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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 8 avril 1870

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1869-1870)

(Présidence de M. Dolezµ.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 741) M. de Vrindtsµ fait l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. Reynaertµ lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Vrintsµ présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Mettier, ancien sergent au 3ème régiment de ligne, demande que le département de la guerre lui délivre un congé honorable. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les membres du conseil communal de Cerfontaine prient la Chambre d'autoriser la concession au sieur Brassine d’un chemin de fer d'Athus à Givet. »

M. de Baillet-Latourµ. - Je demanderai que cette requête soit renvoyée à la commission des pétitions avec prière de présenter un prompt rapport.

- Adopté.


« Par deux pétitions, des habitants de Bruxelles demandent que le projet de code de procédure civile permette aux parties et aux avocats de faire usage de la langue flamande devant les tribunaux de l'arrondissement dc Bruxelles. »

- Renvoi à la commission chargée d'examiner le projet de code de procédure civile.


« Par dépêche du 6 avril, le ministre de la justice transmet, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation ordinaire du sieur Etienne, J.-F. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


« La commission de la société chorale et littéraire les Mélophiles à Hasselt adresse un exemplaire du dernier bulletin littéraire de la société. »

- Dépôt à la bibliothèque.


« M. Orts, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé. »

- Accordé.

Rapports sut des demandes en naturalisation

M. Moutonµ dépose des rapports sur des demandes de naturalisation ordinaire.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ces rapports et les met à la suite de l'ordre du jour.


MpDµ. - L'ordre du jour appelle en premier lieu les prompts rapports de pétitions.

M. Bouvierµ. - Je demanderai que cet objet soit remis à la fin de la séance.

- Cette proposition est adoptée.

Projet de loi révisant le code de commerce (titre III, livre premier : Des sociétés)

Second vote des articles

Section III. Des sociétés en commandite

Article 21

MpDµ. - Dans la séance d'hier, l'article 21 a été réservé.

MjBµ. - Je proposerai la rédaction suivante :

« L'associé commanditaire ne peut, même en vertu de procuration, faire aucun acte de gestion, c'est-à-dire représenter la société dans ses rapports avec les tiers. »

Il est évident que les actes dont il est parlé dans le paragraphe 2 ne sont pas des actes de gestion. C'est ce que la jurisprudence a admis. Elle a considéré un grand nombre d'agissements de la part des associés commanditaires comme n'étant pas des actes de gestion.

Or, en disant que l'associé commanditaire ne peut représenter la société dans ses rapports avec les tiers, l'on élimine, des actes interdits aux commanditaires, tous ceux dans lesquels les gérants ne représentent pas la société.

MpDµ. - Je mets aux voix la nouvelle rédaction proposée par M. le ministre.

- Cette rédaction est adoptée.

Section IV. Des sociétés anonymes

Article 48

MpDµ. - Nous passons à l'article 48 (44 du projet primitif) qui avait été réservé et qui a fait l'objet d’un rapport de l'honorable M. Dupont dans la séance d'hier.

La commission propose la rédaction suivante :

« L'administrateur' qui a un intérêt opposé à celui de la société, dans une opération soumise à l'approbation du conseil d'administration, est tenu de prévenir le conseil et de faire mentionner cette déclaration au procès-verbal de la séance.

« Le conseil ne peut approuver l'opération sans l'autorisation des commissaires.

« Il est spécialement rendu compte à la première assemblée générale, avant tout vote sur d'autres résolutions, des opérations autorisées aux termes des paragraphes précédents.

« Si l’administrateur n'a pas fait connaître au conseil d'administration qu'il a un intérêt dans l'opération, il sera responsable des pertes qu'elle aura causées. Il en sera de même pour les administrateurs qui ont agi sans l'autorisation des commissaires.

« Ces règles ne sont pas applicables si l'opération a été conclue avec publicité et concurrence ou si l'assemblée générale, informée de la position de l'administrateur, a d'avance autorisé la convention.

« Cette autorisation peut être donnée même pour une année entière et pour une catégorie d'opérations déterminées, sauf compte à rendre à l'assemblée générale à l'expiration du terme stipulé. »

D'un autre coté, M. le ministre de la justice présente la rédaction suivante :

« Il est interdit aux administrateurs de prendre ou de conserver un intérêt dans une entreprise ou dans un marché, à moins qu’ils n'y soient autorisés par le conseil d'administration et par les commissaires.

« Il est rendu un compte spécial, à la première assemblée générale, des marchés ou entreprises autorisés aux termes du paragraphe précédent.

« Si l'administrateur n'a pas fait connaître au conseil d'administration qu'il a un intérêt dans l'opération, il sera responsable des pertes que l'entreprise ou le marché aura causées. Il en sera de même pour les administrateurs qui ont agi sans l'autorisation des commissaires.

« Ces règles ne sont pas applicables, si l’entreprise ou le marché a été conclu avec publicité et concurrence, ou si l’assemblée générale, informée de la position de l’administrateur, a d’avance autorisé la convention. »

MPDµ. - M. le ministre ne se rallie-t-il pas la rédaction de la commission ?

MjBµ. - Non, M. le président.

(page 742) MpDµ. - La discussion s’engage donc sur le projet du gouvernement et sur la rédaction de la commission.

Personne ne demandant la parole, je vais mettre d'abord aux la rédaction de la commission, qui doit être considérée comme amendement.

- Après une double épreuve par assis et levé, l'amendement de la commission est adopté.

Article 52

MpDµ. - Nous revenons à l'article 52 (48 du projet amendé) auquel la Chambre était arrivée hier à la fin de la séance.

« Art. 52 (48 du projet amendé). La surveillance de la société est confiée à un ou plusieurs commissaires pris parmi les associés ou non.

« Les commissaires sont nommés, pour la première fois, par l'acte qui constitue définitivement la société.

« Chaque année, l'assemblée générale ordinaire, après l'approbation da bilan et la nomination des administrateurs, fixe le nombre des commissaires, détermine leurs émoluments et procède à leur nomination.

« Les émoluments d'un commissaire ne peuvent être supérieurs au tiers ceux d'un administrateur.

« Les statuts peuvent établir qu'il sera interdit aux administrateurs de prendre part au vote pour la nomination des commissaires.

« Les commissaires sont toujours révocables.

« Si le nombre des commissaires est réduit, par suite de décès ou autrement, de plus de moitié, le conseil d'administration doit convoquer immédiatement l'assemblée générale. »

M. le ministre de la justice propose les amendements suivants à l'article 52 :

Rédiger les paragraphes 2 et 3 de la manière suivante :

« Les commissaires sont nommés pour le terme de six années. La nomination est faite : pour la première fois, par l'acte qui constitue définitivement la société ; et ensuite, par l’assemblée générale des actionnaires.

« Le nombre des commissaires est fixé par les statuts, mais il peut être modifié par l'assemblée générale. Cette assemblée détermine les émoluments des commissaires, lesquels ne peuvent être supérieurs au tiers de ceux d'un administrateur.

Supprimer le paragraphe : « Les statuts peuvent établir, » etc.

Ajouter au paragraphe final : « Pour pourvoir au remplacement. »

MpDµ. - Quelqu’un demande-t-il la parole sur la rédaction nouvelle du gouvernement ou sur la rédaction de la commission ?

Personne ne demandant la parole, la discussion est close.

Je vais mettre aux voix les divers paragraphes de cet article :

« La surveillance de la société est confiée à un ou plusieurs commissaires pris parmi les associés ou non. »

M. Saincteletteµ. - Il me semble qu'il serait plus correct de dire : « L'administration est contrôlée par un ou plusieurs commissaires. » Dire : « La surveillance de la société est confiée à un ou plusieurs commissaires pris parmi les associés ou non », ne me paraît pas d'une rédaction très pure ; du moment qu'on laisse à l'assemblée générale le droit de choisir les commissaires, elle les prend où elle veut : dans le sein ou en dehors du conseil.

MjBµ. - L'article n'existait pas comme il est rédigé ; il a été amendé.

M. Saincteletteµ. - On pourrait dire :« La surveillance de la société est confiée à un ou plusieurs commissaires pris dans le sein ou en dehors de la société. »

MjBµ. - Ce que l'on veut, c'est simplement dire que les commissaires peuvent ne pas être membres de la société. On pourrait donc dire : « La surveillance de la société est confiée à un plusieurs commissaires qui peuvent ne pas être des associés. »

- Le paragraphe, ainsi rédigé, est adopté.

Les deux paragraphes par lesquels M. le ministre de la justice propose de remplacer les paragraphes 2, 3 et 4 sont mis aux voix et adoptés.

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose de supprimer le paragraphe 5, ainsi conçu :

« Les statuts peuvent établir qu'il sera interdit aux administrateurs de prendre part au vote pour la nomination des commissaires. »

- Cette suppression est adoptée.

« Les commissaires sont toujours révocables. »

- Adopté.

« Si le nombre des commissaires est réduit, par suite de décès ou autrement, de plus de moitié, le conseil d'administration doit convoquer immédiatement l'assemblée générale. »

MpDµ. - M. le ministre propose d’ajouter à ce paragraphe ces mots : « pour pourvoir au remplacement. »

- Le paragraphe, ainsi modifié, est adopté.

L'ensemble de l'article est définitivement adopté.

Article 53

« Art. 53 (49 du projet amendé). Les commissaires sont investis du droit de prendre communication de toutes les pièces et écritures de la société, d'examiner ses opérations, de contrôler ses comptes, ses inventaires et ses bilans.

« Il leur est remis chaque trimestre, par l'administration, un état résumant la situation active et passive.

« Les commissaires doivent soumettre à l'assemblée générale les résultats de leur mission, avec les propositions qu’ils croient convenables.

« L'étendue et les effets de leur responsabilité sont déterminés d'après les règles générales du mandat. »

MjBµ. - Je proposerai d'ajouter à la fin du troisième paragraphe : « et lui faire connaître le mode d'après lequel ils ont contrôlé les inventaires. » C'est indispensable. Souvent les commissaires signent qu'ils contrôlent les inventaires, et ce contrôle n'a pas été sérieux.

- L'article est définitivement adopté avec l'addition proposée par M. le ministre de la justice.

Article 55

« Art. 55 (51 du projet amendé). L'assemblée générale des actionnaires a les pouvoirs les plus étendus pour faire ou ratifier les actes qui intéressent la société.

« Elle a le droit d'apporter des modifications aux statuts, mais sans pouvoir changer l'objet essentiel de la société.

« Lorsqu'il s'agit de délibérer sur les modifications aux statuts, l'assemblée n'est valablement constituée que si les convocations ont mis cet objet à l'ordre du jour et si ceux qui assistent à la réunion représentent la moitié, au moins, du capital social.

