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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 26 avril 1856

Séance du 26 avril 1856

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)

(Présidence de M. de Naeyer, vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1211) M. Ansiau procède l'appel nominal à 2 heures et un quart.

Il donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier dont la rédaction est approuvée, et présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Le conseil communal d'Aerschot prie la Chambre d'autoriser la concession d'un chemin de fer direct d'Anvers à Hasselt par Lierre, Heyst-op-den-Berg, Aerschot et Diest, se reliant à Aerschot avec la ligne de Louvain à Herenthals et d'un chemin de fer d'Aerschot à Malines par Heyst-op-den-Berg. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif a la concession de plusieurs lignes de chemins de fer.


« L'administration communale de Weckevorst prie la Chambre d'accorder la concession d'un chemin de fer de Lierre à Hasselt par Heyst-op-den-Berg, Aerschot et Diest avec embranchement de Malines à Heyst-op-den Berg dont le projet a été soumis au gouvernement. »

- Même décision.


« Les membres de l'administration communale de Pael demandent l'exécution du réseau de chemins de fer de Bruxelles à Louvain et au camp de Beverloo par Aerschot et Diest, d’Anvers à Hasselt par Lierre, Aerschot et Diest, avec prolongements et embranchements, qui est proposé par la société Verhaegen. »

- Même décision.


« Le sieur Spiessens, remplaçant de la classe de 1849, actuellement en congé, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir le remboursement d'une somme qui est déposée à son profit dans la caisse du corps. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

Projet de loi acordant des crédits supplémentaires au budget du ministère des travaux publics

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Mercier). - D'après les ordres du Roi, j'ai l'honneur de déposer un projet de loi ayant pour objet d'imputer sur le budget des travaux publics de 1856, diverses dépenses se rapportant à des exercices antérieurs, à concurrence de 22.727 fr. 28 cent., et d'ouvrir au même département sur l'exercice 1855 un crédit de 103,305 fr. 34 c. pour faire face à diverses dépenses énumérées dans le projet de loi.

- Il est donné acte à M. le ministre des finances de la présentation du projet de loi qu'il vient de déposer.

Ce projet et les motifs qui l'accompagnent seront imprimés, distribués et renvoyés à la section centrale qui a examiné le budget des travaux publics.

Projet de loi portant le budget de la dette publique de l’exercice 1857

Discussion générale

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, la section centrale a demandé d'abord que le gouvernement annexât chaque année au budget de la dette publique uu état détaillé des minimums d'intérêt payés aux sociétés concessionnaires de chemins de fer et de lignes de navigation ; en second lieu, un état indiquaut les sommes payées aux diverses sociétés de chemin de fer et aux offices télégraphiques du chef des recettes opérées pour leur compte par l'administration belge.

J'ai l'honneur d'annoncer à la Chambre qu'à l'avenir ces renseignements seront annexés à chaque projet de budget de la dette publique.,

Messieurs, d'après l'état de l'encaisse du trésor et l'appréciation que j’ai faite de la situation générale de nos finances, je suis d'avis que dans des circonstances normales, il n'y aura pas lieu de faire un emprunt dans le cours de cette année ; cependant, comme l'avenir nous est inconnu, il est prudent de prévoir toutes les éventualités ; je compte donc proposer un projet de loi tendant à autoriser le gouvernement à faire cet emprunt, sauf à n'user de cette faculté qu'en temps opportun.

Je soumettrai en même temps à la Chambre un projet, à l'effet d'obtenir les pouvoirs nécessaires pour opérer la conversion de l'emprunt de 26 millions à 5 p. c. contracté en 1851.

Enfin, bien que, dans mon opinion, il n'y ait pas lieu, quant à présent, d'aliéner les actions du chemin de fer rhénan que possède l'Etat, je demanderai l'autorisation d'en faire la cession en tout ou en partie si plus tard il n'y a plus de motif sérieux de les conserver.

J'ai cru devoir prévenir la Chambre de mes intentions à cet égard, parce que je ne doutais pas qu'à l'occasion de la discussion du budget de la dette publique, des interpellations me fussent adresséees sur les différents objets dont je viens de parler.

M. Osy. - Toutes les sections qui ont examiné le budget de la dette publique n'ont eu aucune observation à faire sur ce budget en lui-même. Effectivement, depuis la création de la commission de surveillance, toutes les opérations de la caisse d'amortissement sont contrôlées. Aussi„ n peut dire que toutes ces opérations se font d'une manière très régulière et à l'avantage du pays.

Je n'entrerai pas dans les détails relatifs à la dette publique : ils sont suffisamment connus et il est inutile de les reproduire ici.

Les sections ont fait différentes observations. Entre autres, on aurait désiré connaître exactement quelles sont les sommes payées par le gouvernement du chef du minimum d'intérêt qui a été garanti à diverses compagnies. M. le ministre est convenu avec la section centrale de donner à l'avenir ce renseignement à la suite dn budget des travaux publics.

Les sections avaient demandé aussi qu'on rendît compte de ce qu'on paye aux chemins de fer de Dendre-et-Waes et de Jurbise à Tournai. Le gouvernement a répondu que ceci se rapporte au budget des dépenses pour ordre ; il a cependant donné des renseignements qui se trouvent consignés dans le rapport.

Je demande qu'à l'avenir le gouvernement donne ces renseignements, à la suite du budget des dépenses pour ordre, afin que les sections puissent les examiner.

Les sections ont demandé des renseignements très détaillés sur les pensions militaires, et le gouvernement s'est empressé de répondre aur questions qm lui ont été adressées à cet égard par la section centrale. Vous trouverez sur le bureau un tableau indiquant, par séries de cinq années, les pensions qui ont été accordées, et vous y verrez quelle progression énorme le chiffre de ces pensions à subie ; ainsi depuis 1835 les pensions militaires accordées se sont élevées à environ 450,000 fr. pour cinq ans, extinctions déduites ; mais dans la seule année 1855, on a accordé pour 203,000 francs de pensions, extinctions déduites, et, d'après les chiffres qui nous ont été communiqués par le règlement, vous verrez que le montant des pensions augmentera encore dans une proportion considérable.

Or, dans le budget de 1857, dont nous nous occupons en ce moment, nous avons à voter 3,075,000 fr. du chef des pensions. Messieurs, c'est là une somme immense et je ne pense pas qu'il y ait un pays où le chiffre des pensions militaires soit aussi élevé qu'en Belgique, proportion gardée.

La section centrale a engagé le gouvernement à prendre des mesures pour que les fonds des mineurs et les fonds provenant des faillites soient déposés dans la caisse des consignations. En effet, lorsqu'on les dépose dans une autre caisse, il peut en résulter des événements très fàcheux pour ces mineurs.

