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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 20 février 1862

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1861-1862)

(page 763) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Moor, secrétaire, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart.

M. de Florisone, secrétaire, lit le procès-verbal de la dernière séance.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Moor, secrétaire, présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Le sieur Léon Orts présente des observations sur les explications données par M. le ministre des travaux publics au sujet d'un système de locomotives attribué à M. l'ingénieur Belpaire et demande une rémunération, comme étant le véritable inventeur de ce système. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion.


« Les sieurs Hilgers et compagnie se plaignent que la poudrerie de Wetteren soit seule appelée à fournir au département de la guerre les poudres nécessaires au service de l'armée. »

M. Guillery.— Messieurs, cette pétition soulève une question très importante ; elle touche à la liberté du commerce ; elle touche également à l'application de la loi de comptabilité.

Je propose le renvoi de la pétition à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Par deux lettres, en date du 19 février 1862, M. le ministre de la justice renvoie à la Chambre, avec les pièces de l'instruction, les demandes en obtention de la naturalisation ordinaire, formées par les sieurs P.-J. Peckx, à Bruxelles, et J.-B. Grognier, dit Quélus, domicilié dans la même ville. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


« Le sieur Piette réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir le remplacement du secrétaire communal de Fraipont. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

Proposition de loi relative aux servitudes militaires

Dépôt

M. de Boe (pour une motion d’ordre)µ. - Messieurs, je crois pouvoir demander à la Chambre quelques instants d'attention et arrêter pendant quelques minutes l'examen du budget de l'intérieur. Je n'ai pas l'habitude d'abuser des moments de la Chambre.

Des projets de loi dont les rapports sont entre les mains des membres de l'assemblée depuis un ou deux ans, des pétitions dont l'analyse est très vivement attendue, ne peuvent, grâce à la longueur de nos débats, aboutir à une discussion.

Au nombre de ces pétitions se trouve celle qui a été adressée à la Chambre par le conseil provincial d'Anvers il y a près d'un an, relativement aux servitudes militaires.

Depuis quinze jours, nous discutons le budget de l'intérieur ; nous ne savons quand cette discussion se terminera et quand, dès lors, la Chambre pourra aborder celle de la question concernant les servitudes militaires.

Messieurs, la députation anversoise soutiendra devant vous les réclamations de ses commettants, ses membres sont inscrits depuis le dépôt du rapport de la commission des pétitions. Son but est d'arriver à une législation nouvelle qui sauvegarde le droit de la propriété.

Afin d'activer autant que possible le dépôt de cette loi nouvelle, afin de mettre en quelque sorte le gouvernement en demeure de déposer un projet, j'ai l'honneur de soumettre à la Chambre une proposition de loi ainsi conçue...

MpVµ. - Je dois faire observer à M. de Boe que, conformément au règlement, sa proposition doit être déposée sur le bureau et puis renvoyée aux sections pour savoir si elles en autorisent la lecture.

M. de Boe. - Je voudrais que la Chambre fût saisie de la proposition de loi.

M. Guilleryµ. - Déposez-la sur le bureau.

M. de Boe. - Je vais la déposer.

MpVµ. - La proposition de M. de Boe sera communiquée aux sections, conformément au règlement.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1862

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XV. Enseignement supérieur

Discussion générale

MpVµ. - La discussion s'ouvre sur le chapitre XV (enseignement supérieur).

M. Tack. - Messieurs, je profite de la discussion du chapitre XV, concernant l'instruction, pour demander à l'honorable ministre de l'intérieur quelques explications au sujet de la manière dont son département a interprété certaine disposition de la loi sur l'examen de gradué en lettres.

Cette loi a été votée, vous vous le rappellerez, l'année dernière. Tous les honorables membres qui ont assisté aux débats qu'elle a soulevés, se souviendront que l'une des préoccupations constantes de la Chambre fut de faire en sorte que cette loi ne pût pas avoir d'effet rétroactif ni enlever à personne des droits acquis.