« Si cette dernière condition n'est pas remplie, une nouvelle convocation sera nécessaire, et la nouvelle assemblée délibérera valablement, quelle que soit la portion da capital représentée par les actionnaires présents.

« Aucune modification n'est admise que si elle réunit les trois quarts des voix. »

- Cet article est mis aux voix et définitivement adopté.

Article 56

« Art. 56 (52 du projet amendé). Il doit être tenu, chaque année, au moins une assemblée générale dans la commune, aux jour et heure indiqués par les statuts.

« Le conseil d'administration et les commissaires peuvent convoquer l’assemblée générale. Ils doivent la convoquer sur la demande d'actionnaires représentant le cinquième du capital social.

« Les convocations pour toute assemblée générale contiennent l'ordre du jour et sont faites par des annonces insérées deux fois, à huit jours d’intervalle au moins, et huit jours avant l'assemblée, dans le Moniteur belge, dans un journal de Bruxelles et dans un journal de la province ou de l'arrondissement où se trouve le siège de la société.

« Des lettres missives seront adressées, huit jours avant l'assemblée, aux actionnaires en nom, mais sans qu'il doive être justifié de l'accomplissement de cette formalité.

« Quand toutes les actions sont nominatives, les convocations peuvent être faites uniquement par lettres recommandées. »

M. de Rossiusµ. - Messieurs, je demande la suppression de l'obligation de faire une insertion dans un journal de Bruxelles. Cette insertion est coûteuse. Je comprends très hm la publicité du Moniteur et d'un journal de la province, mais je ne vois pas la nécessité d'obliger les sociétés étrangères à la province de Brabant à faire des insertions dans un journal de la capitale.

MjB. - Un fait positif, messieurs, c'est que d'habitude les journaux de province ne vont que dans la province, et que vous n'aurez pas rempli le but de la loi, si vous ne prescrivez pas l'insertion dans un journal de la capitale.

La publication au Moniteur a pour but de réunir tous les actes des sociétés ; mais le Moniteur n'a pas la même étendue de publicité que les autres journaux de la capitale.

Je suppose que vous ayez une affaire dans le Limbourg, vous auriez la publicité d'un journal flamand de cette province ; si tous les actionnaires résidaient dans le Limbourg, je le comprendrais, mais si vos actionnaires se trouvent dans toutes les parties du pays, la publicité d'un journal de Bruxelles est indispensable.

M. de Macarµ. - Messieurs, au premier vote j'ai proposé un amendement qui était exactement celui que vient de vous soumettre l'honorable M. de Rossius.

Je trouve très dur de forcer les sociétés anonymes qui, sous le régime nouveau, pourront être très peu importantes, faire des frais assez (page 742) considérables sans nécessité. L'on trouvera très peu de garanties dans le fait des publications dans un journal de Bruxelles.

L’insertion obligatoire des convocations au Moniteur offre plus d'avantages que la dissémination de ces renseignements dans les divers journaux de Bruxelles ; l'on aura même moins de garanties de publicité par ce système que par celui qui obligerait à l'insertion simultanée dans un journal de la province et dans un de l'arrondissement où se trouve la société, et, par conséquent, le plus souvent, une assez grande partie des actionnaires.

Il est incontestable que les actionnaires de Huy et de Verviers seront plus sûrement informés des assemblées par des annonces dans un journal de leur localité que par l'insertion dans un journal de Bruxelles.

Je crois que l'amendement proposé au premier vote était bon et j'insiste pour que la proposition de l'honorable M. de Rossius soit adoptée.

M. Mullerµ. - Messieurs, j'appuie les observations qui viennent d'être présentées.

Je ne vois aucune garantie sérieuse de plus dans la publication dans un journal de Bruxelles. Ce journal pourra fort bien ne pas arriver à la connaissance des actionnaires de province, s'ils n'y sont pas abonnés.

Si l'on disait ; Dans un organe de la presse s'occupant spécialement des opérations financières, je concevrais l'utilité de cette prescription ; mais ce seront les administrateurs qui pourront choisir arbitrairement le journal dans lequel la publication aura lieu.

Dans ces conditions, comme l'a dit l'honorable M. de Rossius, c'est un petit impôt que frappe au profit d'une partie de la presse de la capitale. L'insertion dans le Moniteur, que tout intéressé peul consulter au besoin, me semblerait devoir suffire.

M. Guilleryµ. - Messieurs, véritablement, je ne comprends pas que l'on fasse intervenir la presse dans ce débat.

J’aimerais tout autant que l'on en fît une question politique.

On a décidé la question au premier vote. La Chambre s'est prononcée pour une publicité complète, qui est l'essence du projet de loi.

Aujourd'hui, dans la pratique, la plupart des statuts exigent que l'insertion des convocations ait lieu dans un journal de Bruxelles.

Pourquoi cela ? Parce que, si vous insérez les publications dans un journal de province, il se peut qu'elles n’arrivent pas à la connaissance des actionnaires. Il en sera tout autrement si, après avoir fait comme le veut l'article, l’insertion dans un journal de province, on la fait également dans un journal répandu dans tout pays.

M. Mullerµ. - Un journal de finances.

M. Guilleryµ. - Les journaux financiers ne sont faits que par des spécialités.

Il faut qu'en lisant son journal on y trouve l'annonce des assemblées. Il n'y a qu'un journal répandu dans tout le pays qui convienne pour cela.

- La discussion est close.

MpDµ. - M. de Rossius propose de supprimer dans le troisième paragraphe de l'article les mots : « dans un journal de Bruxelles. »

- La suppression est mise au vote par assis et levé. Elle n’est pas adoptée.

Article 57

MpDµ. - L'article 57, adopté au premier vote, est ainsi conçu :

« Les statuts déterminent le mode de délibération, le nombre d'actions qu'il est nécessaire de posséder, soit à titre de propriétaire, soit à titre de mandataire, pour être admis dans l'assemblée générale, et le nombre de voix appartenant à chaque actionnaire eu égard au nombre d'actions dont il est porteur.

« Toutefois, nul ne peut prendre part au vote pour un nombre d'actions dépassant le tiers du nombre d'actions émises, ou les deux cinquièmes des actions représentées.

« Les décisions sont prises à la majorité des voix des actionnaires présents. »

M. le ministre de la justice propose de modifier le second paragraphe et de dire :

« Toutefois, nul ne peut prendre part au vote pour un nombre d'actions dépassant le tiers des actions émises ou les deux cinquièmes des actions représentées. »

M. Saincteletteµ. - D'après la rédaction primitive de l'article 57, il semble que l'on ne puisse prendre part aux délibérations de l'assemblée générale, que comme propriétaire ou comme mandataire de propriétaire.

Je demande au gouvernement s'il entre dans sa pensée de refuser le droit de prendre part aux délibérations de l'assemblée générale : 1° à l'usufruitier ; 2° au créancier gagiste.

Le créancier gagiste doit avoir, selon moi, le droit de prendre part aux délibérations de l’assemblée générale. En effet, il ne peut s’en dessaisir. au profit du propriétaire, car alors il abandonnerait la possession des actions.

Il suit de là que si vous n'accordez pas le droit de vote au créancier gagiste, toutes les actions engagées ne pourront être représentées.

Je crois qu'on pourrait rédiger l'article dans des termes plus généraux et dire : « Les statuts règlent la composition, le mode de délibération et le mode de votation de l'assemblée générale. »

MjBµ. - Quant à la question de mandat, l'amendement est inutile. Si les statuts disent que l’on peut voter par mandat, rien ne s'opposera à ce qu'il en soit ainsi. (Interruption) L'article est formel à cet égard. Quant à la question des créanciers gagistes, la jurisprudence prononcera. (Interruption.)

D'après la jurisprudence actuelle, l'usufruitier et le créancier gagiste ont, je pense, le droit de voter.

M. Saincteletteµ. - Sous la loi actuelle et d'après la jurisprudence actuelle, le fait de se présenter dans une assemblée générale avec des actions dont on n'est pas propriétaire n’est pas puni, tandis qu'aujourd'hui vous le punissez. Il faut mettre l'article que nous discutons en relation avec l'article 88 ainsi conçu :

« Seront punis d’une amende ceux qui, ne possédant... »

MjBµ. - Le mandataire ne se présente pas comme propriétaire.

M. Saincteletteµ. - Non, mais l'usufruitier ?

MjBµ. - Il est toujours propriétaire d'une partie de l’action, le revenu. C’est, du reste, une question qui ne se rattache pas à la disposition pénale que l'honorable membre a citée.

Dans cette disposition, en effet, il s'agit d’individus qui se présentent à l'assemblée générale munis d'un certain nombre d'actions dont ils disent propriétaires pour obtenir un plus grand nombre de voix au profit de de ces actions. C'est là une véritable fraude ; mais il n'en est pas ainsi de l'intervention de l'usufruitier ou du propriétaire gagiste.

M. Saincteletteµ. - Je me déclare satisfait de l’explication de M. le ministre.

M. Watteeuµ. - L'observation que vient de présenter l'honorable Sainctelette ne peut évidemment pas être admise ; elle est contraire à tous les principes de droit.

D'abord, l'usufruitier n'a que le droit de jouir ; il n'a pas le droit de disposer ; par conséquent en concourant aux décisions prises en assemblée générale, il pourrait dénaturer les droits du nu propriétaire, ce qui serait contraire à la loi.

En ce qui concerne le créancier gagiste, la question est encore plus sérieuse, puisque la loi interdit au créancier gagiste de disposer d'une façon quelconque de l'objet donné en gage.

Or, comment voulez-vous que le créancier gagiste puisse, par son vote, changer la situation de la propriété au détriment du propriétaire ? Il n'a qu'un droit éventuel à la chose pour autant que le débiteur ne s'acquitte pas de son obligation.

Il serait donc contraire à tous les principes d'insérer dans la loi l'amendement de l'honorable M. Sainctelette, surtout avec la portée qu'il y attache.

MiPµ. - Je crois que l'honorable M. Watteeu n'a pas suffisamment examiné la question qui vient d'être soulevée.

J’ai eu, dans le temps, l'occasion de l'examiner comme avocat, et le résultat auquel Je suis arrivé est diamétralement contraire à l'opinion qu'il vient d'émettre. Je dois ajouter que le confrère que j'avais alors comme adversaire, s'est rendu à ma solution et l'a trouvée fondée.

Quoi qu'il en soit, nous n'avons pas nous prononcer sur ce point. Il en sera après le vote de la loi exactement ce qu'il en est aujourd'hui. Il n'y aura donc rien de décidé par la loi : la jurisprudence décidera d'après les principes généraux du droit, qui ne sont pas changes par la nouvelle législation.

Ainsi, messieurs, si j'ai demandé la parole, c'est moins pour traiter cette question que pour faire une observation qui se rattache une déclaration que j’ai faite hier la Chambre.

