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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 16 mai 1867

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1866-1867)

(Présidence de M. E. Vandenpeereboomµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1021) M. Thienpont, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. de Florisone, secrétaireµ, donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Thienpontµ présente l'analyse suivante des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Les membres du conseil communal et des habitants de Bousval prient la Chambre d'autoriser la concession d'un chemin de fer partant d'un point à déterminer entre les stations de Marbais et de Laroche, pour aboutir à Bruxelles. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du rapport sur des pétitions relatives au même objet.


« M. Anspach demande un congé de deux jours. »

« M. Jamar, obligé de s'absenter, demande un congé de quelques jours. »

- Ces congés sont accordés.

Projet de loi autorisant le gouvernement à échanger un terrain domanial

Rapport de la commission

M. Jouretµ. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission qui a examiné le projet de loi autorisant le gouvernement à conclure un échange de terrain avec la ville de Tournai.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et le met à la suite des objets à l'ordre du jour.

Ordre des travaux de la chambre

M. Dethuinµ. - Messieurs, j'ai demandé la parole pour prier la Chambre de vouloir bien consacrer la séance de demain à la lecture des prompts rapports.

Permettez-moi d'insister sur ce point, il est très important. En effet, si nous ne nous occupons pas des prompts rapports avant la fin de la session, ils ne seront plus présentés à la Chambre avant le mois de décembre. Il faudra quelques semaines aux honorables ministres auxquels ils seront renvoyés pour les examiner et l'on arrivera ainsi au mois de janvier 1868.

Les pétitionnaires auront donc attendu un an avant de connaître le résultat de leurs réclamations.

Messieurs, si ces rapports sont prompts, que seront donc désormais ceux qui ne le seront pas ?

Si au contraire nous terminons cette besogne avant de nous séparer, les honorables ministres pourront examiner à leur aise, attentivement, ces rapports après la clôture de la session et faire droit, s'il y a lieu, aux réclamations qu'ils contiennent.

Parmi les pétitions, il en est une pour laquelle mon excellent ami et collègue Carlier a demandé un prompt rapport ; elle est très importante et a été adressée à la Chambre par l'administration communale de Nimy-Maizières.

Messieurs, depuis novembre 1865 cette commune est très agitée, profondément troublée, ses intérêts locaux gravement compromis à la suite d'une lutte engagée entre l'administration communale et l'inspection primaire, un instituteur en a été victime.

Je crois, messieurs, que la justice exige que l'on ne prolonge pas, pendant huit ou dix mois encore, l'état de gêne, de malaise dont souffre cette commune.

Je prie donc la Chambre, si elle ne veut pas consacrer toute la séance de demain aux prompts rapports, de bien vouloir s'occuper du feuilleton dans lequel se trouve la pétition de Nimy.

Cette affaire est sérieuse et c'est un véritable service que l'on rendrait à une commune de l'arrondissement que j'ai l'honneur de représenter.

MfFOµ. - Messieurs, je ne conteste pas l'intérêt que peuvent présenter les pétitions qui ont été renvoyées à la commission et qui ont été l'objet de prompts rapports. Mais il est évident que les travaux dont la Chambre est saisie, et qui ont un caractère d'urgence, ne peuvent être interrompus pour des discussions de cette nature. Nous ne pouvons arriver à la fin de cette session sans avoir statué sur les propositions importantes qui sont soumises depuis longtemps à la législature.

Je prie donc la Chambre de vouloir bien ajourner la discussion de ces prompts rapports.

M. Moncheurµ. - Je pense qu'il est impossible que la Chambre se sépare sans avoir consacré au moins une séance aux prompts rapports. Je ne prétends pas qu'on doive interrompre la discussion de la loi sur la péréquation cadastrale pour aborder celle des prompts rapports, mais il est évident que nous ne pouvons pas remettre à la session prochaine (page 1022) la discussion des prompts rapports, dont plusieurs sont d'une grande urgence. Nous avons entre autres les pétitions qui nous ont été adressées par plusieurs députations permanentes des conseils provinciaux, relativement à un objet dont on doit s'occuper avant la prochaine session de ces conseils. Quel que soit l'accueil qu'on veuille faire à ces pétitions, il est évident qu'elles ont un caractère excessivement sérieux ; elles émanent d'autorités constituées haut placées et pour lesquelles nous devons avoir des égards. Nous ne pouvons refuser de nous occuper de l'objet dont elles nous entretiennent. Je demande donc que les prompts rapports soient maintenus sur notre ordre du jour au rang qu'ils y occupent.

MfFOµ. - Lorsque la Chambre aura statué sur les projets de loi dont elle est saisie et qui sont à la fois urgents et importants, je ne m'oppose nullement à ce qu'on s'occupe des prompts rapports. Mais pour l'objet dont vient de parler l'honorable M. Moncheur, je vous prie, messieurs, de remarquer que la pétition a été également adressée au Sénat. Le Sénat l'a renvoyée au gouvernement avec demande d'explications et ces explications ont été déjà fournies. Je ne pourrais donc que donner une deuxième édition de ces explications, et je me ferai au surplus un véritable plaisir d'en adresser une copie à l'honorable membre, s'il en témoigne le désir.

M. Moncheurµ. - Il vous est impossible de préjuger quel sera le résultat de la discussion. Vous ne pouvez savoir si la Chambre n'exprimera pas un vœu sympathique, en principe, aux propositions des députations permanentes.

MfFOµ. - La Chambre s'est déjà prononcée sur celle question.

M. de Macarµ. - Comme rapporteur de la commission des pétitions qui a été chargée d'examiner la pétition à laquelle l'honorable M. Dethuin, vient de faire allusion, je tiens à déclarer que le rapport est fait et que je suis à la disposition de la Chambre.

M. Dumortierµ. - Je ne crois pas, comme le dit M. le ministre des finances, que la Chambre ne doive s'occuper de prompts rapports que lorsqu'elle aura épuisé l'immense ordre du jour qui existe actuellement. Ce serait annuler le droit de pétition, ce serait anéantir le droit d'initiative de la Chambre, qui statue sur l'urgence du rapport à faire sur telle ou telle pétition. Parmi celles qui ont été l'objet d'une demande de prompt rapport, il s'en trouve une qui est d'une importance extrême, c'est la pétition signée par près de 500 habitants de Tournai contre l'emplacement qu'on veut donner à la station. (Interruption.) Je dis qu'une pétition signée par près de 500 habitants de Tournai, tous les notables, tous les électeurs, je dirais presque tous appartenant à votre opinion, messieurs de la gauche, et je pourrais même dire 4 ou 5 membres de la famille de M. le ministre de la justice, une telle pétition, messieurs, ne doit pas être livrée à l'oubli. Il me semble que c'est là une chose qui mérite un examen et il n'est pas possible d'admettre que les pétitions urgentes soient renvoyées à la session prochaine, c'est-à-dire aux calendes grecques.

Je demande, comme mon honorable ami M. Moncheur, que l'on continue l'examen de la loi en discussion, mais que la Chambre fixe immédiatement après une séance pour entendre les rapports sur les pétitions dont on a déclaré l'urgence.

- Une voix. - Et l'expropriation par zones ?

M. Dumortierµ. - Il n'y a rien qui presse. Est ce que par hasard on est aussi pressé de priver le citoyen de sa propriété qu'on l'a été d'en priver le magistrat âgé de 70 ans ?

J'ajouterai d'ailleurs que l'expropriation par zones est une question qui prendra un temps très considérable à la Chambre et que tout le monde n'est pas encore décidé à annuler un article de plus de la Constitution.

Je pense donc, messieurs, que cette question n'est pas aussi urgente que les pétitions pour lesquelles la Chambre a demandé un prompt rapport.

M. de Brouckereµ. - Messieurs, je reconnais avec M. le ministre des finances qu'il est bien difficile que nous interrompions la discussion dont nous nous occupons depuis quelques jours et que nous ajournions les projets de lois importants qui figurent à notre ordre du jour pour nous occuper de pétitions.

Cependant, il est incontestable que parmi celles sur lesquelles on a demandé de prompts rapports, il en est de très intéressantes, entre autres celle dont a parlé l'honorable M. Dethuin.

Je crois que si la Chambre ne pouvait s'occuper de cette pétition avant de se séparer, ce qu'il y aurait de mieux à faire, c'est que M. le ministre de l'intérieur voulut bien avoir une conférence avec les députés de Mons pour arranger cette affaire qui me semble susceptible d'arrangement et pour aviser avec lui aux moyens de faire cesser un conflit qui dure depuis trop longtemps.

MpVµ. - Il est convenu qu'on fixera prochainement un jour pour la discussion des prompts rapports.

Projet de loi révisant les évaluations cadastrales

Discussion générale

M. Teschµ. - Messieurs, la Chambre est sans doute fatiguée de cette discussion qui est déjà très longue, et je ferai en sortede la retenir le moins possible.

J'ai demandé la parole, messieurs, hier lorsque l'honorable M. Dumortier, reproduisant une assertion très erronée quant aux opérations cadastrales dans le Luxembourg, cherchait à la justifier par une insinuation des plus malveillantes et tout aussi peu fondée que l'assertion elle-même.

L'honorable M. Dumortier disait qu'il ne comprenait rien aux opérations cadastrales faites dans le Luxembourg ou qu'il y comprenait trop, s'il était vrai que le travail définitif avait été fait par des Luxembourgeois, ce qui incriminait le caractère des honorables fonctionnaires de notre province qui avaient dû coopérer à ces opérations comme le caractère des Luxembourgeois eux-mêmes.

M. Dumortierµ. - Pas du tout.

M. Teschµ. - C'est ce dont l'honorable M. Dumortier aurait surtout dû s'abstenir, à moins d'avoir vérifié et d'avoir trouvé exact le fait qu'il insinuait de cette manière.

Je répondrai d'abord à l'insinuation qui m'a vivement blessé et pour les Luxembourgeois et pour les fonctionnaires auxquels elle pouvait s'adresser.

Il est complètement inexact que le travail définitif ait été fait à Bruxelles par des Luxembourgeois qui auraient, en quoi que ce soit, modifié le travail qui a été fait dans la province ; le travail en ce qui concerne la province de Luxembourg a été complètement adopté à Bruxelles ici qu'il a été proposé par la commission provinciale, et aucune espèce de changement n'y a été fait.

