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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 29 janvier 1867

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1866-1867)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboomµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 323) M. de Florisone, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 3 heures et un quart.

M. de Moor, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Florisoneµ présente l'analyse suivante des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Des habitants de Saint-Josse-ten-Noode demandent la révision de la loi sur la garde civique. »

« Même demande d'habitants de Lombeek-Notre-Dame et de Dinant. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur les pétitions relatives au même objet.


« Des orfèvres, bijoutiers et horlogers d'une commune non dénommée présentent des observations sur les dispositions de la loi du 19 brumaire an VI, qui règlent le travail des matières d'or et d'argent. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif au travail des matières d'or et d'argent.


« Des bijoutiers et horlogers à Bruges demandent le maintien de la loi concernant le travail des matières d'or et d'argent. »

- Même décision.


« Des bijoutiers et horlogers de Leuze déclarent adhérer à la pétition des bijoutiers et horlogers de Bruxelles, relative au projet de loi concernant le travail des matières d'or et d'argent. »

« Même adhésion des bijoutiers et horlogers à Fleurus. »

- Même décision.


« Le sieur Ghede propose d'introduire dans le projet de loi sur la milice un amendement qui permette au remplaçant en congé illimité de toucher une partie de son cautionnement, s'il possède un avoir à sa masse d'habillement. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi.


« Le sieur Delberghe, commissaire de police à Fontaine-l'Evêque, demande une indemnité pour les commissaires de police qui remplissent les fonctions de ministère public près les tribunaux de simple police. »

- Renvoi à la commission chargée d'examiner le projet de loi sur l'organisation judiciaire.


« Les facteurs ruraux du bureau de Pâturages demandent une augmentation de traitement. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget des travaux publics.


« Des habitants de Thielen demandent la construction d'une route d'OEvel à Merxplas par Lichtaert, Thielen, Gierle et Beersse. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« La dame Laethem, veuve du sieur Vercruysse, garde-route au chemin de fer de l'Etat, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir sa pension. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Bruxelles demandent le suffrage universel pour les élections communales et provinciales. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi qui modifie quelques dispositions des lois électorales. »


« M. Visschers fait hommage à la Chambre de cinq exemplaires de son mémoire intitulé : Coup d'œil sur la situation et les besoins des caisses de prévoyance en faveur des ouvriers mineurs. »

- Dépôt à la bibliothèque.


« M. De Fré, retenu chez lui par le décès de sa mère, demande un congé de quelques jours. »

- Ce congé est accordé.

Décès d’un membre de la chambre

MpVµ. - Le bureau a reçu la missive suivante :

« Monsieur le président,

« J'ai l'honneur de vous faire part de la perte cruelle que je viens d'éprouver dans la personne de mon cher époux, le baron Vanden Branden de Reeth, membre de la Chambre des représentants, décédé à Malines aujourd'hui dimanche 27 janvier. L'absoute, suivie de l'enterrement, aura lieu le mercredi 30 janvier, à une heure de relevée. On se réunira à la maison mortuaire.

« Veuillez, M. le président, en informer les membres de la Chambre des représentants, et agréer l'assurance de ma considération la plus distinguée.

« Baronne Vanden Branden de Reeth.

« Malines, 27 janvier 1867. »

J'ai reçu notification du même décès de la part des bourgmestre et échevins de la ville de Malines.

Je propose à la Chambre d'adresser une lettre de condoléance, à la famille, et de tirer au sort, conformément aux précédents, une députation de onze membres qui, avec le président, assistera aux funérailles. (Appuyé ! appuyé !)

- Cette proposition est adoptée.

Il est procédé au tirage au sort de la députation ; elle se compose de MM. Dethuin, de Rongé, Mascart, Vleminckx, de Haerne, de Baillet, Carlier, Vermeire, Allard, Dumortier et Kervyn de Lettenhove.

MpVµ. - Les membres qui ne sont pas désignés pour faire partie de la députation pourront se joindre à elle.

Des mesures seront prises pour qu'un convoi spécial soit mis à la disposition de la députation et des membres qui voudront se rendre aux funérailles.

Demain il n'y aura pas séance. La Chambre se réunira jeudi à 2 heures.

Rapports de pétitions

M. Descamps, rapporteurµ. - Par pétition datée de Bruxelles, le 15 janvier 1867, des habitants de Bruxelles demandent la révision de la loi sur la garde civique.

Même demande d'habitants d'Anvers, Bruxelles, Liedekerke, Borgt-Lombeeck, Dinant.

Les pétitionnaires demandent que la Chambre veuille bien provoquer d'urgence la révision de la loi du 18 juillet 1853 et faciliter, par l'organisation d'un premier ban, la formation de corps de volontaires qui seraient, le cas échéant, de puissants auxiliaires pour l'armée permanente.

La commission propose le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Baevegem, le 20 novembre 1866, des électeurs communaux de Baevegem déclarent protester contre des décisions de la députation permanente, en matière électorale, et prient la Chambre d'examiner s'il n'y aurait pas lieu de modifier, en ce point, les attributions de ces corps politiques.

Cette pétition a été rédigée en termes si peu mesurés que la commission s'est demandé si elle ne devait pas passer à l'ordre du jour sans s'occuper de l'examen de la question qu'elle soulève ; l'opinion contraire ayant prévalu, votre commission pense qu'abstraction faite de la forme, elle mérite de fixer l'examen sérieux du gouvernement.

Elle s'est demandé s'il n'y avait pas lieu de modifier les attributions de la députation permanente en matière électorale et s’il ne fallait pas considérer (page 324) comme anomale la situation faite à un corps ayant des attributions purement administratives pouvant se transformer en corps politique. Elle n'a pas cru devoir résoudre cette grave question. Elle conclut à ce que la pétition soit renvoyée à M. le ministre de l'intérieur pour qu'il en fasse l'objet d'un examen approfondi.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition sans date, les sieurs Grange, Marx et Collignon demandent que tous les officiers, sous-officiers et soldats belges, actuellement au Mexique, soient autorisés à rentrer en Belgique le plus tôt possible.

Cette pétition devient sans objet depuis que M. le ministre des affaires étrangères, sur l'interpellation que j'ai eu l'honneur de lui adresser, a répondu que des mesures étaient prises pour le rapatriement des militaires belges qui s'étaient engagés au service du Mexique.

En conséquence, la commission conclut à l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Ingelmunster, le 26 novembre 1866, dos cabaretiers, à Ingelmunster, se plaignent qu'un garde champêtre de la commune exerce la profession de cabaretier, quoique cela lui soit interdit par le règlement provincial.