Cette volonté expresse a été formulée dans l'article 9 de la loi, qui statue qu'elle n'est pas applicable à ceux qui ont satisfait aux prescriptions analogues de la loi du 1er mai 1857.

Je viens de citer le texte de l'article 9 : il veut dire que tous les élèves qui avaient terminé leurs études pendant l'année scolaire 1859-1860 ou, si vous voulez, avant la fin de 1860, étaient dispensés de subir l'examen de gradué en lettres, moyennant de produire un certificat constatant qu'ils avaient achevé leurs humanités jusqu'à la rhétorique inclusivement.

Or, une circulaire ministérielle du 28 juin dernier enlève le bénéfice de cette disposition à toute une catégorie de jeunes gens, à ceux qui se trouvent porteurs de certificats en règle, mais qui, pour des motifs quelconques, n'ont pas jugé jusqu'à présent utile de les faire homologuer.

Cette interprétation est illégale et évidemment contraire à la disposition de l'article 9 que je viens de citer.

Jusqu'à présent, je n'ai entendu produire aucune raison solide à l'appui de cette manière de procéder.

Je crois donc qu'il conviendrait que pour la session prochaine la circulaire du 28 juin 1861 fût modifiée, et rapportée, au besoin.

Je voudrais savoir si M. le ministre de l'intérieur est disposé à entrer dans cette voie et à faire respecter les droits acquis des jeunes gens qui se trouvent dans le cas que je viens d'indiquer.

MiVµ. - Messieurs, comme vient de le dire l'honorable M. Tack, l'article 9 de la loi indique les jeunes gens qui seront, par disposition transitoire, dispensés de passer l'examen de gradué en lettres. La catégorie d'élèves dont parle l'honorable membre est parfaitement déterminée : ce sont les jeunes gens qui, ayant fait leurs études avant la promulgation de la loi, n'ont pas fait homologuer leurs certificats en temps utile.

Le gouvernement a pensé, - ces faits se sont passés avant mon entrée au ministère, - que les catégories d'élèves auxquelles il est fait allusion n'étaient pas comprises dans la disposition de l'article 9.

Je pourrais, messieurs, si vous le voulez, traduire en quelque sorte cette disposition et vous pourriez reconnaître alors que les jeunes gens dont on parle ne sont pas compris dans les exceptions mentionnées dans cette disposition.

L'article est transitoire et les exceptions en général sont de stricte interprétation.

Le conseil de perfectionnement de l’enseignement moyen a été appelé à délibérer sur cette disposition et il a examiné même la déclaration faite à la Chambre à cette époque par M. Rogier, ministre de l'intérieur.

Cette déclaration est ainsi conçue :

« M. le ministre de l'intérieur. - Le jury chargé de vérifier les certificats d'études institués par la loi du 1er mai 1857, a terminé sa mission. Pourrait-on autoriser le nouveau jury chargé de recevoir les certificats institués par la nouvelle loi à homologuer les certificats de jeunes gens qui ont fait leurs études, qui les ont terminées dans le courant de l'une des années 1857,1858, 1859, 1860 et qui pour un motif quelconque n'ont pas fait approuver leurs certificats ?

« De toutes parts. - Sans doute.

« M. le ministre ajoute. - Les jeunes gens qui justifieront d'avoir terminé leurs études dans le courant de l'une des quatre années précédentes, seront admis à produire leurs certificats en 1861. »

Or, messieurs, le conseil de perfectionnement et l'honorable ministre de l'intérieur, après lui, ont interprété cette disposition en ce sens que les certificats délivrés antérieurement à 1861, seraient valables, mais jusqu'au moment où ils auraient été homologués. Il est évident que les certificats délivrés avant la promulgation de la loi n'ayant aucun caractère officiel, et je pourrais dire aucune date certaine, il était difficile de leur donner en quelque sorte un caractère authentique.

