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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 4 mai 1866

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1865-1866)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboomµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 701) M. de Moor, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Thienpont. Secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Moorµ présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Geurdon demande que le projet de loi d'amnistie soit rendu applicable aux remplaçants comme aux miliciens proprement dits. »

- Sur la proposition de M. Bouvierµ, renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.


« Des maîtres de carrières de pierres blanches de Goberlange se plaignent de l'emploi de la pierre blanche étrangère pour la construction des monuments du pays. »

- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.


« La dame Lagrandeur demande que son fils Louis, incorporé au 9ème régiment de ligne, soit renvoyé du service. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des habitants de Lincent prient la Chambre de rejeter la disposition du projet de Code pénal qui punit les combats de coqs. »

« Même demande d'habitants de Goyer. »

- Renvoi à la commission pour la révision du Code pénal.


« Le conseil communal de Mons émet le vœu que le projet de loi relatif à la réforme électorale consacre le principe de la réduction du cens, celui de l'adjonction des capacités et la combinaison de ces deux éléments dans les limites les plus larges possibles, à l'époque actuelle. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Des habitants de Bruxelles demandent que le droit de suffrage dans les élections provinciales et communales soit étendu à tous ceux qui savent lire et écrire. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à la réforme électorale.


« Des habitants de Bruxelles demandent le suffrage universel pour les élections communales et provinciales. »

- Même dépôt.


« Des ouvriers dans le Brabant présentent des observations sur l'article 2 du projet de loi relatif aux coalitions. »

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le projet de loi.


« Par messages du 3 mai 1866, le Sénat informe la Chambre qu'il a donné son adhésion à plusieurs projets de loi. »


« M. le ministre des affaires étrangères fait hommage à la Chambre de deux exemplaires de la deuxième feuille de la carte de l'Escaut, levée par le lieutenant de vaisseau Stessels. »

- Dépôt à la bibliothèque.


MpVµ. - Voici comment est composée la commission chargée d'examiner la proposition de loi relative au monument à élever à S. M. le Roi : MM. Ern. Vandenpeereboom, de Kerchove, Allard, Vermeire, Muller, Delcour et Van Humbeeck.

Projet de loi allouant des crédits au budget du ministère des travaux publics

Dépôt

MfFOµ. - D'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer un projet de loi allouant au département des travaux publics des crédits supplémentaires à concurrence de 1,185,600 fr. 48 c. relatifs aux exercices 1865 et antérieurs. »

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi ; la Chambre en ordonne l'impression et la distribution et le renvoi à l'examen des sections.

Discussion générale sur l'exécution de la loi sur les fondations de bourses d'étude

MjBµ. - Messieurs, hier l'honorable M. Delaet m'a interrompu parce que j'avais dit que dans la maison Terninck, se trouvaient des religieuses.

Je ne me trompais pas en affirmant ce fait. D'après les termes du testament que j'ai fait vérifier de nouveau ce matin, les maîtresses chargées de donner l'instruction doivent être des filles religieuses.

Telle est l'expression dont le fondateur se sert, et de plus la députation permanente, dans ses rapports, appelle les maîtresses de la maison Terninck des sœurs.

Il est possible, maintenant, que ces maîtresses ne soient pas de telle ou telle congrégation, que ce soient des sortes de béguines. Mais ce dont je suis convaincu, c'est que ce sont des filles religieuses, et en tous cas, si ce ne sont pas des personnes ayant ce caractère, c'est que le testament n'a pas été exécuté.

M. Delaetµ. - Je vous ferai d'abord observer que l’explication que vient de nous donner M. le ministre de la justice, le met en contradiction avec lui même. Il nous a dit hier que l'école Terninck était si bien que institution civile que le fondateur avait stipulé que les institutrices ne seraient pas des religieuses, qu'il n'y aurait pas là un couvent ni rien qui sente le couvent.

Or, aujourd'hui que M. le ministre a vu le testament, lui qui est venu affirmer qu'il n'avançait que des choses dont il était certain, des faits qu'il avait contrôlés et que nous ne devions plus contrôler...

- Des membres. - Il n'a pas dit cela.

M. Delaetµ. - ... il doit avouer qu'il n'avait pas lu le testament dont il parlait. Ab uno disce omnes. Par ceci apprenez ce que c'est que du reste.

Je maintiens que malgré ce testament et en conformité du reste de ce testament, il n'y a pas de religieuses à l'institut Terninck. Je n'ai pas sous les yeux l'acte d'institution ; il est en flamand et il est très probable qu'il emploie l'expression godsdienstige dochters, ce qui est tout autre chose que votre traduction. II s'agit tout simplement de filles non irréligieuses, c'est-à-dire de filles pieuses, dévotes. Voilà la pensée du fondateur, et quoique je n'aie pas le testament sous les yeux, je ne crains pas d'avancer qu'il porte les mois : geestelyke dochters.

Maintenant j'affirme de nouveau qu'à l'institut Terninck il n'y a pas de religieuses appartenant à une règle quelconque ; que les institutrices, qui pour la plupart sont d'anciennes élèves de l'établissement, portent un uniforme, qu'elles suivent certaines règles (interruption), oui qu'elles suivent une certaine règle de discipline intérieure. (Nouvelles interruption.)

Les membres qui m'interrompent sont-ils déréglés dans leur vie ? Chacun de nous s'est prescrit, je crois, une règle de vie. Je crois que dans chacun de nos ménages qui ne sont pas des couvents, nous suivons certaines règles de conduite. Or, il se peut qu'il y ait un règlement d intérieur dans la maison Terninck.

Mais il y a là si peu de règles monastiques qu'une des sœurs étant morte récemment, on a fait annoncer le décès par qui ? Par un bedeau d'église quelconque ? Non, tout bonnement par le bedeau des solidaires d'Anvers.

Je crois que cela s'est fait par méprise ; mais je sais que le fait n'aurait pas eu lieu, si la maison avait été soumise à un autorité religieuse.

Maintenant, si M. le ministre de la justice prétend faire rentrer dans les règles monastiques toutes les institutrices qui ne sont pas irréligieuses, alors je ne sais plus quelles sont les écoles qui pourront remplir les conditions exigées par M. le ministre pour qu'un établissement soit réellement une école de filles laïque au vœu de la loi et selon le cœur de nos adversaires.

MjBµ. - Messieurs, je n'ai nullement dit que le testateur avait défendu d'introduire du religieux dans (page 702) sa maison, puisqu'il a stipulé dans son testament que l'enseignement serait donné par des fêtes religieuses.

Mais j'ai dit que le testateur avait déclaré que jamais son établissement ne pouvait dégénérer en couvent, ni en un établissement quelconque sentant le couvent, c'est-à-dire qu'il pouvait y avoir quelques institutrices religieuses, mais que l'institution ne devait pas devenir un couvent dont l'enseignement n'aurait été que l'enseigne.

Maintenant l'honorable M. Delaet répond que je n'ai pas lu le testament. L'honorable M. Delaet se trompe ; son interruption d'hier m'a fait examiner de nouveau les actes de la fondation Terninck. Or, comment ce testament appelle-t-il les institutrices ? Geestelycke dochters, des filles religieuses. J'avais cru que je me trompais quand l'honorable membre, qui est d'Anvers, disait, avec tant d'assurance, qu'il n'y avait pas de religieuses.

Il est tellement vrai que ce sont des religieuses, qu'elles suivent des règles, qu'elles ont des supérieures, et cela est tellement connu à Anvers que les rapports de la députation permanente de la province d'Anvers désignent les institutrices de cet établissement sous le nom des Sœurs. Or, je ne crois pas que des laïques s'appellent des sœurs.

M. Jacobsµ. - Les maçons sont bien des frères. (Interruption.)

MjBµ. - Si toutes les réfutations des faits que j'ai annoncés sont de la nature de celle de l'honorable M. Delaet, il n'y a pas beaucoup de danger que le discours que j'ai prononcé hier soit ébranlé.

L'honorable M Delaet ne veut pas voir des religieuses dans des dames qui sont d'un ordre spirituel, qui portent un costume, qui suivent des règles et ont des supérieurs ecclésiastiques. Je ne sais plus ce qu'on appellera des religieuses.

M. Dumortierµ. - Les faits qui sont produits aujourd'hui montrent à la dernière évidence le peu de fondement de toutes les accusations que vous avez entendues hier.

L'honorable M. Bara a soutenu hier deux choses : c'est que le testament disait hier qu'il ne pouvait y avoir à l'institut Terninck d'ordre religieux à aucun titre, que le testateur ne voulait pas que cette fondation devînt une maison religieuse ; que cependant, malgré cette prescription, des religieuses avaient envahi l'établissement et qu'elles l'avaient envahi en nombre tel, qu'il y en avait presque autant que d'élèves.

Eh bien, voilà deux faits qui sont déclarés aujourd'hui inexacts par M. le ministre lui-même, puisqu'il vient vous dire que dans le testament il est dit que l'établissement sera tenu par des religieuses. Vous avez par là la mesure du plaidoyer que vous avez entendu hier.

M. Teschµ ; - Je n'ai pas à défendre M. le ministre de la justice ni à rectifier ce qu'on vient de dire. Je n'ai pas entendu les paroles qu'on lui prête aujourd'hui. M. le ministre n'a pas dit que le testament défendait qu'il y eût des sœurs à l'institut Terninck. Il a déclaré que le testament défendait que l'on fît de cette institution un couvent ni rien qui ressemblât à un couvent.

Mais, en définitive, la question de savoir s'il y a ou s'il n'y a pas des sœurs à l'institut Terninck, et à quelle congrégation elles appartiennent, est chose parfaitement indifférente. De quoi nous occupons-nous ? Des abus des administrateurs spéciaux. Eh bien, quel est le fait en lui-même ? Le fait est que, dans l'établissement de Terninck, il y a de 70 à 75 élèves, et que pour ces 70 à 75 élèves, il y a régulièrement de 22 à 27 institutrices. Voilà le fait auquel il faudrait répondre. (Interruption.) Il ne s'agit pas d'autre chose que de cela.

Il y a là une institution administrée par des administrateurs spéciaux, eh bien, pour 70 à 75 élèves au maximum, il y a 25 à 27 institutrices. Je dis que c'est un abus et un abus qu'on ne tolérerait pas, s'il y avait des administrateurs soumis à un contrôle sérieux.

M. Wasseigeµ. - Mais n'est-ce pas à Gembloux qu'il y avait deux professeurs pour un élève ?

MjBµ. - Evidemment, messieurs, il n'est pas possible de laisser se propager des erreurs aussi manifestes. Voici l'Almanach royal, où tout ce qui concerne les maisons religieuses se fait sous le contrôle de l'autorité ecclésiastique ; eh bien, que voyons-nous dans l'almanach royal : « Communautés religieuses.

« Diocèse de Malines.

« Anvers. Sœurs de Terninck. »

M. Jacquemynsµ. - On a interrompu tout à l'heure l'honorable M Tesch quand il a dit qu'il y a à l'institut Terninck 25 à 27 sœurs pour donner l'enseignement à 70 ou 75 élèves et on a objecté à cela qu'à l'institut agricole de Gembloux il y a 2 professeurs pour un élève. D'abord le fait est matériellement inexact ; à l'institut agricole de Gembloux il y a à peu de chose près le nombre d'élèves pour lequel l'institut a été fondé, (Interruption.) A l'institut agricole de Gembloux, chaque professeur a un cours spécial à donner ; est-ce que, par hasard, l'honorable M. Delaet soutiendra qu'il y a 27 branches différentes d'enseignement primaire à l'école de Terninck ?

M. Jacobsµ. - M. le ministre, qui prétend connaître si bien le testament et l'acte de la fondation Terninck, doit savoir que les institutrices ne sont autre chose que d'anciennes élèves et que le nombre apparent des institutrices s'explique par cette circonstance que les anciennes élèves qui n'ont pas encore trouvé une position dans le monde, restent provisoirement à l'établissement et concourent à donner l'enseignement.

Du reste, messieurs, cela est complètement étranger au débat. Lors de la discussion de la loi sur les bourses, l'honorable M. Tesch a fait la déclaration suivante :

« Je n'hésite pas à déclarer que la fondation Terninck ne tombe pas sous le coup de la loi, parce qu'elle est principalement une fondation de bienfaisance. »

Cela n'a donc rien de commun avec le débat actuel. Il ne s'agit pas là d'abus dans l'administration des bourses d'étude ; lorsque nous discuterons la question de la bienfaisance, vous parlerez de l'institut Terninck si cela vous fait plaisir, mais il faut avoir bien peu d'abus à citer en matière de bourses d'étude pour y mêler des questions de bienfaisance.

Je me demande en vain quel est le but utile de l'interpellation de l'honorable M. Funck, et de la réponse si longue et si passionnée qu'a lue hier l'honorable ministre de la justice. Il a cru faire l'apologie de la loi des bourses et répondre aux reproches articulés contre le cabinet à cet égard. Mais de quoi s'agit-il ?

De l'exécution de la loi sur les bourses d'étude et des abus qu'on peut avoir découverts dans la gestion des administrateurs spéciaux n'ayant aucun rapport avec des actes de l'ordre administratif et judiciaire, de l'ordre politique.

Quand on a discuté dans cette enceinte la loi, quels étaient nos griefs ? Sur quoi portait le débat ? Siégeait-il ici un seul défenseur des abus, quels qu'ils fussent ? Y avait-il un seul membre qui demandât qu'il n'y eût pas de contrôle sérieux sur les bourses d'étude ? L'unique point qui nous séparait, l'unique problème qu'il fallait résoudre consistait à savoir si, en présence d'abus et d'un contrôle inefficace, il fallait réprimer les abus et renforcer le contrôle, ou bien confisquer les bourses.

Que prouvent les abus vrais ou faux que vous venez étaler devant nous ?

Parce qu'il y aura eu plus ou moins d'abus, votre loi sera-t-elle meilleure ou plus mauvaise ?

Reconnaîtrez-vous que votre loi est mauvaise s'il n'y a pas d'abus, et devrons-nous reconnaître qu'elle est bonne s'il y en a ?

On vous a accusés de violer les testaments et de ne pas respecter la volonté des testateurs. Serez-vous excusés parce qu'un ou plusieurs administrateurs spéciaux auront agi de même ?

Vous vous plaignez très amèrement de ce qu'on vous a traités de voleurs ; mais, en vérité, serez-vous plus eu moins voleurs parce qu'il y aura eu des voleurs parmi les administrateurs spéciaux ?

Quelle influence les abus peuvent-ils avoir sur la justice ou l'injustice du principe de la loi ?

Ce sont des points de fait, et vous trouvez très commode de vous placer sur le terrain des faits pour répondre à des critiques qui portent sur le terrain du droit.

M. Teschµ. - Nous soutiendrons la discussion en droit quand vous le voudrez.

M. Jacobsµ. - J'espère que vous choisirez pour cela un moment plus opportun (interruption) et que vous ne viendrez pas entraver de nouveau, par là, la discussion de la réforme électorale. (Interruption.)

En matière d'administrations spéciales, de charité libre ou d'enseignement libre, les abus ne prouvent pas plus contre la liberté de la charité ou de l'enseignement, que les abus des employés d'administrations officielles, monts-de-piété, bureaux de bienfaisance, prisons ou autres ne prouvent qu'il faille supprimer les administrations de l'Etat et la charité légale.

Mais quoique ces faits d'abus nous soient étrangers, vous nous en avez saisis. Dès lors notre dignité nous commande de ne pas nous contenter d'un rapport incomplet, sans dates, sans lieux, sans indication de noms ; il nous faut un rapport complet et circonstancié, surtout par suite des paroles de M. le ministre de la justice qui nous a laissé entendre que l'abus était la règle et la bonne gestion l'exception ; il nous faut le rapport demandé par l'honorable M. de Theux, donnant le nombre des bourses, celui des abus, leur nature, pour que chacun de nous et le pays entier sache dans quelle proportion il y a eu bonne et mauvaise gestion.

