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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 27 avril 1865

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1864-1865)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboom.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 811) M. Thienpont, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

M. Van Humbeeck, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Thienpont, secrétaireµ, présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Des propriétaires, industriels et commerçants de Genappe, Baisy-Thy, Houtain, Bousval, Loupoigne, Vieux-Genappe, Ways, Glabais, Sart-Dames-Avelines et Maransart demandent que le chemin de fer, qui va relier Charleroi à Bruxelles, passe par Genappe. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi de travaux publics.


« Des habitants de Bruxelles prient la Chambre de prendre des mesures pour assurer la répression d'une atteinte portée à la loi sur le duel dans la matinée du 8 avril. »

- Renvoi à la commission chargée d'examiner la question se rattachant à cette affaire.


« M. le ministre de la justice transmet, avec les pièces de l'instruction la demande en obtention de la naturalisation faite par le sieur J.-P. Marx, gendarme à Tervueren. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


« M. Wasseige, obligé de s'absenter, demande un congé. »

- Accordé.

Composition de la commission relative à l’incident du 8 avril dernier

MpVµ. - Vous avez chargé votre bureau de désigner les membres qui devaient faire partie, avec votre président, de la commission chargée de faire un rapport sur l'incident du 8 avril dernier. Le bureau a désigné MM. de Brouckere, de Theux, Dolez, Kervyn de Lettenhove, Bara et Delcour.

La commission s'occupera immédiatement de l'accomplissement de son mandat.

Projet de loi modifiant la loi du 30 mars 1836 sur l’organisation communale

Discussion des articles

Article 2

MpVµ. - Nous en sommes restés à l'article 2 ; la parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Depuis quelques années et dans ces derniers temps surtout, on a beaucoup parlé de centralisation et de décentralisation administrative. A cette occasion, on a maintes fois rappelé la prospérité et la splendeur de nos antiques communes, prospérité et splendeur qui étaient, dit-on, la conséquence des libertés et des franchises dont elles jouissaient.

Sans contester ces causes de cette prospérité si grande, je dois dire qu'il en est une qu'on oublie : nos grandes communes n'étaient pas seulement libres et indépendantes, elles étaient aussi privilégiées et leur prospérité était due autant aux privilèges industriels dont elles jouissaient qu'à la liberté et à l'indépendance que, très souvent, elles avaient conquises au prix des plus grands sacrifices.

Plus que personae, messieurs, je suis fier quand je parcours les pages de notre glorieuse histoire communale, mais je me demande si ces réminiscences d'un passé glorieux peuvent être utilement invoquées dans cette discussion et servir d'exemple pour ce qui nous reste à faire de nos jours.

Je me demande et je demanderai à tous les membres de cette Chambre qui se sont le plus spécialement occupés d'études historiques, je demanderai spécialement à l'éminent historien de nos communes flamandes qui a pris la parole dans la séance d'avant-hier, si dans son opinion il serait possible de rétablir aujourd'hui telle qu'elle existait autrefois l'ancienne organisation communale.

Poser cette question, c'est la résoudre, et tout le monde reconnaîtra que dans l'état actuel de l'organisation politique de notre pays les communes et les provinces jouent un rôle tout différent de celui qu'elles jouaient à l'époque de Guy de Dampierre, par exemple.

J'ai dit qu'on parle beaucoup de centralisation et de décentralisation. Ce dernier mot surtout est fort à la mode. A entendre certaines personnes, on croirait en vérité qu'en Belgique les citoyens, les provinces et les communes sont liés par les chaînes d'une centralisation excessive et dans des entraves étroites dont le gouvernement seul, de sa main de fer, tient tous les ressorts ! Quand j'entends, messieurs, propager de pareilles exagérations peu flatteuses pour notre organisation administrative, je suis forcé de croire qu'on se rend peu compte en général de la portée et de la signification des mots centralisation et décentralisation administrative !

Dans une autre occasion, en parlant de décentralisation j'ai dit, que, lorsqu'on s'occupe de cette matière, il est des écueils qu'il faut éviter. Lorsqu'on décrète des mesures décentralisatrices, il faut bien se garder de jeter la confusion et la perturbation dans les divers services qui forment les rouages de la machine administrative qui, quoi qu'on en ait dit, a utilement fonctionné pour le pays depuis l'époque de notre régénération politique,

Est-ce à dire, messieurs, que, dans l'opinion du gouvernement, il faille maintenir à perpétuité ce qui est et ne rien améliorer ? Evidemment non ; et le cabinet actuel a prouvé en maintes circonstances qu'il désire la décentralisation et la simplification de l'administration autant qu'il est légitimement possible de l'obtenir.

Je crois inutile de rappeler à la Chambre les lois qui ont été votées depuis quelque temps dans ce but ; je crois superflu de lui rappeler les mesures importantes qui ont été prises par arrêtés royaux ou ministériels, pour simplifier les formalités et les écritures administratives.

Messieurs, avant d'aller plus loin, il faut nous entendre sur un point essentiel : qu'est-ce que la décentralisation ; jusqu'où peut-elle aller ; dans quelles limites doit-elle être maintenue ?

D'après moi, et je crois que nous serons tous d'accord sur ce point, la décentralisation serait complète ou parfaite dans un pays où, d'une part, l'autorité à quelque degré que ce soit, l'autorité communale, provinciale, ou centrale, s'abstiendrait de toute intervention dans le domaine de l'activité privée ; et où, d'autre part, chacun des corps constitués se bornerait à exercer les attributions essentielles en vue desquelles ces corps exercent.

Mais vouloir charger les particuliers de poser des actes qui sont d'intérêt public, d'intérêt général ; vouloir attribuer à des corps administratifs placés au deuxième ou au troisième degré de l'échelle administrative des attributions qui touchent à l’intérêt général, ce ne serait pas là décentraliser : ce serait jeter la perturbation dans tous les pouvoirs ; ce serait introduire la confusion dans l'administration elle-même.

Eh bien, messieurs, c'est là l'écueil que nous devons éviter en nous occupant de décentralisation. En pareille matière comme en toute autre il faut faire ce qui est logique et équitable de faire ; mais il ne faut pas aller trop loin.

Et ici, messieurs, qu'on me permette une observation : il est deux choses que, en dehors de cette enceinte bien plus qu'ici, on confond souvent.

Je veux parler de la décentralisation administrative et de la simplification de l'administration.

Je vous ai indiqué brièvement, messieurs, ce que, d'après moi, doit être la décentralisation. Quant à la simplification administrative, c'est tout bonnement une diminution des écritures, des rouages et des formalités administratifs. Ce sont là deux choses parfaitement indépendantes. Décentralisation n'est nullement synonyme de simplification, et la preuve, c'est qu'on peut avoir un gouvernement extrêmement centralisé et où cependant l'administration serait fort simple ; le contraire peut être vrai aussi ; sans sortir de notre pays, bien que la loi et les instructions soit les mêmes pour tous, dans certaines provinces, par suite de circonstances locales ou pour d'autres motifs, les affaires s'administrent avec beaucoup plus de simplicité que dans d'autres.

Il en est de même des communes : la loi communale est la même pour tous, et cependant dans certaines grandes villes, ou dans certaines (page 812) localités industrielles, par exemple, l'administration locale est plus compliquée que dans d'autres communes. Dans les villes, l'instruction des affaires administratives se fait par écrit ; des enquêtes ont lieu ; des formalités de toute nature sont exigées ; dans les communes rurales, l'administration est d'une simplicité admirable ; tout se fait souvent verbalement et sans écrit aucun.

Ainsi, entre la simplification et la décentralisation, il y a une différence considérable ; dans la séance d'avant-hier si je ne me trompe, l'honorable M. Jacobs l'a constaté.

Messieurs, le cabinet actuel a déjà cherché à simplifier les rouages de l'administration, et il ne demande qu'à persévérer dans cette voie ; mais il faut bien le dire : son bon vouloir est arrêté par une circonstance que chacun de vous appréciera.

Dans notre pays, ou demande que le gouvernement ait peu de pouvoir, peu de droits ; mais, d'un autre côté, on exige énormément de lui ; ainsi, à chaque instant, on fait un appel au gouvernement pour des causes qui ne le concernent en rien, et l'on cherche à faire faire par le gouvernement ce qui, en réalité, n'entre pas dans ses attributions.

On exige aussi que le gouvernement intervienne en toutes choses par des subsides. Les subsides portés aux budgets ne sont jamais suffisants. La Chambre demande qu'on les augmente sans cesse. Les dépenses auxquelles ces subsides sont affectés sont fort utiles sans doute ; mais la Chambre devra reconnaître que lorsque le gouvernement doit distribuer entre un très grand nombre de communes les crédits considérables qui lui sont alloués, il y a là une source inévitable de complications administratives, d'écritures et de formalités.

Par exemple, on met à la disposition du gouvernement un crédit d'un million pour la voirie vicinale et l'on trouve que ce n'est pas assez. Ce crédit est réparti entre un très grand nombre de communes du pays. Chaque commune doit faire sa demande, dresser un plan et les devis des travaux à exécuter ; toutes ces pièces doivent être adressées au gouvernement. Evidemment il résulte de là une complication notable des écritures administratives.

Ce que je dis de la voirie vicinale, je pourrais le dire à plus forte raison des subsides pour l'instruction. Et pour vous donner une idée des complications que la distribution des subsides entraîne, il me suffira de dire que si la Chambre vote le nouveau crédit de 5 millions demandé pour construction de maisons d'école, il y aura là à instruire pour elle un millier d'affaires, ayant chacune un dossier composé de 10 à 15 pièces ; faites maintenant une petite multiplication, et vous verrez à quelles complications administratives la répartition des subsides donnera lieu.

Du reste, je le répète, je ne critique pas la destination de ces subsides, mais je constate une fois de plus que c'est là une des plus grandes sources des complications administratives en Belgique.

Messieurs, en commençant, j'ai eu l'honneur de dire à la Chambre ce que doivent être, d'après moi, les véritables principes de la décentralisation. La section centrale ne s'est pas écartée de ces principes, et c'est par ce motif que je pourrais me rallier à la plus grande partie des amendements qu'elle propose à la Chambre.

Le gouvernement fait ainsi un pas de plus ; il témoigne une fois de plus de son désir de diminuer autant que possible le travail administratif, de le décentraliser.

Mais je ne puis me rallier aux amendements présentés par d'honorables membres. Ces honorables collègues me semblent s'être écartés des vrais principes : ils proposent de donner à des corps électifs des attributions que l'Etat doit exercer, comme le gardien de l'intérêt social en général.

Dans les développements qu'ont donnés à leurs motions les auteurs de ces propositions, dans les discours que d'honorables collègues ont prononcés, ils ont beaucoup insisté sur la centralisation administrative dont la Belgique serait la triste victime.

Or, il n'est peut-être pas de législation où la décentralisation administrative soit plus nettement caractérisée que dans celle de notre pays.

Et en effet, le Congrès national a inscrit le principe de la décentralisation dans l'article 108 de notre pacte fondamental. Cet article dit en effet :

« Les institutions provinciales et communales sont réglées par des lois.

« Ces lois consacrent l'application des principes suivants :

« (...) 2° L'attribution aux conseils provinciaux et communaux de tout ce qui est d'intérêt provincial et communal sans préjudice de l'approbation de leurs actes, dans les cas et suivant le mode que la loi détermine. »

Vous le voyez donc, le principe de la décentralisation, c'est-à-dire le principe que l'Etat ne doit faire que ce qui est d'intérêt général, est un principe constitutionnel et ce principe n'a pas été perdu de vue par les législateurs de 1836 qui ont décrété les lois d'organisation provinciale et communale ; la loi provinciale porte expressément que l'autorité provinciale règle tout ce qui est d'intérêt provincial, que les conseils communaux règlent tout ce qui est d'intérêt communal.