C'est la troisième fois que les cabaretiers d'Ingelmunster s'adressent à 3l Chambre. Une première fois, celle-ci a passé à l'ordre du jour ; une seconde fois, le 14 avril 1866, elle a renvoyé la pétition à M. le ministre de l'intérieur.

La commission propose l'ordre du jour de cette pétition. La Chambre n'a rien à y voir. Les pétitionnaires peuvent s'adresser au gouverneur de la province, qui fera droit à leur réclamation si elle est fondée.

La commission vous propose l'ordre du jour.

- L'ordre du jour est prononcé.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Etalle, le 27 novembre 1866, des habitants d'Etalle demandent que le chemin de fer à construire de Virton à Luxembourg passe par Etalle et Habzy.

Le pouvoir législatif ayant conféré à M. le ministre dos travaux publics la faculté de rattacher la voie ferrée sur Virton à un point quelconque de la ligne de Namur à Arlon, le droit d'intervention de la Chambre se trouve actuellement épuisé.

Votre commission, en présence de cette situation, a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre des travaux publics.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Termonde, le 9 novembre 1866, le sieur De Roo, milicien de la classe de 1865, prie la Chambre de lui faire obtenir un congé.

Le milicien De Roo, de la classe de 1865, s'est adressé une première fois à la Chambre, dans le mois de novembre 1865, pour obtenir un congé.

A la suite de sa réclamation, un congé de faveur de trois mois suivi d'une prolongation de congé d'un mois, lui fut accordé.

Le 1er mai 1866 il saisit de nouveau la cambre pour obtenir la même faveur, et le 9 novembre suivant, une nouvelle pétition lui parvient.

Le pétitionnaire s'est trompé de chemin, c'est au département de la guerre qu'il aurait dû faire parvenir ses diverses réclamations, la Chambre étant incompétente pour statuer sur de semblables demandes. Votre commission vous propose en conséquence l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Engis, le 24 mai 1866, le conseil communal d'Engis prie la Chambre d'autoriser la concession d'un chemin de fer de Charleroi à Quiévrain, avec embranchement vers Saint-Ghislain.

Le conseil communal d'Engis a, sous la date du 19 février 1866, saisi la Chambre d'une pétition tendante à lui voir accueillir favorablement la demande en concession d'un projet de chemin de fer parlant de la station de Frameries pour Condé (France) qui desservirait tous les intérêts locaux se rencontrant sur son parcours. Ce projet de chemin de fer étant fusionné avec celui de Charleroi à Quiévrain avec embranchement vers Saint-Ghislain paraît aux yeux des pétitionnaire d'une utilité incontestable comme devant créer une source intarissable de prospérité (ce sont les termes de la pétition) à l'industrie en général et tout spécialement à l'industrie houillère. Votre commission a l'honneur de recommander à la bienveillante sollicitude de M. le ministre des travaux publics la pétition du conseil communal d'Engis et elle vous propose le renvoi de celle-ci à ce haut fonctionnaire.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Hamme, le 16 novembre 1866, le conseil communal de Hamme réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une halle ou station sur la ligne du chemin de fer de Dendre-et-Waes, dans la commune de Grembergen.

La réclamation du conseil communal de Hamme, arrondissement de Termonde, tendante à obtenir une halte ou station sur la ligne du chemin de de fer Dendre-et-Waes dans la commune de Grembergen est fondée sur l'état d'isolement où se trouve cette localité importante par sa population, son agriculture, son commerce et son industrie, sur les entraves que présentent aux voyageurs les nombreux ponts à traverser dans l'intérieur de la ville de Termonde pour atteindre la station et la distance assez grande à franchir pour y arriver.

Ces considérations ont paru assez puissantes à votre commission pour proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre des travaux publics.

M. Vermeireµ. - Messieurs, j'appuie les conclusions de la commission des pétitions. Les développements que M. le rapporteur vient de donner et les inconvénients qu'il signale, inconvénients qui sont tout à fait au détriment du commerce et de l'industrie de la commune de Hamme, me dispensent d'entrer dans plus de détails.

Non seulement la commune de Hamme, mais beaucoup d'autres communes en aval de la ville de Termonde retireraient le plus grand avantage de cette halle ou station que les pétitionnaires demandent.

J'espère, messieurs, que l'honorable ministre des travaux publics persévérera dans la voie où il est entré de créer beaucoup de petites stations. En ce qui concerne la station demandée pour la commune de Grembergen, j'appuie, de tous mes moyens, les développements de l'honorable rapporteur ainsi que les conclusions de la commission des pétitions.

M. Van Cromphautµ. - Messieurs, la commune de Hamme compte une population de 12,000 habitants, et deux autres communes également très importantes sont intéressés à ce que la demande des pétitionnaires soit favorablement accueillie. II y a plus de 25,000 habitants. J'espère que M. le ministre des travaux publics, qui a déjà tant fait pour les petites stations, voudra bien accorder à la commune de Hamme l'objet de sa demande. Hamme n'est relié à aucun chemin de fer et la station la plus rapprochée de cette commune est celle de Termonde ; par l'établissement d'une halle ou station à Grembergen la commune de Hamme jouirait également des bienfaits du railway national.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Isenberghe, le 4 octobre 1866, les époux Maelslaf, qui n'ont pu obtenir le Pro Deo dans une affaire dont se trouve saisi le tribunal de première instance de Furnes, demandent à être admis à faire entendre leurs témoins.

La Chambre n'a pas à intervenir dans les affaires judiciaires. La commission vous propose l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Leeuw-Saint-Pierre, le 19 mai 1866, le sieur Cnaeps se plaint d'être lésé dans la succession d'un parent.

Les mêmes motifs, messieurs, portent la commission à vous proposer l'ordre du jour.

- Adopté.


Par pétition datée de Bruxelles, le 12 mai 1866, le sieur Cuvellc demande qu'il soit donné suite à ses réclamations relatives à son brevet de perfectionnement.

Le sieur Cuvellc peut s'adresser à M. le ministre de l'intérieur pour l'objet de sa demande. La Chambre n'a pas à statuer sur sa réclamation. La commission vous propose l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Bruxelles, le 14 mai 1866, le sieur Van Doren demande ; 1° que des boîtes à lettres soient placées à toutes les haltes des chemins de fer et levées quelques minutes avant l'arrivée du convoi ; 2° que les instituteurs communaux donnent annuellement, après le tirage au sort, quelques leçons d'exercice militaire en langue flamande, aux jeunes conscrits qui ne comprennent pas le français.