(page 703) Aussi, messieurs, ne puis-je prendre au sérieux la proposition que nous a faite hier l'honorable M. Tesch, de déposer sur le bureau les dossiers relatifs aux faits dont a parlé M. le ministre de la justice et de discuter le lendemain. C'est à peu près comme si un procureur général venait dire à un avocat : Voilà le dossier, nous plaiderons, demain devant le jury.

Que ferait l'avocat ? Il demanderait le renvoi de l'affaire à la session suivante.

M. Coomansµ. - Et quand il y a 116 avocats ?

M. Teschµ. - Nous ne sommes pas des avocats d'abus.

M. Jacobsµ. - Non, nous n'en sommes pas : qu'ils soient commis par des hommes portant la redingote ou la soutane, peu nous importe. Il faut qu'ils soient réprimés, et c'est pourquoi je ne conçois pas cette considération tirée de l'honneur des familles qui engage M., le ministre de la justice à ne pas attraire à cette barre les administrateurs coupables de malversations.

Lorsqu'un crime, lorsqu'une infraction de quelque nature que ce soit acte commise, tenez-vous compte de l’honneur des familles ? Non, vous poursuivez, vous condamnez et vous publiez la condamnation ; eh bien, c’est ce qu'on nous demande de faire ici. On vous dit : Donnez-nous un rapport complet, avec l'indication des dates, des lieux, des personnes, faites-nous connaître quelles sont celles qui ont droit à notre estime, qu’elles sont celles, au contraire, qu'il faut signaler à l'animadversion publique.

M. Van Overloopµ. - Qu'on fasse ce qu'on fait pour les funérailles du Roi. On a cru à des abus graves dans les comptes, et le gouvernement n'a pas reculé devant l'impression de ces comptes avec les noms, quelque préjudiciable que cette publicité puisse être pour des particuliers.

MjBµ. - Il faudrait d'abord qu'on rendît les comptes

M. Jacobsµ. - Faites-les rendre et agissez loyalement et non pas anonymement.

MjBµ. - C'est ce que nous faisons.

M. Jacobsµ. - C'est ce que vous ferez, je l'espère.

Depuis longtemps, la presse nous annonçait des révélations scandaleuses à propos des bourses. Je suis très étonné que M. le ministre de la justice ne nous ait apporté que des faits vieux, réchauffés, pourrais-je dire, pour rendre l'idée de son prédécesseur. D'après M. Tesch, en effet, presque rien n'est neuf, la plupart des faits énumérés par M. le ministre de la justice dans la séance d'hier, son prédécesseur les avait déjà fait connaître au Sénat. Il a fallu grouper autour d'eux la fondation Terninck et quelques autres peut-être aussi étrangers aux bourses pour chercher à produire une impression fâcheuse. Que deviennent vos prétendues révélations ?

Je me demande donc en vain quel but utile on poursuit au point de vue des travaux parlementaires ; je vois qu'on les entrave, je ne vois à l'interpellation un but utile qu'au point de vue du parti et des élections.

Le discours ou plutôt la réclame électorale de M. le ministre de la justice sera imprimée aux frais de l'Etat et envoyée à toutes les administrations des communes ; elle sera répandue, avec la dernière homélie de Joseph Boniface, dans tous les cabarets du royaume ; elle servira à réveiller contre le clergé toutes les passions haineuses et à lancer cette meute qui ne sait qu'aboyer à la soutane.

Voilà le but, mais on en a encore un autre : c'est d'éviter le débat sur la réforme électorale ; vous croyez utile de faire vibrer la corde cléricale, mais vous craignez de faire vibrer la corde démocratique et vous trouvez plus commode de jeter des bâtons dans les roues.

Lorsque la réforme électorale s'est présentée, on a traîné en longueur malgré les impatiences de l'opinion publique. Le gouvernement méconnaissait d’abord la nécessité d'une réforme, et lorsqu'il s'est vu contraint de présenter un projet qui ne satisfait personne, il recule et évite la discussion. Voilà votre tactique, que je veux faire déjouer ; je la signale à la Chambre, je la convie à ne pas s'en rendre complice, en reprenant la discussion du projet de loi sur la réforme électorale.

MjBµ. - Je ne comprends véritablement pas la portée de la dernière observation de M. Jacobs. Cet honorable membre prétend que le gouvernement recule devant la discussion relative à la réforme électorale et, chose curieuse, ce sont des membres de la gauche qui ont demandé la mise à l'ordre du jour de cette réforme, et c'est l'honorable M. Nothomb qui, par une demande de renseignements dans la section centrale, a empêché que le rapport ne fût fait plus vite.

M. Jacobsµ. - Faut-il donc ne plus demander de renseignements ?

MjBµ. - Nullement ; mais ne venez pas dire que le gouvernement ne veut pas de la réforme alors que c'est du consentement du gouvernement que la réforme électorale a été mise à l'ordre du jour et que c'est de vos amis qui ont voulu la retarder.

M. Funck m'avait adressé des interpellations au sujet des bourses d'étude : fallait-il, pour plaire à nos adversaires, leur laisser tout le profit des agitations réellement indignes qu'ils ont suscitées au sujet de la loi sur les bourses d'étude ? Quoi ! il serait permis à nos adversaires d'aller partout criant que nous sommes des voleurs, et nous, parce qu'il y a un projet sur la réforme électorale, nous devrions nous taire !

Les évêques publient des réclames électorales dans lesquelles on affirme que le gouvernement a fait adopter par la Chambre une loi contraire à la morale et à la justice, et le gouvernement, pour faire la réforme électorale, laisserait dire les évêques, laisserait publier contre lui toutes sortes d'infamies ; on nous traite de voleurs et de coupeurs de bourses, et nous n'aurions pas le droit de montrer où sont les véritables voleurs, où sont ceux qui ont dilapidé le patrimoine de l'instruction publique ! Et aujourd'hui vous criez, parce que nous venons vous montrer, par les nombreux abus que nous avons signalés, que la législature a eu raison de modifier l'ancienne organisation des bourses d'étude.

Vous craignez que mon discours soit lu dans tout le pays. Est-ce que par hasard les discours des membres de la Chambre et des membres du gouvernement sont faits pour être mis sous l’éteignoir ? Allez-vous prêcher qu'on ne doit plus lire ce qui se dit dans cette Chambre ?

Oh ! je sais que des membres de votre parti empêcheront la lecture de mon discours, parce que, si mon discours était lu partout, justice serait vile faite de vos prétentions. Mais quant à nous, nous n'avons pas peur de la lumière, et si nous faisons publier notre discours, nous mettrons votre réponse à la suite si vous en faites une, nous n'avons pas peur que dans le même livre on lise ce que vous avez dit à côté de ce que nous avons dit. Nous sommes convaincus que tous les faits que nous avons avancés sont exact et reposent sur des faits authentiques.

J'arrive au point qu'a traité l'honorable membre. Il dit qu'il faut publier un rapport complet. Vous voyez le but de cette demande, c'est d'écarter le débat ; c'est de dire jusqu'après les élections : tout est réservé, rien n'est prouvé, les administrateurs spéciaux sont des modèles de vertu et de probité administrative ; rien ne nous démontre les abus ; attendons le rapport, la lumière ! Voilà le but que se propose l'honorable membre.

L'honorable membre ajoute : Le gouvernement n'a apporté aucune preuve à l'appui de ce qu'il a avancé. Nous ne reculons pas devant la preuve des faits que nous avons allégués. Nous demandons à déposer nos dossiers sur le bureau. Vous êtes assez nombreux pour les examiner ; ils ne sont d'ailleurs pas si volumineux que vous ne puissiez vous acquitter de cette tâche. Si, plus tard, vous voulez l'impression des pièces, tant mieux, je ne m'y oppose pas. Nous ne sommes pas les défenseurs des administrateurs spéciaux. Si nous ne publions pis ces pièces, c'est encore par égard pour vous.

Je fais l'offre à la Chambre de déposer les dossiers sur le bureau. Tous les membres de la Chambre pourront les compulser. Si vous reculez devant cette offre, c'est que vous ne voulez pas avoir en mains la preuve des abus que j'ai signalés, et il sera établi que le gouvernement a fait tout ce qu'il a pu pour vous démontrer la réalité des abus qu'il vous a fait connaître et que vous avez reculé devant cette preuve.

M. Pirmezµ. - Je demande la parole pour une motion d'ordre.

Messieurs, l'honorable ministre de la justice vient de démontrer qu'il avait parfaitement le droit de se défendre et de défendre la majorité de la Chambre contre les attaques dont ils sont l'objet depuis si longtemps. Mais, pour être juste, je dois reconnaître que cette défense est en même temps une attaque et que l'honorable ministre s'est servi non seulement du bouclier, mais aussi de la lance et de l’épée.

Il est juste que les personnes qui se considèrent comme attaquées, que la minorité de la Chambre qui se considère comme attaquée... (Interruption.)

M. Jacobsµ. - Pas le moins du monde.

M. Coomansµ. - Je n'ai pas mis la main dans les bourses. Cela ne me regarde pas.

M. Pirmezµ. - Ce que je dis n'a évidemment rien de blessant pour les membres de la Chambre.

Il est donc juste que la minorité de cette Chambre qui est attaquée dans les principes et dans les institutions qu'elle défend, soit mise à même de répondre au discours de l'honorable ministre de la justice. Pour cela, il faut, selon moi, deux choses : il faut que les pièces justificatives soient mises à sa disposition ; il faut en second lieu qu'elle puisse avoir le temps d'examiner ces pièces.

M. le ministre de la justice vient d'offrir de déposer les pièces sur le (page 704) bureau de la Chambre. Je demande que ces pièces soient déposées immédiatement ou demain matin.

MjBµ. - Lundi. Certaines pièces doivent venir des provinces.

M. Pirmezµ. - Vous avez au moins une partie des pièces ?

MjBµ. - Oui.

M. Pirmezµ. - Je demande que M. le ministre de la justice dépose, dès demain matin, toutes les pièces dont il peut disposer, et qu'aussitôt qu'il aura les autres à sa disposition, elles soient remises sur le bureau.

Je demande, en second lieu, que la discussion sur l'incident soit remise à mardi prochain.

M. Coomansµ. - Après la réforme électorale.

M. Pirmezµ. - Je propose de remettre la discussion sur l'incident à mardi.

M. Jacobsµ. - Cet incident ne nous regarde pas.

M. Bouvierµ. - Vous reculez.

M. Pirmezµ. - Je ne demande pas de clore l'incident. Je demande au contraire d'ajourner la fin de l'incident pour que vous soyez mis à même de vous défendre. La motion de l'honorable M. de Theux, les discours de l'honorable M. Dumortier et de l'honorable M. Jacobs, n'ont pas d'autre but que de réclamer les moyens de répondre au discours de M. le ministre de la justice.

M. Delaetµ. - De demander que le pays soit mis à même de juger.

M. Pirmezµ. - Eh bien, le pays sera mis à même de juger, lorsque vous aurez été mis à même de répondre.

M. Jacobsµ. - Nous ne sommes pas attaqués.

M. Pirmezµ. - On fait ici une confusion. On suppose que nous prétendons que les membres de la droite sont personnellement attaqués. Il ne s'agit pas de Cela. Mais les principes qu'ils ont soutenus et les institutions qu'ils défendent ont été attaqués hier par M. le ministre de la justice et la proposition de l'honorable comte de Theux a pour but explicite de mettre la minorité à même de défendre ces institutions et ces principes, par la communication et l'examen des pièces invoquées.

Je propose donc de remettre la suite de la discussion de l'incident à mardi. D'ici là, la droite pourra examiner les pièces, prendre des renseignements et ensuite présenter la défense qu'elle offre.

Messieurs, on veut ajourner la fin de l'incident jusqu'après la discussion de la réforme électorale... Permettez-moi de vous le dire, messieurs, il y a là quelque chose d'étrange ; vous prétendez que M. le ministre de la justice s'est livré hier aux attaques les plus violentes. Si j'étais dans la position d'avoir à me défendre, ou à défendre les intérêts de mon parti contre des attaques violentes, je ne demanderais pas mieux que de pouvoir répondre immédiatement à ces attaques. Je ne sais pas si nos goûts sont aussi différents que nos idées ; mais j'avoue que rien ne me pèse plus que de devoir demeurer sous le coup d'accusations aussi injustes et aussi violentes que celles que vous soutenez être dirigées contre vous.

Messieurs, remettre la discussion jusqu'après celle de la réforme électorale, c'est ajourner cette discussion jusqu'à la semaine prochaine. Je crois que c'est là ce que vous voulez...

M. Jacobsµ. - J'espère bien que non.

M. Pirmezµ. - Je persiste à croire que c'est là ce que vous voulez ; je vais vous le prouver.

En effet, la proposition de l'honorable M. de Theux consiste à demander un rapport et l'impression de toutes les pièces qui doivent justifier ce rapport. Dans un mois, nous avons des élections ; il est bien connu que, quinze jours avant les élections, il n'y a pas de séance possible ; il n'est pas moins certain que d'ici à quinze jours, il est impossible de rédiger un rapport et de faire imprimer les pièces.

Donc, la proposition de l'honorable M. de Theux a pour conséquence nécessaire de faire remettre le débat à la session prochaine ; je modifie donc ce que j'avais avancé : que vous voulez ajourner le débat à la session prochaine.

Messieurs, il s'agit d'une question très importante avec laquelle on agite le pays ; on vous offre l'occasion de la discuter ici, pour que l'opinion publique puisse se prononcer. La droite ne peut vouloir continuer à attaquer sans qu'il soit permis de riposter ; si vous voulez faire juger par le pays la question qui est soulevée, ayez le courage de la discuter d'une manière complète, avant que le pays procède aux élections.

Je suis convaincu que pas un membre de la majorité ne repousserait la discussion sur le principe de la loi, si vous voulez encore une fois discuter les principes. Si mardi prochain, lorsque le débat sur l'incident sera ouvert, vous voulez recommencer la discussion sur les principes, vous ne trouverez pas de contradicteurs sur nos bancs.

M. Jacobsµ. - N'avons nous donc rien à faire ?

M. Pirmezµ. - Les interruptions de M. Jacobs font voir que nous sommes sur un terrain extrêmement désagréable pour son opinion.

Ou montre le désir d'avoir une discussion pour pouvoir renverser toutes les accusations de M. le ministre de la justice, mais quand je propose un moyen d'avoir cette discussion, on m'interrompt pour me dire : « Nous aimerions mieux autre chose. »

Je crois satisfaire à ce qu'il y a de profondément légitime, je le reconnais, dans les demandes de la droite, en faisant la proposition que j'ai eu l'honneur de vous soumettre.

M. de Theuxµ. - Messieurs, si j'ai hier signalé l'inconvenance du procédé de M. le ministre de la justice, je dois aujourd'hui signaler son habileté. Pour excuser sa conduite dans la séance d'hier, il dit : « Nous étions attaqués ; nous devions nous défendre. »

MjBµ. - Je n'ai pas à excuser ma conduite.

M. de Theuxµ. - Eh bien, messieurs, je le demande à tout homme de bonne foi : Quelle a été l'attaque ? C'est une question de principe, une question de légitimité de la loi, de justice de la loi qui a été en discussion.

Cette question a été débattue pendant deux ou trois semaines tant à la Chambre qu'au Sénat. Les adversaires de la loi ont fait valoir leurs motifs ; ses partisans ont fait valoir les leurs : cette question est donc épuisée pour nous. Maintenant qu'elle se pose dans la presse ou dans des écrits, cela ne nous regarde plus. (Interruption.)

