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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 9 mai 1866

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1865-1866)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboomµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 747) M. Thienpont, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.

M. Van Humbeeck, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Thienpont présente l'analyse suivante des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Desoil, présentant des observations contre une décision de la députation permanente du Hainaut qui a exempté pour un an le milicien Leclere, de Sars-la-Buissière, demande que ce milicien soit enrôlé et que son fils Aimé Desoil, appelé à son défaut, soit momentanément rappelé dans ses foyers. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des habitants d’Enghien se plaignent que l'administration des hospices de cette ville ne mette point en adjudication publique la fourniture des aliments et des autres objets nécessaires à ces établissements. »

M. Ansiauµ. - Je prierai la Chambre de renvoyer cette requête à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport. C'est une question fort importante et très délicate au point de vue de l'administration des biens des établissements publics.

- Adopté.


« Le sieur Sladey se plaint que l'administration des biens de la fondation Deleginte se refuse à rendre compte de sa gestion. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« M. Mascart demande un congé pour cause d'indisposition. »

- Accordé.


« M. de Woelmont, obligé de s'absenter, demande, un congé. »

- Accordé.

Projet de loi autorisant le gouvernement à condéder un chemin de fer industriel de Tournai à Antoing

Rapport de la commission

M. de Brouckereµ dépose :

1° Le rapport de la commission spéciale qui a été chargée, d'examiner le projet de loi déposé hier par M. le ministre des travaux publics et ayant pour objet d'autoriser le gouvernement à accorder la concession d'un chemin de fer destiné à relier les établissements industriels du bassin calcaire de Tournai à la station du chemin de fer de l'Etat.

Projet de loi autorisant le gouvernement à concéder des chemins de fer secondaires dans les deux Flandres

Rapport de la commission

2° Le rapport de la même commission sur le projet de loi ayant pour objet d'autoriser le gouvernement à accorder la concession de certains chemins de fer secondaires dans les deux Flandres.

- La Chambre ordonne l'impulsion et la distribution de ces rapports et les met à l'ordre du jour à la suite des projets d'intérêt matériel qui y sont déjà portés.

Projet de loi sur les coalitions

Rapport de la commission

M. Ortsµ. - J’ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du Code pénal qui a examiné le projet de loi sur les coalitions, renvoyé par le Sénat.

Je demanderai à la Chambre de vouloir bien mettre ce projet à l'ordre du jour à la suite des projets d'intérêt matériel dont il vient d'être parlé. Il serait, je pense, utile que nous pussions voter ce projet avant de nous séparer.

- La proposition de M. Orts est adoptée.

Le rapport sera imprimé et distribué.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. Bouvierµ dépose des rapports sur des demandes en naturalisation.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports et les met à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi accordant des crédits pour les travaux d’assainissement de la Senne et l’érection d’une salle d’exposition des beaux-arts

Discussion générale

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Messieurs, Messieurs, je répondrai le plus brièvement possible à quelques points des discours qui ont été prononcés dans la séance d'hier.

Le premier point, dont j'ai à parler est la contradiction que l'on a cherché à établir entre ce que, d'une part, j'annonçais la disparition graduelle et successive des eaux de la Senne tandis que, d'autre part, je prétendais que les voûtes destinées à leur servir d'écoulement pourraient être insuffisantes.

Il n'y a là, messieurs, aucune contradiction. Si ceux qui m'ont fait cette objection avaient parcouru l'Espagne, ils auraient pu voir à Valence, entre autres, une rivière, couverte de ponts de 12 a 15 arches et dans laquelle il ne passe ordinairement, pendant 360 jours de l'année, pas plus d'eau que dans le Maelbeek. Eh bien, à plusieurs reprises ces ponts ont été endommagés, emportés même. et comment l’ont-ils été ? Par les causes que je vous signalais hier, c'est-à-dire par des arbres arrachés aux rives, des maisons entraînées on d'autres accidents de même nature.

Il n'y a donc aucune contradiction dans les faits que je vous signalais, la diminution graduelle des eaux ordinaires et l'augmentation probable des eaux en temps d'orage ou de dégel.

Si, au lieu de voûter la Senne, on la laissait couler à ciel ouvert, il est évident qu'aucun de ces accidents ne serait jamais à craindre, quel que soit le volume des eaux qui trouveraient toujours à s'élever, à se dégager au besoin même. Si le volume des eaux était tellement considérable que le lit nouveau qu'on créerait fût insuffisant, si par un accident quelconque une partie seulement de la voûte venait à s'effondrer, tout la reste devrait suivre et vous auriez à réparer des dégâts considérables. C'est contre cette éventualité que je crois devoir prévenir la ville de Bruxelles afin de ne pas compromettre les grands intérêts qui se trouvent engagés dans la question de l’assainissement de la Senne.

En exécutant les travaux à ciel ouvert, non seulement vous arrivez au principal résultat qu’on a voulu atteindre en assainissant la Senne, mais en même temps vous rendez possibles les moyens de circulation auxquels j’ai fait allusion.

M. Orts a cherché à équivoquer en disant : Nous allons ouvrir une grande rue qui va donner toute satisfaction sur ce point. Je demande pourquoi ouvrir une grande rue, si nous allons attirer la circulation à l'autre extrémité de la ville, par la création d'une station centrale à Molenbeek ? Mais il ne s'agit pas de supprimer cette grande voie publique, si l'on ne voûte pas la Senne ; il s'agit de créer des deux côtés de la Senne élargie et redressée des quais où la circulation pourra s'établir et à ces quais on n'a fait, et on ne peut faire et on ne fait.qu'une seule objection, c'est qu'il serait difficile aux personnes habitant d'un côté du quai d'aller visiter les voisins de face sans faire un détour par les ponts.

Mais quand on doit visiter quelqu'un dans une rue du même carré, il faut bien faire le tour pour y arriver.

(page 748) Il on sera de même si vous créez des quais sur la rivière à ciel ouvert mais quant à ce qui concerne la circulation générale de la ville, qui est la chose à laquelle nous avons à pourvoir, cela n'entraînera aucune difficulté, aucun dérangement, aucun allongement.

Je dois faire remarquer, en outre, que le maintien de la rivière à ciel ouvert permettrait de résoudre la question du chemin de fer intérieur et de la station centrale. Rien, en effet, ne serait plus facile, une fois la rivière redressée à l'intérieur de la ville, que d'établir un chemin de fer non pas souterrainement, comme on l'indiquait hier, ce qui serait une absurdité, mais au-dessus du sol, comme cela existe à Londres, à Paris, à Lyon, à Manchester et dans toutes les grandes villes qui ne sont pas situées sur des hauteurs et où l'on a établi des stations centrales dans l'intérêt de la facilité des communications avec le dehors.

Rien ne serait plus facile à exécuter, rien ne faciliterait même davantage toutes les relations avec les chemins de fer qui s'élèvent sur les plateaux à droite et à gauche de la vallée de la Senne, que la création d'une station au-dessus du niveau actuel des rues. Cela pourrait se faire, je ne dirai pas sans dépense, mais sans difficultés matérielles et sans devoir faire des démolitions considérables et sans apporter de perturbations à la circulation dans l'intérieur de la capitale. J'ajoute que ce serait le seul moyen pour celle-ci de continuer à s'enrichir, à progresser, en mettant ses moyens de circulation et de communication au même niveau que ceux des villes de même importance dans d'autres pays.

Messieurs, il m'a été répondu hier aux observations que j'avais faites sur les conventions intervenues entre la ville de Bruxelles et la compagnie concessionnaire, que nous n'avions pas à nous inquiéter des stipulations de ces conventions ; que nous devions accepter les propositions qui nous sont faites, que nous avons pour garantie la surveillance de la commission d'ingénieurs à laquelle la ville de Bruxelles a confié ses intérêts.

Messieurs, c'est précisément parce que ce mode de procéder sort complètement des principes constitutionnels sous lesquels nous vivons et qui impliquent la responsabilité ministérielle, comme garantie des fonds que nous votons, que j'ai proposé les amendements dont je vous ai donné lecture hier.

Il est impossible, messieurs, que nous confiions cette responsabilité à une commission anonyme, qui aujourd'hui se compose de messieurs tels et tels ingénieurs en chef, dans lesquels nous pouvons avoir aujourd'hui toute confiance, mais qui demain peut être composés d'autres éléments dans lesquels nous ne l'aurions plus.

Dans le régime constitutionnel sous lequel nous vivons, c'est le ministre qui seul doit avoir la responsabilité des fonds que la législature vote. Voila pourquoi, dans l'amendement à l'article 4, je propose que cette responsable incombe directement au ministre ; et c'est pourquoi j'indique que la loi ne doit être exécutoire qu'après que le ministre aura reçu des plans complets et détaillés et qu'il les aura approuvés.

M. Bouvierµ. - La responsabilité est de droit.

M. Le Hardy dc Beaulieuµ. – La responsabilité est de droit, mais elle n'est pas de fait ; hier, on m'a répondu que, en fait, c’est la commission des ingénieurs qui serait responsable, que c'est sur la commission des ingénieurs que repose l'exécution complète de tout le contrat. Eh bien, c'est pour que le principe soit posé d'une façon formelle dans la loi elle-même que j'ai proposé l'amendement, amendement que je maintiens, du reste.

Mais, messieurs, j'ai une autre observation à faire.

Hier on a donné, dans les réponse qui m'ont été faites, le secret de la combinaison qui nous est soumise.

On nous a dit : Toute cette affaire est une spéculation. Si les articles ne sont pas rédigés d'une façon très précise, si nous n’avons ni devis, ni cahier de charges, et si nous restons dans un grand vague sur tous ces points, c'est précisément parce que c'est une spéculation.

Je demande, messieurs, si nous pouvons, nous, législateurs, apporter un appoint à une spéculation, sans prendre toutes nos garanties...

M. Bouvierµ. - Nou s ne lâcherons pas nos écus.

M. Coomansµ. - Ils sont lâchés.

M. Bouvierµ. - Pas du tout.

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Nous ne lâcherons pas nos écus, me dit-on ; mais, messieurs, une fois que la loi sera votée, une fois qu'elle sera promulguée, les écus en vertu même de la loi, devront bien être lâchés, vu qu'elle est exécutoire immédiatement après sa promulgation.

M le ministre des travaux publics, dans qui j'ai la plus grande confiance, et la preuve en est dans les amendements que j'ai présentés, M. le ministre des travaux publics me fait signe que, lui, prendra toutes les précautions.

Mais qui me garantit que d'ici avant l'exécution complète des travaux, M. le ministre des travaux publics n'aura pas un successeur, deux ou trois successeurs peut-être, et que parmi ces successeurs nous trouverons toujours les mêmes garanties ?

C'est donc sur la loi que nous devons baser nos garanties ; quand nous les aurons dans la loi, nous serons certains que personne ne pourra lâcher nos écus sans les garanties que M. le ministre des travaux publics lui-même trouve nécessaires.

Mais il est un autre point sur lequel je désirerais avoir des explications.

Dans le premier contrat avec la compagnie concessionnaire, je lis aux dispositions générales le paragraphe suivant :

« La ville fera les expropriations à l'avantage des soussignés de seconde part en ce qui regarde les immunités de la ville en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique. »

Je désirerais savoir quelles sont les immunités de la ville en cas d'expropriation pour cause d'utilité publique.

M. Ortsµ. - De ne pas payer d'enregistrement.

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Mais l'Etat ne paye pas d'enregistrement et on exproprie pour compte de l'Etat.

M. Ortsµ. - Mais non, ce n'est pas pour compte de l’Etat.

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Quand on exproprie pour cause d'utilité publique, on exproprie pour le public ; que ce public soit représenté par l'Etat, qu'il soit représenté par la province, qu'il soit représenté par la commune, c'est toujours utilité publique, et le public n'a pas à se payer à soi-même des droits d'enregistrement.

M. Ortsµ. - Cela ne veut pas dire autre chose.

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Je me demande donc si dans la spéculation que la ville de Bruxelles fait ou permet à une compagnie de faire de l'assainissement de la Senne, elle donne quelque chose en compensation des capitaux que cette compagnie va, paraît-il, dépenser gratuitement au profit de la ville.

Si cette stipulation m'a paru assez importante pour que j'attire sur elle votre attention, messieurs, c'est que dans le second contrat, celui du 9 mars dernier, la même stipulation se trouve reproduite, et notez bien qu'ici il ne s'agit plus d'expropriation dans l'intérieur de la ville, il s'agit d'expropriation à l'extérieur. C'est la ville donc qui se charge d'exproprier pour compte d'entrepreneurs et qui leur garantit les immunités dont elle jouit. S'il ne s'agit que de cette immunité de ne pas payer de droits d'enregistrement, et il ne peut en être autrement quand il s'agit de travaux d'utilité publique, si vous n'avez à donner que cela, la clause était parfaitement inutile ; elle doit dire autre chose, ou je ne la comprends pas.

Mais voici un autre fait.

