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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 9 décembre 1865

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1865-1866)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboomµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 155) M. de Moor, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à deux heures un quart.

M. Van Humbeeck, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Moor présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Le sieur Emile-Jean-Paul-Joseph Spierings, maître sellier au 3ème régiment de lanciers, demande la naturalisation ordinaire avec exemption du droit d'enregistrement, »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Le sieur Martin-Charles-Antoine Buol, maître de musique à l'athénée royal de Bruges, né à Namur, prie la Chambre de décider si la qualité de Belge lui est acquise et, en cas de négative, de lui accorder la naturalisation, avec exemption du droit d'enregistrement. »

- Même renvoi.


« Le sieur Kint, soldat au 3ème régiment de ligne, demande un congé pour venir en aide à son vieux père. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« M. J. Jouret, retenu chez lui par une affaire imprévue, demande un congé. »

- Accordé.

Rapport sur des pétitions

M. Bricoult, rapporteur. - Par pétition datée de Montignies-sur-Sambre, le 23 mai 1865, le sieur Stassin réclame contre la décision par suite de laquelle son fils Alphonse a été incorporé dans l'armée.

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Bricoult, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Anvers, le 17 mai 1865, le sieur Seys demande que son fils Norbert, soldat au 2ème régiment de ligne, soit congédié du service militaire.

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Bricoult, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Erps-Querbs, le 9 mai 1865, des habitants de Cortenberg et d'Erps-Querbs demandent le prompt achèvement du chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain.

Conclusions : Renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition du 22 novembre 1865, le sieur Antoine Reminis, marchand de bétail à Malines, expose à la Chambre que 9 bêtes à cornes déjà vendues par lui ont été, par ordre de l'autorité, saisies et séquestrées comme suspectes d'être atteintes de la peste bovine.

Après une inspection de dix jours, elles ont été déclarés saines par le vétérinaire du gouvernement, qui en a délivré un certificat. Le lendemain, un des animaux étant tombé malade, le pétitionnaire le fit abattre et consulta le vétérinaire qui en ordonna l'enfouissement, et fit de nouveau séquestrer le reste du troupeau du 18 septembre au 6 octobre ; après quoi, il fut déclaré sain et livré à la consommation.

La statistique insérée dans le rapport du gouvernement sur la peste bovine ne mentionne pas l'animal abattu et enfoui.

Le pétitionnaire demande quelle loi autorise la séquestration des bêtes suspectes, et réclame une indemnité de 1,165 fr. en réparation du préjudice qu'il a éprouvé, tant par suite de la séquestration que par suite de l'enfouissement.

La commission s'est occupée d'abord de la question posée par le pétitionnaire.

En France, l'arrêt du conseil du 19 juillet 1746, article premier, oblige les propriétaires de bêtes à cornes à faire constater par l'autorité que les bêtes malades ou soupçonnées ont été séparées des bestiaux sains et renfermées dans des endroits d'où elles ne puissent communiquer avec eux, mais cet arrêt n'a été publié en Belgique que partiellement par l'arrêté du directoire exécutif du 27 messidor an V, arrêté qui n'autorise les agents de l'autorité qu'à séquestrer les bêtes malades et non plus les suspectes. L'arrêt du conseil du Roi, du 16 juillet 1784, article 4, n'admet aussi que la séquestration des bêtes malades.

L'article premier de la loi sanitaire décrétée par le Congrès national, le 18 juillet 1831, autorise le chef de l'Etat à déterminer, par arrêté, les mesures extraordinaires que l'invasion ou la crainte d'une maladie pestilentielle rendrait nécessaires sur les frontières de terre ou dans l'intérieur, L'arrêté royal du 3 septembre 1865 autorise le ministre de l'intérieur à prendre les dispositions nécessaires pour empêcher la propagation du typhus contagieux ; mais aucun arrêté ministériel n'a, en exécution de l'arrêté royal, permis aux fonctionnaires et notamment aux médecins vétérinaires de séquestrer les bêtes suspectes.

L'utilité de la mesure fait désirer à la commission qu'à l'avenir sa légalité ne puisse plus être contestée et qu'on ne se contente pas de la publication per relationem des dispositions de l'arrêt de 1746 relatives aux bêtes suspectes. Il importe qu'un arrêté ministériel, pris en vertu de l'arrêté royal du 3 septembre dernier, confie aux vétérinaires du gouvernement le droit de séquestrer les bêtes suspectes, droit qui appartient aujourd'hui déjà aux autorités communales en vertu de l'article 3, n°5 du titre XI de la loi des 16/21 août 1790 et de l'article 20 du titre I, section I de la loi rurale des 28 septembre/6 octobre 1791.

Le préjudice résultant de la séquestration, mesure dont le pétitionnaire conteste la légalité, ne peut être apprécié que par les tribunaux ; il en est de même de celui résultant de l'enfouissement ; la compétence de la Chambre pourrait donc être contestée ; cependant, dans la pensée que le gouvernement, rendant hommage à ce principe, que tout sacrifice imposé à quelques-uns dans l'intérêt de tous doit être réparé par la généralité, fera droit spontanément, dans une juste mesure, à la demande du pétitionnaire si l'examen qu'il en fera lui en démontre l'équité, la commission conclut au renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

M. Bouvierµ. - Messieurs, je crois que la Chambre, comme vient de le dire l'honorable rapporteur, est incompétente pour statuer sur cette pétition, mais je pense que M. le ministre de l'intérieur a tout intérêt de l'examiner avec une bienveillante sollicitude. Elle signale, si j'ai bien écouté, un fait très grave : c'est que, sur neuf bêtes à cornes qui ont été saisies, une seule a été abattue, les huit autres ont été séquestrées, et séquestrées dans un local exposé à toutes les intempéries de l'air. Le pétitionnaire a, dit-il, subi de ce chef un très grave préjudice.