Je répète que la question de droit, longuement débattue par nous, est épuisée pour le parlement. Voilà mon opinion. Je crois que tout le monde doit être de cet avis, à moins qu'on ne veuille rien faire ici que des discours : je ne pense pas que ce soit là le but d'un parlement.

Messieurs, est-ce que M. le ministre de la justice a été attaqué sur des faits ? A-t-on signalé des abus de son administration relativement aux bourses ? Si cela est, il a eu raison de riposter par les documents dont il nous a entretenus hier ; mais cela n'est pas ; c'est donc M le ministre de la justice qui est l'agresseur. Voilà la vérité ; ce sont les administrateurs spéciaux qui sont accusés.

Maintenant quels sont les juges compétents ? L'honorable M. Pirmez dit que M. le ministre de la justice déposera, mardi prochain, tous les documents ; il y a peut-être une centaine de faits et nous pourrions reprendre le débat huit jours après.

- Des membres. - Non pas huit jours après, mais le lendemain du dépôt des pièces.

M. de Theuxµ. - Je demande de nouveau quels seront les juges ? L'honorable M. Pirmez, qui est un avocat distingué, a-t-il jamais vu dans un tribunal juger une centaine de procès en vingt-quatre heures ? A-t-il jamais vu un avocat se charger de plaider autant de procès dans un si court espace de temps ? Cent procès, c'est souvent la vie d'un avocat.

Messieurs, quelle utilité pourrait présenter le dépôt d'une centaine des dossiers sur le bureau, si les pièces ne sont pas imprimées ? Il faudrait un ou deux ans pour les étudier, pour nous procurer des renseignements. Nous avons le droit de dire : Je ne puis pas plaider la cause ; c'est impossible ; je demande une remise, comme font les avocats.

Et puis vous êtes juges et parties ; vous avez voté la loi ; vous voulez la justifier par des accusations dirigées contre les administrateurs spéciaux ; vous n’êtes pas des juges compétents ; je le déclare franchement ; je ne considère comme juges compétents que les tribunaux, lorsque vous ferez traduite devant la justice du pays les administrateurs spéciaux.

Maintenant, je me garderai bien de traiter ces questions dans tous leurs détails devant vous ; mais nous voulons que les pièces soient imprimées et que chacun des administrateurs spéciaux les connaisse et puisse se préparer, lorsqu'il sera attrait en justice, à se défendre, à fournir des mémoires publics, s'il le juge à propos.

Mais je n'hésite pas à dire encore que c'est une chose inouïe que de forcer des administrateurs qui, presque tous, ont géré gratuitement leurs fonctions, à faire de grandes dépenses de publicité, pour imprimer des mémoires que vous ne vous donnerez pas la peine de lire, car ils sont d'avance condamnés chez vous, vous ne lirez pas leur défense.

Mais, messieurs, je demande la permission de vous lire une défense globale comme l'attaque a été globale, afin qu'elle se trouve dans les (page 705) Annales parlementaires. Vous savez que les députations permanentes des états provinciaux sous le gouvernement des Pays-Bas et des conseils provinciaux sous le royaume de Belgique ont été chargées de la haute tutelle de l’administration des bourses, qu'elles devaient approuver les comptes et tons les actes de ces administrations, qu'elles avaient le pouvoir de les attraire en justice et que de temps en temps elles l'ont fait. Voici leurs rapports pour une période de douze années. Ce document a été lu au Sénat par l'honorable M. Malou, il est juste qu'il soit imprimé aux Annales parlementaires.

Comme je suis fatigué de cette longue discussion, l'honorable M. Nothomb veut bien se charger de vous lire ce document et je l'en remercie.

M. Nothombµ. - Voici ce document :

1850.

Anvers. Exposé simple des faits accomplis. Relevé des comptes des fondations.

Quant à la fondation Vandeweyer, le ministre de la justice a prononcé, sauf recours en justice régIée, l'annulation des collations faites contrairement aux droits d'un paient.

« Le gouvernement s'occupe d'un projet de loi sur les fondations de bourses. Il serait à désirer que cette loi ne se fît pas attendre, afin de trancher des questions fort controversées à l'égard de la légalité des règlements qui régissent aujourd'hui les institutions. »

Brabant. Rien.

Flandre occidentale. Les comptes ont été transmis en temps utile ; les excédants ont été placés.

Flandre orientale. Il n'y a dans cette province que six bourses universitaires et 14 pour la théologie. Pas d'autre mention.

Hainaut. Après avoir cité les faits accomplis, la députation ajoute :

« Nous avons constaté avec plaisir que les ressources des fondations s'accroissent sensiblement, tandis que les bienfaits qu'elles répandent suivent aussi la voie progressive. »

Liège.. « L'administration des fondations de bourses continue à être régulière. »

Le rapport mentionne une fondation autorisée en 1819 avec droit de collation par l'évêque, sous certaines réserves (fondation de Josse Sacré).

La députation mentionne aussi un conflit d'attributions existant entre elle et le séminaire, conflit soumis au gouvernement, qui n'a pas encore pris de décision.

Limbourg. Les comptes, à l'exception d'un seul, ont été arrêtés. Une action judiciaire se poursuit de ce chef contre les administrateurs...

« La comptabilité des fondations de bourses est assez bien tenue et s'améliore tous les ans. »

On place les fonds disponibles.

Luxembourg et Namur. Rien.

\1851.

Anvers rend compte des faits accomplis sans signaler aucun abus et ajoute :

« L'intervention de cette loi (annoncée par le gouvernement depuis deux ans) est vivement désirée. »

Brabant. Rien.

Flandre occidentale. Les comptes ont été transmis en temps utile ; la ventilation n'a donné lieu à aucune observation.

Flandre orientale. Même mention qu'en 1850.

Hainaut. « Nous n'avons en général que des éloges à donner à MM. les proviseurs et administrateurs des fondations de bourses, pour la manière dont ils gèrent les intérêts de ces établissements. »

Liège. « Ces fondations continuent à être administrées régulièrement. »

La députation expose le conflit international qui s'est élevé au sujet de la fondation Darchis. Elle avait désigné un boursier ; mais l'administration, dont le siège est à Rome, en a nommé un autre.

Limbourg. Les comptes ont été arrêtés sauf un seul. Les administrateurs en retard ont été condamnés judiciairement à régulariser leur comptabilité arriérée par suite du décès du receveur. Plusieurs comptes de cette fondation sont déjà arrivés.

« En général, la comptabilité continue à être bien tenue, les fonds disponibles sont appliqués. »

Luxembourg. Rien.

Namur. Rend compte de la fin de la contestation au sujet de la fondation Jacquet. L'arrêté royal du 11 août 1850, qui révoquait un arrête antérieur (de 1838) a été exécuté : la partie de la fondation qui concerne l'instruction primaire est attribuée à la commune de Rochefort ; le surplus, qui constitue des fondations de bourses, est géré par le curé, le. bourgmestre et échevins et deux parents du fondateur que le gouvernement a désignés sauf les droits des tiers.

1852

Anvers. Résumé des comptes. Exposé des faits administratifs.

Brabant. Idem.

Flandre occidentale. Mêmes phrases qu'en 1851.

Flandre orientale. Idem.

Hainaut. « Les administrateurs collateurs gèrent très convenablement les intérêts qui leur sont confiés. Une seule administration, qui a son siège dans l'arrondissement d'Ath, se montre tellement négligente dans ses relations avec l'administration provinciale, que nous nous verrons enfin forcés de provoquer à son égard telles mesures que de droit. »

Liège.

Les comptes sont généralement réguliers.

« Nous tenons la main à ce que la volonté des fondateurs soit scrupuleusement respectée dans les limites tracées par la législation. »

Limbourg. Les comptes ont été approuvés à l'exception d'un seul. Les administrateurs de cette fondation restent sourds à tout avertissement et même à un jugement rendu.

La comptabilité continue à être généralement bien tenue. On applique les excédants disponibles.

Luxembourg. Rien.

Namur. Analyse les faits administratifs, les transactions, aliénations, etc., qui ont été approuvées.

\1853.

Anvers. Simple compte rendu des faits.

Brabant. Résumé des omîtes et de la situation financière, qui est prospère.

Flandre occidentale. Mêmes énonciations qu'en 1851.

Flandre orientale. Mêmes énonciations qu'en 1851.

(N. B. Mêmes formules stéréotypées p. 1854, 1855 et 1856).

Hainaut. Résumé des comptes, qui présentent un excédant de plus de 34.000 fr.

Liége. Les douze comptes déjà transmis n'ont donné lieu à aucune observation.

Limbourg. Tous les comptes, à l'exception d'un, ont été approuvés, Si, dans peu de temps, la comptabilité de celle-ci n'est pas apurée, il en sera derechef donné connaissance au gouvernement, afin qu'il prescrive les mesures qu'il jugera nécessaires.

« La comptabilité se tient régulièrement. »

Les excédants disponibles sont placés.

Luxembourg. Rien.

Namur. Compte rendu des faits administratifs, placements, transactions, etc.

1854.

Anvers. Relevé général des comptes. Faits administratifs tels que transaction, etc.

Brabant. Simple résumé de la comptabilité des fondations.

Hainaut. Idem.

Liége. « Le contrôle que la législation actuelle attribue à l'autorité, publique sur les fondations de bourse, n'est ni assez direct, ni assez efficace pour prévenir la possibilité des abus ; toutefois, dans notre province, ces fondations semblent généralement administrées d’une manière satisfaisante, sous le rapport financier. Nous tenons la main à la transmission régulière qui doit nous être faite des comptes, et nous veillons, autant que possible, à ce que les principes d'une bonne gestion soient constamment observés. »

Limbourg. Les comptes ont été approuvés, y compris celui de la fondation Boukens, dont la comptabilité est actuellement aussi entrée dans une voie régulière.

La comptabilité continue très régulièrement.

La députation expose les faits administratifs.

Namur. Rien.

\1855.

Anvers. Simple résumé des comptes. Mention d'une contestation d'intérêt privé relative à la jouissance d'une bourse, et décidée par le ministre, sauf recours aux tribunaux.

Brabant. Résumé des comptes.

Hainaut. Les 102 comptes ont été vérifiés et approuvés.

« Les administrateurs désignés par les fondateurs et ceux qui tiennent leurs fonctions du gouvernement, s'acquittent généralement avec zèle de leurs obligations ; néanmoins quelques-uns font exception et refusent de se soumettre aux prescriptions des arrêtés royaux précités. Nous nous verrons peut-être forcés de les signaler au gouvernement. »

Liège. « Autant qu'il nous est possible d'en juger, ces fondations sont administrées régulièrement, en conformité des dispositions des arrêtés de 1818 et de 1823 ; la volonté des fondateurs est scrupuleusement suivie dans les limites tracées par la législation sur cette matière. Les comptes qui nous parviennent avec assez de régularité, ne donnent lieu (page 706) en général qu'à des observations de détail ; les remplois prescrits s'exécutent sans retard. »

Limbourg. Compte rendu des faits administratifs.

La députation déclare qu'elle se propose de faire une instruction générale afin de simplifier les comptes, de les rendre uniformes et plus clairs.

Luxembourg. Rien.

Namur. Rien.

1858

Anvers. Comptes généraux. Faits administratifs.

Brabant. Résumé général des comptes.

Hainaut. « Messieurs les administrateurs collateurs remplissent généralement leurs fonctions avec beaucoup de zèle et apportent dans l’administration des biens des fondations un intérêt tout particulier. »

« Par suite de remplois successifs, plusieurs fondations ont accru leurs revenus au point de pouvoir augmenter le nombre et l'importance des bourses à conférer. Nous avons applaudi à de semblables mesures, dont nous encourageons l'extension, autant qu'il est en notre pouvoir. »

Liége. « Nous pourrions désirer plus de promptitude en général dans la transmission qui nous est faite annuellement des comptes de ces fondations ; la plupart, malgré nos instances, nous parviennent rarement dans le délai fixé par l'arrêté de 1823. Au reste, l'examen attentif que nous en faisons nous donne lieu de croire que la gestion des administrateurs continue à être satisfaisante ; mais il serait désirable que le contrôle de l'autorité pût être plus efficace. »

Limbourg. Les administrations ont adopté le nouveau mode de comptabilité uniforme et simple que la députation leur avait soumis. Les écritures n'étant pas partout fort bien tenues, des administrations ont prescrit des vérifications. Compte rendu des faits administratifs.

Luxembourg. Rien.

Namur. Run.

\1857.

Anvers. Simple mention de faits administratifs. Les excédants de recettes ont été convenablement appliqués autant que le service de l'exercice l'a permis.

Le relevé des comptes des fondations se trouve à la suite de l'exposé.

Brabant. « Le gouvernement ayant chargé une commission de tracer le cadre de la publication qui sera faite des actes des fondations des bourses d'étude, nous n'attendrons pas nos renseignements sur cet objet, le travail qui va être entrepris devant être plus complet que celui que nous pourrions donner. »

Les chiffres des comptes de chaque fondation sont résumés pages 150 à 161.

Les revenus ordinaires s'élèvent ensemble à 208,356 francs. En 1855 il a été conféré 927 bourses montant à fr. 135, 472-63.

Flandre occidentale. Les comptes ont été transmis dans le délai voulu ; la vérification n'a donné lieu à aucune observation.

Flandre orientale. Rien relativement aux bourses de fondation.

Hainaut. Les fondations de bourses sont généralement bien administrées.

« Les comptes nous parviennent plus régulièrement que par le passé, et nous avons lieu d'espérer qu'avant peu d'années le service des fondations ne laissera plus rien à désirer, notamment sous le rapport de la comptabilité. Nous nous appliquons tout particulièrement à faire augmenter le nombre et le taux des bourses, autant que les revenus et les actes de fondation le permettent. »

Liège. Statistique des bourses ; 23 fondations anciennes ont été rétablies en vertu des arrêtés de 1818 et 1823. 10 fondations plus récentes ont été autorisées au profit du séminaire de Liège. La députation déclare ne pouvoir exercer sur ces dernières aucun contrôle sérieux.

La députation a émis l'avis que les arrêtés précités (à part la question absolue de légalité) ne sont pas applicables aux fondations pour l'instruction primaire.

Elle mentionne diverses affaires tenues en suspens jusqu'à décision définitive sur l'applicabilité aux fondations nouvelles des dispositions actuellement en vigueur.

« Les comptes des fondations de bourses de la première catégorie nous ont été régulièrement soumis, et nous les avons apurés ; nous regrettons cependant que la plupart de ces comptes ne nous parviennent qu'après l'expiration du délai fixé par l'article 6 de l'arrête royal du 2 décembre 1823. »

Limbourg. Les comptes de 1855 sont tous approuvés.

La députation a constaté des irrégularités dans la tenue des écritures de quatre fondations et un déficit dans la caisse d'un receveur. Des mesures ont été prises pour faire disparaître les abus et les irrégularités.

« L'accroissement des revenus, l'augmentation du nombre des bourses de certaines fondations et la majoration du taux d'autres, sont autant de preuves des soins que les administrateurs apportent dans l'accomplissement de leur mission. »

Luxembourg. Rien.

Namur. Rien.

1858.

Anvers. Faits administratifs. Mêmes renseignements qu'en 1857.

Brabant. Résumé général des comptes. Il a été conféré 845 bourses représentant une somme de 136,846 fr. 21 c.

Flandre occidentale. Les comptes des fondations de bourses nous ayant été transmis dans le délai fixé, et la vérification n'ayant donné lieu à aucune observation, l'approbation voulue leur a été accordée.

Flandre orientale. Rien.