La ville se charge d'exproprier aux frais des soussignés tous les terrains nécessaires. Ensuite on stipule que la ville devient propriétaire de plein droit,

M. Vleminckxµ. - Messieurs, je constate que l'honorable membre qui vient de se rasseoir, pas plus que M. Julliot, n'a attaqué le projet actuellement soumis à vos délibérations, au point de vue de l'hygiène. Je suis donc dispensé de le défendre à ce point de vue. Il eût été difficile, en effet, messieurs, pour l'honorable M. Julliot et pour vous tous, de ne pas reconnaître que la Senne, dans son état actuel, est un véritable loyer d'infection, et que c'est un devoir pour tout le monde d'en débarrasser au plus tôt l'agglomération bruxelloise, et quand je dis l'agglomération bruxelloise, je suis bien modéré.

En effet, l'influence de causes insalubres ne s'arrête pas toujours aux lieux de leur origine, mais se fait sentir au loin dans plus d'une circonstance. Plus d'une fois on a vu des épidémies, dues à des causes locales, étendre leurs ravages bien au delà du rayonnement de ces causes et faire des victimes là où l'on se croyait le plus à l'abri de leur atteinte. Il en est exactement de même pour les effets de l'assainissement. Ceux-là aussi ne sont pas seulement locaux ; ils se font sentir de proche en proche et finissent, en dernière analyse, par se traduire, comme je l'ai dit dans une autre circonstance, en un accroissement de bien-être général et de richesse publique.

J'ai entendu hier l'honorable M. Julliot vous parler, à l'occasion d'assainissement, d'une solidarité volontaire et d'une solidarité qui ne l'est pas. L'honorable membre veut bien de l'une, mais ne veut pas de l'autre, En d'autres tenues, fidèle a son système, il ne veut pas, (page 749) ou plutôt il ne voudrait pas que l'Etat intervînt en matière d'assainissement. Voilà l'interprétation la plus vraie de sa pensée.

C'est, messieurs, la plus étrange doctrine que j'aie jamais entendu professer ; étrange non pas pour nous, assurément, qui connaissons depuis longtemps l'opinion de l'honorable membre, mais à coup sûr pour tous les hygiénistes du monde. C'est une des erreurs les plus funestes qu'on puisse commettre. Je rappellerai à l'honorable membre que son système a eu naguère pour effet le dépérissement, l'anéantissement de grandes et brillantes cités, éteintes sous l'influence de causes de mortalité, que la solidarité non volontaire n'avait ni enlevées ni détruites. Il y a dans l'antiquité, et même dans les temps modernes, des exemples frappants de pareils malheurs.

J'engage l'honorable membre à lire là-dessus, dans le Journal des Débats, l'analyse,d'un livre qui a paru récemment et qui est intitulé : Assainissement du littoral de la Corse et en général des lieux insalubres situés sur le bord de la mer, par M. Scipion Gras, ingénieur en chef des ponts et chaussées, ou plutôt je l'engage à lire l'ouvrage tout entier, et ses convictions seront bientôt faites. Mais pour ne pas sortir de notre bonne Belgique, je prie l'honorable membre de se rappeler que, sans l'intervention de l'Etat, sans la solidarité forcée, comme il l'appelle, deux de nos villages des Flandres, Watervliet et Saint-Laurent (je les ai cités dans une autre circonstance), n'existeraient peut-être plus en ce moment ou du moins seraient entièrement dépeuplés.

Que l'honorable M. Julliot en soit bien assuré : si, par aventure, il se produisait des causes d'insalubrité et de mortalité dans l'arrondissement qui l'a envoyé dans cette enceinte, aucun des députés de Bruxelles ne lui marchanderait son vote et tous s'empresseraient d'aider l'Etat à rendre à la population de Tongres la vie et la santé.

Il y a, il doit y avoir, en matière d'assainissement ou d'hygiène, solidarité forcée, non seulement entre les diverses parties d'un même pays, mais entre toutes les nations. Je remercie le gouvernement d'avoir rappelé ce grand et bel axiome dans l'exposé des motifs de la loi.

J'ai maintenant quelques mots à répondre à mon honorable ami, M. Le Hardy de Beaulieu. Je resterai toujours dans les choses de l'hygiène. J'avoue n'avoir pas compris qu'à propos de travaux à exécuter pour l'assainissement de la Senne, l'honorable membre soit venu nous effrayer, eu nous menaçant, pour l'avenir, d'une disette d'eau. Est-ce que ces travaux qu'on projette n'entreprendre, seront pour quelque chose dans cette disette ?

Y aura-t-il, à cause de ces travaux, un centimètre d'eau de moins dans la Senne ?

Non, n'est-ce pas ? Mais en vue d'un événement possible, parce que notre population est alimentée d'eau par un système artificiel, et que ce système peut être interrompu, il faut aviser à donner dès à présent plus d'eau à la Senne, pour qu'en cas d'accident cette eau puisse servir aux besoins domestiques !

Evidemment, messieurs, ceci est un tout autre ordre d'idées. Il ne s'agit plus ici d’assainissement, ou, pour parler plus clairement, de la non infection de la Senne qui est le seul et l'unique objet des travaux proposés. Moi aussi j'aurais voulu plus d'eau dans la Senne, mais non pas précisément pour les mêmes raisons que l'honorable M. Le Hardy de Beaulieu. Je ne crains pas, comme lui, une interruption dangereuse de notre système artificiel. Cette interruption me semble presque impossible. Un réservoir peut nous faire défaut, mais non pas deux, non pas trois, non pas, quatre à la fois. Ce serait presque la fin du monde.

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Et l'aqueduc ?

M. Vleminckxµ. - Oh ! l'aqueduc ! un accident s'y présentant, serait bien vite réparé.

Comme je le disais hier, n'oubliez pas qu'il existe dans Bruxelles une quantité considérable de puits qui servent toujours, en dehors du système artificiel à notre alimentation de tous les jours.

M. Bouvierµ. - Beaucoup dans le bas de la ville.

M. Vleminckxµ. - Et pas moins dans le haut. Moi-même je n'ai pas l'eau de la ville.

Enfin, messieurs, et vous le savez déjà, l'administration communale s'occupe d'augmenter le volume d'eau, et ce sera l'occasion de créer de nouveaux réservoirs, ce qui rendra bien moins imminent encore le danger imaginé par l'honorable membre.

Il nous faut plus d'eau, je le reconnais, mais c'est une erreur de croire que nous ne disposons actuellement que de 40 litres ; il y en a bien le double. Il nous faut plus d'eau, non pas précisément pour nos usages domestiques, mais dans l'intérêt de la salubrité publique. Il faut plus d'eau surtout pour chasser avec plus de force dans les collecteurs, les matières fertilisantes des égouts, afin que ces matières n'y séjournent pas, afin que, par leur fermentation, des gaz malfaisants ne viennent pas infecter la partie haute de la cité, car dans ce cas, vous le savez, les parties supérieures des égouts font véritablement l'office de cheminées d'appel.

Il faut autre chose encore ; il faut, avec un supplément considérable d'eau, une pente plus déclive à plusieurs de nos canaux souterrains, ce que d'ailleurs nécessite la position qui sera donnée aux collecteurs.

Tout cela se fera, j'en ai l'assurance, mais convenez, messieurs, que tout ne peut se faire à la fois. C'est assez des charges actuelles dont ou nous a récemment frappés, c'est trop peut-être ; il ne faut pas que d'ici à longtemps on songe à nous nu imposer de nouvelles.

Messieurs, je voterai le crédit qui nous est demandé avec la certitude que je fais une excellente chose ; je le voterai parce que je suis convaincu depuis longtemps qu'assainir est non seulement une bonne action, mais une fructueuse opération.

(page 779) M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Je me demande si cet article comprend également la rétrocession des terrains sur lesquels sera établie l'usine de décantation. L'article ne le dit pas.

Dans un autre article du deuxième contrat, sur lequel je désirerais avoir des explications, il est dit que le cautionnement de 50,000 livres sterling est applicable aux deux entreprises et non plus à la première seulement ; de sorte que l'importance des travaux et de la responsabilité est doublée tandis que le cautionnement reste le même. N'est-ce pas contraire aux principes d'une bonne administration ?

En résumé, messieurs, je crois devoir maintenir l'amendement que j'ai eu l'honneur de déposer hier.

Je ne tiens pas énormément à la partie de l'amendement qui se rapporte à l'article 5, si la ville croit pouvoir faire les frais des études, sans l'intervention du gouvernement ; mais quant à l'amendement à l'article 4, qui nous donne la garantie directe et légale que nos fonds seront employés selon nos intentions, je crois que la Chambre doit l'adopter. Elle (page 780) doit vouloir que des plans définitifs et complets soient dressés et soumis à M. le ministre des travaux publics avant que l'on puisse disposer des ressources applicables à l'entreprise. Elle doit également exiger qu'un compte lui soit rendu chaque année afin qu'elle puisse exercer sou droit de contrôle.

Je maintiens donc cette partie de mon amendement et je désire qu'elle soit adoptée par la Chambre.

(page 748) M. Coomansµ. - Messieurs, les critiques parfaitement raisonnées que vous avez entendues ici et dans la presse, me permettent de résumer en peu de mots les principales raisons qui m'empêchent de voter le projet de loi.

D'abord les précautions que le gouvernement promet de prendre en ce qui concerne l'emploi des fonds de l'Etat, ne me rassurent pas pleinement. C'est une histoire que j'ai lue bien souvent, et dont je connais le dénouement souvent fallacieux. Quand le vin est tiré, il faut le boire, et nous avons fait cette triste expérience dans l'affaire de la colonne du Congrès, dans l'affaire de l'église de Laeken ; nous la ferons encore dans l'affaire du monument à élever à Léopold Ier. Je crains fort que ce premier million ne soit pas le dernier.

Je suis incompétent et c'est parce que je le suis, que je m'en rapporte à des hommes très compétents ; or, ces hommes assurent que l'exécution du plan qui nous est soumis coûtera non pas 26, 30 ou même 50 millions, mais une somme incalculable. Le gouvernement a beau me donner aujourd'hui l'assurance qu'il ne lâchera pas les écus avant de s'être mis à couvert en ce qui concerne la valeur des travaux exécutés, je ne suis guère rassuré. Plusieurs hypothèses, messieurs, m'effrayent : D'abord la Compagnie ne remplit pas ses engagements pour l'une ou pour l'autre raison. La ville est accablée d'impôts, elle est au-dessous de ses affaires. Les travaux sont commencés ; la Senne est ouverte, elle est réduite à l’état d'un vaste égout ; nous nous trouvons devant des runae minaces derrière lesquelles il y a treize députés très forts.

L'honorable M. Vleminckx vient de faire appel à nos sentiments d'humanité et de présenter trente-six autres arguments dont le meilleur est l'intérêt de la salubrité publique. Donc quand vous serez à court d'argent, c'est nous qui aurons à payer, car Bruxelles joue, parmi les animaux belges, le rôle du lion.

Ainsi, messieurs, j'ai bien peur que les 7 millions qu'on nous demande ne soient qu'un premier à-compte. Dieu fasse que je me trompe !

Ensuite, messieurs, je suis quasi-habitant de Bruxelles, je suis Bruxellois, je vois beaucoup de Bruxellois et il ne m'est pas démontré du tout que les Bruxellois désirent l'exécution de ces vastes plans. Je conclurais plutôt contre. J'ai entendu beaucoup de plaintes, très peu d'éloges, plaintes qui portent principalement sur l'élévation croissante des impôts. Je déclare sincèrement que je crois que la très grande majorité des habitants de la capitale est hostile à ce projet. On ne nous le propose donc pas au nom de Bruxelles, on nous le propose au nom de l’édilité bruxelloise et au nom des onze représentants de Bruxelles que je suis assez étonné de voir unanimes en cette affaire.

M. Ortsµ. - Une fois n'est pas coutume.

M. Coomansµ. - C'est la coutume quand il s'agit d'assiéger le trésor public ; alors vous êtes parfaitement unis.

Messieurs, il y a une circonstance officielle où l'on aurait pu préjuger la véritable opinion du public bruxellois, c'est l'élection de l'honorable M. Splingard. La question de l'assainissement de la Senne était posée très nettement en cette occasion, Eh bien, messieurs, pour qui une majorité du corps électoral s'est-elle prononcée ? est-ce pour les défenseurs du projet de l'édilité et dit gouvernement ? Point, c'est pour celui qui l'attaquait à fond, pour M. Splingard qui a été nommé triomphalement, et je doute fort que les principaux promoteurs et futurs exécuteurs de ce projet fussent réélus, demain, s'ils donnaient leurs démissions aujourd'hui.

(page 950) M. Ortsµ. - Je demande la parole.

M. Coomansµ. - C'est une opinion personnelle, mie j'exprime. Mais je serais assez curieux d'assister à cette épreuve.

Il me semble, messieurs, que l'on abuse un peu, au détriment de ma chère ville natale du terrible argument de l'insalubrité, argument qui devient redoutable dans la bouche d'un homme aussi compétent que M. Vleminckx. Cette insalubrité de Bruxelles me semble un argument nouveau, j'allais presque dire inventé pour les besoins de l'embellissement.