Je pense que les mesures prises par M. le ministre de l'intérieur pour combattre l'épizootie de typhus contagieux sont, d'une manière générale, fort bonnes ; mais, d'un autre côté, je ne pense pas qu'il faille, dans un intérêt public, exproprier en quelque sorte un malheureux et faire profiter la généralité d'une perte pour conjurer les progrès d'un mal qui aujourd'hui, par suite des mesures auxquelles je viens de faire allusion, se trouve singulièrement atténuée.

Je le répète, j'appelle toute l'attention de M. le ministre de l'inférieur sur cette pétition, dont j'appuie le renvoi dans l'intérêt de l'agriculture, dont les souffrances sont grandes par suite du prix si peu rémunérateur des céréales.

- Les conclusions sont adoptées.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition datée de Tirlemont, le sieur Janssens-Van Tell se plaint de ce que la commune de Breyssem-Cumptich ait fait une emprise sur son terrain pour élargir ses chemins.

Le pétitionnaire peut actionner la commune soit au possessoire, soit au pétitoire ; la réclamation n'est pas de la compétence de la Chambre.

La commission ne peut donc que proposer l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Les bourgmestres de dix-huit communes du littoral de la mer du Nord demandent que les frais de visite, transport et enterrement des cadavres non reconnaissables trouvés à la côte, soient mis à la charge de l'Etat ; ils font remarquer, à l'appui de leur pétition, que l’Etat profitant des épaves provenant des naufrages, doit supporter les charges de ce dont il retire le profit.

La commission propose le renvoi à MM-, les ministres de l'intérieur et des finances.

M. Van Iseghemµ. - Je viens appuyer la réclamation de divers bourgmestres du littoral.

Il arrive très souvent que quand des tempêtes éclatent et que nous avons des naufrages sur notre côte, des cadavres sont rejetés sur la (page 156) plage. Les communes sur le territoire desquelles les cadavres sont jetés ont des frais considérables à supporter pour le transport à travers les dunes et l'enterrement de ces cadavres. C'est une charge assez lourde pour les pauvres communes du littoral.

Comme ces individus sont souvent inconnus et qu'ils appartiennent presque tous à des nations étrangères, il est impossible de forcer les communes du littoral à supporter une dépense à laquelle elles ne sont nullement tenues. Quand des cadavres sont jetés sur notre côte, les administrateurs communaux ont déjà beaucoup de besogne pour les enterrements, et on voudrait encore que de charges fussent supportées par les communes.

J'appelle donc toute l'attention sur les faits relatés par les pétitionnaires, et j'espère que le gouvernement payera à l'avenir les frais de transport et d'enterrement des cadavres.

J'appuie donc le renvoi de la pétition à MM. les ministres des affaires étrangères et de l'intérieur.

- Les conclusions sont adoptées.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Les administrations communales d'Heyst, Lisseweghe, Westcapelle, Knocke, Ramscapelle, Houcke, Oostkerke, Dudzeele, ainsi qu'un grand nombre de propriétaires de l'arrondissement de Bruges, signalent l'état déplorable de la dune ou digue de mer de Blankenberghe à Heyst, et surtout depuis les écluses de Lisseweghe jusqu'en face du village d'Heyst ; ils affirment que, depuis 5 ans, elle a reculé en cet endroit de plus de 40 mètres.

Cet état de choses encore empiré à la suite de la tempête du 28 janvier précédent, et l'insuffisance des travaux en train d'exécution aux jetées d'Heyst, portent les pétitionnaires à réclamer des travaux de renforcement considérables !

La commission propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

M. de Vrièreµ. - Les pétitions sur lesquelles vous venez d'entendre le rapport sont de la plus haute importance.

Les pétitionnaires demandent que des jetées et des brise-lames en nombre suffisant soient construits pour empêcher les dévastations de la mer, et ils demandent surtout que des renforcements soient exécutés aux dunes, de manière à empêcher que les digues de mer ne se déplacent et n'envahissent les territoires environnants.

Déjà, messieurs, les pétitionnaires se sont adressés à la Chambre l'année dernière et le gouvernement a exécuté un certain nombre de travaux. J'apprends aussi qu'il est question d'en exécuter d'autres. Mais il paraîtrait, du moins dans l'opinion de beaucoup de personnes et entre autres des pétitionnaires, que ces travaux ne seront pas suffisamment efficaces.

Il paraîtrait que pour empêcher que la dune n'envahisse les terres qui l'avoisinent et ne se rapproche, comme elle le fait actuellement, du village d'Heyst, il serait nécessaire de garnir de fascinages le pied des dunes. J'appelle donc sur cet objet la plus sérieuse attention de M. le ministre des travaux publics. La question est de la plus haute importance ; dans une matière comme celle-là, toute insuffisance de précautions engagerait sérieusement la responsabilité du gouvernement.

Je prie donc M. le ministre de vouloir bien rassurer les populations et les propriétaires qui se sont adressés à la Chambre, en leur donnant l'assurance que les travaux nécessaires seront exécutés avec la plus grande diligence et que les crédits nécessaires à ces travaux y seront appliqués sans parcimonie. Quand il s'agit d'un ennemi aussi redoutable que la mer, toute économie serait ruineuse.

