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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 11 février 1865

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1864-1865)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 477) M. Thienpont, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.

M. Van Humbeeckµ donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la Chambre

M. Thienpont présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.

« Le sieur Paie, ancien maréchal des logis au 4ème régiment d’artillerie, demande une pension. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Paris propose des mesures pour assurer la sincérité des élections. »

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le projet de loi relatif aux fraudes électorales.


« Il est fait hommage à la Chambre par M. L. Durant, de 12 exemplaires d'une publication qu'il vient de faire et qui a pour titre : « Le projet de loi sur la police et la discipline médicales. »

- Dépôt à la bibliothèque.


« Il est fait hommage à la Chambre, par M. Keller, de 116 exemplaires d'un mémoire à l'appui d'une demande en concession d'un chemin de fer direct de raccordement des stations du Nord et du Midi. »

- Distribution aux membres et dépôt à la bibliothèque.


« M. Vleminckx, retenu par une indisposition, demande un congé de quelques jours. »

- Accordé.

Projet de loi relatif au cens d’éligibilité des sénateurs

Motion d’ordre

M. de Theuxµ (pour une motion d’ordre). - Messieurs, vous vous rappellerez que le Sénat a voté un projet de loi relativement à la question de savoir si les centimes additionnels légaux, provinciaux et communaux doivent compter pour former le cens d'éligibilité au Sénat. Cette question, messieurs, est urgente de sa nature ; car si le projet adopté par le Sénat reçoit la sanction de la Chambre et du Roi, il faudra en tenir compte pour la prochaine formation de la liste des éligibles.

Je demanderai donc à M. le président si la commission désignée par le bureau s'est constituée ; sinon, je prierai M. le président de vouloir bien la convoquer pour qu'elle se constitue et l'inviter à faire un prompt rapport. Cette question ne peut pas exiger de longs débats et il est urgent qu'elle reçoive une solution.

M. Lelièvre. - Il y a déjà longtemps que j'avais formé une demande analogue à celle de l'honorable M. de Theux. Le projet dont il s'agit est soumis à la Chambre depuis plusieurs années, il avait été examiné dans les sections et un rapport, si je ne me trompe, avait été déposé lorsque la dissolution de la Chambre est venue en interrompre la discussion.

Je prie donc M. le président de vouloir faire en sorte que la commission spéciale soit convoquée le plus tôt possible pour s'occuper d'un projet véritablement urgent.

MpVµ. - La commission sera invitée à s'occuper d'urgence de cet objet.

Projet de loi accordant au ministère de l'intérieur un crédit d'un million pour construction et ameublement de maisons d'école

Discussion générale

M. Bouvierµ. - J'ai demandé la parole non pour critiquer le projet de loi soumis à vos délibérations, mais pour y donner mon complet et sympathique appui. L'école et le maître, c'est le plus puissant levier de la civilisation moderne ; avec ces indispensables auxiliaires, il n'est plus de déshérités de ce monde. L'homme ne peut plus exhaler des plaintes contre la société quand celle-ci lui offre la nourriture intellectuelle, le pain de l'intelligence, pour le soustraire à la plus poignante des misères, l'ignorance ; quand elle lui procure les moyens de s'élever et de grandir en préparant son avènement au rôle de citoyen.

L'école et le maître, c'est le triomphe de la démocratie éclairée, la seule qui ait mes sympathies. Elle constitue l'avenoir de la société moderne. L'école et le maître, c'est la consécration pratique du grand principe de notre Constitution qui proclame la souveraineté de la nation, aujourd'hui encore à l'état de lettre morte aussi longtemps que l'école et le maître n'auront pas élevé le niveau de l'instruction générale dans notre pays, tant et aussi longtemps que le dernier et le plus reculé de nos villages, le plus délaissé de nos hameaux ne seront pas pourvus de ces grands et puissants éléments de grandeur intellectuelle et morale pour nos populations.

Mais il ne s'agit pas seulement de construire des écoles, ce qu'il faut aussi, c'est créer de bons maîtres, et après les avoir créés, leur donner l'aisance, car l'aisance, c'est la dignité, et la dignité élève ces nobles et utiles fonctions à la majesté du sacerdoce. Il ne faut pas que, dans un pays libre et démocratique comme le nôtre, nos yeux soient affligés du désolant spectacle de voir les maîtres se transformer en marguilliers, bedeaux, chantres ou sacristains pour assurer leur existence. Si vous voulez faire fructifier l'instruction primaire, relevez le maître, il se transformera. En s'élevant lui-même il rendra à la société des citoyens dignes d’un pays libre et de participer au gouvernement de ce pays.

Mais ce qui manque chez nous, ce sont des écoles normales. Quand on songe qu'en vertu de la loi de 1842 il n'existe, en Belgique que deux écoles normales pour créer ces utiles vocations qui constituent les bons maîtres et une véritable carrière pour eux. Quand on pense que dans notre pays sur 8,389 instituteurs primaires il y en a seulement 1,980 munis de diplômes, on reste stupéfait et on se demande comment un gouvernement libéral n'ait pas songé à modifier cette loi qui accuse une aussi déplorable lacune.

Hâtez-vous donc, M. le ministre, de présenter un projet de loi portant création de nouvelles écoles normales, agrandissez celles qui existant. Il ne s'agit plus de nous déclarer que cette question mérite examen. Il faut mettre énergiquement la main à l'œuvre. Le temps nous presse. L'examen est fait. Vous en trouverez la triste preuve dans les chiffres dénoncés. A l'œuvre donc, et vous aurez bien mérité du pays !

Je viens de vous dire qu'il est possible d'agrandir les écoles normales qui existent actuellement, et ici je rencontre l'opinion récemment exprimée par l'honorable ministre de l'intérieur, qu'il préfère les grands établissements d'instruction à ceux de moindre importance. Une grande fabrique, ajoutait-il, fonctionne mieux qu'un petit atelier. Pour moi, j'aime les uns et les autres. Mais pour satisfaire à la préférence marquée de l'honorable ministre, je vais lui indiquer un excellent moyen.

Il existe à Virton une école normale annexée à l'école moyenne où directeur et professeurs rivalisent tous de zèle et de dévouement pour donner de l'éclat à cet utile établissement.

Cinquante-cinq élèves normalistes le fréquentent. Ce nombre pourrait être doublé, si le gouvernement voulait s’imposer le sacrifice de fournir un subside assez considérable pour permettre d'ajouter une aile aux bâtiments existants.

Le gouvernement trouverait ainsi, sans augmenter le personnel du corps enseignant, un excellent moyen d'étendre la pépinière de jeunes instituteurs et de venir en aide à ces populations si actives et si intelligentes du Luxembourg où l'industrie, par l'absence de chemins de fer, fait encore défaut.

J'ai le ferme espoir que l'honorable ministre prendra en sérieuse considération le moyen facile de parer pour une minime partie à la grave situation du manque d'instituteurs diplômés.

Avant de terminer, j'aurai à demander à M. le ministre s'il n'est pas possible d'annexer au bâtiment de l'école dans les villages un jardin où le maître pourrait donner quelques leçons d'arboriculture et d'horticulture.

Cette minime dépense constituerait une véritable amélioration dans nos communes, elle contribuerait à l'importation dans nos villages d'une bonne espèce de fruits et de légumes, propageant ainsi une alimentation, plus saine et plus abondante et pouvant donner lieu à un commerce d'exportation considérable. Témoin l'Angleterre, qui achète, dans les environs de Saint-Trond, des cerises pour des sommes s'élevant à un chiffre énorme.

Ces jardins, tout en procurant un utile délassement aux maîtres, leur donneraient le moyen d'exercer les élèves aux pratiques usuelles de la culture maraîchère, de celle du verger et ces utiles et salutaires leçons finiraient par exercer la plus heureuse influence sur la richesse publique. (page 478) Elles feraient connaître dans nos plus modestes villages les meilleures espèces de fruits et les procédés de culture perfectionnés. Ce serait d'après l'expression d'nu grand poète, unir l'utile à l'agréable,

M. Lelièvre. - Je dois applaudir au projet du gouvernement et même l'engager à persévérer dans la voie qu'il a suivie jusqu'aujourd'hui.

L'instruction primaire est un intérêt social digne de toute la sollicitude des pouvoirs publics. Il est indispensable que dans le plus bref délai toutes les communes soient mises à même d'avoir une école située sur leur territoire et de satisfaire à la disposition de l'article premier de la loi du 23 septembre 1842.

Sous ce rapport, je partage complètement l'avis du gouvernement. L'école communale doit être la règle, l'école adoptée n'est que l'exception. Le texte de la loi ne permet d'élever aucun doute à cet égard.

L'école communale énoncée à l'article premier de la déposition législative en question est exigée impérieusement.

Les écoles dont il s'agit aux articles 2 et 3 ne sont que facultatives, et l'autorité supérieure est appelée à examiner s'il y a lieu de dispenser la commune de la prescription lui imposée par l'article premier.

J'engage donc le gouvernement à accorder le plus de subsides que possible en faveur de l'enseignement primaire, et je ne reculerai pas même devant un emprunt ayant pour objet d'assurer l'exécution de l'article premier de la loi de 1842 dans toutes les communes du pays. Jamais fonds ne peuvent avoir une meilleure destination.

Du reste, je reconnais que le gouvernement ne néglige pas cette branche importante de services publics, et je donnerai avec empressement un vote favorable au projet de loi.

M. Rodenbachµ. - Messieurs, nous sommes tous grands partisans de l'instruction ; je ne pense pas qu'il y ait un seul député qui ne soit désireux de doter le pays d'un bon enseignement. Nous en avons donné des preuves ; l'instruction primaire est beaucoup plus avancée en Belgique qu'en France, nous pouvons marcher de pair avec l'Angleterre. Je crois qu'il n'y a que la Prusse et l'Amérique qui l'emportent sur nous pour l'enseignement.

On a parlé des écoles normales. Je crois, messieurs, que nous en avons trente et une, aussi bien des écoles normales du gouvernement, que des écoles normales libres, et dans un pays de liberté nous devons vouloir qu'il y en ait beaucoup de la dernière catégorie. On ne peut pas toujours demander des fonds au gouvernement ; cela est contraire à l'esprit de nos institutions.

Je pense que récemment on a établi encore trois écoles normales nouvelles. Il est possible qu'on en fasse encore pour les filles, je l'ai entendu dire d'une manière non officielle.

Mais, lorsqu'on veut établir de ces écoles, il faut que ce soient des établissements libres, érigés sans le concours du gouvernement, car nous devons ménager les ressources de l'Etat.

Je crois que jusqu'à présent on ne peut pas se plaindre, lorsque dans notre pays de 4,500,000 habitants, il y a 31 écoles normales.

M. Bouvierµ. - Et 6,000 instituteurs non diplômés.

M. Hymans. - Messieurs, la Chambre se rappelle que, dans la discussion du budget de l'intérieur, j'ai, à propos de l'enseignement primaire, prouvé, en me servant de statistiques officielles, que les résultats obtenus dans le domaine de l'instruction primaire ne sont pas en rapport avec les grands sacrifices que le gouvernement a faits depuis de longues années.

Depuis que j'ai prononcé ce discours, auquel l'honorable ministre de l'intérieur s'est réservé de répondre dans la discussion du projet de loi actuel, j'ai eu tout le loisir de vérifier de nouveau les chiffres que j'ai produits devant la Chambre, et j'affirme de nouveau que le nombre des élèves qui fréquentent les écoles primaires en Belgique est relativement moins élevé qu'il y a 25 ou 30 ans.

Ces chiffres peuvent sembler étranges et je sais que l'on contestera mes allégations. J'en ai lu la réfutation en règle dans un journal.