(page 764) Ils sont donc encore admis aujourd'hui comme les certificats délivrés depuis, seulement ils ne dispensent plus les élèves de passer l'examen de gradué en lettres.

La Chambre comprendra que s'il était possible de produire après un certain nombre d'années de mise en vigueur de la loi actuelle des certificats antérieurs, cela pourrait donner lieu à des difficultés très grandes et même à des fraudes.

Le motif principal qui a déterminé mon honorable prédécesseur à agir comme il l'a fait, c'est qu'il a cru que comme les certificats n'avaient aucun caractère authentique, aucune date certaine, ils ne pouvaient être admis. Je crois, au surplus, que les cas dont il peut être ici question sont extrêmement rares. Je me borne à indiquer la marche qui a été suivie par le département de l'intérieur, en cette matière, et les motifs qui l'ont déterminé.

M. Tack. - Je regrette de devoir dire que la réponse de M. le ministre de l'intérieur ne peut nullement me satisfaire.

Si le point en discussion n'est pas très grave quant à ses conséquences, il présente, sous un autre rapport, un véritable intérêt ; car, au fond, de quoi il s'agit-il ? Il s'agit de questions de principe. Est-il permis de modifier, par disposition ministérielle, le sens et la portée de la loi, fût-ce sous prétexte de la corriger ?

En second lieu, est-il permis d'imprimer à la loi un effet rétroactif ? Non.

Or, c'est ce que fait la circulaire ministérielle du 28 juin 1861.

M. Muller. - C'est la question.

M. Tack. - Eh bien, je vais traiter la question.

L'honorable ministre, au lieu d'aborder directement la difficulté, me semble l'avoir plutôt tournée ; il ne l'a pas résolue, il l'a éludée.

De ce que des abus sont possibles, même probables, ce que je conteste, car, pour ma part, je ne pense pas qu'il faille les appréhender, je dirai tantôt pourquoi ; mais de ce que des abus soient possibles, ce ne serait pas une raison pour changer la portée de dispositions légales ; la loi fût-elle mille fois absurde, avant tout il faut l'appliquer et la respecter.

La Chambre me permettra de préciser le débat et de remonter un instant à la législation sur la matière. La question est assez compliquée, et je pense que la Chambre voudra bien m'accorder quelques instants de bienveillante attention ; je tiens à le répéter, au fond la controverse soulevée est très importante.

La loi de 1857 a été une réaction contre la législation antérieure ; la loi de 1857 a introduit un système nouveau et en même temps absolu ; le système de certificats qui a remplacé le régime de l'examen préalable. Avant la loi de 1857, et par application de la loi de 1849, l'élève devait passer, avant de subir ses examens universitaires, l'examen préalable connu sous le nom d'examen d'élève universitaire.

Ainsi, sous le régime de la loi de 1849, c'était le système absolu de l'examen préalable qui était en vogue ; sous le régime de la loi de 1857, c'est le régime absolu des certificats qui a été préféré.

La loi de 1861 a consacré un système mixte, elle a admis les certificats pour certaines branches d'études, pour d'autres branches elle a introduit l'examen préalable qu'on a appelé examen de gradué en lettres.

Le texte de l'article 9 de la loi du 27 mars 1861 porte, comme je l'ai dit tantôt, que la loi de 1861 n'est pas applicable à ceux qui ont satisfait aux prescriptions de la loi du 1er mai 1857, ce qui signifie : ceux qui sont pourvus de certificats sont dispensés de subir l'examen de gradué en lettres.

Jusqu'ici je suis d'accord avec M. le ministre de l'intérieur.

La difficulté naît sur le point de savoir si le jury nouveau peut homologuer des certificats délivrés par application de la loi du 1er mai 1857 aux mêmes fins que le jury ancien.