Ainsi donc ce que M. Dumortier voulait faire croire, à savoir que le travail avait subi à Bruxelles des changements favorables au Luxembourg parce que des fonctionnaires luxembourgeois y auraient coopéré, est en tous points contraire à la vérité. Quant au travail qui a été fait dans la province même sous la direction de qui a-t-il été fait et par qui a-t-il été fait ?

Certes, messieurs, s'il est un travail fait dans une province quelconque qui offre des garanties d'impartialité en raison des personnes qui y ont pris part, c'est évidemment celui qui a été fait dans le Luxembourg.

En effet, à ce travail ont coopéré le directeur des contributions dans la province, l'inspecteur spécial du cadastre, l'inspecteur provincial du cadastre et des contrôleurs ; eh bien, à quelle province appartenaient ces fonctionnaires par leur naissance ? Il y a d'abord le directeur des contributions M. Dordu, qui appartient à la province de Flandre occidentale ; l'inspecteur provincial du cadastre M. Libert, qui appartient à la province de Namur ; l'inspecteur plus spécial du cadastre, M. Farcy, qui est Limbourgeois et le contrôleur qui a principalement opérée M. Halloy, qui appartient à la province de Namur.

Voilà, messieurs, les fonctionnaires qui ont dirigé et fait le travail sur lequel la Chambre a en ce moment à statuer. Maintenant, quant aux indicateurs, quant aux experts, ils ont été pris dans la province comme cela s'est fait partout ailleurs et il était impossible de faire autrement ; mais vous remarquerez, messieurs, que tous les hommes dont l'opinion devait exercer une influence prépondérante sur les estimations sont étrangers au Luxembourg. C'est peut-être à cette circonstance que nous devons de ne pas avoir été dégrevés dans une proportion plus forte et plus conforme à la justice.

Voilà donc, messieurs, le moyen de justification des assertions de l'honorable M. Dumortier qui croule par sa base et c'était cependant le seul.

Maintenant, messieurs, quand on dit que le Luxembourg est de toutes les provinces celle dont le développement a été le plus grand depuis 30 ans, on dit une chose qui est diamétralement contraire à la réalité des choses. Si l'on affirmait tout à fait le contraire, on serait dans le vrai. D'où vient cette erreur profonde, absolue ? Elle provient de ce que personne ne veut se reporter à 30 ans en arrière, de ce que personne ne (page 1023) se demande quelles sont les causes qui influent sur le développement de la valeur de la propriété et l'augmentation de ses revenus.

Quelles sont les principales raisons qui déterminent l'augmentation de la valeur de la propriété et où ces raisons se sont-elles produites ?

La principale raison qui détermine l'augmentation de la valeur de la propriété, c'est incontestablement le développement industriel, qui amène l'augmentation des populations et par suite celle de la consommation. Qu'est-ce qui produit encore l'augmentation des revenus de la propriété ? C'est le développement de l'industrie agricole, c'est le perfectionnement de cette industrie, perfectionnement qui se produit par la culture de plantes industrielles dont la valeur est beaucoup plus grande et en même temps par un mode de culture meilleur.

Eh bien, où ces causes se sont-elles produites ?

Dans le Luxembourg ? Pas du tout.

Elles se sont produites précisément dans toutes les localités où le projet de loi propose d'augmenter les contributions. Tous vos grands établissements industriels, tous vos hauts fourneaux, de quand datent-ils ? Ils remontent tout au plus à une trentaine d'années. Quels établissements existaient dans la province de Liège lors de la confection du dernier cadastre ? Il n'y avait guère que les usines Cockerill, comme établissement important. Les sociétés de Sclessin, d'Ougrée et tant d'autres se sont constituées depuis.

Passez dans la province de Namur ; de quelle époque datent les grands établissements de Floreffe et d'Oignies, toutes les verreries ?

M. Wasseigeµ. - L'établissement d'Oignies n'est pas dans la province de Namur.

M. Teschµ. - Non, mais vous avez l'établissement de Floreffe qui se trouve à proximité. Eh bien, de quand tout cela date-t-il ; de quand date le développement de vos exploitations de houilles qui font la richesse de la Basse Sambre ? De quand datent vos exploitations de minerais olitiques et de terres plastiques ? Mais de moins de 30 ans. Comparez la situation de 1836 et 1853 à la situation actuelle et vous verrez le développement industriel qui s'est produit dans certaines parties de la province de Namur.

Mais de quand donc date Charleroi comme bassin industriel ? De quand datent les établissements de Châtelineau, de Couillet, de la Providence et de tant d'autres ? Mais de 30 ans et de moins encore ; c'est-à-dire d'une époque postérieure à celle où le cadastre a été terminé ; de sorte que ces grands établissements industriels n'ont pas pu entrer en ligne de compte lorsque le premier travail a été fait.

Je vous le demande, messieurs, examinez tout cela et quand vous aurez fait ce travail, je vous prierai de vouloir bien m'accompagner dans le Luxembourg et de me montrer un seul établissement important qui s'y serait élevé depuis cette époque.

Vous le chercheriez vainement. Mais vous y trouverez des établissements qui étaient en pleine activité à cette époque et qui, depuis, ont été totalement ruinés et abandonnés. De sorte que le Luxembourg offre une situation diamétralement opposée à celle que nous montrent les provinces qui réclament aujourd'hui. Et ce sont les grands établissements de ces provinces qui ont tué tous les petits établissements du Luxembourg et que tandis que vous vous éleviez sans cesse, le Luxembourg, au contraire, déclinait de jour en jour. Voilà la vérité, la vérité incontestable, et je défie qui que ce soit, ici ou ailleurs, de me contredire sur ce point.

Il est donc, messieurs, qu'on ne permette le mot, il est véritablement absurde, il est véritablement ridicule de venir comparer le mouvement industriel du Luxembourg à celui des provinces de Namur, de Liège et de Hainaut, car je le répète, c'est par centaines que l'on compte dans ces provinces les établissements industriels tandis que vous n'en rencontreriez pas un seul, dans le Luxembourg, qui ait une importance sérieuse, réelle.

Vous ne pourriez pas m'y montrer un seul centre de population nouveau que l'industrie aurait formé ; tandis que, dans les provinces que je viens de citer, la population n'a cessé de s'accroître dans les plus fortes proportions.

Ainsi, messieurs, rien que sous le rapport du développement industriel, qui a certes une immense influence sur l'augmentation de la valeur de la propriété, il y a une différence du tout au tout.

II en est de même, messieurs, quant au mouvement de l'industrie agricole proprement dite. Dans les parties de la Belgique que j'oppose au Luxembourg, il y a une véritable industrie agricole ; il n'en est pas de même dans le Luxembourg.

L'agriculture y est aujourd'hui ce qu'elle était il y a un siècle ; c'est-à dire qu'on se borne à cultiver pour les besoins de la population et que la culture ne peut même y suffire à ces besoins. Voilà l'énorme différence.

De la culture des plantes industrielles, des betteraves, du lin, du tabac, des colzas du houblon, il n'en est pas question dans le Luxembourg ; le sol ne s'y prête pas, et on n'y fabrique pas d'engrais.

Ce qui a surtout augmenté en Belgique le revenu des terres, c'est le grand nombre de sucreries de betteraves qu'on y a créées. Ces établissement ont fait doubler, tripler, quadrupler même le loyer des terres dans certaines localités.

Le nombre de ces usines s'augmente de jour en jour, et le loyer des terres augmente toujours. Y a-t-il quelque chose de semblable dans le Luxembourg ? Personne n'oserait le soutenir.

Sans doute, lorsque vous comparez le Luxembourg d'aujourd'hui au Luxembourg d'il y a 30 ou 40 ans, il y a sous certains rapports une amélioration, je veux bien l'admettre ; mais quand vous comparez le Luxembourg aux autres provinces, comme vous devez le faire, les opérations cadastrales n'ayant eu pour but que de rechercher l'augmentation du revenu foncier de toutes les provinces pour établir la base de l'impôt ; quand vous comparez, dis-je, le Luxembourg aux autres provinces, vous reconnaissez à l'instant l'immense infériorité du Luxembourg.

Vous ne pouvez, sous aucun rapport, comparer le revenu de la propriété dans le Luxembourg à ce que nous voyons à cet égard dans les autres provinces.

Je n'hésite pas à dire que quand on procédera à la révision parcellaire, le Luxembourg sera dégrevé dans une proportion bien plus considérable qu'on ne propose de le faire aujourd'hui.

Qu'est-ce qui a été fait dans le Luxembourg en fait d'agriculture ? J'en parle de la manière la plus désintéressée, la plus impartiale et sans la moindre exagération : ce qui a été fait jusqu'à présent dans le Luxembourg se borne à ceci : on a défriché quelques terrains. Voilà tout, et aucune cause générale n'est venue y produire sur la valeur des propriétés une influence quelconque.

Aussi eût-il été facile à tout observateur attentif d'indiquer à l'avance et en l'absence même des opérations cadastrales, où il y aurait augmentation de l'impôt foncier.

Où le nombre des membres des Chambres a-t-il été augmenté ? C'est dans les provinces de Brabant, de Liège, de Namur et de Hainaut, c'est là que la population s'étant accrue, c'est là que le bien-être s'était développé et avec lui l'augmentation de la valeur de la propriété.

Dans le Luxembourg, la population n'augmente que dans de très faibles proportions.

La construction des routes, des chemins n'agit pas directement et immédiatement sur la valeur des propriétés ; cela prépare plutôt le développement pour l'avenir ; il ne suffit pas d'avoir des terres ; il faut encore des bras ; il faut des capitaux.

Ces bras et ces capitaux ne viennent pas du jour au lendemain, lorsque les conditions de production ne sont pas avantageuses.

A ces raisons que je viens de donner, s'en joignent d'autres qui démontrent encore que le dégrèvement aurait dû être plus élevé. En effet, si nous décomposons le nombre des propriétés dont se compose le sol du Luxembourg, que trouvons-nous ?

Nous y trouvons une très grande partie de bois. Or, il est incontestable que les bois y ont perdu de leur valeur. L'industrie métallurgique qui le consomme a complètement disparu de cette province. Illn'y existe plus un seul établissement en activité.

M. Moncheurµ. - C'est précisément l'histoire des trois quarts de la province de Namur.

M. Teschµ. - Pour la province de Namur, on vous a déjà répondu hier. Vous avez pu trouver l'emploi de vos bois bien plus facilement que le Luxembourg ; vous êtes de beaucoup plus près des centres de consommation que ne l'est le Luxembourg. Cela est tellement vrai, que le bois qui doit venir du Luxembourg se trouve grevé de 30 à 40 p. c de frais de transport.