On m'a reproché d'abord trop de confiance dans les statistiques antérieures à la loi de 1842 et, en second lieu, d'avoir négligé de compter ,au nombre des élèves qui fréquentent aujourd'hui les écoles, ceux qui se trouvent dans les écoles d'asile et dans un certain nombre d'établissements libres non renseignés par les rapports officiels.

Messieurs, j'ai examiné derechef la statistique, et je n'ai rien à changer aux chiffres que j'ai produits dans cette Chambre, il y a quelques mois, et je l'affirme de nouveau, le nombre des élèves qui fréquentent les écoles primaires dans notre pays n'a pas augmenté dans la même proportion que la population du royaume.

Ainsi, comme je l'ai dit la première fois, d'après le rapport présenté à la Chambre par M. Nothomb, en 1842, 453,000 élèves fréquentaient les écoles en 1840, sur 4,064,000 habitants.

En 1860, 515,812 élèves fréquentaient les écoles sur une population de 4,700,000 habitants.

En 1840, donc un peu plus du neuvième de la population, en 1860 un peu moins du neuvième, et, dans les chiffres que je cite sont compris ceux qui se rapportent aux écoles privées, aux écoles libres de tout genre, aux pensionnats. Si j'y ajoute encore, pour 1860, les 25,000 enfants qui se trouvent dans les écoles gardiennes, j'arrive à un chiffre de 540,812 enfants, ce qui ne modifie guère la proportion. C'est alors le neuvième de la population qui fréquente des écoles comme en 1840, et la proportion d'il y a 25 ans n'est pas dépassée.

Ceci répond au reproche qu'on pourrait me faire d'avoir négligé certains éléments dans mes calculs.

J'ai à répondre à cet autre reproche de m'être fondé sur des statistiques trop anciennes. J'en prends, si l'on veut, de plus récentes, celle de 1848, et je trouve qu'au 31 décembre 1848, en ajoutant le nombre des élèves qui fréquentaient les écoles primaires proprement dites, au nombre des élèves des écoles gardiennes, il y avait une population de 491,000 élèves sur 4,360,000 habitants, alors qu'il y en avait, en 1860, 540,812 sur 4,700,000. Donc en 1848, 11 1/4 p. c. de la population se trouvait dans les écoles, en 1860, 11 1/2 p. c. ; jugez de ce que nous avons gagné, de la progression que nous avons faite de 1848 à 1860, c'est-à-dire en douze ans.

Ce qui prouve d'ailleurs que les progrès ne sont pas aussi notables qu'on semble le croire, c'est la statistique des miliciens illettrés. On a dit souvent dans cette Chambre que cette statistique ne prouvait rien ou pas grand-chose ; j'admets qu'elle ne prouve pas d'une manière absolue, mais nous n'avons pas d'autre critérium, nous ne possédons pas d'autre base d'appréciation. En France on en possède une autre.

On y fait la statistique des individus qui se présentent à l'état civil pour se marier et qui ne sont pas à même de signer leur acte de mariage. J'appelle l'attention du gouvernement sur l'utilité que pourrait présenter un pareil relevé.

Quant à la statistique des miliciens, si elle ne prouve pas d'une manière absolue, elle prouve autant aujourd'hui qu'il y a vingt-cinq ans. En France, elle est considérée comme un sérieux élément d'appréciation.

L'administration doit aussi la considérer comme telle en Belgique, car elle l'invoque en toutes circonstances, dans tous les rapports sur l'instruction primaire, dans les bulletins du département de l'intérieur, dans les rapports annuels des députations permanentes.

Or, il résulte de ces nombreuses données officielles fournies depuis 1843, qu'en 1840, 53 p.c. des miliciens inscrits ne savent ni lire ni écrire, et qu'en 1862 la proportion était descendue à 30 p. c. Depuis 1843 jusqu'à 1862, c'est-à-dire pendant une période de vingt ans, nous avons gagné 11 p. c. sur l'ignorance.

C'est beaucoup, je l'admets, mais ce n'est pas assez. En France où pendant la même période on a gagné 15 p. c, c'est-à-dire 2 p. c. de plus que nous, on est loin de se tenir pour satisfait. Je vois un signe de dénégation de la part de quelques honorables membres. J'ignore quel point de mon argumentation leur paraît douteux, mais je suis en mesure de prouver que mes opinions se placent sous un patronage qui mérite quelque respect.

On semble contester la comparaison que je fais entre notre situation et celle de la France. Eh bien, je vais vous citer les affirmations solennelles d'un homme éminent, de M. le général Morin, président des cinq Académies de France, parlant dans la séance publique de l'Institut, du 16 août 1864.

Je ne crois pas que M. le général Morin ait tenu à induire en erreur son illustre auditoire, et certes, il a dû être à même de puiser ses renseignements aux sources les plus dignes de foi.

Voici les paroles du général Morin :

« Si nous rapprochons les résultats obtenus en Allemagne de ceux qui, chaque année, sont constatés et recueillis avec soin par le ministère de la guerre en France, nous sommes forcés de reconnaître toute l'infériorité de notre population sous ce rapport et la lenteur du progrès que fait chez nous l'instruction primaire.

« En réunissant dans un même tableau, et en mettant en regard pour chaque année, depuis 1828 jusqu'à 1862 exclusivement :

« 1°. Le nombre des jeunes gens de 20 ans de toute la France, appelés chaque aimée à concourir au tirage pour le recrutement, c'est-à-dire la totalité des jeunes hommes de cet âge ;

« 2° Le nombre de ceux qui ne savaient ni lire ni écrire, au jour du tirage :

« 3° La proportion de ce dernier nombre au premier ;

« L’examen de cette proportion montre :

(page 470) « 1° Que sur 100 gens ayant vingt ans en 1828, il y en avait 53, ou plus de la moitié, qui ne savaient ni lire ni écrie ;

« 2° Qu'à l’époque de la promulgation de la loi de 1833 sur l'instruction primaire, il y en avait encore 46 sur 100 qui étaient aussi ignorants ;

« 3° Enfin, qu'après 29 années d'exécution de cette loi bienfaisante et populaire, malgré les sacrifices toujours croissants de l'Etat, il y avait encore, en 1862, plus de 27 jeunes gens de 20 ans sur 100 qui ne savaient ni lire ni écrire. (En Belgique il y en a 31 !)

« Si l'on représente par une construction graphique les données de ce tableau, on obtient une courbe d'une continuité remarquable, qui donne la loi géométrique du décroissement de l'ignorance.

« Elle montre avec quelle lenteur désespérée diminue le nombre des jeunes gens qui ne savent ni lire ni écrire, malgré les ressources froissantes que les communes, les départements et l'Etat ne cessent de consacrer à cette partie fondamentale de l'instruction publique.

« On y voit en effet que, tandis que la somme inscrite au budget de l'Etat pour l'instruction primaire, avait été élevée du chiffre de 100,000 fr. qu'elle était en 1829, à 4,797.000 francs pour l'année 1861, c'est-à-dire était devenue 48 fois plus forte, et que le nombre des écoles avait plus que triplé, le nombre des jeunes gens de 20 ans qui ne savaient ni lire ni écrire n'avait diminué que dans le rapport de 52 à 27, ou de moins de moitié.

« Cette diminution paraît même devenir de plus en plus lente, malgré l'accroissement inverse des sacrifices pécuniaires, et la continuité de la courbe qui en indique la loi, semble montrer que, tant qu'il ne sera pas pris de mesures autres que des allocations financières et des créations d'écoles nouvelles, l’on ne pourra pas se flatter de voir la proportion des jeunes gens absolument ignorants descendre seulement à 10 sur 100 avant plus de 50 ans. »

Voilà les conclusions du général Morin, raisonnant d'après les statistiques du département de la guerre, et nous sommes de 4 p. c. en arrière de la France.

Le mal est donc réel, et il est clair pour tout homme qui apprécie sainement les choses, il est clair, ainsi que l'a dit M. Jules Simon, qu'il ne suffit pas de créer des écoles et de bonnes écoles pour répandre l'instruction publique dans les masses. Ce n'est pas tout de faire de grands sacrifices ; il faut que ces sacrifices produisent en raison de leur importance : il y a bien des hommes dans le monde dont l'éducation a coûté fort cher et qui n'ont rien appris.

Ainsi la quotité des sacrifices faits pour l'instruction publique par un gouvernement libéral et progressif n'est pas une raison suffisante pour que l'instruction des masses se développe dans une proportion égale. Le mal que je constate consiste dans la lenteur des victoires que nous obtenons sur l'ignorance. Ce mal est constaté dans tous les rapports officiels, et quand M. le ministre de l'intérieur constate dans cette Chambre des progrès incessants, des progrès que nous sommes tenus d'admirer, il n'est pas tout à fait d'accord avec les pièces qu'il signe et avec les rapports qu'il nous distribue...

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Vous me prêtez des arguments pour pouvoir les réfuter.

M. Hymans. - Pas du tout. Mon Dieu, ne chicanons pas sur les mots. Vous avez dit qu'on avait énormément fait et qu'il restait énormément à faire. J'admets l'exactitude de cette double affirmation, mais je crois, avec le général Morin, que, pour faire mieux, il faut recourir à d'autres moyens que ceux qu'on emploie aujourd'hui, qu'il ne suffit pas des allocations financières et de la création d'écoles pour parvenir au but que nous voulons atteindre.

Nous sommes d'accord sur un point, qu'il reste beaucoup à faire ; vous croyez qu'on arrivera à le faire par les moyens actuels. Telle n'est pas mon opinion.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je n'ai rien dit de semblable.

M. Hymans. - Pardon ; je n'ai pas ici le discours que vous avez prononcé il y a six semaines ; mais il en résulte à l'évidence que ceux qui proposeraient de faire plus que vous ne faites, ne seraient pas appuyés par vous...

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Cela n'est pas exact.

M. Hymans. - Mais à l'époque où l'honorable M. Guillery a proposé un amendement tendant à augmenter l'allocation destinée au service ordinaire de l'instruction primaire, le gouvernement, y compris l'honorable ministre de l'intérieur, a combattu cet amendement que nous avons été très peu dans cette Chambre à voter. (Interruption.)

Je ne comprends pas ces protestations, je m'explique probablement très mal.

Je ne prétends pas qu'on n'a pas dépensé assez d'argent, je ne conteste que les résultats et l'efficacité des moyens.

N'est-il pas vrai qu'en mainte occasion vous avez combattu les propositions qui vous étaient faites ?

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Nous les combattons comme inopportunes, sauf huit jours après à venir demander des fonds à la Chambre.

M. Hymans. - Vous prononcez le mot « inopportunes » qui me met à l’aise ; nous allons nous entendre ; vous considérez ces proposions comme inopportunes, nous les considérons comme opportunes, nécessaires, urgentes.

Quoi qu'il en soit, je constate un mal réel ; je constate que le système actuel ne produit pas des résultats proportionnés aux sacrifices que le pays s'impose.

La preuve en est inscrite tout au long dans les rapports du gouvernement. Je n'ai qu'à ouvrir le dernier rapport triennal, signé par le ministre actuel de l'intérieur. A la page 10 de ce rapport, je lis ce qui suit :

« Les élèves qui ont définitivement quitté les écoles à la fin de l'année scolaire 1859-1860 étaient au nombre de 65,000. De ce nombre 21,546 seulement, 35 p. c, avaient fait un cours complet d'études.

« Ainsi, plus de deux tiers ont cessé de fréquenter les classes, sans avoir acquis le minimum des connaissances indispensables à la vie usuelle, à la vie sociale, et ce, pour se livrer, avant l'âge, aux labeurs de l'industrie ou aux travaux domestiques.