Je disais hier que le dépôt d'actions fait par les administrateurs constitue une espèce de gage, de nantissement.

Je crois que cela est exact en ce qui concerne les droits qui sont conférés aux sociétés.

(page 744) Cependant, il est important de constater que ce dépôt a un caractère particulier et que le droit de gage que l'on confère à la société n'aura pas pour conséquence d'empêcher l'administrateur de voter avec des actions déposées aux mains de la société. Il est évident qu'il en est ainsi d'après la nature même de ce contrat de gage ; le dépôt a pour but d'assurer la marche régulière de la société et l'on ne peut par conséquent pas interdire à l'administrateur de prendre part aux délibérations, qui sont un des actes normaux de la société.

M. Saincteletteµ. - Je me suis tout à l'heure déclaré satisfait des explications données par M. le ministre.

Dès lors qu'il est entendu que les articles 52 et 87 ne modifient en rien la jurisprudence actuelle, j'ai tout apaisement. Mais je ne puis pas laisser passer sans observation ce que vient de dire l'honorable M. Watteeu.

Je crois, contrairement à son opinion, que la thèse soutenue par moi est parfaitement conforme aux véritables principes du droit. Ni l'usufruitier ni le créancier gagiste ne font acte de disposition en prenant part aux délibérations de l'assemblée générale, en veillant à ce que l'assemblée statue régulièrement et équitablement sur la question des fruits qu'ils ont droit de percevoir, l'un en qualité d'usufruitier, l'autre en qualité de créancier.

Le droit de prendre part aux délibérations de l'assemblée générale n'est que le corrélatif du droit de jouir. .

- Personne ne demandant plus la parole, les paragraphe 1 et 2 de l'article 57, qui ont été amendés au premier vote, sont successivement mis aux voix et définitivement adoptés.

Article 58

« Art. 58 (54 du projet amendé). Chaque année, l'administration doit dresser un inventaire contenant l'indication des valeurs mobilières et immobilières et de toutes les dettes actives et passives de la société, avec une annexe contenant tous les engagements de la société en cours d’exécution, tels qu'endossements sue traites négociées, contrats, cautionnements, et autres engagements quelconques.

« L'administration forme le bilan et le compte des profits et pertes dans lesquels les amortissements nécessaires doivent être faits. Il est fait annuellement sur les bénéfices nets un prélèvement d’un vingtième au moins, affecté à la formation d'un fonds de réserve ; ce prélèvement cesse d'être obligatoire lorsque le fonds de réserve a atteint le dixième du capital social.

« L'administration remet les pièces avec un rapport sur les opérations de la société, un mois au moins avant l'assemblée générale ordinaire, aux commissaires, qui doivent faire un rapport contenant leurs propositions. »

MpDµ. - Les mots « avec annexe contenant »forment l'amendement qui a été adopté, au premier vote, dans l'article 58.

M. Saincteletteµ. - J'ai l'honneur de proposer à la Chambre d'abord d'ajouter dans le premier paragraphe de l'article 58, les mots : « en résumé » au mot : « contenant » ; ensuite, de supprimer, dans la dernière ligne du même paragraphe, les mots : « et autres engagements quelconques. » Ces derniers mots me semblent complètement inutiles.

MjBµ. - Je ne m'oppose pas à ce que le premier paragraphe de l'article 58 soit modifié comme le propose l'honorable M. Sainctelette.

- Le premier alinéa de l'article 58, modifié comme l'a proposé N. Sainctelette, est mis aux voix et définitivement adopté.

Article 59

MpDµ. - La Chambre passe à l'article 59 (55 du projet amendé). Il est ainsi conçu :

« Quinze jours avant l'assemblée générale, le bilan et le compte de profits et pertes sont, au siège social, à l'inspection des actionnaires.

« Ils sont adressés aux actionnaires en nom, en même Lemps que la convocation, de même que le rapport des commissaires, s'il ne conclut pas à l’adoption complète du bilan. »

M. le ministre de la justice propose de rédiger l'article 59 de manière suivante :

« Quinze jours avant rassemblée générale, le bilan, le compte de profits et pertes, ainsi que la liste des actionnaires indiquant le nombre de leurs actions et leur domicile, sont, au siège social, à l'inspection de ces derniers.

« Le bilan et le compte sont adressés aux actionnaires en nom, etc. »

M. de Rossiusµ. - Il y a impossibilité, messieurs, d'introduire dans l'article 59 les mots : « ainsi que la liste des actionnaires. »

En effet, s'il s'agit d'actions au porteur, on ne saurait indiquer les actionnaires. Il faudrait donc, si la rédaction de M. le ministre était adoptée, ajouter les mots : « en nom » et dire : « ainsi que la liste des actionnaires en nom.

MjBµ. - Il est évident qu'il s'agit ici d'actions nominatives. Car, s'il s'agissait d'actions au porteur, il va de soi qu'on ne saurait les indiquer. Il est donc inutile de mettre « les actionnaires en nom ».

MpDµ. - M. de Rossius insiste-t-il sur l'adjonction des mots « en nom » qu'il proposait ?

M. de Rossiusµ. - Non, M. le président.

M. Eliasµ. - Je demanderai s'il est bien entendu que cette disposition est un minimum de garantie et si les actionnaires peuvent exiger que d'autres pièces leur soient remises ?

MjBµ. - Toutes les dispositions de la loi sont des minima de garantie. Si les actionnaires veulent stipuler d'autres obligations qui ne sont pas contraires au droit, ils pourront évidemment le faire. Et l’honorable M. Elias aura raison de les conseiller si elles sont indispensables à la marche de la société.

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 62

« Art. 62. Dans tous les actes, factures, annonces, publications et autres pièces émanées des sociétés anonymes, on doit trouver la dénomination sociale précédée ou suivie immédiatement de ces mots, écrits lisiblement ct en toutes lettres : Société anonyme, et de l'énonciation du capital.

« Le chiffre du capital social peut, après publication d'une situation da capital, être augmenté par suite, soit de versements éventuels effectués, soit de souscriptions d’actions nouvellement obtenues. Il doit être diminué, après l’approbation du bilan, du montant des pertes qui seraient constatées.

« Dans les sociétés anonymes dont les actions ne portent pas d'indication de valeur, l'énonciation du capital sera remplacée par ces mots : capital indéterminé. »

MpDµ. - M. le ministre propose de supprimer au premier paragraphe les mots « et de l'énonciation du capital » et de remplacer les trois derniers paragraphes par le paragraphe suivant :

« Si les pièces indiquées énoncent le capital social, ce capital devra être celui qui résulte du dernier bilan. »

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Article 64

« Art. 64. Les sociétés anonymes ne peuvent émettre d'obligations au porteur par de tirage au sort qu'à la condition que toutes les obligations soient remboursables par la même somme, et que la somme consacrée annuellement à l'amortissement et au service des intérêts soit la même pendant toute la durée de l'emprunt.

« Il ne peut être émis d'obligations de cette nature qu'après la constitution de la société et pour une somme égale au capital social versé. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose d'ajouter le paragraphe suivant :

« Il pourra néanmoins être stipulé que, pendant un terme qui n'excédera pas dix ans, aucun remboursement n'aura lieu, et que la société qui a fait l’emprunt se bornera au service des intérêts. »

MiPµ. - Messieurs, je proposerai une nouvelle rédaction de cet article qui me paraît de nature à lever toute espèce de difficulté et à écarter les objections qui ont été faites contre la rédaction actuelle.

Cet article a pour but exclusif les Obligations qui sont remboursables à primes.

Il est bon, en effet, que les sociétés puissent émettre des obligations que l'usage a admises, sans devoir recourir à une autorisation du gouvernement, qui peut être nécessaire en présence de la loi de 1851 sur les loteries.

Lorsque les obligations sont remboursables par la somme même pour laquelle elles ont été émises, que la désignation de l'ordre de remboursement se fasse par voie du sort ou autrement, il n'y a aucune difficulté ; la loi pas à intervenir.

L'intervention de la loi n'est nécessaire que lorsque le taux du remboursement est supérieur au taux d'émission, c'est-à-dire lorsqu'il y a, sous une forme ou sous une autre, un avantage dépendant de la désignation du sort. Il s'agit de résoudre par la loi dans quelles conditions on peut faire l'émission d'obligations ainsi remboursables à un taux supérieur au taux d'émission.

Je crois que, pour que ces émissions soient possibles, il faut exiger les conditions suivantes :

D'abord, il faut que les obligations rapportent au moins 3 p. c. d’intérêt. Si elles ne rapportent pas 3 p. c., il est évident que l'on donne à l'élément aléatoire une part trop grande.

(page 745) La seconde condition doit être que toutes les obligations soient remboursables par le même chiffre. Il ne faut pas permettre les primes proprement dites, c’est-à-dire les bénéfices qui sont exclusivement du domaine de la loterie.

Enfin, la troisième condition, c'est que, pendant tout le cours de l'op »ration, l'annuité destinée à l'amortissement et au service des intérêts soit constamment la même, qu’il y ait une annuité constante comprenant les intérêts et l’amortissement.

Ces trois conditions exigées, il n'y a nul inconvénient à autoriser l'émission des obligations

On a demandé, dans la première discussion, s'il ne fallait pas permettre d'ajourner le remboursement des obligations, c'est-à-dire de différer le remboursement des obligations pendant un certain nombre d'années. Mais les obligations auxquelles on a fait allusion ne rentrent aucunement dans la catégorie des obligations à primes. Il s'agissait des obligations émises à un taux égal au taux du remboursement. Ainsi on a cité un emprunt fait par une société charbonnière par obligations émises à 1,000 francs, remboursables à 1,000 francs, et qu'on devait rembourser d’après les résultats de l'exploitation.

Il est évident que ces opérations restent libres. L'article ne s'y applique pas. Mais il s'applique aux obligations de chemins de fer, émises à 250 ou 300 francs et remboursables par 500 francs en un grand nombre d’années, en 70, 80 ou 90 ans.

Evidemment, il n'y a aucune espèce d'utilité à différer l'amortissement des obligations, parce que cet amortissement ne consiste que dans un tantième assez peu élevé.

Ainsi, pour les obligations de chemins de fer dont je viens de parler, je crois que l’amortissement est de 20 à 25 centimes par 100 francs. C'est une somme trop minime pour qu’il soit nécessaire de s'en préoccuper et de différer l'amortissement. Je crois donc que la rédaction que je propose fera disparaître toutes les difficultés.

