j'avais avancé que j'avais la persuasion que le congrès aurait rejeté ma proposition, quoiqu'il partageât mon opinion sur l'évidente justice sur laquelle elle était fondée, l'honorable membre aurait été en droit de me faire rappeler à l'ordre. Mais, comme malheureusement les principes de justice, quelque absolus qu'ils soient en eux-mêmes, ne sont souvent que relatifs, selon la diversité des opinions, je n'ai exprimé que la mienne propre. Il restait à l'assemblée à la partager ou non.

M. Lebeau a trouvé que j'étais tombé dans une contradiction. J'ai dit que jamais je ne transigeais (page 432) avec aucun principe de justice ; le fait est vrai, mais la conséquence que l'honorable membre en a tirée est inexacte. j'aurais dû, selon lui, ne proposer aucun cens électoral et attribuer le droit d'élire à tous les contribuables. J'ai dit moi-même que cette conséquence était renfermée dans le principe, mais. puisque le congrès avait posé les bornes de 20 florins, je n'étais plus en droit de les franchir. Il m'oppose donc une objection qu'il aurait dû adresser au congrès : car c'est l'article 47 de la constitution qui m'a empêché de pousser mon principe électoral dans ses dernières conséquences. M. Lebeau a cru découvrir une autre inconséquence. J'ai dit que je reconnaissais autant de titres au droit électoral aux citoyens qui, dans les grandes villes, payent 99 florins de contribution et à ceux qui, dans les petites villes, en payent 49, qu'à ceux qui en payent respectivement 100 et 50. De là l'honorable membre a conclu que la même objection subsistait, si le cens électoral était réduit à de moindres proportions. Il eût eu raison, si j'avais proposé, comme dans le tableau, un cens proportionné et comparatif, mais j'en ai présenté un qui est uniforme, et dès lors son objection s'évanouit.

L'honorable membre a entendu que j'avais fait l'éloge du radical Hunt. Je n'ai prononcé aucun mot qui y eût quelque rapport. J'ai énoncé un simple fait qui se rattache à ce célèbre personnage. J'ai dit qu'il venait d'être nommé membre du parlement d'Angleterre, et que les préventions qui avaient plané sur lui commençaient à disparaître ou que déjà elles avaient disparu. C'est un fait à vérifier par les journaux anglais. M. Lebeau trouve encore une objection dans l'exemple que j'ai puisé dans les abus des élections populaires en Angleterre et dans l'achat des votes anglais. J'ai proposé cette partie de la législation anglaise comme un exemple à suivre, mais je n'ai rien dit pour défendre les abus qui s'y rattachaient. J'ai défendu le principe de ce système et non pas les effets abusifs qu'il produit de temps en temps et que le préopinant a exagérés ; ils sont en outre sans conséquence. Existe-t-il d'ailleurs aucune institution humaine dont on n'abuse pas ? et M. Lebeau lui-même pourrait-il nous présenter un système électoral qui n'ait pas ses abus ? Pourra-t-il nous proposer un système quelconque qui mette un obstacle à ce qu'on achète des votes ou à ce que la grande propriété exerce son influence sur beaucoup d'électeurs ? La question n'est donc pas particulière dans la peur des inconvénients qui existeraient avec toute loi électorale, mais dans la justice des principes. Il reste uniquement à décider s'il est équitable ou non, que tous ceux qui participent aux charges de l'État participent aussi à l'exercice des droits constitutionnels. Je le répète, je crois que la proposition est juste, utile et nécessaire, pour les raisons que j'ai eu l'honneur de vous développer. (J. F., 18 fév.)

M. le président – Messieurs, il me semble que M. Lebeau a entendu la question d'une manière trop absolue ; l'assemblée est-elle satisfaite de l'explication que M. de Foere vient de donner du passage de son discours qui a été inculpé ? (Un murmure affirmatif se fait entendre sur tous les points de la salle ; M. Lebeau paraît aussi satisfait.) (J. F., 18 fév.)

- L'assemblée déclare qu'il n'y a pas lieu au rappel à l'ordre. (J. F., 18 fév.)

M. Alexandre Rodenbach – Notre constitution étant pour ainsi dire républicaine, il me semble que, pour être conséquent, il faudrait intéresser la généralité des citoyens à la chose publique. Les libéraux des deux nuances sont d'accord sur ce principe. Cormenin et de Lamennais, tous deux, veulent l'abolition du cens. Il semble que les auteurs du projet ne veulent rien accorder à ceux qui ont le plus contribué à la révolution. Je connais, dans ma province, grand nombre de villages, tels que Merckem, Clercken, Zarren, Woumen, etc., qui, avec un cens aussi élevé, ne donneraient qu'un petit nombre d'électeurs. En conséquence, je propose que le cens pour les campagnes ne soit fixé qu'à 20 florins. Les véritables libéraux ne peuvent point s'opposer à ma proposition. Si sous Guillaume, le cens électoral eût été de 20 florins et si surtout le peuple eût nommé directement ses mandataires, les Belges auraient obtenu la majorité dans les chambres, et ils n'auraient pas été forcés, en 1830, de tirer des coups de fusil et de faire des barricades. (J. F., 18 fév.)