En deux mots le certificat ancien, homologué par le jury actuel, a-t-il pour effet de dispenser de l'examen de gradué en lettres, ou dispense-t-il seulement de l'examen supplémentaire ?

L'honorable ministre de l'intérieur ne donne au certificat qu'une portée restreinte.

Eh bien, il suffit de jeter les yeux sur la discussion qui a eu lieu dans cette enceinte en 1861 pour se convaincre que le système soutenu par M. le ministre de l'intérieur n'est point admissible. Il ne suffit pas de citer quelques lambeaux isolés de la réponse de l'honorable M. Rogier, ministre de l'intérieur à cette époque ; il faut, pour comprendre le sens de sa réponse, la rapprocher de l'interpellation qui l'a provoquée.

Or, je vais donner lecture des discussions qui ont eu lieu à ce propos, et vous allez vous convaincre qu'évidemment, il ne s'agissait pas seulement de faire valoir les certificats à l'effet de dispenser de l'examen supplémentaire, mais bien à l'effet de dispenser de l'examen de gradué en lettres.

Voici, messieurs, ce qui a été dit au premier vote :

« M. le président. - M. le ministre de l'intérieur propose une nouvelle rédaction de cet article ; elle est ainsi conçue :

« Les dispositions des articles 2 et suivants de la présente loi ne sont pas applicables à ceux qui auront satisfait aux prescriptions analogues, soit de l'article 31 paragraphe premier ou de l'article 65 paragraphe 9 de la loi du 15 juillet 1849, soit de l'article 2 de la loi du 1er mai 1857, ou qui auront profité du bénéfice de l'article 56 de cette dernière loi. »

« M. le rapporteur du projet de loi ne voit-il pas d'inconvénient à ce que ce nouveau texte soit substitué à celui de la section centrale ?

« M. Devaux, rapporteur. - Non, M. le président.

« M. le ministre de l'intérieur. - Il s'agit de ménager la transition et de respecter les droits acquis sous l'empire de la législation précédente. Cet article s'applique à différentes catégories d'élèves.

« M. Tack. - Je désire que M. le ministre de l'intérieur nous dise si l'amendement qu'il vient d'introduire à l’instant laisse aux récipiendaires plus de latitude, leur est plus favorable, et moins restrictif, en un mot, que l'article 9 qu'il remplace.

« Il est impossible de saisir, par une simple lecture, la portée de cet amendement qui vise une série de dispositions de lois que personne n'a présentes à l'esprit. Il est donc essentiel que M. le ministre s'explique.

« M. le ministre de l'intérieur. - Il offrira plus de latitude. Si l'on veut, je donnerai des explications au second vote.

« M. de Theux. - Il serait préférable que M. le ministre donnât les explications aujourd'hui, sans cela nous serions pris au dépourvu.

« M. le ministre de l'intérieur. - J'avais préparé une note explicative sur chaque amendement, je ne l'ai pas sous la main.

« M. de Theux. - On pourrait insérer la note au Moniteur.

« M. le ministre de l'intérieur. - Il est inutile de faire cette insertion au Moniteur. Il s'agit d'une mesure toute favorable aux élèves, il ne peut y avoir aucun inconvénient à ce que les explications soient données au second vote.

« - L'article 9, tel que propose de le rédiger M. le ministre de l'intérieur, est mis aux voix et adopté. »

M. Guilleryµ. - Qu’est-ce que cela prouve ?

M. Tack. - Je vais vous donner la suite et vous le verrez.

Et d'abord, il est évident, par la citation que je viens de faire, que la pensée du ministre a été de dispenser l'élève de l'examen de gradué en lettres. Il voulait étendre le texte primitif qu'il amendait. D'après ce texte, les élèves qui avaient commencé leurs études universitaires à la fin de 1860, étaient dispensés de l'examen de gradué en lettres.

Voici maintenant l'interpellation faite au second vote, et la réponse du ministre.