Voici cette rédaction :

« Les sociétés anonymes ne peuvent émettre d'obligations remboursable par voie de tirage au sort à un taux supérieur au prix d’émission qu'à la condition que les obligations rapportent 3 p. c. d'intérêt au moins ; que toutes soient remboursables par la même somme et que le montant de l'annuité comprenant l'amortissement et les intérêts soit le même pendant toute la durée de l'emprunt. «

M. Jonetµ. Messieurs, je pense qu'il y aurait un changement de rédaction à faire au deuxième paragraphe. Je proposerai de remplacer les mots : « et pour une somme égale au capital versé » par ceux-ci : « Le montant de ces obligations ne pourra, en aucun cas, être supérieur au capital social versé. »

M. Saincteletteµ. - Je ne comprends pas bien l'utilité de la dernière disposition de l'amendement proposé par M. le ministre de l'intérieur et d'après laquelle la somme consacrée annuellement à l'amortissement doit être la même pendant toute la durée de l'emprunt.

Il peut arriver et il arrive très souvent que la somme dépensée pour exécuter un travail industriel produit beaucoup plus pendant les dernières années que pendant les premières.

Ainsi, une société de mines émet des obligations pour faire un nouveau puits, il est évident que les produits de ce travail seront beaucoup considérables la vingtième année que la première. Il y aurait donc lieu d'autoriser les emprunteurs à répartir le remboursement d'une manière inégale sur les différentes périodes de la durée de l’emprunt.

Si l'on construit un chemin de fer, il évident que les revenus ne seront pas aussi élevés la première année que la dixième, la quinzième ou la vingtième.

Prescrire un crédit uniforme d'amortissement, c’est donc imposer aux premières années une charge relativement plus lourde qu'on ne fait pour les dernières

MiPµ.- Je dois d'abord constater que la disposition ne s'applique pas aux obligations remboursables au taux de l'émission. Or, dans les affaires de mines, ce sont généralement, je crois, les obligations employées ; ces obligations restent sous le régime d’une liberté absolue.

Mais je ne puis pas admettre qu'on fasse des émissions d'obligations à primes sans que l'annuité soit la même.

La matière des obligations à rimes est compliquée et l'on peut facilement induire le public en erreur sur la valeur des primes.

Il faut donc une règle garantissant le preneur d'obligations.

Or, si l'on renvoyait à une époque très éloignée le commencement du remboursement du capital à primes, il est incontestable que l'on priverait le preneur d'obligations d'une très grande partie d'une chose sur laquelle il croit pouvoir compter.

En accumulant sur les dernières années le remboursement des primes, sans avoir une progression constante, on fait disparaître presque complètement le bénéfice des primes.

Voilà une première raison d'exiger l'égalité des annuités. il en est une autre. C’est qu’il ne faut pas faire des emprunts alors que l'on ne peut, au moment mène de l’emprunt, faire face au service de l'intérêt augmenté d'une légère somme d'amortissement, d’un quart pour cent. par exemple.'

Je pense donc qu'il faut, pour permettre à une société anonyme, qui est un corps privilégié, d’émettre des obligations remboursables avec prime, ce qui est une opération privilégiée, il faut, dis-je, que cette opération se fasse dans des conditions normales.

Il n'y a rien d’exorbitant à exiger que l'on paye, pendant toute la durée de l'opération, un quart pour cent, par exemple.

Si la société ne peul faire face aux intérêts augmentés d'un léger tantième, d'un p. c. par exemple, pour l'amortissement, elle fait mieux de ne pas emprunter.

Du reste, la pratique justifie parfaitement la disposition que j'ai l’honneur de vous proposer.

Toutes les obligations émises par les sociétés de chemins de fer l'ont été dans les conditions que j'indique. Il y a des annuités constantes, c’est-à-dire que les intérêts, plus la quotité de l'amortissement, sont les mêmes pendant toute la durée de l'opération.

Aujourd’hui que nous voulons soustraire ces opérations à la tutelle du gouvernement à laquelle elles sont soumises actuellement, nous avons parfaitement le droit d'exiger dans la loi les conditions qui se pratiquent maintenant, qui ne donnent lieu à aucune espèce de réclamation et qui sauvegardent l'intérêt public.

Aller plus loin, ce serait ouvrir la porte à de nouvelles combinaisons qui pourraient offrir des dangers.

M. Dupont, rapporteurµ. - Je désirerais savoir de M. le ministre de l’intérieur s’il entend appliquer le second paragraphe de l'amendement en ce sens qu'il sera permis aux sociétés anonymes d'émettre des obligations au porteur sans aucune espèce de limite ?

MiPµ. - Evidemment, oui.

- Le premier paragraphe est définitivement adopté.

« Paragraphe 2. Il ne peut être émis d'obligations de cette nature qu'après la constitution de la société et pour une somme égale au capital versé. »

M. Watteeuµ. - Messieurs, ce paragraphe ne paraît pas répondre à l'esprit de prévoyance qui domine dans la loi.

Dans la pensée du rédacteur de l'article, l'obligataire qui est, en résumé, un créancier de la société, a toujours un gage au moins équivalent à la totalité de l’emprunt opéré par les émissions d'obligations.

Or, voici ce qui peut arriver :

Une société anonyme, par exemple, constituée au capital de 2 millions, aura, à la suite d'opérations désastreuses, perdu la moitié de son capital.

Pourra-t-elle, dans cette hypothèse, émettre deux millions d'obligations ?

A prendre l'article à la lettre, il en devrait être ainsi, car les deux millions, quoique perdus, n’en auraient pas moins été versés ; il en résulte que les preneurs d'obligations qui compteraient sur le gage de deux millions ne trouveraient qu'un gage de moitié.

Je propose de rédiger ce paragraphe comme suit :

« Il ne peul être émis d’obligations de cette nature qu'après la constitution de la société et pour une somme égale au capital social qu'elle possède au moment de l'émission. »

De cette façon, la société qui aurait perdu la moitié de son capital ne peut émettre que pour la moitié d'obligations.

MjBµ. - Une société peut se constituer à l'aide d'un vingtième du capital nominal. (Interruption.) Une société au capital de 2 millions pourra donc se constituer avec 100,000 francs. Eh bien, ne pourrait-elle faire d'emprunt que pour 100,000 francs ?

M. Watteeuµ. - L’honorable ministre de la justice ne m’a pas compris. Peu importe que la société soit constituée avec des versements partiels.

MjBµ. - C'est le capital social.

M. Watteeuµ. - C’est le capital social versé ; eh bien, le capital social peut être perdu pour moitié ; il est cependant versé.

MjBµ. - La société est constituée dès qu'il y a un vingtième des actions versées.

M. Watteeuµ. - Oui, mais que possède-t-elle ?

(page 746) MjBµ. - Elle possède le vingtième du capital.

M. Watteeuµ. - Et si la moitié du capital est perdue ?

MiPµ. - M. Watteeu ne comprend pas bien, je pense, l'objection de M. le ministre de la justice.

Mon collègue demande si, avec la rédaction de M. Watteeu, non seulement on ne pourra pas émettre d'obligations pour la quotité du capital qui sera perdue, mais si l'on ne pourra pas faire d'émission pour la quotité du capital qui, non seulement ne sera pas perdue, mais n'aura pas encore été versée dans les caisses sociales. Ainsi, dans une société au capital de 2 millions souscrits, si 100,000 francs seulement sont versés, pourrait-on emprunter par obligations à primes pour 100,000 francs seulement, ou pour 2 millions ?

M. Watteeuµ. - Evidemment ; tout ce que je tiens à voir consacrer, c'est une garantie sérieuse aux porteurs d'obligations. c'est-à-dire que le montant des obligations à émettre ne puisse dépasser le montant du capital que la société possède réellement.

MjBµ. - Dites alors du capital qui résulte du dernier bilan.

M. Watteeuµ. - Il suffirait d'ajouter une conjonction « et » de dire : « Il ne peut être émis d'obligations de cette nature qu'après la constitution de la société et pour une somme égale au capital social versé et qu’elle possède au moment de l'émission. »

MiPµ. - Voici l'objection. Une société est constituée au capital de 2 millions, mais il n'y a de versé que 100,000 francs ; est-ce que la société, dans l'opinion de M. Watteeu, peut faire un emprunt de 2 millions ou seulement un emprunt de 100,000 francs ?

M. Watteeuµ. - Seulement de 100,000 francs.

MiPµ. - l faut que cela soit clair je doute que cela résulte du texte, car la société constituée au capital de 2 millions et qui a 100,000 francs dans ses caisses a le droit d'exiger les 1,900,000 francs restants de ses souscripteurs.

On pourrait admettre l'idée de M. Watteeu, mais il faudrait un autre texte.

M. Jacobsµ. - Il me semble qu'on répondrait à l'idée de M. le ministre de l'intérieur en substituant les mots : « capital émis » à ceux « capital versé ».

MfFOµ. - Et s'il est perdu...

M. Jacobsµ. - Je réponds d'abord à M. le ministre de l'intérieur qui pose cette hypothèse : Un capital souscrit de deux millions sur lequel 100,000 francs ont été versés sans qu'aucune perte ait été subie. D'après M. le ministre, il est impossible de restreindre à 100,000 francs le droit qu'a la société d'émettre des obligations.

Mais si l'article reste rédigé comme il l’est, on ne pourra, en effet, émettre que cent mille francs d'obligations, attendu qu'il n'y a que cent mille francs versés.

L'honorable M. Watteeu a soulevé une autre question : Faut-il tenir compte des pertes qui auront été subies par la société ? Je ne le pense pas, messieurs, parce que, si l'on tenait compte des pertes, le chiffre des obligations que la société peut émettre varierait à chaque exercice.

Une perte peut se produire dans le cours de chaque exercice social ; le capital se trouverait donc diminué et le nombre d'obligations qu'on aurait en circulation se trouverait en disproportion avec l'avoir véritable de la société.

Il est impossible de maintenir, si l'on parvenait à l'établir pour un instant, un équilibre complet entre l'avoir de la société et le capital obligations. Dès qu'on ne peut pas maintenir cet équilibre, ne cherchons pas à 1'établir pour un instant.

Quand une société aura fait des pertes considérables, elle devra liquider, en vertu d'un article qui se trouve dans tous les statuts. Ne prévoyons donc pas le cas de pertes énormes : le remède se trouvera dans la liquidation anticipée de la société.

Pour entrer dans les idées de M. le ministre de l’intérieur, nous devons substituer aux mots « capital émis » les mots « capital versé ».

En tout cas, il faut entendre le mot « versé » d'une façon très large. Les versements, en effet, ne se font, la plupart du temps, pas en argent exclusivement ; il y a des apports. Le capital, c'est le capital versé ou le capital apporté.

M. Watteeuµ. - M. le ministre de l'intérieur avait perdu de vue la rédaction du projet lorsqu'il nous disait tout à l'heure qu'une société constituée au capital de 2 millions, bien qu'il n'y eût que 100.000 francs versés, pourrait émettre pour 1,900,000 francs d’obligations. C'est une erreur, attendu que, d'après le texte proposé, il faut que le montant des obligations à émettre ne dépasse pas le montant du capital versé, c'est-à-dire, non pas du capital à verser, mais du capital réalisé. Eh bien, dans une hypothèse comme dans l'autre, mon observation reste entière.