MtpVSµ. Je pense, messieurs, qu'il a été satisfait par anticipation au vœu exprimé par les pétitionnaires. L'honorable rapporteur pourra donner les indications précises à cet égard, mais je crois que la pétition remonte à plusieurs mois.

M. Jacobs, rapporteurµ. - Il y a, messieurs, un assez grand nombre de pétitions et la plupart ne sont pas datées.

MtpVSµ. - Je crois qu'elles remontent à plusieurs mois, et depuis qu'elles sont arrivées à la Chambre divers travaux ont été entrepris.

Je n'ai pas besoin de dire que si le remède que nous comptons apporter au mal était reconnu insuffisant, le gouvernement aviserait. Il n'y a pas de parcimonie possible dans une pareille affaire, mais je suis persuadé, contrairement à l'opinion des signataires de la pétition, que les travaux qui sont entrepris ou qui le seront très prochainement satisferont d'une manière complète à la situation signalée.

Le gouvernement a demandé aux Chambres tous les crédits qu'il a jugés indispensables pour remédier au mal ; il n'en a pas retranché un centime et les Chambres ont voté sans observation plusieurs centaines de mille francs pour cet objet. Ces sommes considérables vont être employées immédiatement, et si, lorsqu'elles seront dépensées, d'autres crédits sont encore nécessaires, le gouvernement n'hésiterait pas à les demander et je suis convaincu que les Chambres s'empresseraient de les accorder.

M. de Vrièreµ. - Je ne connais pas la date des pétitions, mais un honorable bourgmestre du littoral m'a déclaré, comme il a déclaré à ses collègues, que les travaux exécutés jusqu'à présent ne sont pas suffisants pour rassurer les populations contre les dangers qu'elles redoutent. Je me permets donc de recommander cet objet d'une manière toute spéciale à M. le ministre. Je le répète encore, dans l'opinion de beaucoup de personnes il ne suffit pas d'augmenter le nombre de jetées, de brise-lames, mais c'est aux dunes mêmes qu'il faut faire des travaux.

C'est sur ce point que j'appelle l'attention de M. le ministre. Je n'ai jamais douté de sa sollicitude pour les intérêts dont il s'agit et c'est plutôt à son département que je m'adresse actuellement. Je suis convaincu qu'il veillera à ce que les travaux nécessaires soient exécutés dans les meilleures conditions.

M. Jacobs, rapporteurµ. - Les pétitions dont il s'agit et qui ne portent point de date, ont été analysées les unes les 27 et 31 juillet 1865, les autres au mois de novembre.

MtpVSµ. - Il y a donc plusieurs mois que ces pétitions sont arrivées à la Chambre.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition datée de Bruges, le 19 novembre 1865, le sieur de Groof demande un subside pour l'aider à couvrir les frais d'un appareil à diriger les ballons, dont il est l'inventeur.

Le sieur de Groof croit avoir découvert les règles de l'aviation. Sou procédé a recueilli les suffrages de la Société parisienne pour l'encouragement de la locomotion aérienne, mais il veut doter son pays de son invention et c'est ce qui le détermine à nous demander un subside.

La commission propose le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

- Ce renvoi est ordonné.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Sur une série de pétitions relatives à des demandes, soit de congé, soit de secours, soit de subsides, pour lesquelles la commission propose l'ordre du jour, par ce motif que les réclamations ne dépendent pas de la Chambre, qui est donc incompétente à cet égard et impuissante à y faire droit.

Ce sont les suivantes :

Par pétition datée de Molenbeek-Saint-Jean, le 12 juillet 1865, le sieur Stievenart, ancien employé de l'octroi à Bruxelles, demande une indemnité annuelle ou un titre honorifique, en récompense de services rendus de 1831 à 1835.

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition sans date, le sieur Kint, milicien de 1864, en garnison à Bruges, demande un congé de 2 à 3 mois, pour venir en aide à son père qui est dangereusement malade.

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition datée de Leupeghem, le 22 novembre 1865, le sieur Luneburg demande une récompense pour le dévouement dont il a fait preuve lors de l'incendie de la fabrique du sieur Demetz, à Koekelberg.

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Arlon, le 27 novembre 1865, la veuve du sieur Heimburger, ancien chef de musique de l'armée, demande un secours annuel.

Conclusions : Ordre du jour.

M. Rodenbachµ. - Je ne puis me rallier aux conclusions de la commission des pétitions, qui me paraissent trop rigoureuses. Le sieur Heimburger a été chef de musique de l'armée pendant 30 ans ; s'il avait vécu quelques jours de plus, il aurait pu jouir du bénéfice de la loi que la Chambre a votée et qui règle les positions des chefs de musique de l'armée, et sa veuve aurait droit à la pension comme veuve d'officier. Une circonstance fâcheuse lui a enlevé cet avantage et il serait fort dur de repousser sa demande. S'il n'est pas possible de lui accorder une (page 157) pension, on pourrait, ce, me semble, eu égard à sa position malheureuse, lui accorder une gratification ou un secours.

M. Hymansµ. - J'appuie la proposition de M. Rodenbach et je demande que la pétition de la veuve du sieur Heimhurger soit renvoyée au bienveillant examen de M. le ministre de la guerre. Le sieur Heimhurger, ancien chef de musique de l'armée, est mort à l'époque où la Chambre venait d'être saisie d'un projet de loi qui a été voté depuis et qui assimile les chefs de musique aux lieutenants. Comme l'a dit M. Rodenbach si le sieur Heimburger avait vécu quelques jours de plus, il aurait joui du bénéfice de cette loi. (Interruption.) II se trouvait dans les conditions voulues pour jouir du bénéfice de cette loi... Du reste, je reconnais que la veuve du sieur Heimburger n'a pas droit à la pension et e ne viens pas demander qu'on lui en accorde une, mais je trouve qu'on pourrait accorder un secours à la veuve d'un artiste qui, même en dehors des services qu'il a rendus dans l'armée, en a rendu d'autres qui sont parfaitement connus de tous les amis des arts.