Eu effet, messieurs, l'autre jour, jetant les yeux sur un livre anglais qui porte un titre séduisant, à savoir : Indication des lieux, des stations les plus salutaires du monde entier. Je me suis mis à le feuilleter et qu'y ai-je vu ? J'y ai vu cette attestation d'hommes compétents parmi lesquels il y a des médecins qui, pour être anglais, n'en sont pas excessivement inférieurs aux nôtres, j'y ai vu, dis-je, cette attestation que, de tous les lieux de l'Angleterre l'île de Wight était le plus sain (ceci est peut-être dit pour y encourager le séjour de la reine Victoria) et que, de tous les lieux du continent, sans en excepter Nice et Monaco, c'était Bruxelles qui était le plus salubre.

M. Bouvierµ. - Le haut de la ville.

M. Coomansµ. - Vous pouvez acheter ce livre pour trois ou quatre francs.

M. Vleminckxµ. - On vous dit le haut de la ville.

M. Coomansµ. - D'abord le livre ne distingue pas et il n'est pas nécessaire de distinguer. M. Vleminckx vient de vous dire que l'insalubrité bruxelloise est une menace pour toute la nation. Or, si la moitié de Bruxelles est insalubre et peut infecter tout le royaume, je ne comprendrais pas comment cette moitié n'infecterait pas l'autre... (Interruption.) Eh bien, messieurs, je ne crois pas que nous devions abuser de cet argument ; nous pourrions faire tort à nos concitoyens et nous donner à nous ou tout au moins à nos familles des soucis qui sont également malsains.

Mais il y a plus ; j'ai entendu soutenir ces jours-ci non seulement par des ingénieurs, mais par des médecins, que la Senne n'est pas malsaine le moins du monde, que la Senne est très calomniée, que la Senne est une rivière très pure et très innocente... (interruption) et qui n'a pas besoin d'être assainie ; mais que ce qui a besoin d'être assaini, ce sont les égouts qui y mènent et qu'aussi longtemps que votre système d'égouts sera mal combiné, la Senne sera malsaine. Eh bien, messieurs, de mon expérience personnelle je puis déclarer que les abords de la Senne sont moins puants (il faut bien se servir du mot propre) que maintes rues de Bruxelles où les égouts ont un écoulement insuffisant.

C'est votre système d'égouts qui est mauvais ; quant à la Senne elle est si peu malsaine que si elle n'existait pas, vous devriez la creuser. La Senne est excellente, elle est une nécessité pour la salubrité. Que vous la voûtiez, que vous ne la voûtiez pas, peu importe, mais précipitez l'écoulement de vos ordures vers le meilleur de tous les égouts, car c'est un égout marchant, et sans cesse disparaissant, et alors vous n'aurez plus a vous plaindre. Du reste je ne vois pas que la mortalité soit plus grande à Bruxelles que dans d'autres villes réputées saines.

Ce sont des ingénieurs honorables et savants, des médecins honorables et savants, qui m'ont assuré que l'on jouait, au sujet de la Senne, une véritable comédie, que la Senne n'a pas besoin d'être assainie et qu'elle peut parfaitement rester à ciel ouvert, ce qui est le rôle, de tontes les rivières créées par le bon Dieu. Les eaux insalubres sont les eaux qui ne marchent pas, c'est-à-dire les eaux stagnantes.

Amsterdam a des eaux malsaines, mais toute ville sise sur une rivière qui a une certaine pente, n'est pas malsaine du chef de la rivière.

Ce qu'on vent favoriser, ce sont des projets d'embellissements ; on veut grossir encore un peu la tête bruxelloise sur le corps belge au détriment des membres ; voilà le but.

Or, messieurs, je nie absolument le devoir de l'Etat d'intervenir dans l'embellissement de la capitale. Loin que des raisons politiques m'y engagent, je trouverais au contraire des raisons politiques qui m'en détourneraient. Ah !si vous me démontriez, conformément à la thèse de M. Vleminckx, qu'il y va d'une question d'humanité, je dirais : Soit ! Ouvrons encore les cordons de notre bourse, puisqu'il le faut. Mais tel n'est point le cas aujourd'hui.

Voilà pour ce qui concerne Bruxelles. Mais permettez-moi de dire deux mots d'’un autre intérêt, de celui du trésor qui est engagé dans la question. Voilà encore 7 millions qu'on lui soutire. Le moment est-il bien opportun ? A cause des circonstances extérieures, les recettes de l'Etat diminuent et je crains fort que nous n'ayons un compte fâcheux à régler à ce sujet avec M. le ministre des finances vienne la Saint-Sylvestre.

Si les circonstances extérieures s'aggravent, vous aurez une notable diminution dans les ressources nationales (interruption) et communales. (Interruption.)

Je suppose que la Belgique sera toujours là pour payer la dette finale de Bruxelles.

Mais vous aurez une réduction considérable des recettes de nos chemins de fer. Certes ce grand abaissement des tarifs, qui vient d'être décrété, est un avantage pour une grande partie du public belge ; mais ne soutenez donc pas que le trésor public s'en trouvera bien. Vous aurez de ce chef une diminution qu'on peut évaluer à deux ou trois millions par an. Vous aurez en outre une diminution de quelques millions encore sur le produit de nos impôts en général.

Voilà ce qui doit déjà vous donner à réfléchir... (Interruption.) Ah ! oui, on nous a promis la suppression des barrières ; mais reste à savoir si l'on ne sera pas forcé de revenir sur cette mesure, pour cause, non pas de salubrité publique, mais de pauvreté publique.

Bref, messieurs, nous pouvons nous trouver bientôt dans de graves embarras financiers, et il me semble peu prudent de se livrer à des dépenses de luxe à la veille de dépenses nécessaires.

Pourquoi le gouvernement n'agirait-il pas comme chacun de vous le fait individuellement ? Nous diminuons nos dépenses de luxe quand les dépenses nécessaires s'accroissent. (Interruption.)

Encore un mot, messieurs. Hier encore, j'entendais un marchand de vins se plaindre très vivement de l'immense difficulté qu'il éprouvait à placer des vins ; je lui répondis : Prenez-vous-en à M. de Bismarck ; c'est lui qui est votre ennemi, et un peu le nôtre.

Pourquoi, messieurs, tant de précipitation ? Y a-t-il péril en la demeure ? Je ne le crois pas. Je ne vois pas quel mal il peut y avoir à ajourner la solution de cette affaire à six mois.

Et d'ailleurs, messieurs, on m'assure, et ceci me paraît digne d'être pris en considération, on m'assure que demain (on m'a même montré la dépêche télégraphique qui l'annonce), vous aurez des offres bien plus séduisantes que celles que vous êtes si pressés d'accepter aujourd'hui. On vous offrira un rabais sur la somme déjà convenue et de plus un chemin de fer à l'intérieur, gratis. Pourquoi donc, messieurs, ne pas attendre au moins 24 heures ? (Interruption.) Ce sont des noms très honorables, très connus qui sont mis en avant et qui sont garantis par d'autres noms également honorables. Pourquoi donc tant se presser ?

Messieurs, je me résume. Je ne suis pas contraire à une certaine intervention de l'Etat dans des travaux d'assainissement bien combinés. Je reconnais que la capitale a droit à quelque chose de plus qu'un village de la Campine. Vous ne pouvez pas exiger davantage de moi, surtout au point de vue constitutionnel.

Je suis prêt à vous voter quelque chose, plusieurs millions même ; mais à une condition, qu'ils soient bien employés.

J'avoue que ce qu'on m'a dit depuis quelques semaines, à moi homme incompétent mais consciencieux, m'émeut un peu ; car il s'agit d’un travail même qui, prétend-on, n'a pas été suffisamment étudié.

Pourquoi donc ne pas attendre encore un peu ? Aussi bien on ne mettra pas la main à l'œuvre dès demain, et je crains fort qu'au lieu de la pelle, les hommes de bonne volonté n'aient à manier sous peu des instruments plus terribles.

Amendons six mois et je vous promets mon concours ; mais alors que tous les hommes sérieux seront presque unanimes pour approuver le projet qui vous sera soumis.

Donc, messieurs, l'ajournement à six mois.

M. Ortsµ. - Je ne veux répondre que très peu de chose, à un seul des arguments qu'a présentés l'honorable M. Coomans.

M. Coomansµ. - Est-ce que les autres ne sont pas bons ?

M. Ortsµ. – A mon avis, non ; et d'ailleurs ils ne sont pas neufs ; on y a déjà répondu.

Voici l'argument auquel j'entends répondre : L'honorable M. Coomans prétend que l'adoption du projet proposé par le gouvernement n'est pas demandée par la ville de Bruxelles.

M. Coomansµ. - J'en doute très fort.

M. Ortsµ. - M. Coomans en doute très fort et voici sa raison : c'est qu'il a entendu dire quelque part, par quelqu'un qu'il n'a pas nommé, que le projet ne valait rien.

M. Coomansµ. - Je n'ai pas dit cela.

M. Ortsµ. - Vous n'avez pas nommé vos autorités.

(page 751) M. Coomansµ. - Je n'ai pas dit que le projet ne valait rien, puisque je l'ignore, mais j'ai dit qu'il n'est pas populaire à Bruxelles.

M. Ortsµ. - Mais vous n'avez pas dit de qui vous teniez vos renseignements.

M. Coomansµ. - Oh ! de beaucoup de monde.

M. Ortsµ. - Eh bien, je vais vous dire, moi, de qui je tiens mes renseignements contraires et je nommerai mes autorités. Je connais, messieurs, trois représentations légales de l'intérêt bruxellois : j'en connais une à la Chambre, j'en connais une à la province et j'en connais une à la commune. Je commence par la dernière ; c'est la plus directe : sur 31 membres dont se compose le conseil communal de Bruxelles, qui n'a jamais passé pour ne pas représenter les intérêts de la capitale, un membre, une première fois et deux membres, une seconde fois ont fait de l'opposition au projet.

Au sein de la députation bruxelloise, au conseil provincial, et à coté d'elle se trouvaient les députés des faubourgs de Bruxelles en amont et en aval, une seule voix bruxelloise a critiqué le projet de loi.

A la Chambre enfin, l'honorable M. Coomans l'a constaté comme un fait rare dans nos précédents parlementaires, tous les députés de Bruxelles sont d'accord pour demander l'adoption du même projet de loi.

Je demande, messieurs, après cela s'il est encore permis de prétendre que les représentants légaux des intérêts de Bruxelles ne sont pas d'accord avec le reste de la population.

M. Coomansµ. - Et l'élection de M. Splingard ?

M. Ortsµ. - Je vais vous en parler de suite ; je prends vos arguments dans l'ordre où vous les avez présentés et ce n'est pas ma faute si je rencontre l'élection de M. Splingard à la queue.

J'y viens donc et je dis que cette élection ne prouve exactement rien contre le principe du projet. M. Splingard, avant son élection, n'a jamais dit qu'il fût hostile au projet d'assainissement de la Senne, alors soumis à l'opinion publique. M. Splingard n'a pas posé sa candidature comme une protestation contre le projet dont la ville de Bruxelles était saisie et, pour le prouver, je vais faire parler M. Splingard lui-même ; j'espère que vous le croirez.

M. Coomansµ. - Il était hostile au projet actuel, qu'il a combattu avant l'élection.

- Voix nombreuses à gauche. - Du tout ! Du tout !

M. Ortsµ. - Cela est parfaitement inexact et vous allez en avoir immédiatement la preuve, M. Coomans.

M. Splingard ayant été nommé, les délais nécessaires pour la vérification de ses pouvoirs n'étaient pas expirés ; il ne pouvait pas siéger encore le jour où le conseil communal avait à s'occuper du projet.

Eh bien, M. le bourgmestre de Bruxelles, par un sentiment de délicatesse et de loyauté que vous apprécierez, a désiré savoir l'opinion de M. Spingard élu, mais qui ne pouvait pas siéger. M. Splingard a répondu par une lettre qui a été lue en séance du conseil, et qui a été imprimée dans la brochure blanche distribuée à la Chambre, page 134.

Voici ce que j'y lis :

« Vous ajoutez, M. le bourgmestre, que vous seriez satisfait de connaître mon opinion, afin de la communiquer à mes collègues, sur le plan d'assainissement qui leur est soumis. A ce sujet, M. le bourgmestre, je ne puis que vous répéter ce que j'ai eu l'honneur de vous dire dans notre entretien d'avant-hier, que plus que personne je désire qu'il soit porté promptement remède à l’état hygiénique d'une grande partie de la capitale, et qu'à ce point de vue je ne puis qu'approuver le principe fondamental du projet, c'est-à-dire la construction de collecteurs avec voûtage de la Senne, seul moyen pratique d'assainir et d'embellir. »

Maintenant, M. Splingard, une fois nommé, a-t il fail plus tard de l'opposition dans le sein du conseil communal de Bruxelles ? Y a-t-il critiqué le principe du projet après l'avoir approuvé d'avance ? Pas le moins du monde. Il a adopté le principe, le dissentiment scientifique n'a porte que sur une question de quelque centimètres de plus ou de moins pour les nouvelles voûtes à établir.

Maintenant un dernier mot.

L'honorable M. Coomans a trouvé un moyen très neuf d'opposition au projet ; il a vu ce que personne n'a vu, il a senti ce que personne n'a senti, ou plutôt il n'a pas senti ce que tout le monde sentait.