Voilà donc le principe consacré par notre Constitution et confirmé par nos lois organiques.

La Constitution, et ici commence seulement la difficulté, la Constitution et nos lois ajoutent que, dans certains cas, l'approbation d'une autorité supérieure est nécessaire. Toute la question, lorsqu'on s'occupe de décentralisation, est donc de savoir dans quel cas cette autorisation est requise te par qui elle doit être donnée.

Pour nous, elle doit l'être par le Roi, chaque fois que l'intérêt général est directement ou indirectement en jeu.

Permettez-moi, messieurs, de vous faire remarquer encore qu'en remettant aux collèges des députations permanentes le soin d'approuver un certain nombre d'actes qui touchent à l'intérêt général, le législateur de 1836 est allé très loin. Logiquement, le gouvernement seul eût dû approuver les actes de cette nature, parce que, je reviens toujours à cette même idée, du moment que l'intérêt général est en heu, c'est au gouvernement à intervenir.

Je dis que le législateur est allé très loin ; pour s'en convaincre il suffit d'examiner l'organisation des députations permanentes.

Dans la plupart des pays, les corps intermédiaires placés entre les communes et l'autorité supérieure n'exercent leurs pouvoirs que par délégation ; ceux qui les composent ne sont que des délégués de l'administration centrale. Les membres formant ces administrations secondaires sont nommés par le pouvoir central et sont révoqués par lui. Ils sont responsables vis-à-vis du gouvernement.

Leurs actes peuvent être ainsi contrôlés, et d'un autre côté, souvent ces corps n'ont qu’un mandat consultatif, si je puis parler ainsi ; ils sont entendus, ils donnent leur avis ; mais une autorité gouvernementale soit le gouvernement lui-même, soit son délégué, statue et approuve l'acte posé par la commune.

Dans notre pays, il en est tout autrement. Vous le savez, les collèges de la députation permanente, institution éminemment utile et qui rend les plus grands services, sont indépendants du gouvernement. Le gouvernement n'a aucune influence à exercer ni sur leur nomination ni sur leur révocation. Ils ne dépendent que du corps électoral ; c'est le corps électoral qui les élit et qui les révoque parfois lorsque le grand jour de l'élection est venu.

C'est donc au corps électoral seul qu'ils doivent rendre compte. Et cependant, messieurs, veuillez-le remarquer, ces corps qui sont indépendants de l'Etat, qui ne dépendent que des électeurs, exercent certaines prérogatives qui logiquement devraient appartenir exclusivement au gouvernement, gardien des intérêts généraux. .

D'un autre côté, ces collèges de la députation étant élus par les mêmes électeurs qui envoient des législateurs dans cette Chambre, il est difficile que certain reflet politique ne rejaillisse pas sur ces corps électifs.

Il serait peu exact de soutenir que ces collèges n'aient certaines tendances politiques, suivant leurs sympathies ou leurs antipathies pour les doctrines que professe le gouvernement.

Ainsi donc, le législateur belge est allé très loin lorsqu'il a remis à ces corps indépendants électifs non responsables vis-à-vis de l'Etat, qui peuvent avoir des tendances politiques contraires à celles du gouvernement, la mission d'approuver des actes d'intérêt général, même d'une partie restreinte.

M. Julliot. - Tous les pouvoirs émanent de la nation.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Sans doute, mais il n'en résulte pas que toutes les autorités doivent être élues directement, car alors il faudrait aussi faire élire les membres du pouvoir exécutif et les ministres eux-mêmes.

En citant ces faits, messieurs, j'ai voulu arriver encore à cette conclusion que l'on a tort de vouloir comparer trop souvent nos institutions belges aux institutions d'autres nations.

On a tort de prendre dans les législations étrangères certaines dispositions éparses et de les comparer aux dispositions de la législation belge ; enfin l'on a encore plus tort de dire, lorsque les ministres s'opposent à l'adoption de certains amendements, qu'un ministre belge redoute et repousse des réformes qu'un ministre étranger aurait proposées dans un autre pays.

On a beaucoup parlé d’un pays voisin, et je dois croire que ceux qui (page 813) en ont parlé n'ont pas suffisamment étudié l'organisation administrative qui a prévalu en France sous tous les régimes, sous la restauration comme sous la monarchie de juillet, sous la république comme sous l'empire.

Je n'ai pas l'intention de donner une conférence sur l'organisation administrative de la France.

Mais je demanderai à la Chambre la permission de citer quelques dispositions des lois françaises, afin de faire comprendre la différence énorme qu'il y a entre le système qui nous régit et le système administratif de nos voisins. En faisant ces citations je ne blâme rien, je ne critique rien, je n'apprécie même rien. Je comprends parfaitement que les différents pays, ayant des besoins distincts, doivent avoir des institutions qui différent essentiellement entre elles.

Ou a parlé des conseils de préfecture, on les a comparés à nos députations permanentes. Vous savez, messieurs, ce que sont ces députations permanentes ; les conseils de préfecture sont tout autre chose ; ces corps sont souvent purement consultatifs ; leurs membres sont nommés par l'empereur et ne peuvent, dans aucun cas, être révoqués par le gouvernement, ce sont des espèces de commissions, et quand ils exercent des attributions, c'est en vertu d'une délégation du chef de l’Etat ou même de son délégué.

Le plus souvent donc les conseils de préfecture donnent des avis, mais, en dernier ressort, c'est le gouvernement ou le préfet qui statue, qui ordonne sous sa responsabilité envers l'Etat et en vertu de l'autorité de l’Etat.

Pour vous faire apprécier cette législation, il faut, messieurs, que je vous dise en peu de mots quelles sont les attributions des chefs des départements en France.

Le préfet français, messieurs, est non seulement administrateur, mais il est encore juge.

Comme administrateur, il a dans le département la direction des intérêts généraux, départementaux et communaux.

Le préfet, notez bien que ce n'est ni l'empereur ni la députation, annule et réforme tous les actes des autorités inférieures. Il statue provisoirement en cas d'urgence même dans les matières qui sont du ressort de l'empereur et des ministres et l'exécution préalable est due à son arrêté.

Le préfet, et une grande influence doit par suite en résulter pour lui, a le droit de faire une foule de nominations. Il nomme dans certains cas les maires. Il nomme les administrateurs, directeurs et receveurs des établissements de bienfaisance, les commissaires de police des villes d'une importance de moins de 6,000 âmes ; il nomme les receveurs de certaines villes, etc.

Le préfet est en outre chargé, messieurs, du maintien de l'ordre public. Il entre dans ses attributions d'interdire les théâtres. Aucun théâtre ne peut être ouvert sans l'autorisation du préfet. Aucun café, aucun cabaret ne s'établit sans la permission du préfet qui peut aussi en ordonner la fermeture.

Pouvez-vous dans un pareil régime comparer les attributions d'un magistrat français avec celles du magistrat équivalent dans notre pays ?

En matière de presse, le préfet adresse aux journaux les avertissements préalables à la suspension.

Il fait d’autorité et gratis toutes les insertions qu'il juge convenable. Il désigne chaque année les journaux qui recevront des annonces judiciaires. Il dirige le colportage des journaux, etc., etc.

Le préfet, messieurs, - bien plus et ceci serait parfaitement inconstitutionnel chez nous, - intervient dans la police et dans l'exercice des cultes en prenant d'office les recours comme d'abus. Les instructions pastorales doivent être soumises à son approbation avant d'être publiées. Il reçoit le serment des curés, des vicaires et desservants.

M. Bouvierµ. - Voilà de magnifiques libertés !

MIVDPBµ. - L'évêque doit lui donner avis des nominations de desservants et des motifs d'absence de tout prêtre salarié.

Le préfet règle les allocations à payer par la commune aux desservants et aux vicaires.

En matière d'instruction publique, messieurs, c'est encore le préfet qui règle tout ce qui concerne ce service important. Il exerce une grande influence sur la nomination et la révocation des instituteurs et des institutrices, s'il ne les nomme pas, sur les directeurs et les directrices des établissements d'instruction. C'est lui encore qui veille à l'organisation des écoles et à la fixation des subventions qu'on peut leur accorder.

Le préfet, messieurs, a encore d'autres droits. Il examine et vise la comptabilité des communes.

Il a le droit d’imposer d’office au besoin les communes pour la réparation des chemins. Il fixe le contingent de l’entretien des chemins de grande communication, et il fait lui-même, seul, le règlement général pour les chemins du départements.

Je n'insiste pas, messieurs, mais je pourrais encore citer un grand nombre d'attributions des préfets en France. J'ai voulu prouver que les attributions et les pouvoirs des chefs des départements français sont tout autre chose que les attributions et les pouvoirs de chefs de nos provinces.

Quand on conclut de ce que le préfet agît par délégation qu'il y a là une décentralisation sérieuse, on se trompe grandement ! C'est le contraire qui a lieu, puisqu'on donne à un fonctionnaire placé plus près des intérêts locaux la faculté d'exercer certains pouvoirs qui sont, je pense, exercés avec plus d’indépendance par l'autorité centrale.

Maintenant si des préfets je passe aux moires, je dirai que c'est une grande erreur de croire que le maire français soit l'équivalent du bourgmestre belge.

En France comme en Belgique, le chef de l’administration de la commune est nommé par le chef de l'Etat dans l'un et l'autre pays, ils peuvent être nommés dans le sein du conseil, mais ils ne doivent pas l'être ; seulement il y a entre les systèmes suivis dans les deux pays une différence immense ; pour nommer un bourgmestre hors du conseil, en Belgique, la loi exige une foute de circonstances et de garanties que certainement on n'exige pas en France.

Ainsi en France on nomme un maire en dehors du conseil sans formalité aucune, uniquement parce que le gouvernement ou le préfet l'aura jugé utile ; en Belgique pour nommer un bourgmestre en dehors du conseil il faut l'avis conforme de la députation permanente ; aussi, toute proportion gardée, le nombre de maires nommés en dehors du conseil est l'us considérable que celui des bourgmestres nommés en dehors du conseil en Belgique et je crois même ne pas m'aventurer en disant : Il n'existe peut-être pas en Belgique aujourd'hui un seul bourgmestre qui n'ait été choisi dans le sein du conseil communal, du moins je n'ai pas depuis 3 ans et demi fait une seule nomination pareille.

La nomination du maire en dehors du conseil n'est pas entourée en France des garanties dont on l'entoure en Belgique, et cependant, messieurs, la nomination du chef de la commune parmi les élus par la commission est une garantie requise pour l'indépendance communale. Ou l'a constaté récemment. Dans le parlement d'un pays voisin, un amendement a été présenté récemment, tendant à émettre le vœu de voir nommer tous les maires dans le sein du conseil municipal et cet amendement a été rejeté à l'assemblée française par 200 voix contre 25 !

Un maire en France a des attributions fort étendues qu'on ne pourrait pas donner à nos bourgmestres parce qu'on craindrait d'en faire de petits despotes. D'abord, le maire administre et pose certains actes sous la direction de l'autorité supérieure ; c'est ainsi qu'il fait publier et exécuter les lois et règlements et qu'il est chargé de l'exécution des mesures de sûreté générale ; d'un autre côté, le maire agit toujours sous la surveillance directe et immédiate du sous-préfet et par suite du préfet.

C’est sous cette surveillance qu'il est chargé seul de l'administration de la commune, sous sa responsabilité, sans collège, sans contrôle autre que celui de l'autorité supérieure, c'est le maire qui nomme tous les fonctionnaires de la commune ; en Belgique, cette nomination appartient au conseil communal élu ; le maire a la police municipale, la police rurale, la police de la voirie ; c'est lui qui est chargé seul de la conservation des propriétés de la commune, de la gestion des revenus, de la surveillance des établissement communaux, de la comptabilité communale, enfin le maire seul a le droit de proposer les budgets, de rendre les comptes, et de mandater sur la caisse communale.