Il est à ma connaissance que la veuve du sieur Heimburger, qui a été pendant 30 ans au service militaire dans l'armée belge, se trouve aujourd'hui réduite à la plus profonde misère. Si j'avais pu supposer qu'il eût été question de cette affaire à la séance d'aujourd'hui je me serais muni de pièces qui auraient prouvé d'une manière trop évidente, malheureusement, combien cette dame est digne de la sollicitude de la législature et du gouvernement. II serait un peu rigoureux, ce me semble, de prononcer un dédaigneux ordre du jour sur cette pétition. J'en propose donc le renvoi à M. le ministre de la guerre.

M. Jacobs, rapporteurµ. - Messieurs, l'ordre du jour proposé par la commission n'a rien de désobligeant ni de dédaigneux ; nous ne sommes pas même entrés dans l'examen des faits ; mais nous nous sommes dit que si la Chambre ne prononce pas l'ordre du jour sur une foule de questions qui ne sont pas de sa compétence, nous serons assaillis de demandes de ce genre. C'est pourquoi nous avons pris cette mesure générale, qui n'a de caractère désobligeant pour aucun des pétitionnaires, de proposer l'ordre du jour sur toutes les pétitions traitant d'objets qui ne sont pas de la compétence de la Chambre, qu'il n'est pas en sa puissance de leur accorder.

M. de Baillet-Latourµ. - J'appuie les observations qu'a faites l'honorable M. Hymans. J'ajouterai seulement que le frère du sieur Heimburger a été un des officiers distingués de notre armée. Il jouit, il est vrai, d'une pension du chef de ses services militaires ; mais il me semble que c'est encore là une circonstance qui mérite d'être prise en considération dans l'examen de la demande de la dame Heimburger.

- L'ordre du jour est mis aux voix et adopté.

M. Hymansµ. - Il y a doute.

MpVµ. - M. Hymans, c'est le bureau qui décide de cette question ; il a été unanime pour déclarer que la majorité s'était prononcée en faveur de l'ordre du jour.

M. Hymansµ. - Il y a la moitié de la Chambre qui n'a pas pris part au vote.

MPVµ. - Il fallait engager vos collègues à se lever pour ou contre.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition datée de Ciney, le 30 novembre 1863, le sieur Degré, ancien facteur rural, demande un secours.

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition datée de Comines, le 21 novembre 1865, le sieur Borst demande que son fils, Jacques-François, soldat au 2ème régiment de chasseurs à cheval, obtienne l'exemption du service on du moins un congé à long terme.

Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition datée de Syngem, le 16 novembre 1865, le

sieur Reveyn demande un congé pour son fils Léonard, milicien de la levée de 1864. Conclusions : Ordre du jour.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition sans date, des habitants de Reckheim demandent la construction d'un chemin de fer de Lanaeken à Maeseyck

Conclusions : Renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Jacobs, rapporteurµ. - Par pétition sans date, des habitants de Molenbeek-Saint-Jean présentent des observations contre le projet qui tend à enlever aux communes de Molenbeek-Saint-Jean, Anderlecht, Koekelberg et Laeken, le bénéfice d'un chemin de fer en raccordement des gares du Nord et du Midi à Bruxelles.

Conclusions : Renvoi à M. le ministre des travaux publics.

M. Vleminckxµ. - M. le ministre des travaux publics étant présent à la séance, il me semble qu'il est complètement inutile de lui renvoyer cette pétition ; l'honorable ministre peut dès à présent faire connaître à la Chambre si, oui ou non, il est question de ne pas exécuter le chemin de fer qui doit relier la station du Nord à celle du Midi de Bruxelles.

MtpVSµ. - Messieurs, en réponse à l'interpellation que vient de m'adresser l'honorable M. Vleminckx, je n'hésite pas à déclarer que l'intention du gouvernement est d'exécuter purement et simplement la loi qui a été votée, en ce qui concerne le raccordement dont il s'agit.

MpVµ. - Les conclusions sont le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

M. Vleminckxµ. - Ce renvoi est maintenant inutile ; M. le ministre des travaux publics vient de s'expliquer au sujet de la pétition.

M. Jacobs, rapporteurµ. - Je n'insiste pas sur le renvoi à M. le ministre des travaux publics ; je demande que la pétition soit déposée au greffe.

- Ce dépôt est ordonné.


M. Vander Donckt, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Andennes, le 6 décembre 1865, le sieur Rousseau demande une indemnité pour les pertes que la canalisation de la Meuse occasionne aux récoltes de son île située sur ce fleuve.

Messieurs, le sieur Rousseau est propriétaire d'une parcelle de terre qui forme une île dans la Meuse ; par suite des travaux exécutés sur ce fleuve, son île se trouve constamment inondée ; le pétitionnaire se plaint de ce que la récolte des foins y est devenue impossible et que l'osier qui y est planté dépérit ; il réclame du gouvernement une indemnité pour les pertes que le gouvernement lui fait éprouver, par l'établissement d'une écluse et de barrages.

