Accueil Séances
plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Bibliographie et
liens Note
d’intention
Séance précédente Séance suivante
Chambre des représentants de Belgique
Séance
du mardi 22 décembre 1840
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre (notamment pétition relative à un traité
de commerce avec les Pays-Bas (Delfosse)
2) Projet de loi fixant le contingent de l’armée pour 1841 (de Puydt, Delehaye, de Puydt, Delehaye, de Puydt, Delfosse, Delehaye, Brabant)
3) Projet de loi portant des crédits provisoires au budget de l’armée pour l’exercice 1841 (Delehaye, Mast de Vries, Delehaye, Delfosse, Rodenbach, de Puydt, Delehaye, Pirson, de Puydt, Manilius)
4) Projets de loi portant un crédit provisoire 1° au budget de l’intérieur et 2° au budget des travaux publics pour l’exercice 1841
5) Projet de loi relatif aux concessions de péages et projet de loi de transfert pour le service du chemin de fer
6) Projet de loi portant le budget transitoire des voies et moyens pour l’exercice 1841
7) Projet de loi portant modification de limites communales
8) Projet de loi portant le budget de la justice pour
l’exercice 1841. Discussion des articles. Tours pour enfants abandonnés (Doignon, Dolez, Desmet,
Leclercq, Doignon) ;
service des prisons notamment philanthropie moderne » et rôle de la
religion (Dedecker, Leclercq,
Dedecker), concurrence faite par les produits des
prisons avec ceux de l’industrie linière, conditions de détention (Van Cutsem), état des prisons de Liége (Delfosse) et de Verviers (Demonceau),
réplique générale (Leclercq), état des prisons de
Liége (Raikem, Delfosse),
sûreté publique (Dumortier, Leclercq)
(Moniteur belge n°358 du 23 décembre 1840)
(Présidence de M. de Behr, vice-président)
M. de Renesse procède à l’appel nominal à 2 heures.
M. de Villegas lit le procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse communique à la chambre les pièces de la correspondance :
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur J.-B Helsner, musicien au 7e régiment de ligne, né à Alexandrie, et entré au service de Belgique en 1830, demande la naturalisation. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
_____________________
« Le
sieur Joseph-Godefroid baron de Holling, lieutenant-colonel au régime d’élite
en garnison à Bruxelles, né en Prusse, et étant depuis 1814 au service des
Pays-Bas et de
- Même décision.
_____________________
« Le sieur Casimir de Bondt, ex-milicien de 1836, congédié par suite d’infirmités corporelles, gagnées au service, demande une pension. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
_____________________
« Le sieur P.-L Bonne, milicien de 1838, se plaint d’une décision ministérielle qui l’oblige à fournir un second remplaçant ou à servir en personne, son premier remplaçant ayant été renvoyé pour idiotisme. »
- Même décision.
_____________________
« Le sieur
Dumont-Francotte, négociant à Liége, demande qu’il soit fait un traité de
commerce avec
M. Delfosse
– Messieurs, la pétition de M. Dumont-Francotte a deux objets. Il demande
d’abord qu’on cherche à rétablir, à l’aide d’un traité de commerce avec
Sous le premier rapport, la pétition doit être renvoyée à la commission des pétitions ; sous le second rapport, elle doit être envoyée à la section centrale chargée de l’examen du budget des voies et moyens. Je demande ce double renvoi.
- Cette proposition est adoptée.
_____________________
M. le président– Le bureau a nommé M. d’Hoffschmidt en remplacement de M. Heptia, en qualité de membre de la commission chargée de l’examen du projet de loi relatif à la séparation des deux sections de la commune de Tourinnes-Beauvechain.
PROJET DE
LOI FIXANT LE CONTINGENT DE L’ARMEE POUR 1841 ET PROJET DE LOI PORTANT DES
CREDITS PROVISOIRES AU BUDGET DE L’ARMEE POUR L’EXERCICE 1841
Présentation de rapports
M. de Puydt – Messieurs, la section centrale du budget de la guerre m’a chargé de vous présenter le rapport sur deux projets de loi qui lui ont été renvoyés dernièrement. L’un a pour objet de fixer le contingent de l’armée pour l’exercice de 1841 à 80,000 hommes. La section centrale, par les considérations émises par le gouvernement en faveur de cette demande, vous propose d’adopter la loi dans les termes dans lesquels elle vous a été présentée par le gouvernement.
Le second projet a pour objet d’accorder au département de la guerre un crédit provisoire de 5 millions de francs pour les besoins du service pendant les deux premiers mois de l’année 1841.
La section centrale du budget de la guerre a commencé ses travaux, mais elle ne prévoit pas qu’elle puisse vous présenter son rapport sur ce budget avant les premiers jours du mois prochain ; elle attend en ce moment les renseignements qui ont été demandés au département de la guerre, en réponse à de nombreuses observations faites par les sections, et ce sera seulement quand elle sera saisie de ces renseignements qu’elle pourra reprendre ses travaux.
Dans cet état de choses, la section centrale vous propose d’adopter purement et simplement la demande d’allocation, faite par le département de la guerre, d’un crédit provisoire de 5 millions de francs pour les besoins du service pendant les deux premiers mois de l’année 1841.
M. le président – Demande-t-on l’impression de ces rapports ?
M. Delehaye – Je la propose. Il me semble que la demande d’une armée de 80,000 hommes vaut bien que la chambre l’examine avec soin ; pour que nous puissions l’examiner avec soin, il faut que nous ayons sous les yeux le rapport de la section centrale.
M. de Puydt, rapporteur – Je demande au contraire que la chambre vote sur le projet séance tenante, parce qu’il me semble que les questions qu’il soulève sont extrêmement simples, et qu’il suffira de quelques mots d’explication pour faire comprendre à l’honorable M. Delehaye que l’armée de 80,000 hommes qu’on demande existe déjà.
On ne vous demande pas une chose que vous n’avez pas. En effet c’est extrêmement simple : le temps de service de nos miliciens est de 8 années, dont une partie est en service actif, une partie dans la réserve, et une autre en congé illimité.
Le contingent annuel est de 10,000 hommes : cela fait 80,000 hommes pour les 8 années de services. M. le ministre de la guerre a le droit de mettre sous les armes 80,000 hommes si les circonstances l’exigeaient, s’il fallait pourvoir à la sûreté du pays. Ainsi, le gouvernement ne vous demande pas quelque chose de nouveau.
La
proposition du gouvernement a plutôt un caractère politique : elle a pour
but de faire comprendre au pays et à l’extérieur que
M. Delehaye – Messieurs, je ne prétends pas combattre les raisons qui viennent d’être présentées par l’honorable rapporteur ; je n’ai pas examiné la question. Mais venir prétendre qu’il faille voter une armée de 80,000 hommes, parce que cette armée existe déjà ; c’est là un argument qui n’est pas exact. Il est si vrai que cette armée n’existe pas, que l’on doit venir nous en faire la demande. Le contingent de l’armée n’était pas aussi élevé pour l’exercice courant.
Comme j’ai déjà eu l’honneur de le dire, au moyen de la neutralité forte dont on a déjà tant parlé, on veut imposer au pays des sacrifices considérables ; or, avant de donner mon assentiment à ces mesures, il faut que nous ayons le temps d’examiner. Je ne dis pas que les raisons données par l’honorable M. de Puydt ne soient pas fondées ; mais nous qui n’avons pas examiné la question en détail, comme la section centrale, il nous est impossible d’émettre un vote à cet égard en parfaite connaissance de cause. Je demande donc qu’on nous laisse le temps d’examiner la question.
M. de Puydt, rapporteur – C’est une simple mesure d’ordre qui n’impose aucun sacrifice extraordinaire au pays ; cela ne doit exercer aucune influence sur le budget : ce budget restera tel qu’il est. Sur cette quotité de 80,000 hommes dont le gouvernement pourra disposer, si la nécessité l’exige, il n’y a que le tiers qui se trouve en solde d’après le budget. Cela ne porte donc aucune atteinte à la dépense.
M. Delfosse – Messieurs, j’appuie les observations de l’honorable M. Delehaye ; il me semble que l’affaire est assez importante pour n’être pas discutée séance tenante. Je demande au moins la remise à demain.
M. Delehaye – Messieurs, l’argument que l’honorable M. de Puydt vient de présenter n’est pas admissible ; il vous a dit qu’en mettant à la disposition du gouvernement une armée de 80,000 hommes, vous ne donnez pas en même temps les fonds pour les entretenir ; cela est vrai à la rigueur : mais ne comprend-on pas que si la chambre accordait aujourd’hui au gouvernement une armée de 80,000 hommes, elle ne pourrait, sans se montrer inconséquente, se dispenser de voter plus tard les fonds nécessaires pour cette armée ? La question est donc très grave et il faut que nous ayons le temps de l’examiner.
M. Brabant – Messieurs, l’honorable M. Delehaye, appuyé par l’honorable M. Delfosse, demande l’impression du rapport et la remise de la discussion à demain pour avoir le temps d’examiner la proposition. Mais, messieurs, le rapport que vient de faire l’honorable M. de Puydt ne contient aucun renseignement qui ne se trouve déjà dans l’exposé des motifs du gouvernement. M. le ministre de la guerre vous a dit qu’en présence des circonstances générales et des éventualités qu’elles peuvent amener, le gouvernement a cru devoir élever le contingent de l’armée à 80,000 hommes pour 1841, tandis que celui de 1840 n’était que de 50,000 hommes.
La crainte manifestée par les honorables préopinants porte particulièrement sur les conséquences que doit avoir, quant au budget, le contingent de 80,000 hommes. Eh bien, les précédents sont là pour donner les apaisements les plus complets à ces honorables membres. Le projet de budget présenté par M. le ministre de la guerre, à l’exception des officiers de l’état-major, dont je n’ai pas fait le relève, ne propose des fonds que pour 2,625 officiers de troupes, et pour 29,764 sous-officiers et soldats à tenir sous les armes pendant toute l’année, ainsi que pour 9,000 hommes d’infanterie à réunir pendant dix jours.
L’année dernière, le budget a été calculé pour 2,726 officiers à 34,035 sous-officiers et soldats et 13,000 hommes d’infanterie, réunie pendant 10 jours ; et cependant la chambre a voté, sans la moindre difficulté, un contingent de 50,000 hommes. Depuis la révolution, au moins à partir de 1832, vous avez constamment voté un contingent de 120,000 hommes. Eh bien, immédiatement après la convention du mois de mai 1833, l’effectif de l’armée a été considérablement réduit et je ne crois pas qu’il y ait un seul budget qui ait porté plus de 45,000 hommes en solde sur les 110,000 hommes portés dans la loi de contingent. L’année dernière, les mêmes craintes ont été manifestées, et la chambre a eu ses apaisements sur ce point.
M. Delfosse – Messieurs, je ne veux contester aucune des observations qui viennent de vous être soumises par l’honorable M. Brabant. Je n’ai pas dit que je m’opposerais au projet, j’ai seulement dit que je désirais l’examiner. Puisque le rapport ne contient rien que ce qui se trouve dans l’exposé des motifs du projet du gouvernement, je n’insiste pas pour l’impression du rapport, mais j’insiste pour la remise de la discussion à demain.
M. Delehaye – Je me rallie à cette proposition.
- La chambre consultée décide qu’elle s’occupera, séance tenante, des deux projets de loi sur lesquels M. de Puydt vient de présenter un rapport.
PROJET DE LOI SUR LE CONTINGENT
DE L’ARMEE
Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on passe à la discussion des trous articles du projet de loi qui sont adoptés sans discussion en la teneur suivante :
« Art. 1er. Le contingent de l’armée, pour 1841, est fixé au maximum de quatre-vingt mille hommes.
« Art. 2. Le contingent de la levée de 1841 est fixé à un maximum de dix mille hommes qui sont mis à la disposition du gouvernement.
« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le 1er janvier 1841. »
On procède à l’appel nominal sur l’ensemble de la loi.
Le projet est adopté à l’unanimité des 63 membres qui ont pris par au vote.
Il sera transmis au sénat.
Les membres qui ont pris par au vote sont :
Ce sont : MM. Brabant, Buzen, Cogels,
Cools, Coppieters, David, de Behr, Dedecker, de Florisone, de Foere, de Garcia
de
MM. Delehaye et Delfosse qui se sont abstenus, sont invités à énoncer les motifs de leur abstention.