La province de Namur se trouve donc dans des conditions bien meilleures ; elle n'a pas les mêmes distances à parcourir.

Quant aux propriétés bâties, je suis certain qu'il est des localités où l'on construit plus en une année que dans toute la province de Luxembourg. Je suis certain qu'on élève plus de constructions en un an à Bruxelles qu'on n'en élève dans le Luxembourg en deux ou trois ans. Cet accroissement des propriétés bâties, dans les autres provinces, devait être une nouvelle cause de dégrèvement pour le Luxembourg.

(page 1024) Ces raisons auxquelles je pourrais en ajouter beaucoup d'autres, si je ne craignais d'abuser des moments de la Chambre, doivent vous prouver que si une injustice a été commise, ce n'est pas en faveur, mais au préjudice de la province que j'ai l'honneur de représenter ici.

M. Dumortierµ. - Je demande la parole pour un fait personnel.

L'honorable membre qui vient de se rasseoir m'a accusé de m'être livré, dans la séance d'hier, à des insinuations malveillantes contre les Luxembourgeois. Je ne croyais pas qu'une telle accusation me serait venue, précisément le jour ou j'ai prononcé des paroles de sympathie, d'une très vive sympathie pour les Luxembourgeois.

- Des membres. - Cédés !

M. Dumortierµ. - Je crois que ceux qui sont restés réunis à la Belgique comprendront fort bien la portée de mes paroles. Mais l'honorable M. Tesch ne peut pas appeler insinuations malveillantes pour les habitants d'une province ce qui est l’examen d'une question.

L'honorable membre avait d'autant plus tort de parler d'insinuations malveillantes, que lui-même en a fait immédiatement après, dans son discours, lorsqu'il est venu dire que le Luxembourg avait droit à une réduction, et que si cette réduction n'était pas plus forte, cela était dît à un inspecteur namurois et à un autre inspecteur de telle province.

Voilà l'insinuation malveillante ; et c'est lorsque vous vous êtes livré à cette insinuation, que vous m'accusez. Et pourquoi ? Parce que je ne peux pas m'expliquer ce fait que la propriété a perdu du valeur, depuis le dernier cadastre dans le Luxembourg.

MfFOµ. - Pas du tout, elle a augmenté de valeur.

M. Dumortierµ. - Elle a relativement perdu de valeur puisqu'elle doit être dégrevée de 52,000 francs.

Voilà l'insinuation malveillante ! Or, il suffit de lire le rapport, de lire ce que dit M. le ministre des finances. Je ne répéterai pas la phrase ; elle a été dite quatre ou cinq fois. Mais il suffit de lire ce que dit M. le ministre des finances pour voir s'il y a eu dans mes observations des insinuations malveillantes.

Messieurs, j'aime le Luxembourg, et je l'aime beaucoup, mais je n'aime pas qu'on vienne, sans raisons plausibles, charger une province pour en dégrever une autre.

M. de Theuxµ. - J'ai quelques, mots à dire sur la question du cadastre.

Ce que l'honorable M. Tesch vient de dire, quant au Luxembourg, je me proposais de le dire en grande partie quant à la province de Limbourg.

De toutes les provinces, c'est celle dont la population a reçu le moins d'accroissement. Il n'y a, dans cette province, aucune grande ville, pas plus que dans le Luxembourg. Il n'y a aucune grande industrie nouvelle. La principale industrie de la province est celle qui a son siège à Hasselt, celle de la distillation des grains ; et celle-là est très ancienne.

J'ai donc été étonné de voir que la province de Limbourg occupe le quatrième rang dans le progrès du revenu signalé dans tout le pays. Ainsi la province de Limbourg est signalée comme ayant progressé de 82 p. c, tandis que le Brabant est signalé comme n'ayant progressé que de 77 1,2 p. c, et que le Hainaut n'a progressé que de 85 p. c, 3 p. c. de plus que le Limbourg. Cela est véritablement incompréhensible.

Messieurs, la conclusion que je veux tirer de ceci, c'est que, quoique la Chambre n'ait pas discuté le résultat général ou la réalité de l'accroissement de la prospérité agricole dans toute la Belgique, il est important de faire une réserve à cet égard. Car je suis intimement persuadé que le progrès agricole, dans la province de Limbourg, n'est pas de 82 p. c. Aussi, tout en votant pour le projet de loi, je ne veux en aucune manière donner mon assentiment au tableau du progrès agricole dans tout le pays.

Je ne veux pas discuter cette question en ce moment, parce que M. le ministre des finances a déclaré qu'il n'en résultera aucune conséquence avantageuse pour le trésor, ni relativement à la contribution personnelle, ni relativement au droit de succession. Cette déclaration me donne mes apaisements quant à présent ; mais si, plus tard, on voulait tirer parti de ce tableau pour introduire de nouvelles charges sur la propriété, je déclare dès à présent que je ne considère pas du tout ce tableau comme ayant des résultats sérieux et authentiques.

Messieurs, je voltrai pour le projet de loi qui établit la répartition, parce qu'il est évident que les Flandres doivent être dégrevées, et que si l'on ne votait pas le projet, le dégrèvement auquel les Flandres ont droit serait ajourné.

On a beaucoup parlé d'un cadastre parcellaire. Je crois que si l'on veut décréter un cadastre parcellaire, il serait bon de prendre une autre époque et de déterminer en même temps une évaluation de province à province, mais non pas de se borner à faire un cadastre parcellaire de chaque province, d'après le tableau qui nous a été donné. Je pense que cette question doit être réservée. Moyennant ces déclarations, je répète de nouveau que je voterai le projet de loi.

M. de Macarµ. - Messieurs, j'ai à justifier l'amendement que, de commun accord avec l'honorable M. Moncheur, nous avons présenté dans la séance d'hier.

Je tiens à expliquer le sens que j'ai voulu lui donner, et à bien préciser la portée que je lui attribue.

D'une part, selon moi, la valeur de la propriété en Belgique, est exagérée, et le projet de loi consacre des inégalités que je ne crois pas pouvoir imposer à mes commettants, sans qu'il soit bien démontré qu'il a été impossible de les éviter.

D'autre part, je ne puis contester que les Flandres sont surtaxées, et j'ai dit l'autre jour que je me rallierais à toute mesure, ayant pour but le dégrèvement immédiat des Flandres, qui pourrait être prise sans danger pour l'avenir.

D'après les opinions, je ne dirai pas émises dans cette Chambre, car à part M. le rapporteur et M. le ministre des finances, je dois constater que personne ne s'est levé pour appuyer le projet de loi, mais manifestées en sections et en dehors de la Chambre même, je crois que le sentiment de la réparation à accorder aux Flandres aura une très grande influence sur la décision de la Chambre. Entre une injustice actuelle et une injustice future qu'on pourra, se dit-on, réparer un jour, on préfère, semble-t il, porter remède immédiat au mal qui existe et laisser à l'avenir le soin de remédier à notre décision.

Personnellement, je dois le dire, je ne crois pas avoir le droit de réparer une injustice en en créant d'autres. Cependant j'ai dû tenir compte des conditions où se trouvait la Chambre et j'ai cru faire un acte honnête en donnant à toutes les opinions qui se sont produites la facilité de s'exprimer par un vote. C'est dans ce sens que l'amendement a été proposé.

Ceux qui pensent qu'il y a lieu de dégrever immédiatement les Flandres seront satisfaits et en même temps auront la possibilité de ne point imposer à l'avenir les inégalités que j'ai indiquées dans une autre séance et que tous les orateurs qui se sont succédé ont constatées. Ceux qui pensent, comme moi, que le projet de loi est essentiellement mauvais, auront la consolation, dans leur défaite, de ne devoir subir que transitoirement l’état de choses qu'ils réprouvent, la révision parcellaire devant bientôt établir pour chacun la véritable position qu'il doit avoir et sauvegarder les intérêts de tous. Ceci dit quelle serait la portée de la décision à prendre par la Chambre.

Evidemment, messieurs, si la révision parcellaire est ordonnée, il ne faudrait pas se borner à la ventilation des baux telle qu'elle a été faite aujourd'hui, il faudrait qu'un appel nouveau fût fait aux propriétaires ; ils comprendraient, probablement mieux cette fois qu'il y a pour eux une importance capitale à les fournir, et comme il s'agira d'une œuvre sérieuse, comme il s'agira d'établir pour plusieurs années les bases de notre principal impôt, les éléments d'appréciation seraient cette fois plus nombreux qu'ils ne l'ont été, les conséquences plus légitimes.

Notamment il est évident que les baux ayant pour objet des biens qui ont changé de nature devront être pris en considération, d'un autre côté le classement ne pouvant se faire qu'après l'examen parcellaire, je suis convaincu que dans ces conditions on pourra arriver à des résultats à peu près exacts.

Je voudrais aussi que les commissions provinciales appelées à juger du travail, pussent prendre connaissance des baux qui auront été rejetés par les agents du cadastre, soit comme exagérés, soit comme atténués. Ces agents devront être tenus de motiver les mesures qu'ils auront prises à cet égard.

Enfin, il faudrait laisser aux commissions provinciales tout le temps nécessaire pour qu'elles pussent faire un travail sérieux et exercer un contrôle tout à fait efficace.

Messieurs, avant de terminer, je voudrais répondre quelques mots au discours prononcé par l'honorable M. Frère dans la séance d'hier ; cependant, au point où en sont arrivés les débats, je comprends que j'aie l'obligation d'être bref.

Je me bornerai à faire remarquer que, parmi les inégalités signalées, deux des principales n'ont été rencontrées ni par l'honorable ministre des finances ni par l'honorable rapporteur de la section centrale, Ni le (page 1025) fait de la surtaxe imposée aux terres de la première classe, à la décharge des terres des dernières classes, ni le fait de l'absence de changement de classement des terrains, qui ont changé de nature, n'ont été déniés par les honorables orateurs.

Ce dernier fait, messieurs, peut avoir une importance réelle : nous le savons tous, il y a dans le Luxembourg, dans le Limbourg et, comme le disait M. le ministre des finances, dans la province de Namur à propos des bois, une masse de terrains qui ne seront soumis qu'à un impôt excessivement modique, que les autres propriétés devront nécessairement compenser par un surcroît d'impôt.