Votre commission, messieurs, a l'honneur de vous proposer, sur la première partie de la pétition, le renvoi à M. le ministre des travaux publics, et l'ordre du jour sur la seconde partie.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée d'Arlon, le 8 mai 1866, le conseil communal d'Arlon demande que la garantie d'un minimum d'intérêt en faveur du (page 325) chemin de fer de Virton ne soit accordée que pour la construction d'une ligne d'Arlon à Virton, par Châtillon. Saint-Léger et Ethe.

Les mêmes considérations que nous avons fait valoir quant à la pétition d'Etalle, militent en faveur de celle-ci.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Bruxelles, le 26 avril 1866, le sieur Van de Weygaerde demande que la garde civique soit organisée en deux bans et que le service du premier ban soit obligatoire jusqu'à l'âge de 30 ans seulement.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Kerckom le 21 avril 1866, le conseil communal de Kerckom demande que la route projetée de Saint-Trond à Waremme passe par Aelst, Mielen-sur-Aelst et Goyer.

Votre commission vous propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Mons, le 20 juillet 1865, le conseil provincial du Hainaut demande que la concession du chemin de fer projeté de Saint-Ghislain à Frameries soit mise en adjudication publique et que le gouvernement fasse, en toute occasion, l'application la plus large et la plus profitable à l'intérêt des consommateurs, de l'article 12 de la loi du 2 mai 1837 sur les mines.

La concession du chemin de fer dont il s'agit étant accordée, la commission propose l'ordre du jour sur cette partie de la pétition et, quant au deuxième point, elle propose le renvoi à M. le ministre des finances.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition datée de Verviers, le 22 juin 1866, le conseil communal de Verviers demande la garantie d'un minimum d'intérêt pour la concession d'un chemin de fer se dirigeant vers la Prusse, par les plateaux de Herve.

Même demande des conseils communaux de Henri-Chapelle, Feneur, Membach, Warsage, Mortier, Retinne, Teuwen, Sippenaeken, Visé, Soumagne, Mortroux, Battice, Fléron, Thimister, Micheroux, Cerexhe-Heuseux, Dison, Tignée, Saive, Hodimont.

Les conseils communaux de Verviers, Henri-Chapelle, Feneur, Membach, Warsage, Mortier, Retinne, Teuwen, Thimister, Micheroux, Cerexhe-Heuseux, Dison, Tignée, Saive, Hodimont, demandent la garantie d'un minimum d'intérêts afin que la concession accordée par le gouvernement à une société pour l’établissement d'un chemin de fer vers la Prusse sur les plateaux de Herve puisse produire ses effets ; qu'en l'absence de cette garantie, des cantons riches par leurs produits agricoles, leur commerce et leur industrie restent dans une situation d'infériorité déplorable vis-à-vis du reste du pays, doté de ces précieuses voies de communication ; que cette garantie n'imposerait d'ailleurs aucun sacrifice au trésor public, puisqu'elle serait purement morale et qu'elle n'aura d'autre but que d'attirer, sur cette utile et féconde entreprise, des capitaux qui se montreraient moins timides en présence de cette garantie.

Déterminée par ces considérations, voire commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre des travaux publics avec prière de l'examiner avec une grande bienveillance.

M. Vander Maesenµ. - Je remercie l'honorable rapporteur et la commission des pétitions des conclusions qu'ils viennent de prendre. De mon côté, je viens recommander cette pétition à l'examen attentif et bienveillant de M. le ministre des travaux publics.

Si la Chambre me le permet, je ferai valoir quelques considérations qui lui serviront puissamment dans cet examen.

Le chemin de fer des plateaux de Herve, vous le savez, a été concédé il y a environ 4 ans. A cette époque, les concessionnaires n'ont demandé ni garantie de minimum d'intérêt ni aucune espèce de faveur du gouvernement. Ils croyaient ne pas en avoir besoin.

D'après les calculs par aperçu qui se font toujours en pareille matière, il paraissait établi que le chemin de fer rapporterait à la société concessionnaire 1,800,000 fr. tous frais d'exploitation payés. En effet rien ne paraissait devoir être plus fructueux qu'un chemin de fer construit sur le plateau de Herve ; car ce chemin de fer est destiné à réunir 4 grandes villes, les villes de Liège, Verviers, Aix-la-Chapelle et Maestricht, à desservir 30 communes dans un rayon d'une lieue et à alimenter des industries nombreuses, puissantes et prospères. Cette contrée, vous le savez, possède des mines de plomb et des mines de zinc, les plus importantes du pays peut-être. C'est là que sont établies les sociétés du Bleyberg et de la Vieille-Montagne.

L'industrie houillère y est représentée par le vaste bassin de Herve qui renferme de nombreuses exploitations desservant l'industrie de Verviers et alimentant de nombreuses machines à vapeur de l'arrondissement.

Il n'y a pas de doute que si un chemin de fer venait remplacer dans cette contrée les voies de communication difficiles qui y existent maintenant, les exploitations de mines de houille du plateau de Verviers seraient plus que décuplées.

L'industrie drapière est aussi représentée à Thimister et à Charneux par de nombreuses fabriques de draps et d'étoffes de laine de toute espèce. Enfin, messieurs, par un heureux privilège, ce pays, si essentiellement industriel, est aussi un pays agricole très avancé. Les territoires de Herve et d'Aubel sont suffisamment connus, le premier par ses pâturages, le second par ses campagnes fertiles.

Les concessionnaires ne se sont donc pas trompés lorsqu'ils ont pensé que le chemin de fer dont ils demandent la concession aurait des résultats fructueux. Cependant ce chemin de fer ne s'est pas construit.

Quatre ans se sont écoulés et le droit s'est ouvert pour le gouvernement de prononcer la déchéance des concessionnaires et de confisquer le cautionnement qu'ils ont fourni.

Le gouvernement n'use pas de ce droit et il a parfaitement raison, parce qu'il rencontrerait difficilement des concessionnaires aussi sérieux que ceux qui se sont présentés.

Si ce chemin de fer n'est pas encore construit, cela tient à différentes causes ; mais la principale réside dans les circonstances difficiles que nous avons traversées, dans les crises que nous avons subies.

Ces événements politiques et ces crises ont rendu les capitaux extrêmement timides et les ont effrayés à ce point que les capitalistes hésitent à prendre part aux meilleures opérations, tant est encore présent à leur esprit le souvenir des désastres financiers de ces derniers temps.

Par suite de ces causes, le chemin de fer concédé ne s'est donc pas exécuté et les communes qui étaient appelées à profiter de cette voie rapide de communication ont organisé un vaste pétitionnement.