M. Bouvierµ. - Vous oubliez les cimetières. (Interruption.)

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Le chef de la municipalité française a en outre, presque seul, le droit d'initiative au conseil communal. Vous aurez pu remarquer dans le décret soumis en ce moment à l'assemblée française, que la plupart des simplifications qu'on autorise doivent être dues à l'initiative du maire. C’est là une prérogative considérable pour le maire et un amoindrissement pour les membres des conseils municipaux qui n'ont ainsi que des droits restreints.

Et chose importante à remarquer, c'est que dans notre pays le conseil communal règle tout ce qui est d'intérêt communal, tandis qu'en France le conseil municipal n'a d'autres attributions que celles qui leur sont confiées par la loi.

En France, les conseils municipaux ne peuvent se réunir que quatre fois par an, et la durée de leur session est limitée par la loi elle-même ; (page 814) pour se réunir extraordinairement, il faut une autorisation spéciale de l’autorité supérieure.

Les séances des conseils municipaux ne sont pas publiques, aucun compte rendu ne peut en être officiellement donné dans le journaux ; les conseils municipaux ne peuvent pas correspondre avec d'autres conseils, et il leur est interdit de rédiger des protestations ou des adresses ; les imprimeurs, les journalistes même qui rendraient ses résolutions publiques seraient punis conformément à l'article 123 du Code pénal.

Vous voyez qu'il y a en France de très grandes restrictions a la liberté communale et que ce qui se passe en Belgique est bien différent.

Pour ne parler que du droit de correspondre et du droit d'adresse je dirai, et M. Jacobs qui représente plus spécialement l'arrondissement d'Anvers doit le savoir, que certains conseils communaux ne se font pas faute de rédiger des adresses et des protestations. (Interruption.)

Un dernier mot. En Belgique, les conseils communaux sont permanents ; en France, ils peuvent être suspendus par le préfet, dissous par m’empereur et dans ce cas ils sont remplacés par une commission administrative qui fonctionne jusqu'au jour où de nouvelles élections normales ont lieu.

En faisant ces citations, je n'ai eu qu'un seul but, c'est de détruire l’opinion que d'autres pays et notamment celui dont je viens de parler jouissent de plus grandes libertés que le nôtre.

Je crois que de pareilles idées ne doivent pas se propager et que nous devons au contraire bénir Dieu d'avoir donné à la Belgique une population qui puisse supporter autant de liberté et autant d'indépendance.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Je demande la parole.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je le répète donc, je n'ai voulu rien blâmer ni rien critiquer, j'ai voulu simplement constater des faits, qui sous tous les régimes ont existé dans un pays voisin.

Ce que je viens de dire, messieurs, surtout en commençant mon discours vous prouve assez que je ne puis pas me rallier, au nom du gouvernement, aux amendements présentés par les honorables MM. Jacobs et Kervyn de Lettenhove.

Je vais vous en dire brièvement les motifs.

L'honorable M. Jacobs propose d'enlever complètement, radicalement au Roi le droit d'approuver les actes posés par les conseils communaux, lesquels, en vertu de la loi de 1856, sont soumis à l'approbation royale.

Une pareille disposition serait, d'après moi, complètement contraire à tous les vrais principes de la décentralisation ; ce serait, que l'honorable membre me permette de le lui dire, de la décentralisation à rebours ; vous donneriez aux députations permanentes, corps électifs, irresponsables envers l'Etat, le droit d'approuver des actes touchant à l'intérêt général, et qui sont de la compétence exclusive de l'autorité centrale. Il y aurait là une véritable perturbation de pouvoirs ; il y aurait là une confusion complète dans les attributions des divers corps constitués ; et au bout de quelques temps vous auriez comme conséquence du trouble, sinon un arrêt, si je puis ainsi dire, dans la machine administrative.

Pour vous prouver, messieurs, l'importance des actes que les honorables MM. Jacobs et de Naeyer proposent de soumettre en dernier ressort à l'approbation des députations permanentes, il suffit de lire leur amendement. Voici ce que j'y lis :

« Sont soumis à l'approbation de la députation permanente, sauf appel au Roi par la commune : les aliénations, transactions, échanges de biens ou droits immobiliers de la commune... les emprunts..., etc., etc. »

Tous ces actes, messieurs, sont d'une importance extrême ; il est de l'intérêt de l'Etat que les communes ne s'appauvrissent pas et cet intérêt est plus puissant qu'ailleurs dans un pays où l'on réclame si fréquemment l’intervention pécuniaire de l’Etat.

Pourriez-vous soutenir qu'il n'est pas de l'intérêt général que les emprunts communaux soient contractés dans de bonnes conditions, que des communes ne s'obèrent pas ?

Si vous me le permettez, messieurs, je vous rappellerai qu'à une époque, qui n'est pas celle du plus grand développement de nos libertés communales, les communes avaient le droit de faire à peu près tous les actes que les auteurs de l'amendement proposent de leur abandonner, sauf approbation des députations. Eh bien, qu'est-il arrivé ? C'est que la plupart de nos communes étaient obérées au point qu'à l'époque de la révolution française elles auraient nécessairement dû faire faillite si cette révolution n'était survenue et n'avait fait crouler tout l'édifice communal.

L'état financier de la plupart de nos communes en 1790 était resté tel qu'une des premières mesures prises par le gouvernement hollandais a été de forcer ces communes à reconnaître et à régulariser leurs anciennes dettes, et aujourd'hui la plupart des grandes communes du pays payent encore des sommes considérables pour solder des dettes contractées par elles avant la révolution et qui sont dues exclusivement à la mauvaise gestion des finances communales, gestion qui a été longtemps affranchie de tout contrôle de l'autorité supérieure.

Le gouvernement autrichien avait parfaitement compris les dangers de cet état de choses, et si je ne me trompe, - l'honorable M. Kervyn pourra nous renseigner exactement sur ce point, - au milieu du dernier siècle, Marie-Thérèse fut forcée d'instituer une junte communale pour surveiller l'administration des communes belges qui avaient si fortement engagé leur avenir financier.

Mais je reviens, messieurs, à l'amendement de MM. Jacobs et de Naeyer, dont cette digression m'a quelque peu éloigné.

Ces honorables membres proposent d'autoriser les communes à percevoir des péages et des droits de passage sans l'intervention du gouvernement ; mais, messieurs, c'est là une matière excessivement délicate. Pour qui connaît les tendances des communes, il est possible qu'on établisse des péages à la charge exclusivement des habitants des localités voisines et le devoir du gouvernement est d'assurer la libre circulation entre les diverses localités.

Aujourd'hui déjà, messieurs, lorsque le gouvernement a à examiner de pareilles affaires, il rencontre souvent des prétentions exagérées de la part des communes, prétentions qui, je dois le dire, sont dans certains cas mêmes soutenues par les députations permanentes. Or, si le gouvernement ne pouvait pas approuver les actes relatifs aux droits de passage et de péage, il en résulterait de très grands inconvénients.

Quant aux actes de donations et aux legs faits à la commune ainsi qu'à l'acquisition d'immeubles ou de droits immobiliers, il me semble qu'ici encore l'intervention de l'autorité royale est nécessaire, parce qu'ici il s'agit d'un véritable intérêt général. Le gouvernement depuis une vingtaine d'années a cherché à établir une jurisprudence uniforme pour l'acceptation des libéralités et pour les conditions attachées aux legs et aux donations, et il a eu souvent à lutter, sous ce rapport, contre des communes et même contre des députations permanentes.

Si vous retirez au gouvernement le droit d'intervenir en pareil cas, vous risquez fort de provoquer les inconvénients les plus sérieux. Ici on invoque le projet de loi français, mais, messieurs, ainsi que l'a dit dernièrement l'honorable M. Kervyn, si les municipalités françaises ont le droit d'accepter des dons et legs, c'est à des conditions et dans des limites qu'il importe de ne point perdre de vue. Voici le texte de la loi française :

« Acceptation ou refus des dons et legs faits à la commune, sans charges, sans conditions, sans affectation immobilière et lorsque ces dons et legs ne donnent pas lieu à réclamation. »

Vous voyez, messieurs, que les droits que l'on octroie aux municipalités françaises sont des droits très limités, puisqu'il faut qu'une donation réunisse tant de conditions pour pouvoir être acceptées par elles sans l'intervention du chef de l'Etat.

D'un autre côté, je me demande si l'intérêt général n'exige pas aussi qu'on mette quelque entrave à l'immobilisation de la propriété foncière même au profit des communes. Or, le projet français a prévu ce cas, puisque, lorsqu'il s'agit d'immeubles, c'est l'autorité centrale qui intervient ; d'après l'amendement, les communes pourraient accepter toujours des dons et legs sans l'intervention de l'Etat.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Je me suis exprimé autrement.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je m'occupe de l'amendement de MM. Jacobs et de Naeyer.

M. Jacobsµ. - Sauf le droit d'annulation.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Je vais venir à ce droit d'annulation.

Ce que je dis des dons et legs, s'applique à l'acquisition des immeubles. L'Etat doit également intervenir dans ces affaires.

L'honorable membre propose encore de laisser aux conseils communaux le soin de fixer la grande voirie.

Je ne sais en vérité pas pourquoi l'honorable membre ne propose pas de faire administrer le domaine de l'Etat par les communes, alors qu'une partie de ce domaine se trouve sur leur territoire.

Je dois le dire, cette proposition paraît fort peu logique, et la Chambre n'admettra sans doute pas un pareil système. En tout cas, le gouvernement doit le combattre très énergiquement.

L'amendement que je combats s'applique ensuite à la démolition (page 815) des monuments de l'antiquité existant dans la commune, et les réparations à y faire, lorsque ces réparations sont de nature à changer le style ou le caractère des monuments. »

Messieurs, sans vouloir donner une preuve de mon amour pour l'archéologie, je dois combattre encore cette proposition. Il est de notre devoir à tous de sauvegarder autant que possible les monuments qui sont la gloire du pays et qui consacrent les souvenirs du passé.

Un ancien château, un ancien monument historique, un tumulus, par exemple, peut se trouver dans une petite commune rurale ; peut-on permettre de détruire ces monuments historiques et le gouvernement ne doit-il pas pouvoir empêcher ces actes de vandalisme ?

Messieurs, les honorables auteurs des amendements répondront aux objections que j'ai faites : « Mais il y a appel. »

Veuillez remarquer, messieurs, qu'il y a une différence énorme entre l'usage que fait le gouvernement d'un droit d'approbation, et l'usage qu'il peut faire d'un droit d'annulation.

Il y a toujours quelque chose de rigoureux, souvent même d'odieux à annuler une délibération, soit d'un conseil communal, soit d'une députation permanente ; le gouvernement ne s'y résout qu'à la dernière extrémité. L'annulation indispose les autorités dont elle annule les actes. Cette mesure présente encore beaucoup d'autres inconvénients.

Ainsi, par exemple, supposons que dans le système de l'honorable M. Jacobs, un conseil communal pose un acte et que la députation permanente l'approuve.

Ainsi que le dit l'honorable M. Jacobs, le gouvernement a le droit d'annuler cet acte. Or, dans un acte, il y a ordinairement des choses qui sont bonnes, d'autres qui sont mauvaises. Si le gouvernement annule l'acte, l'acte tombe ; il n'en existe plus rien.

Mais si, au lieu d'être armé du droit d'annulation, le gouvernement a le droit d'approbation, il peut se mettre en rapport avec le conseil communal ; il lui dit : « L'acte que vous soumettez à l'approbation du gouvernement est bon ; mais il y a lieu d'y introduire quelques modifications. »

La commune, convaincue par les arguments que lui expose le gouvernement, modifie sa délibération, et alors le gouvernement peut parfaitement approuver la délibération prise par le conseil communal.