Je répondrai quelques mots au reproche que l'honorable ministre m'a fait, à moi plus particulièrement, dans la séance d'hier. L'honorable ministre nous a informé qu'il avait l'intention de se mettre à la tête d'une société ayant pour objet d'acheter les terres de mon arrondissement à 2,400 fr.

Cette nouvelle ne peut manquer de m'être particulièrement agréable, je puis garantir qu'elle sera parfaitement accueillie dans mon arrondissement et que l'honorable ministre y rencontrera un accueil des plus sympathiques. Cependant je dois, à mon très grand regret, déclarer que je ne suis pas en mesure de fournir ce qu'il désire.

L'honorable ministre se tromperait cependant s'il croyais que les chiffres que j'avais indiqués, non pas comme étant d'une manière absolue la valeur de la propriété, mais comme un élément d'appréciation qui avait son importance, sont énormément éloignés de la valeur réelle. Précisément, au moment où l'honorable ministre parlait, je recevais d'un notaire de l'arrondissement de Huy, un document de même nature que celui que j'avais produit précédemment. Celui-ci ne comprend, à une exception près, que des ventes de quantités de terre inférieures à un hectare par acte. Eh bien, le prix de l'hectare ressort à 3,476 francs et le prix des baux à 107 fr.

Ne l'oubliez pas, il s'agit précisément des localités qui de tout mon arrondissement ont le plus de valeur. Dans ces actes figurent des prés, des cotellages, des vignobles et des jardins que le cadastre nouveau porte à un prix bien supérieur à ceux que je viens de mentionner.

Je puis ajouter que je garantis la parfaite exactitude, la vérité du document que j'invoque. Entre la valeur attribuée aux propriétés par le projet de loi et la valeur réelle, il y a un écart considérable.

C'est là ce que je voulais prouver et je pense que l'évaluation que je signale aujourd'hui, bien que plus élevée de 1,000 francs que celle résultant des documents que j'ai fournis dernièrement, prouve qu'il y a, entre la valeur réelle et la valeur attribuée par le cadastre, une très grande différence.

Messieurs, je dois dire un mot à l'honorable ministre sur ce qu'il a dit de la situation exceptionnelle qui atteint mon arrondissement.

L'augmentation n'est pas exceptionnelle, et au surplus le reproche que j'ai fait au projet de loi ne porte pas sur la valeur qu'on attribue à la propriété dans l'arrondissement, mais sur les inégalités qui lui sont appliquées et qui m'empêchent de déclarer à mes mandataires qu'ils ont été taxés comme ils devaient l'être et qu'ils ne payent que ce que justement ils doivent payer.

Messieurs, je suis obligé aussi de revenir sur le fuat de l'exagération de la valeur qu'on attribue à la propriété.

L'honorable ministre a dit : Vous prétendez que la propriété est augmentée, mais vous ne le prouvez pas.

Je demanderai à M. le ministre comment je pourrais faire cette preuve à moins de faire un travail dans le genre de celui qui a été fait par l'administration, à moins de faire une espèce de contre-enquête et de fournir ainsi des chiffres à l’encontre de ceux qu'il a produits.

Il ne m'a pas même été possible de contrôler le travail des réviseurs. C'est ainsi que j'ai pris le fait des communes de Genck et de Sutendael dans le rapport de la commission provinciale du Limbourg sans pouvoir connaître ce que l'honorable ministre m'a appris dans la séance d'hier. Au surplus, ce fait ne prouve-t-il pas qu’on a décidé la question sur la production d'une quantité excessivement minime de baux ?

J'ai fait ce que j'ai pu pour obtenir des données certaines, et la preuve en est dans les divers relevés que j'ai fait faire et dont j'ai donné connaissance à la Chambre. Je me suis adressé surtout aux personnes qui, par leur caractère et leurs connaissances spéciales, pouvaient m'inspirer de la confiance, je leur ai demandé notamment s'ils pensaient que réellement, comme l'affirme le projet de loi, la moyenne du revenu d'un hectare pouvait être, en Belgique, de 100 francs.

A très peu d'exceptions près même dans cette Chambre, il m'a été répondu par tous que cette valeur paraissait exagérée. Lorsque vous me disiez, M. le ministre, que ce sont des baux qui déterminent cette valeur, vous deviez prouver que ces baux ont été convenablement triés, qu'ils n'ont pas été refusés sans contrôle par les agents du cadastre.

Ce que j'ai dit des baux enregistrés et non enregistrés l'autre jour a une influence plus grande qu'on ne l'a supposé sur la valeur attribuée à la propriété.

Il est évident que si l'on peut faire cinq parties d'un tout, l'une valant 20 et les quatre autres 10, on n'obtiendra pas la moyenne en prenant la différence entre 20 et 10.

La moyenne sera le cinquième de la somme de 4 fois 10 et une fois 20, soit 12 et non pas 15.

Or, dans le calcul qui a été fait pour les baux enregistrés et non enregistrés, on n'a tenu compte que des baux enregistrés produits et l'on n'a pas tenu compte de la quantité de ceux-ci qui n'étaient pas produits.

Si l'on se décide, messieurs, à faire une révision parcellaire il y aurait lieu de tenir compte de la moins-value que la terre a subie depuis quelques années.

Ce but que tous nous désirons atteindre, n'est-il pas de fixer équitablement ou sagement l'impôt foncier ?

Messieurs, à propos des bâtiments de mines et de charbonnages, M. le ministre vous a dit qu'il ne se croyait pas le droit de ne pas frapper ces bâtiments de l'impôt, qu'il doutait qu'il fût autorisé à cela par une loi quelconque, enfin qu'il trouvait inadmissibles les raisons données pour justifier l'allégation du payement en double emploi.

Quant au premier point.si l'honorable ministre n'entend pas innover, s'il n'entend pas faire décider la question ipso facto par le projet de loi, je consentirais très volontiers à ce que les tribunaux décidassent de la chose. Mais s'il s'agit de créer l'impôt cette fois, je crois que la thèse que j'ai soutenue dans une précédente séance est parfaitement logique.

L'impôt, a dit M. le ministre, doit être établi sur tout ce qui constitue un revenu.

Or, à coup sûr les machines d'exhaure, les ventilateurs ne constituent pas un revenu, mais une dépense.

Quand on paye la redevance sur les mines, il est évident qu'on ne paye qu'à la condition que les produits soient hors de terre, qu'ils soient mis à la disposition des consommateurs.

Je le demande n'est-ce pas frapper deux fois la même valeur, que d'exiger un impôt direct d'abord, puis de frapper l'outil, l'engin indispensable pour livrer les produits à la consommation ?

Je n'entends pas parler, messieurs, des bâtiments commerciaux, des dépendances de houillères ne servant pas directement à l'extraction, mais seulement de ceux qu, sont en quelque sorte le complément indispensable de la mine qui en sont pour ainsi dire une partie intégrante.

Je ne demande que ceci : qu'on n'innove pas, qu'on respecte les droits de chacun, et je me déclare satisfait.

Avant de terminer, messieurs, je ne puis que répéter ce que j'ai dit en commençant.

Mon amendement a été produit dans un but de conciliation. Il laisse à chacun la possibilité de dégrever immédiatement les Flandres tout en ne grevant pas dans l'avenir la propriété de charges qu'elle ne serait pas en mesure de supporter sans perturbation, tout au moins sans graves inconvénients.

- L'amendement est appuyé.

M. de Naeyerµ. - Messieurs, je crois que la discussion est à peu près épuisée. Aussi, mon intention n'est pas d'entrer dans de longs développements.

Je crois que j'aurais surtout mauvaise grâce de vouloir occuper longtemps la Chambre pour prouver la légitimité du dégrèvement qui doit être accordé aux Flandres, puisqu'il n'y a pas, à cet égard, la moindre contestation. Tous les membres, même les plus opposés au projet de loi, ont reconnu que les Flandres sont aujourd'hui surtaxées et qu'elles doivent être dégrevées.

L'honorable M. de Macar, notamment, disait dans son premier discours : « Je veux, autant que qui que ce soit dans cette Chambre, dégrever les Flandres de la surtaxe dont elles sont frappées. »

L'honorable M. Wasseige s'est prononcé formellement dans le même sens. Du reste, cette surtaxe qui pèse sur les provinces flamandes est un fait de notoriété publique, et qui a été produit par des causes qui sont parfaitement connues. L'honorable ministre des finances vous a dit hier, et avec raison, que la valeur locative a augmenté dans une moindre proportion dans les Flandres qu'ailleurs, parce que, lors de la confection (page 1026) du premier cadastre, la production agricole avait déjà atteint dans cette province un haut degré de perfectionnement et que par conséquent il y avait là moins de progrès à réaliser que dans les autres provinces.

Mais il y a une autre cause qui mérite aussi de fixer votre attention. C'est qu'alors que les autres provinces étaient en voie de progrès, les Flandres ont eu à traverser une crise industrielle d'une extrême intensité et qui a dû arrêter nécessairement le développement de leur prospérité. Aussi le dernier exposé de la situation du royaume nous fournit à cet égard des renseignements extrêmement concluants. Nous y voyons entre autres que pendant la période de 1530 à 1800 la population du royaume a augmenté de 305,755 habitants, ce qui fait pour tout le pays un accroissement proportionnel de 6,91 p. c.

Or, quelle a été cette proportion dans les Flandres ? Dans la Flandre orientale, la proportion d'accroissement de la population n'a été pendant cette période de 10 ans que de 2,05 p. c, c'est-à-dire pas même le tiers de la moyenne du pays ; dans la Flandre occidentale, cette proportion est descendue à 1,20 p. c, ce qui ne fait pas même le cinquième de la proportion générale. Examinons maintenant ce qui s'est passé dans les provinces dont le contingent de contributions foncières doit être augmenté dans une certaine mesure à raison d'un accroissement très notable de leur revenu foncier. Dans la province de Liège, la population est augmentée pendant la même période (1851 à 1860) dans la proportion de plus de 13 p. c. ; dans le Hainaut, de près de 11 p. c., et dans la province de Namur, de près de 9 p. c. Pendant la période décennale qui a précédé celle de 1850 à 1860 et qui a nécessairement dû exercer une influence immédiate sur les 10 années qui ont servi de base à la révision des évaluations cadastrales, il y a des différences encore plus saillantes.