M. Delehaye – Je me suis abstenus parce que j’ai pensé que la loi qui nous était soumise était asez importante pour mériter un examen.
M. Delfosse – Je me suis abstenu par les mêmes motifs.
M. le président – Nous passons au second projet.
PROJET DE
LOI RELATIF AU CREDIT PROVISOIRE DE 5 MILLIONS DEMANDE POUR LE BUDGET DE
Le projet de loi est ainsi conçu :
« Art. 1er. Il est ouvert au ministère de la guerre un crédit provisoire de cinq millions de francs (fr. 5,000,000), à valoir sur les dépenses de l’exercice 1841. »
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa promulgation. »
M. Delehaye
– Messieurs, dans la section à laquelle j’ai l’honneur d’appartenir, j’ai émis
l’opinion que dans l’état actuel de
J’ai
comparé avec
On
dit que ces 5 millions sont destinés à faire face aux dépenses des premiers
mois de l’année. Je pense qu’en prenant le terme le plus rigoureux, cela comprend
les mois de janvier et février. Deux mois sont le sixième de l’année. Or, si 5
millions sont le sixième de la dépense, vous aurez pour toute l’année un budget
de 30 millions. Or, il est impossible que
Déjà,
nous avons voté plusieurs budgets et les économies introduites sont tellement
minimes qu’elles ne méritent aucune considération. Le budget de la guerre seul
permettait de faire des économies réelles. En adoptant la proposition de
n’accorder que 25 millions, on donnait au gouvernement les moyens d’avoir une
armée aussi forte que celle de
Je crois même qu’on pourrait sans danger réduire le chiffre de notre armée à 20,000 hommes. Je ne m’attendais nullement à ce que séance tenante et sans que l’ordre du jour l’indiquât, on s’occuperait de la fixation du contingent de l’armée et du crédit provisoire demandé pour le département de la guerre. Si j’avais eu le temps de les examiner attentivement, je leur aurais peut-être donné mon assentiment. Quant au premier, j’ai dû m’abstenir ; quant au second, d’après l’examen que j’ai fait de quelques détails, je serai forcé de refuser mon vote.
M. Mast de Vries – Je demande la parole pour répondre quelques mots à ce qu’a dit M. Delehaye sur le nombre de mois dont le crédit demandé doit couvrir la dépense. Il vous a dit que le gouvernement, en dépensant la somme en deux mois, serait dans les termes de la loi, parce que deux mois sont plusieurs mois. Je lui ferai observer que si le crédit devait servir pour trois mois, il en résulterait que le budget ne devrait être que de 20 millions. Or, de toutes les sections il n’en est pas une qui soit descendue à ce chiffre. Je ferai tout ce qui dépendra de moi pour réduire les dépenses du département de la guerre, mais jamais je ne proposerai de réduire ce budget à 20 millions.
Le crédit de 5 millions est demandé pour plusieurs mois, ce sera entre deux et trois mois, c’est tout ce que nous pouvons raisonnablement exiger.
M. Delehaye – J’ai dit que si le gouvernement dépensait le crédit demandé en deux mois, nous n’aurions aucun reproche à lui adresser, la loi portant que c’est pour faire face aux dépenses des premiers mois de l’année. Je vous le demande, entre-t-il dans votre manière de voir que le département de la guerre absorbe 5 millions en deux mois ? Je sais qu’il pourra ne les dépenser qu’en trois mois, mais d’après les termes de la loi il peut également les dépenser en janvier et février.
M. Delfosse – Messieurs, je voterai pour le crédit provisoire qui nous est demandé par M. le ministre de la guerre, parce qu’il n’y a pas moyen de faire autrement. J’aurais comme d’autres, beaucoup de choses à dire sur le chiffre de notre armée et sur la dépense qu’elle doit occasionner, mais je crois que le moment n’est pas venu. Je me bornerai aujourd’hui à exprimer le vœu que l’on ne nous mène pas comme l’année dernière de crédits provisoires en crédits provisoires. J’espère que la section centrale sentira la nécessité de presser son travail et que M. le ministre de la guerre s’empressera de lui fournir tous les renseignements dont elle peut avoir besoin.
M. Rodenbach – La section centrale du budget de la guerre a travaillé avec beaucoup d’activité pendant huit ou dix jours. Nous avons analysé tous les procès-verbaux des sections, nous avons demandé des renseignements à M. le ministre de la guerre, et avant que ces renseignements nous soient parvenus, nous ne pouvons pas continuer.
Comme l’a dit M. Mast de Vries, on ne nous demande que cinq millions de crédit provisoire, et en admettant que l’armée ne soit pas plus forte, que ne le demande le député de Gand, ce n’est pas trop. Le ministre ne dit pas que cette somme sera dépensé en deux mois.
Nous avons l’exemple de l’économie faite l’année dernière par M. le ministre de la guerre. Quand les ministres font des économies il faut bien le reconnaître. J’espère qu’avec les cinq millions demandés il pourra bien marcher plus de deux mois.
Le budget de la guerre sera discuté à notre rentrée après les vacances de janvier, les deux mois ne seront pas écoulés, et si la chambre veut en fixer le chiffre au-dessous de 30 millions, à 28 millions comme quelques sections l’ont demandé, rien ne nous empêchera de le faire. Nous ne risquons donc rien à voter ces cinq millions demandés.
M. de Puydt – Les renseignements demandés au ministre de la guerre sont le résultat d’observations extrêmement nombreuses, faites par les sections ; il n’est pas étonnant dès lors qu’il se soit écoulé un délai assez long avant de recevoir ces renseignements. Aussitôt qu’ils nous seront parvenus, le travail de la section centrale sera assez avancé pour que la section centrale terminé son examen dans un temps très court et puisse présenter son rapport dans le commencement de janvier.
Je
ne puis pas laisser sans réponse une comparaison qu’on a faite entre l’armée
belge et celle d’une autre puissance. On a parlé de
L’armée
belge a un maximum de 80,000 hommes. Voyez les détails du budget, et
rappelez-vous ce que vient de dire l’honorable M. Brabant, et vous ne douterez
pas que nous avons à peine 25,000 hommes en solde. Sous ce rapport, nous sommes
dans la même condition que
M. le ministre de la guerre (M. Buzen) – Je suis prêt à fournir à la section centrale demain ou après-demain les renseignements qu’elle m’a demandés Ainsi, comme l’a dit l’honorable M. de Puydt, on pourra arrêter le rapport sur le budget de la guerre dans les premiers jours du mois prochain.
M. Delehaye – L’honorable M. de Puydt envisage notre neutralité comme une source de dépenses. (Dénégations de la part de M. de Puydt.)
Je me rappelle que dans la discussion des 18 articles on a présenté notre neutralité comme devant limiter nos dépenses en ce qu’elle devait nous mettre à même d’avoir une armée moins forte. Nous devrons, dit l’honorable membre, défendre notre neutralité. Mais si nous devons la défendre, quel avantage offre-t-elle ? Atteinte à l’indépendance d’une nation, la neutralité ne trouve sa justification que dans les économies qu’elle permet de faire.
Il nous faut, dit-on, une armée pour défendre nos vingt places fortes. Mais, pour bien garder vos vingt places fortes, il vous fait une armée de 100,000 hommes. Et quand vous aurez disséminé cette armée dans vos vingt places fortes, quelle sera votre attitude dans vos places qui ne sont pas fortes ? Quels moyens de défense aurez-vous, en Belgique, où il n’y a ni garde civique, ni garde nationale ? Car l’honorable M. de Puydt, qui a en cette matière des connaissances spéciales, ne contestera pas que ce n’est pas trop de 100,000 hommes pour garder vingt places fortes.
Cet
honorable membre a parlé de
M. Pirson – Le vote que vous venez d’émettre est un vote de confiance pour le ministère ; celui que vous avez à émettre sur le projet de loi en discussion est également un vote de confiance. Je crois que nous n’avons pas jusqu’à présent à nous repentir de la confiance que l’assemblée et le pays ont accordée à M. le ministre de la guerre, qui l’an dernier a eu un vote de confiance global. Cependant j’ai une observation à lui fait qui tend aux économies, économies qu’il a commencées, mais qui n’ont pas toutes été réalisées.
Lorsqu’il a été question non seulement de sauver notre indépendance, mais encore de conserver notre territoire, nous avons fait de grands frais en pure perte. Ceux qui ont fait ces dépenses n’ignoraient pas qu’elles étaient faites en pure perte ; en effet, s’ils avaient cru que nous devions à cette époque nous servir de nos forces militaires, n’auraient-ils pas commencé par mettre à la pension ou en non-activité des militaires de haut grade qui n’étaient pas du tout en état de commencer une campagne ?
Nous ne sommes pas à la veille de commencer une campagne ; mais puisque nous donnons au gouvernement un vote de confiance, en lui donnant, dans la prévision des éventualités de guerre le pouvoir de porter l’effectif de notre armée à 80,000 hommes, nous devons lui recommander toutes les économies qui seraient possibles dans le cas où cette éventualité viendrait à se réaliser. Je leur recommande donc de mettre, dans ce cas, en non-activité des officiers d’un haut grade, qui, si notre neutralité était violée, seraient plutôt un obstacle qu’un soutien pour la défendre, et de remplacer, par intérim, ces officiers par d’autres d’un grade inférieure, qui seront ainsi mis à l’épreuve.
M. de Puydt – Il est fort inutile de prolonger ce débat. Cependant je ne veux pas qu’on se méprenne sur le sens de mes paroles. Je n’ai pas dit que la neutralité occasionnait des dépenses, puisque j’ai prouvé que nous n’avions pas une armée proportionnellement plus forte que les autres nations. Mais j’ai dit qu’en cas de guerre, ce pouvait être une nécessité pour nous d’avoir une armée plus forte que d’autres nations. Personne ne prétendra que notre armée peut rester, en cas de guerre, limitée à 25,000 hommes. Si nous avions la guerre, je crois que personne d’entre vous n’hésiterait à porter notre armée non pas seulement à 80,000 hommes, mais à 150,000, pour maintenir notre nationalité. (Réclamations de la part de quelques membres.)
Si vous êtes disposés à sacrifier la qualité de Belge pour quelques hommes, c’est votre affaire. Mais je crois que la majorité n’hésitera pas. Et je dis qu’en cas de guerre nous ne pouvons avoir la prétention de nous défendre avec moins de 80,000 hommes.
M. Manilius – Je voterai aussi le chiffre de cinq millions de francs ; non que je considère ce chiffre comme un chiffre normal. Mais je suis convaincu que M. le ministre de la guerre fera qui dépendra de lui pour introduire des économies. Et quand même les 5 millions seraient dépensés dans les deux premiers mois de l’année comme le craint l’honorable M. Delehaye, ce ne serait pas une raison pour que les dépenses eussent lieu sur le même pied pendant le reste de l’année.
Par ces motifs, je crois et j’espère que la chambre croira qu’il y a lieu d’adopter le projet de loi.
- Les deux articles du projet de loi sont successivement mis aux voix et adoptés.
Il est procédé à l’appel nominal sur l’ensemble du projet de loi, en voici le résultat :
68 membres sont présents.
66 votent pour l’adoption.
2 (MM. de Foere et Delehaye) votent contre.
La chambre adopte.
Ont voté pour l’adoption : MM. Brabant, Buzen, Cogels,
Cools, Coppieters, David, de Behr, Dedecker, de Florisone, de Garcia de
PROJET DE LOI PORTANT UN CREDIT
PROVISOIRE AUX BUDGETS DE L’INTERIEUR ET DES TRAVAUX PUBLICS POUR L’EXERCICE
1841
M. le ministre de l’intérieur (M. Liedts) présente un projet de loi de crédit provisoire pour le département de l'intérieur.
- La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce projet de loi et le renvoie à la section centrale chargée de l’examen du budget de l’intérieur.
__________________
M. le ministre des travaux publics (M. Rogier) – J’ai l’honneur de présenter un projet de loi pour le service de mon département pendant les deux premiers mois de l’exercice 1841. Ce projet de loi est accompagné d’un tableau qui reproduit les divers articles du budget sur lesquels une imputation est proposée jusqu’à concurrence de deux douzièmes. On s’est abstenu de proposer des allocations sur des articles nouveaux et sur les articles où il y a des augmentations de dépenses. De telle manière qu’il n’y a rien de préjugé.