Dans le système de l'honorable M. Jacobs, cela n'est pas possible.

Le gouvernement n'a que 40 jours pour procéder à ces annulations.

Mais quiconque est au courant des nombreuses formalités administratives doit reconnaître qu'il serait impossible de faire toutes les démarches, dont je viens de parler, dans un délai si court.

Du reste, si le système que je combats était consacré, il ne tarderait pas à rendre le gouvernement odieux sur tous les points du pays. D'un autre côté, il est à craindre que, loin de simplifier les opérations administratives, on ne vienne les compliquer.

En effet, il est très probable qu'il y aurait appel devant le gouvernement à peu près dans chaque cas où il y aurait eu de l'opposition dans le sein du conseil communal.

J'ai dit tout à l'heure que le droit d'approbation du gouvernement lui donne la faculté d'améliorer en quelque sorte par ses conseils les actes des communes ; il me sera facile de le prouver ; sur 139 demandes d'aliénations proposées par des communes en une année, 61 n'ont été approuvées qu'à la suite des observations faites par le gouvernement. En matière de transactions, 13 délibérations de conseils communaux ont été approuvés par le Roi, 12 l'ont été après observations.

Je reconnais qu'il y a certains actes qui donnent lieu à peu d'observations et sont approuvés purement et simplement. Mais pour tous les actes qui peuvent donner lieu à des réclamations, nous avons cru qu'il y a lieu de maintenir l'état de choses actuel, pour que le gouvernement puisse, par voie de conseil, amener les communes à modifier leurs délibérations, le cas échéant. Je parlais tout à l'heure des donations et legs. Eh bien, de 12 donations et legs, faits en faveur de communes, 6 n'ont été approuvés qu'après observations du gouvernement. Ainsi, dans un grand nombre de cas, l'intervention du gouvernement peut être très utile.

Il me reste à dire un mot de l'amendement de l'honorable M. Kervyn. Cet amendement est moins radical que celui des honorables MM. Jacobs et de Naeyer. Dans le système de l'honorable M. Kervyn, certains actes restent soumis à l'approbation du Roi.

Ce sont les aliénations, les impositions communales qui dépasseraient 20 centimes additionnels au principal des contributions, la fixation de la grande voirie, enfin la restauration des monuments d'antiquité. Mais l'honorable M. Kervyn se contente de l'approbation de la députation permanente, pour d'autres actes qui tombent cependant à l'intérêt général et qui sont d'une importance extrême.

Ainsi, il veut que le droit d'établir des péages puisse être accordé par la députation sans l'intervention du gouvernement. J'ai déjà combattu cette proposition ; j'ai dit que, dans mon opinion, il serait dangereux, pour l'intérêt général, de faire une pareille concession aux communes.

L'honorable membre se contente encore de l'approbation de la députation pour les actes de donations et legs faits à la commune et aux établissements communaux. Ainsi, c'est la députation qui approuverait tous les actes de donations et legs faits à la commune, sms limite aucune. Mais cela n'est pas admissible, et je crois que la Chambre n'admettra pas un pareil système.

L'honorable membre laisse encore à la commune, sauf approbation de la députation, le droit d'établir, de modifier ou de supprimer les impositions communales. Enfin, la Chambre a voté, il y a quelques années, une loi d'abolition des octrois ; depuis lors, le gouvernement est presque constamment en lutte avec les communes qui veulent indirectement rétablir les octrois.

Tous les jours il est obligé de faire des observations. Tous les jours il est forcé de refuser des demandes d'impôts établis sur des bases analogues. Tantôt c'est sous prétexte d'abattoirs, tantôt c'est sous prétexte de péages, tantôt c'est sous prétexte de droits de place sur les marchés, tantôt c'est sous prétexte de certains droits de passage ou de colportage.

Messieurs, je crois que la jurisprudence à cet égard est encore trop loin d'être convenablement établie, pour qu'on puisse demander que le gouvernement n'intervienne plus dans une matière qui est aussi manifestement, d'après moi, d'intérêt général.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - J'ai réservé formellement au gouvernement le droit d'approuver les bases d'impôt.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Vous réservez formellement au gouvernement le droit d'approuver les bases d'impôt. Mais le quantum de ces impôts est encore une question à laquelle le gouvernement a intérêt. Les communes peuvent exiger des droits exorbitants sur certaines matières, et le gouvernement ne serait pas là pour les en empêcher ! Cela n'est pas admissible.

Dernièrement encore on demandait l'autorisation d'imposer un droit sur les ventes de récoltes. Ou m'a parlé dans le temps d'établir une taxe sur les arbres. On aurait compté tous les arbres d'une commune et l'on aurait perçu un centime par chaque arbre qui se serait trouvé dans la commune. Si le gouvernement ne pouvait intervenir dans ces matières, je crois que nous aurions, au bout d'un certain temps, un véritable désordre.

Veuillez remarquer, messieurs, que pour ce qui concerne les impositions communales, nos communes se trouvent dans une position tout autre que celle des communes des autres pays. Aux termes de la Constitution, les communes belges peuvent s'imposer comme elles veulent moyennant approbation de l'autorité supérieure, c'est-à-dire qu'elles peuvent asseoir leurs contributions sur toutes les bases qu'elles jugent utiles.

Dans les autres pays l'on indique par la loi quelles sont les bases des impôts communaux. Quelquefois ce sont les centimes additionnels ; d'autres fois ce sont les droits d'octroi ; quelquefois ce sont les droits de navigation.

Mais ces bases sont déterminées et les communes ne peuvent aller au-delà ; tandis qu'en Belgique les communes imposent tout ce qu'elles veulent, moyennant approbation, et c'est précisément parce que leur liberté est plus grande qu'il faut certaine retenue, parce que l'intérêt général serait compromis.

Ce sont là, messieurs, les principales dispositions des amendements qui nous sont soumis. Je crois avoir démontré que les dispositions qu'on vous propose d'adopter sont contraires aux vrais principes qui seuls peuvent assurer en Belgique une administration régulière.

Comme je l'ai dit, le gouvernement pourra se rallier aux amendements de la section centrale, qui respectent ces principes.

Quand aux amendements présentés par l'honorable M. Lelièvre et à celui des honorables MM. Jacobs et de Naeyer, nous nous en expliquerons lorsque le moment sera venu. Ce sont des choses entièrement indépendantes du projet présenté.

M. Lelièvre. - J'ai développé, dans la séance de mardi dernier, les motifs qui me portent à persister dans mon amendement. Je me bornerai aujourd'hui à invoquer une autorité imposante sur laquelle j'appelle l'attention de la Chambre.

Troplong, sur l'article 910 du Code civil (Traité des donations et testaments, n" 677 et suivants), s’exprime en ces tenues : « En règle générale, les fruits et intérêts de la chose léguée ne courent (page 816) qu'à compter du jour de la demande en délivrance. Mais comment un établissement public, qui n'a pas encore reçu l'autorisation du gouvernement pour accepter le legs qui lui est fait, pourra-t-il intenter une demande en délivrance ? Il faudra donc qu'il perde les fruits et les intérêts pendant tout le temps que la procédure en autorisation sera pendante devant l’autorité administrative. Voilà encore une perte dont les établissements publics sont victimes sans aucun motif raisonnable.

« La loi du 18 juillet 1837 sur l'administration municipale a aperçu ces inconvénients, et voici comment elle y remédie. i-

« Le paragraphe final de l'article 48 précité est ainsi conçu :

« Le maire peut toujours, à titre conservatoire, accepter les dons et legs en vertu de la délibération du conseil municipal. L'ordonnance du roi ou l'arrêté du préfet qui intervient ensuite a effet du jour de cette acceptation.

« De là deux conséquences.

« La première, c'est que l'acceptation provisoire du maire empêche la caducité ; la seconde, c'est qu'elle donne au maire le droit de faire une demande en délivrance pour donner cours aux fruits et intérêts.

« Cette disposition de la loi du 18 juillet 1837 est excellente. Il serait à désirer qu'elle fût introduite dans la législation des hospices, des établissements de bienfaisance et autres ; en attendant, les établissements placés sous l'influence d'une règle qui n'a pas été assez prévoyante, voient leurs mains liées et ils perdent des intérêts et des fruits qui tourneraient au profit des œuvres dont ils sont chargés.

« C'est ce qu'a jugé la première chambre de la cour de France sous ma présidence par arrêt du 27 janvier 1851. »

Suit l'arrêt.

« Cet arrêt est rendu dans les termes du droit, il paraîtra victorieux à tous ceux qui examineront la situation sans préjugé. Cette situation est sans doute fâcheuse, mais c'est au législateur qu'il appartient de la changer et nous savons que les personnes qui s'intéressent aux administrations charitables songent à la corriger. »

On lit ensuite dans une note au n°678 ce qui suit :

« Depuis que j'ai écrit ces lignes et sans aucun doute sous l'influence de l'arrêt rendu par la cour de Paris, le législateur est intervenu et corrigeant la situation fâcheuse que je signale, il a introduit dans la législation des hospices la disposition de l'article 48 de la loi du 18 juillet 1857 relative aux communes.

« C'est ce qui résulte de la loi des 7-13 août 1851 dont l'article 15 dispose :

« Le président de la commission des hospices et des hôpitaux peut toujours, à titre conservatoire, accepter, en vertu de la délibération de la commission, les dons et legs faits aux établissements charitables. Le décret du pouvoir exécutif ou l'arrêté du préfet qui interviendra aura effet du jour de cette acceptation. »

Ainsi en France, conformément à l'opinion des meilleurs auteurs, on a corrigé la législation dans le sens de mon amendement.

Il me semble donc que le moment favorable est venu de réaliser l'amélioration que j'ai eu l'honneur de proposer à la Chambre.

Il est du reste à remarquer que cette disposition avait été déposée dans le projet de loi sur la bienfaisance qui avait été présenté en 1856 et qu'elle n'avait donné lieu à aucune critique.

Je dois maintenant dire quelques mots de l'amendement des honorables MM. Jacobs et de Naeyer. C'est surtout le paragraphe concernant les dons et legs qui me paraît pouvoir donner lieu à de graves inconvénients.

D'après la disposition proposée, les députations permanentes seraient compétentes pour autoriser l'acceptation des dons et legs les plus considérables.

D'après l'article 910 du Code civil, les dispositions de cette nature ont besoin de l'autorisation du gouvernement. Il me paraît impossible de substituer, surtout pour des objets importants, le contrôle des députations qui se prononcent au point de vue d'un intérêt provincial à l’action du pouvoir central, dont le droit de tutelle et de police a pour base un intérêt général.

Or, c'est surtout au point de vue de l'ordre public et de l'intérêt des familles que la loi requiert l’intervention de l'autorité supérieure.

Je pense qu'il convient, par des motifs sérieux de ne déférer aux députations le droit de statuer en matière de libéralités faites aux communes et aux établissements publics, que quand il s'agit de valeurs considérables, et ce principe n'a cessé d'être observé jusqu'à ce jour d'après la législation, ei tous les temps ; l'autorisation relative aux dons et legs à accorder aux établissements de mainmorte, a toujours été de la compétence du gouvernement.

Cela se conçoit, il s'agit d'un intérêt social du premier ordre, et, sous ce rapport, le gouvernement est plus compétent que les autorités provinciales.

Je pense donc que la proposition de MM. Jacobs et de Naeyer va trop loin et qu'il est préférable d'adopter un système moins radical.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - M. le ministre de l'intérieur nous disait tout à l'heure que nous avons le droit de nous féliciter de ce qu'aucun autre pays plus que la Belgique n'est capable de libertés et d'indépendance communale.