La ville de Verviers s'y est associée et le conseil provincial de la province de Liège, sur un rapport qui lui a été présenté, après mûr examen, a également décidé qu'il appuierait la demande d'un minimum d'intérêt en faveur de la compagnie concessionnaire du chemin de fer dont s'agit.

Si ce minimum d'intérêt est accordé, nul doute, messieurs, que ce chemin de fer ne soit immédiatement exécuté, puisque les capitaux, assurés d'un placement convenable, ne feront plus défaut à l'entreprise.

M. le ministre des travaux publics avait d'abord fait opposition à la concession de cette voie ferrée parce qu'il craignait qu'elle ne fît concurrence au chemin de fer de l'Etat. Mais il n'a pas tardé à modifier son opinion et à reconnaître la haute utilité d'une ligne attendue avec la plus grande impatience par les populations des plateaux de Herve.

Dès lors, je pense que l'honorable ministre des travaux publics voudra bien examiner avec la plus sérieuse attention les pétitions qui vont lui être envoyées et je ne doute pas qu'après examen il ne reconnaisse la nécessité de présenter un projet de loi ayant pour objet d'accorder le minimum d'intérêt demandé.

M. Moreauµ. - Messieurs, je viens, comme mon honorable collègue, appuyer les conclusions de la commission et recommander d'une manière spéciale, à M. le ministre des travaux publics, l'objet de cette pétition.

Dernièrement, messieurs, lorsque le gouvernement nous a présenté un projet de loi à l'effet d'accorder la garantie d'un minimum d'intérêt aux concessionnaires des chemins de fer de Virton et de Maeseyck, il justifiait sa demande en nous disant que cette garantie de minimum d'intérêt était provoquée par des nécessités impérieuses et qu'elle devait être considérée comme n'étant en quelque sorte qu'un appui moral, un prêt sans intérêt, si elle devait être appliquée, parce qu'il était à prévoir que dans peu les produits nets de l'exploitation de ces chemins de fer couvriraient les intérêts garantis.

Or, messieurs, ces deux conditions se rencontrent à un bien plus haut degré dans le cas dont il s'agit.

Il est impérieusement nécessaire que le chemin de fer des plateaux de Herve se construise au moyen de la garantie d'un minimum d'intérêt (page 326) qui ne sera aussi qu'un appui purement moral donné aux capitalistes qui voudront l'entreprendre.

C'est la loi du 12 août 1862 qui a autorisé M. le ministre des travaux publics à concéder le chemin de fer des plateaux de Hervé, ainsi que plusieurs autres, et, si je ne me trompe, tous ces chemins de fer sont construits ou en voie d’exécution, hormis ce dernier.

S'il en est ainsi, ce n'est pas cependant, comme on vient de le dire, parce que ce railway n'a pas une grande importance, qu'il n'est pas destiné à vivifier de nombreuses industries et qu'il ne parcourt pas une contrée très peuplée et riche sous tous les rapports.

Sur une longueur de 75 kilomètres environ, il desservira 36 communes ayant une population de 225,000 âmes au moins, non compris celles de Maestricht et d'Aix-la-Chapelle ; il passera près de 39 houillères dont 20 sont actuellement en exploitation et à proximité des établissements si importants du Bleyberg et de la Vieille-Montagne.

II activera également nos relations internationales, puisqu'il servira au transit du Nord de l'Allemagne vers la France par Liège et au transit du Sud de l'Allemagne et du Luxembourg, vers la Hollande par Visé.

On devait croire, messieurs, qu'une entreprise qui se présente dans d'aussi bonnes conditions et a autant de chances de succès trouverait des capitaux nécessaires pour se réaliser promptement et que, de tous les chemins de fer concédés par la loi de 1862, celui des plateaux de Herve serait un des premiers qui se construiraient.

Aussi ne peut-on attribuer le retard apporté à son exécution qu'à la déception qu'ont éprouvée trop souvent les capitalistes qui se sont intéressés dans des entreprises de l'espèce et au coût kilométrique qui est assez élevé, parce que ce chemin de fer parcourt un pays accidenté et dont les terrains ont en général une valeur vénale assez grande.

Le surcroît du reste des dépenses qu'il exigera peut-être sera largement compensé par le bénéfice qu'il donnera.

Si donc nous demandons que le gouvernement accorde un minimum d'intérêt à ce chemin de fer, ce n'est que pour rassurer les capitalistes et les engager à prendre part à cette entreprise. Nous en avons l'intime conviction, le trésor public ne sera pas grevé, il ne s'imposera aucun sacrifice. Dans le cas dont il s'agit, il arrivera ce qui a eu lieu pour d'autres chemins de fer tels que ceux du Luxembourg, de Charleroi à Louvain. Ce minimum d'intérêt doterait le pays d'une nouvelle voie de communication qui l'enrichirait notablement sans imposer aucune charge aux contribuables. Car il est pour ainsi dire impossible qu'il en soit autrement dans une contrée aussi propice à l'établissement d'un chemin de fer, dans une contrée dont la densité et la richesse de la population, et les ressources minéralogiques, industrielles et agricoles fourniront les éléments d'un trafic considérable.

Le gouvernement, messieurs, ne peut nous opposer la décision qu'il aurait prise de ne plus intervenir pécuniairement dans les entreprises des chemins de fer concédés.

Sans vouloir examiner si cette décision est en général à l'abri de toute critique, je ferai observer qu'il me paraît qu'elle ne peut recevoir son application à un chemin de fer qui a été concédé avant qu'elle fût prise ; que cette règle ne peut en quelque sorte avoir un effet rétroactif qui porterait le plus grand préjudice à notre arrondissement, et lui enlèverait, si je puis le dire, des droits qu'elle a moralement acquis.

En effet, lorsque nos populations ont appris la concession de ce chemin de fer, elles ont eu la quasi-certitude qu'elles ne resteraient plus isolées au milieu du mouvement qui se fait autour d'elles, que bientôt elles jouiraient comme d'autres des immenses bienfaits que cette voie nouvelle de communication leur procurerait ; que leur richesse se décuplerait par ce puissant moyen d'activer leurs industries, et aujourd'hui, voyant leur espoir déçu, elles se demandent pourquoi le gouvernement, lui qui est venu en aide à d'autres dans des conditions bien plus mauvaises, ne les seconderait pas également ; pourquoi il aurait deux poids et deux mesures.

Elles ont, messieurs, d'autant plus de motifs pour réclamer ce minimum d'intérêt que l'Etat leur a fait essuyer un préjudice notable par la direction qu'il a donnée à son chemin de fer.