L'augmentation totale de ma population du pays, pendant cette période, a été de 355,040 habitants, ce qui donne une proportion de 8,67 p. c. pour tout le royaume. Quelle a été cette proportion dans les Flandres ? Dans la Flandre occidentale, elle a été de 2,31 p. c. et dans la Flandre orientale seulement de 0,61 p. c, c'est-à-dire de moins d'un p. c, tandis que dans les provinces de Namur et de Liège elle était de plus de 14 p. c. et dans le Hainaut de près de 11 p. c., et j'ajouterai que, même dans les provinces de Limbourg et de Luxembourg, l'augmentation de la population a été proportionnellement bien plus considérable que dans les Flandres. Ainsi, pendant la période de 1851 à 1860, l'accroissement a été, dans le Limbourg, de près de 4 p. c, et, dans le Luxembourg, de près de 5 p. c. ; pendant l'autre période, c'est-à-dire de 1841 à 1850, la population a augmenté dans ces deux provinces de plus de 10 p. c.

Il est donc évident qu'en ce qui concerne l'accroissement de la population, les Flandres sont restées dans une très grande infériorité relativement à toutes les autres provinces et notamment à l'égard des provinces de Namur, de Liège et de Hainaut, d'où la conséquence, parfaitement logique, que la valeur locative des propriétés a reçu aussi une augmentation bien plus faible dans les provinces flamandes que dans les autres parties du pays ; car il est impossible de nier la connexité entre l'accroissement de la population et la prospérité du pays, tout comme il est impossible de révoquer en doute la connexité entre le développement de la prospérité et l'accroissement de la valeur des propriétés.

Toutefois, messieurs, le résultat des nouvelles évaluations cadastrales ne se justifie pas uniquement par des inductions tirées des circonstances que je viens d'indiquer sommairement. Ainsi que l'honorable ministre des finances vous l'a parfaitement prouvé, ces évaluations sont basées sur des données très positives et très certaines ; on a procédé cette fois comme on avait procédé antérieurement, on a eu recours à la ventilation des baux et je crois qu'il est impossible de trouver un procédé plus concluant. Il y a eu cependant cette différence, c'est que les baux qui ont servi de base aux nouvelles évaluations ont été plus nombreux de 50 p. c. que ceux qui ont été ventilés au cadastre primitif. Or, puisqu'on a admis les résultats du cadastre primitif comme étant d'une exactitude assez approximative, pourquoi n'admettrait-on pas les résultats des évaluations actuelles, puisque dans les deux cas l'on a opéré sur les mêmes bases.

On me dira peut-être que lors du cadastre primitif on a eu recours à une expertise parcellaire, tandis que, cette fois, on s'est contenté d'établir des moyennes par cantons. J'admets que cela puisse amener des modifications. Quant au revenu relatif des différentes parcelles, mais au point de vue du contingent de chaque province, il ne peut en résulter qu'une influence très secondaire, et je vais vous le prouver par un exemple emprunté à un des griefs principaux articulés contre le projet de loi, je yeux parler des bois de la province de Namur.

L'honorable ministre a constaté hier par des renseignements officiels que les nouvelles évaluations des propriétés boisées de la province de Namur, qu'on prétend être si exagérées, n'auront, en définitive, d'autre conséquence que d'augmenter le contingent de contribution de la province de Namur de 27,500 fr., ce qui, soit dit en passant, fait une augmentation de 22 à 23 centimes par hectare pour les 121,000 hectares de bois qui existent dans cette province. Mais, messieurs, supposons qu'on procède à une expertise parcellaire ; quel en serait le résultat ? En résultera-t-il que cette augmentation de 27,000 fr. de contribution devra être reportée sur les autres provinces ? En aucune façon ; supposons que, par suite de cette expertise parcellaire, la contribution qui frappe actuellement les bois ne soit pas augmentée et je crois que c'est un résultat auquel les intéressés applaudiraient beaucoup. Eh bien, cette expertise parcellaire constaterait aussi qu'il y a dans cette province au moins 30,000 hectares de bois qui ont été convertis en terres arables ou prairies. Or, n'est-il pas évident que le revenu cadastral de ces bois devenus terres et prairies devrait être considérablement augmenté ? Et certes l'on aurait encore à s'applaudir si l'augmentation de revenu n'était que de 15 francs par hectare et cela suffirait déjà pour augmenter le contingent de la contribution de 30,000 francs, soit un franc par hectare.

Vous auriez donc, d'une part, un dégrèvement de 27,000 francs, mais, d'un autre côté, une augmentation de 30,000 fr., et cela dans l'hypothèse la plus favorable que l'on puisse imaginer dans le sens des réclamations qu'on a fait valoir.

M. Wasseigeµ. - Non, mais il serait réparti plus justement ; c'est tout ce que nous demandons.

M. de Naeyerµ. - Cela dépendrait des résultats de l'expertise parcellaire qui très probablement donnerait lieu aussi à des inégalités et ne manquerait pas de soulever également des réclamations ; mais en admettant qu'elle fût conforme à ce que vous pourriez désirer, je dis que le contingent de votre province ne serait point modifié.

M. Moncheurµ. - Mais la répartition serait plus équitable.

M. de Naeyerµ. - C'est possible, mais cela n'est pas du tout certain.

Messieurs, je me bornerai à attirer votre attention sur une dernière considération.

Je disais tout à l'heure que la nouvelle répartition du contingent entre les provinces est certainement de nature à nous inspirer autant de confiance que les évaluations qui ont eu lieu pour le cadastre primitif, puisqu'on a opéré dans les deux cas sur les mêmes bases, avec cette différence en faveur des dernières opérations,, qu'il y a une augmentation de 50 p, c. dans le nombre d'actes qui ont servi aux évaluations.

Mais il y a plus ; c'est que nous avons aujourd'hui, pour contrôler les résultats de ces opérations, un moyen qui n'existait pas lors du cadastre primitif ; ce moyen, c'est la ventilation des ventes publiques, qui a été faite en exécution de la loi de 1851, sur les droits de succession et dont les résultats sont consignés dans un long tableau annexé à l'arrêté du 28 juillet 1852.

Ce tableau, messieurs, contient pour chaque commune deux multiplicateurs ; l'un pour les propriétés bâties, l'autre pour les propriétés non bâties. Il y a donc là une masse énorme de chiffres, puisqu'il y a deux multiplicateurs pour chacune de nos 2,500 et quelques communes.

Je me suis donné la peine, messieurs, de compulser ces chiffres pour, en extraire des moyennes relatives aux propriétés non bâties, par provinces et par cantons. Eh bien, je suis arrivé ainsi à constater qu'il y a une concordance assez remarquable entre ces multiplicateurs moyens par provinces et même, jusqu'à un certain point, par cantons, et entre les nouvelles évaluations cadastrales, en d'autres termes entre les résultats de la ventilation des ventes publiques et les résultats de la ventilation des baux, ce sont précisément les provinces dont le continrent dans l'impôt foncier doit être augmenté dans la plus forte proportion qui ont aussi le multiplicateur moyen le plus élevé. Ainsi, la province de Namur figure ici au premier rang. Le multiplicateur moyen pour cette province est au moins 84, alors que dans la Flandre occidentale il n'est que 40 et dans la Flandre orientale 46 1/2.

Dans le Hainaut et dans la province de Liège, le multiplicateur moyen est à peu près le même, savoir et dans le Hainaut et 62 1/2 dans la province de Liège.

Vous voyez que cela coïncide assez bien avec les résultats des nouvelles opérations cadastrales.

M. Wasseigeµ. - Cela prouve que nous aurions pu nous plaindre depuis beaucoup plus longtemps.

(page 1027) MfFOµ. - Mais non, c'est le contraire qu'il faut en conclure.

M. Wasseigeµ. - Si le multiplicateur est trop élevé, nous avions évidemment le droit de nous plaindre.

MfFOµ. - Mais il n'est pas trop élevé.

M. Wasseigeµ. - C'est la question.

M. de Naeyerµ. - Mais le multiplicateur n'a pas été établi d'une manière arbitraire, il est le résultat rigoureux de la ventilation des ventes publiques enregistrées dans notre province comme dans la vôtre. Vous n'avez donc nullement lieu de vous plaindre, à moins que vous ne prétendiez qu'on vend vos biens trop cher, fait dont je doute que vous soyez disposé à vous plaindre. (Interruption.)

Il est évident, messieurs, qu'il y a un rapport nécessaire, un rapport indiscutable même entre la valeur vénale et la valeur locative. J'admets parfaitement que ce rapport puisse être dérangé pour certaines communes ; mais quand on opère par province, il est impossible que ce rapport n'existe pas ; car s'il y avait une province qui se trouvât à cet égard, dans une position plus favorable que les autres, immédiatement les capitaux y afflueraient et l'équilibre se rétablirait immanquablement et cela au bout de très peu de temps.

Ce qui est encore remarquable, c'est que cette concordance du multiplicateur avec les nouvelles évaluations cadastrales se manifeste aussi pour beaucoup de cantons et surtout pour les cantons au sujet desquels des plaintes ont été élevées.

Ainsi, pour le canton de Huy, par exemple, il y a encore un multiplicateur extrêmement élevé ; il est de quatre-vingt-douze au moins ; il y a même des communes où il est plus fort ; mais la moyenne est au moins 92.

On a fait ressortir l'évaluation qui paraissait trop faible pour le canton de Gedinne relativement à d'autres cantons.

Eh bien, cette quotité d'augmentation pour le canton de Gedinne, plus faible que pour d'autres, est encore conforme au tableau des multiplicateurs, car dans toute la province de Namur, c'est le canton de Gedinne qui a le multiplicateur le plus faible, il ne s'élève qu'à 59 alors que les cantons de Ciney et de Walcourt ont respectivement pour multiplicateurs moyens 107 et 124. L'argument que je tire du tableau annexé à l'arrêté du 24 juillet 1852 vient encore à l'appui de ce que disait tout à l'heure l'honorable M. Tesch, relativement au Luxembourg. On a parlé d'attribuer au Luxembourg la même quotité d'augmentation qu'au Hainaut.

Eh bien, le tableau des multiplicateurs, dont je parle, vient encore renverser cette idée et démontrer qu'elle est complètement fausse. Le multiplicateur pour la province de Luxembourg est loin d'être aussi élevé que celui de la province de Hainaut.

Maintenant, messieurs, permettez-moi d'ajouter quelques mots pour apprécier la valeur des écarts que je viens de signaler entre les multiplicateurs adoptés pour les droits de succession.