Le gouvernement a répondu qu'effectivement pour les mineurs l'intérêt de 3 p. c. que la loi accorde est très bas. Je partage sous ce rapport l'opinion du gouvernement ; mais comme la caisse fait des bénéfices assez considérables, je suis persuadé que si, par une loi que nous proposerait le gouvernement, on accordait un intérêt de 4 p. c. au fonds des mineurs, il y aurait encore avantage pour le gouvernement.

J'engage donc M. le ministre à examiner s'il n'y aurait pas lieu de modifier la loi à cet égard.

Quant aux faillites, M. le ministre des finances a fait connaître qu'il s'entendrait avec M. le ministre de la justice.

Il faut, messieurs, que tous les fonds provenant des faillites soient versés à la caisse des consignations. J'engage M. le ministre de la justice à faire des circulaires à tous les tribuuaux de commerce pour que toutes les sommes provenant des faillites soient versées à la caisse des consignations et puissent y rester intactes jusqu'à ce qu'il arrive une liquidation des faillites ou un concordat.

Les sections se sont occupées d'une autre question très grave. Il s'agit des fonctionnaires des travaux publics qui sont en congé. La réponse du gouvernement a été que la discussion du budget des travaux publics devant venir avant celle du budget de la dette publique, il se réservait de donner des renseignements.

Mais comme il en est autrement, permettez-moi de vous donner quelques renseignements que nous n'avions pas pu compléter, et que nous n'avions pu compléter, parce que nous nous attendions à ce que la discussion du budget des travaux publics viendrait la première.

Vous verrez à la suite du rapport qu'il y a 28 hauts fonctionnaires du ministère des travaux publics, ingénieurs et autres, qui sont en congé, qu'on a cédés aux compagnies concessionnaires de chemins de fer ou à 'étranger.

Si le gouvernement a pu se passer des services de ces fonctionnaires, je n'ai rien à dire. Mais si le gouvernement ne prend pas très prochainement une mesure, vous serez obligés d'ici à peu d'années de supporter une augmentation considérable de dépenses.

Je m'explique.

Ces fonctionnants détachés auprès des compagnies concessionnaires ou à l'étranger travailleront, loin du service du gouvernement, pendant les meilleures années de leur vie. Mais comme ils sont restés sur les cadres de l'administration, quand ils ne pourront plus faire leur service, ils viendront demander, en vertu de la loi, à M. le ministre des ravuiix publics, une peusiou.

Vous aurez ainsi à pensionner beaucoup d'employés qui n'auront pas rendu de services à l’Etat.

Je demandé positivement, et je pense que la Chambre sera d'accord avec moi, que le gouvernement prenne une décision, qu'il envoie à tous (page 1212) ces fonctionnaires une circulaire pour les inviter à opter entre le service de l'Etat on le service des compagnies ou de l'étranger.

Outre ces 28 fonctionnaires, il est d'autres employés qui se trouvent dans une position bien différente encore. Nous trouvons à cet égard, dans le rapport de l'honorable M. de Man, les renseignements que nous n'avions pu obtenir. Il s'agit, messieurs, des traitements d'attente qu'on donne au département des travaux publics. Nous voyons quel le chiffre de ces traitements s'élève à 142,000 fr.

L'honorable M. de Man, dans son rapport, nous communique la réponse du gouvernement ; nous y voyons que ces fonctionnaires du département des travaux publics qui jouissent de traitements d'attente, sont classés en trois catégories. En premier lieu, il s'agit des employés atteints d'infirmités. Je conçois que lorsqu'un employé est malade, il faille lui donner un traitement d'attente.

En second lieu des employés reçoivent des traitements d'attente pour refus d'accepter des fonctions. Ainsi un fonctionnaire refuse d'accepter les fonctions que le gouvernement lui donne, et le gouvernement est assez faible pour lui donner un traitement d'attente. Je demande si c'est là de la bonne administration.

Les fonctionnaires de l'Etat, selon moi, sont à la disposition du gouvernement, s'ils ne veulent pas servir comme le leur ordonne le gouvernement ; il faut qu'ils soient sans rémission rayés des cadres. Je ne connais pas d'autre manière d'administrer. C'est ce que j'ai demandé sous tous les ministères, et je le demande aujourd'hui plus que jamais, parce qu'il s'agit ici d'une somme très considérable.

Je vois dans le tableau imprimé à la suite du rapport de l'honorable M. de Man, qu'il y a au département des travaux publics des ingénieurs dont le traitement d'attente est plus élevé que ne pourrait l'être une pension. Il y en a qui ont des traitements d'attente de 6,000 fr. et plus. Or, le maximum des pensions n'est que de 5,000 fr.

Il y a une troisième catégorie de traitements d'attente. Ce sont ceux qui sont accordés aux fonctionnaires qui ont perdu la confiance de l'administration. Je demande s'il n'est pas plus que temps que le gouvernement prenne des mesures pour mettre un terme à de semblables abus.

Je conçois qu'on accorde des traitements d'attente pour infirmités, bien entendu quand il s'agit d'infirmités temporaires. Car s'il s'agit d'infirmités incurables, les fonctionnaires doivent être pensionnés. Mais je ne puis consentir à ce qu'on donne des traitements d'attente à des fonctionnaires qui refusent leurs services à l'Etat, ou à des fonctionnaires qui ont perdu la confiance de l'administration. Si des fonctionnaires n'eut plus la confiance du gouvernement, celui-ci doit les destituer.

Je demande, messieurs, que le gouvernement s'explique sur l'emploi de cette somme de 142,000 francs. Je demande aussi qu'il nous dît s'il est décidé à prendre une décision pour les ingénieurs détachés auprès des compagnies concessionnaires ou à l'étranger.

Je crois devoir demander dès aujourd'hui ces renseignements, puisque la discussion du budget de la dette publique a lieu avant la discussion du budget des travaux publics.

Je le crois d'autant plus nécessaire que le budget de la dette publique ne prendra pas beaucoup de temps, tandis qu'il n'en sera pas de même du budget des travaux publies où, dès lors, cette affaire que je considère comme grave pourrait passer inaperçue.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, je laisserai à mon honorable collègue, M. le ministre des travaux publics, le soin de répondre aux dernières observations de l'honorable M. Osy. Quant à ce qu'a dit cet honorable membre par rapport au service de la caisse des consignations en ce qui concerne les fonds des mineurs et les fonds provenant des faillites, je me réfère à la réponse que j'ai faite à la section centrale et qui est consignée dans son rapport, à savoir que cette observation fera l'objet de la plus sérieuse attention du gouvernement.

Quant aux pensions militaires, il n'est pas étonnant qu'il y ait un surcroît de dépenses aux considérables pendant l'exercice 1855 ; la mesure générale qui a été prise a donné lieu, comme on en est convenu d'ailleurs, à une dépense plus forte pendant cet exercice ; mais il n'en fera pas de même pour l'avenir.