- La chambre ordonne l’impression et la distribution de ce projet de loi et le renvoie à la section centrale chargée de l’examen du budget des travaux publics.
PROJET DE LOI RELATIF AUX
CONCESSIONS DE PEAGES ET PROJET DE LOI DE TRANSFERT POUR LE SERVICE DU CHEMIN
DE FER
M. Cools présente deux rapports de la section centrale des travaux publics, le premier sur le projet de loi relatif aux concessions de péages, le second sur un projet de loi de transfert pour le service du chemin de fer.
Ces deux rapport seront imprimés et distribués. La chambre en fixe la discussion à demain.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET
TRANSITOIRE DES VOIES ET MOYENS POUR L’EXERCICE 1841
M. Jadot donne lecture du rapport de la section centrale sur le budget transitoire des voies et moyens.
- La chambre ordonne l’impression et la distribution, et sur la proposition de M. le ministre des finances, en fixe la discussion à demain.
______________________
M. Jadot dépose ensuite le rapport sur le budget des voies et moyens, présenté primitivement par le gouvernement.
- L’impression et la distribution est ordonnée.
PROJET DE LOI MODIFIANT DE
LIMITES COMMUNALES
M. d’Hoffschmidt présente un rapport de la commission qui a été chargée d’examiner le projet de loi tendant à la séparation des communes d’Ulumont et Botassart et celle de Sansarath.
- Ce rapport sera imprimé et distribué.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DE
Discussion des articles
Chapitre VIII – Cultes
Articles
2 à 4
La chambre en est restée hier à l’article 2 du
chapitre VIII – Cultes.
Elle adopte successivement, sans aucune discussion,
les trois articles suivants :
« Art. 2. Culte protestant : fr.
55,500. »
« Art. 3. Culte israélite : fr.
11,000. »
« Art. 4. Secours : fr. 100,000. »
Chapitre IX – Etablissements de bienfaisance
Articles
1 à 3
« Art. 1. Frais d’entretien et de transport des
mendiants et insensés, dont le domicile de secours est inconnu : fr. 15,000. »
- Adopté.
___________________
« Art. 2. Subsides à accorder extraordinairement
à des établissement de bienfaisance et à des hospices d’aliénés : fr.
125,000. »
- Adopté.
___________________
« Art. 3. Pour avances à faire au nom des
communes, à charge de remboursement de leur part, au dépôt de mendicité établi
aux colonies agricoles : fr. 48,047. »
- Adopté.
La chambre passe à la discussion de l’article 4.
« Art. 4. Subsides pour les enfants trouvés et
abandonnés sans préjudice du concours des communes et des provinces : fr.
175,000. »
M.
Doignon – A l’occasion de cet article, j’appellerai l’attention ou
plutôt les méditations de M. le ministre de la justice sur une question de la
plus haute importance, je veux parler de la question des enfants trouvés.
Convient-il d’amener successivement par degrés la
suppression des tours dans nos provinces ? M. le ministre Ernst était de
cet avis. Il était pour la suppression des tours, et y engageait autant que
possible.
En France, messieurs, depuis bien longtemps on a été
effrayé des conséquences du système des tours. Le nombre des enfants déposés
est devenu si considérable, la dépense qui en résulte est devenue tellement
exorbitante, que partout elle absorbe une majeure partie des ressources
départementales.
Croyant remédier à ce mal l’on a adopté le système de
permutation des enfants de département à département. Mais bientôt on devra
renoncer à ce système.
En Angleterre les tours on été supprimés depuis vingt-cinq
ans. On a regardé cette institution comme le fruit de ces idées
philanthropiques tout à fait mal entendues, mal calculées dans l’intérêt
social. On a reconnu que les hospices des enfants trouvés n’étaient, selon
l’expression de lord Brougham, que des hospices de bâtards.
On a dit à tort qu’il y avait plus d’infanticides là
où il n’y avait pas de tours. Les statistiques nous prouvent le contraire. En
effet, l’établissement des tours favorise plus ou moins l’immoralité, et
l’immoralité vous le savez engendre les grands crimes.
L’intérêt de l’humanité demande aussi cette
suppression. Il est constant qu’on voit mourir un nombre considérable de ces
enfants, parce qu’ordinairement ils sont confiés à des mains mercenaires, et
périssent à défaut de soins maternels.
On prétendu
aussi que les tours empêchaient les infanticides. Je pense qu’on se trompe.
Lorsqu’une mère est assez dénaturée pour se décider à ôter la vie à son enfant,
les tours ne l’arrêtent pas. Quel est en effet le motif qui porte une mère à
commettre ce crime ? N’est-ce pas parce qu’elle veut absolument cacher sa
faute à tous les regards, ensevelir sa bonté dans les ténèbres ? Eh bien,
messieurs, dans une pareille position une mère n’aura aucun égard aux tours.
Car pour y faire déposer son enfant il faut nécessairement qu’elle confie son
secret à un tiers qui se charge d’y porter son enfant. Il faut nécessairement
violer son secret, et c’est précisément ce qu’elle ne veut pas.
Le meilleur système, à mon avis, est celui qui tend à
rapprocher l’enfant de sa mère, et lui donner ainsi certains liens de famille.
C’est ce système qui existe dans nos Flandres, où en général il n’y a pas de
tours. Là généralement les mères sont portées à retenir leurs enfants près
d’elles, et elles y sont d’autant plus portées, qu’on a soin de distribuer des
secours convenables avec prudence et discrétion.
J’engage M. le ministre à examiner mûrement cette
grave question.
M. Dolez – Messieurs, en demandant la parole, il n’entre pas
dans ma pensée de m’opposer à la motion de l'honorable M. Doignon. Comme lui je
crois qu’il est nécessaire que le gouvernement apporte des modifications dans
le système des tours.
Mais si je partage la pensée de l’honorable M. Doignon
sur ce point, je ne puis la partager sur les motifs qui la lui dicte. Je crois,
quant à moi, que s’il importe d’examiner la question de la suppression des
tours, c’est particulièrement au point de vue des finances commerciales, parce
que dans nos provinces il est des villes qui supportent toutes les charges des
tours, tandis que d’autres en sont complètement exemptes.
Mais au point de vue moral, au point de vue
humanitaire, je me prononce de toutes mes forces contre les principes de
l’honorable M. Doignon. Et qu’il me soit permis de rappeler un fait dont la
ville a été le théâtre. Il y a deux ans, je pense, une malheureuse avait été
chargée par plusieurs mères de porter les enfants qu’elles avaient mis au monde
en secret dans une ville éloignée, parce qu’à Tournay, il n’existait pas de tour.
Savez-vous quelle a été l’horrible spéculation que l’absence d’un tour a
inspirée à cette femme ? Pour s’épargner les frais du voyage, elle tuait
les malheureuses victimes qui lui étaient confiées. S’il eût existé un tour à
Tournay, probablement cette femme n’aurait pas conçu cette pensée et aurait
exécuté le mandat qui lui avait été donné, non en donnant la mort à ces
malheureux enfants, mais en les portant à l’hospice.
L’honorable membre a invoqué l’exemple des Flandres.
J’entends dire, ce que j’ignorais, qu’il existe un tour à Gand, et, sous ce
rapport, les assertions de l’honorable M. Doignon ne sont pas fondées en fait.
Mais en admettant comme exactes les conséquences qu’il en tirait, ce que je dis
n’en serait pas moins complètement sauf.
Qu’on ne s’aperçoive pas dans certaines localités des
Flandres de l’absence des tours, cela pourrait se concevoir, et la raison en
est simple. C’est que les enfants qui devraient être exposés au tour dans les
Flandres le sont dans les villes voisines. C’est ainsi que je sais de science
certaine qu’à Mons il arrive de l’étranger une quantité d’enfants qu’on y
expose ; et c’est à tel point qu’il a été porté à ma connaissance que le
nombre d’enfants étrangers envoyés à Mons était si considérable qu’on a dû
ordonner aux employés de l’octroi de surveiller l’entrée des enfants.
J’engage donc, comme l’honorable M. Doignon, le
gouvernement à porter ses méditations sur la questions des tours. Mais je ne
puis admettre les principes posés par l’honorable membre, comme devant amener
leur suppression. Je crois au contraire qu’il importerait dans l’intérêt de
l’humanité de les réorganiser avec plus de soin.
M. Desmet – La question de la
suppression des tours est très importante, et je ne puis m’associer à la
demande de l’honorable M. Doignon. Je crois que les tours sont un mal
nécessaire. Il est vrai qu’il en résulte des inconvénients, et entre autres
ceux qu’on vient de citer, que les enfants des campagnes sont déposés dans les
villes. Mais comme il n’y a pas de tours dans les campagnes, les enfants ne
peuvent être déposés que dans les lieux les plus voisins.
L’honorable M. Doignon a signalé un fait qui est
vrai ; c’est que souvent ces enfants sont abandonnés à des mains
mercenaires, à des personnes qui n’en ont aucun soin, mais il y a moyen
d’obvier à cet inconvénient ; il y a moyen de surveiller les personnes
auxquelles les enfants trouvés sont confiés ; c’est ce qui se fait dans
plusieurs communes.
M. le ministre de la
justice (M. Leclercq) – Messieurs, cette question de la suppression ou du maintien
des tours est trop grave, elle donne lieu à trop de divergence d’opinion entre
les esprits de la plus haute portée, pour que je me permette d’énoncer ici une
opinion sur cette matière, à l’occasion d’un article de mon budget. C’est
précisément à cause de sa gravité que cette question occupe toute mon
attention, ; dans peu de temps une décision quelconque sera prise.
M. Doignon – L’honorable M. Dolez a
rencontré mes observations, et je pense qu’il n’a rien pu détruire des
principes que j’ai posés. Il a présenté des inconvénients ; il a cité un
crime qui a été commis, un crime qui fait horreur ; mais, messieurs, dans
tout système possible, il y a des inconvénients. Lorsqu’on fait des lois, il
faut voir les choses de plus haut ; s’il n’y avait pas eu de tours, les
inconvénients dont a parlé l’honorable membre ne se seraient pas présentés, le
crime qu’il a cité n’aurait pas été commis ; le trafic horrible dont il a
parlé n’aurait pas eu lieu. D’ailleurs, messieurs, quand il s’agit de mesures
législatives, c’est mal argumenter que se se prévaloir de cas tout à fait
spéciaux et monstrueux. Mes principes sont donc restés debout, malgré les
observations de M. Dolez.
Ce n’est point ici le moment de les développer :
je n’ai entendu qu’appeler l’attention du gouvernement sur la question.
- L’article est mis aux voix et adopté.
Chapitre X – Prisons. Service domestique
Article 1
« Art. 1er. Frais d’entretien, d’habillement, de
couchage et de nourriture des gardiens et des détenus : fr.
1,200,000. »
M. Dedecker – Messieurs, une augmentation de 423,000 francs est
demandée au chapitre X, pour le service des prisons. La nécessité de cette
augmentation résulte surtout de deux faits qui donnent bien à réfléchir mais
qu’il faut cependant finir par admettre : le chiffre toujours croissant de
la population de nos prisons et le prix élevé des objets de consommation. Cette
augmentation, messieurs, a d’autres causes encore, qui sont moins importantes,
moins fondées, selon moi, et que je me propose d’examiner devant vous. En
procédant à cet examen, j’aurai l’honneur de vous soumettre quelques
considérations très courtes sur la partie matérielle et sur la partie morale de
l’administration des prisons.
D’abord, messieurs, j’aurais désiré que M. le ministre
de la justice eût soumis à la législature un état plus ou moins détaillé des
travaux exécutés dans nos prisons ; il me semble qu’il eût été d’un grand intérêt
pour nous de savoir comment se fait l’achat des matières premières, comment se
consomment les produits fabriqués ; il me semble que ce n’eût pas été trop
des lumières de toute la chambre, pour déterminer quelles espèces et quelles
quantité de produits l’on fabriquerait dans les prisons.