En effet il est constant que le chemin de fer de l'Etat, au lien d'avoir été construit, à très grands frais, par la vallée de la Vesdre, au milieu des montagnes, aurait dû traverser le pays de Herve pour suivre la ligne la plus courte et la plus directe entre Liège et Aix-la-Chapelle.

Aussi le conseil provincial de Liège a-t-il reconnu qu'il était de toute justice d'accorder le minimum d'intérêt demandé à ce chemin de fer et dans sa séance du 19 juillet dernier, il a décidé à la presque unanimité des voix qu'il adresserait une demande à cet effet à la législature.

Ce minimum d'intérêt, messieurs, comme le conseil provincial l'a constaté serait non seulement en général un grand bienfait pour la province de Liège, mais encore spécialement pour l'industrie lainière de l'arrondissement de Verviers, car des fabricants de Verviers, de Dison et d'autres communes voisines s'approvisionnent de presque tout le charbon dont elles font usage aux houillères qui sont situées à proximité du chemin de fer projeté, et si vous avez bien voulu donner dernièrement de l'eau à l'industrie drapière, je viens aujourd'hui vous demander que vous lui procuriez aussi à meilleur compte ce que l'on peut en appeler le pain.

J'espère donc que le gouvernement, après avoir examiné sérieusement cette affaire, accueillera favorablement la demande des pétitionnaires.

- Adopté.


M. Bouvier-Evenepoel, rapporteurµ. - Par pétition sans date, les instituteurs de la commune de Mont proposent des mesures pour améliorer la position matérielle des instituteurs communaux.

Même pétition d'habitants de Jumet et d'instituteurs dans la Flandre orientale.

La pétition soumise aux délibérations de la Chambre mérite d'autant plus de fixer son attention que l'instruction primaire, dans un gouvernement libre et démocratique, est la condition de sa prospérité et du large et sage développement de ses institutions. Un peuple sans instruction n'attache que peu de prix à la liberté et devient plus facilement la proie du despotisme, quelle que soit son étiquette. L'instruction élève la dignité humaine, assure l'ordre social et conduit à la prospérité générale. Pour atteindre une situation aussi brillante, il est indispensable d'assurer à l'instituteur primaire une position digne de la mission qui lui est confiée. Il faut que non seulement il soit à l'abri du besoin, mais que sa position lui assure un certain bien-être qui l'attache aux nobles fonctions qu'il occupe dans la société. Le gouvernement et les Chambres ont déjà beaucoup fait pour améliorer la position des instituteurs ; le rapport triennal 1858-1860 présenté à la législature par l'honorable ministre de l'intérieur le constate (la moyenne du revenu de ce fonctionnaire, y est-il dit, s'était déjà accru de plus de 115 p. c. en 1860, et leur avenir est assuré par l'institution des caisses de prévoyance). Ainsi la situation est bien changée. Cependant elle n'est pas encore complètement satisfaisante. Comme on l'a dit dans les rapports antérieurs, il reste toujours beaucoup à faire et l'on devra redoubler d'efforts si l'on veut enfin atteindre le but que le législateur s'est proposé en 1842. Les communes, les provinces et l'Etat devront s'imposer de nouveaux sacrifices dont l'étendue ne saurait être exactement déterminée.

Un pays libre ne saurait s'imposer trop de sacrifices pour satisfaire à un besoin aussi vivace que celui de donner le pain de l'intelligence aux classes déshéritées. Aussi pourrons-nous constater avec une légitime fierté la progression des dépenses faites en Belgique par l'Etat. Le budget de 1831 porte, en faveur de l'enseignement primaire, 217,000 francs ; celui de 1867 s'élève à 3,466,154 francs.

Ces deux chiffres indiquent clairement que les grands pouvoirs de l'Etat ont rempli noblement leur devoir, qu'ils n'ont reculé devant aucun sacrifice et qu'ils continueront à montrer leur munificence pour un si grand intérêt social. Un écrivain éminent a proclamé que le peuple qui a les meilleures écoles est le premier peuple. S'il ne l'est pas aujourd'hui, il le sera demain. Cette vérité trouve son application toute récente. Le peuple prussien, chez lequel on ne rencontre que 5 p. c. d'illettrés, a montré dans la guerre de 1866 que l'instruction ne donne pas seulement de grandes puissances intellectuelles, mais fait d'excellents soldats.

Pour obtenir un bon enseignement primaire, il est indispensable de relever, non pas seulement la situation morale des maîtres, mais aussi leur condition matérielle. Il ne faut pas qu'ils se préoccupent outre mesure de leur budget, car cette funeste tendance nuirait à leur enseignement. Il faut que, dans l'intérêt de la dignité et de la valeur de leur enseignement, ils ne soient plus astreints, pour assurer le budget, à être sacristain, bedeau, sonneur de cloches, etc. Elever le maître, c'est relever l'école ; relever l'école, c'est assurer l'instruction du peuple, et j'ajouterai, l'indépendance nationale.

Les pétitionnaires résument leurs réclamations dans les termes suivants :

« 1° En leur accordant un traitement fixe suffisant pour leur garantir une position indépendante, le minimum actuel de 200 francs de la loi du 23 septembre 1842, ou le maximum, tel qu'il est déterminé par l'arrêté royal du 10 janvier 1863, ne pouvant atteindre ce but,

« 2° En maintenant le casuel ou minerval à côté du traitement fixe, mais en garantissant à l'instituteur un minimum de casuel ;

(page 327) « 3° En ne faisant subir aux instituteurs communaux aucune retenue pour avoir droit à une pension ; en exigeant moins de 30 années de services et de 60 ans d'âge comme condition indispensable et en permettant à l'instituteur de tenir compte de toutes ses années de services, excédassent-elles 30 années ;

« 4° En ne conservant le système des retenues que pour les pensions des veuves et orphelins des instituteurs communaux, retenues qu'il serait préférable de voir alimenter une seule caisse centrale de prévoyance pour tout le royaume au lieu de neuf caisses provinciales et d'une caisse centrale ; en ne permettant, en aucun cas, de faire subir des réductions à ces pensions, ni d'augmenter le chiffre des retenues. »

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur avec prière de l'examiner avec 'a plus grande bienveillance.

M. Dethuinµ. - Messieurs, je viens appuyer la pétition en faveur des instituteurs primaires.

L'instituteur est l'objet de la sollicitude générale, et on le conçoit, car il est la base, le fondement, et, si je puis m'exprimer ainsi, la personnification de l'école et de l'enseignement.

Or, depuis quelque temps, il se fait en Belgique un mouvement véritablement populaire en faveur de l'instruction. On a compris, et l'on comprend tous les jours davantage, que c'est d'elle que dépend en grande partie le développement matériel aussi bien que le développement intellectuel du pays.