On pourrait admettre, je pense, que 35 est en quelque sorte un multiplicateur normal, c'est-à-dire qu'en admettant que le revenu imposable ait été établi d'une manière exacte par l'ancien cadastre, on aurait eu très approximativement à cette époque la valeur vénale, en multipliant le revenu imposable par 35.

Du reste, si l'on veut admettre un autre multiplicateur comme type, par exemple 40, les résultats des comparaisons que je viens de faire seront proportionnellement les mêmes.

Eh bien, si nous admettons comme type normal le multiplicateur 35, il en résulterait que pour la Flandre occidentale, où le multiplicateur est aujourd'hui 40, il n'y aurait qu'une augmentation de 14 1/4 p. c. dans la valeur vénale.

Or, quant à la valeur locative imposable, on attribue à cette province une augmentation de 42 p. c. ; vous voyez donc qu'elle n'est pas privilégiée.

Pour la Flandre orientale, vous avez le multiplicateur moyen 46 1/2 ; eh bien, en admettant toujours comme type le multiplicateur 35, cela représente un accroissement de valeur vénale de 32 5/4 p. c. Encore une fois, vous le voyez, cette province n'est pas privilégiée puisqu'on augmente son revenu cadastral de 52 p. c.

Voyons maintenant ce qui en est pour la province de Namur qui se plaint tant. En adoptant la base que je viens d'indiquer, savez-vous, messieurs, quelle est l'augmentation de la valeur vénale dans cette province qui croit qu'on commet une énormité à son égard parce que son revenu cadastral serait augmenté de cent pour cent ? Eh bien, la valeur vénale des propriétés non bâties y est augmentée de 140 p. c. depuis la confection du cadastre ! Vous voyez donc que vous n'avez nullement des motifs de vous plaindre et que surtout vous ne pourriez pas prétendre que les Flandres sont trop dégrevées, puisque pour 140 p. c. d'augmentation de la valeur vénale, on n'augmente votre valeur locative que de 100 p.c., tandis que dans la Flandre occidentale la valeur locative est augmentée de 42 p.c., alors que la valeur vénale n'est augmentée que de 14 1/4 p. c, et que dans la Flandre orientale la valeur locative est augmentée de 51 1/2 p. c, alors que la valeur vénale n'est augmentée que de 32 à 33 p. c.

Je pourrais entrer dans beaucoup d'autres détails ; mais ce que j'ai dit suffira pour démontrer que la répartition du contingent entre les provinces est à l'abri de toute critique raisonnable.

Il est parfaitement établi que l'état actuel des choses constitue une injustice criante envers les Flandres ; cette injustice est reconnue par tout le monde. Or, il ne serait pas de la dignité de la législature de maintenir une injustice reconnue ; je dis même que la moralité publique protesterait contre une pareille manière d'agir.

Maintenant, les provinces qui vont payer un peu plus, ont-elles à se plaindre ? Voici à quoi cela se réduit pour la province de Namur qui se plaint le plus ; cette province verra sa contribution augmentée de 14 à 15 p. c., alors que son revenu est augmenté de plus de 100 p. c. et que l'augmentation de la valeur vénale de ses propriétés s'élève au moins à 140 p. c. Consciencieusement parlant, ce n'est pas là un sort bien malheureux.

- La discussion générale est close. On passe aux articles.

Discussion des articles

Article premier

« Art. 1er. Le montant de la contribution foncière au profit de l'Etat est fixé, pour 1868, à la somme de 18,909,283 fr. 66 c., qui sera répartie entre les provinces et les communes à raison de 6 70/100 p. c. du revenu cadastral imposable au 31 décembre 1865, tel qu'il est déterminé par la révision des évaluations cadastrales décrétée par la loi du 10 octobre 1860. »

M. Dumortierµ. - Messieurs, dans la séance d'hier, j'ai annoncé que j'appellerais l'attention de la Chambre sur une modification à introduire à l'article premier.

L'article premier contient deux choses ; il consacre d'abord la répartition générale entre les provinces, répartition qui est faite en vertu d'opérations générales et qui a pour résultat de procurer un dégrèvement aux Flandres trop longtemps surtaxées. Ainsi que vient de le démontrer encore l'honorable M. de Naeyer, ce dégrèvement est très loin d'être exagéré ; je pense avec d'honorables amis qu'il aurait pu être beaucoup plus considérable. Tout le monde a reconnu qu'il fallait dégrever les Flandres ; il n'y a eu qu'une voix là-dessus.

Ce point acquis à la discussion, voyons la sous-répartition dans les provinces.

Cette sous-répartition se trouve établie à la page 51 de l'exposé dos motifs, dans une colonne portant pour rubrique : « Montant de l’impôt foncier au profit de l’Etat.

« Province d'Anvers : 1,639,469 fr. 66 c.

« Brabant etc., etc., etc. »

Le total pour les 9 provinces est de : 18,909,283 fr. 06 c., chiffre égal à celui qui est indiqué dans l'article premier du projet de loi. La colonne où se trouve la sous-répartition par provinces est suivie de deux autres colonnes, présentant respectivement les différences en plus et les différences en moins, et c'est là que vous voyez que les Flandres seront dégrevées d'environ un million de francs.

J'accepte la division par province ; personne jusqu'ici n'a réclamé contre cette division par province ; toutes les réclamations ne se sont portées que sur la sous-division. Eh bien, toutes les provinces acceptant la répartition générale qui dégrève les Flandres, qui dégrève même le Luxembourg, qui n'augmente que très peu le Limbourg, je me demande : Y a-t-il nécessité de mettre à exécution la sous-répartition qui se fait dans chaque province par canton et par commune ? C'est cette sous-répartition qui a donné lieu à tous les abus dont on a parlé. Ne serait-il pas possible d'admettre la division générale proposée par le gouvernement et de faire dans chaque province, au moyen du cadastre actuel, la sous-répartition du chiffre affecté à chaque province ? De cette manière vous faites disparaître tous les abus de détail dont on s'est plaint depuis le commencement du débat. (Interruption.) Pardon ; le Hainaut ne payera pas un centime de plus ou de moins ; M. le ministre des finances propose de lui attribuer une somme de fr. 3,535,492 05 c.

Cette somme reste acquise au Hainaut ; seulement les opérations de détail dont on s'est plaint considérablement seront mises de côté jusqu’à (page 1028) une révision parcellaire combinée, ainsi que l'a très bien dit l'honorable M. de Theux ; vous arriverez alors à un résultat qui pourra être accepté par tout le monde, et qui sera d'autant plus acceptable que vous aurez déjà fait une répartition par province, conformément aux règles que le gouvernement vous a proposées.

A mes yeux, rien de plus juste que de procéder ainsi. Grâce à la révision parcellaire, vous ferez disparaître les abus qui ont soulevé des réclamations ; vous ferez disparaître les griefs articulés au sujet de ces propriétés boisées qui ont perdu de leur valeur ; de ces terres défrichées dont a parlé l'honorable M. Ansiau, et qui payeront un quart p. c. de leur revenu ; de ces prairies des bords de l'Escaut et de la Sambre qu'a signalées mon honorable ami, M. Vander Donckt, et qui, bien qu'elles aient perdu énormément de leur valeur, vont voir augmenter leur contribution d'une manière considérable.

Messieurs, si vous sanctionniez tous ces faits, vous ne feriez autre chose que déplacer l'injustice. Tout en faisant cesser une injustice pour les Flandres, vous créeriez une injustice, au détriment de tout le pays. C'est alors que de tous les points de la Belgique il vous arriverait des réclamations contre les opérations cadastrales.

Je pense avec l'honorable M. Moncheur et avec d'autres honorables collègues qu'il est indispensable d'arriver à une évaluation parcellaire.

On vous dira : tels ou tels seront augmentés ; mais du moins il y aura justice, et les griefs dont on vient de se plaindre et que mon excellent ami l'honorable M. de Naeyer a eu bien soin de laisser de côté, doivent nécessairement être redressés. Je propose donc à la Chambre un amendement ainsi conçu :

« Le montant de la contribution foncière au profit de l'Etat est fixé pour 1868 à la somme de 18,909,283 fr. 06 cent., répartie entre les provinces comme suit :

« Anvers : 1,639,469 06

« Brabant : 3,760,861 86

« Flandre occidentale : 2,312,460 02

« Flandre orientale : 2,711,035 55

« Hainaut : 3,553,492 05

« Liège : 2,117,903 26

« Limbourg : 840,297 38

« Luxembourg : 612,675 71

« Namur : 1,361,088 97

« Total ; 18,909,285 66

« La sous-répartition dans chaque province sera faite d'après le cadastre actuel, jusqu'à la révision parcellaire. »

Je crois que c'est là le seul et unique moyen de donner raison à tous les griefs, aux griefs dont les Flandres se sont plaintes avec tant de raison et aux griefs dont tant de députés se sont plaints depuis le commencement de ce débat.

Plus tard, la révision parcellaire se fera et alors s'il y a lieu de modifier la répartition par province, vous le ferez ; mais jusque-là, il vaut mieux maintenir les bases actuelles, auxquelles l'opinion publique est faite, dont personne ne se plaint, qui n'ont excité aucune réclamation dans le pays. Ce sera beaucoup plus sage que de se lancer dans des modifications qui exciteront de vifs mécontentements.

M. Tackµ. - Il est extrêmement difficile de calculer, à première vue, toute la portée de l'amendement que l'honorable M. Dumortier vient de présenter, à l'instant même, à la Chambre. Je crois cependant qu'il est facile de démontrer, en peu de mots, que cet amendement ne saurait recevoir votre approbation.

Tout d'abord, je crois qu'il faut accepter le système du projet de loi tout entier ou le rejeter dans toutes ses parties. Point de milieu ! sans quoi, l'on tombe dans de singulières contradictions, et c'est à cela qu'aboutit l'amendement dont vous venez d'entendre la lecture.

Que vous propose l’honorable membre ?

D'adopter le projet du gouvernement quant à la répartition à faire entre les provinces, c'est-à-dire qu'il vous conseille de sanctionner les évaluations faites, en exécution de la loi de 1860. Quant à cette répartition et par un étrange retour sur lui-même il refuse, immédiatement après, de ratifier ces mêmes opérations quand il s'agit de faire la sous-répartition, comme il l'appelle, ou, si vous voulez, la répartition de canton à canton, de commune à commune. Ce qui est bon pour le premier cas devient mauvais pour le second.