Je prends acte de cette déclaration de M. le ministre et je l'invoque pour combattre le discours qu'il vient de prononcer.

Je crois, messieurs, à la fécondité des libertés communales dans les temps anciens. Je crois qu'aujourd’hui encore nous pouvons maintenir les mêmes principes et aller plus loin que n'a été la loi de 1836.

Un mot d'abord sur le passé.

M. le ministre de l'intérieur m'a adressé trois objections. J'ai fait une part trop grande à l'influence des libertés communales. Je n'ai pas tenu compte des privilèges commerciaux qui avaient si puissamment contribué à l'ancienne prospérité de notre pays.

Il m'est impossible, messieurs, de séparer notre prospérité politique de notre prospérité commerciale.

C'est à raison de la protection que nos lois présentaient que le commerce a pris en Belgique cette extension si remarquable. C’est à raison de la protection de nos lois que les marchands de tous les pays de l'Europe venaient réclamer chez nous une généreuse hospitalité.

M. le ministre de l'intérieur poursuivant jusqu'à une époque l'us récente l'histoire de nos communes, les a accusées d'avoir été une source de dépenses considérables, à tel point qu'au XVIIIème siècle il y avait une situation désastreuse à laquelle la centralisation seule a pu porter remède.

Je crois devoir protester contre ce reproche. Nous savons tous combien la Belgique a été ensanglantée par les invasions étrangères, combien de malheurs elle a eu à subir, combien de fois elle a été surchargée d'impôts et de contributions, et si elle a lutté contre tous ces malheurs et contre tous ces désastres, c'est évidemment à la persévérance, à la fécondité de l'esprit communal qu'elle le doit.

Voici d'ailleurs comment s'exprimaient les autorités les plus compétentes à la fin du XVIIIème siècle, a l'époque même qu'indiquait M. le ministre de l'intérieur. Je lis dans un rapport adressé au duc de Saxe-Teschen :

« Si Votre Altesse royale daignait se faire tracer le tableau du plat pays de la Flandre tel qu'il était passé soixante-cinq ans, elle reconnaîtrait à son grand étonnement que ce pays, aujourd'hui un des plus beaux et des plus riches de l'Europe, n'offrait alors aucun débouché d'une ville à l'autre, aucun chemin praticable dans l'intérieur des terres, aucune grande route qui ne fût infestée de vagabonds. »

Et dans un mémoire émanant des états de Flandres et qui, je pense, est du 27 juillet 1787, on lit ce qui suit :

« Il y a eu peu de guerres en Europe dont les Pays-Bas n'aient été le berceau ou le théâtre ; mais à peine dévastées par les fléaux qui accompagnent constamment les armées, l'on a vu ces provinces reprendre immédiatement leur antique prospérité, et ce n'est qu’à la bonté de nos lois que nous devons ces avantages. »

Certes, messieurs, il n'est pas dans ma pensée de prétendre que nous pouvons faire revivre aujourd’hui nos anciennes institutions communales, en tant qu'elles ont été le privilège de quelques grandes villes. Autrefois, les libertés étaient le privilège de quelques-uns. Aujourd'hui elles doivent être le droit de tous, et le degré de civilisation, le degré d'instruction, le degré de développement qui existait autrefois dans nos grandes cités, nous devons constater aujourd'hui qu'il appartient à toutes nos communes. Ce que nos villes ont pu faire dans le moyen âge, je crois qu'il est peu d'autorités communales qui, dans une certaine mesure, dans la mesure que j'ai cru devoir indiquer moi-même, ne puissent le faire.

Je crois qu'il faut tenir compte du développement des mœurs, du développement de l'esprit public qui ont préparé depuis longtemps les progrès de ces libres institutions qui appartiennent à la Belgique plus qu'à tout autre pays.

J'arrive au présent.

M. le ministre de l'intérieur m'a adressé à cet égard plusieurs reproches.

J'ai insisté sur ce qui s'est fait dans les pays étrangers. J'ai trop parlé de l'Allemagne, de la Suisse, de l'Autriche. J'ai été peut-être coupable en invoquant ce qui se passe dam les Pays-Bas qui, soumis longtemps à la même législation, se trouvent dans une situation politique qui se rapproche beaucoup de la nôtre. J'ai été surtout coupable en parlant de la France et en cherchant, de ce côté, des leçons.

(page 817) Messieurs, je tiens à déclarer qu'à toutes les époques, avant-hier comme toutes les fois que j'ai eu l’honneur de prendre la parole à la Chambre, j'ai fait mes réserves les plus expresses sur ce point. J'ai rappelé que la France avait été longtemps le pays du monopole et de la centralisation.

Mais j'ai invoqué cet exemple par ce motif que lorsque la France reconnaît ces fautes des temps passés et marche en avant dans la carrière de la liberté administrative, il est du devoir de la Belgique de ne pas rester en arrière ; je tenais à constater que tout ce que le gouvernement français pouvait accorder à la commune française, le gouvernement belge était tenu également de l'accorder à la commune belge.

Il est évident, messieurs, que la loi de 1836 est une loi excellente en ce sens qu'elle confère aux députations permanentes la tutelle des communes. Je l'ai déjà dit et je le répète ; je n'envie à la France ni l'autorité du préfet, ni l'autorité du conseil de préfecture, mais je tiens à observer qu'en France comme en Belgique, l'autorité centrale a été longtemps surchargée d'attributions exagérées et qu'il y est reconnu aujourd'hui que, dans l'intérêt même de l'autorité, il faut que son action soit affranchie de ce qui la surcharge et la compromet.

Certes, messieurs, en France, l'autorité ne renoncerait pas à rester forte, et lorsque, tout à l'heure, l'honorable ministre de l’intérieur m'avertissait de ne pas aller trop loin, de ne pas affaiblir le pouvoir central, de ne pas compromettre le principe du gouvernement, je me sentais très disposé à lui opposer, ce que, il y a quelques jours, je lisais dans le rapport de M. Thuillier présenté au corps législatif ; il y a là des vérités qui s’appliquent aussi bien à la Belgique qu'à la France.

Vous comprenez parfaitement, messieurs, que délivrer l'administration centrale des attributions excessives qui lui appartiennent aujourd'hui, c'est fortifier l'Etat et concilier la marche régulière des affaires avec la liberté administrative.

Voici, messieurs, comment s'exprime M. Thuillier :

« Appelé à tout diriger, à tout surveiller, à tout réglementer, l'Etat se trouve conduit à assumer tant d'attributions diverses et tant de devoirs, qu'il finirait par absorber les intérêts généraux, les intérêts locaux, les intérêts privés, dans son autorité souveraine. On sollicite sans cesse ce pouvoir, de qui tout dépend, car il décide, il aide et conseille, autorise ou défend. A tant de prérogatives correspond une immense responsabilité Tout semblant émaner du gouvernement, on s'en prend à lui de tout : du bien qu'il ne peut faire, du mal qu'il ne peut empêcher. Quelle autorité ne s'énerverait dans l'accomplissement d'un pareil rôle ? Quand vous aurez étendu la sphère d'action des conseils généraux et municipaux, relâché ou brisé les liens de la tutelle officielle, décentralisé en un mot les affaires locales, vous n'aurez pas affaibli le pouvoir, vous l'aurez, au contraire, grandi et fortifié, en dégageant sa responsabilité. »

- Un membre. - C'est en France.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Ce sont là d'excellentes paroles. Vous dites qu'elles ne s'appliquent pas à la Belgique ; évidemment les honorables interrupteurs veulent prétendre que tout ce que la France veut se donner, nous le possédons déjà.

MfFOµ. - Nous possédons beaucoup plus.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Alors je demanderai pourquoi l'on n'introduit pas, dans la loi que nous discutons aujourd'hui, les principales dispositions de la loi française de 1865. Pourquoi ne permet-on pas aux communes de régler par les délibérations de leurs conseils électifs l'acquisition des propriétés immobilières dans une certaine limite, l’acceptation ou le refus des dons et legs faits, sans charges, conditions ou affectation, en dehors de toute réclamation ?

Pourquoi ne permet-on pas aux conseils communaux, toujours sans aucune intervention supérieure, de voter des emprunts dont l'amortissement ne dépasse pas douze années ?

Tout cela, messieurs, n'existe pas dans le projet de loi que nous avons sous les yeux.

M. le ministre de l'intérieur (M. A. Vandenpeereboom). - Voulez-vous lire le prunier numéro de cet article : « Sur la proposition du maire, » c'est-à-dire d'un fonctionnaire nommé par le gouvernement,

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Mais, en Belgique, messieurs, lors même que le bourgmestre proposerait cela, le conseil communal ne pourrait pas le voter en dernier ressort.

- Un membre. - En France le maire ne peut rien sans l'intervention du préfet.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Je ne vois nulle part que le maire ne puisse pas porter à l'ordre du jour, sans l'autorisation du préfet, les objets dont je viens de parler, car l'exposé des motifs prévoit précisément le développement des attributions du conseil municipal et la même extension est proposée pour les conseils généraux.

Eh bien, messieurs, étendons également en Belgique les attributions de nos autorités électives. La France, engagée trop longtemps dans les liens du monopole et de la centralisation, cherche aujourd'hui à les secouer. Profitons de l'expérience des pays voisins et à aucun point de vue ne faisons moins pour la Belgique que ce qui existe ailleurs.

M. le ministre de l'intérieur, dans l'exposé des motifs, constate que dans la plupart des cas le recours à l'autorité centrale est sans utilité, que généralement les lumières des députations permanentes suffisent. S'il en est ainsi, et lorsque M. le ministre de l'intérieur vient dire qu'après 30 années il y a un pas à faire dans la voie de la décentralisation, ne serait-il pas déplorable de reconnaître que toutes ces améliorations se réduisent à un seul cas nouveau ?

Faudrait-il déclarer qu'il est un cas unique où une réforme introduite après trente années doit attribuer à la commune, agissant d'accord avec la députation permanente, le droit de prendre une résolution en dehors de la tutelle de l'autorité centrale ?

Quand M. le ministre de l'intérieur faisait tout à l'heure l'éloge de la loi communale, je reconnaissais volontiers qu'en 1836 la loi communale réalisait de notables progrès ; mais j'ai aussi le droit d'ajouter qu'après 30 années la loi communale doit être étendue et développée.

Telle et l'observation sur laquelle j'ai insisté, telle est la pensée qui a dicté mon amendement et je déclare en terminant qu'en adhérant entièrement aux principes énoncés dans l'exposé des motifs, je ne vois, dans le projet de loi, rien qui réponde à ces pompeuses prémisses. D'autre part, je ne remarque pas que M. le ministre se soit expliqué sur les idées de décentralisation dont il nous entretenait en 1862.

Il me paraît que ce n'est point par des questions de chiffres qu'il faut procéder, mais que c'est par des questions de principes. Il faut ne pas hésiter à le dire : les mœurs politiques se sont développées, la Belgique est capable de supporter plus de liberté. Accordons aux communes quelque chose de plus qu'en 1836 et formons le vœu que, les mœurs politiques se développant de plus en plus, nous pourrons dans quelques années les associer de plus en plus à la gestion de leurs intérêts.

M. Jacobsµ. - Messieurs, M. le ministre de l'intérieur a commencé son discours par établir en thèse générale, qu'en Belgique il y a plus de libertés sous tous les rapports et notamment dans la sphère communale qu'en aucun autre pays.

Il a fait un parallèle entre la Belgique et la France et il s'est restreint à ce parallèle. Assurément, si nous n'avions à comparer que ces deux pays, ce n'est pas moi qui le contredirais.

Personne dans cette enceinte n'a soutenu que la liberté communale soit plus développée en France qu'en Belgique.