Dans ces circonstances, la commission a conclu au renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

M. Moncheurµ. - Messieurs, je prie l'honorable ministre des travaux publics de vouloir bien examiner cette pétition avec une bienveillance toute particulière. Il s'agit d'une propriété qui forme l'unique patrimoine du pétitionnaire et que les travaux de la canalisation de la Meuse ont détériorée d'une manière très considérable. Je ne doute pas que les agents de l'administration régleront de gré à gré l'indemnité qu'il est juste d'allouer au sieur Rousseau, car s'il était obligé de recourir aux tribunaux, il serait dans l'impossibilité de le faire, à cause de la pénurie de ses ressources. Dans ces circonstances, il est, je le répète, de toute justice de la part du gouvernement de régler de gré à gré l'indemnité qui peut être due au particulier lésé par un travail d'utilité publique.

Je me borne, à prier de nouveau M. le ministre des travaux publics de vouloir bien examiner la pétition avec bienveillance et prendre les mesures qui lui paraîtront commandées par la justice et l'équité.

- Personne ne demandant plus la parole, le renvoi de la pétition à . M. le ministre des travaux publics est ordonné.


M. Vander Donckt, rapporteurµ. - Par pétition datée de Nazareth, le 20 juin 1865, des habitants de la Pinte réclament l'intervention de la Chambre pour qu'il ne soit pas donné suite à la demande ayant pour objet la séparation de ce hameau du reste de la commune de Nazareth.

Messieurs, une première pétition a demandé la séparation de ce hameau et son érection en commune distincte.

Les pétitionnaires déclarent qu'un grand nombre de signatures apposées sur cette première pétition provenaient de personnes étrangères à la commune de Nazareth, étrangères même au hameau de la Pinte. Non seulement il y a des signatures qui n'avaient rien à faire dans une pétition qui ne concerne que la commune de Nazareth et le hameau de la Pinte, mais de plus il est vrai de dire que ce hameau est situé dans une des localités les moins fertiles de la Belgique et qu'il serait impossible de pourvoir aux frais de l'administration si ce hameau était érigé en commune distincte.

En présence de ces considérations, votre commission vous propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Ces conclusions sont adoptées.


(page 158) M. Vander Donckt, rapporteurµ. - Par pétition datée de Saint-Josse-ten-Noode, le 14 novembre 1865, la dame Deladrière réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une pension en qualité de veuve d'un décoré de la croix de Fer.

Messieurs, une pétition semblable nous a déjà été adressée dans le courant de la session dernière, et l'honorable ministre a bien voulu dire alors que cette dame avait des droits acquis, qu'elle obtiendrait une pension du moment qu'il y aurait des vacatures.

La pétitionnaire dit que depuis cette époque il y a eu plusieurs vacatures et elle sollicite de nouveau l'intervention de la Chambre pour obtenir la pension.

Elle prétend de plus que feu son mari, le commandant Deladrière a été dans le cas de rendre un service signalé à M. le ministre de la guerre qu'il a délivré, aux risques de sa vie, lorsque l'honorable général Chazal était prisonnier des Hollandais à Mons.

Votre commission, messieurs, vous propose de renvoyer aussi cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Vander Donckt, rapporteurµ. - Par pétition datée de Bruxelles, le 10 septembre 1865, des médecins vétérinaires civils proposent d'améliorer la position des vétérinaires qui font partie de l'armée.

Messieurs, il se présente ici un fait très insolite : ce sont des pétitionnaires qui viennent solliciter pour d'autres.

Si les vétérinaires de l'armée s'adressaient à la Chambre, il paraît qu'ils commettraient une faute ; il ne leur est pas permis de solliciter sans l'autorisation de leurs supérieurs. Mais ce sont les vétérinaires civils qui pétitionnent pour les vétérinaires de l'armée.

Nous avons cru que les vétérinaires de l'armée devaient commencer par s'adresser à leurs supérieurs et que si leur réclamation était fondée, ces supérieurs n'hésiteraient pas à leur donner satisfaction. Nous avons pensé que cette manière insolite de pétitionner pour d'autres ne pouvait être accueillie par la Chambre que par l'ordre du jour et c'est la conclusion que nous avons l'honneur de vous proposer.

- Cette conclusion est adoptée.


M. Vander Donckt, rapporteurµ. - Par pétition datée de Bruxelles, le 30 juin 1865, les sieurs Herlant et Gillé, président et secrétaire de la société de pharmacie de Bruxelles, réclament l'intervention de la Chambre pour obtenir le retrait des dispositions qui font délivrer, par les pharmaciens militaires, les médicaments à un grand nombre de personnes étrangères à l'armée.

Les pétitionnaires signalent surtout les anciens officiers et les ouvriers du chemin de fer.

La commission a cru que c'était un intérêt purement privé qui engageait les pharmaciens civils à réclamer contre une mesure qui s'exécute en vertu d'un arrêté royal. Comme nous croyons que la Chambre n'est pas disposée à retirer cet arrêté, mais que peut-être M. le ministre de la guerre pourrait trouver moyen de concilier les divers intérêts, la commission conclut au renvoi à M. le ministre de la guerre.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Vander Donckt, rapporteurµ. - Messieurs, les quatre pétitions suivantes ont trait au même objet. Il s'agit du chemin de fer déjà décrété de Grammont à Nieuport.

Ces pétitions émanent surtout des communes de Nederbrakel, d'Opbrakel, de Paricke et de Hooghlede.