Parmi les économistes, il en est qui contestent
l’utilité intrinsèque de semblables travaux ; il en est d’autres qui
recommandent de préférence telle ou telle fabrication spéciale ; il en est
d’autres, enfin, qui signalent les dangers de la concurrence des produits des
prisons avec les produits des industries libres et rivales. Dernièrement
encore, si je ne me trompe, le comité central de l’association nationale pour
l’encouragement de l'ancienne industrie linière a présenté, sous ce rapport,
quelques considérations au gouvernement. En un mot, messieurs, tant et de si
graves questions industrielles se rattachent au travail des prisons, que le
gouvernement, sans abdiquer ses droits d’administrateur, eût bien pu nous soumettre
un exposé de l’organisation de ce travail.
Vous avez vu, messieurs, dans le rapport de la section
centrale, qu’une des causes de l’augmentation demandée par M. le ministre,
c’est la mesure prise par lui de remplacer partout, par des employés libres,
les détenus qui avaient été employés jusqu’à présent, soit dans les bureaux,
soit dans les infirmeries des prisons. Ici encore, j’aurais désiré que M. le
ministre se fût expliqué sur les motifs qui lui ont fait adopter une semblable
mesure. Le choix des détenus étant convenablement, judicieusement fait, il me
semble qu’il y aurait là d’abord un moyen d’économie, ensuite un moyen de
relever ces détenus à leurs propres yeux, de leur faire conserver en leur
montrant ainsi un peu de confiance, un reste de cette dignité d’homme qui leur
sera si nécessaire lorsqu’il rentreront dans la société.
D’ailleurs, messieurs, il y a dans la population des
prisons des hommes qu’une vicieuse et incomplète instruction y a poussés, des
hommes qui ne conviennent pas aux travaux manuels ; je désirerais savoir
comme M. le ministre entend occuper cette catégorie de détenus et comment il
parviendra à les soustraire aux dangers de l’oisiveté, dangers qui sont plus
grands dans ces lieux que partout ailleurs.
En tant que je puis me le rappeler, l’augmentation qui
résulterait de ce chef au budget des prisons, sera de 15,000 francs ; il
me semble, messieurs, que pour voter cette augmentation nous devrions avoir la
conviction que ce sacrifice pécuniaire sera compensé par un avantage moral incontestable,
et je vous avoue que jusqu’à présent je ne le vois pas ; j’attends sur ce
point des explications de M. le ministre.
Ces détenus une fois remplacés par des employés
libres, et par conséquent rétribués, je ne comprends pas comment, d’après la même
note communiquée à la section centrale, M. le ministre demande encore au litt.
C une augmentation de 5,000 francs pour faire imprimer des états qui jusqu’ici
se faisaient à la main ; car il me semble que, pour peu qu’on ait de
l’expérience en matière typographique, on sait qu’il en coûte moins pour faire
imprimer que pour faire écrire. Mais ce que je ne pense pas, il devrait en
coûter davantage, je devrais m’opposer à ce surcroît de dépense, car lorsqu’il
y a encore tant d’améliorations essentielles à introduire dans le régime des
prisons, il ne faut pas ainsi gaspiller l’argent pour des objets de pure forme,
par des motifs tout à fait secondaires.
Puisque j’en suis à parler de la manie de sacrifier à
la forme, je vous dirai qu’il en est, d’après moi, absolument de même pour les
constructions. Tout cela est admirablement bâti, mais avec un luxe qui ne
permet pas même, pour justifier les dépenses que ces constructions entraînent,
d’alléguer le prétexte du bien-être matériel des détenus. Depuis quelques temps,
il existe, sous ce rapport, entre les nations une lutte qui menace de dévier
fort sérieuse, fort compromettant pour leurs budgets. Des touristes
philanthropes parcourent le continent, traversent même les mers pour inspecter
les prisons des différents pays et reviennent ensuite chez eux publier des
« Rapports », des « Coups d’œil » pleins d’éloges pour
l’administration de telle ou telle prison, le tout bien entendu à charge de
revanche. Le résultat de ces inspections, fort souvent superficielles, c’est qu’on
s’habitue de plus en plus à sacrifier à la forme, à se contenter
d’améliorations qui frappent la vue. On construira, par exemple, des salles
d’une dimension extraordinaire, on préférera un arrangement tout à fait
symétrique, le tout souvent au détriment du service de la maison, et
certainement toujours au détriment du trésor public.
Loin de moi, messieurs, de vouloir contester en aucune
façon le zèle et l’intelligence des hommes chargés chez nous de cette partie de
l’administration. Dernièrement encore j’ai eu l’occasion de visiter
quelques-unes de nos institutions de ce genre, et certainement j’aime à
proclamer que tout m’y a paru fort bien organisé, une fois que l’on se place au
point de vue de ceux qui ont présidé à cette organisation.
Je ne veux pas méconnaître leur mérite, mais ils ont
le tort de se laisser entraîner par cette manie dont je signalais tout à
l’heure les dangers, de se laisser dominer par certaines idées, aujourd’hui en
vogue. Je m’élève contre cette philanthropie du siècle dont le caractère
principal est l’ostentation, et je ne pense pas que le gouvernement doive
continuer à lui fournir ainsi, au détriment du trésor et sans aucun utilité
réelle pour les détenus, les moyens de satisfaite une vanité habilement cachée
sous le masque de l’humanité.
Je vais même plus loin, messieurs, et j’oserais dire
qu’il y a ici plus qu’une question de forme, plus qu’une question
d’économie : d’après moi, il y a ici une question de principes que je
formulerai en ces termes :
Est-il permis à l’administration des pisons de
changer, de son autorité privée, le caractère et la nature des peines, et de
bouleverser ainsi indirectement la législation pénale qui nous régit
encore ?
D’après moi, messieurs, c’est là ce qui se fait sous
nos yeux et sans que la législature se doute le monde du monde de cette
usurpation de ses pouvoirs. En effet, les pénalités établies par nos codes et
appliquées dans nos prisons sont essentiellement corporelles ; cela
résulte de l’esprit de nos lois, et c’est ce que le bon sens nous indique comme
devant être. Eh bien la tendance de la philanthropie moderne, c’est d’effacer
par degrés tout ce que ces peines ont de corporel, afin de les rendre de plus
en plus morales. Ce fait, messieurs, s’explique très bien ; vous savez
tous que les principales modifications du système pénitentiaire, qui ne sont en
définitive que la reproduction des anciens règlements monastiques, nous
viennent en dernier lieu des pays protestants où tout, en religion comme en
morale, se résume dans l’empire de la raison. Cet incessant appel à la raison
individuelle a dû avoir nécessairement et naturellement son écho jusque sous
les voûtes de nos maisons de détention.
Dans le prisonnier on n’a vu que sa raison, on n’a
compté que sur sa raison pour le punir comme pour opérer son amendement moral.
La philanthropie moderne s’est fourvoyée encore en ce
qu’elle n’a vu qu’un côté des peines. Elle n’a vu dans les peines qu’un moyen,
c’est-à-dire le moyen d’arriver à la réforme morale des détenus. Or, les peines
sont aussi un but, elles ont pour but de faire souffrir. Ces souffrances, il
est vrai, doivent être ménagées, de manière qu’elles aient un caractère
d’utilité, de correction pour l’avenir ; mais elles ne doivent jamais
perdre leur caractère de punition, d’expiation pour un passé coupable.
Avec cette tendance doublement erronée et vicieuse, la
philanthropie moderne, dans les intentions de laquelle je reconnais au reste
beaucoup de droiture, a faussé l’esprit de notre législation pénale. Cette
législation est-elle conforme aux besoins de l’époque ? c’est ce que je ne
veux pas examiner pour le moment ; mais je pense que tant que cette
législation n’aura pas été changée par les pouvoirs compétents, ce n’est pas à
l’administration des prisons à se charger de ces changements.
Cette violation indirecte de nos lois pénales, on
pourrait se sentir disposé à la pardonner, si elle avait amené des résultats
incontestablement favorables ; malheureusement personne, je pense,
n’oserait l’affirmer.
Et ici j’ai à signaler une singulière anomalie. Cette
même philanthropie, qui, par une première erreur, n’a vu dans les peines qu’un
but exclusivement moral, a ensuite, par une autre erreur tout opposée, voulu
atteindre ce but par des moyens uniquement artificiels et matériels. Au lieu de
réveiller dans le cœur des coupables les souvenirs religieux de leur
jeunesse ; au lieu de les entourer d’une atmosphère de vertu, on a
froidement discuté des systèmes de réforme tout mécaniques, on a, à grands
frais, changé la disposition des locaux, on a établi des cellules, on a fait
régner partout le silence le plus absolu. En un mot, on ne s’est servi que de
moyens matériels, qui tant qu’ils ne seront pas combinés avec les moyens
spirituels, tant qu’ils seront abandonnés à eux-mêmes, seront toujours et
nécessairement frappés d’une stérilité complète. Messieurs, je ne discuterai
pas devant vous la valeur respective de ces systèmes pénitentiaires ; cet
examen nous mènerait trop loin. D’ailleurs, j’avoue que par eux-mêmes ils sont
tous inefficaces. Messieurs, osons-le dire une bonne fois : ce n’est pas à
la raison du coupable qu’il faut faire un appel, c’est à sa conscience. Cet
appel, ce n’est pas à la bureaucratie administrative à le faire, mais à la
religion. Et cependant que voyons-nous ? Ceux qui sont employés au service
intérieur de nos prisons sont pour la plupart d’anciens militaires dont les
paroles et les actes ne respirent pas en général une scrupuleuse
moralité ; et l’on avouera sans peine que de tels instructeurs sont bien
mal choisis pour contribuer à opérer la réforme morale des détenus.
Les seuls représentants actuels de la religion dans
nos prisons, ce sont les aumôniers ; et encore, il me peine de le dire,
souvent on se méfie d’eux. Les préjugés irréligieux n’ont pas respecté les
verrous. Jusque dans ce séjour du crime, on semble redouter l’influence de ces
hommes de zèle et de dévouement dot l’unique but est de faire rentre, avec la
foi, l’espérance dans le cœur des condamnés.
J’ajouterai que l’administration elle –même, sous
prétexte de conserver intacte la liberté des opinions religieuses, ou dans la
criante futile de voir s’opérer des conversions hypocrites, s’est opposée à la
consolidation de l'influence religieuse, comme su en définitive cette influence
devait servir à autre chose qu’au triomphe de ces principes moraux, seuls
capables d’opérer une réforme véritable dans les déchus.
J’appelle sur ce point l’attention toute spéciale de
M. le ministre de la justice, d’autant plus que je connais ses sentiments à cet
égard. Par conviction personnelle, il saura donner à cette influence religieuse
dans nos prisons toute la liberté, et au besoin tout l’appui qui lui serait
nécessaire. Ce n’est pas ici une question de parti, une affaire de politique
intérieure qui puisse nous diviser ; Et quand ici même on prodige encore
contre cette influence religieuse de banales accusation de domination et
d’empiètement, quand on veut la détrôner partout, j’espère qu’au moins on lui
permettra de régner dans nos prisons.
Parmi les moyens les plus propres à provoquer de la part
des détenus un retour sérieux vers le bien, il fait citer la lecture des livres
d’une moralité qui ne rebute pas, mas qui encourage, qui entraîne ; de
livres où l’on cite l’exemple de condamnés ramenés peu à peu à la vertu être
devenus dignes de l’estime de leurs concitoyens.
On comprend tout de suite que le choix de ces livres
et aussi important que délicat, et je ne sais si l’administration actuelle peut
espérer d’atteindre le but proposé en mettant entre les mains des prisonniers
des livres religieux et moraux, si vous voulez, mais d’une religiosité vague,
et d’une moralité spéculative sans pratique et sans sanction.
Je n’ignore pas que des livres convenables, des livres
appropriés aux prisons ne sont pas fort nombreux. Mais pourquoi le gouvernement
ne mettrait-il pas, par exemple, au concours, tous les ans, ou tous les deux ou
trois ans, un livre de cette espèce, en allouant pour cet objet, 600, 700 ou
1,000 francs ? Pourquoi encore ne pourrait-il pas promettre des subsides
de 200 francs à des personnes qui se proposeraient de publier de livres de
cette catégorie ; je pense que personne ne contestera l’importance des
livres de ce genre. A ceux qui ne la comprendraient pas, je citerai l’exemple
de pays voisins, de pays protestants, où ces sortes de publication se font aux
frais du gouvernement ; (erratum, Moniteur du 25 décembre 1840) je citerai
l’exemple de
Un deuxième moyen d’obtenir l’amendement moral des détenus
et de prévenir les récidives, c’est de faire en sorte qu’à leur rentrée dans la
société, les détenus puissent voir s’offrir devant eux une carrière honorable.