M. Dumortierµ. - Parce c'est là que sont les injustices.

MfFOµ. - Pas du tout.

M. Tackµ. - L'honorable M. Dumortier demande que le chiffre de l'augmentation, tel qu'il est arrêté pour chaque province, par le projet de loi, soit réparti entre les cantons et les communes en proportion des évaluations cadastrales anciennes.

Or, il est tel canton d'une province qui, depuis trente ans, a progressé énormément, où le revenu des immeubles est accru dans des proportions considérables ; il est tel autre canton, a ns la même province, qui est pour ainsi dire resté stationnaire, et vous allez faire payer par ce dernier canton les aggravations de charges qui incombent au canton où la richesse immobilière s'est développée dans de larges proportions.

Toutes les opérations qu'on a faites auront donc été inutiles.

Voici du reste un autre effet du système que l'honorable député de Roulers met en avant. C'est que l'augmentation dûment constatée, résultant des évaluations parcellaires faites pour les propriétés bâties dans les villes, irait peser en grande partie sur les propriétés rurales.

Ainsi la plus-value qui a été constatée à Bruxelles en ce qui touche le revenu imposable des propriétés bâties grèverait de tout son poids les propriétés rurales du Brabant.

Une conséquence pareille n'est pas admissible. Ce serait consacrer une flagrante injustice au détriment de beaucoup de cantons et au profit de quelques-uns.

Il résulte de l'amendement de l'honorable M. Dumortier encore cette autre anomalie, c'est que le marc le franc du revenu imposable varierait entre les diverses provinces.

Aujourd'hui le marc le franc est uniforme pour tout le pays. Le projet de loi respecte ce principe et fixe identiquement pour 1868, dans toutes les communes de Belgique, le marc le franc à 6 70/100 p. c. du revenu cadastral imposable au 31 décembre 1865.

L'amendement de l'honorable M. Dumortier ferait varier le tantième pour cent de province à province.

La chambre est impatiente de finir, c'est pourquoi je bornerai là mes observations.

- Des membres. - Aux voix ! aux voix !

MfFOµ. - Messieurs, je ne veux pas examiner longuement l'amendement de l'honorable M. Dumortier. Il n'est évidemment pas soutenable. Ainsi, les mêmes opérations qu'il déclare justes en ce qui concerne les provinces, il les déclare inexactes et inadmissibles en ce qui touche les cantons. L'honorable M. Tack vient de vous démontrer à quels résultats absurdes on arriverait par l'adoption de cet amendement. Ainsi, il arriverait que, dans la province de Liège, certains cantons, et notamment le canton d'Aubel, qui doivent être dégrevés, seraient surtaxés. Cela, je le répète, n'est pas admissible. Ce n'est pas, d'ailleurs, pour m'occuper de ce amendement que je me suis levé.

Mais on m'a demandé si les particuliers qui prétendraient, par exemple, que leur propriété est exempte de l'impôt foncier en vertu d'une disposition de la loi sur l'impôt foncier, pourraient réclamer, après l'adoption de l'article premier de la loi que nous discutons, suivant la forme déterminée, devant la députation permanente et au besoin, devant la cour de cassation, contre la taxe qu'on voudrait leur imposer.

Je réponds affirmativement à cette question. Il en est incontestablement ainsi. Si l'on prétend qu'une propriété est exempte de l'impôt foncier en vertu de la loi, on suivra les précédents tracés en cette matière, et qui sont déterminés par la loi elle-même. On aura à se pourvoir devant les autorités compétentes, qui sont, je le répète, la députation permanente, et au besoin, la cour de cassation.

- La clôture est demandée.

M. Thibautµ. - Je demande à répondre quelques mots au discours de l'honorable M. de Naeyer.

- La clôture est prononcée.

L'amendement de M. Dumortier est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

L'article premier est adopté.

Article 2

« Art. 2. Le contingent de chaque commune et celui de chaque province seront augmentés ou diminués annuellement dans la proportion indiquée à l'article premier, à raison des accroissements ou des diminutions de revenu imposable qui y seront constatés par les opérations de la conservation du cadastre. »

- Adopté.

Article additionnel

MpVµ. - Vient l'article additionnel, proposé par MM. de Macar et Moncheur. Il est ainsi conçu :

« Il sera procédé, dans le plus bref délai possible, à la révision par parcelle, du revenu cadastral des propriétés non bâties. »

MfFOµ. - J’ai déjà dit qu'il me paraît impossible de concilier deux dispositions aussi manifestement opposées : la première décréterait l'application de la révision qui vient d'être opérée ; et, par la seconde, on déciderait que l'on (page 1029) continuera de réviser. Il est évident, dès lors, qu'il ne faut pas adopter la révision qui est proposée. Cela est incontestable.

Il y a d'autant moins lieu d'adopter un pareil système que, dans la pensée des honorables auteurs de l'amendement, il faudrait refaire toutes les opérations ; on ne pourrait ne pas s'en tenir à la ventilation des baux qui a été faite, il faudrait procéder à une nouvelle ventilation.

Or, il me paraît beaucoup plus sage de faire ce que j'ai indiqué déjà : attendre qu'un certain temps se soit écoulé, afin de faire une opération plus complète et plus utile. Des changements feraient survenus, une situation nouvelle serait constatée ; c'est l'observation que vient de faire également l'honorable M. de Theux, et elle me paraît très fondée. Il vaut évidemment mieux attendre quelques années, plutôt que de dépenser maintenant 4 millions pour une opération qui ne pourrait donner un résultat satisfaisant.

M. Moncheurµ. - Il n'y a pas la moindre contradiction entre la thèse que nous avons soutenue dans toute cette discussion et l'amendement par lequel nous proposons à la Chambre de déclarer en principe, qu'une révision par parcelle du revenu cadastral des propriétés bâties aura lieu par les soins du gouvernement, le plus tôt possible.

Nous qui croyons que le travail qu'on nous présente est essentiellement défectueux, mauvais, rempli d'injustices, nous agissons sous l'empire de cette conviction, et non seulement nous voterons contre l'adoption de ce travail, mais, nous plaçant dans l'hypothèse qu'il soit accepté par la législature, nous demandons que celle-ci fasse au gouvernement un devoir de prendre ou de proposer dans le plus bref délai possible les mesures propres à faire la révision cadastrale sur une autre base, sur la seule qui puisse rétablir la justice distributive, c'est-à-dire l'expertise parcellaire. Il n'y a certes, dans cette demande de notre part, rien de contradictoire, ainsi que le prétend M. le ministre des finances ; il n'y a, au contraire, rien que de parfaitement conséquent avec nos paroles et nos convictions.

Nous désirons que si la nouvelle péréquation qu'on nous propose d'adopter est mise un jour à exécution, elle soit du moins de la plus courte durée possible. Nous n'indiquons pas, il est vrai, de terme ou de délai fixe endéans lequel l'expertise parcellaire devra être faite, mais il suffira que le gouvernement soit placé sous l'obligation de la faire le plus tôt possible. Nous savons, du reste, par expérience, que ces sortes d'opérations sont très lentes, car voilà sept années que l'on a été occupé du travail dont on vous demande de sanctionner aujourd'hui les résultats.

M. le ministre des finances vient de dire qu'après une nouvelle période on pourra faire un autre travail de révision des revenus cadastraux, mais qu'est-ce que M. le ministre entend par une nouvelle période ? Sera-ce encore une période de quarante ans ? C'est fort à craindre, or, c'est contre pareille éventualité que-nous voulons garantir le pays, en demandant que par un article additionnel à cette loi, si elle est adoptée, il soit ordonné en principe que l'expertise parcellaire du revenu aura lieu de suite.

Ceux qui, comme nous, pensent que la loi en projet repose sur des données erronées et produit de graves et nombreuses injustices, ne peuvent refuser leur vote à une disposition dont le but et l'effet seront de faire cesser ces injustices.

Rappelez-vous, messieurs, que beaucoup de fonctionnaires qui ont coopéré à rassembler les éléments du projet de loi en discussion, et qui y ont coopéré en suivant les instructions qu'ils ont reçues, reconnaissent que dans une foule d'applications de ces instructions et des opérations qu'ils ont faites, les résultats sont contraires à la justice distributive et à l'équité ; et que plusieurs d'entre eux, d'accord avec la plupart des commissions provinciales et des députations permanentes des conseils provinciaux, ont déclaré que l'unique moyen de remédier au mal était, à leur avis, l'expertise parcellaire.

De la part donc de ceux-là mêmes qui voteront pour la loi, il n'y aura aucune espèce de contradiction à voter également pour l'article additionnel qui ordonne l'expertise parcellaire dans un très prochain avenir. Cette disposition peut parfaitement se concilier avec l'adoption de la loi, elle sera rationnelle et conforme aux principes de la justice.

MfFOµ. - J'avais compris d'abord l'amendement en ce sens qu'il s'agissait de continuer les opérations et la révision parcellaire ; mais l'honorable membre dit : J'exprime un vœu dans la loi, le vœu que l'on révise ultérieurement les évaluations cadastrales, au moyen de l'expertise parcellaire complète. C'est donc une déclaration de principe vague, dont l'application n'aura lieu que dans un délai indéterminé. Dans ces conditions, c'est encore beaucoup moins admissible, car il faudrait une loi ultérieure pour organiser cette application ; il faudra décider quelles seront les bases de l'opération, quelle sera la période sur laquelle porteront les investigations.

On veut faire déclarer, par la loi, qu'il y aura lieu ultérieurement à une révision parcellaire complète de toutes les propriétés bâties et non bâties. Eh bien, on ne peut pas demander à la Chambre de poser un pareil principe.

Ainsi vous voulez faire appliquer les opérations qui viennent d'être terminées et faire déclarer en même temps qu'elles sont inexactes et qu'elles doivent être révisées. Je dis que votre proposition est inadmissible : vous ne pouvez pas faire déclarer par le législateur qu'une œuvre est bonne et en même temps qu'elle est mauvaise.

Il vaut mieux, sous tous les rapports, réserver votre droit d'initiative ou attendre que le gouvernement saisisse les Chambres d'un projet de loi.

M. de Macarµ. - L'amendement que nous avons proposé n'a d'autre but que celui-ci : Nous croyons que le projet présenté par le gouvernement, et qui, selon nous, est mauvais, a des chances très grandes d'être adopté par la Chambre ; nous proposons un article qui donne satisfaction aux Flandres, mais qui, à tous autres égards, ne permettra à cette loi d'avoir ses effets que pendant un certain nombre d'années très restreint. Quant à moi je voterai dans tous les cas contre le projet.