« Ce fait regrettable, dit l'inspecteur du Hainaut, dans son rapport annuel de 1860, est de nature à décourager les instituteurs, qui se plaignent généralement de voir les enfants déserter leurs classes, dès qu'ils ont été admis à la première communion. Une fois sa première communion faite, il est rare, en effet, que l'enfant de la classe ouvrière continue à fréquenter l'école. Il n'est le plus souvent arrivé qu'à sa onzième année, lorsque l'industrie s'empare de lui, pour ne plus le relâcher, pour l'enfouir dans les travaux des houillères ou pour l'étioler et l'abrutir dans l'atmosphère insalubre de quelque manufacture, ou. l'on ne tient pas plus compte de son développement physique que de sa culture morale et intellectuelle.

« La dignité humaine, d'accord ici avec les plus précieux intérêts des familles, d'accord avec tous les intérêts sociaux, demande qu'il soit porté un remède efficace à un si grand mal, qui va toujours croissant, et qui compromet même l'avenir de bien des industries, auxquelles les bras vigoureux feront un jour défaut, si l’on continue à abuser des forces naissantes de l'enfant. »

Vous le voyez donc, messieurs, il y a un mal constaté par des inspecteurs de l'enseignement primaire, et ce mal, ils déclarent qu'il va toujours croissant et qu'il faut y apporter un prompt remède. Ce remède, permettez-nous de le chercher.

Ce que constate cet inspecteur du Hainaut est reconnu par plusieurs de ses collègues. A la page 120, vous trouverez des conclusions analogues de l'inspecteur de la Flandre orientale. Le rapport qui a suivi en 1862 la grande enquête que le gouvernement impérial avait ouverte sur l'état de l'instruction primaire en France, aboutit aux mêmes doléances, qui amèneront inévitablement, quoi qu'on fasse, dans un avenir plus rapproché qu'on ne le croit, le triomphe de l'instruction obligatoire.

II résulte à l'évidence de tout ce qui se passe autour de nous que ce n'est pas l'inertie du gouvernement qu'il faut accuser, puisqu'il est prouvé que le gouvernement belge fait des sacrifices considérables, beaucoup plus considérables pour l'instruction primaire que la France, et qu'il occupe même une place plus élevée sous ce rapport dans la hiérarchie que la plupart des pays de l'Europe.

Pour moi, je n hésite pas à le dire ici, quoique je sache d'avance que mon opinion ne trouvera guère d'adhérents dans cette Chambre, je suis un partisan invétéré et incorrigible de l'instruction obligatoire. J'ai lu tout ce qu'on a dit dans cette Chambre sur cette question ; j'ai lu tout ce qu'on a écrit en Belgique et en France sur cette réforme importante, et j'en ai conclu qu'il n'y avait pas un argument sérieux à opposer à la doctrine de l'enseignement obligatoire, ni en théorie ni en pratique.

Eu théorie, elle n'a rien de contraire ni à la liberté générale des citoyens ni à la liberté de l'enseignement en particulier.

En pratique, l'enseignement obligatoire existe dans la plupart des pays de l'Europe. Il existe, dit-on, chez des nations despotiques. Mais il fleurit aussi chez des nations libres. Je ne connais que l'Angleterre et la France qui ne l'aient pas adopté jusqu'à ce jour, et j'ai la confiance qu'il ne se passera pas longtemps avant que la France opère sa conversion.

Dans la plupart des Etats de l’Union américaine, dans presque toute (page 480) l'Europe, en Suisse, en Allemagne et dans beaucoup d'autres contrées, l'enseignement obligatoire est inscrit dans la loi. En Espagne elle l'est depuis 1857. En Italie, la première chose que le gouvernement ait fait après le peuple eut secoué le joug de l'étranger, c'a été d'inscrire dans la loi sur l'instruction publique le principe de l'obligation, et dans la loi électorale, la déchéance des droits politiques pour tous les citoyens qui, au bout d'un certain temps, ne sauraient pas lire et écrire.

Quand on peut invoquer de pareils exemples à l'appui de sa thèse, l'exemple du monde civilisé à l'exception de deux pays, dont l'un est sur le point de se convertir, je crois qu'on a droit, sinon à l'approbation de ses collègues, du moins à réclamer le respect pour la doctrine que l'on défend.

Du reste, messieurs, l'instruction obligatoire sera facile à introduire le jour où l'on aura modifié radicalement les méthodes d'enseignement. J'ai indiqué à M. le ministre de l'intérieur les études faites en Angleterre et d'où il résulte de la manière la plus évidente qu'en diminuant le nombre des heures d'école on ne diminue en rien l'excellence de l'enseignement, on obtient même des résultats plus remarquables. J'ai eu l’occasion de constater en Belgique, dans des établissements industriels la vérité de ce fait. Notre honorable collègue M. de Rongé pourrait vous dire les résultats qu'il a obtenus en appliquant ce système au vaste établissement industriel qu'il dirige. Diminuer les heures d'instruction, c'est rendre l'école plus attrayante, c'est y attirer un plus grand nombre d'élèves, c'est enlever aux parents le prétexte qu'ils tirent du travail de leurs enfants, pour se refuser à les instruire, c'est retenir les élèves à l'école jusqu'à un âge plus avancé et les empêcher ainsi d'oublier ce qu'ils ont appris, condition essentielle pour que l'enseignement porte ses fruits.

Quant le mot « enseignement obligatoire » est prononcé dans cette Chambre ou ailleurs, on a une réponse toute prête : on répond immédiatement par l'insuffisance du nombre des écoles et des instituteurs, par l'impossibilité d'exécuter une pareille loi. Je reconnais ces difficultés ; je reconnais qu'il serait matériellement impossible de rendre hic et nunc l'enseignement obligatoire en Belgique.

Pour y arriver, il faut construire des écoles et créer des instituteurs ; il faut augmenter le nombre des écoles normales et modifier la loi de 1842 ; mais je crois que la révision, dans ces termes, ne serait pas difficile et ne soulèverait pas de grands orages.

L'importance de la création d'écoles est énorme ; l'absence de locaux, leur insuffisance, leur mauvaise construction entravent l'enseignement dans un très grand nombre de communes. L'exiguïté du local, le manque de mobilier, le manque de beaucoup d'autres conditions sur lesquelles je n'insisterai pas dans cette enceinte et dont l'absence amène quelquefois dans les communes rurales des abus déplorables, tout cela nuit considérablement au développement de l'instruction primaire. Souvent, je le sais, les administrations communales sont en faute.

L honorable ministre de l'intérieur a pris, il y a deux ans, un arrêté dans le but d'améliorer la situation des instituteurs, et d'après l'esprit de cet arrêté, le minimum du traitement fixe des instituteurs devait être établi d'après la fréquentation des écoles ; mais quelles qu'aient été les bonnes intentions du ministre dans cette circonstance, il est arrivé à rendre les instituteurs responsables de l'inaction et de l'apathie des administrations communales ou des bureaux de bienfaisance, de tous ceux enfin dont c'est le devoir de propager l'instruction. Quels sont les moyens que possède l’instituteur pour attirer les enfants ? Un bon enseignement, dira-t-on ; d'après moi, ce n'est pas un moyen suffisant, surtout dans les campagnes, au contraire (interruption) ; au contraire, certainement ; là où l'instituteur lutte avec le clergé, plus l'enseignement sera bon, plus on tâchera d'éloigner les enfants de l'école.

Je dis que l'instituteur n'a pas d'autres moyens h sa disposition que son bon enseignement et la persuasion dont il peut user sur la population au milieu de laquelle il réside ; or ces moyens sont évidemment insuffisants ; il faut que l'administration communale vienne en aide à l'instituteur, et l'expérience prouve que cet appui il ne l'obtient pas toujours, qu'il rencontre souvent du mauvais vouloir de la part des administrations locales.

L'arrêté royal de 1863 rend l'instituteur responsable de la non fréquentation des écoles ; que la pauvreté des habitants, que les maladies, que le voisinage des grandes usines, que le mauvais vouloir de l'administration empêche la fréquentation de l'école, c'est l'instituteur qui en est responsable et qui en suppose les conséquences.

Pour vous prouver, menteurs, combien de difficultés nous avons encore à combattre, permettez-moi de vous citer deux faits qui sont à ma connaissance personnelle.

Dans une commune d'un arrondissement qui n'est pas le mien, mais qui fait partie de province de Brabant, un père de famille vient demander à l'instituteur si son fils peut encore fréquenter l'école ; l'enfant était âgé de 14 ans et n'avait plus droit à l'enseignement gratuit ; l'instituteur répond ; Certainement, mais il faut payer la rétribution scolaire.

Le père va consulter le vicaire de la paroisse, qui lui dit : N'envoyez plus votre enfant à l'école, il sait lire, écrire et calculer, c'est tout ce qu'il faut ; s'il continue à s'instruire, on lui apprendra le français, il lira les journaux libéraux et les mauvais livres et il deviendra un danger pour la société. Le père a suivi le conseil du vicaire et n'a plus envoyé son fils à l'école jusqu'au jour où l'instituteur est venu lui dire : Votre fils est un bon élève, je tiens à lui et je vous permets de me l'envoyer ; il ne payera pas.

Dans une autre commune, l'instituteur s'adresse au bourgmestre pour se plaindre de l'ameublement de l'école, il lui dit qu'il a besoin des objets les plus indispensables pour compléter le mobilier classique ; le bourgmestre lui répond : Je ne donnerai rien et je ne proposerai pas au conseil de vous allouer un centime ; les écoles ne servent qu'à gâter les domestiques. Quand on sort de l'école sachant lire et écrire, on va travailler dans une fabrique, on va à la ville, on abandonne le village, et nous sommes obligés de nous contenter du rebut de la population pour servir dans nos maisons et dans nos fermes.

Je pourrais, messieurs, citer beaucoup de faits de ce genre, ils prouvent combien les préjugés contre l'enseignement sont encore répandus dans les campagnes, même chez ceux qui devraient en être les défenseurs les plus énergiques.

Compter absolument sur la bonne volonté des communes, c'est donc s'exposer à de grands mécomptes. Il faut créer des instituteurs, construire des écoles, et en assurer la fréquentation par d'autres moyens que ceux que l'on emploie.

L'honorable M. de Kerchove dans son rapport nous dit qu'il est indispensable que le gouvernement mette le plus tôt possible les communes à même de satisfaire aux prescriptions de l'article premier de la loi du 23 septembre 1842.

Tout récemment un honorable sénateur de l'opinion catholique a formellement proposé de contracter un emprunt pour doter les communes du pays des écoles dont elles ont besoin. J'aurais préféré voir émaner cette proposition d'un membre de l'opinion libérale, mais elle a été énergiquement appuyée par d'honorables sénateurs de la gauche, par MM. de Selys-Longchamps et Forgeur.

M. le ministre a promis d'étudier la question, et je crois qu'il doit répondre au Sénat à propos de la discussion du crédit qui nous occupe.

Lors de la discussion du budget de l'intérieur, j'avais aussi émis l'idée de contracter un emprunt dans le but de faciliter les efforts des communes.

Depuis lors j'ai constaté que le gouvernement lui-même à une autre époque, avait eu cette idée et je trouve dans le rapport triennal sur l'instruction primaire, l'exposé des motifs et le texte d'un projet d'emprunt élaboré au département de l'intérieur, sous le ministère de l'honorable M. Rogier.

Aux termes de ce projet, le gouvernement eût été autorisé à emprunter 8 1/2 millions à la Banque Nationale ; il eût fait des avances aux communes qui devaient le rembourser par annuités en 23 ans. On comptait de la sorte amener, en peu de temps, l'exécution complète de l'article premier de la loi de 1842.

Les raisons sur lesquelles s'appuyait la commission centrale de l'instruction primaire pour soumettre au ministre ce projet d'emprunt, sont assez remarquables pour que je demande la permission de donner lecture de quelques-unes des considérations qu'elle fait valoir.

« Jusqu'ici, dit la commission, les communes ont allégué la pénurie de leurs ressources pour ajourner les dépensas concernant :

« A. La construction, l'acquisition ou la restauration des maisons d'école et des logements d'instituteurs ;

« B. L'ameublement des salles d'école ;

« C. L'acquisition de jardins à l'usage des instituteurs dans les localités rurales.