Hainaut. « Les administrateurs de fondations de bourses d'étude montrent généralement beaucoup de zèle dans l'accomplissement de leurs devoirs.

« Deux administrations de fondations qui n'avaient pu jusqu'à ce jour nous envoyer leurs comptes annuels par suite des procès tendants à faire annuler l'arrêté d'institution ou de rétablissement ont vu ces procès se terminer à leur avantage.

« .....Nous avons eu la satisfaction de pouvoir proposer l'année dernière à M. le ministre de la justice d'augmenter le taux et le nombre de plusieurs bourses d'étude. »

Liége. Trois fondations nouvelles ont été reconnues par arrêtés de septembre et octobre 1857. Il n'y a pas de décision quant à deux autres.

Le nombre total des fondations autorisées dans la province est de 42, y compris les bourses fondées au séminaire.

« Nous n'exerçons pas de contrôle sur l'administration de ces dernières ; les autres nous ont soumis leurs comptes de l’exercice de 1856, à l'exception toutefois des fondations Deleixhe, dont le receveur refuse depuis plusieurs années de rendre compte de sa gestion, et Surlet, dont les administrateurs n'ont pas encore répondu à nos invitations réitérées. »

Les comptes que nous avons eu à examiner nous ont paru régulièrement dressés, et nous les avons tous approuvés.

Limbourg. La comptabilité et les titres des fondations dont il est parlé dans l'exposé précédent ont été régularisés.

« En général la gestion de ces institutions se fait convenablement. » On exécute les volontés des fondateurs, on place les excédants disponibles.

Luxembourg et Namur. Rien.

\1859.

Anvers et Brabant. Simple compte rendu des faits accomplis, sans observations.

Hainaut. « Les administrateurs collateurs de fondations de bourses continuent, en général, à apporter beaucoup de zèle dans l'accomplissement de leurs devoirs. Nous regrettons d'avoir à dire que certaines fondations se montrent récalcitrantes en refusant de soumettre leurs comptes annuels à notre approbation. Nous les avons signalées à M. le ministre de la justice. » (Le rapport constate que des mesures ont été prises pour mettre fin aux abus qui se commettaient dans la collation des bourses.)

Liége. « Les comptes que nous avons eu à examiner nous ont paru régulièrement dressés et ils ont reçu notre approbation.

« Nous avons toutefois le regret de n'avoir pu amener jusqu'ici le receveur de la fondation Deleixhe à rendre compte de sa gestion. »

Flandre orientale, Namur et Luxembourg. Rien.

Flandre occidentale déclare que les comptes des fondations ont été remis en temps utile, et que la vérification de ces documents n'a donné lieu à aucune observation.

Limbourg. En général nous constatons une amélioration assez sensible dans la gestion de ces institutions. Les nombreuses remarques dont leur comptabilité a été l'objet dans les dernières années ont notablement fait diminuer les erreurs et les irrégularités. L'autorité provinciale tient la main à ce que les intérêts de tous soient sauvegardés et à ce qu'il soit constamment agi conformément à la volonté du fondateur.

Les excédants de comptes sont immédiatement appliqués.

(page 707) 1860

Anvers. « Les administrateur collateurs... montrent en général beaucoup de zèle dans l’accomplissement de leurs devoirs. » Les comptas sont régulièrement rendus. Il s'est élevé deux contestations entre des prétendants droit.

Brabant. Un conseiller provincial s'étant plaint de l'accumulation des excédants de revenus des fondations, la députation expose quel est l'excédant réel, puis elle ajoute : Les mesures à prendre pour assurer l'utile emploi des sommes annuellement disponibles ne peuvent se résumer en une disposition unique et générale, sans tenir compte de la volonté des fondateurs, lorsqu'elle est connue. »

N. B. L'exposé contient le tableau général des fondations, dont le siège est dans le Brabant (pages 460 et suiv.) ; il reproduit aussi une lettre à M. Staes relative à la gestion des biens.

Flandre occidentale. Mêmes énonciations qu'en 1859.

Flandre orientale. Aucune mention.

Hainaut. « Comme par le passé, nous n'avons qu'à nous louer du zèle apporté par les administrateurs collateurs dans l'exercice de leurs fonctions. Quelques-uns montrent encore certaine négligence dans la gestion des intérêts qui leur sont confiés ; mais nous espérons sous peu mettre fin à cet état de choses. »

Le rapport constate l'accroissement des revenus des fondations et l'état prospère de cette branche du service public.

Liège. Le simple compte rendu des faits. « Les comptes de 24 fondations nous ont été soumis ; nous les avons trouvés régulièrement dressés et ils ont reçu notre approbation. »

Limbourg. Grâce à la vigilance des administrateurs et aux recommandations incessantes de l'administration provinciale, la gestion des fondations se fait avec régularité. La comptabilité est bien tenue et les stipulations des actes de fondation sont fidèlement observées. Tocs les comptes de 1858 et 41 comptes de 1859 sont arrêtés.

Luxembourg et Namur. Rien.

\1861.

Anvers. « Comme par le passé, les intérêts confiés aux administrateurs-collateurs sont généralement gérés avec zèle, et, autant que possible, selon les intentions des fondateurs. Il ne nous est parvenu aucune réclamation contre les collations faites... Tous les comptes de l’exercice 1860 ont été soumis à notre approbation définitive en temps opportun. »

Brabant. Tous les comptes ont été rendus. Le rapport en donne seulement les résultats sans autres observations.

Hainaut. A l'effet de réprimer les abus fréquents que l'on remarque dans la collation des bourses, la députation a posé au ministre de la justice quelques questions que celui-ci a résolues. L'abus principal paraissait être la trop longue durée de jouissance des bourses.

Liège. Mêmes indications qu'en 1860. Le rapport constate (mais sans commentaire) que le gouvernement a refusé d'autoriser une fondation distincte.

Limbourg. Les comptes sont rendus. « Les inexactitudes dans la tenue de la comptabilité diminuent d'année en année. On peut considèrer les administrations de bourses comme suivant une marche régulière. »

N. B. Le rapport mentionne un procès entre particuliers au sujet d'une collation de bourses.

Luxembourg et Namur. Rien.

1862.

Anvers. « Les fondations de bourses d'études ayant leur siège dans cette province continuent d'être, à quelques exceptions près, administrées aves soin et intelligence. »

« ... Nous avons arrêté définitivement avec un solde actif, sauf deux, tous les comptes de l'exercice 1861. Nous en donnons ci-après le résultat sommaire :

« Il résulte de ce tableau, ainsi que du travail que nous adressons chaque année au gouvernement... sur la comptabilité des fondations, que cette branche du service public se trouve dans un état prospère...

« Au surplus, les dépenses des fondations sont généralement réglées de manière à permettre l'accroissement successif des dotations dans de sages limites. »

Brabant. Relevé détaillé des fondations. Revenu annuel fr. 232,276-73. Reproduit une circulaire de M. le ministre de la justice, tendant à empêcher la collation de bourses en plus grand nombre ou à des taux plus élevés que ne le portent les actes de fondation...

Flandre occidentale. Même mention que les années précédentes.

Flandre orientale. Rien.

Hainaut. Résumé de l'état financier « lequel est satisfaisant. » Compte rendu des questions soumises au département de la justice.

Liège. La députation a prescrit aux proviseurs et aux administrateurs collateurs de dresser les comptes, par exercices scolaires, à dater de 1864.

27 comptes ont été approuvés. 73 bourses ont été conférées.

Limbourg. Tous les comptes de 1860 et 26 comptes de 1861 sont arrêtés

« La régularité et l’exactitude constatées depuis quelque temps dans la gestion et la comptabilité de ces institutions sont, sans contredit, la conséquence de la surveillance active et constante de l'autorité supérieure, qui voue des soins spéciaux à sauvegarder les intérêts des familles. »

Luxembourg. Rien.

Namur. Rien.

M. de Theuxµ. - Vous avez entendu, messieurs, les rapports des députations permanentes sur les administrations de bourses, pendant les années 1850 à 1862. pendant une période de 12 années. Si on avait écoulé attentivement, je crois que l'on aurait été très étonné d'une situation si différente de celle qu'indiquait hier M. le ministre de la justice. Je ferai observer à la Chambre que les députations permanentes de cette époque étaient presque toutes libérales. A une seule près, le libéralisme y avait la majorité. Je dis ceci parce que ce sera un titre tout particulier à la confiance d'une partie de cette Chambre et d'une partie du public.

Eh bien, messieurs, ce que nous demandons, c'est que M. le ministre de la justice, dans un rapport, redresse les rapports des députations permanentes placées immédiatement au-dessus des administrations de bourses, au lieu de venir lancer des accusations individuelles et partielles pour en induire qu'il y a un système général d'abus dans les administrations des bourses. On est venu produire quelques faits isolés et, je dois le dire, on les a produits avec passion, comme accusateur et non pas pour la nécessité de la défense.

La lecture, messieurs, que vous venez d'entendre, je vous en demande pardon, a été certainement fastidieuse pour la Chambre aussi beaucoup de membres qui applaudissaient hier M. le ministre de la justice lorsque dans un discours passionné il attaquait les administrations de bourses, causaient aujourd'hui et prêtaient peu d'attention. Je conviens que c'est dans la nature des choses ; dans une assemblée politique, on écoute quelquefois les discours passionnés avec beaucoup plus d'attention qu'une simple lecture. Mais, au moins, la lecture de ce document aura pour conséquence l'impression dans les Annales parlementaires et une justification générale se trouvera à côté d'une accusation que l'on a voulu rendre générale.

Maintenant, messieurs, si nous reprenions une à une toutes les discussions, je crois, messieurs, que la Chambre succomberait à l'ennui de cette besogne, et, en outre, elle n'apprécierait pas les faits avec cette impartialité que les parties devraient attendre ; ce n'est réellement que devant les tribunaux que l'on peut compter sur une attention vraie, complète et sur la justice de la décision.

J'ai demandé la production de tous les dossiers et leur impression, accompagnée d'un rapport général sur l'administration des bourses, contredisant peut-être les rapports des députations permanentes. Cela nous permettrait peut-être de tirer une conclusion que quelconque, mais il est impossible que les parties incriminées obtiennent cette justice à laquelle elles ont droit, à moins qu'on ne produise les documents et qu'on ne les fasse imprimer. Ce n'est qu'après l'impression des pièces que les parties incriminées seront mises à même de se justifier.

Cependant vous leur imposez une besogne bien lourde pour des administrateurs qui géraient généralement à titre gratuit, vous leur imposez en outre une dépense, car il est probable que, pour répondre à M. le ministre de la justice, chacun d'eux aurait besoin d'un avocat. D'ailleurs la défense la plus complète serait produite dans quelques journaux et non dans les autres.

M. le ministre a voulu produire un effet général.

Mais je compte assez sur la justice de l'opinion publique pour croire qu'elle ne suivra pas un mouvement passionné et désordonné et n'admettra pas pour vrai tout ce qui a été produit dans nos débats.

C'est tout ce que je demande. Je n'en dirai pas davantage, mais je regrette profondément ce qui s'est passé dans la séance d'hier, ce qui est sans précédents dans le parlement et ce qui, j'espère, se trouvera sans reproduction dans l'avenir.


« M. De Fré, retenu chez lui par un deuil de famille, demande un congé. »

- Accordé.


MjBµ. - L'honorable membre vient de dire qu'il regrettait profondément ce qui s'est passé hier.

(page 708) Pour ma part je regrette profondément tout ce qui s'est passé dans les anciennes administrations spéciales. Voilà ce dont il s'agit.

M. de Theuxµ. - Ce n'est pas de cela qu'il s'agit.

MjBµ. - L'honorable membre parle de discours passionné. Mais la passion consiste-t-elle à parler de faits ? Ce sont cependant les faits que j'ai cités qui vous ont irrités le plus.

Vous n'avez nullement interrompu quand j'ai présenté des considérations tirées de mon propre fonds, mais lorsque je citais des faits, vous avez fait entendre des interruptions continuelles.

Vous prétendez que les faits sont passionnés ; ils sont très caractéristiques, ils indiquent les abus des anciennes administrations spéciales. Voilà ce qui vous a irrités, je le reconnais, parce que ces faits donnent la mesure du système que vous avez défendu.

M. Coomansµ. - Les voleurs ne sont pas nos amis.

MjBµ. - Je dis que la thèse que vous soutenez favorise la dilapidation des administrations publiques.

M. Coomansµ. - Il ne faut pas flétrir les députations permanentes.

MjBµ. - Vous allez voir comment les députations permanentes ont pu écrire ce que vous dites et ce qui, au surplus, n'est pas un éloge bien brillant.

Que disent ces collèges ? Ils consacrent chaque année, dans l'Exposé de la situation de la province, deux ou trois lignes à l'administration des bourses.

C'est une banalité, à telle enseigne qu'il est probable que le membre de la députation permanente qui a rédigé le rapport n'a fait que copier chaque année le passage du rapport précédent, relatif aux fondations de bourses. (Interruption.)

M. Coomansµ. - Voilà la flétrissure.

M. Wasseigeµ. - J'ai été membre d'une députation permanente. Je dis que les faits qu'affirme M. le ministre ne sont pas exacts.

MjBµ. - Les députations permanentes ont déclaré elles-mêmes qu'il était impossible, avec les arrêtés de 1818 et de 1823, de faire exécuter la loi.

M. Coomansµ. - Elles ont menti alors.

MjBµ. - Elles n'ont pas menti, elles ont déclaré leur impuissance.

Que disait en 1854 la députation de Liège ? « Le contrôle que la législation actuelle attribue à l'autorité publique sur les fondations de bourses n'est ni assez direct ni assez efficace pour prévenir la possibilité des abus ; toutefois dans votre province ces fondations semblent généralement administrées d'une manière satisfaisante sous le rapport financier.

« Nous tenons la main à la transmission qui doit nous être faite, des comptes et nous veillons autant que possible A ce que les principes d'une bonne gestion soient constamment observés. »

Quel était son langage en 1856 ? « Nous pourrions désirer plus de promptitude en général dans la transmission qui nous est faite annuellement des comptes des fondations ; la plupart, malgré nos instances, nous parviennent rarement dans le délai fixé par l'article 6 de l'arrêté royal du 2 décembre 1823. Au reste l'examen attentif que nous en faisons nous donne lieu de croire que la gestion des administrateurs continue à être satisfaisante, Mais il serait désirable que le contrôle de l'autorité pût être plus efficace. »

Effectivement les administrateurs spéciaux envoyaient des comptes. Par conséquent on ne pouvait dire qu'il y avait malversation.

Un jour la députation permanente de la province de Limbourg s'avise de faire vérifier cinq des fondations. On envoie un inspecteur sur les lieux et savez-vous le rapport que fait ce délégué ?

La députation du Limbourg reconnaît qu'en général ces fondations sont bien administrées. Mais, en 1856, elle décide d'envoyer des commissaires spéciaux et de faire vérifier quelques fondations. Quel fut le résultat de cette vérification ?

Nous lisons dans le rapport de 1857 :

« Dans le courant de l'année 1856, nous avons fait procéder à la vérification de la caisse et de la comptabilité de cinq fondations. Il a été constaté des irrégularités dans la tenue des écritures de quatre d'entre elles, et un déficit dans la caisse d'un receveur.

« Après des recherches minutieuses, on est parvenu à démontrer aux débiteurs l'obligation de poser des actes de reconnaissance de leurs dettes.

« Des mesures ont été prises pour faire disparaître les abus et les irrégularités qui nous ont été signalés par les rapports de l'employé délégué. »

Vous voyez donc bien, messieurs, que ce contrôle était illusoire, et pour vous prouver qu'on ne peut accuser les députations permanentes de faire plus qu'on ne leur permettait, je dirai que très rarement elles ont pu remplir leurs obligations vis-à-vis du gouvernement.