Il prétend que la Senne n'est pas une cause d'infection pour la ville de Bruxelles ; qu'elle n'a pas besoin d'être assainie, et que la ville de Bruxelles est aussi salubre pour les personnes souffrantes que peuvent l'être Nice et Monaco ; enfin la Senne est parfaite, elle ne répand aucune mauvaise odeur, au contraire ; cela est si peu sérieux que je croyais que l'honorable M. Coomans allait finir par le refrain d'une chanson bien connue, en affirmant de la Senne : Que c’est un vrai bouquet de fleurs.

Messieurs, l'insalubrité de la Senne, la nécessité de l'assainir n'ont été niées par personne ; cette nécessité est même le point de départ de tous les projets présentés en concurrence avec celui qui a été adopté par les pouvoirs publics.

L'honorable M. Coomans reconnaît que les Chambres doivent faire quelque chose dans l'occurrence ; mais il prétend que la ville de Bruxelles use d'un prétexte, en parlant d'assainissement ; à la faveur de ce prétexte, elle ne songe qu'à prendre des millions dans le trésor public pour s'embellir.

Si l'honorable M. Coomans avait lu attentivement les pièces, il aurait vu que le concours de l'Etat est demandé par la ville de Bruxelles uniquement pour les travaux d'assainissement ; que les travaux d'embellissement de la capitale restent exclusivement à sa charge, sauf une exception : Le million mis à la disposition de M. le ministre de l'intérieur pour obtenir un local destiné à recevoir les expositions des beaux-arts et à servir à d'autres cérémonies. Ce local dispensera le gouvernement de consacrer tous les trois ans des fonds considérables à la construction des baraques provisoires, dépense que l'honorable M. Coomans a critiquée souvent et à bon droit.

En allouant à la ville de Bruxelles ce million pour la construction d'une salle d'exposition permanente, l'Etat fait donc une bonne affaire et la Chambre n'hésitera pas à lui donner l'autorisation nécessaire.

MpVµ. - M. Coomans a fait parvenir au bureau la proposition d'ajourner la discussion à six mois.

MiVDPBµ. - Messieurs, la section centrale propose de rédiger l'article 2 du projet de loi comme suit :

« Art. 2. Un crédit d'un million de francs est accordé au ministère de l'intérieur et formera la part de l'Etat dans les frais d'érection, par la ville de Bruxelles, d'une salle d'exposition des beaux-arts, au local de la Bourse. »

Je me rallie à cote nouvelle rédaction, sauf que je demande la suppression des mots : « au local de la bourse » et l'addition des mots « et cérémonies publiques » à ajouter après ceux « des beaux arts ».

Voici les motifs qui m'engagent à proposer la suppression des mots « au local de la Bourse ». Après le vote de la loi, il faudra nécessairement qu'il intervienne une convention entre le gouvernement et la ville de Bruxelles ; qu'on se mette d'accord sur l'importance de ce local et sur le plan de ce bâtiment. Jusqu'ici rien n'est arrêté. Il n'est pas même certain que le local de la Bourse sera suffisamment grand pour y établir la salle d'exposition des beaux-arts.

Je désire que le gouvernement et la ville de Bruxelles restent parfaitement libres de stipuler, en ce qui concerne la salle des beaux-arts et des cérémonies publiques. Je ne dis pas que le local de la Bourse ne conviendra pas ; mais je ne pense pas qu'il soit possible, de préjuger dès aujourd'hui par une loi qu'il conviendra.

M. Orts, rapporteurµ. - Messieurs, l'amendement que propose M. le ministre de l'intérieur est parfaitement dans les intentions de la section centrale, et je me permettrai d'ajouter, dans les intentions de la ville de Bruxelles. Si la section centrale a désigné le local de la Bourse dans l'article 2, c'est parce qu'elle croyait que le gouvernement tenait à ce que la salle d'exposition des beaux-arts fût établie dans la nouvelle Bourse. Si le gouvernement préfère autre chose, nous sommes parfaitement d'accord.

M. Wasseigeµ. - Messieurs, je désire présenter quelques observations pour appuyer la proposition d'ajournement qui vient d'être déposée par l'honorable M. Coomans.

Il me paraît qu'on a fait assez bon marché de ses arguments ; d'abord sous le prétexte qu'une partie de ces arguments n'étaient pas nouveaux, on n'y a rien répondu et on a répondu fort peu de chose à ceux de ces arguments qui certainement étaient présentés pour la première fois.

Ainsi, l'honorable M. Coomans vous a dit que ce n'est pas la Senne qui est malsaine ; mais que ce qu'il y avait à curer principalement c'étaient les égouts, et que le système présenté n'aurait pas ce résultat ; on n'a pas répondu un seul mot à cette observation qui est de la nature la plus grave.

Cependant vous avez vu dans la presse et dans les brochures qui nous ont été distribuées, que, de l'avis d'hommes parfaitement compétents, l'assainissement de la Senne n'aurait pour résultat d'assainir la ville de (page 752) Bruxelles qu'à la condition bien expresse que l'on prendrait des mesures énergiques pour l'assainissement des égouts ; que rien de cela n'était suffisamment prévu dans le projet que nous discutons et que rien ne pouvait être efficace sans un système de chasse d'eau qui viendrait plusieurs fois par jour curer ces égouts ; que, sans ce moyen, les égouts continueraient à renfermer les immondices, et répandraient au dehors des miasmes nuisibles, à la santé publique ; que dès lors on augmenterait plutôt le mal que de le diminuer.

Voilà un argument auquel on n'a pas répondu ; je ne sais s'il est vieux ou nouveau ; je ne sais si on y a répondu au dehors, mais je trouve qu'il est de la plus grande importance et j'aurais désiré qu'on y eût répondu dans cette Chambre.

Une autre raison me fait appuyer la motion d'ajournement ; c'est que le projet ne me paraît pas suffisamment étudié, de toutes parts il est l'objet de vives critiques auxquelles il n'a pas été suffisamment répondu, et si le vote du subside qui nous est demandé impliquait notre assentiment au plan, objet des conventions de la ville de Bruxelles et de la compagnie anglaise, je me verrais forcé de voter contre.

Parmi les arguments auxquels on n'a pas répondu, je citerai celui relatif à l'inopportunité de la dépense. Nous ne sommes plus dans la situation où nous nous trouvions lors du vote du conseil communal de Bruxelles et du conseil provincial du Brabant. L'horizon politique s'est bien assombri depuis lors, et les circonstances peuvent devenir beaucoup plus graves encore ; est-ce bien le moment de faire des dépenses qui ne soient pas indispensables et de voter de gros crédits alors que le gouvernement lui-même n'a pas osé répondre, sur l'interpellation faite hier par l'honorable M. Coomans, qu'il n'aurait pas à nous demander bientôt de pourvoir à la sécurité du pays ?

A cet argument, l'honorable M. Orts n'a rien répondu. A cette considération, j'en ajouterai une autre, qui me paraît encore avoir une certaine valeur, même au point de vue de la salubrité publique.

Est-ce bien le moment de remuer les miasmes de la Senne ? Le choléra et les maladies épidémiques n'ont pas disparu de l'Europe. Au contraire, il y a peu de temps, le choléra sévissait avec une violence inouïe dans une de nos provinces. Le Luxembourg, vous le savez, en a été victime d'une façon subite et extrêmement violente,

M. de Moorµ. - Pas le moins du monde.

M. Bouvierµ. - C'est dans le grand-duché.

M. Wasseigeµ. - Il y a peu de temps que le grand-duché et le Luxembourg belge ne faisaient qu'une de nos provinces.

- Un membre. - Et ils ne sont pas séparés par un mur de la Chine.

M. Wasseigeµ. - Je ne comprends pas l'importance de l'interruption.

Il est possible que le choléra ait diminué considérablement dans le Luxembourg, mais s'il faut en croire les journaux, il sévit d'une manière très violente encore en Hollande.

Eh bien, je le répète, alors que nous avons à craindre de voir avec les chaleurs cette épidémie terrible recommencer son cours à travers notre pays, est-ce bien le moment ne se livrer à des travaux du genre de celui pour lequel on sollicite notre concours ? Je ne le pense pas..

Je crois donc qu'en tout état de cause, il serait très désirable de voir ajourner ces travaux. Nous aurions le temps, en ajournant les travaux, d'examiner d'une façon plus sérieuse les différents projets en présence. Dans quelques mois une discussion nouvelle pourrait apporter plus de lumières, et d'ailleurs, la publicité donnée à cette affaire amènerait peut-être, ainsi que l'honorable Coomans le disait, de nouveaux concurrents.

On vous a déjà dit hier qu'une société avait offert de verser immédiatement un cautionnement de 1,250,000 fr. et que ce cautionnement était à la disposition du gouvernement, s'il voulait l'accepter. Il a été refusé. Je trouve que c'est une erreur, qu'il n'est pas trop tard pour faire un appel a la concurrence.

Et à propos de cautionnement, je ne sais si c'est l'honorable ministre des travaux publics ou un membre de la gauche qui disait hier : Avez-vous vu l'argent ? Je demanderai au gouvernement s'il a vu le cautionnement de la société avec laquelle la ville a traité, et où est ce cautionnement.

M. Ortsµ. - Oui, il est dans la caisse communale.

M. Bouvierµ. - Mais cela est dit dans le rapport.

M. Wasseigeµ. - Si le cautionnement de la société concessionnaire a été versé dans la caisse communale, je trouve qu'il y est illégalement, qu'il ne devrait pas y être ; voici pourquoi.

L'arrêté royal du 2 novembre 1848 dit ;

« Art. 23. Les cautionnements en numéraire et en fonds nationaux des personnes qui prennent part aux adjudications ou qui obtiennent des concessions de travaux d'utilité publique, sont assimilés aux fonds et consignations régis par la loi du 28 ventôse an XIII, et produisent les mêmes intérêts, à moins qu'il n en ait été autrement convenu par les contrats ; néanmoins ils sont versés chez les agents du caissier de l’Etat.

« Art. 24. Les cautionnements des entrepreneurs des travaux d'utilité publique en général, soit que ces travaux s'exécutent au profit de l'Etat, soit qu'ils aient lieu aux frais des provinces ou des communes, sont également déposés à ladite caisse et de la même manière comme le prescrit le paragraphe 2, article 23 précité. »

J'avais donc raison de dire que le cautionnement versé dans la caisse communale s'y trouvait illégalement ; ce qui prouve par parenthèse que les administrations publiques, voire même celle de la capitale, n'observent pas toujours la loi et que l'on est mal venu d'en faire un grief exclusif à charge des administrations spéciales. Vous le voyez donc, messieurs, beaucoup d'irrégularités ont été commises dans cette affaire ; régularisons donc le tout, rien ne presse, faisons appel à la concurrence, aux nouvelles idées, attendons des circonstances plus favorables, et nous n'aurons pas à nous en repentir.

MtpVSµ. - Messieurs, je suis convaincu que la proposition d'ajournement qui vient d'être produite par l'honorable M. Coomans et par l'honorable M. Wasseige, va à rencontre du sentiment de la presque unanimité des membres de cette Chambre.

M. Wasseigeµ. - Nous verrons cela au vote.

MtpVSµ. - Nous verrons cela au vole.

Dans ma conviction, le sentiment presque unanime des membres de cette Chambre, c'est qu'il faut en finir de la question de la Senne.

M. Coomansµ. - A condition de bien commencer.

MtpVSµ. - Justement.

M. de Brouckereµ. - Vous ne voulez pas qu'on commence.

MtpVSµ. - La Chambre veut en finir, comme Bruxelles veut en finir, comme le conseil communal veut en finir, comme le conseil provincial veut en finir, comme toutes les parties intéressés, autorités et public, veulent en finir avec infiniment de raison.

Qu'est-ce qu'on demande ? La Chambre demande deux choses : C'est que les fonds qu'on pétitionne soient dépensés et c'est que la part qu'on réclame au trésor ne soit pas exorbitante par rapport à la dépense générale.

Si la Chambre obtient des explications satisfaisantes sur ces deux points, je le répète encore, c'est ma conviction et nous verrons tout à l'heure au vote si elle est fondée, la presque unanimité des membres de cette Chambre est désireuse d'en finir.

Messieurs, il n'y a pas une question d'intérêt matériel qui soit à l'ordre du jour depuis aussi longtemps et pour laquelle on ait proposé autant de solutions que la question de la Senne. Il y a vingt ans que cette question est à l'ordre du jour, il y a vingt ans que l'initiative privée s'exerce sur cette question. Vous l'avez entendu hier, il ne s'est pas produit moins de 42 projets d'assainissement de la Senne. Quelle est la question d'intérêt matériel qui ait à ce point excité la verve des particuliers et des faiseurs de plans ?

M. Coomansµ. - Je le crois bien, parce qu'il y a des millions derrière.

MtpVSµ. - Je vous demande pardon ! C'est une question fort délicate que de savoir s'il y a des millions derrière.

M. Coomansµ. - S'il y avait des millions derrière la milice, il y a longtemps que nous aurions ce projet de loi.

MtpVSµ. - Je répète donc qu'il n'y a pas une question qui ait été mûrie autant que la question d'assainissement de la Senne.