Certes s'il y avait à choisir entre les deux législations, nul n'hésiterait ; mais faut-il pousser le chauvinisme au point de prétendre que nous n'ayons aucun emprunt à faire à une législation en général inférieure à la nôtre.

L'honorable M. Kervyn vient de citer différents points qui chez nous sont encore soumis à l'approbation de la députation permanente tandis qu'en France le conseil communal est omnipotent. On lui a répondu, il est vrai, que ce n'est que sur la proposition des maires ; mais quant à moi je préférerais encore un conseil communal omnipotent lorsqu'il agit sur la proposition du maire à un conseil communal ne pouvant délibérer que moyennant approbation de la députation permanente. Je crois qu'il y aurait encore progrès.

Tout ce qui est d intérêt général, a dit M. le ministre de l'intérieur, entraîne l'intervention du pouvoir central, et les objets dont il s'agit dans les cas prévus par l'article 77 de la loi communale, cas dans lesquels la députation permanente tranche en dernier ressort, ne sont attribués à ce collège que par une espèce de délégation que l'on pourrait même qualifier d'excessive.

Je tirerai argument précisément de ces cas de l'article 77 de la loi communale dans lesquels l'intérêt général est engagé d'une manière approximativement aussi considérable que dans les cas de l'article 76, car je rappellerai à la Chambre que lorsqu'on a discuté la loi communale, différents points qui figuraient à l'article 76 ont été transportés à l'article 77 et réciproquement.

Je tirerai argument du pouvoir accordé à la députation permanente dans les cas prévus par l'article 77 pour conclure qu'il n'y aurait pas d'inconvénient si majeur à lui donner la même omnipotence dans les cas prévus par l'article 76.

(page 818) Mais remarquez, messieurs, que l'amendement proposé par l'honorable M. de Naeyer et par moi ne va pas à beaucoup près aussi loin.

Ce n'est pas un amendement radical. Nous n'excluons pas l'intervention royale, nous n'enlevons à la couronne aucune de ses prérogatives, nous ne faisons que changer le mode d'intervention. Au lieu d'une intervention obligatoire et générale, nous proposons une intervention facultative et exceptionnelle. La Chambre jugera lequel des deux modes lui offre le plus de garanties.

Cette intervention du reste pour certains des cas prévus par l'article 76 pour les aliénations, les acquisitions, lorsqu'il s'agit d'une somme inférieure à 5,000 fr., et pour les petites communes c'est une somme considérable, cette intervention du pouvoir royal n'est pas exigée par le projet actuelle.

Nous ne touchons donc pas à une espèce d'arche sainte.

A propos ds législations étrangères, dont je disais un mot en commençant, j'invoquerai un autre exemple qui montrera que nous ne sommes pas précisément l'Eldorado des libertés communales.

Si j'ouvre la loi communale néerlandaise, j'y trouve à l'article 194 que les emprunts, les acquisitions, les aliénations, les donations et legs sont soumis d'une manière absolue à la députation permanente.

Je crois qu'il existe en Hollande un droit de recours, un droit d'annulation comme celui que nous voulons établir par notre amendement, mais l'approbation royale n'est pas exigée pour tous les cas ; et, si la loi fondamentale n'avait pas exigé l'intervention du pouvoir central pour l'approbation des impôts communaux, je suis disposé à croire que le législateur aurait traité les impôts comme les emprunts.

L'honorable ministre de l'intérieur n'a fait que deux objections à notre amendement. Je n'entrerai pas dans le détail des différents cas qui y sont compris ; l'un frappe plus l'honorable ministre de l'intérieur, l'autre frappe plus l'honorable M. Lelièvre ; quant à moi ils me frappent tous également.

J'accorde au gouvernement qu'ils doivent tous être mis sur la même ligne, ainsi que le fait son projet.

Le tout est de savoir si je donne autant de garanties à la commune et au pouvoir central, en substituant la faculté d'annuler d'office à l'approbation obligatoire aujourd'hui. Deux objections, disais-je, ont été faites à notre système. Voici la première. Il arrive dans beaucoup de cas, que le gouvernement n'approuve ni ne désapprouve en totalité la délibération communale. Il approuve tel point, il blâme tel autre. Il renvoie la délibération à la commune pour qu'elle la modifie et cette délibération lui revient modifiée.

Dans le système qui substitue l'annulation d'office dans le délai de 40 jours à l'approbation, ce délai est trop court pour permettre que la délibération soit renvoyée à la commun ; et que celle-ci prenne une nouvelle décision. D'autre part, l'annulation offre certains caractères odieux qu'il ne faut pas prodiguer.

Je réponds que, si le délai doit être allongé, il est facile de le faire. Mais c'est inutile et dans la plupart des cas il suffira pour le renvoi de la délibération à la commune et pour l'envoi d'une délibération nouvelle.

Dans le cas où le délai ne sera pas suffisant, qu'arrivera-il ?

C'est que le gouvernement annulera la première délibération et qu'il lui en viendra une seconde, qu'il approuvera.

Quant au caractère odieux qu'où prête à l'annulation d'office, ce caractère, je ne le reconnais pas même aujourd'hui.

Je ne crois pas qu'une commune dont la délibération est annulée trouve odieuse la décision gouvernementale.

Mais le caractère odieux, d'où pourrait-il résulter ?

De ce que ces annulations sont exceptionnelles et très rares. Le jour où elles seront régulières, normales, le jour où le mot non-approbation, qui figure aujourd'hui dans l'arrêté royal, sera remplacé par le mot annulation, le jour où vous aurez fait la règle de ce qui est aujourd'hui l'exception, l'odieux disparaîtra et vos deux objections n'auront plus même un semblant de vérité.

Si M. le ministre de l'intérieur n'a pas d'autres raisons à opposer à notre amendement, la Chambre peut sans crainte y donner son assentiment.

M. Mullerµ. - Messieurs, je tiens à déclarer à la Chambre que je ne partage nullement les opinions des orateurs qui ont invoqué l'exempte de la France pour combattre le projet de loi et qui ont établi un parallèle, peu favorable à la Belgique, entre les libertés communales que consacre notre législation et celles que l'on s'apprête à donner à la France.

Ce que je désire sincèrement pour ce dernier pays, c'est que ce qui sortira du nouveau projet de loi qui va être soumis aux délibérations du corps législatif soit de nature à le doter de libertés communales aussi étendues que celles que nous possédons.

Ce n'est pas à la France, messieurs, que nous avons sous ce rapport à faire des emprunts utiles. Nous sommes, en matière d'organisation communale, en possession de précieuses prérogatives ; il nous reste, il est vrai, quelques réformes à introduire au point de vue de la simplification ; mais à coup sûr nous n'avons pas à modifier profondément notre régime communal.

Cela dit, messieurs, j'exprimerai mon opinion sur deux questions qui ont été développées aujourd'hui, l'une par l'honorable M. Lelièvre, l'autre par l'honorable M. Jacobs, relativement aux legs et donations.

La section centrale par un motif que la Chambre comprendra a fait droit à la partie de l'amendement de M. Lelièvre qui concerne les donations entre-vifs. En effet, si le donateur vient à mourir avant l'acceptation de cette donation, elle deviendra caduque, c'est-à-dire qu'elle ne pourra plus être acceptée. Une partie de la citation que M. Lelièvre a empruntée à M. Troplong se rapporte à ce point : c'est contre la caducité de la donation que se récrie surtout cet éminent jurisconsulte.

Quant aux legs faits aux communes ou à des établissements publics, il n'y a pas les mêmes motifs pour prendre des mesures conservatoires, parce que la mort du testateur n'empêche pas le moins du monde la commune ou l'établissement public d'entrer en possession du legs, s'il est autorisé.

L'honorable M. Lelièvre dit : Mais il n'aura pas la jouissance des intérêts à partir du décès ou à partir de la demande d'acceptation qui aura été accueille par le pouvoir compétent ? D'après moi, messieurs, il y a un moyen très simple pour le testateur de remédier à cet inconvénient. C'est de mentionner, dans ses dispositions, qu'il entend que sa libéralité porte fruits ou intérêts à partir de son décès ou de toute autre date, sous ce rapport toute liberté lui est, me semble-t-il, réservée. J'ajouterai que ce qui nous a aussi déterminés à n'accueillir que partiellement l'amendement de M. Lelièvre, c'est que nous n'avons pas jugé convenable de vous proposer de prendre à quelques mois d'intervalle deux dispositions, différentes de rédaction et d'effets, sur cette question, que vous avez déjà résolue dans la loi sur les fondations des bourses.

Nous avons donc préféré reproduire textuellement l'article 47, si je ne me trompe, de cette loi, pensant qu'il y aurait imprudence à modifier actuellement ce texte, alors qu'il s'agit d'une matière tout à fait identique.

Quant à l'amendement de l'honorable M. Jacobs, qui demande que les autorisations de dons et legs soient accordées par les députations permanentes dans tous les cas, et qu'il ne puisse pas y avoir recours au Roi lorsque la somme ne dépasse pas 5,000 fr., je ne puis y donner mon adhésion. Au surplus, M. Jacobs se trompe, quand il dit qu'il en est déjà ainsi actuellement en ce qui concerne les sommes de 5,000 fr.

En effet, lorsque les députations statuent, il y a toujours recours au Roi et le Roi peut statuer dans tous les cas.

Il serait impossible rationnellement d'admettre une disposition qui donnerait aux députations permanentes le droit d'autoriser les legs, quelles que soient leur importance et leur valeur en ne laissant au Roi qu'un droit stérile et impraticable d'annulation. Je ne puis me rallier à un tel système par deux raisons, puisées, l'une dans l'intérêt des familles que l'Etat doit protéger, l'autre dans la nécessité sociale de prévenir la trop grande concentration de la propriété en mainmorte. Sous ce double rapport, je croîs qu'il convient de laisser au gouvernement seul le droit d'approuver en tout ou en partie ces espèces de libéralités, même lorsqu'elles ne dépassent pas 5,000 fr. Et je crois, à ce propos, devoir donner une explication sur ce qui doit déterminer l'importance numérique d'une libéralité, et la compétence du pouvoir royal ou des députations permanentes.

En supposant qu'un testament comprenne plusieurs legs à des établissements différents, il doit être entendu que si ces legs réunis dépassent 5,000 fr., ils doivent être autorisés directement par le Roi comme cela s'est pratiqué jusqu'ici dans la plupart des provinces.

En terminant, je ferai remarquer, messieurs, que l'on sort complètement du domaine de la liberté communale, lorsqu'on demande eu cette matière plus que ce qui existe aujourd’hui.

Telles sont les observations que j'avais à soumettre à la Chambre.

M. Tackµ. - Je demande la parole uniquement pour présenter une observation sur l'une des dépositions de l'article 76, modifié par le projet de loi, je veux parler de celle relative aux établissements publics existant dans la commune.

(page 819) Je ne sais si je me trompe, mais il me semble qu'il y a une contradiction entre le texte du projet et le texte de l'exposé des motifs. La loi communale statue que les numéros 3 et 4 de l'article 76 sont applicables aux établissements publics existants dans la commune, qui ont des administrations spéciales, c'est-à-dire que les actes de donations faits en faveur de ces établissements et les demandes en autorisation d'acquérir des immeubles ou des droits immobiliers faites par les hospices et bureaux de bienfaisance ou les fabriques d'église, doivent être soumis à la sanction royale.