Elles devaient adresser tous les ans un rapport sur les bourses d'étude. Vous allez voir comment elles se sont acquittées de cette tâche, et vous jugerez de l'insignifiance du contrôle qu'elles exerçaient :

Anvers. De 1849 à 1860 il n'y a pas eu de rapport.

Brabant. Les rapports ont été régulièrement envoyés, sauf que depuis 1862 il n'y en a plus eu.

C'est dans le Brabant que les administrations spéciales ont laissé le moins à désirer. C'est parce qu'il y avait là toute une grande administration qui avait son siège à Louvain.

Flandre occidentale. De 1850 à 1855, pas de rapport. Idem de 1856 à 1859. Idem depuis 1860.

Flandre orientale. De 1855 à 1857, pas de rapport.

Hainaut. De 1850 à 1855, pas de rapport.

Liège. De 1844 à 1854, pas de rapport.

Limbourg. Pas de rapport depuis 1860.

Luxembourg. Pas de rapport de 1842 à 1859. Pas de rapport depuis 1860.

Namur. De 1845 à 1859, pas de rapport. Idem depuis 1660.

El cependant l'honorable M. Wasseige, qui a été membre de cette députation ferait bien de nous dire pourquoi ce collège n'a pas envoyé son rapport au gouvernement, aux termes de la loi.

Il est évident que ces corps ne pouvaient faire de rapports et je vais vous en donner la preuve. On envoyait aux députations des comptes qui indiquaient les dépenses et les recettes.

M. Delcourµ. - On le faisait, j'en suis sûr.

MjBµ - Pour le Brabant.

Je vous ai déjà dit que le Brabant se trouvait dans une position exceptionnelle.

Les députations avaient beau réclamer, elles ne pouvaient rien obtenir. Qu'arrivait-il ? On leur répondait comme dans la fondation de Hauport : Nous n'acceptons pas de contrôle ; le testament déclare que nous sommes indépendants de toute autorité supérieure, nous nous conformons à la lettre du testament. On a plaidé pendant dix ans. Il est donc constant que, quoi qu'aient pu dire les députations permanentes, elles n'ont pu contrôler les actes des fondations. Mais en supposant même qu'elles aient pu le faire, cela empêche-t-il que les faits que j'ai rapportés soient vrais ? Cela prouverait que les administrateurs ont été assez habiles pour cacher leurs fautes aux députations permanentes.

M. Van Overloopµ. - Cela prouverait que les députations ont été négligentes.

MjBµ. - Dites donc aussi aux ministres qu'ils ont été négligents, puisqu'ils n'ont pu faire produire les comptes. On a plaidé, de 1846 à 1856, pour les obtenir des administrateurs de Hautporl et à la fin, il a fallu transiger. Je vous ai cité le fait des deux frères Anselme et Xavier, qui s'entendaient pour ne pas signer les comptes. Un jour, Anselme voulut signer, Xavier ne voulait pas ; le lendemain Xavier voulait signer, mais Anselme ne le voulait plus. C'est ainsi qu'on s'est trouvé dans l'impossibilité d'avoir les comptes. IL fallait remédier à ces abus.

M. de Theux nous dit qu'on ne peut discuter sur les pièces qui doivent être déposées. Je ne sais vraiment pourquoi. L'honorable membre trouve que cette discussion viendrait trop tôt ; si c est le seul obstacle, on peut ajourner la discussion ; voulez-vous la remettre après jeudi ?

M. Coomansµ. - Après la réforme.

MjBµ. - Si vous ne voulez pas discuter, je ne puis vous y obliger.

M. Thonissenµ. - Nous voulons discuter, mais après l'impression des pièces.

MjBµ. - Mais quelles pièces ?

M. Thonissenµ. - De toutes les pièces dans lesquelles vous puisez vos accusations.

MjBµ. - D'abord ce n'est pas dans des pièces que je puise mes accusations, c'est dans des faits ; quand le curé Dupuis emporte la caisse et les registres de la fondation Franck, il n'y a plus de pièces, il y a absence de pièces. (Interruption.)

(page 709) MjBµ. - II y a un document, oui ; un rapport de M. le gouverneur, mais je crois qu'une déclaration d'un ministre vaut bien celle du gouverneur.

M. Delaetµ. - Vous pouvez vous tromper ; je vous prouverai tout à l'heure qu'à propos de la fondation Terninck vous vous êtes trompé du tout au tout.

MjBµ. - Si je me suis trompé comme tout à l'heure, l'erreur ne serait pas grande, car i'Almanach royal même m'a donné raison.

M. Delaetµ. - J'ai ici l'acte de fondation qui vaut mieux que l'Almanach.

MjBµ. - Nous désirons que la lumière se fasse et nous vous offrons le dépôt des pièces, mais quant à faire imprimer tous les dossiers je ne puis y consentir. Quand j'aurais fait imprimer quelques pièces on me dira : Ce n'est pas tout et pour vous satisfaire il faudrait finir par faire imprimer toutes les archives du département de la justice. M. de Theux dit qu'il faut deux ou trois ans pour plaider un procès de cette nature. (Interruption.)

Mon honorable prédécesseur, M. Tesch, a cité au Sénat plusieurs des faits dont j'ai entretenu hier la Chambre. Eh bien, les administrateurs spéciaux qui ont eu connaissance de ces faits ont-ils réclamé ? M. de Theux nous dit : Ces administrateurs sont des particuliers. Les accusations seront publiées dans les journaux, mais tout le monde ne les connaîtra pas. Est-ce sérieux ? Quand des faits pareils sont indiqués au sein du parlement, toute la presse s'en occupe.

Or, si vous parvenez, par la presse, à détruire l'exposé que j'ai fait, vous aurez atteint votre but.

Au surplus, si les administrateurs spéciaux trouvent que j'ai blessé la vérité, qu'ils indiquent les erreurs que j'ai commises ; si j'en ai réellement commis, je le reconnaîtrai. Mais ce que je ne puis admettre, c'est que vous prétendiez que ces faits que j'ai cités sont inexacts parce que les pièces ne sont pas imprimées.

MpVµ. - M. Pirmez a fait parvenir au bureau la proposition suivante :

« Je propose d'ajourner la discussion de l'incident à mardi, afin que d'ici là, M le ministre de la justice puisse mettre les pièces invoquées par lui à la disposition de la Chambre. »

Cette proposition est une proposition d'ajournement, et aux termes de l'article 24 du règlement la proposition d'ajournement suspend la délibération.

M. Dumortierµ. - Je demande la parole.

MpVµ. - Sur l'ajournement ?

M. Dumortierµ. - Je demande la parole sur la proposition d'ajournement et sur le fond.

- Des voix à gauche. - Pas sur le fond.

- D'autres voix. - Non, non.

M. Dumortierµ. - Vous voulez étouffer la discussion. (Interruption.) Vous nous refusez la communication des pièces, et quand nous protestons, vous étouffez la discussion. Voilà ce qui montre l'iniquité de votre cause.

MpVµ. - Je suis obligé de vous faire remarquer que les questions d'ajournement devraient d'abord être vidées, sauf à reprendre après la question du fond.

M. Dumortierµ. - Ce qui a excité au plus haut degré l'indignation des membres du parti auquel j'ai l'honneur d'appartenir, c'est que dans le long réquisitoire que vous avez entendu hier et que mon honorable ami, M. de Theux, a qualifié avec beaucoup de raison de véritable acte de diffamation... (Interruption.)

- Des voix. - A l'ordre !

MpVµ. - Si M. de Theux s'était permis cette qualification, je. lui aurais dit que nous ne devons pas nous diffamer les uns les autres et que si toute imputation de mauvaise intention est défendue, la diffamation est, à plus forte raison, interdite.

M. Dumortier, je vous engage à ménager vos expressions.

M. Dumortierµ. - Je les ménage, M. le président. Mais M. le ministre de la justice refuse d'indiquer le lieu où les faits se sont passés, la date, les noms des personnes, laissant ainsi planer sur tous les administrateurs spéciaux de la Belgique une accusation du vol. (Interruption).

Il a jeté ce mot que vous avez entendu encore tout à l'heure : Voilà où sont les voleurs ; il a ainsi, je le répète, fait planer l'accusation de vol sur tous les administrateurs des fondations.

MjBµ. - Je demande la parole pour un fait personnel.

- Voix à droite. - Vous ne pouvez être entendu maintenant pour un fait personnel.

MjBµ. - Je la demande pour un rappel au règlement.

- Des voix à droite. - Vous ne pouvez pas parler maintenant.

MjBµ. - Un membre a le droit de demander la parole pour un rappel au règlement surtout lorsqu'on prononce des paroles qui touchent à son honneur, et je trouve que, dans une assemblée délibérante, on doit accorder à un membre attaqué dans son honneur le droit de se défendre et de se défendre immédiatement.

M. Wasseigeµ. - Tout à l'heure.

- Des membres. - Non ! Non !

- D'autres membres. - Nous en appelons au règlement.

M. Dumortierµ. - Je demande si j'ai le droit de continuer.

MpVµ. - La parole est à M. le ministre de la justice pour un rappel au règlement.

MjBµ. - L'article 23 du règlement dit : « Il est toujours permis de demander la parole sur la position de la question pour rappeler au règlement ou pour répondre à un fait personnel. »

- Plusieurs membres. - Après que l'orateur a parlé.

MjBµ. - Le règlement défend de se livrer à des imputations attentatoires à l'honneur des membres de l'assemblée et non seulement le président a le soin de conserver la dignité de tous les membres, mais chaque membre a aussi ce devoir.

MpVµ. - C'est pour cela que j'ai relevé les paroles de M. Dumortier.

MjBµ. - L'honorable membre prétend... (Interruption.)

- Des membres. - Non ! non ! vous n'avez pas le droit de parler.

M. Dumortierµ. - Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. Coomansµ. - Et moi aussi.

MpVµ. - M. le ministre, vous aurez tout à l'heure la parole,

MjBµ. - M. le président, je ne crois pas qu'il soit permis à un membre de répondre à un orateur, en disant que son discours est un acte de diffamation. Je ne crois pas que ce soit là un langage convenable.

MpVµ. - Aussi, je vous ferai remarquer de nouveau que j'ai relevé ces paroles de M. Dumortier.

MjBµ. - Il ne les a pas retirées ; s'il les avait retirées, je n'aurais pas demandé la parole. Mais il ne l'a pas fait, et s'il ne les retire pas, je demande qu'il soit rappelé à l'ordre.

MpVµ. - M. Dumortier, vous avez attribué à M. de Theux des paroles qu'il n'a pas dites, maintenez-vous cette assertion ?

M. Dumortierµ. - M. le président, je crois que tout le monde, autour de moi, se rappelle avoir entendu l'honorable M. de Theux prononcer ces paroles.

MpVµ. - Non.

M. Dumortierµ. - Il ne s'agit pas ici d'une diffamation personnelle ; c'est une diffamation collective. Lorsqu'on vous signale des administrations et qu'on vient vous dire. : Voila où sont les voleurs, je demande si ce n'est pas une véritable diffamation.

MjBµ. - Cela ne vous regarde pas.

M. Dumortierµ. - Vous avez dit que les administrateurs des fondations étaient des voleurs et vous venez de le répéter. Eh bien, je vous déclare que ce que vous avez dit hier, vous n'oseriez pas le dire dans un lieu public, car vous auriez cent procès en calomnie. Vous vous êtes couvert du manteau de l'inviolabilité parlementaire pour avancer des faits et les qualifier de manière telle que vous ne pourriez pas tenir le même langage dans un lieu public.

MjBµ. - Ce n'est pas moi, c'est le vicaire de Villers qui a dit que le curé Dupuis était un voleur.

M. Dumortierµ. - C'est vous qui avez dit à propos des administrateurs des fondations de bourses d'étude : Voilà où sont les voleurs.

MjBµ. - En parlant de la fondation Franck.

M. Dumortierµ. - Eh bien, en qualifiant ainsi des hommes (page 710) honorables qui ont géré des administrations publiques, vous faites peser sur leur tête une accusation telle, que tous les administrateurs spéciaux seront sous le coup de cette accusation de vol. Je dis que si quelque chose devait être interdit et réprimé dans un parlement, ce sont de semblables accusations,

MpVµ. - M. Dumortier, rappelez-vous qu'on vous propose de dire tout cela et autre chose encore mardi prochain.

M. Dumortierµ. - M. le président sait que cette discussion est une chose défavorable à la chose publique. II veut la faire cesser, et je l'approuve.

MpVµ. - Je veux faire exécuter le règlement.

M. Dumortierµ. - Je le sais ; vous êtes trop louable pour que je méconnaisse vos intentions. Mais permettez-moi encore un mot de réponse.

MjBµ. - Avant tout, retirez vos expressions.

M. Dumortierµ. - Quoi ! vous venez dire que par votre discours vous avez dévoilé où étaient les voleurs. Vous faites peser sur tous les administrateurs spéciaux que vous avez indiqués, l'accusation de vol.

De pareilles choses ne sont pas tolérables dans une assemblée législative.

MpVµ. - Vous n'avez pas le droit de dire que M. le ministre a posé un acte de diffamation. Je vous demande de retirer ces mots, ou je vous rappellerai à l'ordre.

M. Delaetµ. - Il y a eu diffamation, et si l'on me laisse parler, je le prouverai.

MpVµ. - Je vais vous rappeler à l'ordre.

M. Wasseigeµ. - Nous en acceptons tous la responsabilité. Il faut donc nous rappeler tous à l'ordre !

- La droite entière. - Oui ! tous ! tous !

MpVµ. - M. de Theux, je vous demande si vous prenez sous votre responsabilité les mots qu'on vous prête.

- Des membres. - Ce n'est pas la question.

M. de Theuxµ. - M. le président, mon discours, tel que je l'ai prononcé, se trouvera aux Annales parlementaires ; je n'ai rien à y ajouter ni à en retrancher. Je n'y ai pas touché en quoi que ce soit, si ce n'est à deux ou trois mots qui avaient été irrégulièrement rapportés par le sténographie.

Mon discours est là, vous pouvez consulter la minute de la sténographie ; mais jamais je ne retirerai rien de ce que j'ai dit hier !

MpVµ. - Le bureau n'a pas compris ces mots ; sinon, il les aurait relevés.

Je demande à M. Dumortier s'il maintient ces mots.

M. Dumortierµ. - M. le président, je laisse les intentions de côté je n'ai pas entendu incriminer les intentions de M. le ministre, en répétant la qualification que mon honorable ami M. de Theux avait donnée à son discours. Mais je dis que lorsque après avoir prononcé un discours dans lequel on incrimine cinquante administrations, on vient dire : Voilà où sont les voleurs, il y a là un acte qui mérite la qualification que je lui ai donnée et que je maintiens.

Je mets les intentions de côté ; mais l'acte, j'ai le droit de le qualifier comme je l'ai fait.

MjBµ. - L'honorable M.Dumortier déclare qu'il n'a pas attaqué mes intentions ; et il me demande l'explication du mot « voleurs » que j'ai employé.

J'ai cité des faits ; j'ai cité l'affaire de la fondation Franck ; j'ai cité l'affaire du curé qui a emporté la caisse.

M. Thonissenµ. - Ce sont deux voleurs.

MjBµ. - J'ai cité cinq ou six faits du même genre ;- je n'appelle pas voleur un administrateur qui n'aurait pas tenu un registre.

L'honorable M. Dumortier avait dit que la loi des bourses était une loi de vol ; ce n'est pas moi, mais mon honorable collègue, M. le ministre des finances, qui, répondant à l'honorable M. Dumortier, a dit : Vous traitez la loi de 1864 de loi de vol, et nous vous disons où sont les voleurs...