Et qu'a-t-on fait finalement ? Il y a deux ans, l'on a institué une commission composée d'hommes comptant parmi les plus compétents du pays et les plus impartiaux, une commission composée de cinq ingénieurs eu chef, qui n'ont aucune espèce d'intérêt pécuniaire dans la question, et ou l'a investie de la tâche d'examiner les projets qui s'étaient produits jusque-là et d'en produire un nouveau, si les anciens ne leur paraissaient pas convenir.

(page 753) Cette commission, vous le savez, a été instituée le 3 juin 1865 et elle a produit son rapport le 30 mars 1865. Elle a donc mis un an à peu près à produire ce travail. Et vous viendrez dire aujourd'hui que la question n'est pas suffisamment mûrie !

Mais comment voulez-vous la mûrir davantage ? Vous vous déclarez personnellement incompétent. Les hommes les plus compétents out étudié la question avec toute la maturité possible, et vous voulez autre chose. Quoi ? Qui étudiera la question à l'avenir ? Je vous le demande ! Ce n'est pas vous ; vous dites que vous n'êtes pas une spécialité, et quand ou vous donne l'avis des spécialités, vous dites : Non, cela ne me convient pas ; il me faut autre chose.

M. Coomansµ. - Vos spécialités ne sont pas d'accord.

MtpVSµ. - Pardon ; elles sont unanimes.

M. Coomansµ. - Vos cinq ingénieurs, oui.

MtpVSµ. - Mais quelles sont ces spécialités qui ne sont pas d'accord ?

M. Coomansµ. - Il en est plus de cinq que je pourrais citer.

MtpVSµ. - Oui, des auteurs de plans. Mais précisément mes spécialités officielles, ces hommes qui jouissent d'une notoriété qui n'est pas contestée, qui ont un talent, un mérite universellement reconnus, n'avaient pas à soutenir un plan émané d'eux. Ils n'avaient rien produit, et comme le fait observer très justement l'honorable M. Elias, il n'y avait pas de millions à gagner pour eux. Ils ont donc, après un an d'études consciencieuses, produit un plan reposant sur les principes les plus élémentaires, pour l'appréciation desquels il suffit de vouloir, pendant une demi-heure, faire emploi de son bon sens. Qu'est ce qu'ils ont dit ? Ils ont dit que la Senne est infectée par les matières qu'on y déverse. Pour avoir une Senne pure, il faut ne plus y déverser ces matières. Réduite à ces proportions, la question est très simple ; aussi tous les plans qui sont venus ensuite ont pris pour point de départ le principe de la commission.

M. de Naeyerµ. - Ce principe était connu et admis avant le travail de la commission.

MtpVSµ. – Il a été mis en relief avec un soin tout particulier, on n'a plus raisonné que sur le point de savoir s'il faillait détourner la Senne ou s'il fallait la voûter. (Interruption.)

Ce n'est pas là une partie essentielle du projet. Savez-vous ce qui est une partie essentielle ?

C'est la séparation de la Senne des matières putrescibles, puis et surtout les dimensions, la forme, le mode de construction des ouvrages d'art. Les ingénieurs n'ont jamais dit que le voûtement de la Senne était incompatible avec son assainissement. Il y avait deux systèmes : l'un consistant à voûter, l'autre à ne pas voûter la Senne. Entre les deux systèmes ils ont manifesté leur préférence pour celui qui consistait à laisser la Senne couler à ciel ouvert, mais ce n'était là qu'une simple préférence. Postérieurement ils ont admis le voûtement et indiqué comment il fallait exécuter les travaux pour qu'ils offrissent la solidité voulue.

En somme, messieurs, il n'est pas de projet qui ait été étudié aussi à fond, et vous attendriez vingt ans, que vous ne feriez pas un pas de plus.

C'est dans ce sens, messieurs, que je disais que le sentiment universel est qu'on doit en finir.

Maintenant l'honorable M. Coomans objecte qu'en réalité, il s'agit beaucoup moins de l'assainissement de la Senne que d'une manœuvre employée par la ville pour soutirer des millions à l'Etat, dans un but d'embellissement. Eh bien, messieurs, rien n'est plus inexact. Le projet conçu par les ingénieurs est dégagé de tout élément d'embellissement ; ils proposent de rectifier la Senne de manière à faciliter l'écoulement des eaux et de séparer de la Senne les immondices, en construisant des égouts collecteurs. Ce sont bien là des travaux de pur assainissement ou d'utilité publique proprement dite. Or, messieurs, que devaient coûter ces travaux ? D'après les évaluations de la commission, ils devaient coûter 17 millions de francs, non compris les terrains nécessaires à l'exécution, les emprises.

Dans le plan sur lequel vous avez à voter, on retranche quelques-uns des travaux indiqués par la commission et en tenant compte des travaux retranchés et qui montent à 6,000,000 fr., je trouve que les travaux proposés par la commission sont exécutés jusqu'à concurrence de 10,400,000 fr., somme à laquelle il faut ajouter la valeur des terrains à emprendre ; en évaluant très modérément ces terrains, ou arrive à 9 millions ; c'est donc en tout 19,400,000 fr. du chef de l'écoulement des eaux et de l'assainissement.

Et qu’est-ce que l'Etat paye ? 7 millions dont il faut retrancher un million destiné à l'érection d une salle pour les expositions des beaux-arts. Il ne paye par conséquent pas le tiers de la dépense, tout embellissement à part.

Qu'on ne parle donc pas de travaux d'embellissement. Les travaux d'assainissement pur et de rectification de la Senne montent à 20 millions chiffre rond et l'Etat paie 6 millions... (Interruption). Qu'est-ce qu'il y a d'embellissement des travaux indiqués par la commission ?

On demande au gouvernement d'intervenir dans les seuls travaux d'assainissement et de rectification de la Senne, et c'est la ville seule qui supporte les travaux d'embellissement. Eh bien, messieurs, je suis d'avis que si l'on sollicitait du gouvernement d'intervenir dans une mesure modeste, même dans les travaux d'embellissement et que si le gouvernement y consentait, il ne ferait que son devoir. La capitale a des droits spéciaux à la sollicitude de l'Etat, et je n'ai aucun motif pour ne pas émettre cette opinion. Ce que l'on fait pour la capitale, on le fait pour le pays, on le fait dans un intérêt de nationalité.

L'honorable M. Coomans et après lui l'honorable M. Wasseige ont parlé de la situation du trésor. Il est clair que si l'on était complètement libre on voterait aujourd'hui le moins de millions possible. Mais on n'a pas cette liberté, il s'agit d'une convention faite lorsque les événements qui se produisent aujourd'hui ne s'annonçaient même pas ; elle remonte, en effet, au commencement de l'année dernière.

Il s'agit donc bien plus de savoir si nous pouvons déchirer une convention loyalement faite que de savoir si la situation du trésor est bonne ou mauvaise.

L'honorable M. Wasseige a entretenu encore la Chambre de deux points techniques ; il a dit : Le mal ne gît pas dans l'infection de la Senne, il git dans l'infection provenant des égouts ; c'est le système des égouts qu'il faudrait modifier. Mais, messieurs, c'est précisément ce que l'on fait, ; le principe de la commission consiste à séparer les matières d'égouts de la Senne proprement dite, et en deuxième lieu à prévoir que les matières putrescibles ne séjournent dans les égouts ; qu'elles soient incessamment entraînées dans l'égout principal ; le système général des égouts de la capitale se compose de deux parties, une partie qui descend du haut de la ville vers le bas ; là l'écoulement est toujours instantané.

Mais, arrivées dans le bas de la ville, les immondices s'arrêtent aujourd'hui, et c'est là qu'il faut un mode particulier de construction pour les entraîner rapidement. Eh bien, c'est ce mode de construction de l'égout collecteur qui se trouve dans le bas de la ville, qui est proposé par la commission, et ainsi la commission a prévu l'objection que présente l'honorable M. Wasseige et elle l'a résolue,

L'honorable M. Wasseige enfin a parlé du choléra. Il croit que la loi votée et la convention définitivement arrêtée avec la compagnie, on va immédiatement faire des travaux d'où se dégageront des miasmes pestilentiels,

Il n'en est rien ; en niellant toute l'activité possible à ces travaux, je ne pense pas qu'on puisse mettre une pelle en terre avant l'année prochaine. Il faudra d'abord nettement arrêter le cahier des charges ; poursuivre toutes les formalités administratives que commandent l'expropriation par zone et les acquisitions de terrains. Les craintes de l'honorable M. Wasseige sont donc mal fondées, et de ce côté rien ne doit arrêter la Chambre. (Aux voix ! aux voix !)

- Des membres. - La clôture !

M. Coomansµ (contre la clôture). - M. le ministre m'a mis au défi de réfuter ses arguments ; la Chambre doit donc me laisser la liberté de répondre.

MpVµ. - Je dois dire qu'il n'est pas dans l'habitude de la Chambre de clore après un discours de ministre.

- Voix nombreuses. - Parlez ! Parlez !

M. Coomansµ. - Le grand argument de l'honorable ministre est que l'assainissement de Bruxelles doit coûter 17 millions et que le trésor n'interviendra que pour 1/3 dans la dépense. Donc, dit-il, vous êtes en contradiction avec vous-même. La question n'est pas là : elle est ailleurs, non seulement pour moi, mais pour l'honorable ministre, pour la ville de Bruxelles, et pour la compagnie concessionnaire.

Toute cette entreprise serait impossible sans l'expropriation. Or, je suis de ceux qui admettent le principe d'une large expropriation, de l'expropriation par zone,

(page 751) Je criîs avec un éminent financier qu'il eût été possible de faire supporter tous les frais de l'assainissement et de l’embellissement par les travaux mêmes.

Deux mots à ce sujet. Pourquoi notre ville de Bruxelles, comme presque toutes les villes anciennes et les villes du moyen âge est-elle si irrégulièrement bâtie ? Uniquement parce que l'expropriation était inconnue de nos pères. La ville de Bruxelles ne se composait autrefois que de moulins de Sans-souci auxquels il était impossible de toucher : ni les ducs, ni les souverains, ni les communes ne pouvaient exproprier la moindre maison, d'où la nécessité de bâtir toujours en zig-zag.

Nous sommes revenus en grande partie sur cette erreur, nous avons admis aujourd'hui le principe de l'expropriation ; mais peut-être ne l'appliquons nous pas assez largement ; ma conviction est que si nous l’avions appliqué avec justice et avec intelligence, il eût été possible de ne pas faire payer un centime ni aux contribuables de Bruxelles, ni à ceux de la Belgique entière.

Je vais répondre maintenant à deux ou trois observations qui m'ont été brièvement faites, et je tâcherai d'y répondre plus brièvement encore.

M. Orts affirme que l'élection de M. Splingard ne prouve rien, attendu que M. Splingard était partisan du projet avant son élection.

Il n'en est rien. Tous les journaux qui ont combattu l'élection de M. Splingard l'ont fait en présentant M. Splingard aux électeurs comme un adversaire du projet de la ville de Bruxelles, et c'est sur ce terrain que l'élection a eu lieu. M. Splingard en est sorti triomphant ; il m'est donc permis d'en conclure, pour autant qu'on puisse conclure quelque chose d'une élection à suffrage restreint, que la majorité de la population bruxelloise est contraire au projet de la ville.

Maintenant, dit-on, mes arguments sont vieux au lieu d'être neufs. Je ne m'en plaindrai pas ; je crois que les meilleurs arguments sont les vieux, ils ont du moins prouvé ceux-là qu'ils avaient la vie dure, tandis que maints arguments ne seront plus rien, ni jeunes ni vieux, sous peu. Et qui donc a répondu à cette observation que j'ai pris la liberté de vous répéter, que d'autres concessionnaires se présentent et vous offrent des conditions plus favorables que celles qui vous ont été faites ? Est ce qu'il n'y aurait de solvable en Europe que la maison avec laquelle vous avez traité ? Pourquoi repousser les offres qui vous sont faites par des hommes honorables ; y a-t-il donc péril en la demeure ?

Je maintiens que, sous tous les rapports, la question n'est pas mûre et que nous agirions sagement en votant l'ajournement.

- La discussion générale est close.

MpVµ. - Il y a lieu de voter d'abord la proposition d'ajournement de M. Coomans.

- Des membres : L'appel nominal.

- Il est procédé à cette opération.

85 membres y prennent part.

25 répondent oui.

60 répondent non.

En conséquence, la Chambre n'adopte pas.

Ont répondu oui :

MM. Royer de Behr, Schollaert, Snoy, Thienpont, Thonissen, Vander Donckt, Van Renynghe, Verwilghen, Wasseige, Coomans, Delcour, de Liedekerke, de Mérode, de Ruddere de te Lokeren, de Smedt, de Theux, d'Hane-Steenhuyse, Jacobs, Janssens, Julliot, Landeloos, Magherman et Notelteirs.