« M. Tack. - Messieurs, l'article 9 a été introduit dans le projet de loi pour sauvegarder les droits acquis et empêcher que la loi n'eût un effet rétroactif. Tel que vous êtes appelés à le voter, il constitue un amendement proposé par M. le ministre de l'intérieur, et à la rédaction primitive du projet de loi et à celle qui avait été adoptée par la section centrale.

« L'amendement me paraît un peu obscur ; il est assez difficile d'en saisir la véritable portée. Il semblerait d'après son texte, rigoureusement interprété, que le récipiendaire ne pourra faire valoir que les certificats déjà acceptés antérieurement par le jury.

« Or, messieurs, je ne pense pas que cette restriction concorde avec l'intention de l'honorable ministre de l'intérieur, puisque sa première rédaction ne comportait pas une pareille limitation.

« Je crois que les termes de l'article 9 signifient que les dispositions de l'article 2 et les suivantes ne sont pas applicables à ceux qui se trouvaient, au moment de la publication de la présente loi, en mesure de satisfaire aux prescriptions des lois antérieures.

« En d'autres termes, je pense que l'article 9 veut dire ceci : Sont dispensés de l'examen de gradué en lettres, d'abord ceux qui pourront produire un diplôme d'élève universitaire délivré en vertu de la loi du 15 juillet 1849 ; en second lieu, ceux qui prouveront qu'ils ont commencé leurs études universitaires avant 1857 ; en troisième lieu, ceux qui prouveront qu'au moment de la publication de la loi actuellement en discussion, ils avaient fréquenté un cours d'humanités et qui justifieront de cette position au moyen d'un certificat.

« Ainsi, pour ne citer qu'un exemple : les jeunes gens qui ont terminé leurs études au mois d'août dernier et qui se présenteront devant le jury, ne seront pas obligés de subir l'examen de gradué en lettres, du moment qu'ils apporteront un certificat constatant qu'ils ont suivi un cours (page 765) d'humanités conformément aux prescriptions de la loi de 1857, sous l'empire de laquelle ils se trouvaient placés.

« M. le ministre de l’intérieur. Messieurs, la loi s'applique aux élèves qui suivent le cours de rhétorique cette année. Ceux qui ont fini leur rhétorique l'année dernière, ou bien ont obtenu un certificat, et alors ils sont parfaitement en règle, ou bien ils n'ont pas obtenu de certificat, et dans ce cas ils pourront en réclamer un.

« A défaut de certificat, ils auront la faculté de subir l'examen supplémentaire.

« Il n'y a plus de jury devant lequel ces jeunes gens pourraient se présenter aujourd'hui pour produire leur certificat. Le jury chargé de vérifier les certificats d’études moyennes, institué par la loi du 1er mai 1857, a terminé sa mission. Pourrait-on autoriser le nouveau jury chargé de recevoir les certificats institués par la nouvelle loi à homologuer les certificats des jeunes gens qui ont fini leurs études d'humanités dans le courant de l'une des années 1857, 1858, 1859 et 1860, et qui, pour un motif quelconque, n'ont pas fait approuver leur certificat ?

« - De toutes parts. - Sans doute.

« M. le ministre de l'intérieur. - Ainsi les jeunes gens qui justifieront d'avoir terminé leurs études dans le courant de l'une des quatre années précédentes, seront admis à produire leurs certificats en 1861 (C'est cela !)

« M. Tack. - Messieurs, je suis satisfait de la déclaration que M. le ministre de l'intérieur vient de faire. Cette déclaration concorde avec mes vues et lève le doute que pouvait présenter la nouvelle rédaction de l'article 9. »

Il me semble que c'est clair en présence des explications données par M. le ministre de l'intérieur ; tout récipiendaire ayant terminé ses études avant 1860, et muni d'un certificat en due forme, n'importe par quel jury il est homologué, doit être dispensé de l'examen de gradué en lettres. Du reste cela est conforme à l'esprit de la loi.