Ces communes se trouvent jusqu'ici privées de chemin de fer. Elles se croyaient certaines d'obtenir le chemin de fer décrété par la loi. Mais par suite de circonstances nouvelles, il paraît que la construction de ce chemin de fer ne se réalisera pas. Leurs réclamations sont surtout basées sur les paroles prononcées par M. le ministre des travaux publics dans la séance du 6 juin 1864, dans laquelle l'honorable ministre des travaux publics fait connaître à la Chambre qu'il se proposait de demander une modification à celle loi en ce sens que la ligne d'Audenarde à Nieuport serait seule exécutée et qu'on renoncerait à la ligne de Grammont à Audenarde.

Il est cependant vrai de dire que la commune de Nederbrakel est un chef-lieu de canton d'une population de 4,000 âmes, qu'elle a dans son sein sept brasseries, deux sucreries, une justice de paix, deux distilleries, un marché très important et très fréquenté, un atelier d'apprentissage et beaucoup d'autres industries. C'est donc une localité très importante et il serait extrêmement heureux de la voir relier au réseau de l’Etat.

Elle se trouve sous ce rapport à peu près dans les mêmes circonstances que la commune de Cruyshautem, qui est aussi chef-lieu de canton et qui jusqu'ici n'est pas reliée au chemin de fer.

La commune de Hooghlede réclame aussi pour qu'il ne soit rien changé au tracé primitif du chemin de fer d'Audenaerde à Nieuport.

Votre commission, messieurs, conclut au renvoi de ces pétitions à M. le ministre des travaux publics.

M. Maghermanµ. - Je viens appuyer les conclusions de l'honorable rapporteur et les développements dans lesquels il est entre. Il serait extrêmement fâcheux que les communes qui se croient un droit, basé sur une loi, à un chemin de fer, se vissent frustrées dans leurs espérances. J'espère que cela ne sera pas et que M. le ministre des travaux publics voudra rassurer ces communes de la même manière qu'il vient de le faire en ce qui concerne le chemin de fer de ceinture de Bruxelles.

En ce qui concerne le tracé même de la ligne, je désire qu'il ne s'écarte pas du bourg populeux de Nederbrakel, c'est d'ailleurs le tracé le plus court. Il y a bien quelques accidents de terrain aux abords de ce bourg, mais ils ne sont pas d'une importance telle que la compagnie qui construira cette ligne ne rencontre des avantages, même en passant par quelques sacrifices pour desservir ce centre de population.

MtpVSµ. - Je regrette, messieurs, de. ne pouvoir prononcer les paroles rassurantes que réclame l'honorable M. Magherman ; une promesse a été faite à la société en vertu de laquelle, si la société insiste, le gouvernement devra proposer une modification au contrat, et cette modification consisterait à exonérer la société de la ligne de Grammont à Audenarde.

La Chambre se rappellera que le chemin de fer de Courtrai à Denderleeuw a été considéré, par ceux qui s'occupent d'affaires de cette nature, comme une excellente entreprise et je crois que cette appréciation était parfaitement fondée ; mais il y avait un autre chemin de fer demandé en même temps et qui ne semblait pas offrir les mêmes garanties d'exécution, c'était la ligne de Grammont à Nieuport.

J'ai accolé cette ligne à la première et la Chambre n'a pas hésité à voter le projet ayant pour objet de lier le chemin de fer de Courtrai à Denderleeuw au chemin de fer de Grammont à Nieuport, d'en faire une seule entreprise, d'unir solidairement ces deux lignes. Malheureusement l'exécution est restée en suspens pendant fort longtemps et je crois même que les intéressés désespéraient de voir mener l'affaire à bonne fin.

C'est dans cet état de choses qu'une nouvelle compagnie a soumis au gouvernement une combinaison nouvelle donnant toute garantie d'exécution, mais subordonnée à cette condition que les nouveaux concessionnaires seraient exonérés de l'obligation de construire la section de Grammont à Audenarde.

Entre le jour où la concession avait été primitivement accordée et le jour où cette modification a été demandée, il s'était présenté un fait très intéressant, c'est que le gouvernement, en vertu d'une ancienne loi, avait concédé le chemin de fer de Braine-le-Comte à Courtrai ; or, il suffit de regarder la carte pour s'assurer que cette ligne et celle de Grammont à Audenarde sont presque parallèles, qu'elles desservent le même plateau.

Dans ces circonstances, le gouvernement s'étant assuré que, moyennant la dispense de construire la section de Grammont à Audenarde, tout le reste était assuré d'une prompte et complète exécution, le gouvernement, messieurs, n'a pas hésité à déclarer à la société qu'éventuellement il soumettrait à la Chambre une modification à la concession primitive ; car veuillez bien le remarquer, le gouvernement ne peut rien faire de son autorité privée ; il faut que la législature intervienne.

La question se présente donc ainsi : - et, en passant, je puis affirmer à l'honorable député d'Audenarde que l'exécution du réseau, modifié comme je viens de le dire, commencera sans délai et qu'elle sera énergiquement poursuivie - la question est donc, en définitive de savoir, en supposant que les Chambres approuvent la modification que le gouvernement s'est engagé à leur soumettre, la question est de savoir s'il ne vaut pas infiniment mieux avoir en réalité la plus grande partie du réseau que seulement d'avoir en perspective le réseau tout entier. Je pense qu'entre l'espérance et un fait réalisé les intéressés eux-mêmes n'hésiteront pas à se prononcer comme s'est prononcé le gouvernement.

Du reste, j'insiste sur ce point, les Chambres auront à statuer, le gouvernement ne pouvant rien faire de sa propre autorité.