Ont répondu non :

MM. Orban, Orts, Reynaert, Sabatier, Tack, Tesch, T'Serstevens, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vilain XIIII, Vleminckx, Warocqué, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Carlier, Couvreur, Crombez, de Bast, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove, de. Macar, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Terbecq, Dewandre, Dolez, Dupont, Elias, Frère Orban, Funck, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Lange, Le Bailly de Tilleghem, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Moreau, Mouton, Millier, Nélis, Nothomb et Ern. Vandenpeereboom.

Discussion des articles

MpVµ ; - Nous abordons la discussion des articles.

Article premier

« Art. 1er. Le crédit alloué au gouvernement par le paragraphe 9 de l’article premier de la loi du 8 juillet 1865 (part d’intervention de l’Etat dans les travaux d’assainissement de la Senne) est augmenté de trois millions de francs. »

M. Coomansµ. - Dans les faubourgs déjà si populeux de Bruxelles, on se préoccupe d'un point que je voudrais voir éclaircir.

Je n'affirme rien, je doute et je désire ne plus douter.

On dit qu'il y a eu des pourparlers entre des membres de l'édilité bruxelloise, et des membres du ministère au sujet de la future et peut-être prochaine annexion des faubourgs à la capitale. (Interruption.)

Eh bien, messieurs, c'est sur ce point que je demanderai des éclaircissements.

MiVDPBµ. - Je ne sais vraiment pas, messieurs, si je dois répondre à la question que m'adresse l'honorable M. Coomans.

- Voix à gauche. - Non ! non !

- Voix à droite. - Si ! si !

MiVDPBµ. - Eh bien, je lui dirai qu'aucune ouverture n'a été faite au gouvernement, et je crois qu'il n'est pas question le moins du monde de ce projet.

M. Coomansµ. - Me voilà satisfait.

- L'article premier est mis aux voix et adopté.

Article 2

« Art. 2. Un crédit d un million de francs est accordé au ministre de l'intérieur pour l’érection d'une salie d'exposition des beaux-arts, à Bruxelles. »

MpVµ. - Le gouvernement, d'accord avec la section centrale, propose de modifier comme suit l'article 2 :

« Un crédit d'un million de francs est accordé au ministre de l'intérieur et formera la part de l'Etat dans les frais d'érection par la ville de Bruxelles d'une salle d'exposition des beaux-arts et des fêtes ou cérémonies publiques. »

- Cette nouvelle rédaction est adoptée.

Article 3

« Art. 3. Ces crédits seront couverts au moyen des ressources ordinaires. »

MpVµ. - A cet article, M. Le Hardy propose d'ajouter la disposition suivante :

« Le gouvernement est autorisé à faire sur ces crédits une avance de cinquante mille francs pour h confection des plans et devis définitifs. »

M. Bouvierµ. - Cet amendement est retiré.

MpVµ. - M. Le Hardy insiste-t-il ?

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Je n'insiste pas si la ville veut faire les frais elle-même.

MpVµ. - Le maintenez-vous ou le retirez-vous ?

M. Bouvierµ. - Relirez ! retirez !

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Soit, je le retire ! (Interruption.)

- L'article 3 est adopté.

Article 4

« Art. 4. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »

MpVµ. - Ici se rattache un second amendement de M. Le Hardy, ainsi conçu :

« Art. 4. La présente loi sera exécutoire aussitôt que des plans complets, détaillés et définitifs auront été remis à M. le ministre des travaux publics et approuvés par lui. Il sera rendu compte annuellement à la législature de l'emploi des fonds. »

M. Le. Hardy maintient-il cet amendement ?

M. Le Hardy de Beaulieuµ. - Oui, M. le président.

- L'amendement est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

L'article 4 du projet, est mis aux voix et adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé à l'appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

82 membres y prennent paît.

66 répondent oui.

16 répondent non.

En conséquence, la Chambre adopte.

Le projet de loi sera transmis un Sénat.

Ont répondu oui :

MM. Orban, Orts, Reynaert, Sabatier, Schollaert, Tack, Tesch, Thonissen, T'Serstevens, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Warocqué, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Cartier, Couvreur, Crombez, de Bast, de Brouckere, de Decker, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove, de Macar, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Smedt, de Terbecq, Dewandre, Dolez, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Janssens, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Lange, Le Bailly de Tilleghem, Le Hardy de. Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Moreau, Mouton, Muller, Nélis, Nothomb et Ernest Vandenpeereboom.

Ont répondu non :

MM. Royer de Behr, Snoy, Thienpont, Vander Donckt, Van Renynghe, (^page 755) Wasseige, Coomans, Delcour, de Ruddere de te Lokeren, de Theux, d'Hane Steenhuyse, Jacobs, Julliot, Landeloos, Magherman et Notelteirs.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. J. Jouretµ. - J'ai l'honneur de déposer quatre rapports sur des demandes de naturalisation ordinaire.

- Ces rapports seront imprimés et distribués et les demandes portées sur un prochain feuilleton.

Projet de loi autorisant le gouvernement à concéder des chemins de fer vicinaux dans le Brabant

Discussion de l’article unique

MpVµ. - La discussion est ouverte sur l'article unique, auquel il est apporté un changement qui consiste dans la suppression des mots : « annexés à la présente loi ».

L'article serait donc ainsi conçu :

« Article unique. Le gouvernement est autorisé, à concéder, aux clauses et conditions de la convention et du cahier des charges, en date du 19 mars 1866, un réseau de chemins de fer destinés à relier entre elles et à la ville de Bruxelles, plusieurs villes et communes rurales situées dans la province de Brabant et dans les parties limitrophes des provinces de la Flandre orientale et du Hainaut. »

M. Coomansµ. - Enfin, messieurs, voici uu projet sur lequel j'espère que nous émettrons un vote unanimement favorable ; du moins je n'ai entendu formuler aucune critique.

Les chemins de fer circulaires réaliseront de grands progrès dans les environs de Bruxelles, surtout, lesquels figurent parmi les plus arriérés de la Belgique entière. Je désire donc, que l'exécution de ce projet ait lieu le plus tôt possible.

Il me reste pourtant une crainte ; c'est que les conditions faites au concessionnaire par le gouvernement ne soient ou ne deviennent une entrave à cause de la légèreté extraordinaire avec laquelle elles paraissent avoir été rédigées.

Je n'ai pas l'honneur de connaître le concessionnaire ; mais tout ce que j'ai entendu dire de cet honorable citoyen lui est parfaitement favorable ; je ne comprends pas pourquoi on s'est montré à son égard beaucoup plus sévère qu'à l'égard d'autres concessionnaires,

Je fais allusion au prix kilométrique de la construction des voies ferrées projetées, prix dont la modicité est extrême, ainsi que le dit l'exposé des motifs lui-même. J'espère bien que ce ne sera pas un obstacle à l'exécution du projet...

MtpVSµ. - Nullement.

M. Coomansµ. - Je me borne donc à prier le gouvernement de hâter par tous les moyens possibles la réalisation d'un excellent projet que je voterai avec le plus grand plaisir.

M. Carlierµ. - J'ai lu avec satisfaction, à la fin du travail de l'honorable rapporteur, que M. le ministre des travaux publics avait promis d'étudier prochainement les projets destinés à relier Mons à Enghien et à abréger les détours de la voie qui unit actuellement la capitale de ma province et la capitale du pays.

Je viens insister pour que M. le ministre veuille bien donner incessamment suite à cette promesse.

La construction des chemins de fer vicinaux brabançons va rapprocher les bassins du centre et de Charleroi de Boom et d'Anvers, et placer le bassin de Mons dans des conditions de concurrence évidemment désavantageuses. Il importe que l'égalité soit promptement rétablie entre les trois bassins ; j'espère que je ne ferai pas, à cet égard, un vain appel à la justice et à la bienveillance de M. le ministre.

MtpVSµ. - Messieurs, contrairement à ce que pense l'honorable M. Coomans, le prix total des chemins de fer vicinaux dans le Brabant est amplement suffisant pour réaliser cette entreprise. Ce prix a été présenté par le concessionnaire lui-même.

Quant au chemin de fer dont pa.de l'honorable M. Carlier, le projet m'en a été soumis il y a quelques jours seulement. Je promets volontiers à l'honorable membre d'en faire l'objet d'un examen prochain.

M. Jacobsµ. - Messieurs, le gouvernement a déjà déposé des projets de loi autorisant l'Etat à concéder des chemins de fer vicinaux dans le Brabant, dans le Hainaut et dans les Flandres. Je demanderai à M. le ministre, des travaux publics s'il ne peut nous faire espérer que, dans un avenir plus ou moins rapproché, il proposera à la Chambre la concession d'un réseau de chemins de fer vicinaux dans la province d'Anvers. C’est peut-être dans cette province que se trouvent le plus de chefs-lieux de cantons non encore reliés à notre réseau ferré.

- Un membre. - Y a-t-il des demandes de concession ?

M. Jacobsµ. - Il y a eu plusieurs demandes de concessions, je désire connaître les intentions du gouvernement à cet égard, et notamment sur la concession d'un chemin de fer d'Auvers à Breda. Ceci me conduit à un autre point.

Le gouvernement a été autorisé à construire un canal de Turnhout à Anvers. On prétend que le gouvernement a le dessein de remplacer la section de Saint-Job in t' Goor à Anvers par un chemin de fer ; je prie l'honorable ministre de vouloir bien donner quelques explications à ce sujet.

MtpVSµ. - Messieurs, le gouvernement est disposé à faire concéder dans le nord de la province d'Anvers tous les chemins de fer qu'on demande, à la condition qu'il aura la certitude que ces demandes sont sérieuses. Je dois constater que ce cas est extrêmement rare.

Je me suis encore occupé, dans ces derniers jours, d'une concession de chemin de fer que je comptais comprendre dans l'un des projets de loi qui ont été soumis récemment à la législature.

Il s'agit du chemin de fer de Malines à Achel. J’ai de exiger des garanties qui ne m'ont pas été fournies.

Il en est de même du chemin de fer d'Anvers à Breda, dont parle l'honorable M. Jacobs. II y a deux ans que j'ai déclaré être prêt à concéder ce chemin de fer.

En ce qui concerne le projet de remplacer, par un chemin de fer, le canal de Turnhout par Saint-Job à Anvers, sur une partie de son parcours, c'est évidemment un projet qui mérite d'être examiné.

Mais il doit être bien entendu que, si au lieu de construire le canal de Turnhout à Saint-Job, le gouvernement concède ou aide à faire construire un chemin de fer, il ne pourra plus être question d'accoler un chemin de fer au canal ou ub canal au chemin de fer. Il ne doit pas y avoir d'équivoque là-dessus. L'un est absolument exclusif de l'autre.

M. Coomansµ. - Messieurs, puisque le canal dont on parle est dans mon domaine électoral, je demanderai la permission d'en dire quelques mots.

Ce canal est à peu près sacrifié dans la pensée de M. le ministre des travaux publics. Je suis loin de m'en plaindre. Il y a longtemps que je soutiens ici et ailleurs que l'ère des canaux est close ; et je crois avec l'honorable M. Nélis, qui sourit de satisfaction, que c'est réellement jeter les deniers publies à l'eau que de construire encore des canaux dans le pays.

C'était jadis un excellent système de locomotion ; mais le progrès aidant, il ne vaut plus grand-chose aujourd'hui, et bientôt il ne vaudra plus rien. Arrêtons-nous dans cette voie, et ne votons plus un sou pour les canaux.

- La discussion est close.

Vote de l’article unique

MpVµ. - L'article unique du projet est ainsi conçu :

« Article unique. Le gouvernement est autorisé à concéder, aux clauses et conditions de la convention et du cahier des charges, en date du 19 mars 1866, annexés à la présente loi, un réseau de chemins de fer destinés à relier entre elles et à la ville de Bruxelles, plusieurs villes et communes rurales situées dans la province de Brabant et dans les parties limitrophes des provinces delà Flandre orientale et du Hainaut. »

- Il est procédé au vote par appel nominal sur ce projet, qui est adopté à l'unanimité des 80 membres présents.

Ce sont :

MM. Orban, Orts, Reynaert, Rogier, Schollaert, Snoy, Tesch, Thibaut Thienpont, Thonissen, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Van Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier, Braconier, Carlier, Coomans, Couvreur, Crombez, David, Debaets, de Baillet-Latour, de Bast, de. Brouckere, de Decker, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove, Delcour, de Macar, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de. Rongé, de Ruddere de le Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Dewandre, Dolez, Dumortier, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Goblet, Grosfils Guillery Hymans, Jacobs, Janssens, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, Le Bailly de Tilleghem, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Magherman, Moreau, Mouton, Millier, Nélis, Notelteirs, Nothomb et Ern. Vandenpeereboom.

Projet de loi contenant l’acte d’accession du duché de Saxe-Cobourg à la convention littéraire et artistique conclue le 11 mars 1866

Dépôt

(page 756) MaeRµ. - J’ai l’honneur de déposer sur le bureau l'acte d'accession du duché de Saxe-Cobourg à la convention littéraire et artistique qui a été conclue avec la Saxe royale le 11 mars 1866.

Cet acte est en tout semblable à celui que nous avons signé avec le duché de Saxe-Meiningen. Il n'en diffère que quant à l'époque de la mise en vigueur. Je crois qu'on pourrait le renvoyer à la commission qui a examiné ce dernier.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi.