Vous le voyez par les discussions. L'honorable ministre de l'intérieur lui-même ayant remarqué que le texte primitif était trop restreint, lui a donné toute l'extension possible, et pour en faire comprendre la portée il a énuméré une série de cas divers.

Il a poussé le scrupule jusqu'à prévoir l'hypothèse presque impossible d'un candidat qui aurait terminé ses études avant 1849. Bref, il a voulu sauvegarder les droits de tous et empêcher que la loi n'eût un effet rétroactif.

La même pensée a dominé au sein de la section centrale et du sénat.

Le texte de la loi est-il obstatif à l'interprétation que je défends ? Nullement, car elle porte :

« Les dispositions des article 2 et suivants de la présente loi ne sont pas applicables à ceux qui auront satisfait aux prescriptions analogues ... de l'article 2 de la loi du 1er mai 1857. »

C'est-à-dire à ceux qui apporteront un certificat de fréquentation des cours homologué par le jury, soit, d'après mon interpellation et d'après la réponse de M. le ministre de l'intérieur, par le jury ancien ou par le jury nouveau.

Est-ce que quelqu'un, à l'époque de la discussion de la loi de 1861, a songé à dire que les jeunes gens qui n'auraient pas fait homologuer leur certificat par le jury ancien, ne seraient pas dispensés de l'examen de gradué en lettres, mais seulement de l'examen supplémentaire ?

Si quelqu'un l'avait fait, je me serais levé à l'instant pour protester et déclarer qu'il ne comprenait pas ma pensée.

Du reste le système préconisé par M. le ministre de l'intérieur conduit à des conséquences absurdes ; pour s'en convaincre, il suffit de comparer l'économie respective de la loi de 1857 et de celle de 1861. Sur quoi doit répondre l'élève qui subit l'examen de gradué en lettres ? Il doit faire preuve de capacité dans les lettres grecques et latines, il est interrogé en outre sur l'algèbre et la géométrie. Voilà quel est l'objet de l'examen de gradué en lettres.

Que constate spécialement le certificat délivré par application de la loi de 1601 ? Que l'élève a fréquenté des cours d'histoire grecque et romaine et d'histoire de Belgique, qu'il a étudié les principes de rhétorique, la géographie, l'arithmétique, le flamand, l'allemand ou l'anglais, enfin qu'il possède des notions de physique.

D'autre part, le certificat délivré par application de la loi de 1857 atteste spécialement que l'élève est apte à faire une traduction du latin, une traduction de la même langue en français, une traduction du grec en français, qu'il a étudié l'algèbre et la géométrie ; en d'autres mots ce certificat est le corollaire de l'examen de gradué en lettres, et on voudrait l'assimiler au certificat supplémentaire exigé par la loi de 1861. Donner la même importance à deux certificats entièrement disparates, qui n'ont pas entre eux la moindre analogie, est-ce une chose admissible ?

Quelle est la conséquence des articles 17 et 18 de la circulaire que je viens de citer ? C'est qu'on fait dire au certificat produit ce qu'il ne dit pas et tout en homologuant, en attestant la sincérité de son contenu, on ne tient aucun compte de ce qu'il constate.

Le certificat délivré en vertu de la loi de 1857 atteste que le jeune homme est apte à faire une traduction latine et grecque, ainsi qu'une composition latine, qu'en outre il est versé dans l'algèbre et la géométrie, et on lui fait dire que le récipiendaire a étudié l'histoire, la géographie, la physique. Cela est-il logique ?

L'honorable ministre a parlé des abus qui pouvaient résulter de mon interprétation. Je l'ai déjà fait observer, qu'importe si elle est conforme à la loi. Au reste c'est critiquer le principe même de la loi de 1861 qui admet les certificats.

Et puis il ne faut pas présumer ici facilement la fraude. Elle serait beaucoup trop facilement découverte. Peut-on supposer qu'un professeur aille aisément et maladroitement se compromettre au point de délivrer un certificat constatant qu'un jeune homme a terminé ses études en 1860, alors qu'il était encore sur les bancs du collège en 1861 ou en 1862 ?