Jusqu'aujourd'hui la dépense normale, du chef des pensions militaires, n'avait pas encore été atteinte ; elle ne le sera peut-être que dans une ou deux années ; après cette époque, les extinctions seront beaucoup plus considérables et, d'un autre côté, le chiffre des nouveaux pensionnés s'atténuera. Nous entrerons dans la situation normale, et je compte bien que les observations de la nature de celles qui viennent d'être produites ne trouveront plus d'application.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, les observations qui ont été présentées par l'honorable M. Osy s'appliquent à deux ordres d'idées.

L'une de ces observations porte sur le budget des dotations ; elle est relative aux pensions éventuelles que l'Etat pourrait être dans le cas d'allouer a certains fonctionnaites. L'autre observation porte sur le budget des travaux publics lui-même, elle est relative aux tratiements des agents de l'administration.

Quant au premier point, l'honorable M. Osy fait remarquer qu'il y a un certain nombre d'ingénieurs qui ont obtenu des congés pour aller à l'étranger ou pour entrer au service de compagnies en Belgique.

Presque tous ces congés datent d'assez longtemps ; à cette époque-là le département des travaux publics a cru faire acte de bonne administration en mettant les services de ses agents à la disposition de tous ceux qui auraient des travaux importants à faire exécuter ; la coopération de ces agents a porté les fruits qu'on était en droit d'en attendre ; car, grâce à leurs conseils, des projets nombreux ont été étudiés, et un grand nombre de ces projets ont été réalisés pour la grande amélioration de nos voies de communication.

L'honorable M. Osy fait remarquer que ces agents, mis à la disposition de compagnies, viendront plus tard, en vertu de la loi, réclamer une pension

Je répondrai que ces agents sont en congé illimité avec la réserve formelle pour le gouvernement de ne plus les admettre, à une époque donnée, dans les cadres de l'administration, s'il ne jugeait pas leur rentrée utile au bien public.

Ainci, d'un côté ces fonctionnaires ne pourront pas venir réclamer de nouveau la rentrée dans le corps ; ils ne seront admis que si le gouvernement le juge utile. D'un autre côlé, en ce qui concerne les pensions, il faut remarquer que le taux de la pension était calculé sur le nombre des années de services effectifs, les années passées en congé sans traitement seront déduites, et que le taux de leur pensions éventuelle sera calculé proportionnellement au nombre d'années pendant lesquelles ils auront rendu des services réels à l'Etat.

Aussi le dangé signalé par l'honorable M. Osy n'existe pas, parce que les ingénieurs ne peuvent pas revendiquer leur rentrée dans le corps quand ils le voudront, et que la pension ne pourra leur être accordée qu'à raison du nombre d'années pendant lesquelles ils ont rendu service à l'Etat.

Leur position n'en est pas moins irrégulière. L'honorable membre propose d'écrire une circulaire aux fonctionnaires dont il s'agit, et de les mettre en demeure d'opter entre le service de l'Etat et celui des compagnies.

Je doute que cette mesure puisse être appliquée d'une manière aussi complète qu'il le suppose, elle pourrait même créer un embarras à l'Etat ; par exemple, si tous les agents qui sont à l'étranger répondaient à la sommation. Nous acceptons, dès aujourd'hui nous rentrons chez vous. L'honorable membre voudra bien remarquer que nous avons 41 agents des ponts et chaussées détachés près de compagnies étrangères et que l'occasion d'en placer 10 ou 12 ne se présente pas tous les jours. Si nous sommes d'accord sur le fond, nous ne le sommes pas sur le moyen d'y remédier.

Du reste, je puis dire que depuis mon entrée au département des travaux publics, je n'ai pas donné d'extension à cet état de choses, j'ai, au contraire, tâché autant que possible de rentrer dans une situation régulière ; je n'ai accordé qu'une seule permission de ce genre.

Un autre point, traité par l'honorable membre, est relatif au budget des travaux publics. Il a fait remarquer que 140,000 fr. étaient employés en traitements d'attente. Il trouve que les motifs d'un pareil état, de choses sont de trois espèces.

D'abord les infirmités ; il reconnaît que dans une administration il y a toujours un certain manquant par raison de santé. Le personnel des chemins de fer est nombreux, les services corporels sont fatigants. Nous avons un très grand nombre de manquants, mais il pense qu'on pourrait diminuer le nombre des disponibilités pour infirmités temporaires si on renvoyait une partie de ceux qui figurent dans cette catégorie devant la commission provinciale qui les déclarerait admissible d'être mis à la pension.

Je ferai remarquer à l'honorable membre que le droit à la pension n'est pas facile à acquérir.

Il faut que l'infirmité ait le caractère constaté d'incurabililé ; or comme les employés du chemin de fer sont des sujets jeunes, la commission ne prononce pas leur admission à la retraite. C'est ce qui maintient les disponibilités à un chiffre très élevé. Les fatigues auxquelles sont astreints les fonctionnaires de cette administration les mettent à un âge peu avancé dans l'impossibilité de continuer leur service ou les obligent à l'interrompre fréquemment ; dans ce cas leur traitement est encore porté sur les traitements d'attente.

Quant à ceux qui se trouveraient en disponibilité par suite de refus d'accepter un emploi offert, je ne puis m'expliquer attendu que ce cas ne s'est pas présenté depuis que je suis au département des travaux publies. J'ignore à quels faits l'honorable membre a pu faire allusion : pour moi je n'ai pas mis un seul agent en disponibilité pour refus de fonctions. A mon avis, ce n'est pas le traitement de disponibilité, mais la révocation, qu'il faut appliquer à l'agent qui refuse d'obéir.

La Chambre se rappellera peur-être que, dans la discussion d'un crédit supplémentaire au budget des travaux publics, j'ai obtenu le rejet d'une allocation pour traitement d'attente donné à ce titre.

Une troisième catégorie aurait pour raison d'être la perte de la confiance de l'administration. L'honorable membre pense que dans ce cas la démission doit être prononcée. Il ne comprend pas qu'on admette au traitement d'attente des agents qui ont perdu la confiance de l'administration.

J'ignore sur quel fait l'honorable membre base cette critique. Je ne connais pas d'administration où l'on n'applique pas la disponibilité ou la non-activité par mesure temporaire ; ce n'est pas parce que certaine faute aura été commise par un agent qu'il doit y avoir lieu de le (page 1213) révoquer ; il y a une mesure intermédiaire, c'est la disponibilité ; si toute faute devait être punie de la révocation, le recrutement du personnel deviendrait impossible.

L'administration des travaux publics comme l'administration de la guerre doit pouvoir user de la mise en disponibilité ou en non-activité comme mesure disciplinaire.

C'est une bonne mesure, je ne pense pas qu'il soit nécessaire de la justifier, elle est conforme à tous les précédents de l'administration.

Un dernier point touché par l'honorable M. Osy, c'est qu'un agent en disponibilité touche un traitement de 6 mille francs, alors qu'il n'en pourrait avoir que 5,000 s'il était mis à la pension.