La Chambre en ordonne l'impression et la distribution et le renvoi à la commission qui a examiné l'acte d'accession du duché de Saxe-Meiningen.

Projet de loi autorisant le gouvernement à concéder des chemins de fer vers Maeseyck et Virton, moyennant garantie d’un minimum d’intérêt aux concessionnaires

Discussion générale

MpVµ. - La discussion générale est ouverte.

M. Teschµ. - Messieurs, je ne viens pas combattre le projet de loi qui vous a été soumis par le gouvernement. Je le remercie, au contraire, très sincèrement de l'avoir déposé.

Mais il est un point qui a donné lieu à des réclamations : c'est la disposition qui fixe le point de départ de ce chemin de fer qui doit relier Virion à la ligne actuelle.

Cette disposition est ainsi conçue :

« Un chemin de fer se détachant de la ligne de Namur à Arlon, à ou vers Marbehan, et se dirigeant vers la frontière française en passant par ou près de la ville de Viritn. »

Ce sont ces mots « à ou vers Marbehan », qui ont donné lieu h des réclamations dont la Chambre a été saisie par la chambre de commerce de la province de Luxembourg, et par différents habitants d'Arlon.

Je n'ai eu connaissance du projet, que comme tout le monde, par la présentation qui en a été faite à la Chambre. Il me serait donc impossible de m'expliquer d'une manière catégorique et absolue sur la question de savoir quel est le point de départ le plus convenable. Il faudrait pour cela s'être livré à des études que je n'ai pas faites.

Aussi, messieurs, ne suis-je pas en mesure de critiquer le point de départ qui a été indiqué par M. le ministre des travaux publics, comme je ne puis pas démontrer que celui qui est indiqué par la chambre de commerce et par des habitants d'Arlon soit le meilleur. Mais il me semble qu'il y aurait un moyen de sauvegarder tous les intérêts : ce serait de ne pas se lier par le projet de loi et de laisser a la décision ultérieure du gouvernement le point de départ que devrait avoir ce chemin de fer ; c'est-à dire qu'il suffirait de supprimer ces mots : » à ou vers Marbehan », et de rédiger l'article de la manière suivante :

« Un chemin de fer se détachant de la ligne de Namur à Arlon, et se dirigeant vers la frontière française en passant par ou près de la ville de Virion. »

De cette manière tous les intérêts seraient sauvegardés. On pourrait examiner quel est le point de départ qui doit être préféré. J'en ai entendu indiquer plusieurs autres différents de celui qui est porté au projet et de celui qui a été demandé par la chambre de commerce du Luxembourg. Après études faites, le gouvernement, restant dans la plénitude de sa liberté, désignerait le point de départ qui donnerait satisfaction au plus grand nombre d'intérêts. Je crois que cela ne présenterait aucune espèce d'inconvénients.

Il y a, messieurs, un motif spécial qui me semble devoir porter la Chambre à admettre ma proposition.

Le projet que nous discutons est d'une date très récente ; le rapport en a été fait très promptement. On en a à peine eu connaissance et l'éveil n'a pas encore pu être donné aux intérêts qui se trouvent engagés dans ce débat.

Si la Chambre ne lie pas le gouvernement, cette question de savoir quel sera le point de départ resterait entière. Les populations intéressées pourraient faire entendre leur voix auprès du gouvernement qui, je n'en doute pas, donnerait, comme je l'ai dit tantôt, la préférence au chemin de fer qui favoriserait le plus à la fois le commerce, l'industrie, l'agriculture et l'exportation des produits de ce pays.

Je demande donc que la Chambre veuille bien supprimer ces mots : « à ou vers Marbehan ». Le gouvernement restera libre, et si après études faites, il trouve que le tracé qu'il indique aujourd'hui est de tous le meilleur, après comparaison faite avec tous les autres tracés qui lui seront, sans doute, signalés, il trouve celui de Marbehan le plus convenable, il maintiendra son opinion ; que si, au contraire, il reconnaît qu'un autre tracé présente plus d'avantages, il lui donnera la préférence. Remarquez bien que pour le gouvernement, cela ne peut être qu'une question secondaire, puisque le minimum d’intérêt fixé par le projet reste, dans tontes les hypothèses, le même.

MtpVSµ. - Je suis fâché de ne pouvoir me rallier à la proposition de l’honorable M. Tesch. Mais les raisons qui l'engagent à faire cette proposition sont précisément celles qui m'engagent à ne pas l'accepter. L'honorable membre voudrait laisser ouverte la question de savoir s'il faut décréter un tracé tel que celui qui est indiqué au projet, ou si le gouvernement doit se réserver la faculté de décréter un autre tracé, celui auquel l'honorable M. Tesch a fait allusion, reliant Virton à Arlon.

Je pense qu'il vaut mieux vider cette question. Le gouvernement a intentionnellement rédigé la loi telle qu'elle vous est soumise. Au lieu de laisser la question ouverte, il a voulu la fermer. Et pourquoi ? Parce que le gouvernement croit que le tracé qu'il propose est infiniment préférable à celui qu'indique l'honorable M. Tesch comme pouvant être mis en parallèle. Or, si le gouvernement est décidé à préférer le tracé défini par le projet de loi, il serait très regrettable de laisser la question en apparence indécise.

Ces questions de tracés, messieurs, passionnent souvent les esprits, et puisque le gouvernement a une détermination prise, il serait de très mauvaise pratique administrative d'accepter une position qui doit nécessairement conduire à des animosités, à des luttes d'intérêts privés.

Je dis que le gouvernement est décidé. De quoi s'agit-il en effet ? Il s'agit de faire un chemin de fer pour Virton et non pas pour Arlon. Arlon est relié au pays de divers côtés, il est relié au grand duché. Arlon est parfaitement desservi. Il s'agit de faire un chemin de fer pour Virton qui n'est relié à aucune ligne. Quel est le plus grand intérêt de Virton ? C'est d'être relié au cœur du pays ; c'est avec le cœur du pays que les habitants de Virton ont le plus de relations ; c'est vers le cœur du pays qu'il faut pouvoir les amener le plus promptement, le plus économiquement.

Pour les marchandises, c'est la même chose ; tout ce qui se produit dans l'arrondissement de Virton se débitera bien mieux dans le centre du pays que dans le coin qui s'appelle Arlon.

S'il fallait passer par Arlon ce serait pour Virton un détour de 25 kilomètres ; ce serait complètement méconnaître le but de la loi.

Je demande donc à la Chambre de vouloir bien maintenir le projet tel qu'il a été formulé après mûr examen par le gouvernement.

M. Teschµ. - Messieurs, je ferai remarquer que je n'ai pas indiqué de tracé.

(erratum, page 780) M. Bouvierµ. - Ni moi non plus.

M. Teschµ. - J'ai déclaré que je n'avais eu connaissance du projet qu'en même temps que les autres membres de la Chambre et qu'il m'était, par conséquent, impossible de venir défendre en parfaite connaissance de cause un tracé plutôt qu'un autre, j'ai entendu parler, par des gens compétents, d'un tracé intermédiaire. Je n'ai pas été à même d'examiner ce tracé ; ce que je désire, ce que je demande c'est qu'on examine, c'est qu'on étudie.

J'admets parfaitement que l'intérêt des habitants de Virton doit être pris en sérieuse considération ; c'est pour eux que le projet est principalement présenté ; mais si l'on trouvait un tracé qui, tout en rapprochant les habitants de Virton du cœur de la Belgique, pouvait cependant aussi donner satisfaction à ces intérêts, qui les amène bien plus souvent au chef-lieu de la province que dans les autres parties du pays, il me paraît que ce trace serait de beaucoup préférable. Il donnerait satisfaction à tous les intérêts à la fois.

Messieurs, il faut bien prendre garde à une chose : l'indication d'un tracé fait d'avance présente toujours de très grands dangers, à moins qu'il n'y ait eu des études très complètes faites à l'avance.

Nous en avons eu la preuve dans ce qui s'est passé pour le chemin de fer du Luxembourg : l'indication des points par lesquels les concessionnaires ont été obligés de passer n'est peut-être pas une des moindres causes des grandes difficultés que présente aujourd'hui cette ligne.

J'insiste donc pour que la Chambre adopte mon amendement ; il ne peut présenter aucun inconvénient : le gouvernement restera maître de maintenir son tracé s'il trouve qu'il est réellement préférable, et il conservera la liberté d'en adopter un autre si d'ultérieures études font reconnaître qu'il en existe un meilleur. Je comprendrais l'opposition s'il s'agissait de faire dès maintenant (page 757) admettre un autre tracé ou dépouiller le gouvernement de sa liberté ; il s'agit au contraire de lui maintenir celle-ci entière, de ne pas le lier par la loi ; tout le monde en pareil cas semble devoir être d’accord.

MtpVµ. - Je reconnais que l'amendement de l'honorable M. Tesch laisse toute liberté au gouvernement ; mais, encore une fois, j'ai étudié la question et j'ai des motifs puissants pour maintenir la proposition du gouvernement.

Les. habitants de Virton n'ont pas réclamé ; ils trouvent la loi, telle qu'elle est conçue, parfaitement bonne et je pense que te point de fait est suffisant pour engager la Chambre à ne pas adopter l'amendement.

M. Bouvierµ. - Je remercie le gouvernement d'avoir présenté le projet du loi et j'associe à mes remercîments les membres qui voudront bien le voter.

M. Van Hoordeµ. - Messieurs, j'applaudis, à mon tour, à l'idée du projet de loi, qui est le payement d'une dette nationale, comme le dit le rapport de la section centrale. Je le voterai avec empressement, et de tous les votes que j'ai été appelé à émettre, aucun ne m'aura causé une satisfaction plus vive. Elle est d'autant plus grande que ces bonnes dispositions du Gouvernement, et l'excellent accueil que la Chambre me semble disposée à leur faire, me donnent l'espoir de voir, un jour, si les faits en démontrent la nécessité, le département des travaux publics adopter le même principe à l'égard d'une ligne de chemin de fer qui doit traverser deux autres arrondissements d'une de ces provinces-frontières dont les exigences politiques ont amoindri l'importance : la ligne de Sedan à Saint-Vith.

En 1862, cette ligne avait obtenu l'encouragement d'une subvention de l'Etat, qui était, je crois, de 40,000 francs par kilomètre. Mais, l'année suivante, lors de la concession du réseau Forcade, cette subvention a été passée sous silence. J'ai déjà eu l'occasion d'exprimer publiquement les regrets qu'a occasionnés le retrait de l'intervention de l'Etat, et j'ai appuyé de toutes mes forces, pendant la discussion de la dernière loi de travaux publics, les vœux de plusieurs corps constitués de la province de Luxembourg et de tous ses habitants qui demandaient instamment de revenir sur cette erreur.

La grande ligne internationale dont il s'agit est au moins aussi bonne, elle est destinée à devenir au moins aussi prospère que les chemins de fer de Maeseyck et de Virton. Si l'Etat consent à aider sa construction par la garantie d'un minimum d'intérêt, nul doute, donc, que cette garantie ne soit également purement nominale après fort peu de temps. En outre, les intérêts qu'elle doit desservir sont tout aussi respectables, car son exécution est attendue impatiemment par un grand nombre de localités importantes, parmi lesquelles il suffit de citer : Bouillon, Bertrix, Houffalize et Vielsalm. Enfin, l'acte de réparation que constituerait ici l'intervention pécuniaire de l'Etat serait tout aussi légitime, attendu que les arrondissements de Neufchâteau et de Bastogne n'ont pas moins souffert que les autres des conséquences du traité de 1839.

Je n'insiste pas pour avoir une solution immédiate de la question. Peut-être l'intervention dont j'ai parlé ne sera-t-elle pas indispensable. C'est l'opinion de M. le ministre des travaux publics. S'il en est ainsi, tant mieux !

J'ai seulement voulu faire une réserve pour le cas où l'avenir prouverait le contraire, et constater que la loi présentée aujourd'hui donne aux populations intéressées le droit d'envisager désormais avec moins d'inquiétude une éventualité qui, jusqu'à présent, leur avait paru fort redoutable.

MtpVSµ. - Je suis fâché de prolonger la discussion, mais je dois cependant ne pas laisser se créer des illusions. L'honorable M Van Hoorde parle d'une nouvelle garantie d'intérêt qu'il ne demande pas aujourd'hui, mais qu'il annonce comme une éventualité ; la franchise que je tiens à mettre dans tous mes actes vis-à-vis de la Chambre m'oblige à déclarer que je ne puis pas accepter cette éventualité ; ma conviction est que l'ère des garanties d'intérêt est close.

M. Coomansµ. - Demain.

MtpVSµ. - Il y avait une raison spéciale pour accorder encore une garantie d'intérêt en faveur de Virton et de Maeseyck, les derniers arrondissements qui restent à relier au réseau de nos chemins de fer ; mais cela fait, je crois que l'ère des garanties d'intérêt sera définitivement fermée. Je crois qu'il est bon que le gouvernement se prononce à cet égard d'une manière claire et catégorique. Si les demandeurs en concession s'imaginaient qu'ils peuvent encore espérer des garanties d'intérêt, ces demandes se reproduiraient journellement.