M. le ministre de l'intérieur, avec la bienveillante sollicitude qu'il déploie en toutes choses et particulièrement dans celles qui touchent à l'instruction publique, lui a fait faire, depuis quelque temps, de rapides progrès : Création de quatre nouvelles écoles normales, dont deux pour les filles, construction de bâtiments d'école, enfin les efforts les plus généreux, les plus louables ont été tentés par l'honorable ministre.

D'où vient que, malgré cela, l'instruction publique en Belgique est toujours en souffrance ?

Je ne sais, messieurs, si je puis me permettre de le dire, mais, selon moi, on n'applique pas le véritable remède, efficace et souverain. En effet, construire des écoles, les meubler, c'est très bien sans doute, mais c'est là le cote purement matériel, mais l'âme qui doit animer l'école, la lumière qui doit l'éclairer, l'instituteur enfin est un peu oublié. Et cependant s'il est un homme qui mérite à tous égards l'estime et la considération de tous, c'est ce modeste fonctionnaire, non pas seulement à cause des qualités spéciales, ni des vertus particulières qui le caractérisent, mais à cause de la sublime mission qu'il s'est donnée et de l'admirable sacerdoce qu'il s'est imposé.

Instruire la jeunesse c'est un fardeau bien pesant, une tâche bien lourde, une responsabilité bien grave. Car l'instruction primaire exerce sur le caractère de l'enfant une empreinte qui ne s'efface jamais. En effet, instruire le peuple, c'est le moraliser, et le moraliser c'est le rendre apte a jouir de la liberté plus grande, plus large, journalièrement progressive et surtout à savoir en profiter avec ce calme, cette sagesse et ce discernement qui font la force et la stabilité de toutes les libertés.

Messieurs, pour arriver à ces résultats, il ne faut pas seulement de nombreuses écoles, mais de bonnes écoles, et pour qu'elles soient telles, il faut de bons instituteurs. Améliorons donc leur position matérielle et morale.

Messieurs, depuis quelque temps, je le constate avec plaisir, la position matérielle des instituteurs s'est sensiblement améliorée. L'arrêté royal de janvier 1863 avait créé quatre catégories d'écoles avec les traitements de 800 fr. première catégorie, 700 fr. deuxième, et 600 fr., troisième.

Remarquons d'abord que les bienfaits de cet arrêté royal profitent exclusivement aux écoles subventionnées par l'Etat. Or, il pourrait arriver que cette subvention fût rejetée par certaines communes qui continueraient à donner à leur instituteur, outre le logement, le minimum 200 fr. stipulé par l'article 21 de la loi de septembre 1842, et cette loi étant toujours en vigueur, on n'aurait aucun recours légal à exercer contre ces communes par trop jalouses de leurs droits et de leur autonomie. Qui souffrirait de cela ? L'instituteur.

Si l'on consulte les tableaux indiquant les traitements des instituteurs primaires, on est étonné de voir que certains d'entre eux touchent les traitements relativement élevés de 1,500, 1,800 et même 2,000 francs d'où l'on conclut que leur position est admirable, qu'ils doivent se considérer comme satisfaits et ne peuvent désirer rien de mieux.

Mais, messieurs, ces traitements relativement élevés ne sont accordés que dans les communes très populeuses, qui ont 8,000, 10.000 et 12,000 habitants ; dans les grands centres industriels, par exemple, dans l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter. Si c'étaient là des généralités, les amis des instituteurs n'auraient qu'une chose à faire, remercier et se taire ; mais ce sont là des exceptions qui ne sont malheureusement ni durables, si stables, ni assurées.

En effet, dans les quatre cantons de l'arrondissement de Mons il y a deux instituteurs ayant 2,000 fr., celui de Cuesmes, 2,180 fr., celui de Frameries, 2,000.

Et il n'y en a que dix ayant 2,000 fr. dans toute la province de Hainaut.

Aussi, messieurs, tout en rendant justice aux idées généreuses qui ont inspiré l'arrêté royal de janvier 1863 favorable aux instituteurs, je l'avoue, on doit aussi me concéder que ce n'est pas au maximum 800 fr. fixés par un arrêté qu'ils doivent les traitements dont je viens d'avoir l'honneur de vous parler, mais au casuel et aux fonctions cumulées.

Je suis peu partisan du minerval ; il offre des inconvénients dont le plus grand, celui qui frappe tout d'abord, c'est d'être réparti avec peu de justice et peu d'égalité. En effet, messieurs, le casuel est plus ou moins fort selon que la commune est plus ou moins populeuse.

L'instituteur ne reçoit donc pas, ainsi que le prétendent les partisans du casuel, à titre de stimulant, la récompense de leur zèle et de leur dévouement pour l'école ; il subit les effets d'un hasard, d'une chance, d'une protection peut-être qui l'a fait nommer, à sa sortie de l'école normale, dans telle commune populeuse plutôt que dans telle autre qui ne l'est pas. Et voilà précisément l'injustice, l'inégalité que j'avais l'honneur de signaler tout à l'heure ; car cet instituteur privilégié est peut-être moins instruit, moins capable, moins zélé que tel autre qui, à sa sortie de l'école normale, est choisi par une commune pauvre, peu populeuse, où peu d'enfants qui fréquentent l'école et où, par conséquent, le casuel est insignifiant et le traitement inférieur.

Et puis, messieurs, le casuel est-il assuré ? Evidemment non ; car il faut peu de chose pour l'enlever à l'instituteur ; par exemple, l'établissement, dans la commune, d'une école privée, laïque ou religieuse, venant faire concurrence à l'école dirigée par l'instituteur et lui enlevant ses élèves, lui retirer une partie de son casuel. Donc diminution, perte, inégalité dans le traitement de l'instituteur qui est parfaitement innocent du fait de la désertion de son école.

C'est la volonté des parents qui préfèrent cette école à telle autre, parce que celle-ci est plus conforme à leurs sentiments, à leurs opinions, pour des motifs futiles peut-être, pour suivre la mode qui veut qu'il soit de bon ton de mettre ses enfants dans certains établissements plutôt que dans certains autres.

Enfin, messieurs, une foule de choses dont il est parfaitement injuste de rendre l'instituteur responsable.

Messieurs, j'ai d'autres considérations à faire valoir en faveur de la suppression du casuel, mais je ne veux pas abuser des moments de la Chambre et de la patience de mes honorables collègues.

Je crois d'ailleurs, messieurs, que cette question d'injustice et d'inégalité suffit pour démontrer les inconvénients du casuel.