(page 159) M. Vander Donckt, rapporteurµ. - Pour le cas où la Chambre adopterait la modification que M. le ministre se propose de lui soumettre, elle sacrifierait les deux chefs-lieux les plus importants de ces localités et s'il n'y pas de chance de les raccorder au chemin de fer de l'Etat, elles resteront longtemps encore dans l'isolement. Je demanderai donc à M. le ministre, sans m'opposer à la modification qu'il a en vue, de ne pas perdre de vue les intérêts de ces localités très importantes de Nederbrakel et de Cruyshautem. Je le prierai de vouloir bien engager les concessionnaires à relier ces deux cantons aux voies ferrées, car, en définitive il y à là une population de 100,000 âmes à peu près qui est encore privée de tout chemin de fer.

M. Maghermanµ. - Je présenterai une simple observation à M. le ministre ; je me bornerai à lui demander s'il ne pourrait pas obtenir le même résultat en accordant, par exemple, à la compagnie la faculté d'exécuter la ligne d'Audenarde à Nieuport à la condition d'exécuter également, mais dans un délai plus long, la section de Grammont à Audenarde ?

M. de Naeyer. — A l'appui des observations présentées par l'honorable ministre des travaux publics, je me permettrai d'ajouter un seul mot, c'est qu'il serait souverainement injuste de paralyser une ligne que tout le monde reconnaît excellente, en y accolant une autre ligne qui ne présente pas les mêmes éléments de prospérité et que l'on sait aujourd'hui ne pas être née viable. En effet, tout le monde reconnaît que la ligne de Denderleeuw à Courtrai est excellente. Aussi la concession en a été demandée, disputée même par un grand nombre de compétiteurs. Or, pourquoi cette ligne, qui est destinée à desservir les intérêts les plus importants, n'a-t-elle pas été exécutée immédiatement ? C'est évidemment parce qu'on y a joint une autre ligne qui ne trouvait pas d'amateurs.

Cet état de choses a duré trop longtemps et la justice exigeait impérieusement qu'il y fût mis un terme ; selon moi, l'honorable ministre des travaux publics a donc pris une mesure très sage et très loyale en dégageant le concessionnaire d'une obligation trop onéreuse et qui aurait eu pour résultat de faire crouler toute l'entreprise et de laisser ainsi en souffrance de très grands intérêts ; il y aurait eu, je le répète, une souveraine injustice à perpétuer l'état actuel des choses qui n'accorde satisfaction à personne et qui se réduit, en définitive, à sacrifier, en fait de voies de communication, ce qui est bon et même excellent à ce qui est mauvais, ou tout au moins médiocre. Il est évident que, par cette combinaison, des populations nombreuses n'ont été privées que trop longtemps d'une voie de communication à laquelle elles ont évidemment droit par leur importance commerciale et industrielle, fruit de leur travail et de leur intelligence.

On a manifesté le désir d'obtenir de nouveaux délais, je crois que les délais ont déjà été trop longs. Dans tous les cas, la modification annoncée par l'honorable ministre ne tend aucunement à sacrifier certaines localités, puisque en laissant les choses dans l'état où elles se trouvent aujourd'hui, personne n'obtiendrait rien.

J'appuie donc les observations présentées par l'honorable ministre des travaux publics et je suis certain que la Chambre n'hésitera pas à ratifier les arrangements qui ont été pris et qui, je l'espère, seront très prochainement soumis à notre approbation.

M. Dumortierµ. - Je ne veux pas vous entretenir de la route qui va de Bruxelles vers la Lys. Mais j'espère que, quelle que soit la combinaison à laquelle il s'arrête, le gouvernement conservera dans son entier la partie de la concession qui s'étend de Roulers à Nieuport. Nieuport est le seul port sur fleuve que possède la Belgique. Ce port serait susceptible de grands développements si des voies de communication lui étaient accordées. D'un autre côté les communications de Nieuport avec Roulers sont une chose indispensable pour l'industrie de Roulers.

J'engage donc le gouvernement à maintenir cette ligne, je l'y engage d'autant plus que cette ligne est indispensable pour la capitale et qu'elle dotera la Belgique d'un port sérieux sur l'Océan.

M. de Smedtµ. - J'appuie les considérations présentées par M. Dumortier. Jusqu'à présent aucun orateur ne s'est élevé contre les nouvelles propositions faites par l'honorable ministre des travaux publics ; quant à moi, je les considère comme devant hâter l'exécution de la ligne que la ville de Nieuport réclame depuis si longtemps et qu'elle réclame avec raison, car c'est la seule ville de cette importance, en Belgique, qui ne suit pas reliée au reste du pays. Cet état de choses est fâcheux, car il est la cause de l'état déplorable dans lequel se trouve le port de Nieuport.

J'espère donc que l'honorable ministre des travaux publics emploiera toute son influence pour que la section comprime entre Nieuport et Dixmude soit une des premières exécutées.

MtpVSµ. - La Chambre a pu constater que je n'ai pas soulevé la question qui s'agite en ce moment. Mais puisqu'elle l'a été par les honorables députés d'Audenarde, puisque ces honorables membres ont cru devoir faire leurs réserves pour l'avenir, il importe de scruter cette question plus à fond, car, en réalité, il s'agit d'un intérêt public et d'intérêts privés considérables, et il convient de ne pas induire ces intérêts en erreur. J'ai donc l'honneur d'annoncer à la Chambre que j'ai pris vis-à-vis de la société concessionnaire un engagement éventuel, celui de soumettre à la Chambre une modification au contrat primitif.