Or, je dois déclarer que depuis assez longtemps déjà plus aucune demande de cette nature n'a été adressée au gouvernement. On sait que le gouvernement a un système et je saisis l’occasion qui m'est offerte pour faire connaître que ce système, le gouvernement compte le maintenir d'une manière très nette, dans toutes les circonstances futures. Par conséquent si pour le chemin dont parle l'honorable M. Van Hoorde, une. combinaison pratique ne parvenait pas à se réaliser, il ne devrait pas compter sur une garantie d'intérêt ; elle lui serait refusée.

M. Van Hoordeµ. - J'ai indiqué sommairement les motifs qui me font espérer de voir appliquer à la ligne de. Sedan à Saint-Vith, si la nécessité s'en fait sentir, le principe qui forme la base du projet que nous allons adopter. L'honorable ministre des travaux publics conteste qu'on puisse raisonner par analogie. Il le conteste, et voilà tout. Je suis le premier à reconnaître que le moment de discuter la question n'est pas encore venu. Je ne lui reproche donc pas son laconisme.

Mais en attendant que ce moment arrive, s'il arrive, je conserve, avec l'espoir que j'ai manifesté, celui de convaincre l'honorable ministre de la justesse de mes observations. Cela me sera d'autant plus facile qu'il a exprimé plusieurs fois, lui-même, une pensée tout à fait favorable à ma thèse, à savoir que le gouvernement doit intervenir quand des entreprises de chemins de fer viables en elles-mêmes ne peuvent cependant pas se soutenir à l'origine.

Je n'ajouterai qu'un mot. Il est vrai que les concessionnaires n'ont rien demandé en 1863, mais s'ils s'étaient trompés, faudrait-il rendre toute une province responsable de l'erreur qu'ils auraient commise ? Personne ici ne voudra soutenir l'affirmative, et, le cas échéant, le gouvernement belge ne pourra pas se montrer moins généreux que le gouvernement prussien qui intervient pour une somme de plusieurs millions dans l'établissement du réseau Forcade sur le territoire des provinces rhénanes.

- La discussion est close.

Discussion des articles

Article premier

MpVµ. - Il y a un amendement de M. Tesch qui consiste dans la suppression des mots « ou vers Marbehan » dans l'article premier. Je le mets aux voix.

- Cet amendement n'est pas adopté.

« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à concéder :

« 1° Un chemin de fer de Hasselt à Maeseyck, avec prolongement éventuel vers la ligne néerlandaise de Venloo à Maestricht, ; 2° Un chemin de ter se détachant de la ligne de Namur à Arlon, à ou vers Marbehan, et se dirigeant vers la frontière française en passant par ou près de la ville de Virton. »

- Adopté.

Articles 2 et 3

« Art. 2. La concession de ces deux chemins de fer pourra être accordée moyennant une garantie d'intérêt qui ne dépassera pas respectivement cent cinquante mille francs (fr. 150,000) pour le premier, et deux cent soixante-quinze mllle francs (fr. 275,000) pour le second.

- Adopté.


« Art. 3. Dans le cas où le produit net de l'exploitation de ces deux chemins de fer excéderait pour la première ligne deux cent mille francs (fr. 200,000), et pour la seconde trois cent quatre-vingt mille francs (fr. 330,000), l'excédant serait versé à la caisse du Trésor à concurrence des sommes éventuellement payées par l'Etat du chef de la garantie pendant les années antérieures. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble.

74 membres y prennent part.

73 membres répondent oui.

1 membre s'abstient.

En conséquence, la Chambre adopte.

Ont répondu oui :

MM. Orban, Orts, Reynaert, Rogier, (erratum, page 780) Snoy, Thienpont, Thonissen, T'Serstevens, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Vau Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Warocqué, Wasseige, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Carlier, Couvreur, Crombez, de Bast, de Brouckere, de Decker, de Florisone, De Fré, de Kerchove, Delcour, de Macar, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Dewandre, (page 758) Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Julliot, Landeloos, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Magherman, Moreau, Mouton, Muller, Nelis, Notelteirs, Nothomb et E. Vandenpeereboom.

S'est abstenu : M. Tesch.

MpVµ. - M. - Tesch est prié de faire connaître à la Chambre le motif de son abstention.

M. Teschµ. - Je suis très heureux de voir relier l'arrondissement de Virton au chemin de fer, mais dans mon opinion il eût été beaucoup plus préférable de ne point indiquer de départ fixe. C'est le motif pour lequel je me suis abstenu.

Projet de loi autorisant le gouvernement à concéder un chemin de fer de ceinture autour de Charleroi

Discussion générale

MpVµ. - La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose un article 2 nouveau.

M. Dewandreµ. - Depuis la convention faite entre M. le ministre des travaux publics et la société concessionnaire du chemin de fer dont il s'agit, cette société a demandé au gouvernement la concession du chemin de fer de Luttre à Châtelineau. Cette ligne fait partie du chemin de fer de. Bruxelles à Châtelineau qui a été décrétée par la loi de travaux publics du 8 juillet 1865. Je comprends qu'il est impossible à M. le ministre des travaux publics de se prononcer immédiatement ou même dans le cours de la session actuelle, sur cette demande.

Mais si, par suite de l'examen qu'il doit faire de cette question, M. le ministre venait à reconnaître qu'il y a lieu de concéder à cette société la ligne de Luttre à Châtelineau, il serait arrêté par les dispositions de la loi de juillet 1865. M. le ministre reconnaissant qu'il y a lieu de détacher la ligne de Luttre à Châtelineau de la ligne déjà décrétée de Bruxelles à Châtelineau s'en trouverait empêché et serait en même temps empêché de mettre en adjudication les travaux de la ligne de Bruxelles à Luttre.

Pour éviter les retards qui en résulteraient, je viens proposer à la Chambre, après avoir consulté M. le ministre des travaux publics, un amendement ainsi conçu, qui formerait l'article 3 du projet.

« Par dérogation à l'article 2 de la loi du 8 juillet 1865, le gouvernement est autorisé, soit à faire exécuter le chemin direct avec embranchements éventuels de Châtelineau à Bruxelles par Luttre, dans les conditions prévues par cet article, soit à ne faire exécuter, suivant ces conditions, que la ligne de Luttre à Bruxelles, et à concéder la section de Luttre à Châtelineau avec embranchements éventuels, à la compagnie des chemins de fer des bassins houillers du Hainaut, aux clauses et conditions à déterminer par le gouvernement. »

- La discussion générale est close.

Discussion des articles

Articles 1 à 3

« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à concéder, aux clauses et conditions d'une convention en date du 21 avril 1866, et du cahier des charges y annexé, un chemin de fer de ceinture autour de la ville de Charleroi. »

- Adopté.

Articles 2 et 3

MpVµ. - La section centrale propose un article 2, ainsi conçu :

« Le gouvernement est autorisé à modifier, de commun accord avec la société concessionnaire, la convention du 21 avril 1866, en ajoutant à son article premier, après les mots : par une double section, la disposition suivante : et de construire une ligne reliant les charbonnages du Hainaut, situés sur la rive droite de la Sambre en aval de Couillet. »

M. le ministre des travaux publics déclare se rallier à cet article nouveau, ainsi qu'à l'amendement de M. Dewandre, qui formerait l'article 3 nouveau.

- Les articles 2 et 3 (nouveaux) sont mis aux voix et adoptés.

Second vote des articles et vote sur l’ensemble

Ces articles formant des amendements au projet de loi, l'assemblée décide qu'ils seront soumis, séance tenante, au second vote.

Ils sont définitivement adoptés.


Il est procédé à l'appel nominal ; le projet de loi est adopté à l'unanimité des 69 membres présents, il sera transmis au Sénat.

Ont voté :

MM. Orban, Orts, Reynaert, Rogier, Schollaert, Tack, Tesch, Thienpont, Thonissen, Valckenaere, A. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Van Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier, Braconier, Carlier, Couvreur, Crombez, C. de Bast, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Kerchove, Delcour, de Macar, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de Ronge, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Dewandre, Dumortier, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Julliot, Landeloos, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Magherman, Moreau, Mouton, Muller, Notelteirs et E. Vandenpeereboom.

Projet de loi relatif à l’aliénation de biens domaniaux

Discussion des articles

Articles 1 à 3

MpVµ. - La discussion générale est ouverte.

Personne ne demandant la parole, la Chambre passe immédiatement à la discussion des articles.

« Art. 1er. Le gouvernement est autorisé à aliéner par voie d'adjudication publique, les biens domaniaux désignés dans l'état annexé à la présente loi, sous les n°1 à 12. »

- Adopté.


« Art. 2. Les biens repris sous les n°13, 14 et 15 pourront être vendus à main ferme, aux conditions indiquées pour chacun de ces articles dans l'état susmentionné. »

- Adopté.


Art. 3. Le gouvernement est également autorisé :

« 1° A aliéner par voie d'adjudication publique :

« . Tous les terrains vagues et sans emploi existant aux abords des routes, des canaux et des chemins de fer, ou provenant de démolitions, constructions, redressements et rectifications exécutées sur les travaux d'art de l'espèce ;

« B. Les biens domaniaux de toute nature dont la valeur estimative ne dépasse pas 5,000 francs.

« 2° A vendre de la main à la main les parcelles dont la valeur estimative ne s'élève pas au-dessus de 100 francs. »

MpVµ. - La section centrale, d'accord avec le gouvernement, propose de remplacer le chiffre de 100 francs par 500 francs au n°2° de l'article 3.

- L'article 3, ainsi modifié, est adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 66 membres présents.

Ce sont : MM. Orban, Orts, Reynaert, Rogier, Tack, Tesch, Thienpont, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem. Van Nieuwenhuyse, Van Overloop, Van Renynghe, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Warocqué, Wasseige, Allard, Bara, Bouvier, Braconier, Carlier, Couvreur, Crombez, C. de Bast, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Kerchove, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Dewandre, Dumortier, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Julliot, Landeloos, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Magherman, Moreau, Mouton, Muller, Notelteirs et E. Vandenpeereboom.

Proposition de loi accordant une pension à la veuve du général-major Trumper

Rapport de la section centrale

M. Funckµ. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre, le rapport de la section centrale qui a examiné la proposition de loi tendante à accorder une pension à la veuve du général-major Trumper.

- Impression, distribution et mise à la suite de l'ordre du jour.


MjBµ. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre, le rapport sur la situation des asiles d'aliénés du royaume, pendant les années 1863, 1864 et 1865.

- Impression et distribution aux membres de la Chambre.


M. Dewandreµ (pour une motion d’ordre-. - Messieurs, il n'y a plus à l'ordre du jour qu'un projet de loi de travaux d'utilité publique ; il s'agit de la concession de chemins de fer secondaires dans le Hainaut. Je demande que la Chambre veuille bien s'occuper immédiatement de la discussion de ce projet de loi.

- Cette proposition est adoptée.

Projet de loi autorisant le gouvernement à concéder des chemins de fer secondaires dans le Hainaut

Vote de l’article unique

MpVµ. - L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« Le gouvernement est autorisé à concéder, aux clauses et conditions (page 759) d’une convention en date du 11 avril 1866, et du cahier des charges y annexé :

« 1° Un chemin de fer de Mons à la ligne de Frameries à Chimay, dans la direction de Ciply ;

« 2° Un chemin de fer de Péronnes à ladite ligne de Frameries à Chimay, dans la direction de Vellereille-lc-Sec ;.

« 3° Un chemin de fer de Piéton à Gosselies avec embranchement vers Bascoup et vers Luttre ;

« 4° Un chemin de fer de Thuin à la ligne dé Piéton à Levai, dans la direction d'Anderlues, avec raccordement au chemin de fer du Centre vers Binche ou vers Bonne-Espérance :

« 5° Un chemin de fer de Marchienne-au-Pont à l'embranchement de Beaumont à Thuin du chemin de fer de Frameries à Chimay, dans la direction de Thuillies ;

« 6° Un chemin de fer de raccordement de cet embranchement à la ligne de l'Entre-Sambre-et-Meuse, dans la direction de Berzée. »

- Personne ne demandant la parole, il est procédé à l'appel nominal.

Le projet de loi est adoptéàk l'unanimité des 67 membres présents.

Ce sont :

MM. Orban, Orts, Reynaert, Rogier, Tack, Tesch, Thienpont, Thonissen, Valckenaere, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Nieuwenhuyse, Van Renynghe, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Wasseige, Allard, Ansiau, Bara, Bouvier-Evenepoel, Braconier, Carlier, Couvreur, Crombez, de Bast, de Brouckere, de Florisone, De Fré, de Kerchove, de Macar, de Mérode, de Moor, de Naeyer, de Rongé, de Ruddere de te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Dewandre, Dumortier, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacobs, Jacquemyns, Jamar, J. Jouret, Julliot, Landeloos, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Magherman, Moreau, Mouton, Muller, Notelteirs et Ern. Vandenpeereboom.

- La Chambre consultée décide qu'elle se réunira vendredi en séance publique à deux heures.

La séance est levée à cinq heures.