« Ce prétexte leur échapperait, puisque le gouvernement leur avancerait les fonds nécessaires. On les mettrait en demeure de remplir leurs obligations : en cas de refus, on exécuterait les travaux et l'on ferait les acquisitions par mesure d'office. Ce serait le moyen d'assurer l'avenir de l'enseignement primaire. Ce service, dans les communes qui ne possèdent pas de maison d'école en propriété, ne peut guère être organisé d'une manière durable. Souvent on est obligé de choisir les instituteurs parmi les candidats qui sont en position de fournir eux-mêmes les locaux et les meubles classiques ; on alloue, de ce chef, une indemnité ; mais le moindre changement dans le personnel enseignant compromet l'existence (page 481) de l'école. Souvent aussi, on est à la merci des instituteurs privés, dont les écoles, bonnes ou mauvaises, doivent être adoptées par les communes pour l'instruction des enfants pauvres. »

D'après le projet élaboré au département de l'intérieur, on ne devait augmenter que de 25,000 fr. l'allocation annuelle affectée au service de l'instruction primaire pour pourvoir à toutes les nécessités de l'emprunt.

Le gouvernement, en 1851, ne crut pas devoir se rallier au projet qui lui était soumis par la commission d'instruction primaire. En le publiant dans le rapport triennal, il se borna à dire que les circonstances ne lui paraissaient point favorables et il s'abstenait de se prononcer sur le fond même de la mesure.

Le gouvernement est donc de ce côté libre de tout engagement, mais il n'en est pas moins vrai que ce projet, élaboré avec soin par ceux-là mêmes dont la mission de veiller aux intérêts de l'instruction primaire, mérite toute l'attention de la Chambre ; il répond d'une manière directe à l'appel contenu dans le rapport de M. de Kerchove ; met les communes à même de satisfaire, sans retard, aux obligations résultant de l'article premier de la loi de 184i2.

Je crois que nous désirons tous que cet article soit appliqué dans toute son extension.

Je voudrais savoir pourquoi il n'a été donné aucune suite à ce projet de loi par le gouvernement.

Les communes rurales, par suite de la création du fonds communal qui a considérablement augmenté leurs ressources, seraient plus à même aujourd'hui, qu'il y a dix ans, de rembourser les avances qui leur seraient faites.

Il ne faut pas se le dissimuler, messieurs, l'idée produite au sein du Sénat par l'honorable M. de Woelmont, sénateur de Namur, a produit une vive et réelle émotion dans le pays. Le pays féliciterait le gouvernement s'il voulait mener à bonne fin l'exécution d'une mesure dont il est le premier auteur.

C'est sous un ministère libéral que l'idée s'est produite il y a quatorze ans, c'est par l'administration libérale qu'elle a été élaborée et rien ne s'oppose, ni les nécessités du trésor, ni la liberté communale, ni la situation politique, à ce que le projet inséré dans le rapport que j'ai en main soit détaché du volume où il se trouve et déposé sur le bureau de la Chambre.

Je n'userai pas de mon initiative parlementaire pour soumettre ce projet à vos délibérations ; il est impossible, dans l'état actuel des partis, de faire aboutir de pareilles propositions sans l'appui du gouvernement. Mais je crois la mesure opportune, je la crois conforme aux principes que nous avons mission de défendre.

En effet, l'enseignement de l'Etat est le drapeau de l'opinion libérale.

Déployons fièrement cette glorieuse bannière. Le pays la suivra avec enthousiasme et dans dix ans vous le retrouverez transformé.

M. Rodenbachµ. Messieurs, en fait de drapeau, je pense que, pour l'instruction primaire, comme pour l'instruction moyenne et l'instruction supérieure, le véritable drapeau est celui de la liberté. C'est avec elle que nous avons fait notre Constitution.

Messieurs, je vais tâcher de répondre quelques mots à l'honorable M. Hymans, qui nous a entretenus d'une statistique faite en France, par le général Morin. Ne nous fions pas trop aux statistiques ; elles sont, en général, très élastiques et se prêtent fort bien à prouver le pour et le contre.

L'honorable membre nous a parlé aussi des résultats constatés par la statistique des miliciens ; à cet égard, je dirai que dans les campagnes et même dans les villes, après l'âge de 12 à 13 ans, les enfants pauvres ne vont plus à l'école, et qu'il n'est pas étonnant, dès lors, de trouver si peu d'instruction chez les miliciens ; ce qu'ils savent à 12 ans, ils l'ont oublié à 19.

M. Hymans voudrait voir augmenter le nombres des écoles.

Je le voudrais aussi, mais est-ce au gouvernement à tout faire ? Pour multiplier les écoles primaires dans toutes les localités, il devrait dépenser des sommes considérables. D'ailleurs son intervention pécuniaire est-elle absolument nécessaire ? n'avons-nous pas en Belgique des écoles libres ? Je pourrais citer des communes de la Flandre occidentale où il en existe 5 ou 6.

On a beaucoup parlé, dans cette discussion, d'instruction. obligatoire ; je ferai remarquer qu'il y a des localités où l'école primaire est distante de 1 lieue et même d'une lieue et demie, comme à Rumbeke et qu'il serait fort difficile de contraindre les enfants à s'y rendre, à moins de recourir à la police.

Je suis aussi partisan que qui que ce soit du développement de l'instruction, mais je crois qu'il ne faut rien exagérer, l'instruction gratuite existe en Belgique dans une notable proportion ; elle existe même dans les écoles libres et à ce sujet, puisqu'on a cité J. Simon, je dirai que J. Simon, dans son dernier ouvrage, déclare que l'instruction primaire est plus développée en Belgique (erratum, p. 492) qu'en France, et que nous consacrons plus de millions que ce pays à son développement ; c'est la vérité.

Je ne suis pas adversaire des établissements du gouvernement, mais je cri's qu'il faut laisser beaucoup à l'initiative individuelle.

On a parlé de l'Amérique ; je dirai que l'instruction y est si répandue que presque tous le monde sait lire et écrire à tel point que tout village à son journal. Eh bien, comment ces résultants ont-ils été obtenus ! Est-ce au moyen de gros subsides et au moyen des établissements du gouvernement ? Non, c'est par la liberté !

Nous avons en Belgique 10 p. c. d'enfants qui fréquentent les écoles ; peut-être pourrait-on arriver à augmenter cette proportion à 12 et 15 au maximum, mais telle qu'elle est, elle est raisonnable, car if faut tenir compte qu'il y a 100,000 Belges en France et que leurs enfants y reçoivent l'instruction.

L'honorable préopinant vous a parlé d'un vicaire rétrograde ; en admettant même que le fait qu'il vous a cité soit de tout point exact, il ne prouve rien, car il constitue une exception ; en Flandre, tous les vicaires parlent le français et partout on enseigne cette langue.

Je me résume. Répandons l'instruction, mais n'imposons pas toute la charge au gouvernement, à la province et à la commune. Laissons une grande part à l'initiative privée et à la liberté.

Nous sommes plus que jamais dans un siècle d'or et de spéculation ; que les industriels, les manufacturiers fassent aussi des sacrifices, qu'ils ouvrent des écoles dans leurs fabriques, qu'ils fixent des heures pour l'instruction des enfants qui y travaillent.

Il n'en faudrait pas beaucoup, et la perte de temps qui en résulterait pour le travail de l'atelier ne serait pas considérable, car l'honorable. M. Hymans a reconnu dans ses écrits qu'en imposait à l'enfant deux heures d'école par jour, on lui fait faire plus de progrès qu'en le surchargeant. Bref, ne puisons pas toujours dans les caisses de l'Etat. Encourageons l'instruction libre ; mais si nous ne voulons pas surcharger nos populations de contributions, si nous ne voulons pas qu'elles regrettent d'avoir fait notre glorieuse révolution, suivons le système du Congrès : économie et liberté en tout et pour tous.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - L'honorable M. Hymans, lors de la discussion du budget de l'intérieur pour le présent exercice a, ainsi qu'il vient de le rappeler, cité une série de chiffres puisés dans des documents officiels, et d'où il résulterait qu'en Belgique l'enseignement primaire, loin d'avoir fait des progrès de 1840 à 1860, est non seulement resté stationnaire, mais que même, malgré les efforts généreux et nombreux, poursuivis pendant vingt années, nous sommes plus éloignés du but que nous ne l'étions au moment du départ.

Les chiffres cités par l'honorable membre sont en général exacts ; mais les conclusions qu'il en tire le sont beaucoup moins. Les chiffres cités ont donc besoin de quelques explications que je crois devoir soumettre à la Chambre. Il serait, en effet, désolant de devoir constater dans cette Chambre qu'après 20 années d'efforts constants faits par la législature, par le gouvernement, par les provinces et par les communes, il nous a été impossible de réaliser le moindre progrès en matière d'enseignement primaire !

Mais avant d'examiner les chiffres produits par l'honorable membre, je demanderai la permission à la Chambre de faire ici une observation.

On semble croire que le gouvernement est tout-puissant en matière d'enseignement primaire et qu'il est en son pouvoir d'assurer la marche régulière et progressive de toutes les écoles du pays ; or, c'est là une grande erreur. Il ne faut pas perdre de vue que le gouvernement, en matière d'instruction primaire, peut moins que les communes elles-mêmes, que l'enseignement primaire est u -service communal et qu'il appartient à la commune de le diriger, de le surveiller et, en principe, de le rétribuer.

Avant d'avoir l'honneur d'être ministre de l'intérieur, j'ai été échevin, puis bourgmestre d'une de nos villes assez importantes ; eh bien, messieurs, j'avoue que je puis moins faire pour développer l'enseignement primaire dans ma ville natale, aujourd'hui que je suis ministre de l'intérieur et que je dispose de millions, que je ne pouvais quand j'étais bourgmestre et même échevin.

Je ne crains pas de le dire, messieurs, là où il y a un bourgmestre zélé, intelligent, secondé par des échevins dévoués, là aussi on trouve uns école bien organisée.

Comment voulez-vous, en effet, que le gouvernement (page 482) même, soit par sas inspecteurs, surveille tous les détails, tout ce qui concerne une école ?

Un bourgmestre, au contraire, étant sur les lieux, peut et doit surveiller son école ; il doit la visiter fréquemment, il doit encourager l'instituteur, et l'entourer d'une bienveillante estime, qui relève le maître à ses propres yeux et aux yeux de ses élèves. Un bourgmestre qui comprend ses devoirs doit engager les parents à envoyer leurs enfants à l'école, il doit et il peut seul surveiller l'enseignement et faire de son école, en un mot, l'objet constant de sa sollicitude paternelle.

Un ministre, au contraire, malgré l'appui de la législature, malgré les millions qu'elle met à sa disposition, malgré le concours de ses fonctionnaires, de ses inspecteurs, peut-il, lui, entrer dans tous ces détails, qu'il importe cependant de ne point négliger si l'on veut que l'école soit bien organisée et marche régulièrement ?

Je dis ceci, messieurs, non point pour disculper le gouvernement qui, je pense, n'a pas besoin de s'innocenter, mais pour faire bien comprendre que l'instruction primaire en Belgique ne peut progresser qu'à la condition que les autorités communales secondent énergiquement le gouvernement et la législature. J'ai du reste la satisfaction, messieurs, de pouvoir déclarer ici que, dans un grand nombre de communes belges, les administrations communales se font un devoir de diriger avec soin et avec sollicitude les établissements d'instruction primaire.

Aussi les cas que vient de citer l’honorable M. Hymans sont-ils rares, je pense. Sans doute, il peut exister des bourgmestres animés de préjugés.