M. Van Meenen – M. de Foere propose un cens uniforme, cela est évidemment contraire à l'article 47 de la constitution, où il est dit que le cens sera déterminé par la loi électorale. En adoptant cette disposition, le congrès doit avoir entendu que le cens ne serait pas uniforme. Je demande donc la question préalable sous ce rapport ; mais j'envisagerai la question sous le rapport des principes. Dans toute société, le droit de chacun des associés est de participer aux avantages et aux charges en raison de sa mise, et nullement d'être gérant de la société. Les radicaux sont en erreur quand ils font un droit de ce qui n'est qu'une fonction. C'est le corps social représenté par nous qui doit déterminer les qualités requises (page 533) pour les fonctions électorales. L'uniformité ne sera d'ailleurs qu'une uniformité écrite qui n'existera pas dans la pratique : dans le Luxembourg on peut être considéré comme un homme aisé quand on paye 20 florins ; il n'en est pas de même autre part. (J. B., 18 fév.)

M. Alexandre Rodenbach – Mon amendement ne tend pas à établir un privilège en faveur des campagnes, car j'ai déposé un autre amendement pour diminuer le cens des villes en proportion. (J. B., 18 fév.)

M. Deleeuw propose de fixer le cens de l'électeur uniformément à 30 florins pour toute la Belgique. Il ne voit pas que la constitution repousse le cens uniforme. Elle a simplement décidé que le cens ne pourra être moindre de 20 fl., et pas plus élevé que 100 florins. (C., 18 fév. et A.)

M. de Robaulx – Si je prends la parole, c'est pour relever des hérésies en droit politique ; je m'y trouve d'autant plus obligé qu'elles viennent d'un jurisconsulte ; deux fois il a posé en principe que la qualité d'électeur est une fonction publique : dès lors, dit-il, elle n'est pas un droit appartenant à tous les citoyens, comme l'a dit M. de Foere, conséquemment encore le cens électoral n'est pas une restriction aux droits des membres de la société, mais une condition imposée pour acquérir une fonction.

Il n'y a qu'une grave erreur dans l'argumentation du subtil collègue, c'est qu'il pose comme axiome, comme vérité reconnue, une prémisse qu'il n'a sans doute lue dans aucun auteur et dont personne ne lui contestera le mérite de l'invention. En effet, est-il bien vrai que chaque citoyen, à son seul titre de membre de la société, n'ait pas droit de concourir à l'élection des représentants de cette société ? Vous avez proclamé comme principe fondamental, dans la constitution, l'égalité de tous devant la loi ; de là il suit que tous les droits de la société appartiennent également à tous ses membres, et qu'aucun privilège politique ne peut être créé. Lorsque la nation élit des députés chargés de venir ici régler ses intérêts, elle n'exerce aucune fonction, elle jouit collectivement d'un droit, et c'est celui de déléguer ses pouvoirs à un nombre fixe de mandataires : or comme ces mandataires sont les élus de toute la nation, qu'ils la représentent tout entière, que les lois qu'ils font obligent tous les citoyens, sans distinction entre ceux qui payent ou ne payent pas de contributions, il est évident que tous ces mêmes citoyens ont intérêt et droit de concourir au contrat de mandat qui doit les lier.

Ainsi la saine raison, quand elle n'est pas travestie par des sophismes, indique que la règle générale est que tout citoyen est ou devrait être électeur de droit.

Cependant comme l'exercice de ce droit nécessiterait des assemblées populaires trop nombreuses qui pourraient occasionner des désordres et compromettre la sûreté et la tranquillité publiques, si toute la nation y prenait part, on a reconnu la nécessité de le restreindre de manière qu'il n'y eût qu'un nombre d'électeurs tel que leur réunion ne fût pas dangereuse ; le cens électoral a donc été créé comme moyen de restriction du droit d'élire : de là la conséquence inévitable qu'elle est odieuse, et que par suite il ne faut en user qu'avec discrétion ; or, si le minimum du cens électoral (20 florins) ne donne pas lieu à craindre que les électeurs soient assez nombreux pour être dangereux, vous devez admettre l'amendement de M. de Foere.

Jusqu'ici je n'ai point entendu alléguer par M. Lebeau, ni par M. Van Meenen, aucun motif plausible contre la fixation du cens à 20 florins ; je ne puis donc adopter leur opinion illibérale qui, en élevant le cens, prive un grand nombre de Belges du droit de voter.

La fixation inégale du cens dans les diverses provinces me paraît une disposition arbitraire dont je ne vois pas l'utilité, car, si un contribuable à 20 florins peut être électeur dans tel district, je ne puis voir du danger à l'admettre dans tous les autres ; si 20 florins sont une garantie de position et de discernement dans une province, il doit en être de même dans les autres ; dès l'instant que le nombre de députés à élire est fixé pour chaque district électoral, peu importe s'il y a plus ou moins d'électeurs, en proportion qu'il y aurait, dans telle province plus riche et plus populeuse, un nombre supérieur de contribuables à 20 florins ; du moment que l'assemblée n'est pas tumultueuse, ils doivent être tous admis puisqu'ils ont tous un droit égal.

Je voterai donc pour l'amendement qui favorisera le plus l'extension du droit électoral. (E., 19 fév.)

M. Deleeuw – Ne conviendrait-il pas de mettre d'abord aux voix s'il y aura un cens uniforme ? (C., 18 fév.)

- Cette demande reste sans suite. (C., 18 fév.)

Les amendements de MM. de Foere, Deleeuw et Alexandre Rodenbach, sont successivement mis aux voix et rejetés. (U. B., 18 fév.)

Projet de loi accordant une solde aux officiers du grand état-major et à des sergents et courtiers de la garde civique

Dépôt du projet et renvoi aux sections

(page 534) M. le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, donne lecture d'un projet de loi présenté par M. de Coppin, tendant à ce qu’il soit accordé une solde aux officiers du grand état-major de la garde civique et à des sergents et courtiers de cette garde.

- Le congrès ordonne l'impression et la distribution de ce projet, et le renvoie à l'examen des sections. (P. V.)

La séance est levée à cinq heures. (P. V.)