Je concevrais les appréhensions de M. le ministre de l'intérieur si le jury nouveau présentait moins de garanties que le jury ancien ; mais il a les mêmes droits, les mêmes prérogatives ; il peut se livrer à un examen approfondi des pièces qu'on lui soumet, il peut s'entourer de toute sorte de lumières. Il apprécie si les certificats présentent tous les caractères de sincérité ou non.

Ainsi ces abus qui effrayent tant M. le ministre de l'intérieur ne sont pas à craindre.

M. le ministre objecte qu'il s'agit d'une disposition transitoire, que toute disposition transitoire doit être strictement interprétée. En thèse générale oui, mais non pas en ce qui concerne les objets qui appartiennent évidemment à la période transitoire que la loi a en vue.

Je pourrais, d'ailleurs, opposera ce brocard de droit une autre maxime, et dire qu'il s'agit d'une disposition favorable, que par conséquent il faut l'étendre autant que possible, favorabilia extendenda.

Le conseil de perfectionnement, ajoute l'honorable ministre, a été saisi de la question. J'ai beaucoup de confiance dans les lumières du conseil de perfectionnement ; mais il peut se tromper. Et l'erreur est d'autant plus naturelle, que les dispositions organiques destinées à mettre à exécution la loi, ont dû être rédigées assez précipitamment. Il ne serait pas étonnant, dès lors, qu'une méprise se soit glissée dans son travail. Il n'est pas trop tard pour en revenir.

Si le conseil de perfectionnement n'a pas vu autre chose que les déclarations faites en 1861, par M. le ministre de l'intérieur, ne les a pas rapprochées de mon observation, je ne m'étonne pas qu'il ait pris une décision dans le sens de la circulaire ministérielle du 18 juin 1861, et je demeure convaincu que s'il avait eu toute la discussion sous les yeux, il n'aurait pas manqué de statuer dans un sens diamétralement opposé.

M. le ministre nous dit : Le nombre des élèves dont il s'agit est peu considérable. Je l'admets, c'est une raison de plus pour se montrer facile et ne pas être trop exigeant à leur égard. Nous avons vécu si longtemps sous le régime des certificats. Qu'importe qu'une dizaine d'élèves de plus passent à l'université à la faveur de ce régime ? S'ils sont incapables, ils seront arrêtés au moment où ils devront passer leur examen de science ou de philosophie.

J'insiste par conséquent pour demander que les dispositions des articles 17 et 18 de la circulaire du 28 juin 1861 soient modifiées, ou plutôt qu'elles soient rapportées ; j'espère que M. le ministre de l'intérieur voudra bien faire examiner la question de plus près, pour voir, s'il ne lui est pas possible de se rallier à mon opinion.

Je désire maintenant poser une autre question à M. le ministre de l'intérieur.

Un arrêté du 14 octobre dernier a institué une commission chargée d'examiner quelles sont les modifications qu'il convient d'apporter à la loi sur l'enseignement supérieur.

Cet arrêté a été pris, je pense, en exécution de l'article Ier de la loi du 27 mars 1857.

Si je dois en croire les informations de la presse, la commission aurait terminé ses travaux. Elle a dû nécessairement s'occuper des grandes questions qui ont été si souvent agitées parmi nous. La question de la composition du jury, la question des certificats d'études : maintiendra-t-on les certificats d'études ou non ? Se bornera-t-on à des certificats de présence ou admettra-t-on des certificats de capacité à délivrer par les facultés des quatre universités ? »

(page 766) Toutes ces questions ont sans doute fait l'objet de l'examen de la commission.

Je voudrais que le gouvernement nous fît connaître s'il est en mesure de présenter un projet de loi. Je voudrais aussi qu'il fît connaître ses vues, pour autant qu'il ait un plan arrêté sur cette matière importante.