M. Rodenbachµ. - Il a parlé d'un vicaire.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - ... Des vicaires rétrogrades, comme l'a dit l'honorable M. Rodenbach répondant à M. Hymans, en ce qui concerne le vicaire dont a parlé l’honorable député de Bruxelles. Mais quant aux administrations communales, les seules dont je m'occupe ici, je crois, je le répète, que les cas d'inertie complète sont heureusement très rares en Belgique.

Je n'ai jamais dit, messieurs, ni dans cette Chambre ni ailleurs, que. sous le rapport de l'instruction, tout était pour le mieux dans le meilleur des royaumes possible. Je ne suis pas du tout partisan du système d'admiration mutuelle ; et jamais je n'ai eu la pensée que tout était parfait et surtout qu'il n'y avait plus rien à faire. J'ai dit, au contraire, et je le répète, que, selon moi, la Belgique a beaucoup fait depuis vingt ans pour l'instruction primaire mais qu'il reste encore beaucoup à faire. J'ajoute que l'on a obtenu beaucoup, mais qu'il reste encore beaucoup à obtenir. Je pense donc que, sous ce rapport, je suis d'accord avec l'honorable M. Hymans lui-même, qui n'a pas bien rendu ma pensée.

Messieurs, quoiqu'il soit assez fastidieux pour la Chambre d'entendre citer des chiffres... (Non ! non !) je devrai cependant, pour répondre à l'honorable M. Hymans en invoquer quelques-uns.

Dans son premier discours, confirmé par celui qu'il vient de prononcer aujourd'hui, l'honorable M. Hymans nous a dit que le nombre de nos écoles était moindre en 1860 qu'en 1845.

M. Hymans. - J’ai parlé du nombre des élèves.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Dans votre premier discours, vous avez allégué le fait que je viens de rappeler, et j'ajoute que les chiffres cités par vous sont en général exacts ; mais ils ont besoin d'une explication.

En effet, en 1840, au 31 octobre, on comptait dans le royaume 5,189 écoles primaires, dont :

2,109 écoles communales,

796 écoles subsidiées,

2,284 écoles entièrement libres.

En 1845, au lieu de 5,189 écoles primaires, il y en avait 5,607, savoir :

2,350 écoles communales,

1,003 écoles adoptées,

78 écoles soumises à l'inspection en vertu de l'article 2 de la loi,

1,863 écoles privées entièrement libres,

Il y avait de plus, 373 pensionnats.

Ainsi, messieurs, en 1845, il y avait 5,667 écoles, et en 1860 il n'y en avait plus, d'après les statistiques, que 5,558, savoir :

3,095 écoles communales,

749 écoles adoptées,

28 écoles privées soumises à l'inspection,

1,450 écoles entièrement libres,

366 pensionnats.

Mais il est à remarquer, et j'appelle sur ce point l'attention de la Chambre, que dans les statistiques de 1840 et de 1845 on a compris toutes les écoles existantes, c'est-à-dire un certain nombre de petites écoles de village qui n'étaient ouvertes que pendant quelques heures dans la journée ou pendant une saison de l'année, souvent le soir seulement et quelquefois un seul jour de la semaine ; ces petites écoles étaient tenues en général par des personnes qui ne faisaient nullement de la profession d'instituteur un état permanent, mais un pis-aller.

Il est donc impossible de comparer exactement le nombre des écoles primaires, communales existant en 1860, au nombre d'établissements d'instruction grands et petits existant en 1840 et 1845. Les auteurs des deux statistiques élaborées en 1845 et en 1860, que je crois exactes, sans cependant l'affirmer, - car en matière de statistique, il est impossible de donner une garantie absolue d'exactitude, - les auteurs des deux statistiques, dis je, sont partis de points tout à fait différents : et c'est ainsi que les résultats présentent également une certaine différence.

L'honorable M. Hymans nous a dit encore, et il vient de répéter, que le nombre des élèves fréquentant les écoles primaires en 1860 n'accuse pas sur celui des enfants fréquentant les écoles en 1840, une progression proportionnée à l'accroissement de ta population.

Eh bien, c'est encore une erreur, ou plutôt une explication, ici, est encore nécessaire.

Les statistiques de 1840 renseignent, comme l'a dit l'honorable M. Hymans, 453,000 élèves sur une population de 4,065,000 habitants, soit, comme il l'a encore constaté, un élève sur neuf habitants environ. Mais on ignore combien, sur ces 453,000 élèves, il y en avait qui étaient âgés de 7 à 15 ans. Ce nombre de 453,000 comprend, en effet, tous les enfants au dessous de l'âge de 15 ans et qui fréquentaient le grand nombre d'écoles primaires et autres écoles dont j'ai parlé.

Dans les statistiques postérieures, au contraire, on n'a compris que les enfants en âge de fréquenter l'école primaire, c'est-à-dite les enfants de 7 à 14 ans. (Interruption.)

Ainsi on sait parfaitement qu'en 1860, les écoles primaires ont été fréquentées par 515,892 élèves de l’âge de sept à quatorze ans, la population du royaume était alors de 4,700,000 âmes.

Maintenant, est-ce à dire qu'il y avait, dans les écoles primaires, moins d'élèves, eu égard à la population, en 1860 qu'en 184 0 ? Messieurs, je ne le crois pas. C'est un point qu'il est impossible d'éclaircir d'une manière complète, parce que, je le répète, les statistiques ne renseignent pas combien il y avait, en 1840, d'enfants de l'âge de sept à quatorze ans fréquentant les écoles primaires. Mais si l'on veut établir une comparaison exacte, il faut comparer le chiffre des élèves âgés de moins de quinze ans qui fréquentent aujourd’hui les établissements d'instruction en général, au chiffre de 453,000 enfants cités dans les statistiques de 1840. Je pourrais vous donner le relevé suivant :

On compte aujourd'hui 596,000 enfants, soit 600,000 âgés de moins de 15 ans fréquentant les différents établissements d'instruction élémentaire, savoir :

Les écoles primaires, 515,892

Les écoles gardiennes, 40,613

Les écoles manufactures, 23,293

Les écoles ressortissant au département de la justice, 4,800.

Enfin, les élèves au-dessous de 15 ans fréquentant les sections préparatoires des écoles moyennes, 11,745.

Le chiffre total s'élève à peu près à 600,000 enfants aujourd'hui. En 1840 il n'était que de 453,000. Il y a donc une différence notable, qui prouve que les conséquences tirées par M. Hymans des chiffres cités par lui ne sont pas exactes.

Il est un troisième point sur lequel je désire répondre à l'honorable député de Bruxelles. Dans son premier discours, l'honorable membre a dit que le nombre des instituteurs diplômés était proportionnellement plus considérable en 1840 qu'en 1860.

En effet la statistique de 1840 renseigne 4,177 instituteurs dont 2,744 communaux, et 1,433 subsidiés ou entièrement libres ; 2° 1,143 institutrices dont 284 communales et 859 subsidiées ou entièrement libres. Il y avait donc 5,320 agents, dont 3,028 communaux et 2,292 subsidiés ou entièrement libres. De ces 5,320 agents, 1,783 étaient porteurs d'un brevet de capacité, et 3,537 étaient entrés dans l'enseignement, sans avoir subi aucun examen, et il est à remarquer que beaucoup de ces instituteurs ne tenaient alors l'école que pendant l'hiver.

Messieurs, la valeur des diplômes ou des certificats de capacité, ceux du troisième degré surtout, qu'on délivrait antérieurement à la promulgation de la loi du 23 septembre 1842, était en général infiniment moindre que la valeur des diplômes qui sont délivrés aujourd'hui dans les écoles ou dans les sections normales : l'honorable M. Hymans a bien voulu le reconnaître. Et, en effet, il résulte des renseignements déposés au département de l'intérieur qu'il y avait dans le personnel de l'enseignement (page 483) primaire des cabaretiers, des maçons, des bouchers, des charpentiers, des barbiers et même des saltimbanques ! L'abus était devenu tellement grand que, depuis la mise en vigueur de la loi du 23 septembre 1842, le département de l'intérieur a dû prendre les mesures les plus énergiques pour éloigner de l'enseignement les singulières espèces d'instituteurs que je viens d'énumérer.

Ensuite, messieurs, le certificat de capacité, surtout pour le troisième degré, s'obtenait avec une extrême facilité. D'après le règlement, voici en quoi consistait l'examen : le récipiendaire devait savoir lire des pièces imprimées ou écrites en toutes sortes de caractères. On considérait cette connaissance comme la marque d'une grande aptitude. Tous, nous nous rappelons qu'ù cette époque on imprimait de petits livres, a b c en différents caractères, le gothique, le moderne, le coulé, etc. ; les instituteurs devaient être en état de lire tous les caractères. On leur donnait ensuite à corriger un travail de cacographie ; puis ils avaient à faire une petite analyse grammaticale, à résoudre un problème d'arithmétique des plus élémentaires, enfin ils avaient à subir une dernière épreuve : on remettait des plumes au récipiendaire ; il devait les tailler, et lorsqu'il les taillait en perfection, cela lui valait un certain nombre de bons points, en d'autres termes, il était passé maître dans l'art de tailler les plumes !

Pouvons-nous, messieurs, comparer nos instituteurs d’aujourd’hui, munis d'un diplôme de capacité délivré à la suite de deux années d'études dans une école ou dans une section normale ; pouvons-nous les comparer à ces espèces d'instituteurs dont je viens de parler et qui subissaient un examen tout à fait dérisoire ?

Du reste, et ici je suis d'accord avec l'honorable M. Hymans, je désire que bientôt nous puissions voir des instituteurs diplômés placés à la tête, non seulement des écoles communales, mais encore de toutes les écoles privées. Nous marchons vers ce but. Le gouvernement, d'accord avec les Chambres, a fait d'énormes efforts pour augmenter le nombre des élèves normalistes.

J'ai dit et l'honorable M. Rodenbach a répété, qu'en 1845 il y avait, dans le pays, neuf établissements normaux, les deux écoles normales primaires de l'Etat, et les sept écoles normales libres. Aujourd'hui nous avons trente et un établissements d'instruction normale primaire pour instituteurs et pour institutrices.

En 1843, le nombre des élèves normalistes était de 468 et en 1865, il est de 1,419 !

Il semble donc qu'il y a là un véritable progrès, et que, loin de décourager le gouvernement dans les efforts qu'il fait, on devrait, au contraire, reconnaître les bons résultats qui ont été obtenus, et même s'en féliciter.

Enfin, messieurs, il reste à éclaircir un dernier point touché par divers orateurs et notamment par l'honorable M. Hymans dans son premier discours. Il s'agit des locaux d'école. Voici la vérité. Sous ce rapport encore nous avons, depuis 20 ans, fait des progrès remarquables.

En 1840, les salles d'école fournies par les communes étaient au nombre de 2,006 ; et le nombre des logements d'instituteurs de 1,151. Beaucoup de ces écoles étaient tenues dans des salles de cabaret. Environ la moitié des instituteurs communaux étaient obligés, à cette époque, de se procurer, de leurs propres deniers, des locaux d'école, et les deux tiers d'entre eux devaient également se loger à leurs frais. Parmi les locaux d'école fournis par les communes 1,040 étaient tenus en location par elles. Un assez grand nombre de locaux qui étaient la propriété des communes, exigeaient des travaux de réparations considérables ; d'autres étaient dans un délabrement tel, qu'il était indispensable de les reconstruire entièrement.

En 1860, les communes possédaient autant de locaux qu'il y avait d'écoles communales, c'est-à-dire 3,095, et elles accordaient un logement ou une indemnité de logement à chaque instituteur.

De ces 3,095 locaux d'école 2,463, ainsi que 1,876 logements d'instituteurs, étaient en 1860 la propriété des communes. 1,613 de ces locaux d'école, comme l'a dit l'honorable M. Hymans, et 1,295 de ces logements réunissent les conditions voulues pour être réputées convenables aux termes de la loi.