Cependant, messieurs, si on ne peut le supprimer immédiatement et le remplacer par un traitement fixe, ce qui, à mon sens, serait préférable, afin de soustraire l'instituteur aux influences étrangères et de lui accorder une plus grande indépendance, ne pourrait-on pas exiger que les communes garantissent à l'instituteur un minimum de casuel ?

Cette mesure aurait cet avantage que les communes s'occuperaient de l'école avec beaucoup plus de sollicitude, sinon par amour de l'école et de l’enseignement, à coup sûr dans un but beaucoup plus prosaïque, beaucoup plus positif, celui d'épargner leurs finances.

En un mot, le casuel ne devrait être que le complément, la partie accessoire du traitement, une prime d'encouragement. Mais cette subvention fixe, cette base invariable devrait être établie à cause même des principes d'égalité et de justice dont j'ai eu l'honneur de vous parler tout à l'heure.

Messieurs, la question des fonctions cumulées entre dans le domaine des considérations morales de l'instituteur.

Si ces fonctions donnent à l'instituteur une augmentation de traitement insignifiante, elles lui enlèvent par contre beaucoup de son indépendance, de sa liberté d'appréciation et nuisent par conséquent à sa dignité d'homme et à sa considération morale.

Quelles sont, messieurs, ces fondions cumulées ?

(page 328) Généralement ce sont celles de receveur du bureau de bienfaisance, de trésorier de fabrique, de sacristain, de chantre, d'organiste.

Messieurs, pour remplir convenablement les fonctions de chantre, de sacristain, d'organiste, que faut-il ?

Si l'on ouvre le Manuel des instituteurs de MM. Engling et Pariezl, prêtres et anciens professeurs, publié à Namur, en 1843, chez M. Xesmael-Legros, imprimeur de l’évêché, nouvelle édition mise en rapport avec la loi organique (de 1842), on y trouvera, page 11 et suivantes : « que le service de l'Eglise exige de l'instituteur des qualités et des occupations particulières. Ces qualités sont : 1° une vraie piété qui lui fasse traiter saintement les choses saintes et qui édifie le peuple ; 2° quelque connaissance des cérémonies, du rituel et du directoire ; 3° le respect envers les ecclésiastiques ; 4° l'assiduité, la tempérance, l'économie, la fidélité, la propreté, l'ordre et la prévenance envers le curé. Ses principales occupations à l'église sont : 1° de chanter ; 2° de sonner ; 3° de veiller à la décence dans le cimetière ; 4° de fermer les armoire» et les portes de l'église ; 5° d'entretenir la propreté du linge, des ornements et de tout ce qui sert aux cérémonies du culte, et 6° une certaine attention de pourvoir aux autres besoins. … En qualité d'organiste, l'instituteur entrera dans l'esprit du chant, etc... Il s’interdira les travaux incompatibles avec l'assiduité et la décence nécessaires à la tenue de l'école ... ses occupations les plus convenables seraient les leçons particulières, le confectionnement des cierges, etc., etc. »

Messieurs, je vous le demande, ces fonctions sont-elles compatibles avec la dignité de l'instituteur, avec la dignité de l'homme chargé de former les citoyens de l'avenir ?

Outre que ces fonctions sont excessivement variées, excessivement divisées et compliquées, et lui enlèvent par conséquent un temps très précieux, elles ne sont pas faites, on l'avouera sans peine, pour développer son intelligence.

Et si l'instituteur ne veut demeurer toute sa vie un pédagogue monotone et ennuyeux, débitant sans cesse sur le même ton les mêmes choses, il doit, me semble-t-il, son école terminée et rentré chez lui, lire, travailler, perfectionner enfin cet art de l'enseignement, si sublime et si vaste.

Enfin, pour dire toute ma pensée, je voudrais voir le casuel supprimé, les fonctions cumulées interdites à l'instituteur comme aux autres fonctionnaires, afin que soumis ensemble aux mêmes lois, au mêmes règlements, il jouît par contre des mêmes privilèges, des mêmes prérogatives, des mêmes honneurs.

Une subvention fixe à tous les instituteurs du pays, voilà mon idéal.

Mais je sais très bien qu'on ne peut du jour au lendemain et d'un trait de plume supprimer une chose existant depuis longtemps sans avoir songé préalablement à la remplacer par une chose meilleure, qu'une subvention fixe exigerait peut-être des dépenses assez considérables. C'est pourquoi je prie l'honorable ministre de l'intérieur de vouloir bien examiner cette question avec sa bienveillance habituelle.

En effet, augmenter le traitement des instituteurs serait justice. Il y a quelques années, on a jugé nécessaire d'augmenter le traitement d'un grand nombre de fonctionnaires civils et militaires. Si les circonstances l'exigeaient, on a bien fait et j'y applaudis.

Mais ne pourrait-on faire de même aujourd'hui pour les instituteurs ; ne pourrait-on les assimiler, par exemple, comme traitement fixe, au plus modeste des fonctionnaires militaires, an sous-lieutenant, qui a 1,800 francs.

Chose pénible à dire l'instituteur n'a pas même le traitement fixe d'un maréchal de logis de cavalerie qui reçoit 810 fr. ou d'un trompette-major de la même arme qui reçoit 635 fr. II a beaucoup moins qu'un adjudant sous-officier de gendarmerie, qui a fr. 4-10 par jour, soit 1,476 fr. par an.

Comme considération morale, l'instituteur est placé au-dessous de ces fonctionnaires militaires. En effet, dans l'armée quand un sous-officier a blanchi sous le harnois, lorsqu'il est, pour me servir de l'expression consacrée un vieux brave serviteur, mais reconnu incapable de devenir officier, à l'unanimité de ses chefs, on lui donne, comme consolation suprême, la croix de son pays.

En effet, un arrêté royal du 1er janvier 1807 nomme chevaliers de l'Ordre de Léopold : 5 sergents, 3 maréchaux des logis, 1 conducteur d'artillerie, 1 brigadier trompette, 2 brigadiers, 1 trompette. 1 tambour-major.

Messieurs, rien de mieux assurément et je suis convaincu que ces décorations sont et seront toujours dignement et honorablement portées mais j'avoue que je voudrais voir accorder ces mêmes distinctions honorifiques aux instituteurs qui sont aussi nos soldats, mais, messieurs, nos soldats de la paix, de l'idée, de l'émancipation et du progrès.

Les services que l'instituteur rend à l'humanité sont immenses et son rôle dans la société moderne est vraiment admirable, ne serait-ce qu'à cause de son désintéressement, (car sa position n'est pas tellement brillante que l'on puisse accuser celui qui l'embrasse d'une idée de lucre et de joie). L'instituteur obéit simplement, naïvement même, à une vocation vers laquelle il se sent attire par d'impérieux et irrésistibles instincts.