- L'article additionnel proposé par MM.de Macar et Moncheur est mis aux voix ; il n’est pas adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé à l'appel nominal.

93 membres y prennent part.

68 répondent oui.

22 répondent non.

3 s'abstiennent.

En conséquence, la Chambre adopte. Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont voté pour :

MM. Jacquemyns, Kervyn de Lettenhove, Lange, Lebcau, Le Hardy de Beaulieu, Liénart, Lippens, Magherman, Mascart, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Reynaert, Rogier, Sabatier, Tack, Tesch, Thienpont, Thonissen, Valckenaere, Van Cromphaut, A. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Van Wambeke, Verwilghen, Vilain XIIII, Vleminckx, Bara, Broustin, Bruneau, Couvreur, David, de Brouckere, de Coninck, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Kerchove de Denterghem, Delaet, d'Elhoungne, de Macre, de Muelenaere, de Naeyer, de Rossius, de Smedt, de Terbecq, de Theux, de Vrière, Dewandre, Dolez, d'Ursel, Elias, Frère-Orban, Funck, Gerrits, Hayez, Hymans, Jacobs, Janssens et Ernest Vandenpeereboom.

Ont voté contre :

MM. Jouret, Landeloos, Lelièvre, Moncheur, Preud'homme, Royer de Behr, Thibaut, Warocqué, Wasseige, Wouters, Allard, Ansiau, Beeckman, Braconier, Bricoult, Crombez, Delcour, de Lexhy, de Macar, Descamps, Dethuin et Hagemans.

Se sont abstenus :

MM. Eug. de Kerckhove, de Mérode et Dumortier.

MpVµ. - Les membres qui se sont abstenus sont priés de faire connaître les motifs de leur abstention.

M. de Kerckhoveµ. - Messieurs, je n'ai pas voté contre la loi, parce que je la considère comme un véritable progrès et la réparation d'une grande injustice.

D'un autre côté, je n'ai pas voulu donner un vole approbatif, parce que la loi me paraît mal assise et basée sur des opérations que je considère comme mal exécutées.

M. de Mérodeµ. - Messieurs, je reconnais la surtaxe qui frappe les Flandres et par conséquent je n'ai pas voulu émettre un vote négatif.

D'autre part, je ne puis adopter les résultats obtenus par la sous-répartition.

J'aurais voulu l'évaluation parcellaire.

C'est là ce qui m'a empêché de voter pour la loi.

M. Dumortierµ. - Messieurs, de tout temps j'ai réclamé la révision de l'impôt injuste qui grève les Flandres ; ma voix n'y a jamais fait défaut.

Mais quand il s'agissait d'une loi qui, tout en rendant justice aux Flandres, commettait à mes yeux d'énormes injustices quant à d'autres, j'ai dû m'abstenir. C'est ce que je fais.


(page 1030) M. de Naeyerµ. - Je me permettrai de rappeler qu'il avait été entendu qu'on ferait imprimer le tableau que le gouvernement a communiqué à la section centrale et qui indique les résultats de la nouvelle évaluation cadastrale.

MfFOµ. - J'ai ordonné qu'il fût imprimé. Il est à l'impression.


M. Dumortierµ. - Je demanderai à l'honorable ministre des finances de vouloir bien donner à la Chambre une explication.

Quelle va être maintenant la condition de l'impôt des successions en ligne directe ? (Interruption.)

Je voudrais savoir s'il sera augmenté oui ou non et si les évaluations exagérées, doublées de valeur serviront de base pour les déclarations en matière de succession.

M. le ministre a dit qu'on n'était pas tenu de s'en rapporter au tableau. Cela est vrai, mais comme on préfère souvent s'en rapporter au tableau, je demande quelle sera la condition de ceux qui prendront ce parti.

MfFOµ. - L'honorable membre doit savoir que l'impôt sur les successions en ligne directe est assis sur la valeur vénale de la propriété.

M. Dumortierµ. - On peut s'en référer au cadastre.

MfFOµ. - Pour déterminer cette valeur, on a donné une facilité consistant dans l'usage d'un multiplicateur du revenu cadastral pour apprécier cette valeur vénale.

Les parties ne sont pas obligées de se servir de ce multiplicateur, et elles n'en font usage que lorsqu'elles ont intérêt à le faire.

Elles peuvent donc déclarer la valeur vénale de leurs propriétés, abstraction faite de ce multiplicateur.

J'ai eu l'honneur de dire à la Chambre que les évaluations cadastrales se trouvant modifiées, il y aurait lieu d'établir de nouveaux multiplicateurs.

Eh bien, des tableaux seront dressés, des mesures seront prises pour que, dans l'avenir comme par le passé, on ait un moyen facile de faire les déclarations en matière de succession ; il n'y aura pas d'autre augmentation que celle qui résultera de l'accroissement de valeur de la propriété ; mais cela est indépendant des opérations cadastrales. Elles n'auraient pas été faites, qu'il en aurait encore été ainsi.

Il faut bien que le rapport entre le revenu cadastral et la valeur vénale de la propriété se modifie en raison de l'accroissement ou de la réduction de cette valeur.

M. Notelteirsµ. - Je voudrais savoir si, après la mise en vigueur de la loi que nous venons de voter, l'ancien multiplicateur et l'ancien revenu cadastral pourront servir de base pour les déclarations de mutation jusqu'à ce qu'un nouveau multiplicateur soit établi.

MfFOµ. - Vous comprenez que je ferai en sorte de faire concorder les deux choses.

On fera concorder la mise en vigueur de la loi, qui n'aura lieu qu'au 1er janvier 1868, avec la publication du nouveau tableau indiquant le multiple du revenu cadastral. Si ce tableau n'était pas prêt d'ici là, on suivrait le mode ancien.


MiVDPBµ. - Messieurs, il me semble que la Chambre pourrait occuper la fin de cette séance en votant quelques petits projets de loi qui ne donneront pas lieu à discussion, tels que l'érection de la commune de Bruly-de-Pesche, l'échange de terrains avec la ville d'Arlon et un crédit spécial au ministère des travaux publics.

- Cette proposition est adoptée.

Projet de loi érigeant la commune de Bruly-de-Pesche

Discussion générale

M. Lelièvreµ. - En ce qui concerne le projet soumis aux délibérations de la Chambre, je pense qu'il ne peut s'élever aucune difficulté ; la séparation est évidemment fondée sur les motifs les plus sérieux. Mais à l'occasion du projet en discussion, je rappellerai à M. le ministre de l'intérieur une demande de même nature qui lui est adressée depuis longtemps. Il s'agit de la séparation de la section de Ville-en-Waret d'avec la commune de Vezin. Cette affaire est à l'étude depuis une époque déjà éloignée, et il est temps qu'elle ait enfin une solution. Je prie donc M. le ministre de vouloir prendre une décision définitive à cet égard, et de saisir les Chambres législatives d'un projet de loi.

- La discussion générale est close ; il est procédé à l'examen des articles.

Discussion des articles

Articles 1 et 2

“Art. 1er. Le hameau de Bruly est séparé de la commune de Pesche (province de Namur), et érigé en commune distincte sous le nom de Bruly-de-Pesche.

« La limite séparative est fixée conformément au tracé du chemin indiqué par les mots : Chemin du Fond-de-l'Eau, au plan annexé à la présente loi, lequel chemin reste au territoire de la commune de Pesche. »

- Adopté.


« Art. 2. Le cens électoral et le nombre de conseillers à élire dans ces communes seront déterminés par l'arrêté royal fixant le chiffre de leur population. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vole par appel nominal sur l'ensemble ; le projet de loi est adopté à l'unanimité des 71 membres présents.

Ce sont :

MM. Jacquemyns, Jouret, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lelièvre, Liénart, Lippens, Magherman, Moncheur, Mouton, Muller, Nélis, Notelteirs, Preud'homme, Rogier, Sabatier, Tack, Tesch, Thibaut, Thienpont, Thonissen, Van Cromphaut, Alp. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Wambeke, Verwilghen, Vleminckx, Warocqué, Wasseige, Wouters, Allard, Bara, Braconier, Bricoult, Broustin, Couvreur, Crombez, David, de Brouckere, de Coninck, de Florisone, de Haerne, de Kerchove de Denterghem, Eug. de Kerckhove, Delcour, d'Elhoungne, de Macar, de Maere, de Mérode, de Muelenaere, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, de Vrière, Dewandre, Dumortier, Elias, Frère-Orban, Funck, Gerrits, Hagemans, Jacobs et Ernest Vandenpeereboom.

- Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Projet de loi autorisant le gouvernement à échanger un terrain domanial

Vote de l’article unique

Personne ne demandant la parole, la discussion générale est close et l'assemblée passe à la discussion de l'article unique ainsi conçu :

« Article unique. Le gouvernement est autorisé à céder, sans soulte ni retour, à la ville d'Arlon, la part appartenant à l'Etat dans les bâtiments de la maison de sûreté de cette ville, en échange du terrain situé dans la même ville, acquis et offert par elle à l'Etat, pour servir d'emplacement à la maison de sûreté cellulaire à construire par le gouvernement. »

- Adopté.

Il est procédé au vote par appel nominal ; le projet de loi est adopté à l'unanimité des 64 membres présents. Ce sont :

MM. Jacquemyns, Jouret, Kervyn de Lettenhove. Landeloos, Lelièvre, Liénart, Lippens, Magherman, Mascart, Moncheur, Mouton, Muller, Notelteirs, Orban, Preud'homme, Rogier, Sabatier, Tack, Tesch, Thienpont, Thonissen, Van Cromphaut, Alphonse Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Hoorde, Van Iseghem, Van Renynghe, Van Wambeke, Verwilghen, Vleminckx, Wasseige, Wouters, Allard, Bara, Bricoult, Broustin, Couvreur, Crombez, David, de Brouckere, de Coninck, de Florisone, de Haerne, de Kerchove de Denterghem, Delcour, d'Elhoungne, de Maere, de Mérode, de Muelenaere, de Naeyer, de Rossius, Descamps, de Terbecq, de Theux, Dethuin, Dewandre, Elias, Frère-Orban,. Funck, Hagemans, Jacobs et Ernest Vandenpeereboom.

- Le projet de loi sera transmis au Sénat.

- Des voix. - A demain.

- La séance est levée à 5 heures.