Maintenant, l'honorable M. Dumortier emprunte un mot qu'aurait prononcé hier l'honorable comte de Theux en qualifiant mon discours d'acte de diffamation. Si hier j'avais pu attacher ce sens aux paroles de l'honorable M. de Theux, je les aurais relevées immédiatement. Aujourd'hui, M. de Theux n'ose pas affirmer que cela se trouve dans son discours ; si vous l'avez dit, vous l'avez pensé ; et si vous l'avez pensé, vous devez le dire.

Eh bien, je déclare que quand un membre vient dire à un ministre qu'il commet un acte de diffamation, ce membre attaque sa bonne foi ; il peut me dire que j'ai commis des erreurs en présentant les faits, mais il ne peut pas incriminer mes intentions, il ne peut pas prétendre que je suis venu ici avec des faits faux pour tromper l'opinion publique. (Interruption.)

Comment ! nous aurions commis un acte de diffamation et nous offrons de mettre sous vos yeux les pièces qui vous fourniront la preuve de tout ce que nous avons avancé. (Interruption.)

Du reste, je n'insiste plus pour le rappel au règlement. M. Dumortier est un ancien du parlement et a déclaré qu'il n'avait pas incriminé mes intentions

MpVµ. - L'incident est clos. La parole est continuée à M. Dumortier.

M. Dumortierµ. - Messieurs, je disais tout à l'heure que lorsque l'honorable M. Bara a prononcé ce long réquisitoire que je ne veux plus qualifier, puisque l'incident est clos, il n'avait pas fait connaître un seul nom d'une des personnes qui étaient coupables, pas un seul des lieux où les faits se seraient passés, pas une seule des dates ; qu'il avait dès lors procédé de manière à faire peser une criminalité sur tous les administrateurs dont il a été question dans la séance d'hier.

Or aujourd'hui qu'arrive-t-il ? On en est réduit à dire ce que vous venez d'entendre, qu'il y a 5 ou 6 faits coupables. Encore faut-il les examiner. Je suis contre les vrais coupables tout autant que vous.

Le curé qui est parti avec les fonds est coupable au même degré que le directeur du mont-de-piété de Louvain qui a disparu avec la caisse. Ce n'est pas parce que quelqu'un est curé, que j’empêcherai la justice de le poursuivre quand il a commis un délit.

Nous avons donc cinq ou six faits coupables, d'après ce que vous avez entendu tout à l'heure. Mais alors pourquoi venir accumuler ici toutes sortes de faits coupables et innocents et les qualifier de vol ? Pourquoi ce discours plein de réticences, dans lequel on ne met pas les intéressés à même de se défendre ? Car si un des intéressés croyait qu'il fût question de lui dans un des faits dénoncés, on s'est ménagé la ressourcé de lui dire : « Il ne s'agit pas de vous, il s'agit d'un de vos prédécesseurs. » Messieurs, c'est là un moyen extrêmement facile de déverser le blâme et l'injure sur toute une classe de citoyens, sans les mettre en état de se défendre. Eh bien, ce que nous avons voulu, ce que nous voulons encore, c'est que nous désirons mettre nos amis à même de réclame, de protester contre les accusations indignés dont ils ont été l'objet en masse.

J'ai suivi avec beaucoup d'attention le discours de M. le ministre de la justice, après avoir accumulé tous les faits dans une commune flétrissure, il est forcé aujourd'hui dédire : II n'y a que 5 ou 6 faits réellement criminels. Quant à ces faits, que je ne puis assez blâmer, il y a des tribunaux en Belgique pour les poursuivre.

Mais, à côté des mêmes faits, M. le ministre de la justice à incriminé une foule d'autres faits qui sont des actes légaux ou des actes de bonne administration.

Il a incriminé des faits que le gouvernement pose lui-même tous les jours et qui, quand ils émanent des administrateurs spéciaux sont transformés en des actes de dilapidation des revenus des fondations. Je vous en citerai un exemple qui m'est signalé à l'instant même.

On a dit qu'un élève d'une université avait obtenu 1,200 fr. de bourses, prélevées sur diverses fondations. Eh bien, pareille chose a été faite cent fois par le gouvernement.

On m'assure que l'élève Margery, de Louvain, a obtenu une bourse de 600 francs sur la fondation Milius dont les administrateurs sont MM. Peemans, Poullet et le doyen de la ville, et que le gouvernement aurait ajouté à cette bourse une autre bourse de 400 francs.

Pourquoi adresser des reproches à des administrateurs spéciaux, du chef de faits absolument analogues à ceux que vous posez vous-mêmes ? Est-ce logique ? est-ce loyal ?

Et pour remédier à ce qu'on appelle des abus, que fait-on ? Le gouvernement a nommé précisément MM. Margery et Peemans membres de la commission provinciale de bourses, chargée d'empêcher les abus dont le jeune Margery aurait été le bénéficiaire.

Des accusations qui n'ont aucun fondement se sont produits partout. A Tournai, un journal, la Vérité, que l'honorable M. Bara connaît parfaitement bien, avait dit que trois fondations dans cette ville avaient disparu ; dès lors on faisait croire que les administrateurs avaient mis en poche le capital de ces fondations ; eh bien, qu'y avait-il en réalité ? C'est que les administrateurs, par mesure d'économie, avaient réuni en une seule les trois fondations dont on avait parlé et qu'on prétendait être disparue.

(page 711) Voila comment on rend coupables des administrateurs spéciaux qui méritent, au contraire, toute l'estime publique.

Dans l'hospice des Alexiens, on a réuni 22 fondations en une seule. Direz-vous que les hospices de Bruxelles ont volé 21 fondations ?

Si le Courrier de l’Escaut n'avait pas révélé ces faits, il est très probable que M. le ministre de la justice les aurait compris dans son discours.

Pour les fondations qu'on dit avoir disparu et que je ne connais pas, il est possible qu'elles aient été aussi réunies à d'autres fondations par mesure d'économie ; il est assez probable que les faits qu'on nous dénonce comme criminels auront eu le même caractère que ceux qui se sont passés à Tournai.

Et puis, comptez-vous la confiscation révolutionnaire qui a fait disparaître une foule de fondations ?

MVµ. - Nous sommes dans la question d'ajournement.

M. Dumortierµ. - Oui, M. le président, mais c'est pour arriver à ma conclusion que j'énonce des faits,

Ce n'est pas tout.

M. le ministre est venu faire des reproches à deux administrations.

A l'une, il a reproché de ne pas distribuer des bourses, sans nous dire le motif pour lequel elle n'en distribuait pas. C'est faire croire que les administrateurs ont volé ces bourses. Or, qu'arrive-t-il ? Il y a des bourses qui ont été presque ruinées par la révolution française.

MjBµ. - J'ai dit qu'on thésaurisait.

M. Dumortierµ. - On thésaurisait les bourses ! Quel était le capital qu'on thésaurisait ? Il y a des bourses qui n'ont plus que 15 fr. de revenu. Que font les administrateurs ? Ils tâchent de refaire le capital pour avoir, au bout d'un certain nombre d'années, une bourse qui ait une valeur réelle, une bourse de 60 à 80 fr. Et les députations permanentes les louent d'en agir ainsi ; les actes de fondation mêmes les y obligent. C'est un acte de bonne administration, et vous érigez cela en crime !

Dans la fondation Brabant, au contraire, vous faites un crime aux administrateurs de ce qu'ils ne thésaurisent pas. Qu'avez-vous dit ? Votre discours n'est pas aux Annales, mais d'après l’Indépendance, et je crois que vos paroles y sont exactement rendues, vous avez dit : Les administrateurs de la fondation Brabant ont conféré des bourses à des personnes qui n'y avaient pas droit, sous prétexte que les titulaires étaient absents.

Ainsi, d'une part on veut que les administrations thésaurisent, et d'autre part on veut qu'elles ne thésaurisent pas.

Messieurs, la fondation Brabant est une fondation très riche qui a été créée il y a près de 300 ans, par un chanoine natif de la Hesbaye. Il y appelle ses parents et les habitants de la Hesbaye. Mais, depuis 300 ans, les parents ont perdu leur filiation ; plus personne ne réclame de bourses et vous voulez qu'on thésaurise indéfiniment une fondation qui a des revenus considérables !

Ainsi là où le capital est assez considérable pour donner des bourses, vous blâmez les administrations d'en avoir donné ; vous faites entendre qu'elles ont mal géré. Et lorsque la bourse est ruinée et que l'intérêt public exige qu'on thésaurise, vous voulez qu'on les donne. Mettez-vous d'accord avec vous-même.

Je pourrais vous parler encore d'autres faits. Je ne cite que ceux qui sont venus à ma connaissance, et en l'absence de toute espèce de documents. Je veux tirer de là la preuve que la proposition de l'honorable M. Pirmez, quoique faite évidemment dans d'excellentes intentions, laisse les accusés sans défense.

De quoi s'agit-il ? Il s'agit d'administrateurs spéciaux. Ce sont eux qui sont ici en cause. Ce n'est pas nous, ce sont nos amis qui sont en cause. Or, lorsque les administrateurs spéciaux que l'on accuse de vol ne sont pas nommés, lorsqu'on ne donne ni les dates, ni les lieux, comment voulez-vous que les administrateurs spéciaux nous fournissent des renseignements d'ici à mardi prochain ? On déposera demain les pièces. Mais demain c'est samedi ; dimanche et lundi il n'y aura pas de séance et après ces jours de congé, la Chambre reviendra sans avoir examiné un seul document ? Et vous voudriez que l'on discute ? Cela n'est pas sérieux.

Ce que vous devez faire, c'est donner aux intéressés la possibilité et le temps de fournir leur justification, et pour cela il faut imprimer avant tout et les noms des prétendus coupables, et les noms des lieux et les dates, et pour cela il ne faut pas longtemps, une seule feuille de papier suffit. L'impression des pièces viendra plus tard, si elle est nécessaire. Lorsque les personnes qui sont incriminées sauront que c'est d'elles qu'il s'agit, elles nous fourniront des renseignements. Mais mettez-les à même de fournir ces renseignements ; nous ne demandons pas autre chose.

Ainsi, je demande positivement que M. le ministre fasse imprimer les noms des personnes incriminées, les dates des actes incriminés, les lieux où les fondations ont été volées.

Celui qui est accusé doit avoir connaissance de l'accusation portée contre lui. Nous ne sommes pas ici devant un tribunal de Venise. Celui qui est accusé doit savoir de quoi il est accusé et celui qui accuse doit savoir à l'occasion de quel fait il accuse.

Or, il y a ici une accusation anonyme qui pèse sur tous les administrateurs spéciaux, et il nous est impossible de les justifier comme il leur est impossible à eux-mêmes de se défendre. Au moyen de cette accusation anonyme, tous les administrateurs spéciaux depuis cinquante ans sont mis en cause. Vous allez les faire montrer au doigt dans toute la Belgique, comme des larrons, comme des voleurs.

Eh bien, leur honneur exige qu'ils se défendent et qu'ils fassent parvenir ici la vérité.

Je suis convaincu que M. le ministre est de bonne foi. Mais ceux qui ont fait le travail ont-ils tous été de bonne foi comme lui ? Il prend ce travail sous sa responsabilité ; c'est trop de complaisance. Vous ne pouvez prendre sous votre responsabilité les actes d'autrui, lorsqu'ils dénoncent des faits que demain vous regretterez peut être d'avoir dénoncé.

Quant à moi, je suis convaincu que les personnes incriminées, lorsqu'elles sauront que c'est d'elles qu'il s’agit, nous feront parvenir des pièces pour prouver que tout cet échafaudage ne tient pas, et que si cinq ou six personnes sont coupables, il n'y a eu en général que des faits de bonne administration, des faits qui ont été approuvés par les députations permanentes, des faits irréprochables sous tous les rapports.

M. Delcourµ. - Je me proposais d'aborder le débat au fond. Mais il paraît que la Chambre n'est pas disposée à m'entendre maintenant.

Cependant j'ai des observations très graves à présenter ; j'ai à répondre aux allégations de M. le ministre de la justice relatives aux fondations de Louvain. Je déclare ici, car je désire que ma déclaration soit publique, que les appréciations de M. le ministre renferment beaucoup d'erreurs : mais il est trop tard pour aborder la question.

- Plusieurs voix. - Non ! non ! Parlez.

M. Delcourµ. - Si vous voulez que j'aborde la discussion, je le ferai immédiatement. Mais comme la proposition de l'honorable M. Pirmez tend à remettre le débat à un autre jour, je pense qu'il est préférable d'attendre pour ne point fatiguer la Chambre.

- Des membres. - Mais non ! Parlez !

M. Delcourµ. - Eh bien, puisque vous le voulez, je suis prêt à discuter avec vous.

Cependant, permettez-moi, avant d'ouvrir le débat, de relever les dernières paroles que vient de prononcer l'honorable ministre de la justice au sujet des rapports des députations permanentes. J'avoue, messieurs, que j'ai été profondément affligé en entendant M. le ministre insinuer que nous ne devons accorder qu'une légère confiance à des rapports officiels, présentés en vertu de la loi.

MjBµ. - Je n'ai pas dit cela.

M. Delcourµ. - C'est le fond de votre pensée. Vous avez parlé, M. le ministre, du rapport de la députation provinciale de Liège de l'année 1854 ; mais vous avez eu soin de ne point citer les rapports des années suivantes.

Il est vrai que la députation de Liège se plaint, dans son rapport de 1844, de l'inefficacité de la législation existante pour prévenir les abus. « Toutefois dans notre province, continue le rapport, ces fondations semblent généralement administrées d'une manière satisfaisante sous le rapport financier. » « Semblent », dit M. le ministre ; la députation n'affirme donc rien. Je réponds par les paroles mêmes de la députation de Liège, tirées de son rapport de 1856 :

« L'examen attentif que nous faisons nous donne lieu de croire que la gestion des administrations des fondations de bourses continue à être satisfaisante. » J'ai pris le texte dans le discours que l'honorable M. Tesch a prononcé au Sénat, dans la discussion de la loi des fondations de bourses.

En 1857, la même députation, persévérant dans la même appréciation, ajoute : « Les comptes des fondations nous ont été régulièrement soumis et nous les avons apurés. » Elle regrette toutefois que les comptes ne lui parviennent qu'après l'expiration du délai fixé par l'article 6 de l'arrêté du 2 décembre 1825.

Ainsi, messieurs, la députation de Liège reconnaît avoir examiné avec soin les comptes qui lui ont été soumis ; elle reconnaît, en 1854, que les fondations semblent généralement administrées d'une manière satisfaisante, sous le rapport financier ; dans son rapport de 1856, elle confirme cette appréciation et déclare que la gestion des administrations continue à être satisfaisante, et l'honorable ministre ose invoquer ce témoignage dans l'intérêt de sa cause ! Je dis, moi, qu'une cause est perdue, lorsqu'on est réduit à la défendre avec de pareils moyens.

(page 712) J’arrive maintenant à la proposition que nous vous avons faite. Nous demandons au gouvernement un rapport général sur l'administration des bourses et l'impression des pièces à l'appui.

Nous le demandons afin de pouvoir contrôler les faits avancés par M. le ministre, afin de pouvoir les soumettre à une discussion sérieuse et approfondie. Nou, messieurs, je ne reculerai pas devant le débat, car je n'hésite pas à dire que la loi de 1864 est une loi injuste.

MpVµ. - On ne peut pas dire qu'une loi du pays est injuste.

M. Delcourµ. - Comment ! vous voulez m'empêcher de dire qu'une loi est injuste, quand, tous les jours, du haut de la chaire, j'enseigne à mes élèves que telle ou telle disposition du Code civil est contraire au droit naturel.