Le projet de loi dit, en outre : Les dispositions du n°1 en ce qui concerne les aliénations de gré à gré, les transactions et les partages sont également applicables aux établissements existants dans la commune qui ont une administration spéciale. Ainsi d'après le projet de loi les aliénations de gré à gré, les transactions et les partages qui intéressent les établissements qui nous occupent doivent être soumis à la sanction royale. Tel est du moins je pense, le sens de la phrase que le gouvernement ajoute à la disposition de la loi communale. Mais le contraire semble résulter de l'exposé des motifs. Je lis à la page 4 :

« La loi communale assimile ici aux communes les bureaux de bienfaisance, les hospices et les fabriques d'église quant aux dons et legs et aux acquisitions d'immeubles. Il y a lieu d'étendre cette assimilation aux aliénations de gré à gré, aux transactions et aux partages qui n'auront pas besoin dès lors d'être approuvés par le Roi. »

Ces conclusions ne correspondent pas aux prémisses, et il me semble qu'au lieu de : « qui n'auront pas besoin des lors d'être approuvés par le Roi », il faudrait dire : « qui auront besoin par conséquent d'être approuvés par le Roi. »

C'est pour qu'il ne reste pas de doute sur la portée du projet de loi que je me suis permis de présenter cette observation. Du reste le paragraphe de l'exposé des motifs qui suit celui dont je viens de donner lecture, semble expliquer les choses.

Voici comment il est conçu :

« Les autres actes prévus par l'article 76 quand ils émanent de ces mêmes établissements ne doivent pas, d'après les lois en vigueur, être revêtus de l'approbation du Roi. Il n'y a par conséquent qu'à maintenir ce qui existe. »

Ceci concorde avec le texte du projet de loi..

En effet, les transactions, les actes de partage, et les aliénations de gré à gré d'après la législation en vigueur doivent être soumis à 1a sanction royale.

MjTµ. - La section centrale a compris le n°1 dans cette disposition.

M. Tackµ. - La disposition figure à la suite de l'exposé des motifs dans le projet de loi, elle émane donc du gouvernement.

Il m'a suffi de lever le doute qui aurait pu surgir et de constater que l'intention du gouvernement est de maintenir ce qui existe, c'est-à-dire qu'à l'avenir comme sous l'empire des lois actuelles, les transactions, les actes de partage et les aliénations de gré à gré, quand il s'agit d’établissements charitables, devront être soumis à l'approbation du Roi.

M. Delcourµ - Ayant fait partie de la section centrale et l'honorable rapporteur, M. Dumortier, n'étant pas présent, je crois devoir donner une explication au sujet de la difficulté qui vient d'être soulevée par mon honorable ami M. Tack.

Je crois, messieurs, qu'il n'y a aucune contradiction dans les dispositions du projet de loi.

La section centrale en ajoutant à la fin de l'article 76 de la loi communale, les mots :

« Les dispositions du n°1, en ce qui concerne les aliénations de gré à gré, les transactions et les partages sont, ainsi que celles des n°3 et 4, applicables aux établissements publics existants dans les communes qui ont une administration spéciale. »

La section centrale, dis-je, a fait un rappel nécessaire pour compléter la loi.

En effet, il suffira, messieurs, pour vous rendre compte de ces mots, de vous rappeler les principes de la loi communale.

Aux ternies des n°3 et4 de l'article 76, les dons et legs excédant la somme de 3,000 fr., les acquisitions d'immeubles dépassant la même somme sont seuls soumis à l'approbation du gouvernement ; l’approbation de la députation suffit si ces actes n’atteignent pas ce chiffre.

Eh bien, ces dispositions ayant été rendues applicables aux établissements publics existants dans la commune, il fallait, dès que le principe de décentralisation était étendu aux aliénations de gré à gré, aux transactions et aux partages, arriver à une règle uniforme et appliquer me même principe aux établissements publics ayant une existence propre dans la commune. Seulement le projet de loi a substitué le chiffre de 5,000 fr. au chiffre de 3,000 fr. établi par la loi communale.

Vous le voyez donc, messieurs, ce changement complète et améliore la loi, c'est une lacune que nous avons voulu combler.

MjTµ. - C’est ce que j'ai dit ; c'est la section centrale qui a ajouté la mention du n°1 de l’article 76.

M. Delcourµ. - C'est cela ; comme il y avait une disposition nouvelle se rattachant au n°1°, nous avons voulu que cette disposition fût étendue aux établissements ayant une existence propre dans la commune.

J'espère que cette explication satisfera l'honorable M. Tack.

MjTµ. - Il y a, messieurs, dans la disposition que nous discutons un point qui intéresse spécialement les administrations qui ressortissent à mon département ; c'est ce qui a rapport aux donations et legs faits à la commune, régis par le n°3, qui devient applicable aux établissements de bienfaisance.

Vous savez quelle est la législation actuelle ; les dons et legs jusqu'à concurrence de 3,000 fr. sont approuvés par la députation permanente sauf recours au Roi de la part des administrations et des personnes intéressées.

Le gouvernement dans le projet qu'il a soumis à la Chambre n'avait en rien modifié les paragraphes 3 et 4. La section centrale a élevé la compétence des députations permanentes jusqu'à la somme de 5,000 francs. Le gouvernement se rallie à cet amendement. Mais deux autres systèmes ont été proposés tendant l'un et l’autre à modifier profondément les dispositions de la loi communale ainsi que l'amendement de la section centrale. L'un de ces systèmes est présenté par l'honorable M. Kervyn, l'autre par les honorables MM. Jacobs et de Naeyer.

D'après l'amendement de l'honorable M. Kervyn, le gouvernement n'intervient plus que lorsqu'il y a recours devant lui : quelle que soit la valeur des donations, le gouvernement n'a plus à statuer, à moins qu'on ne se pourvoie devant lui en degré d'appel.

Il me semble cependant, messieurs, que lorsqu'il s'agit de déterminer les pouvoirs des différentes autorités qui composent la hiérarchie administrative, il y a une chose à examiner avant tout. Il ne suffit pas de nous dire qu'il faut centraliser telles choses, décentraliser telles autres, ce ne sont là que des mots. Il s'agit de savoir, en définitive, quels sont les divers intérêts qui sont confiés aux diverses autorités.

Eh bien, dans les questions de donations et legs, quels sont les intérêts qui se présentent ? Il y en a de trois espèces différentes : il y a d'abord l'intérêt de l'établissement avantagé ; il y a ensuite l'intérêt des héritiers qui sont privés des biens légués ou donnés ; il y a enfin l'intérêt général qui peut être compromis par un grand amortissement possible de biens, par une affectation considérable à des services qui peuvent n'en pas avoir besoin. Voilà les trois intérêts qui sont ici en jeu. Sont-ils sauvegardés par les amendements que l'on a proposés ?

En aucune manière : dans les deux systèmes, l'Etat qui doit veiller à ce qu'il n'y ait pas une trop grande immobilisations de biens, une trop grande quantité de biens en mainmorte, ou trop d'affectations à des services qui n'en ont pas besoin, l'Etat est exclu de toute autorité, de toute surveillance. En second lieu, l'Etat qui doit être la sauvegarde des familles, n'a plus à intervenir en rien dans les donations. On abandonne aux députations le droit de décider dans tous ces cas.

Il n'y a véritablement que l’intérêt des établissements de bienfaisance qui soit sauvegardé, et comme cet intérêt se trouve toujours en opposition avec l'intérêt des héritiers, comme il est souvent en opposition avec l'intérêt général qui veut qu'il n'y ait pas une affectation trop grande à des services qui n'en ont pas besoin, je vous demande ce que deviendront l’intérêt des héritiers et l'intérêt général quand cette attribution sera déférée aux députations permanentes qui ont toujours une certaine tendance à veiller surtout aux intérêts des établissements de bienfaisance.

En réalité, messieurs, par l'organisation que l'on propose on sacrifie l'intérêt des familles et l'intérêt général à l'intérêt de ces établissements. Cela n'est évidemment pas admissible.

Quand vous parlez de décentralisation, je comprends parfaitement bien que vous attribuiez à la commune ce qui intéresse exclusivement la commune et que vous disiez que la commune doit subir les conséquences de son administration. Je comprends encore ce système, même poussé à l'excès.

Mais je ne comprends plus que vous appeliez décentralisation l'attribution donnée aux communes ou aux députations, de la connaissance des affaires qui concernent l'intérêt général.

' Votre décentralisation consiste, d'un côté, à centraliser en quelque (page 820) sorte toutes les charges au détriment de l’Etat, de l’autre, à décentraliser tous les pouvoirs.

Je dis donc que le système que l’on propose n’est pas en harmonie avec les intérêts qui sont en jeu.

L'honorable M. Jacobs a dit qu'on n'excluait pas le gouvernement, qu'on proposait seulement un autre mode de manifestation de son autorité.

Or, messieurs, cet autre mode d'intervention diffère essentiellement dans ses effets ; même après avoir entendu l'honorable M. Jacobs, je ne saurais apprécier les conséquences des annulations qu’on nous propose.

J'attire toute l'attention de la Chambre sur ce point-ci : il y a une énorme différence entre l'intervention du gouvernement jugeant en degré d'appel et l'intervention du gouvernement procédant par voie d'annulation.

Ainsi, lorsqu'un acte est soumis au gouvernement et qu'il a à juger en degré d'appel, il peut le modifier dans certaines de ses parties, dans certaines de ses conditions, il peut en atténuer les conséquences. Lorsqu'il procède par voie d annulation, c'est tout à fait différent.

Prenons, par exemple, un don ou un legs. Supposons qu'il y ait été statué par une députation permanente et qu'un héritier ait réclamé. Eh bien, le gouvernement, procédant par voie d'appel, pourra faire droit, dans une certaine mesure, à la réclamation de l'héritier.

Quand il procédera par voie d'annulation, en sera-t-il de même ?

Non ; il devra maintenir ou annuler complètement l'acte. Après que l'annulation aura été prononcée, que sera-t-il permis de faire ?

Une nouvelle délibération pourra-t-elle intervenir, ainsi qu'une nouvelle décision du gouvernement ? Ce sont toutes conséquences dont je ne puis, quant à présent, me rendre compte.

Dans le système administratif qui nous régit, un amendement pareil à celui que je combats serait de nature à créer une véritable anarchie.

Je le répète, la décision en degré d'appel, et la décision par voie d’annulation ont un caractère et des effets tout à fait différents.

Autre chose. Je ne vois pas même, dans les dispositions qu'on propose, le recours laissé aux héritiers qui est maintenu formellement, quelle que soit la somme, et par le projet du gouvernement et par celui de la section centrale. Je vois bien que les actes sont soumis à l'approbation de la députation permanente, sauf recours au Roi par les communes, mais les dispositions tutélaires introduites par la loi communale, en faveur des héritiers, ne sont pas reproduites dans l'amendement.

Autre chose encore. Le droit d'appel existait pour les héritiers, quelle que fût la somme ; alors que la députation permanente avait statué, se fût-il même agi d'une somme inférieure à 3,000 fr., les héritiers pouvaient se pourvoir devant le gouvernement. Dans le système de l'amendement, ils ne pourront plus se pourvoir devant le gouvernement. Le gouvernement ne pourra pas d'office annuler, à moins que la somme n'excède 5,000 fr.

Messieurs, il faut bien le dire : tout est relatif dans ce monde ; pour de pauvres gens qui ont été déshérités, 2,000, 3,000 ou 4,000 fr. sont une somme très forte, dont la perte leur est souvent bien plus pénible que celle de 20,000, de 30,000 et de 40,000 fr. pour d'autres héritiers.

Il serait injuste de ne pas admettre pour les premiers héritiers le recours au Roi dans tous les cas, comme le fait la loi communale, et comme la section centrale propose de le maintenir.

Messieurs, on parte de simplifications. Je ne pense pas que ce qu'on propose aurait un pareil résultat.