Les locaux d'école appartenant aux communes renferment 3,414 classes pouvant contenir au-delà de 230,000 élèves.

Ainsi, en 1840, 1,000 bâtiments d'école seulement appartenaient aux communes.

En 1860, 2,465 locaux d'école étaient la propriété des communes. Soit, dans ce laps de temps, une augmentation de 1,465 locaux d'école appartenant aux communes.

Mais, je le répète, comme je l'ai dit plusieurs fois déjà, il nous reste encore beaucoup à faire et il nous restera longtemps, encore beaucoup à faire. Si l'on dépensait aujourd’hui 23 à 30 millions pour des locaux d'école, le lendemain il faudrait encore de nouveaux crédits. Tous les jours les besoins augmentent, et tous les jours, avec de bons motifs on devient plus exigeant.

Autrefois, on se contenait d'une école communale au centre du village ; aujourd'hui on demande des écoles dans les hameaux.

On se contentait autrefois d'une seule école pour les garçons et pour les filles. Aujourd'hui l'on demande, et avec ra'ion, que les sexes soient séparés jusque dans les écoles des plus petits hameaux.

D'un autre côté, l'on se contentait autrefois d'une école modeste, d'un simple bâtiment, d'une grande salle ; on achetait une maison, on démolissait quelques cloisons et l'école était faite. Mais aujourd'hui on demande de petits monuments, des écoles bien construites, bien aérées, avec un logement convenable pour l'instituteur, et j'approuve cette ambition. D'après moi, l'école doit être l'un des plus jolis monuments de la commune. Et le gouvernement doit encourager ces tendances, sans cependant aller trop loin.

Enfin, indépendamment des écoles et des habitations d'instituteurs, on exige que chaque instituteur ait son jardin, un jardin de 10 ares environ, situé au centre de la commune.

Pour organiser cela, pour se procurer tout cela, il faut nécessairement dépenser de l'argent et il faudra encore longtemps et constamment dépenser de l'argent pour compléter l'organisation matérielle de l'enseignement primaire.

M. Bouvierµ. - C'est la plus belle dépense pour un gouvernement libéral.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Aussi nous ne nous en plaignons pas.

Messieurs, la Chambre le sait, des dépenses nombreuses ont été faites par les communes, par les provinces et par l’Etat pour construction de maisons d'école. De 1845 à 1860, on a dépensé 11,865,000 fr., depuis 1851 jusqu'en 1863 on a dépensé pins de 13 millions, et depuis la mise à exécution de la loi jusqu'en 1863, le gouvernement, les provinces et les communes ont dépensé plus de 18 millions pour construction de bâtiments d'école.

M. Bouvierµ. - Tant mieux !

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - L'honorable M. Bouvier qui dit : « Tant mieux ! » a bien voulu, en prenant la parole tantôt, faire l'éloge des efforts du gouvernement, et je l'en remercie. Il a signalé à l'attention du ministre la nécessité d'agrandir la section normale adjointe à l'école moyenne de Virton. Rien ne s'y oppose. Cet agrandissement peut parfaitement se faire. Du moment que la commune, qui est chargée de fournir les bâtiments pour les écoles normales, jugera convenable de demander l'autorisation, cette autorisation ne sera pas refusée, et si un léger subside...

M. Bouvierµ. - Le moins léger possible.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Oui, mais les villes doivent, je le répète, fournir les locaux pour les écoles normales et ce n'est que dans des cas très particuliers qu'on peut accorder un léger subside. Du reste, si une demande est faite, je l'instruirai avec toute la bienvcillance possible.

M. Bouvierµ. - Je prends acte de vos généreuses et bonnes paroles.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - M. Hymans a reproché au gouvernement de ne pas admettre, de combattre même les propositions qui pourraient être faites, dans l'intérêt de l'enseignement primaire, par des membres de la Chambre. Il a rappelé l'incident de l'amendement de l'honorable M. Guillery, auquel le gouvernement a cru devoir refuser son appui lorsqu'il a été présenté.

Veuillez-vous rappeler, messieurs, que le gouvernement ne s'est pas opposé en principe à cet amendement. Il a déclaré, lorsque l'amendement était présenté, qu'il n'était pas en mesure de déclarer le chiffre dont il aurait besoin.

Il a donc adhéré à l'amendement en principe, il a déclaré même qu'il aurrait à demander des subsides, mais qu'il ne le pouvait immédiatement parce que les rapports qui devaient être fournis par les gouverneurs ne lui étaient pas encore parvenus. Je me trouve à peu près dans le même cas en ce moment. On prépare le budget de l'intérieur pour 1866. J'ai fait porter à ce budget un crédit pour l'enseignement primaire ; mais j'ai eu soin de mettre en note qu'il me faudra probablement demander un supplément, parce que je ne puis en ce moment indiquer le chiffre qu'il faudra pour 1866, attendu que les besoins ne sont pas encore connus.

Le reproche donc n'est pas juste. Le gouvernement n'a pas refusé en principe l'augmentation de crédit. Il a déclaré qu'il demanderait en temps opportun ce dont il aurait besoin, et il l'a fait. Car depuis lors, le (page 484) crédit pour le service ordinaire de l’enseignement primaire porté au budget de l’intérieur a été successivement augmenté. Au budget de 1862, il était de 1,332,000 fr., au budget de 1865, il est de 2,093,000 fr.

Quoi qu'en dise l'honorable M. Hymans, le gouvernement ne refuse jamais d'examiner les différents systèmes d'amélioration qui lui sont indiqués dans cette Chambre. On a parlé de réduire le nombre d'heures de classe. Une enquête est ouverte sur ce point. Quelques-unes des réponses me sont parvenues ; elles ne sont pas favorables au système, mais elles viennent, je dois le déclarer, des provinces où l'industrie est la moins développée. Il est possible que les réponses des provinces industrielles soient différentes, que l'on y trouvera que l'on peut réduire le nombre d'heures de classe. C'est une question à étudier ; mais je constate que, dans aucun cas, le gouvernement ne refuse d'examiner les mesures qu'on lui signale comme bonnes.

L'honorable M. Hymans vient aussi da vous parler de l'arrêté du 12 janvier 1863. J'ai eu l'honneur d'expliquer à la Chambre l'économie de cet arrêté lors de la discussion du budget de l'intérieur. L'honorable membre perd de vue que les émoluments que l'on accorde aux instituteurs se composent de deux éléments : un élément fixe et un élément variable. On accorde à l'instituteur communal un traitement, c'est le conseil qui l'accorde, ce n'est pas le département de l'intérieur.

M. Hymans. - C'est ce dont je me plains.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Les principes qui ont été admis sont conformes à la loi.

On fait aujourd'hui, pour l'enseignement primaire, ce qu'on a toujours fait pour les enseignements à divers degrés, c'est-à-dire qu'un traitement fixe est accordé à l'instituteur primaire comme aux professeurs des athénées et des écoles moyennes, etc., etc.

Indépendamment de ce traitement fixe et qui est toujours payé, l'instituteur peut gagner un casuel en rapport avec le nombre des élèves qui fréquentent l'école.

Cette mesure est excellente. Elle a pour but de stimuler le zèle de l'instituteur. L'honorable membre dit : Comment cela peut-il stimuler le zèle de l'instituteur ? De mille manières. L'instituteur peut se montrer bienveillant pour les élèves, il peut aller les chercher en quelque sorte. Le casuel est un stimulant pour lui, je le répète, et depuis que ce minerval est payé en raison du nombre des élèves qui fréquentent réellement l'école, on a constaté que le nombre de ceux-ci était beaucoup plus considérable.

Messieurs, je ne suivrai pas l'honorable membre en ce qui concerne l'instruction obligatoire, cette discussion serait ici sans résultat, car il s'agit de savoir uniquement en ce moment si la Chambre veut voter un million pour construction et ameublement de nuisons d'école. Je crois qu'il ne faut pas, à cette occasion, traiter toutes les questions qui se rattachant à l'enseignement. Je constaterai seulement que bien que l'enseignement obligatoire n'existe pas en Belgique, les administrations communales ne sont pas cependant désarmées vis-à-vis d'une catégorie du moins de parents qui refusent d'envoyer leurs enfants aux écoles.

M. Hymans. - C'est injuste.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Si c'est injuste pour les indigents, ce serait encore plus injuste vis-à-vis de tout le monde ; je dis donc que le bourgmestre peut priver de certains secours ou même faire rayer de la liste des indigents les parents qui n'envoient pas leurs enfants à l'école, c'est un moyen de rigueur dont il ne faut certes pas abuser ; du reste 999 fois sur 1,000 la simple menace suffit.

Il me reste un mot à dire en ce qui concerne la dernière partie du discours de l'honorable M. Hymans. L'honorable membre nous a rappelé qu'au sein du Sénat un honorable sénateur a émis l'idée de contracter un emprunt afin d'accélérer la construction des écoles qui restent encore à créer.

L'honorable membre nous a rappelé que cette idée n'était pas nouvelle, qu'elle avait été indiquée dans un rapport que le gouvernement a fait distribuer il y a bien longtemps ; il croit que cette idée pourrait être avantageusement appliquée aujourd'hui. Je ne suis pas de cet avis ; je crois que si l'on voulait réaliser ce système, on marcherait beaucoup moins vite et surtout que ce système serait beaucoup moins avantageux pour les communes.

En 1851, messieurs, le vent soufflait fort aux économies, le gouvernement ne disposait que de crédits très minimes pour la construction d'écoles ; on portait d'abord au budget de l'intérieur 75,000 fr. par an pour cet objet ; plus tard ce chiffre a été porté à 150,000 fr.

Le premier crédit extraordinaire d'un million pour ces constructions a été demandé, en 1851, je pense, après l'élaboration de ce projet d'emprunt ; ce million a été distribué très lentement. Il n'a été épuisé qu'en 1859, ainsi voilà un million dépensé en 8 ans.

Un second million a été demandé, pour le même objet, en 1859, et n'a été dépensé complètement qu’en 1863. Vous voyez donc, messieurs, qu'on ne marchait, à cette époque, que très lentement et que les sommes dont le gouvernement disposait annuellement étaient assez minimes ; on devait songer, en 1851, à créer d'autres ressources.

Mais depuis lors tout est changé, la législature se montre généreuse, elle a voté un troisième million en 1863, un quatrième million en 1864, aujourd’hui, en 1865, un nouveau million est demandé, c'est le cinquième ,je crois pouvoir annoncer que probablement, avant la fin de cette session, il sera nécessaire d'en demander encore un.

- Plusieurs membres. - Très bien ! Très bien !

M. Allard. - C'est le résultat de la loi qui abolit les octrois. Les ressources que le fonds communal procure aux communes leur permettent d'intervenir et d'obtenir ainsi des subsides de l'Etat.

iiVDPBµ. - D'après le projet d'emprunt indiqué dans le troisième rapport sur l'enseignement primaire, les sept huitièmes de cet emprunt devaient être prêtés aux communes qui étaient tenues de rembourser cette avance en 25 ans au moyen d'annuités de 6 p. c. Ce n'émit donc qu'un prêt fait aux communes et elles étaient tenues d'en payer un certain intérêt. Quant au gouvernement, il n'intervenait, à titre de subside, que pour une huitième part, et encore était-il bien stipulé que les communes les plus pauvres pourraient seules réclamer cette part d'intervention.