MpVµ. - M. Delcour, avez-vous dit que la loi de 1864 était une injure pour une partie de la Chambre ? Si j'avais bien compris, vous devriez retirer cette expression.

M. Delcourµ. - M. le président, j'ai dit que la loi de 1864 est injuste ; dans ma pensée elle consacre une injustice, et vous voudriez que je ne vinsse pas le déclarer à la Chambre !

M. Coomansµ (pour un rappel au règlement). - M. le président, vous venez d'engager un de mes honorables amis à rétracter la qualification d'injuste...

MpVµ. - J'avais cru entendre que M. Delcour disait que la loi de 1864 injuriait une partie de la Chambre ; j'ai demandé à M. Delcour si je l'avais bien compris.

M. Coomansµ. - Mon honorable ami a qualifié la loi de 1864 d'injuste et notre honorable président a trouvé cette qualification exorbitante. (Interruption.)

MpVµ. - J'avais cru d'abord que M. Delcour disait que c'était une loi qui injuriait une partie de la Chambre. J'ai voulu dire qu'une loi injuste doit être obéie, jusqu'à ce qu'elle soit légalement changée ; ce qui est toujours possible.

M. Coomansµ. - Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'une loi est toujours juste et je n'ajouterai qu'un seul mot comme rappel au règlement Le règlement doit être le même pour tous ; or si à gauche on peut qualifier d'injuste une loi, à droite on peut le faire aussi ; je ne pense pas que M. le président soit autorisé à nous faire reconnaître que toutes les lois sont justes. Des ministres ici ont qualifié d'injustes et même d'odieuses des lois en vigueur, pratiquées par eux-mêmes.

MpVµ. - J'ai demandé à M. Delcour si je l'avais bien compris. D'après son explication je n'ai pas insisté.

M. Delcourµ. - Messieurs, je respecte trop la Chambre, pour me permettre à son égard la moindre insinuation. Je n'adresserai jamais d'injure à aucun de mes collègues, et jamais je ne me permettrai une parole inconvenante envers le parti auquel je n'appartiens pas ; mais je dis aussi que j'userai de mon droit ; comme jurisconsulte et comme citoyen, j'ai le droit d'émettre, dans cette enceinte, une opinion franche et loyale sur le mérite ou l'équité d'une loi.

Je reviens à la proposition de mon honorable ami, le comte de Theux. Je l'ai signée, parce que je la considère comme nécessaire en présence de la tournure que la discussion a prise. Que voulons-nous ?

M. le ministre de la justice dit :

« Je dois justifier la loi de 1864, je ne puis le faire qu'en citant les abus que présentait l'ancienne administration. »

Je reconnais ce droit à M. le ministre ; je ne viens pas le contester, mais je demande, à mou tour, qu'on nous mette à même de contrôler les faits articulés ; je demande qu'on nous permette de les examiner consciencieusement, et après avoir pris connaissance des pièces. Il faut que nous puissions dire à l'honorable ministre : Oui, vous avez raison sur tel point, mais vous êtes dans l'erreur sur tel autre point. Notre demande est-elle donc exorbitante ? Elle l'est si peu, messieurs, que je suis profondément convaincu qu'une foule d'erreurs ont été commises par l'honorable ministre.

Quoique j'aie les mains pleines de preuves, je ne citerai qu'un seul fait pour le moment.

M. le ministre a cherché à mettre en suspicion l'indépendance des ecclésiastiques chargés d'administrer certaines fondations de bourses annexées aux anciens collèges de l'université de Louvain. Il a parlé, à ce sujet, d'une transaction faite par les fondateurs de bourses avec la ville de Louvain. Les administrateurs ecclésiastiques n'ont voulu signer cette transaction, a dit l'honorable ministre, qu'après avoir consulté leur ordinaire.

Messieurs, je connais cette affaire dans tous ses détails ; j'ai été chargé par les administrateurs de concourir avec eux à la négociation de cette importante affaire ; j'ai même minuté, en partie, le projet d'acte.

Eh bien, je n'hésite pas à déclarer que cette transaction est un des actes les plus honorables, les plus avantageux qui aient été posés pour les fondations de bourses d'étude depuis leur rétablissement en exécution des arrêtés de 1818 et de 1823.

En effet, voici ce qui s'est passé.

Les fondations de bourses avaient des créances considérables à charge de la ville de Louvain. De commun accord avec l'administration communale, les fondations engagèrent un procès au sujet de l'un de ces créances, en déclarant que la solution de toutes les autres affaires dépendrait de la décision judiciaire qui interviendrait.

Le procès fut donc engagé ; il suivit tous les degrés de juridiction.

Les fondations obtinrent gain de cause.

Les sommes dues par la ville de Louvain étaient très considérables. Depuis, très longtemps les arrérages des rentes n'avaient plus été payés ; les finances de la ville étaient gênées, car la somme due s'élevait à plusieurs centaines de mille francs.

J'ignore si les administrateurs ecclésiastiques sont allés consulter leur évêque ; mais ce que j'affirme, c'est qu'ils ont été les premiers à signer la transaction.

MjBµ. - Je ne les ai pas blâmés d'avoir signé.

M. Delcourµ. - Voilà la transaction à laquelle M. le ministre a fait allusion. Lorsqu'il s'agit de conclure un acte qui devait avoir de si graves conséquences, qui devait entraîner le sacrifice d'une somme des plus considérables, trouvez-vous extraordinaire que les ecclésiastiques, qui veulent mettre leurs consciences à l'aise, aillent consulter leur chef immédiat ? Ceux d'entre vous qui ont pris part à une administration publique quelconque, n'ont-ils pas eu recours à des avocats, à des hommes de confiance, pour s'éclairer avant de prendre une résolution grave ?

Voilà, messieurs, comment les faits les plus innocents, comment les faits les plus légitimes deviennent des abus.

J'ai donc le droit de dire que M. le ministre de la justice a commis de graves erreurs dans l'appréciation des faits qu'il a cités dans là séance d'hier.

C'est parce que j'en suis profondément convaincu que je me suis rallié à la proposition de mon honorable ami. Si la Chambre la repousse, je déclare que vous nous mettrez dans l'impossibilité de relever des erreurs manifestes, dans l'impossibilité de repousser les allégations qu'on nous oppose.

MjBµ. - L'honorable membre vient de dire que j'ai, à l'égard des collateurs de certaines bourses de Louvain, lancé des accusations téméraires et non fondées.

Mes explications vous prouveront que je n'ai rien à retirer de ce que j'ai dit.

J'ai dit que les évêques exerçaient sur les collateurs et les administrateurs ecclésiastiques un contrôle supérieur et que l'administration avait eu connaissance de ce fait par diverses pièces.

A ce propos, j'ai parlé d'un procès qui avait eu lieu à Louvain au sujet d'arriérés et j'ai dit qu'une transaction était intervenue. Ai-je blâmé la transaction ? Aucunement.

M. Coomansµ. - Où est le grief, alors ?

MjBµ. - J'ai dit : Les administrateurs ecclésiastiques ont déclaré que cette transaction excellente, non seulement à leurs yeux, mais aussi aux miens, si vous voulez, ils ne pouvaient y consentir sans une permission spéciale de leur évêque.

Ne venez donc pas travestir les faits. Je n'ai pas blâmé la transaction. L'honorable M. Delcour me prête un langage que je n'ai pas terni ; les manuscrits sont là, on peut les vérifier ; j'ai dit que l'évêque exerçait un contrôle supérieur, et j'ai cité la conduite des administrateurs collateurs des collèges de Louvain.

M. Coomansµ. - Ce n'est véritablement pas une proposition sérieuse que celle qui nous est faite d'attendre jusqu'à lundi pour lire un tas énorme de documents (interruption), qualifié d'énorme par M. le ministre lui-même, et puis de discuter mardi.

Comment les 116 membres de cette assemblée examineraient-ils tour à tour, en quelques heures, cette indigeste paperasse ?

Messieurs, il faut être tout à fait de bonne foi et s'expliquer très nettement dans les circonstances graves.

J'ai la conviction que mes honorables amis désirent une discussion très approfondie des faits autant que des principes. Moi je n'éprouve pas le besoin de me livrer à ce débat, je n'y ai jamais pris part, et je vous promets d'avance d'y rester étranger ; mais enfin, si vous éprouvez, vous, le besoin de revenir encore à cette question ultra clérico-libérale qui (page 713) parait si féconde en ajournements pour ne pas dire en manœuvres et en intrigues parlementaires, faites-le.

Mais, je vous en supplie, occupons-nous au moins encore pendant 10 jours de la question véritablement nationale qui nous est enfin soumise, de l'extension du droit de suffrage, de la restitution au peuple de ses prérogatives naturelles et constitutionnelles.

C'est, je crois, le dernier des soucis de l'immense majorité de nos compatriotes, je leur attribue ce bon sens, que de nous voir nous livrer encore pendant je ne sais combien de séances à une discussion rétrospective sur les bourses d'étude ; ce que l'immense majorité de nos compatriotes désire, c'est que nous nous occupions des véritables intérêts nationaux, dont plusieurs sont en souffrance.

Je vous déclare que si la réforme électorale n'avait pas été à l'ordre du jour, j'aurais déjà quitté mon banc pour ce trimestre-ci.

Le public attend avec impatience une solution du problème électoral.

M. Hymansµ. - Allons donc !

M. Coomansµ. - Mais n'injuriez pas la nation belge, ne lui dites pas qu'elle est indifférente aux projets de réforme électorale ; il n'y a rien qui la regarde d'aussi près, car cette réforme lui amènera, j'espère, une réforme des impôts et peut-être une réforme du parlement, ce dont je ne serais pas fâché. (Interruption.) Donc je dis nettement ma pensée : intervertir notre ordre du jour en faveur du libéro-clérical au lieu de continuer à discuter la question électorale que nous avons abordée, ce n'est pas remplir notre devoir, c'est faillir à une promesse solennellement faite au pays.

Il est clair que si vous entamiez la discussion des bourses mardi ou vendredi, nous pouvons dire adieu à la réforme électorale. Après le clérico-libéral, nous nous serons fortement passionnés et fatigués, et nous dirons tous : « Allons-nous-en » ; et qui sera dupe ? La nation. Réformons-nous. Ce débat-ci est pour moi la preuve la plus claire de la nécessité d'une réforme électorale.

Je demande que les pièces soient imprimées ou, par économie, déposées sur le bureau, mais pendant un temps assez long pour qu'une cinquantaine d'entre nous, au moins, puissent les examiner. Je suppose volontiers que la moitié de la Chambre ne les examinera pas. Une fois que le magister dixit, c'est inutile. Mais il y a une cinquantaine de membres ici (je ne suis pas du nombre) qui voudront examiner les pièces à fond. Il faut leur donner le temps nécessaire. Je vous demande comment vous partagerez une centaine de documents volumineux entre cinquante membres pendant deux ou trois heures ? C'est impossible, c'est ne pas vouloir de discussion. (Interruption.)

Vous nous démontrerez ce que vous voudrez, mais après la réforme électorale. (Interruption.) Au lieu de nous réunir à deux heures, réunissons-nous à midi, ayons en outre, s'il le faut, des séances du soir, mais terminons l'examen du projet de réforme. (Nouvelle interruption.)

Si vous êtes impatients d'aborder l'incident relatif aux bourses d'étude, vous avez un moyen de vous satisfaire, aidez-nous à voter promptement la réforme. Mais rejeter ma proposition, c'est justifier le soupçon très répandu (dont je veux bien accepter une certaine responsabilité), que l'incident des bourses n'est produit que pour empêcher le vote de la réforme électorale.

J'ai, quant à moi, d'autant plus lieu de le croire, que d'honorables membres de la gauche ont insisté auprès de quelques-uns de nos amis pour nous faire attacher le grelot de l'ajournement. Je félicite mes honorables amis de n'avoir pas été assez innocents pour se laisser prendre à cette petite manœuvre. On n'a pas osé proposer directement l'ajournement da la réforme, on vient le proposer indirectement : mais je le déclare, pour ma part, la discussion clérico-libérale la plus splendide ne me consolerait jamais de l'ajournement, peut-être de l'enterrement de la réforme électorale.

Je fais la proposition formelle de fixer la discussion sur les bourses d'étude à la suite de l'ordre du jour, c'est-à-dire après le vote sur la réforme électorale.

Les voleurs n'y gagneront rien, si voleurs il y a. Je m'offre à me joindre à vous pour en faire justice, quels qu'ils soient.

- Un membre. - Et les voleurs en soutane ?

M. Coomansµ. - Vous n'avez qu'à les désigner. Si les voleurs portent soutane, ils méritent d'être plus sévèrement punis que les autres.

Je trouve qu'un prêtre voleur est dix fois plus coupable qu'un voleur laïque. Nous attacherons tous les voleurs au pilori de l'infamie publique. M. le ministre de la justice fera encore autre chose, s'ille veut, il les fera poursuivre en justice. (Interruption.) Qui donc a pu croire qu'on veuille ici accorder aux prêtres le privilège de l'impunité ? Ma doctrine est celle du catéchisme ; le prêtre coupable est plus coupable que le laïque.

Aucun voleur n'est de nos amis et je vous avoue que j'éprouve une indignation pénible de devoir nous défendre contre cette perpétuelle insinuation que nous sommes les avocats des voleurs. Les voleurs seront punis de même que les calomniateurs. Mais attendons 8 jours, attendons 15 jours ; vous avez attendu des années pour les poursuivre, attendez quelques jours encore pour les flétrir et surtout laissez-leur le temps de se défendre.

Donc la question des bourses, vous la poserez encore, je le veux bien, mais après la réforme électorale.

MpVµ. - M. Coomans, veuillez faire parvenir votre proposition au bureau.

M. Pirmezµ modifie sa proposition en substituant au mot « mardi » celui de « vendredi ».

MpVµ. - La parole est à M. Nothomb.

M. Nothombµ. - J'y renonce, M. le président.

MpVµ. - La parole est alors à M. Funck.

M. Funckµ. - J'y renonce également.

- Des voix à gauche. - Votons.

MpVµ. - Personne ne demandant plus la parole, je vais mettre aux voix la proposition de M. Pirmez.

M. Coomansµ. - La mienne doit avoir la priorité, M. le président.

M. Pirmezµ. - L'honorable M. Coomans vient de vous dire tout ce qu'il éprouve de pénible à se voir en position d'être soupçonné d'être l'avocat des voleurs ; il doit donc comprendre combien il est plus pénible d'être attaqué tous les jours pendant des mois non seulement comme les avocats de voleurs, mais comme voleurs. C'est pourtant la position qui nous est faite...

M. Coomansµ. - Tout le monde sait bien que vous n'avez rien volé du tout.

M. Pirmezµ. - C'est possible, mais on n'accuse pas moins la majorité d'être composée de voleurs de bourses.

La proposition que j'ai déposée tend à faire vider l'incident avant la séparation des Chambres, celle de M. Coomans aurait pour conséquence d'empêcher que la discussion ait lieu avant la fin de la session. (Interruption) Vous savez fort bien que s'il faut imprimer le rapport il sera impossible de discuter avant la séparation.

M. Coomans a une grande impatience de discuter le projet de réforme électorale, mais cette réforme ne peut être appliquée pour les prochaines élections.

- Une voix à droite. - Et pour l'année prochaine.

M. Pirmezµ. - Pour l'appliquer l'année prochaine seulement, nous avons tout le temps de la discuter, tandis que le débat qui s'agite en ce moment est un débat politique qui doit être épuisé. Je suis très surpris de votre impatience. (Interruption.)