Je pense, au contraire, que si l'amendement pouvait être adopté, il donnerait lieu, dans la pratique, à de grandes complications. Il est évident que si la députation permanente doit décider de toutes les donations qui sont faites, le gouvernement devra nécessairement organiser un contrôle qui s'exercera d'une autre manière ; le gouvernement devra se faire adresser une copie de tous les actes de donation, ainsi que de toutes les décisions prises ; il devra examiner toutes les conditions qui sont imposées ; car en pareille matière, les conditions, c'est la chose importante. Et lorsque les résolutions prises ne lui paraîtront pas conformes aux principes, il devra aviser, et il y aura décision dans tous les cas. Ainsi, loin de simplifier, vous aurez une complication beaucoup plus grande.

Du reste, je n'aperçois pas les abus que le système actuellement en vigueur a pu engendrer ; et cependant il y a longtemps que je suis dans l'administration que j'ai parcourue à tous ses degrés depuis le conseil communal jusqu'au conseil provincial, jusqu'à la Chambre et jusqu'au ministère ; on ne signale pas non plus d'abus.

On dit bien que les communes auront une liberté plus grande ; je conçois cette plus grande liberté, quand il s'agit des intérêts purement communaux ; mais cette liberté plus grande des communes, on ne doit pas l'invoquer quand il s'agit des intérêts généraux, des intérêts des familles, ou des intérêts des établissements de bienfaisance.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Messieurs, l'honorable M. le ministre de la justice a adressé deux reproches à l'un des paragraphes de mon amendement, à propos des legs et donations. Le premier, qu’on ne sauvegardais pas les intérêts des familles, en donnant à la députation permanente le pouvoir de prononcer en denier ressort, lorsqu'il y avait des héritiers lésés ; le second, que mon amendement permettrait l'accumulation des biens de mainmorte.

Je tiens à faire remarquer à la Chambre et à M. le ministre de la justice qu’en ce touche le premier point, mon amendement porte expressément que lorsqu'il y a réclamation de la part de la famille...

MjTµ. - Mon observation s'appliquait non pas à votre amendement, mais à celui de l'honorable M. Jacobs.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Je me borne à faire remarquer d'après mon amendement que chaque fois qu'il y aura, de la part de la famille, opposition à la décision de la députation permanente, il sera statué par le Roi sur l'acceptation, sur la répudiation on ou sur la réduction des donations ou legs. Je suis donc tout à fait à l'abri du premier reproche qu'a fait M. le ministre de la justice.

En ce qui touche le second reproche, j'en ai déjà dit quelque chose dans le discours que j'ai prononcé devant la Chambre. Je puis ajouter en ce moment que je vais déposer sur le bureau quelques lignes qui expliqueront ma pensée et qui compléteront en même temps mon amendement. Voici ce que je propose :

« Dans les cas prévus par les paragraphes 4 et 5, la commune ne pourra acquérir des immeubles qu'autant qu'ils seront destinés à un service d'utilité communale, et les immeubles qui lui seraient donnés ou légués et qui n'auraient pas cette destination, devront, dans le délai de six mois, à partir de la mise en possession de l'objet donné ou légué, être aliénés par voie d'adjudication publique pour le produit en être converti en placements mobiliers avec l'approbation de la députation permanente. »

M. Mullerµ. - Votre amendement s'applique-t-il aux établissements publics autres que la commune ?

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Oui.

MjTµ. - J'ai fait à l'amendement de l'honorable M. Kervyn un reproche auquel cet honorable membre ne répond pas. J'ai dit que quand il s'agit de décentralisation, et c'est le grand reproche que j'adresse aux deux amendements, il faut tenir compte des attributions de chacune des autorités qui constituent notre hiérarchie administrative. Voilà le principe d'où l'on doit partir, et que l'on a méconnu dans les amendements qui ont été déposés. Personne ne s'est demandé : Qu'est-ce qui, en définitive, est d'intérêt général, qu'est-ce qui intéresse non seulement la commune, mais différentes communes, mais différents établissements mais la société tout entière ?

On ne contestera sans doute pas que l'intérêt des familles engagé dans la question des donations intéresse la société tout entière. On ne contestera pas que lorsqu'il s'agit de péages, de passages, de barrières sur des chemins, cela intéressera société tout entière. Mais, en y procédant ainsi, vous rétabliriez le moyen âge. (Interruption.)

Messieurs, je ne viens pas faire de théorie, j'ai vécu toute ma vie de pratique. Eh bien, laissez faire les communes, n'ayez pas au-dessus d'elles une autorité supérieure, et bientôt vous n'aurez plus un chemin où vous ne rencontrerez une barrière.

M. Kervyn de Lettenhoveµ et M. de Naeyer. - Vous avez les députations.

MjTµ. - Vous avez les députations ! Mais elles aussi, à un certain degré, étant plus rapprochées des intérêts locaux, obéissent beaucoup plus à ces intérêts locaux que le pouvoir central qui en est plus éloigné.

S'il en est ainsi, pourquoi demandez-vous tant de subsides ? Mais parce que les communes n'osent pas frapper d'impôts. Et pourquoi n'osent-elles pas frapper d'impôts ? Parce qu'elles sont trop près de leurs électeurs.

Et pourquoi les provinces n'osent-elles pas frapper d'impôts ? Parce qu’elles sont aussi trop près de leurs électeurs ; c'est pour cela qu'on vient tous les jours demander de larges subsides à la caisse du gouvernement, et c'est là la centralisation. Voilà la vérité. Ce que l'on veut, c'est que l’Etat centralise toutes les dépenses, qu'il n'ait plus autre chose à faire qu'à donner de l'argent, et qu'on décentralise complètement l'autorité.

Voilà où mène en réalité le système. (Interruption.) Vous avez beau contester ; c'est la vérité, il n'est personne qui, au fond de sa conscience, ne sente que cela est vrai.

M. de Naeyer. - Allons donc !

MjTµ. - Allons donc ! C'est ainsi.

Tel est donc le grief que je fais aux amendements, c'est de ne pas tenir (page 921) compte de ce qui est d intérêt communal et de ce qui est d'intérêt général. Vous décentralisa, je dirai, par fantaisie. Vous dites ; cela sera réglé par la commune ; cela sera réglé par la députation permanente. Mais vous ne remontez pas aux principes qui devaient dicter toutes vos dispositions.

Maintenant, dirai-je un mot de l'amendement que l'honorable M. Kervyn vient de jeter dans le débat ?

C'est un système entièrement nouveau. Comment ! il va forcer les communes qui recevront des donations, les fabriques d'église, les établissements de charité à rendre, dans les six mois, toutes les propriétés qui leur auront été léguées !

M. de Mérode. -— Dans l'avenir.

MjTµ. - Dans l'avenir, peu importe.

C'est, messieurs, une question très grave et qu'assurément personne ne voudra résoudre sans y avoir profondément réfléchi. Il y a à cette proposition certains avantages.

M. Julliot. - C'est très bon.

MjTµ. - Evidemment, cela peut être très bon à certains points de vue, mais cela peut être très mauvais à certains autres points de vue.

Cela peut être très bon, comme vous appelez cela, économiquement parlant. Mais je dis que cela peut être aussi très mauvais, en ce sens que beaucoup de personnes seront détournées de l'idée de donner, si elles savent qu'immédiatement après leur mort, l'immeuble qu'elles affectent, par exemple, à tels services ou à telles obligations, devra être vendu. Elles y verront la disparition du gage qu'elles ont voulu constituer pour faire exécuter leur volonté.

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - On ne doit pas aliéner dans le cas d'affectation à un service.

MjTµ. - Si je donne, par exemple, pour faire célébrer des anniversaires !

M. Kervyn de Lettenhoveµ. - Ce n'est pas cela.

MjTµ. - Mais vous pouvez réaliser la somme qui aura cette destination.

M. de Mérode. - Il s'agit de dons à titre gratuit.

MjTµ. - Mais ce n'est pas là l'idée de M. Kervyn. L'idée de l'honorable M. Kervyn est de faire vendre tout ce qui est donné gratuitement.

Eh bien, je dis que c'est tout un système et qu'il est impossible de voter au pied levé sur un amendement qui peut avoir des conséquences très sérieuses et qui a besoin d'être mûrement réfléchi. Par conséquent, je dois combattre cet amendement comme n'étant pas suffisamment examiné.

- Plusieurs membres. - Aux voix !

- D'autres membres. - A demain et l'impression de l'amendement !

MpVµ. - J'entends faire la proposition de remettre la séance à demain. Je mets la proposition aux voix.

- Cette proposition n'est pas adoptée.

M. Jacobsµ. - Je ne dirai que deux mots. Je ne répondrai pas longuement à ce qu'a répété M. le ministre de la justice, imitant en cela son collègue M. le ministre de l'intérieur, que nous étions aussi grands centralisateurs en fait de dépenses, que nous l'étions peu en matière de contributions. Tant qu'il existera dans nos budgets des sommes considérables affectées à des subsides aux communes, il y aura affluence de demandes, par suite précisément de l'existence de ces articles du budget.

Quant à moi, je déclare formellement que je n'en suis pas partisan.

Cela met les députés, les arrondissements électoraux et les communes dans une certaine dépendance du gouvernement, qui ne devrait pas exister.

Sous ce rapport donc, je dégage complètement ma responsabilité de cette accusation.

M. le ministre de la justice a fait deux objections à mon amendement qu'il a qualifié d'amendement un peu moyen âge.

Je crois que si mon amendement n'est pas un amendement du présent, ce dont je commence à désespérer...

MjTµ. - Je n'ai pas dit un mot de cela.

M. Jacobsµ. - Vous avez dit qu'avec des amendements pareils, nous retournerions au moyen âge.

MjTµ. - Il s'agit de la disposition relative aux péages et aux droits de passage.

M. Jacobsµ. - C'est une observation générale venant à la suite de critiques qui se rapportaient à notre amendement.

Quoi qu'il en soit, j'espère que si notre amendement n'est pas adopté dans le présent, il le sera dans l'avenir.

Les deux critiques de M. le ministre de la justice portent sur ceci : La première, c'est que le droit d'annulation, dans notre amendement, ne permet que de détruire ou d'approuver en tout les délibérations des députations permanentes et ne permet pas de les réformer en partie.

La seconde critique c'est que, pour les donations et legs de moins de 5,000 fr., nous n'accordons pas même au Roi le droit de les annuler d'office.

Quant à cette seconde critique, moi qui suis disposé à faire autant d'efforts pour me mettre d'accord avec le projet du gouvernement qu'il paraît peu disposé à en faire pour se mettre d'accord avec le notre, je suis disposé à y faire droit, et, d'accord avec l'honorable M. de Naeyer, je supprime le n°2 des exceptions au droit d'annulation du Roi.

Nous faisons ainsi droit, sous ce rapport, aux critiques de M. le ministre de la justice.

Quant au premier point, nous le maintenons énergiquement. Nous croyons qu'il y a tout intérêt, toute utilité à ce que le gouvernement, procédant en dernier ressort, ne puisse qu'approuver ou improuver en tout ; mais ne puisse pas refaire, réformer en approuvant ou en improuvant partiellement.

Sous ce rapport donc, ce qui est un défaut aux yeux de M. le ministre de la justice, est à nos yeux un mérite, de notre amendement et nous le maintenons entièrement.

- Plusieurs membres. - A demain,

- D'autres membres. - Non ! non ! votons !

M. de Theuxµ. - Messieurs, véritablement il me serait très difficile de prendre part au vote en ce moment-ci : beaucoup de discours ont été prononcés, beaucoup de propositions ont été faites ; d'après ce que M. le ministre de l'intérieur avait dit hier, on s'attendait à ce qu'il aurait occupé toute la séance ; je m'aperçois même que beaucoup de membres qui ont l'habitude de siéger ne sont pas présents. Je crois, messieurs, qu'il serait réellement convenable de remettre le vote à demain.

- Cette proposition est mise aux voix et adoptée.

La séance est levée à 4 heures 3/4.