Qu’il s’agisse du capital versé ou du capital exigible à charge des souscripteurs, il n'en est pas moins vrai que l’état de la société peul être tel, à la suite de pertes considérables subies, que les porteurs d'obligations n'auraient plus les garanties que la loi a voulu leur donner. Il faudrait donc que l'on changeât cette rédaction pour que, dans aucun cas, les porteurs d'obligations ne se trouvent en présence d'une société dont le capital social serait inférieur au total des obligations qu'elle veut émettre.

Je dois maintenant répondre deux mots à l'honorable M. Jacobs.

L'honorable membre pense que l'équilibre doit toujours être maintenu et que, par conséquent, il ne servirait de rien de s'assurer, au moment de l'émission des obligations, du véritable état de la société, parce que, dit-il, des événements ultérieurs pourraient amener des pertes considérables et que, par conséquent, les porteurs d'obligations seraient privés d'une partie de leurs garanties. Mais, messieurs, il ne s'agit pas de savoir ce qui arrivera dans l'avenir, mais quelle est la solvabilité que présente la société au moment où l'on traite avec elle.

Tous les jours on traite avec des personnes que l'on croit parfaitement solvables et qui, par suite de circonstances ultérieures, deviennent insolvables. S'il fallait maintenir l'équilibre dont parle l'honorable M. Jacobs, on stériliserait toutes les relations sociales.

Ce que je voudrais, quant à moi, c'est que la garantie, au moment où l'on traite, fût au moins l'équivalent de la somme que l'on réclame aux souscripteurs d'obligations.

Je suis convaincu d'ailleurs que telle a été l'intention des rédacteurs de la loi et qu’en demandant qu'on en change la rédaction je ne fais que renforcer cette intention.

MpDµ. - M. Watteeu maintient donc sa proposition, qui consiste à substituer les mots « le capital qu'elle possède au moment de l’émission aux mots : « le capital social versé. »

MjBµ. - On pourrait dire « le capital réel ». Ces mots se trouvent dans l'article 63. Le capital réel est celui qui existe en fait.

M. Watteeuµ. - Parfaitement.

MpDµ. - M. Watteeu, demandez-vous qu'on mette « le capital réel » ? Il faut préciser par des propositions.

M. Watteeuµ. - Ce que vient de dire M. le ministre de la justice rentre parfaitement dans ma manière de voir ; il suffit de dire : Une somme égale au capital qu'elle possède réellement au moment de l'émission.

MiPµ. - Je demanderai à l'honorable M. Watteeu, s'il ne considère pas comme capital réel ce qui est dû par les actionnaires. Il faut que nous soyons bien d'accord sur la portée de la disposition.

MjBµ. - Je pense qu'il y a lieu de conserver dans l'article 64 les mots : « capital social versé. » Les sociétés anonymes ont le droit d'emprunter pour telle somme qu'il leur plaît ; je ne vois pas d'inconvénient de leur permettre d'emprunter, à primes, pour une somme égale au capital social versé. Les simples particuliers sont autorisés à faire des emprunts à primes. Des obligations à primes sont émises en Belgique par les puissances étrangères.

L'article 64, il est vrai, aurait dû trouver plutôt sa place dans la loi sur les loteries que dans le code de commerce.

M. Watteeuµ. - Voici la rédaction que je propose et qui doit satisfaire tout le monde :

« Une somme égale au capital qu'elle possède réellement, au moment de l'émission. »

J'entends par là tout ce que la société possède. Or, les créances qu'elle a charge des actionnaires sont de la même nature que les créances qu'elle peut avoir à charge de tiers.

Maintenant deux mots à M. le ministre de la justice qui me paraît en contradiction avec le texte même de la loi. Il me répond qu'il n'y a point de nécessité de mettre une limite à cette faculté d'émettre des obligations, parce que les sociétés anonymes peuvent toujours emprunter sous une autre forme.

(page 747) Eh bien, messieurs. s'il ne faut pas de limites, pourquoi donc le ministre a-t-il proposé de ne pouvoir émettre d’obligations de cette nature qu'à concurrence d’une somme égale au capital social versé ?

MjBµ. - Je n'ai rien proposé.

M. Watteeuµ. - Mais vous avez adopté cette rédaction et vous avez reconnu par là la nécessité d’une limite.

Eh bien, messieurs, ce que je veux. c'est que cette limite soit sérieuse : je veux que les tiers ne soient pas alléchés par des combinaisons plus ou moins fallacieuses qui ont déjà été signalées et flétries dans cette enceinte et je dis que vous n'atteindrez pas votre but lorsque vous permettrez l'émission d'obligations avec lesquelles on jettera de la poudre aux yeux des tiers en leur offrant des obligations avec primes alors qu'une grande du capital social sera déjà perdue.

M. Jacobsµ. - Messieurs, je viens aussi proposer une modification au second paragraphe : c'est la suppression des mots « qu'après la constitution de la société. » Ces sont inutiles. Il est évident que les sociétés anonymes autorisées à émettre des obligations avec primes ne peuvent le faire que lorsqu’elles existent.

D'un autre côté, il dit dans le même paragraphe qu'elles ne peuvent le faire qu'à concurrence d'une somme égale au capital social versé. Il est clair qu'avant la constitution de la société, il n'y a pas un sou de versé.

MjBµ. - On pourrait faire des émissions après le premier acte authentique.

M. Jacobsµ. - Il suffira donc qu'après avoir donné aux sociétés anonymes le droit d'émettre des obligations à prime, on ajoute qu'il n'en peut être émis pour une somme égale an capital versé.

MjBµ. - On pourrait très bien émettre des obligations après le premier acte authentique, avant qu'aucune souscription ait été ratifiée par l'assemblée générale.

Eh bien, nous n'avons pas voulu que les emprunts fussent décrétés par les statuts et nous considérons encore les mots « qu'après la constitution de la société » comme indispensables.

MpDµ. - M. Jacobs propose de supprimer au premier paragraphe les mots « qu'après la constitution de la société ». Je mets aux voix cette suppression.

- Cette suppression n'est pas adoptée.

MpDµ. - Pour le second paragraphe nous avons diverses modifications proposées.

D'abord M. Jonet propose de dire : « le montant de ces obligations ne pourra en aucun cas être supérieur au capital social versé » au lieu de « pour une somme égale ».

Il y a ici, je crois, cette nuance que, d'un côté, on autoriser l'émission des obligations jusqu'à concurrence d'une somme totale, tandis que d'un autre coté on veut empêcher l'émission pour une somme supérieure.

M. Jonetµ. - Le deuxième paragraphe de l'article 64 du projet de loi adopté par la Chambre porte :

« Il ne peut être remis d'obligations de cette nature qu'après la constitution de la société et pour une somme égale au capital social versé. »

Il résulte de ce paragraphe ainsi rédigé, qu'une émission d'obligations ne peut se faire qu'à la condition que le chiffre de cette émission soit égal à celui du capital social versé, que par suite une émission faite pour une somme inférieure à ce capital est interdite. Or, telle n'est pas la pensée du rédacteur de la loi.

Ce qu'on a voulu interdire, c'est l'émission supérieure au capital versé. C'est pour faire disparaître tout doute à cet égard et mettre les termes de la loi en harmonie avec la pensée qu'ils doivent exprimer que j'ai proposé mon amendement.

MpDµ. - La rédaction de M. Jonet a donc pour but d'écarter toute incertitude.

- L'amendement de M. Jonet, mis aux voix, est adopté.

MpDµ. - M. Watteeu propose de remplacer les mots : « pour une somme égale au capital social versé » par ceux-ci : « pour une somme égale au capital qu'elle possède au moment de l'émission. »

- Cette modification n'est pas adoptée.

MpDµ. - Je mets aux voix la rédaction suivante :

« Le montant de ces obligations ne pourra en aucun cas être supérieur au capital social versé. »

- Cette rédaction est adoptée.

MpDµ. - Vient le paragraphe additionnel présenté par M. le ministre.

MjBµ. - Il disparaît par suite de l'amendement adopté.

Article 65

M. Jacobsµ. - Il faut nécessairement modifier la rédaction de l'article 65 ensuite des modifications apportées à l'article 64.

Cet article était fait dans l'hypothèse où l'article 64 s'appliquait à deux catégories d'obligations, celles remboursables à primes et celles remboursables sans prime. Il y a lieu d'en modifier la rédaction, puisque l'article 64 ne s'applique plus qu'à une catégorie d'obligations, celles remboursables à primes.

Il faut dire à l'article 65 : « En cas de liquidation, ces obligalions ne seront admises au passif, etc... »

- Cette modification est adoptée.

Articles 68 et 68bis

« Art. 68 (64 du projet amendé). En cas de perte de la moitié du capital social, les administrateurs doivent soumettre à l'assemblée générale la question de dissolution de la société. Si la perte atteint les trois quarts du capital, la dissolution pourra être prononcée par les actionnaires possédant un quart des actions représentées à l'assemblée. »

MpDµ. - Au premier vote, on a supprimé une disposition ainsi conçue :

« La dissolution doit être prononcée, sur la demande de tout intéressé, lorsque six mois se sont écoulés depuis l'époque où le nombre des associés a été réduit à moins de sept. »

M. le ministre de la justice propose de rétablir cette disposition qui formerait un article 68bis.

- La proposition de M. Ic ministre est adoptée.

Section VI. Des associations momentanées et des associations en participation

Article 69

« Art. 69 (66 du projet amendé). L'association momentanée est l'association qui a pour objet de traiter, sans raison sociale, une ou plusieurs opérations de commerce déterminées.

« Les associés sont tenus solidairement envers les tiers avec qui ont traité. »

M. le ministre de la justice propose de dire :

« L'association momentanée est qui, etc. »

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 70

« Art. 70 (67 du projet amendé). L'association en participation est l'association par laquelle une ou plusieurs personnes s'intéressent dans des opérations qu'une ou plusieurs autres gèrent en leur propre nom.

« Le participant qui s’est tenu dans les termes de cette participation n’a, ni activement, ni passivement, d’action directe avec les tiers. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose de dire :

« L'association participation est celle par laquelle, etc. » .