Permettez ; tout à l'heure M. de Theux a fait dépenser trois quarts d'heure à M. Nothomb par la lecture d'une pièce que l'honorable membre avait déjà lue dans la discussion des bourses et qu'il suffisait de mettre au Moniteur.

M. Ortsµ. - Elle y est déjà.

M. Pirmezµ. - Nous aurions consenti à la réimpression.

M. Coomansµ. - Il fallait le dire.

M. Pirmezµ. - Nous l'avons dit, et l'honorable M. Coomans, qui a interrompu tous les orateurs de la gauche pour demander de revenir à la discussion de la réforme électorale a eu bien soin de ne pas interrompre cette lecture.

M. de Theux a manifesté son étonnement de ce que nous n'ayons pas écouté avec intérêt cette fastidieuse lecture, alors que nous avions écouté avec intérêt le discours de M. le ministre de la justice. Si M. Nothomb, au lieu de lire cette pièce que nous connaissons tous, avait fait un discours, nous l'aurions écouté comme nous l'écoutons toujours. Sa lecture n'a du reste pas plus été écoutée sur vos bancs que sur les nôtres.

On nous dit qu'on n'aura pas le temps d'examiner ces nombreux faits. J'admire la contradiction dans laquelle on tombe à chaque instant : quand on répond, on nous dit que M. le ministre n'a cité que quelques faits isolés ; quand on ne veut pas répondre, on nous dit qu'il y a une avalanche de faits.

D'ici à vendredi on aurait parfaitement le temps d'examiner ces faits. La preuve qu'on pourrait le faire, c'est que déjà MM. Dumortier et Delcour en ont discuté plusieurs.

M. de Theux a parfaitement exposé la situation, dans une petite anecdote qu'il nous a racontée.

L'honorable M. de Theux vous a dit qu'un avoué avait consacré bien (page 714) des années à l'examen d'un procès, et que son fils, au bout de quelques jours, l'avait terminé, ce qui avait beaucoup indigné l'ancien avoué.

Ce que l'honorable M. de Theux poursuit avec sa proposition, c'est de faire comme le père qui éternisait le procès, et ce que je vous propose de faire, c'est d'imiter le fils, c'est d'en finir. (Interruption.) La Chambre a à décider, si elle veut faire comme le père ou comme le fils. Or comme je suis bien convaincu que les clients de l'avoué en question se sont très bien trouvés de la solution donnée par le fils au procès, je suis convaincu que le pays se trouvera très bien aussi de la proposition que je viens de faire.

- Plusieurs membres. - La clôture !

M. de Theuxµ. - Je demande la parole sur sa question de priorité.

La proposition de l'honorable M. Coomans doit évidemment avoir la priorité. La discussion de la réforme électorale était commencée, et c'est véritablement un fait exorbitant qu'au milieu d'une discussion aussi importante, on vienne introduire ici la question de la bonne ou de la mauvaise gestion des administrateurs de fondations de bourses que nous ne sommes pas à même d'apprécier en ce moment, que nous ne pourrons apprécier qu'après avoir examiné les accusations produites, après les avoir communiquées aux intéressés, et après avoir reçu d'eux tous les éclaircissements.

Je demande à tous les hommes sincères si la proposition de M. Pirmez est sérieuse et de nature à faire justice aux personnes incriminées. Je dis que non.

Je dis, messieurs, qu'entre l'intérêt que le pays peut avoir de connaître si quelques administrateurs ont abusé, et l'intérêt que le pays a de connaître, avant les élections, quelle est l'opinion du parlement sur la réforme électorale, il y a une distance immense, une distance incommensurable ; voilà l'état de la question, et je demande avec l'honorable M. Coomans que la question électorale soit reprise demain à l'ouverture de la séance et soit continuée à toute fin. Il est inouï qu'une question de cette importance ait été interrompue par un incident de la nature de celui-ci.

L'honorable M. Pirmez dit qu'il s'agit de choisir entre l'avoué père et l'avoué fils.,

Il s'agit de choisir entre deux intérêts, et le plus grand, le plus sérieux celui qu'il faut mener à bonne fin, c'est l'intérêt qu'a le pays de voir quelle est l'opinion du parlement sur la réforme électorale.

Il existe de l'agitation (interruption), des meetings sont convoqués Le pays doit savoir si le parlement veut la réforme électorale et dans quelle mesure il la veut, Voilà le véritable intérêt.

- La discussion est close.

MpVµ. - Il y a deux propositions d'ajournement. Celle de l'honorable M. Coomans doit être mise la première aux voix comme étant la plus étendue.

Elle est ainsi conçue ;

« Je propose de reprendre l'incident après la discussion de la réforme électorale. »

- L'appel nominal est demandé.

Il est procédé au vote par appel nominal sur la proposition de M. Coomans.

MiVDPBµ. - Je dois, avant la proclamation du résultat du vote, signaler un fait des plus graves. Lorsqu'on a appelé le nom de M. Beeckman, j'ai entendu répondre : Oui. Quand on a appelé le nom de M. de Borchgrave, j'ai entendu répondre : Oui.

M. Coomansµ. - Voyez le résultat.

MiVDPBµ. - Laissez-moi parler. C'est une question de bonne foi pour tous les partis. Je suis monté au bureau et j'ai remarqué que M. le secrétaire marquait oui au nom de M. Beeckman. Or, je constate que l'honorable M. Beeckman n'était pas présent.

MpVµ. - Vous comprenez que nous ne pouvons distinguer, an milieu du bruit, l'identité des personnes. Nous notons les oui et les non, comme ils nous arrivent.

M. Jacobsµ. - C'est moi qui, lorsque fut prononcé le nom de M. Beeckman, le premier des membres de la droite appelé à voter, prenant son silence pour une hésitation ai soufflé un « oui ». M'étant aperçu de l'absence de ce collègue, sorti peu d'instants auparavant, j'ai demandé aux membres qui siègent auprès de moi si mon « oui » avait été entendu et recueilli.

M. Delaetµ. - Je vous ai répondu que non.

M. Jacobsµ. - On m'a rassuré à cet égard, et j'avais d'autant moins de scrupule que deux membres de la gauche, assis à côté de moi, n'avaient pas songé à réclamer ; sinon j'aurais été le premier à signaler l'erreur. Tout mes collègues me savent incapable de tenter de voter pour un autre.

M. Wasseigeµ. - Je ne m'y suis pas trompé ; j'ai recueilli les votes et je n'ai pas celui de M. Beeckman ; il y a quarante-sept voix contre quarante-sept, et c'est le résultat que j'ai immédiatement proclamé sur nos bancs.

MpVµ. - Il résulte du dépouillement qu'il y a eu 47 voix contre 47 et que la proposition de M. Coomans n'est pas adoptée.

Ont voté pour la proposition :

MM. Coomans, Couvreur, Debaets, de Conninck, Delaet, Delcour, de Liedekerke, de Mérode, de Muelenaere, de Naeyer, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, de Woelmont, d'Hane-Steenhuyse, Dumortier, Goblet, Grosfils, Guillery, Hayez, Jacobs, Janssens, Julliot, Landeloos, Le Bailly de Tilleghem, Le Hardy de Beaulieu, Moncheur, Notelteirs, Nothomb, Reynaert, Rodenbach, Royer de Behr, Schollaert, Snoy, Tack, .Thibaut, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Overloop, Van Wambeke, Verwilghen, Vilain XIIII et Wasseige.

Ont voté contre la proposition :

MM. Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Bricoult, Carlier, Crombez, David, de BailIet-Latour.de Bast, de Brouckere, de Florisone, de Kerchove, de Macar, de Moor, de Rongé, Dewandre, Dolez, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Hymans, Jacquemyns, Jamar, M. Jouret, Lesoinne, Lippens, Mascart, Moreau, Mouton, Muller, Orban, Orts, Pirmez, Rogier, Sabatier, Tesch, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vleminckx, Warocqué, Allard et Ernest Vandenpeereboom.

Je crois qu'il est inutile d'insister sur cet incident.

Je mets maintenant aux voix la proposition de M. Pirmez.

- Des membres. - L'appel nominal !

M. de Theuxµ (sur la position de la question). - Il est bien entendu qu'en cas d'adoption de la proposition de d'honorable M. Pirmez, la Chambre reprendra demain la discussion du projet de loi sur la réforme électorale. (Oui ! oui !)

MpVµ. - L'ordre du jour sera suivi.

M. Coomansµ (sur la position de la question). - Je fais la proposition que nous nous réunissions à midi.

MpVµ. - C'est ppe autre proposition. Vous pourrez la faire tout à l'heure.

M. Debaetsµ. - Je demande la parole pour une motion d'ordre.

MpVµ. - Ce n'est plus sur la position de la question ; vous ferez votre motion d'ordre plus tard.,

M. Dumortierµ (sur la position de la question). - J'ai un amendement à présenter à la proposition de l'honorable M. Pirmez.

MpVµ. - C'est une autre proposition.

M. Dumortierµ. - Pardon, c'est le complément de la proposition de l'honorable M. Pirmez.

MpVµ. - La proposition de M. Pirmez, comme motion d'ajournement, doit marcher la première ; puis viendront les autres propositions, la vôtre, celles de M. de Theux.

- Des membres. - L'appel nominal.

M. Dumortierµ (sur la position de la question). - La proposition de l'honorable M. Pirmez contient deux choses : une proposition' d'ajournement et une proposition de dépôt de pièces ; je ne m'oppose pas à l'ajournement, mais je demande à compléter la motion de l'honorable M. Pirmez, en ce qui concerne le second point.

MpVµ. - Vous ferez cette proposition, après le vote sur la motion de M. Pirmez.

- Des membres. - Aux voix !

M. Dumortierµ (sur la position de la question). - Je demande la division de la proposition de M. Pirmez.

MpVµ. - La proposition de M. Pirmez n'est pas divisible.

Je mets cette proposition aux voix.

M. Dumortierµ. - Je demande la parole pour un rappel au règlement.

L'article 25 du règlement porte :

« Dans les questions complexes, la division est de droit lorsqu'elle est demandée. » .

Or, je demande la division sur la proposition de M. Pirmez.

MpVµ. - Mais cette proposition n'est pas complexe.

(page 715) MfFOµ. - Messieurs, il me semble que l'on peut, sans difficulté, faire droit à l'observation de l'honorable M. Dumortier. Ne perdons pas de temps sans nécessité. La division consiste en ceci : Le dépôt des pièces d'une part, et d'autre part, la fixation du jour où la discussion sera reprise. Eh bien, le dépôt des pièces n'est pas contesté. Décidons dès lors incontinent que ce dépôt aura lieu.

M. Dumortierµ. - Je ne m'opposerai pas au dépôt des pièces, si vous vous ralliez à la proposition que je fais, de nous donner immédiatement la liste nominative des personnes dont il s'agit dans le discours de M. le ministre de la justice. Si vous ne vous y ralliez pas, c'est que vous voulez empêcher la défense.

MfFOµ. - Messieurs, l'honorable M. Dumortier a demandé la parole pour un rappel au règlement ; et, se fondant sur le règlement, il a demandé la division de la proposition de l'honorable M. Pirmez. J'ai dit qu'on pourrait consentir à cette division.

Mais, maintenant l'honorable M. Dumortier vient demander que la Chambre vote sur une tout autre proposition ; en cela, il est en dehors du règlement.

Si l'honorable membre a une proposition à nous soumettre, qu'il la dépose...

M. Dumortierµ. - Elle est faite.

MfFOµ. - Eh bien, la Chambre entendra tout à l'heure vos développements et statuera sur cette proposition nouvelle.

Il ne s'agit en ce moment que de la proposition de l'honorable M. Pirmez ; on a demandé la division, qui, pour le dire en passant, est parfaitement inutile ; mais enfin on l'a réclamée, et personne n'y fait opposition.

Finissons-en donc, et passons au vote.

M. Dumortierµ et d'autres membres. - Que M. le président commence alors par mettre aux voix l'ajournement.

MpVµ. - Je vais mettre aux voix l'ajournement à vendredi prochain.

- Des membres. - L'appel nominal.

Il est procédé à cette opération.

En voici le résultat :

94 membres répondent à l'appel nominal.

54 votent pour la proposition.

40 votent contre.

En conséquence, 'a Chambre ajourne à vendredi la continuation de la discussion sur l'incident

Ont voté pour la proposition :

MM. Ansiau, Bara, Bouvier, Braconier, Bricoult, Carlier, Coomans, Couvreur, Crombez, David, de Baillet-Latour, C. de Bast, de Brouckere, de Florisone, de Kerchove, de Macar, de Moor, de Rongé, Dewandre, Dolez, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, M. Jouret, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Mascart, Moreau, Mouton, Muller, Orban, Orts, Pirmez, Rogier, Sabatier, Tesch, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vleminckx, Warocqué, Allard et E. Vandenpeereboom.

Ont voté contre la proposition :

MM. P. Debaets, de Conninck, Delaet, Delcour, de Liedekerke, de Mérode, de Muelenaere, de Naeyer, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, de Woelmont, d'Hane-Steenhuyse, Dumortier, Hayez, Jacobs, Janssens, Julliot, Landeloos, le Bailly de Tilleghem, Moncheur, Notelteirs, Nothomb, Reynaert, Rodenbach, Royer de Behr, Schollaert, Snoy, Tack, Thibaut, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, Vander Donckt, Van Hoorde, Van Overloop, Van Wambeke, Verwilghen, Vilain XIIII et Wasseige.

Ordre des travaux de la chambre

MpVµ. - Il y a à notre ordre du jour, comme second objet, un prompt rapport de pétitions. Ce rapport doit être fait par l'honorable M. Delaet sur une demande du conseil provincial d'Anvers tendante à ce que la loi autorise l'emploi, devant les cours et tribunaux, des langues usitées en Belgique. Ce rapport est très volumineux. Je demande à la Chambre d'ordonner l'impression et la distribution de ce rapport.

- Des membres. - Qu'on le lise demain.

M. Debaetsµ. - Il vaut mieux que tout le monde puisse l'examiner à loisir. Nous savons tous que lorsque la lecture d'un rapport dure une heure ou une heure et demie, la Chambre y prête souvent peu d'attention.

M. Vleminckxµ. - Il n'est pas indispensable que nous discutions demain ce rapport. Mais il vaut mieux qu'il soit lu, parce que quand il est lu en séance, nous sommes certains qu'il parvient aux oreilles de tous, tandis que nous ne sommes pas certains que tout le monde lit les pièces imprimées.

M. Debaetsµ. - Je n'insiste pas. L'honorable M. Delaet lira demain son rapport et dès lors il devra être imprimé aux Annales parlementaires.

Discussion générale sur l'exécution de la loi sur les fondations de bourses d'étude

M. Dumortierµ (pour une motion d’ordre). - Je désire que la Chambre se prononce sur ma proposition.

J'ai demandé que le gouvernement fît imprimer les noms des personnes incriminées, ainsi que les dates et les noms des lieux où les actes avaient été posés.

Nous ne pouvons discuter si les personnes incriminées ne nous fournissent des renseignements, si elles ne savent pas qu'elles sont en jeu. On dit qu'il faut que la lumière se fasse ; mais mettez les personnes que vous attaquez à même de faire la lumière.

Je ne pense pas que la Chambre puisse faire opposition à ma demande.

MjBµ. - Le gouvernement a déclaré qu'il donnerait les noms des fondations et les dates des faits pour autant qu'il ait les dates précises de ces faits. Mais quant à livrer les noms, je ne le ferai pas, parce que ce serait sans aucune espèce d'utilité.

Lorsqu'on connaîtra les dates et les fondations, les administrateurs spéciaux qui ont les pièces sauront parfaitement bien de quoi il s'agit.

- La séance est levée à cinq heures trois quarts.