Vous le savez, messieurs, les détenus aujourd’hui,
avec la meilleure volonté du monde, ne peuvent jamais parvenir à effacer la
trace de leurs fautes passées, dans une société égoïste et méfiante, qui les
repousse et les replonge forcément dans l’abîme. Ce résultat est surtout
désolant pour certaines femmes, certains jeunes délinquants qu’un peu de
confiance relèverait, qu’un peu d’appui raffermirait dans le bien.
Pourquoi le gouvernement, s’entendant avec l’autorité
ecclésiastique, ne pourrait-il pas former des « comités de
placement » pour les jeunes libérés ou pour les femmes détenues qui, par
leur conduite en prison, se seraient montrés dignes de cette faveur ? je
suis persuadé que les meilleurs familles de
Enfin, comme un dernier moyen efficace pour opérer
l’amendement moral des détenus, je recommande spécialement à M. le ministre de
la justice de généraliser successivement l’emploi des corporations religieuses
dans nos prisons. Des essais ont déjà été faits, et si les renseignements que
j’ai obtenus sont exacts, on n’a qu’à s’en louer, surtout pour les femmes.
Du reste, je sais d’avance que vu la difficulté que
rencontre aujourd’hui la composition du personnel de ces congrégations
religieuses, il y aura nécessairement parmi les hommes qui en feront partie des
hommes qui ne conviendront peut-être pas sous tous les rapport à cette mission
encore nouvelle dans ce pays. Mais ce qu’elles laisseront à désirer, c’est
surtout pour ce qui regarde l’extérieur et les formes. Mais qu’importe que,
dans leurs rapports avec l’administration, ces hommes ne fissent pas toujours
preuve d’immenses connaissances théoriques et d’une aisance de manière qui,
certainement, ne nuisent pas, mais qui ne sont pas strictement
nécessaires ? Qu’importe que les touristes philanthropes, après avoir
visité nos établissements, n’aient pas à aller vanter chez eux l’exquise
urbanité et les profondes connaissances des membres de ces corporations
religieuses ? Ce n’est pas pour plaire à quelques étrangers, ou pour
flatter l’amour-propre de quelques administrateurs que ces hommes sont là, mais
uniquement pour remplir leur belle et obscure mission : la régénération de
la population des prisonniers. Que le nombre de récidives diminue d’année en
année, et ce sera certainement le plus bel éloge de votre système.
L’introduction de corporations religieuses dans nos
prisons est nécessaire et indispensable, non seulement pour amener d’une
manière durable l’amendement moral des détenus, mais aussi pour réaliser des
économies. Ce personnel est bien plus moral et en même temps plus désintéressé
que le personnel dont on s’est servi jusqu’à présent. Les services de ces
congrégations religieuses ne sont pas mercenaires ; elles n’attendent pas
leur récompense du gouvernement, elles l’attendent de plus haut.
Je vous figurer 3,000 francs au budget pour
« récompenses à accorder aux employés pour conduite exemplaire et pour
acte de dévouement. » Eh bien, voilà encore une somme qui pourrait
disparaître avec le système que je propose.
Les hommes que je recommande au gouvernement
n’auraient pas besoin de récompense pécuniaire pour tenir une conduite
exemplaire. Il ne faudrait pas signaler, de leur part, à la générosité du
gouvernement les actes exceptionnels de dévouement ; toute leur vie, toute
leur carrière serait un long acte de dévouement.
Plus loin, 75,900 francs sont alloués pour
« traitements et tantièmes accordés aux employés sur les produits des
ateliers. » Cette somme disparaîtrait aussi du budget si le service des
ateliers était confié à des corporations religieuses. Cette mesure permettrait
ensuite de réaliser des économies sur les « gratifications accordées aux
détenus », qui s’élèvent à 180,000 francs. (Erratum, Moniteur du 25
décembre 1840) On pourrait les diminuer de moitié une fois qu’on aurait obtenu
des détenus, par une vraie réforme, cette discipline et ce zèle pour le
travail, qu’aujourd’hui on n’obtient d’eux que par des promesses d’argent, qui leur
forment un pécule dont malheureusement ils abusent fort souvent à leur sortie
de prison.
(Moniteur
n°359 du 24 décembre 1840) M. le ministre de la justice (M. Leclercq) – Messieurs, des
considérations qui viennent de vous être présentées, il en est quelques-unes à
la justesse desquelles je rends hommage, mais il en est d’autres qui
contiennent une critique plus ou moins indirecte de l’administration des
prisons, que je dois déclarer n’être pas exactes. L’honorable préopinant a été
induit en erreur sur quelques-unes d’elles. Il s’est plaint de ce que je n’ai
pas remis avec le budget de la justice l’exposé de l’état des travaux dans les
prisons, de ce que je n’ai pas rendu compte de la manière dont se font les
achats de matières premières, les ventes des objets manufacturés et enfin des
espèces de travaux mis en pratique dans l’intérieur des prisons.
Tous les renseignements demandés par la section
centrale lui ont été fournis ; si elle m’en avait demandé qui eussent
trait aux objets, que je viens d’indiquer, je les aurais fournis également. On
sent qu’il est impossible, quand on présente un budget, de s’occuper d’autre chose
que de justifier les dépenses. On ne peut pas entrer dans tous les détails de
l’administration. Au reste, sur tous les points dont a parlé l’honorable
préopinant, je serai toujours prêt à donner les renseignements qu’on pourrait
désirer.
L’honorable membre a critiqué la suppression des
prisonniers employés dans les bureaux. Cette suppression était de toute
nécessité. L’expérience a démontré que l’emploi des prisonniers dans les
bureaux de l’administration entraîne les plus graves abus, que ces prisonniers sont
continuellement en relations avec l’extérieur, que ces relations s’étendent aux
autres détenus et qu’elles portent la plus grave atteinte à la discipline.
C’est l’expérience et l’expérience seule qui a fait supprimer ce mode d’emploi
des prisonniers.
L’honorable préopinant a critiqué aussi la
substitution des états imprimés aux états écrits à la main. S’il avait fallu,
après avoir supprimé les prisonniers employés, faire faire ces états par les
employés libres, la dépense eût été beaucoup plus considérable. Ce n’est
qu’après avoir comparé les deux espèces de dépenses que l’un a été substitué à
l’autre. L’augmentation de dépense, du reste, ne résulte pas seulement de cette
substitution, elle a pour seconde cause la création d’un nouveau pénitencier,
qui exige des frais d’impression plus considérables.
Il a critiqué aussi le luxe des dépenses dans les
bâtiments des prisons. Messieurs, les dépenses de construction des prisons se
font avec la plus grande économie, on y apporte le plus grand soin, afin de ne
pas aller au-delà de ce que le service exige. Les devis sont d’abord soumis à
la commission des prisons, qui est composée de citoyens honorables servant
l’Etat gratuitement et appartenant aux classes les plus distinguées de chaque
localité. Cette commission examine ce devis avec le plus grand soin, il est
transmis avec son avis au gouvernement de la province, qui le soumet encore à
l’examen des ingénieurs. Toutes précautions sont donc prises pour éviter le
luxe et réduire la dépense au strict nécessaire.
Vient enfin le reproche grave qu’on a dirigé contre
l’administration. On a dit qu’elle voulait les dispositions de la loi pénale en
changeant tout à fait le caractère des peines. Messieurs, il faut avoir oublié
les dispositions de la loi pénale pour nous adresser une pareille critique.
Cette loi ne dit rien sur le genre des peines, elle prononce les peines de
l’emprisonnement, de la réclusion et des travaux publics, sans dire comment
seront infligés l’emprisonnement, la réclusion et les travaux publics. Il ne peut
dont y avoir eu aucune violation de la loi pénale, aucun changement introduit
dans le caractère des peines.
Quelques mots vous prouveront que les changements
introduits sont des changements heureux dont personne ne peut se plaindre.
Les prisons, je ne parle pas des prisons de passage,
se divisent en deux classes : la première, qui est destinée aux détenus et
aux individus condamnés à moins de six mois d’emprisonnement, et la seconde qui
est destinée aux condamnés à plus de six mois d’emprisonnement, à la réclusion
et aux travaux forcés. Quant aux prisons pour les prévenus et les condamnés à
six mois d’emprisonnement, aucun changement n’a été introduit dans le caractère
de la pénalité, ces prisons sont restées ce qu’elles étaient, sauf qu’on y a
introduit plus de propreté et plus d’ordre. Sous ce rapport, il n’y a pas la
moindre critique à nous adresser. Dans quelques-unes de ces prisons, on a
introduit le travail volontaire, ce qui est une amélioration et non une
aggravation de peine, puisque le travail est libre.
Dans les prisons où sont détenus les condamnés à plus
de six mois d’emprisonnement, et où, d’après la loi pénale, ils doivent être
assujettis au travail, le changement s’est borné à l’introduction d’occupations
régulières et de nature à relever au lieu d’abaisser la dignité de l’homme,
pour me servir d’une expression de l’honorable préopinant ; tandis que les
travaux forcés, auxquels les détenus étaient soumis il y a une trentaine
d’années, produisaient un effet tout contraire ; le changement, en un mot,
n’a consisté que dans plus d’ordre, plus de propreté, plus de régularité et un
meilleur choix de travaux, et, sous ce rapport, non plus que sous aucun autre,
je ne comprends pas qu’on puisse prétendre qu’on a modifié quoi que ce soit le
caractère de la pénalité.
L’honorable préopinant a soutenu que la réforme des
prisons était une réforme mécanique plutôt que morale. Pour moi, messieurs,
j’ai toujours entendu dire que le travail était un moyen d’amélioration morale
et non une simple réforme mécanique. J’ai toujours ouï dire et je le crois
fermement, qu’un des moyens d’arrêter la corruption des hommes est de les
occuper constamment. J’ai toujours entendu dire aussi que c’était un moyen de
réforme morale et non mécanique que de séparer les dépravés de ceux qui ne le
sont point ou même de séparer les dépravés entre eux, parce que la dépravation
est contagieuse et s’accroît par le contact. C’est encore ce que fait
l’administration autant que le lui permettent les locaux et les crédits dont
elle dispose.
On a introduit l’emprisonnement individuel de nuit
quand on l’a pu, et il est à regretter qu’il n’existe pas dans toutes nos
grandes prisons. Cette séparation, on l’établit de jour, en empêchant la
communication entre les détenus et en leur prescrivant le silence. C’est là, je
le répète, une réforme morale et non une réforme mécanique.
Malheureusement la séparation n’est pas assez complète
pour obtenir toutes les améliorations qu’on pourrait désirer. Mais on ne peut
pas soutenir que ce soit là une réforme tout à fait mécanique.
J’arrive enfin à ce qu’on a dit de la religion. Toutes
les prisons ont des aumôniers et les ordres sont donnés pour qu’ils reçoivent
considération et respect de la part de tous les employés. La plus grande
liberté pour l’exercice de leur mission leur est accordée. Nous aurions désiré
pouvoir introduire partout les congrégations religieuses, dont nous
reconnaissons les services. Nous l’avons fait quand nous l’avons pu, mais ces
congrégations ne se créent pas en un instant. A Namur, il y a une congrégation
de femmes, et nous avons recours à leur dévouement avec reconnaissance ;
quant aux hommes, on n’a pas pu employer ce moyen, il n’y a pas de
congrégations d’hommes en Belgique assez avancées pour rendre les services dont
nous aurions besoin ; il en existe en France, mais elles sont trop
éloignées et pas assez nombreuses pour qu’on puisse attirer chez nous
quelques-uns de leurs membres ; l’avenir, il faut l’espérer, nous fournira
ce qui nous manque encore ; déjà même nous avons pu faire l’essai de
corporations religieuses d’hommes pour soigner les malades dans l’infirmerie
des prisons de Vilvorde et de Saint-Bernard ; le temps nous promet
d’autres progrès ; mais pour le moment nous avons dû nous arrêter, et il
n’y a aucune espèce de reproche à adresser au gouvernement en ce qui concerne
la religion ; il fait tout ce qu’il peut, il se met en rapport avec les
ordinaires des diocèses et donne des traitements aussi forts que possible pour
avoir de bons ecclésiastiques. Et ces ecclésiastiques trouvent toute liberté,
trouvent considération et respect auprès des employés.