Il n'échappera pas à la Chambre qu'il ne dépend pas du département de pensionner un fonctionnaire quand il le veut, mais quand les conditions prévues par la loi sont remplies : 65 ans d'âgé et 35 ans de service ou une infirmité incurable. A défaut de ces circonstances, il est impossible de le pensionner, on peut alors allouer le traitement d'attente au taux fixé par les règlements.

Je prie l'honorable membre de compter le nombre de fonctionnaires mis au traitement de disponibilité depuis un an. Je pense qu'à la suite de cet examen il voudra reconnaître que je n'ai pas abusé de la faculté qui m'est donnée par le règlement.

M. Osy. - Je ne critique pas un fait parce qu'il appartient à telle ou telle administration. J'ai vu figurer dans le tableau qui se trouve à la suite du rapport de M. de Man un traitement d'attente de 6 mille francs ; je n'ai pas examiné s'il avait été accordé sous M. Van Hoorebeke ou M. Rolin ; je ne me suis préoccupé que d'une seule chose, de l’Etat qui paye.

Je ne suis pas d'accord avec M. le ministre, quant aux différentes catégories de mises en disponibilité. Je conçois que quand des infirmités viennent frapper des facteurs de la poste ou autres agents de même catégorie, il faut leur donner un traitement d'attente jusqu'à ce qu'ils soient rétablis ; mais il est des agents dont les infirmités sont telles qu'ils ne pourront jamais rentrer dans le service actif, le gouvernement ferait mieux de les renvoyer devant la commission provinciale pour examiner s'il y a lieu de les pensionner.

Quant aux fonctionnaires qui ne suivent pas les instructions du gouvernement, qui refusent les fonctions qu'on leur offre, ils doivent être révoqués. Je suis certain que si on examinait attentivement la liste, on verrait que beaucoup devraient être démissionnés. Des employés ont des grades trop élevés qu'ils ne peuvent pas remplir ; on leur offre l'emploi d'un grade moindre, ils le refusent. Vous devez alors leur donner démission.

Il en est qui ont perdu la confiance de l'administration, ce n'est pas le cas de leur infliger une punition disciplinaire. On met un officier en disponibilité pour une faute, commise. Mais, si vous en avez comme cela, dans le chemin de fer, dans les ponts et chaussées, qui aient manqué à leur service, si c'est une peine disciplinaire, je le conçois. Mais ce que je ne conçois pas, c'est que des fonctionnaires soient mis en disponibilité comme ayant perdu la confiance du gouvernement. Cette catégorie se trouve dans la réponse faite par le gouvernement à la section centrale.

Or les fonctionnaires de cette catégorie devraient recevoir leur démission ; ils ne devraient pas être placés dans la position de non-activité, recevoir à ce titre un traitement d'attente pendant un certain nombre d'années et ensuite une pension.

Je suis persuadé que si M. le ministre veut se faire faire un rapport sur les motifs de la mise en non-activité, il reconnaîtra qu'il y en a qui sont dans ce cas, et qu'il y en a d'autres qui ont définitivement quitté le service de l'Etat, et qui devraient par conséquent avoir leur démission.

Les fonctionnaires sont au service de l'Etat. S'ils ne veulent plus le servir, libre à eux de quitter. Mais on ne doit pas leur accorder des traitements d'attente.

A cette occasion, je me rappelle un fonctionnaire du ministère des finances qui prétendait toujours être malade, et qui obtenait ainsi des congés qu'il allait passer en France. On assure que, dans un de ces congés, il avait obtenu une place de 10,000 francs dans une administration de chemin de fer. Il venait passer quelques mois en Belgique et toujours sous prétexte de maladie, il obtenait des congés, et allait faire sa place en France.

Il est à ma connaissance que l'honorable M. Ch. de Brouckere, président de la commission de surveillance de la caisse de retraite, a demandé par lettre la destitution de ce fonctionnaire.

Je ne sais ce qui en est advenu, mais ce sont de véritables abus.

La lettre officielle de M. de Brouckere doit se trouver au département des finances. Ces faits se sont passés, non sous l'administration de l'honorable M. Mercier, mais sous celle de l'honorable M. Liedts.

Vous avez lu le long mémoire par lequel l'honorable M. Dumortier s'élève contre la demande d'un crédit de 200,000 fr., somme à laquelle a été fixé par transaction le montant des traitements d'attente accordés par le roi Guillaume et dus par l'Etat. Craignons, messieurs, en maintenant des abus tels que ceux que je viens de signaler, de léguer les mêmes embarras à nos successeurs. Je demande que l'on prenne les mesures nécessaires pour les éviter.

M. Van Hoorebeke. - Je crois que les observations de l'honorable membre auraient trouvé pïus utilement leur place dans la discussion du budget des travaux publics. Un grand nombre de membres n’ont pas le tableau sous les yeux, et n'ont pas, par conséquent, les éléments sur lesquels raisonné l'honorable membre.

Je crois donc qu'il aurait mieux fait de renvoyer ses critiques à la discussion du budget des travaux publics.

Cependant, je dirai un mot de ses observations. Mais, avant tout, je je tiens à rencontrer les considérations par lesquelles il vient de finir.

Il a critiqué avec beaucoup de vivacité la mesure par laquelle le qouvernement a autorisé un certain nombre d'ingénieurs à se mettre au service des compagnies.

Pour se rendre un compte exact de la situation où s'est trouvé le gouvernement à l'époque où ont été accordées des concessions de chemin de fer, il faut se rappeler que les compagnies concessionnaires manquaient d'ingénieurs. Elles se sont adressées àu gouvernement ; elles lui ont demandé comme une faveur d'employer des ingénieurs dans lesquels le gouvernement pût placer sa confiance.

En effet, je crois pouvoir assurer que si les travaux faits par les compagnies l'ont été utilement dans l'intérêt dé l'Etat et dans l'intérêt des compagnies, c'est parce que le gouvernement pouvait placer sa confiance dans des fonctionnaires qu'il avait eus sous ses ordres et qui ont apporté dans l'exécution des travaux la loyauté qu'ils avaient apportée au service de l'Etat.

Des précautions ont été prisés pour empêcher ces fonctionnaires de rentrer arbitrairement au service de l'Etat ; elles sont telles que vient de le dire M. le ministre des travaux publics, c'est-à-dire que dans l'acte qui leur a accordé un congé, il a été formellement stipulé que s'ils voulaient rentrer au service de l'Etat, le gouvernement se réservait d'examiner jusqu'à quel point il lui convenait de faire accueil à leur demande. Ainsi, de ce côté, toutes les garanties ont été prises.

Maintenant pour la liste qui est à la fin du rapport de l'honorable M. de Man d'Attenrode, les détails me manquent pour fournir à la Chambre des éclaircissements bien précis et complets. Cependant je crois pouvoir dire à l'honorable M. Osy que le chiffre des traitements de disponibilité est moins considérable qu'il n'était il y a quelques années.