Pour moi, je suis convaincu que le jour est plus proche où l'instituteur aura, dans noire société civilisée, la position qu'il mérite et qui lui est due à tons égards. Il y va de l'intérêt du pays, et, s'il m'est permis de terminer par une citation qui vient appuyer mes paroles et que j'emprunte à un homme éminent dont la compétence en matière sociale, philosophique et d'instruction publique est parfaitement reconnue, l'honorable M. Jules Simon a dit : Le peuple qui a les meilleures écoles est le premier peuple ; s'il ne l'est pas aujourd'hui, il le sera demain.

Soyons, messieurs, selon l'expression de M. Jules Simon, ce premier peuple, non seulement par nos admirables institutions et nos magnifiques libertés, j'ose le dire avec un légitime orgueil national, nous le sommes déjà ; mais soyons-le aussi en honorant la science dans la personne de l'homme qui est chargé de la transmettre à ceux qui doivent nous succéder, continuer et parfaire dans l'avenir notre œuvre de civilisation et de progrès.

Je propose donc le renvoi de la pétition à M. le ministre de l'intérieur et je suis tranquille sur le sort des instituteurs, car je sais qu'en le confiant à l'honorable ministre on ne peut le placer en de meilleures ni en de plus bienveillantes mains.

M. Vleminckxµ. - Messieurs, je viens appuyer la pétition dont il s'agit et qui a pour objet d'améliorer la position des instituteurs.

Je rappellerai, à cette occasion, à M. le ministre de l'intérieur que le conseil provincial du Brabant a, à deux reprises différentes, porté à son budget une somme annuelle devant servir plus spécialement à indemniser du chef des frais d'installation les élèves sortant des écoles normales, lorsqu'ils seraient appelés aux fonctions d'instituteurs.

Je sais bien que le conseil provincial y a mis une condition, à savoir qu'une somme semblable serait allouée pour le département de l'intérieur.

Jusqu'à présent le département n'a pas fait droit ou n'a pu faire droit à cette résolution. La somme reste inscrite au budget de la province, mais elle y est sans aucune utilité puisqu'on ne peut en faire usage.

Je recommande spécialement cet objet à l'honorable ministre de l'intérieur et s'il ne peut allouer aucune somme sur le budget courant, je le prie d'examiner s'il n'y aurait pas moyen d'attribuer, sur les budgets ultérieurs, une somme semblable, afin de déférer au vœu si bien exprimé à deux reprises différentes par le conseil provincial du Brabant.

MiVDPBµ. - J'accepte volontiers le renvoi au département de l'intérieur, de la pétition dont on vient de présenter l'analyse et je me rallie aux considérations générales que M. Dethuin vient de développer. Je dois cependant faire une simple réserve sur quelques points. Je le ferai le plus brièvement possible.

Chaque fois que l'on parle des frais de l'instruction primaire et notamment des traitements des instituteurs, on s'adresse au gouvernement, le gouvernement seul est mis en cause, et l'on oublie toujours que les frais de l'enseignement primaire sont une charge essentiellement communale et que ce n'est qu'en cas d'insuffisance des ressources communales, que la province d'abord, et le gouvernement ensuite interviennent. Telle est la loi. Si les communes veulent élever les traitements de leurs instituteurs, rien ne les en empêche ; et répondant ici en passant à M. Vleminckx, si le conseil provincial du Brabant croit utile de donner des gratifications aux élèves normalistes au moment où ils s'installent dans une école communale, rien ne les en empêche non plus, et j'avoue même ne pas comprendre pourquoi le conseil, s'il considère cette mesure comme utile, en subordonne la mise à exécution à l'intervention du gouvernement. Il me semble que dans cette circonstance le conseil provincial pourrait fort bien marcher seul sans l'appui du gouvernement. Je ferai remarquer, du reste, que je n'ai pas de crédit pour cet objet à mon budget. Je (page 329) demande pardon de cette parenthèse et je continue de répondre à l'honorable député de Mons.

L'honorable membre a critiqué en termes bienveillants, je le reconnais, l'arrêté pris par le gouvernement au mois de janvier 1863, en ce qui concerne le casuel. Ces critiques ne sont pas fondées. De l'avis de tous les inspecteurs et de tous les hommes qui s'occupent d'enseignement, le casuel est un des meilleurs stimulants pour l'instituteur.

Les émoluments du personnel enseignant à tous les degrés se composent d'un casuel et d'un traitement fixe ; il en est ainsi pour l'enseignement supérieur et pour l’enseignement moyen. On a cru qu'il devait en être encore ainsi pour l’enseignement primaire. J'ai dit que le casuel était un stimulant ; en effet, pour augmenter ses revenus, l'instituteur cherche, en donnant un bon enseignement, à augmenter le nombre de ses élèves et fait ainsi un plus grand bien dans la commune.

Sur ce point donc, je ne pourrai me mettre d'accord avec l'honorable député de Mons. Le casuel devra être maintenu. Faudra-l-il, comme le pense M. Dethuin, fixer un minimum ? C'est une question a examiner, mais quant au principe du casuel, il doit être maintenu.

Si j'avais pu prévoir la discussion qui se produit, je me serais muni de quelques documents statistiques que j'ai fait dresser et j'aurais prouvé à la Chambre, par des chiffres mieux que par des paroles, tout ce qui a été fait en Belgique depuis quelques années en faveur des instituteurs primaires ; je lui aurais démontré notamment, documents en mains, que les émoluments, casuel compris, sont allés en augmentant chaque année dans une proportion considérable et que la moyenne des émoluments des instituteurs est aujourd'hui de 1,000 francs au moins, alors qu'elle n’était, il y a six ans, que de 400 à 500 francs. Ce sont là, messieurs, des résultats dont il faut tenir compte.

Mais puisque je n'ai pas sous la main ces documents, je me réserve de les communiquer à la Chambre dans une autre circonstance. Je me réserve aussi de répondre alors aux diverses observations présentées par l'honorable député de Mons, observations dont il m'est difficile, à une simple audition, de saisir tous les détails.

- Les conclusions de la commission, qui sont le renvoi au ministre de l'intérieur, sont mises aux voix et adoptées.

Projet de loi révisant le code pénal

Rapport de la section centrale

M. Pirmezµ. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport sur les derniers livres du code pénal.

- Ce rapport sera imprimé et distribué et le projet qu'il concerne mis à la suite de l'ordre du jour.

La séance est levée à 5 heures.