On a parlé de livres immoraux dont on permettrait la
lecture dans les prisons. Il est vrai qu’on essaye d’y former des
bibliothèques ; mais les livres sont examinés avec le plus grand soin par
les commissions d’administration, ce sont elles qui sont appelées à les
indiquer et ces bibliothèques sont assez bien composées.
J’ai vu moi-même de ces livres et je puis vous dire
que ce ne sont pas, comme l’a dit l’honorable préopinant, tous livres d’une
religiosité vague, il en est et en nombre suffisant, dont les principes sont
ceux de la religion positive, tels que des livres de prière et des catéchismes.
Je ne crois pas qu’on puisse appeler cela des livres d’une religiosité vague.
Je crois avoir rencontré les critiques que l’honorable
préopinant a faites de l’administration des prisons, et avoir démontré que ces
critiques n’étaient pas fondées.
(Moniteur
n°358 du 23 décembre 1840) M. Van Cutsem – Messieurs, si j’ai demandé la parole sur le
chapitre X du budget de la justice, c’est pour vous soumettre quelques
réflexions qui ont pour but de donner des moyens d’existence à la classe
ouvrière ; car il ne s’agit pas d’augmenter son bien-être matériel, je ne
veux vous parler que de mesures qui peuvent la mettre à même de pourvoit à ses
premiers besoins.
Chacun de nous sait que l’une des principales branches
de notre richesse nationale, l’industrie linière, se débat depuis plusieurs
années contre la concurrence que lui fait la fabrication anglaise, et si nous
ne redoublons pas nos efforts, il est bien à craindre que les Flandres perdent
cette grande prospérité dont elles ont toujours joui, et qu’on se demande un
jour : Qu’est devenu le bien-être de cette contrée industrielle ?
Elle s’était relevée de bien des crises ! Elle avait trouvé moyen de
prospérer même sous les plus mauvais gouvernements imposés par la politique
étrangère ; mais les événements de 1830 sont survenus, et
L’industrie linière a vu depuis quelques années
contrarier ses opérations par l’exportation de ses lins, par l’importation des
fils étrangers et par la diminution d’exportation de ses toiles fabriquées :
lorsque le ministère aura reçu le rapport de la commission qu’il a nommée pour
constater la position de l’industrie linière, et rechercher les moyens de la
faire sortir de l’état de malaise dans lequel elle se trouve aujourd’hui, il
sera convaincu, j’ose l’espérer, que le gouvernement doit prélever des droits
sur les fils étrangers à leur entrée en Belgique, et sur les lins à leur sortie
de notre pays ; c’est parce que j’ai cette idée que je prierai cette
commission de terminer le plus tôt possible ses travaux ; car, je le
répète, l’industrie linière a besoin qu’on adopte en sa faveur les mesures dont
je viens de vous parler : si on les prend, je prédis que cette ancienne
industrie nous restera malgré tous les efforts que les Anglais font pour nous la
ravir ; les consommateurs, qui prennent de nouveau nos produits, les
Espagnols, qui dédaignent déjà les fabricats anglais, viendront
s’approvisionner comme autrefois dans notre Belgique, et si la chambre avait
voté le crédit demandé par le ministre des affaires étrangères pour nommer un
consul à Cadix, ce consul aurait aussi prouvé aux consommateurs de ce pays que
nos fabricats sont d’une toute autre nature que les toiles anglaises et ceux-ci
auraient été, sans aucun doute, encore plus vite désabusés qu’ils ne le seront
à présent en faisant encore quelques expériences à leur préjudice. Mais puisque
la commission minière n’a pas encore fait son rapport, puisque le gouvernement
n’a pas pu faire, à notre antique industrie, le bien qu’il voulait, en nommant
un consul qui l’aurait défendue dans un pays étranger, je viens aujourd’hui
prier le ministère de ne pas susciter lui-même à nos malheureux tisserands et à
nos fileuses une concurrence en Belgique, en faisant filer et tisser dans nos
maisons de force et de détention des fils et des toiles, qu’il vend ensuite sur
les mêmes marchés que nos industriels. Le gouvernement a cru qu’en ne faisant
que des toiles propres à l’usage de l’armée, il n’aurait fait aucun tort à nos
tisserands, mais il a été mal informé à cet égard, car il y a plusieurs
localités, entre autres à Ath, où on ne s’occupe que de la fabrication des
grosses toiles, et qui depuis qu’on travaille les mêmes objets dans les prisons
de l’Etat, ont perdu entièrement cette production ; la ville d’Ath, qui
est le centre du marché de toile de cette espèce, a, après avoir réclamé
longtemps contre cette fabrication, entièrement perdu son marché de toile.
Tout le monde comprendra avec moi que si la lutte que
nos tisserands ont a soutenir contre l’Angleterre, contre cette Angleterre qui,
aidée de ses grands capitaux, de ses vastes débouchés, des encouragement de son
gouvernement et de quelques perfectionnements mécaniques, est menaçante, que
celle qu’ils ont à soutenir contre leur propre gouvernement n’est pas moins
difficile en même temps qu’elle est plus pénible, parce que le salaire des
travailleurs de l’Etat est beaucoup moins élevé que celui des ouvriers libres
et qu’il le met à même de fournir ses produits à beaucoup plus bas prix, que ne
peuvent le faire ceux qui ont souvent une femme et de nombreux enfants à
nourrir.
La concurrence qui existe aujourd’hui entre le
gouvernement et les tisserands fait déjà le plus grand tort à ces derniers, et
cependant on les menace encore d’augmenter cette concurrence en établissant de
nouveaux métiers pour tisser des toiles de toute espèce dans une prison de
l’Etat, qui se trouve au centre de la fabrication de nos toiles ; si le
gouvernement pouvait avoir de pareilles intentions, je le conjure de n’en rien
faire, s’il ne veut voir peupler toutes ses maisons de correction de
tisserands, que l’excessive misère pourrait porter au crime ; car, enfin,
le besoin fait parfois oublier tout autre sentiment.
On me répondra peut-être que les prisonniers ne
travailleront que les toiles à envoyer à l’étranger ; cette objection
pourrait être fondée, si la consommation intérieure usait tous nos
produits ; mais puisque nous savons qu’elle n’en prend qu’une partie, il
est évident que c’est justement là où nous ne devrions pas rencontrer les fabricats
de l’Etat, qu’ils viennent se mettre en lutte avec nous, et nous forcer à
donner à meilleur marché nos produits, d’où la conclusion, qu’à l’intérieur
comme à l’étranger l’Etat nous fait une concurrence qui nous est également
nuisible, et à laquelle il faut partant mettre fin. Un Etat ne doit jamais se
faire négociant ou industriel, il doit se borner à encourager le commerce et
l’industrie ; que notre gouvernement se convainque bien de ces vérités, et
alors il ne se mettra plus en lice avec nos négociants et nos
industriels ; il ne cherchera pas à gagner de l’argent, mais il voudra
procurer au pays l’occasion d’en gagner en y introduisant des fabrications
nouvelles ; et puisqu’il faut que nos prisonniers travaillent pour devenir
meilleurs et pour qu’ils supportent la vie, pourquoi ne les occupe-t-on pas à
produire des fabricats qui sont à peine connus en Belgique, afin de faire
connaître ensuite à nos industriels que tels produits peuvent s’obtenir avec
avantage dans notre pays en les travaillant plutôt de telle manière que de
telle autre ? Je prie donc M. le ministre de la justice de peser mûrement
les considérations que je lui soumets en même temps qu’à cette assemblée, et
j’ose espérer qu’il accordera au pays la faveur que je réclame pour lui, celle
de ne plus faire pour nos travailleurs une concurrence du gouvernement même.
On a dit dans cette assemblée que les prisonniers
étaient trop bien traités dans les maisons de détention de l’Etat ; ceux
qui tiennent un pareil langage n’ont sans doute pas souvent visité les
détenus ; quant à moi, qui par profession surveille les maisons de
détention, je puis vous donner l’assurance la plus formelle, que les
prisonniers ont dans les lieux où ils sont séquestrés tout juste de quoi
pourvoir aux besoins de la vie animale, et cela est tellement vrai, que lorsque
je donne cent billets à ceux qui viennent me demander l’autorisation de les
visiter, il y en a quatre-vingt-dix-neuf qui sont chargés de pain et de pommes
de terre pour alimenter les détenus qui se plaignent de ne pas avoir une
nourriture assez abondante.
Si les orateurs qui ont trouvé que les détenus étaient
trop bien traités dans les maisons de détention, avaient eu connaissance de ces
faits, ils n’auraient pas blâmé les soins que le gouvernement prend d’une
classe malheureuse, quoique coupable de la société ; s’ils avaient les
sublimes principes des criminalistes les plus distingués, ils trouveraient
comme eux, que le criminel doit être séparé de ses concitoyens pour le mettre
hors d’état de leur nuire, et ils ne voudraient pas, comme ils le demandent
aujourd’hui, que l’on ajoutât de nouvelles privations à celles de la liberté.
Ils ont été bien téméraires aussi ceux qui ont blâmé
l’usage que le gouvernement du Roi fait du droit de grâce, quand pour le critiquer,
ils se sont faits l’écho de quelques bruits populaires ; et ce n’est pas
dans les lieux publics qu’on peut s’assurer, si c’est à tort ou à raison que le
Roi a fait grâce à un condamné, c’est par l’examen des pièces de l’instruction
qui a donné lieu à la condamnation qu’on peut voir, si le Roi a bien ou mal
fait de commuer les peines prononcées contre un condamné.
Quant à moi, je suis convaincu, pour ce qui concerne
les crimes perpétrés dans mon arrondissement, que le gouvernement a fait un
noble et digne usage du droit de grâce en accordant aux condamnés la remise
d’une partie de la peine qu’ils avaient encourue et que si l’honorable comte de
Mérode avait été chargé de statuer sur leur sort, lui, qui a une âme
compatissante, aurait fait comme le gouvernement ; qu’il n’aurait pas
voulu que des hommes qui n’auraient volé que des pommes de terre ou du pain
pour nourrir leurs femmes et leurs enfants passassent le reste de leurs jours
en prison, alors encore qu’il était constant qu’ils n’avaient volé que parce
que le manque d’ouvrage les empêchait de se procurer un peu de nourriture.
J’ai dit.
M.
Dedecker
– Je ne puis pas laisser sans réponse les observations de M. le ministre de la justice.
Je serais désolé que les membres du gouvernement vissent dans mes paroles la
moindre intention de leur adresser un reproche personnel. J’ai critiqué la
tendance de l’administration des prisons depuis plusieurs années. Je sais qu’on
ne peut pas improviser des modifications à un système établi, mais je crois
qu’il est du devoir d’un député consciencieux d’avertir le gouvernement quand
il croit qu’il suit une mauvaise voie et de signaler les abus qui viennent à sa
connaissance.
J’avais exprimé le désir que le ministre de la justice
vous remit un état plus ou moins détaillé des travaux exécuté dans les prisons.
Il me répond que la section centrale ne l’a pas demandé. Ce fait est possible.
Mais je ne sais pas si le gouvernement n’est obligé de vous fournir des
renseignements sur les parties essentielles de son administration, qu’au fur et
à mesure que la section centrale les demande, et si, par égard pour la chambre,
il ne devrait pas nous donner spontanément ces renseignements. Je suis persuadé
que ce n’est de la part de M. le ministre qu’un oubli ou peut-être l’intention
de ne pas s’écarter de la marche tracée par ses prédécesseurs.
Lorsque je me suis élevé contre la demande
d’augmentation provenant de la substitution d’employés libres aux employés
détenus, j’ai été mu par cette considération morale qu’il faut autant que
possible relever les détenus à leurs propres yeux. Je sais fort bien que ces
emplois confiés à des détenus avaient donné lieu à des communications avec le
dehors. Mais cela tenait à ce que la surveillance n’était pas bien exercée, et
cela ne prouve pas la nécessité de grever de nouveau le trésor en remplaçant
tous ces employés par des employés libres.
De la note communiquée par M. le ministre à la section
centrale, il résulte qu’il y a une augmentation de dépenses d’environ cinq
mille francs pour l’impression d’états, qui jusqu’ici se faisaient à la main.