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 73

« Art. 73 (70 du projet amendé). S'il n'y est autrement pourvu par contrats, le mode de liquidation est déterminé et les liquidateurs sont nommés par l'assemblée générale des associés. Dans les sociétés en nom collectif et dans les sociétés en commandite, les décisions ne sont valablement prises que par l'assentiment de la moitié des associés possédant les trois quarts de l'avoir social ; à défaut de cette majorité, il est statué par les tribunaux. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose de dire : « à défaut de convention contraire, le mode de liquidation, etc. »

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Section VII. De la liquidation des sociétés

Article 74

« Art. 74. (71 du projet amendé). A défaut de nomination de liquidateurs, les associés gérants dans les sociétés en nom collectif et dans les sociétés en commandite, et les administrateurs dans les sociétés anonymes seront, à l'égard des tiers, considérés comme liquidateurs. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose la rédaction suivante :

« A défaut de nomination de liquidateurs, les associés gérants dans les sociétés en nom collectif ou en commandite et dans les sociétés coopératives, et les administrateurs dans les sociétés anonymes, seront, etc. »

M. Guillery, rapporteurµ. - Je me rallie à cette rédaction.

- L'article ainsi modifié est définitivement adopté.

Article 75

« Art. 75 (72 du projet amendé). A défaut de disposition contraire dans les statuts ou dans l'acte de nomination. les liquidateurs peuvent intenter et soutenir toutes actions pour la société, recevoir tous payements, donner mainlevée avec ou sans quittance, réaliser toutes les valeurs mobilières de la société, endosser tous effets de commerce dont elle est porteur ou qui lui sont remis en payement, transiger ou compromettre sur toutes contestations. Ils peuvent aliéner les immeubles de la société par adjudication publique s'ils jugent la vente nécessaire pour payer les dettes sociales. »

(page 748) MpDµ. - M. le ministre de la justice propose les amendements suivants :

Supprimer les mots : « dont elle est porteur ou qui lui sont remis en payement, » et ajouter à la fin de l'article les mots : « ou si le nombre des associés est de sept ou plus. »

- L'article est définitivement adopté avec les amendements de M. le ministre de la justice.

Article 76

« Art. 76 (72bis du projet amendé). Ils peuvent, mais seulement avec l'autorisation de l'assemblée générale des associés, donnée conformément à l'article 73, continuer, jusqu'à réalisation, l'industrie ou le commerce de la société, emprunter pour payer les dettes sociales, créer des effets de commerce, hypothéquer les biens de la société, les donner en gage, aliéner ses immeubles même de gré à gré et dans tous les cas, et faire apport de l'avoir social dans d'autres sociétés. »

- Adopté avec la suppression des mots : « dans tous les cas », proposée par M. le ministre de la justice.

Article 77

« Art. 77 (75 du projet amendé). Les liquidateurs peuvent exiger des associés le payement des sommes qu'ils sont engagés à verser dans la société et qui paraissent nécessaires au payement des dettes et des frais de liquidation, en tenant compte, s'il y a lieu, des éventualités de non payement. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose de dire : « des sommes qu’ils se sont engagés à verser. »

M. Eliasµ. - Messieurs, c'est ici la place de l'amendement que j'ai annoncé hier et qui est ainsi :

« La disposition du paragraphe 2 de l'article 20 de la présente loi est applicable aux actionnaires, aux administrateurs, aux membres des conseils de surveillance et aux gérants des sociétés anonymes et des sociétés coopératives. »

Vous savez que je ne suis pas partisan de cette disposition. Mon but actuel est d’étendre à un plus grand nombre de personnes le désagrément qui en résulterait, de lui attirer plus d'adversaires et ainsi j'ai l'espoir que sa durée sera abrégée.

MjBµ. - Je me rallie à cet amendement, parce que c'est le même principe qui a été admis pour la commandite. Là les associés ont reçu des dividendes qui ne sont pas pris sur les bénéfices, ils doivent les restituer. De plus, comme ce sont les administrateurs et les gérants qui ont fait la distribution de ces dividendes, pour faire mieux valoir leur société, il est tout naturel qu'ils portent, comme pénalité, la responsabilité de ces dividendes indûment payés et qu'ils les restituent aux actionnaires.

MpDµ. - L'honorable M. Elias propose un amendement qui consiste à ajouter un paragraphe ainsi conçu :

« La disposition du paragraphe 2 de l'article 20 de la présente loi est applicable aux actionnaires, aux administrateurs, aux membres des conseils de surveillance et aux gérants des sociétés anonymes et des sociétés coopératives.’

M. le ministre de la justice se rallie à cette proposition.

- L'amendement est adopté.

L'article, ainsi rédigé, est définitivement adopté.

Article 80

« Art. 80 (76 du projet amendé). Les liquidateurs sont responsables, tant envers les tiers qu'envers les associés, de l'exécution de leur mandat et des fautes commises par eux dans leur gestion. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose de supprimer les mots : « par eux ».

- L'article, ainsi modifié, est définitivement adopté.

Article 82

« Art. 82 (78 du projet amendé). Lorsque la liquidation sera terminée, les liquidateurs feront un rapport à l'assemblée générale sur la manière dont il a été disposé des valeurs sociales, et soumettront les comptes et pièces à l'appui. L'assemblée nommera des commissaires pour examiner ces documents et fixera une nouvelle réunion dans laquelle il sera statué, après le rapport des commissaires, sur la gestion des liquidateurs.

« La clôture de la liquidation sera publiée conformément à l’article 10. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose de dire : « feront un rapport à l'assemblée générale sur l'emploi des valeurs sociales », au lieu de : « feront un rapport à l'assemblée générale sur la manière dont il a été disposé des valeurs sociales. »

- L'article, ainsi modifié, est définitivement adopté.

Section VIII. De la prescription

Article 83

« Art. 83 (79 du projet amendé). Sont prescrites par cinq ans :

« Toutes actions contre les associés, à partir de la publication, conformément à l'article 10, de la retraite de l'associé, de l'acte de dissolution, ou de la clause mettant fin la société ;

« Toutes actions contre les administrateurs de sociétés anonymes, tant de la part des tiers que de la part de la société, à partir des faits qui y donnent lieu

« Toutes actions contre les liquidateurs de société, à partir de la publication ;

« Toutes actions intentées en vertu du deuxième paragraphe de l'article 20 contre les commanditaires, gérants ou commissaires à partir du payement des intérêts et dividendes ou de leur restitution. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose d'ajouter au quatrième paragraphe : « conformément à l’article 82. »

M. Eliasµ. - Je demande que la fin du dernier paragraphe de l'article 83 soit modifiée comme suit :

« A partir du moment où sont devenus exigibles les intérêts et dividendes ou leur restitution. »

Le payement des intérêts et dividendes peut être différent pour chacun des actionnaires.

Il me semble plus utile, dans l'intérêt de tous, de faire partir la prescription d’un moment fixé : l'exigibilité.

Je demande aussi que l'on ajoute les mots : « et du paragraphe 2 de l'article 77. »

- L’article, ainsi rédigé, est définitivement adopté.

Article 84

« Art. 84 (80 du projet amendé). L'action des actionnaires d'une société anonyme agissant individuellement contre les administrateurs ou les liquidateurs, dans le cas où l'assemblée générale a approuvé leur gestion, ne pourra être intentée que dans les trois mois à partir du jour où l’action de la société est devenue non recevable. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose un amendement ainsi conçu :

« L'action individuelle des actionnaires contre les liquidateurs ou administrateurs d'une société anonyme, dans le cas l'assemblée générale a approuvé leur gestion, ne pourra être intentée que dans les trois mois, à partir du jour où l'action de la société est devenue non recevable, conformément à ce qui est dit à l'article 60. »

- L’article, ainsi rédigé, est définitivement adopté.

Section IX. Dispositions pénales

Article 88

MpDµ. - L'article 88, admis au premier vote, était ainsi conçu :

« Seront punis d'une amende de 50 francs à 10,000 francs :

« Ceux qui, en se présentant comme propriétaires d'actions ou de coupures d'actions qui ne leur appartiennent pas, ont pris part au vote dans une assemblée générale d'actionnaires ;

« Ceux qui ont remis les actions pour en faire l'usage ci-dessus prévu ;

« Les gérants ou administrateurs et les commissaires qui ont faussement déclaré, pour entrer en fonctions, être propriétaires d'actions. »

- Cet article est définitivement adopté.

Article 89

MpDµ. - L'article 89, adopté au premier vote, est ainsi conçu :

« Seront considérés comme coupables d'escroquerie et punis des peines portées par le code pénal :

« 1° Ceux qui, par simulation de souscriptions ou de versements à une société ou par la publication faite de mauvaise foi de souscriptions ou de versements qui n'existent pas ou de tous autres faits faux, ont obtenu ou tenté d'obtenir des souscriptions ou des versements ;

« 2° Ceux qui, pour provoquer des souscriptions ou des versements ont, de mauvaise foi, publié les noms de personnes désignées, contrairement à la vérité, comme étant ou devant être attachées à la société, à un titre quelconque. »

- Cet article est définitivement adopté.

Article 90

MpDµ. - L'article 90, adopté au premier vote, est ainsi conçu :

« Seront punis d'une amende de 50 francs à 10,000 francs, et pourront en outre être punis d'un emprisonnement d'un mois à un an, les gérants ou administrateurs qui, en l'absence d'inventaires, malgré les inventaires ou au moyen d'inventaires frauduleux, ont opéré la répartition aux actionnaires de dividendes ou d'intérêts non prélevés sur les bénéfices réels. »

- Cet article est définitivement adopté.

Article 91

MpDµ. - L'article 91, adopté au premier vote, est ainsi conçu :

« Il est interdit à la société en commandite et à la société anonyme de prêter aux actionnaires sur dépôt de leurs actions au porteur.

« Il est interdit au gérant de faire les versements appelés sur les actions non libérées en ouvrant aux actionnaires un compte courant dont le débit est chargé de la valeur de ces versements. »

M. le ministre de la justice propose la rédaction suivante :

« Seront punis des mêmes peines les gérants ou administrateurs qui feront des prêts aux actionnaires sur dépôt d’actions au porteur, ou qui feront les versements appelés sur les actions non libérées en ouvrant aux actionnaires un compte courant débité de la valeur de ces versements. »

(page 749) C’est le système, mais je dois cependant faire une remarque.

Lors du premier vote, j’avais présenté une disposition pour interdire aux sociétés de racheter leurs actions. J'ai été malheureusement absent, lorsque l'article a été voté, et on a fait observer que les sociétés pouvaient avec leur capital racheter des actions. Je l’admets lorsqu’il y a une réserve, parce qu'alors on ne diminue pas le capital ; mais si vous permettez de diminuer le capital réel, où est le gage des personnes qui traitent avec la société ? Il n'en reste plus.

Je demanderai s'il ne conviendrait pas d’inscrire dans la loi qu'il est interdit à toute société de racheter ses propres actions si ce n'est avec son fonds de réserve.