Il s'agit d'exonérer la société concessionnaire d'une partie extrêmement onéreuse de ses obligations, tellement onéreuse que si la société n'entrevoit pas l'espoir d'en être exemptée, tout le reste de la concession serait peut-être abandonné.

Voici ce qui pourrait se présenter aujourd'hui. Il se pourrait qu'on laissât aller la société, qu'une fois qu'elle aurait exécuté ses lignes de Courtrai à Denderleeuw et d'Audenarde à Nieuport, on lui dît : Mais nous avons fait nos réserves et nous ferons opposition à ce que cette exemption vous soit accordée ; nous avons déjà la plus grande partie du réseau, nous entendons que la société s'exécute jusqu'au bout.

Si le contrat pour la construction des sections de Courtrai à Denderleeuw et d'Audenarde à Nieuport qui devait être signé ces jours-ci, qui l'aurait été à coup sûr la semaine prochaine, contrat aux termes duquel l'exécution des 9/10 du réseau était assurée, si ce contrat n'est pas signé bientôt, je doute qu'il le soit encore ou plutôt je crois pouvoir assurer qu'il ne le sera plus, après l'attitude que viennent de prendre les honorables députés d'Audenarde.

Qu'est-ce que la section que le gouvernement, l'assentiment de la législature réservé, a promis de retrancher ? Je tiens à édifier la Chambre à ce sujet pour motiver l'invitation que j'adresserai aux honorables députés d'Audenarde.

On poursuivait très énergiquement de divers côtés à la fois la concession d'une ligne de Courtrai à Denderleeuw, qui paraît excellente. Nieuport demandait depuis plusieurs années, et avec raison, d'être relié au réseau des chemins de fer. J'ai profité de l'occasion pour faire entrer de force, il faut bien le dire, la ville de Nieuport dans une combinaison d'ensemble. Il s'est présenté un concessionnaire très accommodant, trop accommodant peut-être, qui a consenti à assumer l'obligation de construire cumulativement la ligne de Courtrai à Denderleeuw et une ligne partant de Nieuport et aboutissant à Grammont.

Une fois investi de la concession, il s'est mis à faire des études et il n'a pas tardé à reconnaître qu'il avait assumé une charge très onéreuse. La section de Grammont à Audenarde devait coûter tant de millions qu'elle rendait le reste de l'affaire presque impossible. Il y a eu des négociations pour trouver un substituant, mais ces négociations n'ont abouti qu'à la condition que je viens de faire connaître à la Chambre, que le gouvernement présenterait une modification au contrat primitif.

Eh bien, il est encore temps d'opter : Voulez-vous le tout sur le papier ou les 9/10 en réalité ? Voilà comment la question se présente. Si vous préférez avoir le tout sur du papier, il faut le dire. Vous êtes mis en demeure de vous prononcer. Si, au contraire, vous préférez les 9/10 en réalité, il faut le dire aussi.

La question qui a été soulevée ici incidemment vous fait un devoir de loyauté de dire quelle attitude vous prendrez lorsque le projet sera présenté.

Les honorables membres m'ont demandé si l'on ne pourrait pas procéder autrement ; et, au lieu d'exonérer définitivement la société, en ce qui concerne la section de Grammont à Audenarde, si l'on ne pourrait pas lui accorder des délais.

Vous comprenez, messieurs, qu'avant de prendre un engagement comme celui que j'ai annoncé à la Chambre, le gouvernement, qui ne cherche nullement à alléger les obligations qu'on a volontairement et librement contractées vis-à-vis de lui, le gouvernement, qui ne cherche pas à exonérer définitivement, quand il pourrait se tirer d'affaire en accordant des délais, le gouvernement, dis-je, a dû négocier sur cette base faute de mieux, et c'est après avoir reconnu l'impossibilité de réussir dans une autre direction, qu'il a été d'avis qu'il était préférable d'accorder l'exonération complète que de n'avoir rien.

(page 160) Eh bien, cela étant, il importe, pour sauvegarder des intérêts privés considérables et aussi pour sauvegarder l'intérêt public de l'arrondissement d'Audenarde, il importe, dis-je, que les honorables représentants de cet arrondissement s'expliquent dès aujourd'hui sur ce qu'ils feraient si une loi était présentée.

En ce qui concerne le point soulevé par les honorables députés de Roulers et de Furnes, j'ai également l'honneur de déclarer qu'il ne s'agit pas d'une autre modification au contrat primitif que celle que j'ai annoncée. Au delà d'Audenarde, la ligne reste entière, comme elle reste entière entre Courtrai et Audenarde.

Après ces explications, je me croirai libre désormais de présenter le projet de loi dont j'ai parlé, si la société insiste, sans qu'on puisse me faire le reproche d'avoir rien caché à la Chambre. Mais encore une fois je déclare décliner la responsabilité de l'échec de l'affaire, si cet échec se produisait, le contrat dont je parle pour la construction n'étant probablement pas encore signé.

M. Maghermanµ. - Si les choses sont telles que les représente M. le ministre, et je n'ai aucun motif d'en douter, il va sans dire que l'arrondissement d'Audenarde est plus intéressé à obtenir d'une manière certaine les neuf dixièmes de la concession que de courir la chance de n'obtenir rien du tout en la voulant tout entière.

Dès lors je n'hésite pas à le déclarer en ce qui me concerne, nous devons nécessairement, quoique à regret, nous rallier à ce que M. le ministre jugera convenable de décider pour sauvegarder l'intérêt public.

- Les conclusions sont mises aux voix et adoptées.

La séance est levée à 3 heures et demie.