Aujourd'hui il en est tout autrement ; le gouvernement ne limite pas ses subsides au huitième de la dépense ; il intervient en moyenne, sans en faire une règle, pour un tiers environ, et les communes les plus pauvres obtiennent des subsides dans une proportion plus élevée. Si à ce système adopté aujourd'hui on substituait l'intervention pour un huitième, vous rendriez un très mauvais service aux communes, nul ne le contestera.,

Mais, dit-on, les communes n'ont pas de ressources. C'est une erreur ; l'argent ne manque pas aux communes, le fonds communal leur fournit des revenus qu'elles n'avaient pas en 1851. De plus, il s'est créé depuis quelques années une institution qui réalise en grande partie l’idée du projet de 1851, je veux parler du crédit communal. Là, les communes peuvent se procurer, à un intérêt modique et avec un amortissement à très long terme, toutes les sommes qu’elles doivent fournir soit pour construire des bâtiments d'école, soit pour faire d'autres dépenses. Cette facilité de se procurer de l'argent et d'un autre côte les larges subsides du gouvernement créent pour les communes une situation infiniment plus favorable que celle qui leur serait faite si l'on revenait aux anciens projets.

D'un autre côté, messieurs, je me demande s'il faut trop faciliter aux communes les moyens de s'endetter.

Il est évident que le présent ne doit pas payer toute la dépense d'institutions qui doivent profiter aux générations futures, mais il faut cependant que le présent en paye sa part et ne lègue pas à l'avenir des charges trop lourdes et l'impossibilité de faire encore quelque chose. Remarquez, messieurs, qu'en Belgique les communes ont pour plus de 150 millions de dettes et que depuis qu'il est établi, le Crédit communal a déjà prêté aux communes plus de 23 millions.

Du reste, messieurs, pour en finir avec cette question de l'emprunt, je ferai à la Chambre une déclaration nette et catégorique : quand le million que nous demandons aujourd’hui sera épuisé, nous en demanderons un autre, même dans la session actuelle, s'il le faut. Quand ce sixième million sera épuisé, nous en demanderons un septième, puis un huitième, et, chaque fois qu'il faudra des ressources pour l'enseignement primaire, le gouvernement trouvera toujours de l'argent dans sa caisse, et si elle était vide, il saurait en emprunter au besoin. L'argent ne fera jamais défaut quand il s'agira de propager l'enseignement populaire.

- Plusieurs membres. - Très bien ! très bien !

M. Mullerµ. - Messieurs, après les paroles que vient de prononcer l'honorable ministre de l'intérieur, je n'ai que quelques observations à ajouter.

Je ne m'étais fait inscrire que pour m'élever contre le discours par trop décourageant pour le gouvernement et pour le pays de l’honorable M. Hymans. M. le minutie de l'intérieur a parfaitement indiqué que les renseignements que l'honorable membre avait puisé dans la statistique n'étaient point de nature à démontrer qu'en matière d’enseignement primaire nous n'aurions pas progressé depuis 1840.

Il est de toute évidence, et personne parmi nous ne peut douter qu’aujourd'hui l'enseignement primaire est dans une situation plus prospère et plus satisfaisante qu'il ne l'était en 1840.

Il y a, messieurs, deux choses à rechercher en fait d’enseignement. (page 485) Il ne s'agit pas seulement de citer des chiffres ; il faut considérer moins la quantité que la qualité.

Qu'était l'enseignement avant 1840 ? On vous l'a dit, messieurs, et je puis le certifier. Dans la province de Liége, par exemple, parmi les instituteurs qui existaient alors, il n'y en avait guère plus 25 sur 100 qui fussent capables de passer l'examen que l'on exige aujourd’hui ; je vous laisse à penser dans quel état d'instruction et comment on sortait des écoles à cette époque.

Aujourd'hui on se plaint encore d'une foule d'individus ne sachant ri lire ni écrire couramment, bien qu'ils aient fréquenté les classes, c'était bien pis autrefois.

Je pense, messieurs, avoir suffisamment réfuté les inductions défavorables, résultant des chiffres qui ont pu être cités par l'honorable M. Hymans et je crois qu'il suffit d'un peu de réflexion pour qu'il n'existe, non pas dans l'esprit des membres de la Chambre mais dans l'esprit de tous les habitants du pays, aucune incertitude sur les progrès que nous avons réalisés dans l'enseignement primaire.

J'ajoute néanmoins, messieurs, avec M. le ministre de l'intérieur et comme nous tous nous en avons la conviction, que nous avons encore beaucoup d'améliorations à introduire, mais ne disons pas que nous n'avons rien fait, que jusqu'ici nous n'avons travaillé qu'à une œuvre stérile. Ce qui est exact, c'est que nous avons beaucoup gagné, et que nous avons encore beaucoup à conquérir.

Puisque j'ai la parole, messieurs, je me permettrai une observation relativement à l'argument qu'on tire toujours des miliciens ne sachant ni lire, ni écrire, pour accuser le manque de fréquentation des écoles primaires.

D'abord, messieurs, ce mode de constatation est très irrégulier et très défectueux ; en second lieu l'absence d'instruction, même constatée, au moment du tirage de la milice, ne prouve nullement que les enfants n'ont pas fréquenté l'école primaire.

Si l'ou s'assurait si les miliciens ont fréquenté l'école, et si l'on ne se bornait pas à leur demander s'ils savent lire ou écrire, le résultat serait tout autre que celui que l'ou obtient aujourd'hui.

M. Delaetµ. - C'est cela.

M. Mullerµ. - Cela dit, messieurs, je veux constater une lacune regrettable dans le système de notre enseignement.

Entre l'école primaire et l'âge oµ le jeune homme est appelé au tirage de la milice, il s'écoule plusieurs années.

M Rodenbachµ. - 6 ou 7 ans.

M. Mullerµ. - Cet intervalle, qui est de 6 ou 7 ans selon la date de la naissance de l'individu, suffit largement pour qu'il ne sache plus ni lire ni écrire, parce qu'il n'a pas été mis à même de continuer à pratiquer la lecture et l'écriture, enfin de poursuivre l'enseignement primaire.

Que manque-t-il donc ?

Des écoles d'adultes, des écoles dominicales ou des écoles du soir.

M. Bouvierµ. - C'est cela.

M. Mullerµ. - Voilà, selon moi, l'une des lacunes les plus graves qui existent dans notre enseignement primaire. Voilà le complément indispensable.

Dans les paroles qu'a prononcées l'honorable M. Hymans j'ai noté une observation que je recommanderai à M. le ministre de l'intérieur dans le but d'avoir pour l'avenir des données plus positives sur les progrès de l'enseignement primaire.

Il serait facile, en effet, de recourir au moyen proposé par l'honorable M. Hymans, c'est-à-dire de faire relever, à propos de chaque acte de mariage, le nombre des personnes qui signent et le nombre de celles qui auraient déclaré ne pas savoir signer.

Si l'on adoptait en même temps un mode plus précis que celui qui est en vigueur aujourd'hui lors du tirage au sort, nous aurions à l'avenir des moyens plus certains de constater le degré d'avancement de l'enseignement primaire en Belgique.

Je borne là mes observations, car, je n'ai pas besoin de répéter, je pense ce que j'ai dît il y a quelque temps, à savoir que l'attention du gouvernement et sa sollicitude doivent se porter sur la nécessité d'organiser d'une manière convenable l’enseignement des filles, qui n'est pas suffisant en Belgique.

Je n'admets pas, quant à moi, que l'Etat n'ait pas d'établissements à lui, pour former des institutrices. Il doit y avoir, pour l'enseignement des filles, ce qui existe pour l'enseignement des garçons ; l'école de l'Etat d'un côté, de l’autre l’école normale annexée à l'école moyenne, et enfin, l'école libre.

Il faut, sons ce rapport, que l'instruction et l'éducation des filles soient mises sur la même ligne que l’'instruction et l'éducation des garçons.

M . Van Overloopµ. - Messieurs, les dernières paroles de M. le ministre de l'intérieur, paroles auxquelles j'applaudis, me font espérer que j'obtiendrai une réponse favorable à la question que je désire lui poser.

Dans une réponse faite à la section centrale par l'honorable ministre de l'intérieur, je lis :

« Les nouvelles demandes de subsides dont l'instruction est terminée, et auxquelles on a promis de donner suite, sous réserve de l'allocation d'un nouveau crédit extraordinaire d'un million. sont au nombre de 72 ; elles comportent ensemble une somme de 361,301 francs. »

Je désire savoir si parmi ces 72 demandes se trouvent comprises celles des communes de Melsele, Stekene, Haesdonck, St Nicolas (hameau de Ter-Eecken), et Sinay (section de Zwaenaerde). (Interruption.)

Il me semble que je suis parfaitement dans la question, puisqu'il s'agit d'un crédit d'un million pour construction d'écoles, et je ne m'en écarte pas en faisant la statistique des miliciens qui ne savent ni lire ni écrire, et en parlant de l’instruction obligatoire comme d'honorables préopinants l'ont fait.

Je fais cette question par une raison fort simple, c'est qu'il est de la haute urgence qu'il soit donné suite aux demandes dont je viens de parler, et que je suppose que M. le ministre de l'intérieur a sous les yeux le tableau des 72 communes dont la réponse à la section centrale fait mention.

Ainsi à Melsele, d'après une lettre d'une personne qui doit être bien informée, lettre que j'ai reçue ce matin même, l'école est tellement insalubre qu'il ne serait pas étonnant de voir un jour ou l'autre une épidémie éclater parmi les enfants qui la fréquentent, comme cela est arrivé, il y a quelques années, dans la commune de Vynckt.

A l'école de Melsele, les enfants ont à peine un mètre cube d'air par tête tandis qu'il en faut plus de trois.

Il en est à peu près de même, m'écrit-on. à Stekene, et cela malgré les millions votés pour l'enseignement primaire dans les dernières sessions.

On m'assure cependant que depuis trois ans les plans et les devis des écoles à construire sont arrêtés et que les bâtiments seraient faits depuis longtemps si le gouvernement n'était en retard de donner des subsides.

Si ces faits sont exacts, quelle conséquence faut-il en tirer, messieurs ? Que l'on distribue ailleurs les millions que nous votons ; qu'il est des arrondissements et des communes qui sont favorisés aux dépens des autres.

Il y a cependant un double motif pour accorder sans retard des subsides aux communes dont je viens de parler : le motif de l'hygiène et le motif de l'instruction.

L'observation que j'ai faite quant aux communes de Melsele et de Stekene, relativement au retard dans l'octroi des subsides, quoique l'instruction soit achevée, s'applique également, d'après mon correspondant, au local de l'école de Saint-Nicolas, hameau de Ter Eecken, au local de l'école de Haesdonck et à celui de l'école de Sinay, section de Zwaenaerde.

A quoi nous sert de voter des millions si nous n'en avons pas notre part ? Je ne demande pas plus que les autres, ma s je demande que chaque commune ait sa part des subsides, puisque toutes contribuent à verser dans les caisses des receveurs, les sommes au moyen desquelles le gouvernement est mis à même d'accorder des subsides.

J'ai une autre observation à présenter, c'est que, par suite de l'abus de la paperasserie, l'instruction des demandes se fait avec une lenteur décourageante. Les communes de Verrebroeck, Zwyndrecht (Tête de Flandre), Vracene, Kemscke, Saint-Paul, Tamise ont beaucoup à se plaindre sous ce rapport, d'après ce qu'on me dit.

Je désire que l'honorable ministre de l’intérieur, dont on connaît les bonnes dispositions au point de vue de la décentralisation et de la réduction de la bureaucratie, prenne acte de ces observations et fasse en sorte que l'instruction des affaires relatives à l'établissement d'écoles se fasse désormais avec moins de lenteurs qu'aujourd'hui.

L'instruction est très répandue dans le pays de Waes ; si elle ne l'est pas davantage, il ne faut pas, comme on le voit, en chercher la cause dans l'indifférence des administrations locales.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - L'honorable M. Van Overloop ne s'attend pas, je pense, à ce que je lui fasse une réponse complète, il comprend qu’il ne m'est pas possible de savoir si parmi les 132 communes à qui on a promis des subsides...