M. Jacobsµ. - Je me demande si cette disposition n'est pas trop générale. On défend les prêts sur tout dépôt d'actions. Cependant, lorsque les actions sont libérées, je ne vois pas quel inconvénient il peut y avoir à autoriser les sociétés à prêter sur dépôt d'actions. Il n'y a danger que quand les actions ne sont pas libérées, parce que dans ce cas la souscription d'actions est une opération fictive : on souscrit et on ne paye rien ; mais quand les actions sont libérées, quand on a payé la totalité de leur valeur, on doit pouvoir engager les actions aussi bien la société qu'à n'importe qui. Je voudrais donc que la prohibition fût restreinte aux actions non libérées.

MfFOµ. - Non, c'est un rachat d'actions.

M. Dumortierµ. - L'observation de l'honorable M. Jacobs est juste si nous n'envisageons que la société vis-à-vis de la société. Mais qu'a-t-on en vue par cette disposition ? C'est d'empêcher qu'on ne fasse disparaître le capital social.

MfFOµ. - C’est un rachat d'action.

M. Dumortierµ. - C’est un véritable rachat d'actions ; de manière qu'on finirait par faire disparaître tout le capital social. Or, la proposition que je faisais tout à l'heure à la Chambre a précisément pour but de mettre exécution ce que l'honorable M. Frère a fait en 1849 dans une circonstance dont tout le monde ici se souvient encore.

Il faut évidemment empêcher que le capital social ne puisse être absorbé par les gérants. C'est dans ce but que je demande encore s'il ne serait pas prudent et sage d'interdire aux sociétés de racheter leurs propres actions si ce n'est au moyen de leur propre réserve.

MpDµ. - Je n'ai pas d'autre proposition que l'amendement de M. le ministre de la justice.

M. Dumortierµ. - Si la Chambre me le permet, je formulerai une proposition.

- Plusieurs membres. - Oui ! Oui !

MpDµ. -En attendant, nous pouvons passer aux articles suivants :

Article 92

« Art. 92. La preuve des imputations dirigées, à raison des faits relatifs à leurs fonctions, contre les gérants des sociétés en commandite par actions au porteur ou contre les administrateurs des sociétés anonymes, sera admise, par toutes les voies ordinaires, sauf la preuve contraire par les mêmes voies, conformément aux articles 5, 6, 7 et 8 du décret du 20 juillet 1831, relatives à la calomnie et à l'injure envers les fonctionnaires publics. »

- L'amendement qui consiste dans l'indication des numéros des articles, est mis aux voix et définitivement adopté.

Dispositions additionnelles et transitoires

Article 93 et 93bis

« Art. 93. Le titre III du livre premier du code de commerce est abrogé, à partir du jour de la mise en vigueur de la présente loi. »

MpDµ. - M. le ministre de la justice propose un article 93bis ainsi conçu :

« La prescription de cinq ans, établie par l'article 81 est applicable même aux faits passés sous l'empire de la loi antérieure et pour lesquels il faudrait encore plus de cinq ans pour que la prescription fût accomplie aux termes de cette loi. »

- La proposition de M. le ministre de la justice est mise aux voix et adoptée.

Article 92

- L'article 92 (86bis par amendement) est mis aux voix et il est définitivement adopté. »

Dispositions pénales

Article 88

M. de Rossiusµ. - Je demande à la Chambre la permission de revenir à l'article 88. (Assentiment.)

D'après le dernier paragraphe de cet article, sont punis d'une amende de 50 francs à 10,000 francs, les gérants ou administrateurs et les commissaires qui ont faussement déclaré, pour entrer en fonctions, être propriétaires d'actions.

Dans le projet primitif. on imposait aux administrateurs et aux commissaires le devoir d'affirmer qu'ils étaient bien propriétaires des titres affectés à la garantie de leur gestion ou surveillance. L'affirmation mensongère devenait un délit puni par le paragraphe final dont je m'occupe.

Mais vous avez supprimé la déclaration : par cela même, vous avez supprimé le délit. Faisons donc sauter le dernier paragraphe de l'article 88.

Engagé dans une conversation avec l'honorable ministre de l'intérieur sur un texte du projet, j'ai laissé passer l’article 88 ; je me proposais de présenter un amendement au second alinéa.

La Chambre m'autorisera, sans doute, à le déposer maintenant ? (Oui ! Oui !)

Le second alinéa est conçu en ces termes :

« Ceux qui, en se présentant comme propriétaires d'actions ou de coupures d'actions qui ne leur appartiennent pas, ont pris part au vote dans une assemblée générale d'actionnaires. »

Or, en vertu tan autre article, que la Chambre a accueilli, un actionnaire peut prendre part au vote, dans l'assemblée générale, pour un nombre de voix proportionné au tiers des actions émises et aux deux cinquièmes des actions représentées.

Pourquoi ne pas permettre à cet actionnaire de faire indirectement ce qu'il peut faire directement ?

Quand peut-il y avoir délit ? C’cst lorsque la disposition qui limite la représentation des gros intérêts au tiers des actions émises est violée. La défense de la loi est-elle enfreinte, on comprend qu'il y ait délit et répression correctionnelle.

Le gros actionnaire reste-t-il en deçà de la limitation du tiers et des deux cinquièmes le fait de remettre ses titres à autrui ne revêt aucun caractère délictueux. Cet actionnaire fait indirectement ce qu’il pouvait faire directement, voilà tout ; il ne doit pas être punissable, pas plus que celui qui reçoit les actions et, mandataire tacite, prend part au vote dans l'assemblée.

Je proposerai, en conséquence, de rédiger le deuxième alinéa de l’article 88 de la manière suivante :

« Ceux qui, en se présentant comme propriétaires d'actions qui ne leur appartiennent pas et en prenant part au vote dans une assemblée générale d'actionnaires, ont assuré au véritable propriétaire de ces actions la jouissance d'un nombre de voix supérieur au maximum fixé au paragraphe 2 de l'article 57 ;

« Ceux qui ont remis les actions pour en faire l'usage ci-dessus prévu. »

MjBµ. - Messieurs, l'observation de l'honorable M. de Rossius est parfaitement exacte en ce qui concerne le dernier paragraphe de l'article 88. On a permis à des tiers de faire des dépôts pour les administrateurs et dès lors il ne doit plus être affirmé qu'ils sont propriétaires d'actions.

Mais quant à la seconde observation, je crois que M. de Rossius se trompe.

Je crois que dans les actes des sociétés anonymes, comme dans tous les autres actes de la vie, il faut dire la vérité.

Or, quand des personnes se présentent à une assemblée générale, elles doivent faire connaître à quel titre elles se présentent ; ou bien elles sont des actionnaires sérieux et réels, ou bien elles sont mandataires ; mais on ne peut, à l'aide de personnes étrangères à la société, venir exercer une pression sur les autres membres ; il faut alors qu'on sache que c'est la même personne qui agit.

Seulement on pourrait n'appliquer l'article 88 qu'aux sociétés à créer postérieurement et de cette façon l'article devrait être ainsi conçu :

« Ceux qui, en se présentant comme propriétaires d'action qui ne leur appartiennent pas, ont dans une société constituée sous l'empire de la présente loi..... » Le reste comme à l’article. J'admettrais cet amendement, contraire aux véritables principes, uniquement pour maintenir des situations acquises. Les sociétés, je l'espère toutefois, modifieront leurs statuts pour ne pas profiter de cette exception.

MpDµ. - M. de Rossius se rallie-t-il à la nouvelle rédaction proposée par M. le ministre de la justice ?

M. de Rossiusµ. - Oui, M. le président, mais je préfère ma rédaction à celle de M. le ministre.

- Le premier paragraphe de l'article 88, ainsi modifié, est adopté.

MpDµ. - M. de Rossius propose maintenant la suppression du dernier paragraphe de cet article.

(page 750) M. de Rossiusµ. - Oui, mais je suis d'accord avec M. le ministre de la justice.

- La suppression dit dernier paragraphe est prononcée.

Article 91

Art. 91. Il est interdit à la société en commandite et à la société anonyme de prêter aux actionnaires sur dépôt de leurs actions au porteur.

« Il est interdit an gérant de faire les versements appelés sur les actions non libérées en ouvrant aux actionnaires un compte courant dont le débit est chargé de la valeur de ces versements.

MpDµ. - Le gouvernement propose la rédaction nouvelle suivante :

« Seront punis des mêmes peines les gérants ou administrateurs qui feront des prêts aux actionnaires sur dépôt d'actions au porteur, ou qui feront les versements appelés sur les actions non libérées en ouvrant aux actionnaires un compte courant débité de la valeur de ces versements. »

A cet article, M. Dumortier propose l'amendement suivant :

« Seront punis des mêmes peines les gérants ou administrateurs qui rachèteront les actions de la société autrement qu'avec le fonds de réserve ou à l'aide d'un prélèvement sur les bénéfices réalisés, ou qui feront des prêts aux actionnaires sur dépôt d'actions au porteur, ou qui feront les versements appelés sur les actions non libérées en ouvrant aux actionnaires un compte coutant débité de la valeur de ces versements. »

Article 92

MjBµ. - Je crois qu'on a voté l'article 92, auquel se rapportait l'amendement de M. Sainctelette. Comme cet article ne se trouvait pas dans la feuille qui a été distribuée, le vote s'est passé sans que j'y prisse garde. Je propose de revenir sur cet article.

Je présente une autre rédaction ainsi conçue :

« La preuve des imputations dirigées, à raison de faits relatifs à leur gestion ou à leur surveillance, contre les gérants, administrateurs et commissaires des sociétés en commandite par actions au porteur, des sociétés anonymes et des sociétés coopératives, sera admise par toutes les voies ordinaires, sauf la preuve contraire par les mêmes voies, conformément aux articles 5, 6, 7 et 8 du décret du 20 juillet 1831 sur la presse. »

L'amendement a pour but d'étendre la disposition aux administrations des sociétés coopératives et aux commissaires des sociétés. II est évident que les commissaires doivent se trouver dans la même situation que les administrateurs.

M. Saincteletteµ. - Je me rallie à la rédaction proposée par M. le ministre.

M. Dupont, rapporteurµ. - Je m'y rallie au nom de la commission.

- L'article, rédigé comme le propose M.. le ministre, est adopté.

Article 91

M. Dumortierµ. - Quelques collègues me font une remarque très juste au sujet de l'amendement que j'ai proposé. On craint que ces mots : « Il est interdit aux gérants de racheter les actions » ne soient interprétés en ce sens que c'est pour leur compte que cela leur est défendu, tandis que j'ai entendu dire que c'était pour compte de la société.

MjBµ. - Je voudrais avoir une nouvelle lecture de l'amendement.