En 1848, à la suite dé cette fièvre d'économie qui avait envahi le département des travaux publics comme tous les autres, un grand nombre de fonctionnaires ont été mis en disponibilité uniquement par économie, nullement par mesure disciplinaire, comme incapables, comme ayant refusé leur concourt au gouvernement. C'est là du reste une catégorie que je ne connais pas. Si elle figure au tableau, je la désavoue pour mon compte. Je n'admets pas qu'un fonctionnaire qui refuse un service pour lequel le gouvernement le désigne puisse être placé dans la section de non-activité. Il doit être simplement démissionné.

Je dis donc qu'en 1848 un grand nombre de fonctionnaires ont été placés dans la section de disponibilité par suppression d'emploi.

On a pensé qu'on devait leur allouer les deux tiers de leur traitement. C'est ce qui fait que le chiffre affecté aux traitements de cette espèce est si élevé.

A côte de ces catégories il y en a d'autres ; celles des fonctionnaires qui, par mesure d'ordre, par mesure disciplinaire, sont mis en non-activité. Cela existe dans l'armée.

Cela existe aussi au département des travaux publics. Parce qu'au département des travaux publics, le nombre des fonctionnaires est considérable, le chiffre de ces traitements est assez élevé. Mais soyez persuades que dans quelques années, le chiffre des traitements de disponibilité pourra diminuer notablement. A mesure que des vacances de places se présenteront, l'administration des chemins de fer pourra utiliser les services de ceux de ces agents qui sont dans cette situation.

Si d'autres détails doivent être fournis au sujet de cette question, ils pourront l'être dans quelques jours, puisque la discussion du budget des travaux publics doit commencer lundi.

M. Rousselle. - Je voulais faire l'observation que l'honorable M. Van Hoorebeke a présentée en dernier lieu, c'est-à-dire qu'il convient que la Chambre ne prolonge pas ce débat. Le budget des travaux publics n'est pas en discussion ; nous n'avons pas les pièces sous les yeux ; l'honorable rapporteur n'est pas présent.

M. de Man d'Attenrode. - Pardon ! Je suis ici.

M. Rousselle. - Je pensais qu'il n'était pas présent, parce qu'il n'avait pas demandé la parole.

M. de Man d'Attenrode. - Je la demande.

M. Rousselle. - Je dirai cependant que ce qui a frappé la section centrale, comme une grave irrégularité, c'est que tous ces traitements d'inactivité sont prélevés sur le crédit relatif aux traitements du personnel actif, tandis que dans les autres budgets il y a un article spécial pour le personnel en disponibilité.

Dans ce cas la Chambre peut chaque année apprécier la justice des mises en disponibilité et la convenance de les continuer. Mais jusqu'à présent la Chambre n'a pas été mise en état de faire cette appréciation : pour le départemenl des travaux publics, parce que, comme je viens de le dire, on impute les traitements de non-activité sur les crédits alloués pour les traitements d'activité.

(page 1214) M. de Man d'Attenrode. - M. de Man d'Attenrode. - Si l'on désire entamer dès aujourd’hui, la discussion du budget des travaux publics, je, ne demande pas mieux.

- Plusieurs membres. - Non ! Non !

M. de Man d'Attenrode. - J'ai été cependant en quelque sorte mis en demeure de parler, vous voudrez bien me permettre messieurs, de répondre quelques mots à ce que M. le ministre vient de dire. (Parlez ! Parlez !)

L'honorable M. Osy, prenant les devants sur la discussion du budget des travaux publics, vient de vous entretenir du chiffre considérable des fonctionnaire ressortissant à ce département, qui reçoivent des traitements d’attente ou de disponibilité.

En effet, la section centrale a appelé votre attention, d'abord sur le bombre considérable d'ingénieurs détachés près dès compagnies et ensuite les sommes considérables qui sont prélevées sur les crédits du budget pour traitements de non-activité.

Quant à la première catégorie, quant à celle des ingénieurs détachés près des compagnies, sans traitements, l'honorable M. Osy ne s'est appesanti que sur les inconvénients financiers que cette tolérance peut faire surgir.

Mais il est un autre inconvénient, dont il n'a pas parlé, c'est que comme les compagnies accordent des traitements supérieurs à ceux que l'Etat accorde à ces fonctionnaires, les compagnies, attirent à leur service des fonctionnaires qu'il serait utile que l'Etat conservât ; ces fonctionnaires quittent le service de l'Etat, parce qu'on leur offre quelques milliers de francs de plus. Or, comme ils continuent de figurer sur les cadres de l'administration, ils ne risquent rien ; car ils savent que quand ils voudront rentrer, leur demande sera accueillie. C'est ce qui est déjà arrivé. Il y a des ingénieurs détachés près des compagnies étrangères, qui, quand leur mission a été terminée, sont rentrés, et qui touchent un traitement de disponibilité.

Je pourrrais citer encore un fonctionnaire supérieur de l'administration du chemin de fer, à laquelle il rendait de bons services, et qui à été appelé par la compagnie du Nord. Elle lui a offert un traitement plus en rapport avec ses talents, et il a d'autant plus facilement accepté, qu'en passant au service de la compagnie française du Nord il a obtenu la faculté de continuer à figurer sur les cadres de l'administration des chemins de l'Etat.

C'est une question sur laquelle le comité consultatif des chemins de fer a appelé l’attention du gouvernement l'année dernière. Le comité tout entier a prié le gouvernement de mettre ces fonctionnaires en demeure de rentrer au service de l'Etat ou de le quitter définitivement.

Quant à l'autre catégorie, la question est plus délicate. Il faut cependant l'aborder franchement. L'intérêt public l'exige.

Oui, il est vrai que l'administration prélève des traitements d'inactivité, qui s'élèvent jusqu'à 6,000 fr., sur le budget, pour divers motifs : motifs de sauné, motifs de manque de confiance, pourquoi ne dirait-on pas le mot ? Ces employés ont été mis en disponibilité parce que leurs chefs n'ont pas confiance en eux, qu'ils la méritent ou ne la méritent pas, c'est là une question que je n’ai pas à approfondir.

Quoi qu'il en soit, messieurs, il est inouï de voir accorder des traitements de disponibilité pour une somme de 142,000 fr. C'est un abus extrêmement grave. L'honorable M. Rousselle vient d'indiquer en quoi cet abus est particulièrement regrettable, c'est que vous croyez voter des crédits pour les traitements d'activité, et l'on prélève sur ces crédits des sommes considérables pour des traitements d'inactivité. Il est nécessaire qu'on mette au plus tôt un terme à de semblables abus.

Sans doute dans une administration aussi considérable, il peut se présenter des situations exceptionnelles, pour lesquelles il faut créer des traitements d'attente. Mais il est certain aussi que s'il y avait un peu de régularité et de réserve dans cette partie du service, une somme de 142,000 francs pour des traitements de cette nature serait beaucoup trop considérable.