Si les écritures étaient encore faites par des détenus employés dans les
bureaux et travaillant gratuitement, je concevrais que M. le ministre demandât
une augmentation pour faire imprimer ces états. Mais maintenant que les
employés détenus sont remplacés par des employés libres rétribués, je ne
conçois pas cette augmentation des frais d’impression. Evidemment il en coûte
moins pour faire imprimer que pour faire faire des écritures par les employés
libres rétribués.
Je me suis élevé contre le danger de la manie du luxe.
Cette manie se relève dans la construction de nos prisons. Dans la maison de
Gand, on a construit tout un quartier nouveau, à l’emploi duquel on a renoncé
jusqu’à présent. Dans une autre maison que j’ai eu occasion de voir, je me
trouvais avec le directeur dans une salle immense comme peut-être il n’en
existe pas en Europe. Le directeur m’a avoué que les besoins du service exigeaient
que cette salle fût divisée en deux. Mais le besoin voulait-il dire, de renoncer au plaisir
d’avoir une salle d’une si grande étendue et de ne plus voir figurer sur le
calepin des touristes, le chiffre indiquant le nombre des mètres de sa longueur !
Il me semble que l’on peut dire que c’est là un luxe mal placé.
M. le ministre de la justice (M. Leclercq) – Où est cette salle ?
M. Dedecker – Par motif de délicatesse, je n’aime pas de le dire.
M. le ministre de la justice (M. Leclercq) – Comment voulez-vous que
je puisse répondre ? Il faudrait alors ne pas critiquer.
M. Dedecker – Lorsque j’ai dit que la philanthropie moderne
cherche à changer la nature et le caractère des peines, je savais fort bien que
notre législation pénale n’indique pas d’une manière nette et précise ce
caractère et cette nature. Mais il est de fait que toute peine doit être
corporelle.
J’ai dit (et je maintiens mon dire) que la tendance de
cette philanthropie est d’ôter aux peines ce qu’elles ont de corporel pour y
substituer des peines morales. J’ai dit ensuite qu’il y a anomalie à n’employer
pour la réforme morale des détenus que des moyens purement mécaniques et artificiels.
M. le ministre a dit qu’il avait employé le travail comme grand moyen de
moralisation, et que ce n’était pas certainement un moyen mécanique. Je pense
que le travail est au contraire un moyen très mécanique, très matériel. Sans
doute il tend à opérer un effet moral ; mais ce n’en est pas moins un
moyen mécanique. De même la séparation qui tend à un résultat moral est un
moyen mécanique.
Je suis loin de contester les avantages des moyens
mécaniques. Je suis le premier à dire qu’ils sont bons en eux-mêmes. Mais j’ai
dit que s’ils sont bons, combinés avec d’autres moyens, abandonnés à eux-mêmes,
ils seront toujours stériles. Je persiste dans cette opinion.
Lorsque je vous ai indiqué quelques moyens que je
croyais les plus propres à opérer un heureux changement chez les détenus,
lorsque j’ai signalé le danger qu’il y a à mettre entre leurs mains des livres
qui ne leur conviennent pas, je n’ai pas dit que ce fût des livres
« immoraux. »
J’ai dit que la plupart des livres qu’on met entre
leurs mains sont des livres religieux et moraux, mais que l’on n’y trouve
qu’une religiosité vague, qu’une moralité spéculative. Je maintiens mon dire.
La plupart de ces livres sont traduits de l’allemand ou de l’anglais : ce
ne sont que des livres déistes, des livres protestants.
Je crois pouvoir borner là mes observations en réponse
au discours de M. le ministre de la justice.
M. Delfosse – Permettez-moi, messieurs,
de vous entretenir un instant de l’état déplorable dans lequel se trouvent les
prisons de Liége, et de la nécessité d’en construire une neuve.
Je ne puis mieux faire, messieurs, pour rendre cette
nécessité évidente pour la chambre comme elle l’est pour moi, que de donner
lecture de deux extraits de rapports, adressés à M. le ministre de la justice,
par la commission administrative des prisons de Liége ; je vous
communiquerai aussi quelques lignes d’une lettre adressée au même ministre par
notre administration communale.
Voici ce que la commission administrative des prisons
de Liége écrivait le 20 janvier 1836 :
« Bien que les demandes réitérées que nous avons
faites afin qu’une prison soit construite à Liége aient été jusqu’ici sans
résultat, c’est pour nous un devoir de le renouveler, devoir envers les détenus
dont le bien-être et l’amendement nous sont confiés ; devoir envers
nous-mêmes, à qui il importe de décliner la responsabilité de tous les abus et
de tous les maux que produit l’état chaque jour plus déplorable de nos
prisons ; devoir envers l’administration enfin, dont la responsabilité
morale est gravement engagée, en même temps que ses intérêts sont compromis.
« La nécessité d’abandonner les locaux actuels a
été reconnue par toutes administrations qui se sont succédé en Belgique. Il
est, en effet, impossible de ne pas être frappé des inconvénients qu’ils
présentent. Défaut d’appropriation et vétusté des bâtiments, constructions
vicieuses, voisinage d’égouts infects ; cellules étroites, manquant d’air
et qu’il faut chauffer séparément ; impossibilité d’entretenir la propreté
et la salubrité dans les chambres dont les murs et les planchers sont infectés
de vermine ; absence presque complète de classification des détenus
obligés de coucher à deux dans le même lit ; séparation des trois prisons,
dont celle des femmes, où les aliments sont préparés, est à une grande distance
des deux autres ; difficulté d’exercer une bonne surveillance sur des
prisons qui n’offrent aucun ensemble ; personnel nombreux et dont les
traitements excèdent de beaucoup ceux des employés de la prison de Bruxelles,
où la population est double ; dépenses considérables d’entretien et de
réparations qui demeurent toujours imparfaites ; telles sont quelques-unes
des suites funestes du séjour des détenus dans des locaux que l’humanité
s’afflige de voir servir encore aujourd’hui de prison, dans l’une des premières
villes de
Voici ce que la même commission écrivait le 29 janvier
1840 :
« Depuis plus de dix ans, nous n’avons cessé
d’appeler l’attention de l’administration sur l’état chaque jour plus
déplorable de nos prisons, sur la nécessité de les abandonner et d’en
construire de neuves. Nos représentations à ce sujet semble être demeurées sans
résultat ; cette année encore s’est écoulée sans qu’aucune communication
nous ait été faite à cet égard par le gouvernement. Nous ne pensions pas que de
nouvelles réclamations, adressées aujourd’hui, auraient un meilleur sort. Elles
seraient d’ailleurs inutiles. Nous n’avons plus rien à apprendre à
l’administration. Tous les maux auxquels le physique et le moral de nos détenus
sont exposés sans relâche, l’administration les connaît. Nous avons pris soin,
à toute occasion, de l’en informer. Nos devoirs, nos moyens, notre
responsabilité s’arrêtent là. Nous pouvons considérer notre tâche comme
accomplie. Nous déplorons amèrement la malheureuse situation de nos
prisonniers ; mais nous l’avons assez souvent exposée, pour nous croire en
droit d’en décliner entièrement la responsabilité.
On lit en autre dans une lettre adressée à M. le
ministre de la justice par l’administration communale de Liége :
« L’état de la prison de Liége est
déplorable ; la nature du local, ainsi que sa distribution, rendent
impossible toute amélioration, matérielle ou morale. »
Vous voyez, messieurs, par les extraits dont je viens
de vous donner lecture que si jamais chose fût nécessaire, urgente, c’est la
construction d’une prison neuve à Liége. Il y a dix ans que cette urgence
existe, il y a dix ans qu’elles est signalée avec énergie par les autorités
locales.
M. le ministre de la justice, désireux de mettre un
terme à un état de chose dont il a pu, mieux que personne, apprécier les
inconvénients, puisque la commission administrative des prisons de Liége a eu
l’honneur de le compter parmi ses membres, a déjà pris quelques mesures dont on
doit lui savoir gré ; il a fait l’acquisition d’un terrain qui paraît
convenir sous tous les rapports, acquisition conditionnelle bien entendue, et
qui n’aura son effet qu’autant que les fonds nécessaires pour la construction
d’une prison neuve à Liége seront votés par la législature avant la fin du mois
de janvier
L’appel fait par M. le ministre de la justice a été
entendu. L’administration communale de Liége a consenti à intervenir dans la
dépense pour une somme de 50,000 francs ; l’administration provinciale a
consenti à y intervenir pour une somme double. Il y a donc lieu d’espérer que
rien n’arrêtera plus M. le ministre de la justice dans l’exécution de son
projet, et que le concours des chambres ne lui manquera pas pour ce que je
considère comme l’accomplissement d’un devoir d’humanité.
M. Demonceau – Dans la discussion
générale, j’ai signalé à M. le ministre de la justice l’état de la prison de
l’arrondissement de Verviers. Il y avait eu un plan arrêté pour exécuter
différents changements à cette prison. Des sommes considérables avaient été
affectées pour cet objet. Mais il n’a rien été fait jusqu’à présent par les
motifs donnés dans la discussion générale.
Je n’en dirai pas davantage, j’invoquerai seulement le
témoignage de M. le ministre des travaux publics ; il a vu en quel état se
trouvait la prison de Verviers.
(Moniteur n°359 du 24 décembre 1840) M. le ministre de la justice (M. Leclercq) – Messieurs, je
m’expliquerai aussi brièvement que possible sur ce que viennent de dire les
quatre honorables membres qui ont pris successivement la parole.
Je reconnais toute la droiture des intentions de
l’honorable M. Dedecker ; mais je ne puis admettre la critique qu’il a
dirigée contre les prisons, lorsqu’il a dit qu’on pouvait se dispenser de
supprimer les prisonniers employés dans ces établissements, en exerçant sur eux
une surveillance plus active. Je dirai que cette surveillance a été exercée
autant qu’il était possible, et que ce n’est qu’à la dernière extrémité,
lorsqu’on a vu qu’on ne pouvait supprimer les abus qui résultaient de cet état
de choses qu’on s’est décidé à adopter d’autres mesures. Ce n’est d’ailleurs
qu’après avoir consulté et reçut les avis des commissions administratives, que
l’administration centrale a pris une détermination.
L’honorable membre vous a dit qu’il ne concevait pas
qu’on fît imprimer des états que les employés libres pouvaient écrire. Mais
pour cela il faut beaucoup d’employés libres et la dépense serait plus
considérable que celle qui résulte des imprimés.
On vous a cité, comme un exemple de luxe qui règne
dans nos prisons, ce qui s’était passé à Gand, et dans une autre prison, où il
y avait une grande salle qu’on aurait pu partager en deux.
Quant à ce qui s’est passé à Gand, il n’y a pas de
luxe. On a essayé le système cellulaire ; on a voulu introduire à Gand ce
système, que depuis on n’a pas encore reconnu convenable d’admettre. Mais les
cellules, si elles ne sont pas employées à cette fin, pourront l’être pour la
séparation des détenus pendant la nuit. Il n’y a donc pas eu de luxe, il n’y a
eu tout au plus qu’un essai prématuré.
Quant à la salle dont on a parlé, je ne sais s’il y a
avantage à avoir dans la prison où elle existe, une salle de travail au lieu de
deux. Si cette prison m’avait été indiquée par l’honorable M. Dedecker,
peut-être aurais-je pu donner des explications sur les motifs qu’on avait eus
de ne faire qu’une seule salle. Mais à défaut d’indication de sa part, il me
semble qu’il ne peut critiquer comme une affaire de luxe, ce qu’il ne me met
pas à même d’expliquer.
Il vous a dit qu’il n’y avait plus de peines
corporelles dans les prisons. Je m’en rapporterai, à cet égard, à ce que vous a
dit l’honorable M. Van Cutsem. Je persiste à dire que le système de nos prisons
n’est pas trop doux ; je dirai même qu’il est dur. Que certains hommes
s’habituent à la longue à le supporter, qu’ils s’accoutument à la vie des prisons,
ce sont là des cas exceptionnels. Mais personne ne peut dire que ce régime soit
de nature à inspirer le désir d’entrer en prison.