M. Van Overloopµ. - Les 112.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Pardon ; il y a aujourd'hui 132 communes à qui on a promis des (page 486) subsides sur le million que la Chambre va voter, je l'espère ; et l'ensemble de ces subsides comporte déjà une somme de 593,000 fr. ; en sorte que nous serons bientôt amenés à vous demander encore un nouveau crédit.

L'honorable membre comprendra, dis-je, qu'il m'est impossible de me rappeler le nom de toutes les communes à qui des subsides ont été promis. Je crois d'ailleurs que le but de M. Van Overloop est complètement atteint en me faisant la question, (Interruption.) Je regrette infiniment que ce soient les communes de l'arrondissement de M. Van Overloop qui aient si amèrement à se plaindre aujourd’hui seulement ; mais je crois pouvoir donner à l'honorable membre l'assurance que ces plaintes ne sont pas fondées, car je n'ai refusé à aucune commune, qu'elle fût de l'arrondissement de Saint-Nicolas ou de tout autre, les subsides qu'il était juste de leur accorder.

Je suis, en général, quant aux chiffres des subsides, les propositions des députations permanentes. Ces collèges interviennent, dans la plupart des cas, pour une somme égale aux deux cinquièmes du déficit et l'Etat pour les trois cinquièmes. Les plaintes des communes que l'honorable représentant de Saint-Nicolas reproduit ici ne sont donc pas fondées et M. Van Overloop peut affirmer aux bourgmestres de son arrondissement qui se sont adressés à lui, qu'on les a induits en erreur. Toutes les demandes qui ont été faites ont été accueillies ; aucune n'a été écartée ; or, si rien n'a été refusé on n'a pas le droit de se plaindre.

Quant aux complications administratives dont a parlé l'honorable membre, je reconnais qu'elles peuvent être cause de certaines lenteurs dans l'instruction de quelques affaires concernant l'établissement de bâtiments d'écoles, mais comme le gouvernement intervient dans la dépense pour une forte part, il a le droit d'exiger que les plans soient bien faits, qu'ils réunissent surtout toutes les conditions hygiéniques voulues. Quant aux façades, toute latitude est laissée aux députations et aux communes, mais le gouvernement se montre et doit se montrer sévère dans l'examen des plans de la distribution des locaux ; quand les plans ne sont pas parfaits, on fait des observations, les projets sont renvoyés aux communes ; de là des lenteurs inévitables mais justifiées sous tous les rapports.

M. Hymans. - J'ai le droit de trouver étrange que M. Van Overloop me reproche de parler d'instruction obligatoire à propos d'un projet qui concerne l'instruction publique. Cela est certes beaucoup plus intéressant que les appétits de deux ou trois communes de l'arrondissement de Saint-Nicolas.

Lors de la discussion du budget de l'intérieur, il a été décidé de commun accord avec M. le ministre de l'intérieur, que l'examen de ces questions serait ajournée jusqu'à la discussion de ce crédit.

Je n'ai parlé qu'incidemment, d'ailleurs, de l'instruction obligatoire et pour prouver qu'il était indispensable de construire le plus tôt possible des bâtiments d'école dans toutes les communes du pays, et je persiste à croire, malgré tout ce qu'a pu dire M. le ministre de l'intérieur, que le système que j'ai indiqué serait beaucoup plus profitable au pays que celui que le gouvernement met en pratique.

L'honorable ministre de l'intérieur a commis une erreur grave en disant que le premier crédit d'un million avait été proposé après l'examen fait au ministère de la question de l'emprunt. (Interruption). C'est une erreur très importante, car elle forme la base essentiels de l'argumentation de M. le ministre. J'ai sous les yeux le rapport de 1854 présenté par l'honorable M. Piercot.

Le premier crédit d'un million fut alloué le 20 décembre 1851 et c'est après le vote de ce crédit que le gouvernement trouva que l'allocation était loin de suffire à tous les besoins, même en admettant une intervention plus large de la part des administrations provinciales et communales, et il disait dans son rapport, qu'il fallait employer des moyens plus efficaces si l'on voulait obtenir en peu d'années la construction des maisons d'école qui manquaient dans un grand nombre de communes.

Le système des millions successifs était donc inventé avant qu'on l'occupât de l'emprunt, qui ne paraissait pas moins indispensable.

Maintenant il est possible que, les statistiques ne prouvant rien, ce rapport ne prouve pas davantage.

Les statistiques contenues dans les rapports triennaux ne prouvent rien ; on les explique, ou les commente de toutes manières. La statistique des miliciens elle-même n'est plus un élément de preuve. S'il en est ainsi je ne sais plus où aller chercher des moyens de m'éclairer. Certes si les statistiques sur lesquelles je m'appuie ne prouvent rien, ou peu de chose, l'opinion de M. Muller, qui n'invoque rien à l'appui de sa thèse, prouve encore moins. A l'appui de ce que j'avance, je cite au moins des faits ; M. Muller ne nous donne que sa conviction personnelle ; or, quelque confiance que j'aie en son opinion, je crois que les chiffres sont plus concluants.

M. Mullerµ. - J'ai dit que l'instruction de 1840 n'était pas celle d'aujourd'hui.

M. Hymans. - Cela re m'est pas démontré et je crois malgré tout, qu'il y avait d'excellents instituteurs en 1810 ; je crois que s'il y avait des instituteurs cabaretiers il y en avait aussi dont le brevet de capacité était sérieux ; la plupart des instituteurs brevetés sortaient des écoles normales des Pays-Bas, et la génération qui nous a précédés valait bien la nôtre.

Je proteste d'ailleurs contre le reproche qui m'a été fait par M. Muller d'avoir prononcé un discours décourageant.

Je n'ai voulu décourager personne ; j'ai au contraire voulu encourager et stimuler.

A mon avis, quelle que soit la dépense que le gouvernement fasse en faveur de l'instruction, il n'en fait jamais assez. Est-ce là une opinion décourageante ? Evidemment non ! L'enseignement de l'Etat, tel doit être le premier article du programme de tout gouvernement progressif, de tout parlement libéral. Instruction par l'Etat, diffusion de l'instruction dans les plus vastes proportions, telle doit être notre devise, et loin de décourager, je serai toujours prêt à suivre le drapeau qui le portera dans ses plis.

M. le ministre de l'intérieur nous dit : A quoi bon faire un emprunt ? Chaque fois qu'un million est épuisé, on en demande un autre ; et d'ailleurs les communes peuvent s'adresser au Crédit communal. D'accord, mais si le gouvernement faisait des avances aux communes spécialement pour construire des bâtiments d'école, les communes seraient bien obligées de donner cette destination aux fonds qui leur seraient avancés ; tandis que bien souvent elles font des emprunts au Crédit communal pour couvrir des dépenses de luxe et sans se préoccuper d'en affecter une partie aux besoins de l'instruction.

En créant le fonds commun il, vous n'avez pas inscrit dans la loi l'obligation pour les communes de consacrer une partie des sommes qu'elles allaient recevoir à la construction de bâtiments d'école.

MfFOµ. - Je l'avais proposé.

M. Hymans. - Je regrette qu'on ne vous ait pas appuyé, et je serais heureux de voir cette prescription introduite dans la loi.

Aujourd'hui beaucoup de communes ont acquis une grande prospérité, et je crois qu'on aurait le droit de leur imposer l'obligation de consacrer une partie des richesses qu'elles ont acquises d'une façon vraiment inespérée, à la construction de bâtiments d'école. La liberté communale n'aurait certainement pas à en souffrir.

Si la liberté souffre quelque atteinte, c'est plutôt d'une pratique que M. le ministre de l'intérieur nous a indiquée tout à l'heure et qui consiste à refuser les secours du bureau de bienfaisance aux pauvres qui n'envoient pas leurs enfants à l'école. Quand nous venons soutenir dans cette Chambre et ailleurs la thèse de l'instruction obligatoire, on nous répond que nous n'avons pas le droit de contraindre le père de famille, et, en définitive, je m'aperçois qua le contraire existe pour les pauvres.

L'indigent qui n'envoie pas ses enfants à l'école est privé de tout secours, et vous reculez devant l'emploi d'un moyen d'action quelconque contre celui dont l'existence n'est pas à la discrétion des autorités ! Cela est-il juste ? Et n'ai-je pas le droit de dire que l'instruction obligatoire existe pour l'infortuné qui ne peut se défendre, tandis qu'on n'ose pas l'appliquer au citoyen qui, se trouvant dans l'aisance, est bien plus coupable de ne pas donner l'instruction à ses enfants ?

M. de Brouckereµ. - C'est dans l'intérêt même des pauvres.

M. Hymans. - Sans doute, mais cet intérêt n'est pas moindre pour les autres.

M. de Brouckereµ. - Soit ; mais cela n'est pas possible.

M. Hymans. - Je comprends qu'on soutienne cette opinion ; mais qu'on ne vienne donc pas tirer argument contre l'instruction obligatoire de l'impossibilité légale d'exercer une contrainte, quand je vois cette contrainte parfaitement exercée.

- Un membre. - Elle est indirecte.

M. Hymans. - Vous jouez sur les mots. Refuser tout secours au pauvre qui n'envoie pas ses enfants à l'école, c'est exercer sur lui une contrainte très directe.

Ce qu'a dit l’honorable M. Muller à propos des miliciens est parfaitement juste ; je veux bien admettre que sur cent miliciens qui déclarent ne savoir ni lire, ni écrire, il y en a la moitié qui l'on su et qui l'ont oublié, mais là réside précisément le vice de l'organisation de l'enseignement primaire.

Les enfants ne restent ras assez longtemps à l'école ; ils en sortent ne sachant pas assez pour conserver ce qu'ils ont appris ; et c'est afin de les (page 487) y faire rester plus longtemps que j'ai engagé M. le ministre de l'intérieur, il y a deux ans, à mettre à l'étude la question de la diminution des heures d'études quotidiennes. J'apprends avec plaisir que M. le ministre n'a point perdu de vue cette recommandation.

Je crois, messieurs, pouvoir m'en tenir à ces courtes réflexions en réponse aux orateurs qui se sont occupés des idées émises dans mon premier discours. La Chambre me paraît impatiente d'en finir, et je n'abuserai pas plus longtemps de sa bienveillance.

- Voix nombreuses. - Aux voix ! aux voix !

- La clôture de la discussion générale est prononcée.

Discussion des articles

Articles 1 et 2

« Art. 1er. Un cinquième crédit extraordinaire d'un million de francs (fr. 1,000,000) est ouvert au département de l'intérieur, pour aider les communes à subvenir aux frais de construction et d'ameublement de maisons d'école. »

- Adopté.


« Art. 2. Ce crédit sera couvert au moyen des ressources ordinaires. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé à l'appel nominal.

60 membres y prennent part.

59 répondent oui.

1 (M. de Naeyer), s'abstient.

En conséquence, 1a Chambre adepte j le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont répondu oui :

MM. Van Wambeke, Vermeire, Verwilghen, Warocqué, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Crombez, David, de Brouckere, De Fré, de Haerne, de Kerchove, Delaet, Delcour, de Macar, de Mérode, de Moor, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Theux, Devroede, Dewandre, de Woelmont, Dumortier, d'Ursel, Elias, Frère-Orban, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Janssens, Jacquemyns, Jamar, M. Jouret, Lebeau, Le Hardy de Beaulieu, Lelièvre, Magherman, Moreau, Muller, Nothomb, Orban, Reynaert, Rodenbach, Rogier, Schollaert, Thienpont, T' Serstevens, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Heerde, Van Humbeeck, Van Overloop, Van Renynghe et Ernest Vandenpeereboom.

MpVµ. - M. de Naeyer est prié de faire connaître les motifs de son abstention.

M. de Naeyer. - Je me suis abstenu pour les motifs que j'ai fait valoir sur les autres crédits extraordinaires de même nature.

- Plusieurs voix. - A mardi !

- La séance est levée à 4 heures.