Au budget de l'intérieur, il y a aussi un crédit pour traitements de disponibilité. Mais tous les ans le gouvernement indique les personnes auxquelles ce crédit est destiné. La législature peut ainsi veiller à ce que ces positions de disponibilité ne se prolongent pas trop, et à ce que les traitements qui sont ainsi accordés ne finissent pas par devenir une pension déguisée.

La Constitution veut que les pensions soient réglées par les lois spéciales sur la matière. Or, je le répète, dans la catégorie des fonctionnaires du département des travaux publics, il en est qui jouissent depuis trop longtemps de traitements de disponibilité, et il en est qui ne sont nullement infirmes. Je puis même affirmer qu'il y a des fonctionnaires qui se trouvent dans cette catégorie pour avoir refusé de se rendre au poste qui leur était indiqué par l'administration. Il est de ces fonctionnaires qui, ayant acquis une position infiniment meilleure par suite d’un mariage, n’ont pas voulu continuer à servir le gouvernement dans certaines localités qui leur déplaisaient. Ils ont été résider ailleurs et on leur a accordé des traitements de disponibilité.

Messieurs, ce que je répète dans cet incident, c'est que d'après les pairoles de M. le ministre des travaux publics il semblerait que cet état de choses n'a rien d’irrégulier. Vous croyez sans doute, messieurs, comme la section centrale, que cette situation est très irrégulière, et qu'il faut y porter un prompt repède. La chose est facile avec un peu de bonne volonté.

Il faut que le département des travaux publics procède comme les autres départements, qu'il inscrive à son budget un crédit pour les non-activités, et que l'usage de ce crédit soit contrôlé annuellement par les sections centrales chargées de l'examen du budget.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - L'honorable M. de Man voit une très grande différence entre la rédaction du budget des travaux publics et celle des autres départements ministériels ; c'est que pour les autres ministères on a fourni à la Chambre le tableau des fonctionnaires en traitement de disponibilité. Il me paraît que refus d'un pareil tableau pour le département des travaux publics n'a pas été fait, puisque l'honorable M. de Man a trouvé moyen de l'imprimer à la suite de son rapport.

Quant aux chiffres des traitements d'attente, il y a une remarque à faire, c'est que pour avoir droit à la pension du chef de services rendus, ces services doivent avoir une durée de 35 ans.

Or, le chemin de fer n'existe que depuis 20 ans. Il est donc impossible qu'aucun fonctionnaire des chemins de fer, qui n'aurait pas des services militaires ou d'autres services administratifs, obtienne aujourd'hui une pension. Or, depuis plusieurs années on découvre tous les ans des fonctionnaires que pour des raisons d'âge on est obligé de soustraire au service actif, bien qu'ils n'aient pas des infirmités susceptibles d'être constatées par la commission des pensions. Les fonctionnaires de cette catégorie entrent dans une proportion assez considérable dans le chiffre des traitements d'attente.

L'honorable membre semble croire que mon intention soit d'aggraver une situation qu'il trouve déplorable et il me reproche de considérer cette situation comme parfaite. C'est là une grande erreur, car j’ai déclaré en terminant que depuis mon entrée au département des travaux publics j'ai diminué le chiffre des traitements dont il s'agit.

M. de Man d'Attenrode. - Messieurs, la phrase par laquelle le ministre des travaux publies vient de terminer est plus satisfaisante, j'aime à le reconnaître. J’aurais voulu qu'il l'eût prononcée plus tôt.

Il s'est étonné que je me sois plaint de ce qu'on n'a pas fourni à la Chambre le tableau des traitements d'inactivité.

Je vous avoue, messieurs, que je ne me doutais pas le moins du monde qu'un pareil abus existât, et je pense qu'aucun membre de la Chambre ne l'a soupçonné. Aussi la section centrale ne s'en était jamais occupée. Il était impossible, en effet, de supposer qu'on pût 142,000 fr. sur les traitements d'activité pour payer des traitements de non-activité. On devait d'autant moins le supposer, qu'il y a un article au budget pour la disponibilité.

Je me suis trompé en affirmant le contraire il y a un instant.

Cet article comporte un chiffre extrêmement peu considérable il est vnai, mais il fallait eu proposer l'augmentation. On a trouvé plus commode d'imputer les traitements de disponibilité sur les crédits votés pour les traitements d'activité. Cette manière de procéder est plus qu'irrégulière, car c'est une sorte de surprise. (Interruption.) Oui, je dis une surprise, un procédé qui manque de franchise. Est-ce que la Cour des comptes pouvait contrôler ce que font les fonctionnaires, s'ils remplissent leurs fonctions, quel est leur état de santé, s'ils travaillent dans leurs bureaux ou passent leur vie à se promener ? La Cour des comptes est incapable d'exercer ce contrôle. Cela ne la regarde pas. Cela n'est pas dans ses attributions.

Il me reste à répliquer un mot à M. le ministre des travaux publics qui a cherché à atténuer le chiffre considérable des traitements de disponibilité, en déclarant que cette situation a été amenée par les réformes administratives qui ont eu lieu en 1849. Il y a eu, il est vrai, des mises en disponibilité en 1849, par suite de réformes dans quelques départements, mais ces réformes n'ont pas atteint le département des travaux publics, le personnel des chemins de fer n'a subi aucune réduction par suite du système d'économie dans lequel la législature a tenté de pousser l'administration à cette époque.

M. Van Hoorebeke. - Messieurs, je ne veux pas prolonger cette discussion, je la crois tout à fait prématurée, nous ne sommes pas en position de discuter utilement cette question.

M. Coomans. - Si.

M. Van Hoorebeke. - Comment M. Coomans peut-il discuter cette question sans avoir les pièces sous les yeux ?

M. Coomans. - Je ne discute pas, j'écoute.

M. Van Hoorebeke. - L'honorable M. de Man vient de dire que la listé des fonctionnaires ayant un traitement de disponibilité n'a jamais été connue de la Chambre ; eh bien, c'est une erreur manifeste, puisque le budget des travaux publics sur lequel l'honorable M. de Brouwer a fait rapport en 1852 ou en 1853, comprenait à la fin, la liste nominative de tous les fonctionnaires du département des travaux publics, tant de ceux qui se trouvaient en non-activité ou en disponibilité que de ceux qui étaient en activité de service.

Je crois, messieurs, que nous devons attendre la discussion du budget des travaux publics pour examiner ces questions ; nous pourrons alors les traiter en connaissance de cause.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, si ce débat doit continuer, je demanderai également qu'il trouve sa place dans la discussion du budget des travaux publics. Seulement, comme il a été question d'un acte de mon honorable prédécesseur, je me fais un devoir de déclarer que le fonctionnaire du département des finances auuel l'honorable M. Osy fait allusion, ne jouissait plus, depuis longtemps d'aucun traitement lorsque je suis entré au département.

- La discussion générale est close.