Je ne reviendrai pas sur ce que j’ai dit relativement
aux prétendues réformes mécaniques. Je sais qu’il y a des moyens mécaniques de
réforme, mais la réforme n’en est pas moins morale, et sous ce rapport, elle ne
peut être critiquée. On vous a dit que ces moyens mécaniques étaient seuls
employés. Je crois avoir prouvé le contraire en vous disant que la religion
était également au nombre de ceux qu’on employait et que si on n’avait que des
aumôniers dans les prisons, c’était parce qu’il n’existait pas dans le pays de
corporations religieuses assez avancées pour coopérer avec eux à l’amendement
des prisonniers ; et encore cela n’est-il vrai que pour les prisons
d’hommes ; car, pour les prisons de femmes, nous y avons introduit des
sœurs de charité. Il n’y a donc nul reproche à adresser à l’administration,
l’on ne peut exiger qu’elle emploie ce qui n’existe pas.
Quant aux livres, j’ai dit qu’il y avait des livres de
religion positive ; mais on ne peut pas toujours s’en tenir aux livres de
religion ; il faut des livres d’histoire, des récits qui partagent les
loisirs des prisonniers.
J’en viens à ce qu’on a dit sur la concurrence que le
travail des prisons faits à l’extérieur. C’est une chose que nous évitons
autant que possible ; pour fixer le prix des matières fabriquées, on fait
le compte du prix de revient, puis on ajoute 10 p.c., et je puis dire qu’il n’y
a pas, sous ce rapport, aucune concurrence dangereuse. Car une grande quantité
des objets fabriqués dans les prisons est vendue au département de la guerre,
et je suis souvent en contestation avec mon collègue, qui prétend qu’il peut
avoir ces objets à meilleur marché dans le commerce, qu’ils ne lui sont livrés
par les prisons. Cette concurrence est un inconvénient qui m’avait frappé aussi
bien que mes prédécesseurs et que nous avons toujours cherché à éviter.
Quant à la prison de Liége, je n’ignore pas la
situation fâcheuse où elle se trouve ; elle a attiré toute mon attention à
mon entrée au ministère. Elle a fait l’objet d’une correspondance suivie entre
mon département et les administrations provinciale et communale. Si je ne suis
pas encore arrivé à un résultat, c’est par suite de difficultés survenues
relativement à la part contributive de la ville et de la province de Liége dans
la dépense.
La ville s’était d’abord refusée à voter un subside,
on n’avait voté qu’un subside insignifiant, tandis qu’elle retirait de la construction
d’une nouvelle prison un avantage considérable. On devait lui remettre les
terrains que couvrent les anciens bâtiments, et la démolition de ces bâtiments
était un moyen d’embellissement pour la ville. Aujourd’hui elle a reconnu
l’avantage qu’elle en retirerait ; elle a offert un subside, et sous ce
rapport j’espère que nous serons bientôt d’accord.
Quant à la province, il n’en est pas de même. La
province a consenti à la construction, mais elle a accordé pour subside les
centimes qu’elle a payés pour la construction du canal de Bois-le-Duc, tandis
que vous savez qu’il existe une loi écartant les réclamations de la province de
Liége sur ces centimes, jusqu’à ce que la liquidation d’Utrecht soit terminée,
et qui décide que jusque-là ces centimes resteront dans les caisses de l’Etat
et à la disposition de l’Etat. Ce subside n’en était donc pas un.
M. Delfosse – Je demande la parole.
M. le ministre de la justice (M. Leclercq) – Je n’entends nullement me
prononcer sur la question, mais ces sommes ne sont pas à la disposition de la
province et ne peuvent faire l’objet d’un subside.
Du reste, j’espère que nous pourrons lever ces
difficultés et arriver bientôt à un résultat satisfaisant.
Quant à la prison de Verviers, tout était prêt, on
allait mettre la main à l’œuvre, quand le chemin de fer est venu passer au
milieu du terrain que l’on avait choisi. Il a bien fallu penser à un autre
terrain. C’est ce qui a causé le retard dans les travaux. (La clôture ! la clôture !)
(Moniteur n°358 du 23 décembre 1840) M. Raikem – Je n’ai que quelques mots à dire, relativement à la prison de Liége, sur laquelle un honorable membre a attiré l’attention de M. le ministre de la justice.
Depuis plusieurs années, j’avais appelé l’attention du gouvernement sur cette prison, en exposant l’état déplorable dans lequel elle se trouvait. Il résulterait de cet état que les personnes qui y étaient simplement détenues par mesure de prévention, sans avoir été jugées, et dont, par conséquent l’innocence était présumée jusqu’à condamnation, se trouvaient dans un état plus déplorable dans cette prison que ceux qui, ayant été condamnés, étaient renfermés dans une prison centrale.
Il m’a paru qu’à cette époque, ces motifs avaient fait quelque impression ; aussi l’honorable M. Ernst s’était-il occupé de cet objet. D’un autre côté, le conseil provincial de Liége avait appelé l’attention du gouvernement sur l’état déplorable dans lequel se trouvaient les prisons de cette ville. Si ma mémoire est fidèle, il avait même fait l’offre de subvenir pour une partie à la construction d’une prison nouvelle.
L’affaire se trouvait déjà en instruction, lorsque je suis entré au ministère de la justice ; et un de mes premiers soins fut de m’occuper de cet objet, de demander au conseil provincial pour quelle somme il pourrait subvenir. C’était, autant que je puis me le rappeler, à la session de 1839.
Mais on répondit alors qu’il fallait préalablement voir quels seraient les plans qui seraient adoptés par le gouvernement. Il y avait donc nécessité de s’occuper de ce plan. On s’en est occupé le plus tôt qu’il a été possible. Un terrain, sur l’acquisition duquel les autorités avaient été consultées, et qui avait été trouvé le plus convenable, avait été acheté sous condition ; parce que dans l’intervalle il fallait consulter les autorités provinciale et communale sur le point de savoir jusqu’à concurrence de quelle somme l’une et l’autre interviendraient dans la dépense ; et j’avais la confiance que, vu l’état déplorable dans lequel se trouvait la prison, la législature s’empresserait de concourir pour la somme nécessaire à fournir de la part du gouvernement.
Tel était l’état dans lequel se trouvait ce qui est relatif à cette prison. Vous voyez qu’en aucun temps on n’a cessé de s’en occuper, et je suis bien persuadé que M. le ministre de la justice y apportera toute sa sollicitude et employer tous ses efforts pour que bientôt il soit construit à Liége une prison convenable, et qui vienne remplacer celle dont le triste état est reconnu.
M. Delfosse – Je n’ai entendu adresser de reproche à personne, et j’ai une entière confiance dans les intentions de M. le ministre de la justice en ce qui concerne la prison de Liége ; je dois cependant répondre à ce que M. le ministre a dit du subside voté par le conseil provincial. M. le ministre vous a dit que ce subside n’en était pas un, parce qu’il fallait le prendre sur un fonds qui n’était pas disponible, dont une loi empêche de disposer.
Cet obstacle n’est pas sérieux ; le gouvernement pourrait, d’accord avec les chambres, disposer de ce fonds. Le conseil provincial de Liége a prouvé que ce fonds n’était pas dû au gouvernement hollandais ; je ne veux pas traiter la question en ce moment ; mais je dois signaler un fait, c’est que la province du Limbourg, qui avait pris aussi l’engagement de percevoir des centimes additionnels pour le canal de Bois-le-Duc à Maestricht, a cessé de payer à partir de 1830 ; de manière que si l’on permettait à la province de disposer du produit des centimes qu’elle a payés pour cet objet à partir de 1830, on ne ferait que la placer sur la même ligne que la province de Limbourg.
- La clôture de la discussion est prononcée.
Le chiffre de 1,200,000 francs est adopté.
Articles 2 à 7
« Art. 2. Traitements des employés attachés au service domestique : fr. 230,000. »
- Adopté.
____________________
« Art. 3. Récompenses à accorder aux employés pour conduite exemplaire et actes de dévouement : fr. 3,000. »
- Adopté.
____________________
« Art. 4. Frais d’impression et de bureau : fr. 12,000. »
- Adopté.
____________________
« Art. 5. Constructions nouvelles, réparations, entretien des bâtiments et du mobilier : fr. 45,000. »
- Adopté.
____________________
« Art. 6. Traitement et tantièmes aux employés sur les produits des ateliers : fr. 75,500. »
- Adopté.
____________________
« Art. 7. Frais d’impression et de bureau : fr. 12,000. »
- Adopté.
Articles 8 et 9
« Art. 8. Achat de matières premières et ingrédients pour la fabrication : fr. 1,149,000. »
- Adopté.
____________________
« Art. 9. Gratifications aux détenus : fr. 180,000. »
- Adopté.
M. Scheyven, rapporteur – Vous venez, messieurs, d’adopter les articles 8 et 9 sur lesquels il y a une majoration de 120,000 francs ; comme vous avez pu le voir par le rapport de la section centrale, le chiffre porté au budget des voies et moyens pour remboursement d’avances faites pour achat de matières premières devrait être augmenté d’une somme égale ; je demanderai si M. le ministre des finances consent à ce que cette majoration soit faite au budget des recettes.
M. le ministre des finances (M. Mercier) – J’ai compris ces 120,000 francs dans le projet de budget que j’ai soumis hier à la chambre.
Article 1
« Art. 1er. Service des passeports : fr. 8,000. »
- Adopté.
Article 2
« Art. 2. Autres mesures de sûreté publique : fr. 60,000. »
M.
Dumortier – Messieurs, lorsqu’on a voté un chiffre aussi
élevé pour les frais de police, nous étions dans des circonstances tout à fait
extraordinaires ; nous étions alors en guerre avec
Je demande donc que le chiffre de l’article 2 soit réduit à la somme de 40,000 francs, et j’espère que l’année prochaine nous pourrons le réduire à 20,000 francs.
(Moniteur n°359 du 24 décembre 1840) M. le ministre de la justice (M. Leclercq) – Je ne puis, messieurs, consentir à cette réduction. Si les circonstances étaient tout à fait ordinaires, il y aurait peut-être moyen de réduire le chiffre des frais de police, et moi-même au moment où il s’est agi de rédiger le budget, j’avais porté mon attention sur ce point ; mais depuis le mois de juillet dernier, les circonstances ont changé, et à l’instant même j’ai pris la résolution de conserver, pour 1841, le chiffre de 60,000 francs.
Certes, messieurs, il ne faut pas
exagérer les difficultés de la situation, mais il faut convenir aussi que les
circonstances ne sont pas tout à fait ordinaires :
(Moniteur n°358 du 23 décembre 1840) - Le chiffre de 60,000 francs est mis aux voix et adopté.
Chapitre XII
Article unique
« Art. unique. Dépenses imprévues : fr. 5,000. »
- Adopté.
Chapitre XIII
Article unique
« Art. unique. Pour solde éventuel de dépenses arriérées concernant des exercices dont les budgets sont clos : fr. 4,000. »
- Adopté.
Vote sur les articles et sur l’ensemble de la loi
La chambre adopte ensuite les articles de la loi du budget. Ils sont ainsi conçus :
« Art. 1er. Le budget du département de la justice pour l’exercice 1841, est fixé à la somme de 11,060,737 francs, conformément au tableau annexé à la présente loi. »
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire à dater du 1er janvier 1841. »
Il est procédé à l’appel nominal sur l’ensemble du projet ; voici le résultat du vote :
71 membres sont présents.
70 adoptent.
1 rejette.
En conséquence, le projet est adopté.
Ont voté l’adoption : MM. Brabant, Cogels, Coghen,
Coppieters, David, Dedecker, de Florisone, de Foere, Delehaye, Delfosse, de Man
d’Attenrode, de Meer de Moorsel, de Mérode, Demonceau, de Nef, de Potter, de
Renesse, de Roo, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux, de Villegas, Doignon,
Dolez, Donny, Dubois, Dubus (aîné), B. Dubus, Dumont, Dumortier, Fleussu,
Hye-Hoys, Jadot, Kervyn, Lange, Lebeau,
Leclercq, Liedts, Lys, Maertens, Manilius, Mast de Vries, Meeus, Mercier,
Morel-Danheel, Nothomb, Peeters, Pirmez, Pirson, Puissant, Raikem, Raymaeckers,
Rodenbach, Rogier, Sigart, Simons, Smits, Troye, Ullens, Van Cutsem,
Vandenbossche, Vandenhove, Vandensteen, Van Volxem, Verhaegen, Vilain XIIII,
Wallaert, Zoude et de Behr.
M. de Langhe a voté le rejet.
- La séance est levée à 5 heures.