MpDµ. - « Seront punis des mêmes peines les gérants ou administrateurs qui rachèteront les actions de la société autrement qu'avec le fonds de réserve ou à l'aide d'un prélèvement sur les bénéfices réalisés, qui feront des prêts aux actionnaires sur dépôt d'actions au porteur, ou qui feront les versements appelés sur les actions non libérées, en ouvrant aux actionnaires un compte courant débité de la valeur de ces versements. »

M. Dewandreµ. - Il est défendu aux gérants de faire des prêts aux actionnaires sur leurs actions. On pourrait croire qu'il est défendu aux gérants de faire, pour leur compte personnel, des prêts aux actionnaires. C'est comme gérants que cela leur est défendu et le texte devrait l'indiquer.

M. Jacobsµ. - Il va sans dire, et c'est le texte de l'article, que ce n'est qu'aux gérants et administrateurs qu'on a défendu l'achat des actions. Mais reste l'assemblée générale, et d'après le texte de l'article, l'assemblée générale peut décider, dans les circonstances où elle le juge nécessaire, le rachat d'actions.

- Des membres. - Non ! non !

MfFOµ. - Ce serait la disparition du capital.

M. Jacobsµ. - Soit, mais si votre intention est d'interdire ce rachat, il faut modifier l’article, car vous n'interdisez ce rachat qu'à l'autorité exécutive et non à l'autorité délibérante, cella qui représente la société entière, l'assemblée générale.

M. Dumortierµ. - Je ferai remarquer à mon honorable collègue que l'assemblée générale n'a pas le droit de réaliser les actions. C'est une affaire de la gérance.

Maintenant, veuillez-le remarquer ; ceci peut devenir excessivement sérieux. Voilà une société qui est périclitante. On viendra trouver un favorisé auquel on rachètera au pair des actions qui ne valent que 30 p. c. Le capital social va ainsi disparaître. C'est un abus flagrant qui s'est passé, qui se passe encore fréquemment et qu'il importe de prévenir.

Quant à l'observation qui m'avait été faite par l'honorable M. Dewandre, après avoir entendu la lecture de l'amendement, je crois qu'il ne peut pas y avoir de doute. Il s'agit ici des fonds de la société. On dit : « Si ce n'est sur la réserve », c'est donc pour compte de la société.

Maintenant si l'on achète sur le fonds de réserve, on ne diminue pas le capital social. D'ailleurs quand la société a un fonds de réserve, elle offre assez de garanties pour qu'on lui permette de racheter des actions sur ce fonds de réserve. Ce que nous devons vouloir, c'est que le capital social ne puisse, en aucune hypothèse, être diminué par le rachat d'actions de la société.

MjBµ. - Si M. Dumortier voulait revoir sa rédaction, nous pourrions, en attendant, voter les articles concernant les sociétés coopératives. (Adhésion.)

Section V. Des sociétés coopératives

Article 68

MpDµ. - Le premier article, relatif aux sociétés coopératives, qui a été amendé, est l'article 68.

Il est bien entendu que la série des numéros sera établie par les soins du bureau.

L'article 68 est ainsi conçu :

« L'acte constitutif de la société doit déterminer, à peine de nullité, les points suivants :

« 1° La dénomination de la société, son siège, sa durée, qui ne peut excéder trente ans ;

« 2° L'objet de la société ;

« 3° La désignation précise des associés, et s'il y a lieu, les conditions de l'admission, de la démission et de leur exclusion ;

« 4° La manière dont le fonds social est ou sera ultérieurement formé, le minimum de celui-ci ;

« 5° Comment et par qui les affaires sociales seront administrées et contrôlées et, s'il y a lieu, le mode de nomination et de révocation du gérant, des administrateurs et commissaires, l'étendue de leur pouvoir et la durée de leur mandat ;

« 6° Les droits des associés, le mode de convocation, la majorité requise pour la validité des délibérations, le mode de votation ;

« 7° La répartition des bénéfices et des pertes ;

« 8° L'étendue de la responsabilité des associés, s'ils sont tenus des engagements de la société solidairement, ou divisément sur tout leur patrimoine, ou jusqu'à concurrence d'une somme déterminée seulement. »

- Cet article est définitivement adopté.

Article 69

« Art. 69. Toute société coopérative doit tenir un registre contenant à sa première page l'acte constitutif de la société, et indiquant, à la suite de cet acte : 1° les noms, professions et demeures des sociétaires ; 2° la date de leur admission, de leur démission ou de leur exclusion ; 3° le compte des sommes versées ou retirées par chacun d'eux. »

« Ce livre sera coté, parafé et visé soit par un des juges da tribunal de commerce, soit par le bourgmestre de la commune, et sans frais.

« La mention des retraits de mise est signée par le sociétaire qui les a opérés. »

- Adopté.

Article 71

« Art. 71. Lorsque les statuts donnent aux associés le droit de se retirer, ils ne peuvent donner leur démission qu'à la clôture de l'année sociale ou six mois avant. »

MjBµ. - Je demande de remplacer les mots : « qu'à la clôture de l'année sociale », par ceux : « que dans les six premiers mois de l'année sociale. »

On ne pourra donner sa démission que dans les six premiers mois de l'année sociale.

- L'article, ainsi rédigé, est définitivement adopté.

Article 83

« Art. 83. Le bilan sera déposé, dans la quinzaine après son approbation, au greffe du tribunal de commerce du siège de la société. »

- Adopté.

Article 85

« Art. 85. Dans les huit jours de leur nomination, les gérants doivent déposer, au greffe du tribunal de commerce, un extrait de l'acte constatant leur pouvoir.

(page 751) « Ils doivent donner leur signature en présence du greffier, ou la faire parvenir au greffe dans la forme authentique. »

- Adopté.

Section IX. Dispositions pénales

Article 91

MpDµ. - Voici la nouvelle rédaction proposée par l’honorable M. Dumortier à l'article 91 :

« Seront punis des mêmes peines, les gérants ou administrateurs qui rachèteront les actions de la société autrement qu'au moyen de prélèvements sur les bénéfices réalisés ; qui feront des prêts aux actionnaires sur leurs actions. »

- L'article, ainsi rédigé, est définitivement adopté.

Section IV. Des sociétés anonymes

Article 48

MpDµ - Il nous reste à procéder au second vote sur l'article 48 (44 du projet amendé) ; nous avons adopté au premier vote la rédaction suivante :

« L'administrateur qui a un intérêt opposé à celui de la société, dans une opération soumise à l'approbation du conseil d'administration, est tenu d'en prévenir le conseil et de faire mentionner cette déclaration au procès-verbal de la séance.

« Le conseil ne peut approuver l'opération sans l'autorisation des commissaires.

« Il est spécialement rendu compte à la première assemblée générale, avant tout vote sur d'autres résolutions, des opérations autorisées aux termes des paragraphes précédents.

« Si l'administrateur n'a pas fait connaître au conseil d'administration qu'il a un intérêt dans l'opération, il sera responsable des pertes qu'elle aura causées.

« Il en sera de même pour les administrateurs qui ont agi sans l'autorisation des commissaires.

« Ces règles ne sont pas applicables si l'opération a été conclue avec publicité et concurrence ou si l'assemblée générale, informée de la position de l'administrateur, a d'avance autorisé la convention.

« Cette autorisation peut être donnée même pour une année entière et pour une catégorie d'opérations déterminées, sauf compte à rendre à l'assemblée générale à l'expiration du terme stipulé. »

- L'article, ainsi rédigé, est définitivement adopté.

Projet de loi abolissant les droits sur le sel, abaissant la taxe sur les lettres et augmentation les droits sur les eaux-de-vie

Rapport de la section centrale

M. Watteeuµ. - J’ai l'honneur de déposer sur le bureau de la Chambre le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi d'abolition du droit sur le sel, d'abaissement de la taxe des lettres à dix centimes et d'augmentation des droits sur les eaux-de-vie.

- La Chambre décide l'impression et la distribution et la mise de cet objet en tête de l'ordre du joue à la rentrée.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. Bouvierµ. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau de Chambre plusieurs rapports sur des demandes de naturalisation ordinaire.

- Impression et distribution.

Ordre des travaux de la chambre

M. Allard, questeurµ. - Messieurs, avant qu'il soit procédé au vote, j'ai l'honneur de proposer à la Chambre de fixer ses vacances.

L'année dernière, la Chambre s'est ajournée du 19 mars au 13 avril.

Je pense que nous ne pouvons prendre, cette fois, des vacances aussi longues ; nous avons des élections cette année et nous avons beaucoup de travaux à terminer.

Nous sommes saisis d'un projet de loi sur la rémunération des miliciens, d'un projet portant abolition de l'impôt du sel, d'un projet relatif à l'exécution de travaux publics ; nous avons aussi un projet apportant des modifications à la loi communale : tous ces projets présentent de l'importance et il serait désirable qu'ils pussent être votés avant notre séparation.

Je propose, en conséquence, de ne nous séparer que jusqu'au 26 de ce mois.

- Cette proposition est mise aux voix et adoptée.

M. Van Humbeeckµ. - Je demanderai à la Chambre, pour la section centrale qui examine le projet de loi relatif à l'exécution de travaux publics, l'autorisation de faire imprimer et distribuer son rapport pendant les vacances.

M. Allard, questeurµ. - Je demande que tous les rapports soient imprimés et distribués.

MpDµ. - Il en sera ainsi ; et il est entendu que le premier objet à l'ordre du jour pour notre rentrée est le projet de loi relatif à l'abolition de l'impôt du sel, etc.

Projet de loi révisant le code de commerce (titre III, livre premier : Des sociétés)

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal.

75 membres y prennent part.

74 répondent oui.

1 répond non.

En conséquence, le projet de 101 est adopté ; il sera transmis au Sénat.

Ont répondu oui :

MM. Jonet, Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Landeloos, Lefebvre, Le Hardy de Beaulieu, Lesoinne, Lippens, Magherman, Mascart, Moreau, Mouton, Muller, Orban, Pirmez, Preud'homme, Rogier, Sabatier, Sainctelette, Tack, Thonissen, T’Serstevens, Ernest Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Maesen, Vanderstichelen, Van Humbeeck, Van Iseghem, Van Merris, Vleminckx, Watteeu, Wouters, Allard, Ansiau, Bara, Beke, Bieswal, Bouvier-Evenepoel, Bricoult, Broustin, Castilhon. Coremans, David, de Baillet-Latour, de Borchgrave, de Breyne-Dubois, de Brouckere, De Fré, de Kerchove de Denterghem, De Lexhy, de Macar, de Maere, de Muelenaere, de Naeyer, de Rongé, de Rossius, Dethuin, de Vrints, Dewandre, de Zerezo de Tejada, d'Hane-Steenhuyse, Dumortier, Dupont, Elias, Frère-Orban, Funck, Guillery, Hagemans, Hayez, Jacobs, Jacquemyns, et Dolez.

A répondu non : M. Reynaert.

- La séance est levée à 5 heures.

La Chambre s'ajourne au 26 avril.