La Chambre passe à l'examen des articles.

Discussion du tableau des crédits

Chapitre premier. Service de la dette

Articles 1 à 23

« Art. 1er. Arrérages de l'inscription au grand-livre des rentes créées sans expression de capital, portée au nom de la ville de Bruxelles, en vertu de la loi du 4 décembre 1842 : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Arrérages de l'inscription portée au même grand-livre, au profit du gouvernement des Pays-Bas, en exécution du paragraphe premier de l'article 63 du traité du 5 novembre 1842 : fr. 840,560. »

- Adopté.


« Art. 3. Intérêts des capitaux inscrits au grand-livre de la dette publique, à 2 1/2 p. c., en exécution des paragraphes 2 à 6 inclus de l'article 63 du même traité : fr. 5,502,640 78. »

- Adopté.


« Art. 4. Frais relatifs à cette dette : fr. 1,500. »

- Adopté.


« Art. 5. Intérêts de l'emprunt de 30,000,000 de fr., à 4 p. c, autorisé par la loi du 18 juin 1836 : fr. 1,200,000.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt : fr. 300,000.

« Ensemble : fr. 1,500,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Frais relatifs au même emprunt : fr. 2,000. »

- Adopté.


« Art. 7. Intérêts de l'emprunt de 50,850,800 francs, à 3 p. c, autorisé par la loi du 23 mai 1838, et du capital de 7,624,000 francs, à 3 p. c, émis en vertu des lois du 1er mai 1842 et du 24 décembre 1846 (semestres au 1er février et au 1er août 1857) : fr. 1,754,244.

« Dotation de l'amortissement de ces deux dettes (mêmes semestres) : fr. 584,748.

« Ensemble : fr. 2,338,992. »

- Adopté.


« Art. 8. Frais relatifs aux mêmes dettes : fr. 32,000. »

- Adopté.


« Art. 9. Intérêts, à 4 1/2 p. c, sur un capital de 95,442,832 fr., montant des obligations dont l'émission a été autorisée par la loi du 21 mars 1844 (semestres au 1er mai et au 1er novembre 1857) : fr. 4,294,927 44.

« Dotation de l'amortissement de cette dette (mêmes semestres) : fr. 954,428 32.

« Ensemble : fr. 5,249,355 76. «

- Adopté.


« Art. 10. Frais relatifs à la même dette : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 11. Intérêts de l'emprunt de 84,656,000 fr. à 4 1/2 p. c., autorisé par la loi du 22 mars 1844 (semestres au 1er mai et au 1er novembre 1857) : fr. 3,809,520.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt, à 1/2 p. c. du capital (mêmes semestres) : fr. 423,280.

« Ensemble : fr. 4,232,800. »

- Adopté.


« Art. 12. Frais relatifs audit emprunt : fr. 13,000. »


« Art. 13. Intérêts de l'emprunt de 26,000,000 de fr. à 5 p. c, autorisé par la loi du 20 décembre 1851 (semestres au ler mai et au 1er novembre 1857) : fr. 1,300,000.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt, à 1 p. c. du capital : fr. 260,000.

« Ensemble : fr. 1,560,000. »

- Adopté.


« Art. 14. Frais relatifs au même emprunt : fr. 4,500. »


« Art. 15. Intérêts à 4 1/2 p. c, sur 157,615,300 fr., montant approximatif du capital des emprunts émis en vertu des lois du 1er décembre 1852 et du 14 juin 1853 (semestres au 1er mai et au 1er novembre 1856) : fr. 7,092,688 50.

« Dotation de l'amortissement de cette dette, à 1/2 p. c. du capital (mêmes semestres) : fr. 788,076 50.

« Ensemble : fr. 7,880,765. »

- Adopté.


« Art. 16. Frais relatifs à la même dette : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Art. 17. Minimun d'intérêt garanti par l'Etat, en vertu de la loi du 20 décembre 1851 et de lois subséquentes. (Ce crédit n'est point limitatif ; les intérêts qu'il est destiné à servir pourront s'élever, s'il y a lieu, jusqu'à concurrence des engagements résultant de ces lois) : fr. 600,000. »

- Adopté.


« Art. 18. Frais de surveillance à exercer sur les compagnies au point de vue de cette garantie, en exécution des conventions : fr. 4,500. »


« Art. 19. Intérêts et frais présumés de la dette flottante : fr. 950,000. »

- Adopté.


(page 1216) « Art. 20. Rentes viagères (charge extraordinaire) : fr. 2,499 79. »

- Adopté.


« Art. 21. Intérêts à payer aux anciens concessionnaires de la Sambre canalisée, sur une somme de 10,317 fr. 34 c. (charge extraordinaire) : fr. 515 87. »

- Adopté.


« Art. 22. Redevance annuelle à payer au gouvernement des Pays-Bas, en vertu des articles 20 et 23 du traité du 5 novembre 1842, pour l'entretien du canal de Terneuzen et de ses dépendances : fr. 105,820 10. »

- Adopté.


« Art. 23. Rachat des droits de fanal mentionnés au paragraphe 2 de l'article 18 du traité du 5 novembre 1842 : fr. 21,164 02. »

Chapitre II. Rémunérations

Articles 24 et 25

« Art. 24. Pensions ecclésiastiques ci-devant tiercées (charge extraordinaire) : fr. 36,000.

« Pensions civiles et autres accordées avant 1830 (charge extraordinaire) : fr. 60,000.

« Pensions civiques (charge extraordinaire) : fr. 100,000.

« Pensions des veuves et orphelins de l'ancienne caisse de retraite (charge extraordinaire) : fr. 450,000

« Pensions militaires : fr. 3,078,000.

« Pensions de l'Ordre de Léopold : fr. 28,000. »

« Pensions civiles :

« Affaires étrangères :

« Marine : fr. 28,000.

« Affaires étrangères : fr. 40,000.

« Justice :

« Ecclésiastiques : fr. 120,000.

« Civiles : fr. 125,000.

« Intérieur : fr. 200,000.

« Travaux publics : fr. 133,000.

« Guerre : fr. 34,000.

« Finances : fr. 1,500,000.

« Cour des comptes : fr. 11,000.

« Pensions de militaires décorés sous le gouvernement des Pays-Bas (charge extraordinaire) : fr. 7,000.

« Secours sur le fonds dit de Waterloo (charge extraordinaire) : fr. 9,000.

« Arriérés de pensions de toute nature : fr. 5,000.

« Total charge ordinaire : fr. 5,392,000.

« Total charge extraordinaire : fr. 662,000. »

- Adopté.


« Art. 25. Traitements d'attente (wachtgelden) (charge extraordinaire) : fr. 14,928 24.

« Traitements ou pensions supplémentaires (toelagen) (charge extraordinaire) : fr. 6,984 12

« Secours annuels (jaarlijksche onderstanden) (charge extraordinaire) : fr. 825 40.

« Ensemble : fr. 22,737 76. »

Chapitre III. Fonds de dépôt

Articles 26 et 27

« Art. 26. Intérêts, à 4 p. c., des cautionnements versés en numéraire dans les caisses du trésor, par les comptables de l'Etat, les receveurs communaux et les receveurs de bureaux de bienfaisance, pour sûreté de leur gestion, et par des contribuables, négociants ou commissionnaires, en garantie du payement de droits de douanes, d'accises, etc : fr. 420,000.

« Intérêts arriérés du même chef, se rapportant à des exercices clos : fr. 3,000.

« Ensemble : fr. 423,000. »


« Art. 27. Intérêts des consignations (loi du 26 nivôse an XIII), ainsi que des cautionnements assimilés aux consignations par l'article 7 de la loi du 15 novembre 1847 : fr. 120,000. »

« (Les crédits portés au présent chapitre ne sont point limitatifs.) »

Vote sur l’ensemble du projet

- On passe au texte du projet de budget :

« Article unique. Le budget de la dette publique est fixé, pour l'exercice 1837, à la somme de trente-sept millions sept cent quinze mille trois cent cinquante et un francs huit centimes (37,715,351 fr. 8 c), conformément au tableau ci-annexé. »

- Adopté.

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

58 membres sont présents.

56 membres répondent oui.

2 membres (MM. David et Pierre) s'abstiennent..

En conséquence, la Chambre adopte. Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Ont répondu oui : MM. Ansiau, Anspach, Boulez, Brixhe, Coomans, Dautrebande, de Baillet-Latour, de Bronckart, de Brouwer de Hogendorp, de Decker, de Haerne, de La Coste, de Man d'Atlenrode, F. de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, de Theux, Dubus, Dumon, Faignart, Frère-Orban, Goblet, Jacques, Jouret, Julliot, Lambin, Landeloos, Lange, Laubry, Lebeau, Loos, Magherman, Mascart, Matthieu, Mercier, Moncheur, Moreau, Rodenbach, Rogier, Rousselle, Sinave, Tack, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Vermeire, Veydt, Wasseige et de Naeyer.

M. le président. - Les membres qui se sont abstenus sont invités à faire connaître les motifs de leur abstention.

M. David. - Je n'ai pas voté contre le budget de la dette publique parce qu'il contient des dépenses auxquelles nous ne pouvons pas nous soustraire ; d'un autre côté, je ne pourrais lui donner mon vote approbatif aussi longtemps que la loi sur les pensions militaires n'aura pas été révisée de manière à exonérer notablement le trésor public.

M. Pierre. - Les irrégularités graves qui ont été signalées tout à l'heure et l'autre motif indiqué par mon honorable ami, M. David, ne m'ont pas permis de donner au budget un vote approbatif. Les autres articles figurant à ce budget n'offrent pas de difficultés et sont admissibles ; cette considération m'a empêché d'émettre un vote négatif.

- Le projet de loi sera transmis au Sénat.

Motions d’ordre

M. Thiéfry. - Je pensais que M. le ministre de la guerre aurait assisté à la discussion du budget de la dette publique où il est question des pensions militaires, qui ont subi une notable augmentation par suite de l'exécution de l'arrêté du 6 avril 1855.

Quoique M. le ministre des finances nous ait dit qu'à l'avenir il n'y aurait plus une augmentation aussi sensible que celles signalées par l'honorable M. Osy, il est toujours vrai que, par cet arrêté, on mettra à la pension des hommes valides et dont l'expérience et les connaissances militaires pourraient encore être très utiles à l'armée et au pays.

Je voulais profiter de cette occasion pour faire, par motion d'ordre, des observations que je crois ne pouvoir ajourner. Comme il y a au banc ministériel un ancien militaire qui comprendra facilement la valeur de mes observations, je puis les présenter malgré l'absence de M. le ministre de la guerre qui, du reste, les lira dans les Annales parlementaites.

Des projets de loi très importants ont été présentés pour des travaux à construire à Anvers ; il est dit dans l'exposé des motifs que le gouvernement ne fait aucune difficulté d'admettre en principe l'extension que comporte le projet publié par M. Rogier et compagnie. Il pourrait donc se faire que des changements fussent apportés aux forts construits, ou que la Chambre elle-même en adoptât sur la proposition de l'un de ses membres.

Il me paraît qu'il serait au moins convenable que la question fût résolue avant d'y exécuter de nouveaux ouvrages, surtout quand ils ne sont pas d'une absolue nécessité.

On vient cependant de procéder à une adjudication publique pour la construction de 5 hangars dans les forts n°1, 3, 5, 6 et 7 du camp retranché, le devis s'en élevait à 45,725 francs. Eh bien, ces hangars sont complètement inutiles, ils sont destinés à abriter en temps de paix le matériel de l'artillerie et celui du génie. Or il y a, dans les forts mêmes, des locaux suffisants pour leur conservation ; on a construit dans chacun d'eux des réduits avec casemates, avec des logements pour 900 hommes. Plus de 30 membres de cette Chambre les ont visités l'année dernière. L'espace ne manque donc pas pour mettre le matériel à l'abri du mauvais temps. Je prie M. le ministre des travaux publies d'inviter son collègue à ne pas approuver l'adjudication qui vient d'avoir lieu avant de s'être assuré si mes observations ne sont pas fondées.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - J'aurai l'honneur d'appeler l'attention de mon collègue de la guerre sur les observations de l'honorable M. Thiéfry ; je ne doute pas qu'à la première occasion il ne s'empresse de donner des explications satisfaisantes. Dans l'intervalle il examinera, comme vient de le faire ressortir l'honorable membre, s'il y a convenance de suspendre les travaux dont l'adjudication a été annoncée.

Ordre des travaux de la chambre

M. Magherman (pour une motion d’ordre). - Messieurs, il y a quelques jours je proposais de mettre à l'ordre du jour le rapport sur les concessions de chemins de fer dont on venait de faire le dépôt. M. le président me fit remarquer qu'on n'avait l'habitude de fixer le jour de la discussion du projet qu'après la distribution du rapport. Celui dont il s'agit vient d'être distribué ; ma proposition peut donc venir en temps utile.

Je la renouvelle parce que contrairement à l'observation de M. le président on a porté à l'ordre du jour un rapport fait depuis ma première proposition et qui"n'est pas encore distribué ; je veux parler du projet de révision des lois relatives au régime commercial. On pourrait continuer à procéder ainsi et postposer le projet de loi relatif aux chemins de fer dont l'urgence est constatée à l'évidence. Je prie la Chambre de mettre ce rapport à l'ordre du jour après le budget des travaux publics et d'y joindre le chemin de fer de Luttre à Denderleeuw.

M. le président. - Nous ne sommes plus en nombre.

M. Magherman. - C'est parce que je craignais ce résultat que ja voulais faire ma motion avant l'appel nominal.

- La séance est levée à 4 heures et un quart.