Il n'y a eu que trop de tâtonnements et d'hésitations, il importe que la loi sur l'enseignement supérieur acquière enfin de la fixité. L'incertitude qui plane sur cet enseignement est nuisible aux bonnes études comme à la liberté d'action des professeurs et à l'intérêt des élèves et des pères de famille.

Je compte que l'honorable ministre de l'intérieur nous donnera des renseignements sur l'objet dont je viens de l'entretenir.

MiVµ. - Messieurs, je crois pouvoir me dispenser de rencontrer les nombreuses observations présentées par l'honorable M. Tack.

Sur le premier point je me bornerai à dire à la chambre que, d'après mon honorable prédécesseur et le conseil de perfectionnement, l'article 9 de la loi ne permet pas d'admettre au bénéfice de cet article les jeunes gens dont le certificat n'a pas été homologué en temps utile.

Les dispositions de cet article ne sont pas générales : il spécifie au contraire les exceptions admises. Il suffit, messieurs, de lire cet article pour s'en convaincre. En voici le texte :

« Art. 9. Les dispositions de l'article 2 et suivants de la présente loi ne sont pas applicables à ceux qui auront satisfait aux prescriptions analogues, soit de l'article 37, paragraphe premier, ou de l'article 65, paragraphe 9 de la loi du 15 juillet 1849, soit de l'article 2 de la loi du 1er mai 1857, ou qui auront profité du bénéfice de l'article 56 de cette loi.

« La disposition du paragraphe 2 du n°7° de l'article 3 n'est pas applicable aux récipiendaires qui se présenteront à la session de 1861.

« Ceux qui prouveront avoir commencé leur stage notarial avant le 1er mai 1860, sont également dispensés de l'examen établi par la présente loi. »

Or, toutes les lois invoquées ici s'appliquent à des cas spéciaux ; je pourrais les citer. L'article 37 paragraphe premier de la loi du 15 juillet 1849, par exemple, parle du récipiendaire qui a acquis le grade d'élève universitaire sous l'empire de la loi du 5 juillet 1849.

Je ne veux pas abuser des moments de la Chambre, mais je pourrais traduire en quelque sorte toutes les exceptions et dire ce que signifie chacun des numéros indiqués dans l'article 9.

L'honorable M. Tack pense que le conseil de perfectionnement a pu se tromper.

C’est possible, errare humanum est, mais l'honorable M. Tack peut errer aussi. Je dois croire que le conseil de perfectionnement et mon honorable prédécesseur n'ont pas erré, car le conseil de perfectionnement a émis son opinion à l'unanimité et il ne s'est prononcé qu'après avoir mûrement examiné la discussion tout entière.

Mon honorable prédécesseur a décidé la question et devait connaître le sens qu'il attachait à la déclaration dont il vient d'être donné lecture.

Je ne puis pas, du reste, et la chambre le comprendra, je ne puis pas, dis-je, en présence de l'examen sérieux fait par le conseil de perfectionnement et de l'interprétation donnée par l'honorable M. Rogier à ses paroles, prendre l'engagement de retirer la circulaire et de donner à la déclara-ton de mon honorable collègue une interprétation différente de la sienne.

Quant au second point dont vient de parler l'honorable membre, la commission qui a été chargée de préparer un projet de révision de la loi du 1er mai 1857 sur les jurys universitaires, s'est réunie ; elle s'est occupée des différents points que vient d'indiquer l'honorable M. Tack : on s'est prononcé sur la question des jurys d'examen, sur la question des certificats et des programmes.

Le rapport de la commission est terminé et m'a été adressé ; il reste cependant à y ajouter quelques annexes. Le gouvernement fera connaître en temps utile, à la chambre, la décision qu'il aura prise, et la chambre statuera.

M. Tack. - Messieurs, l'honorable ministre de l'intérieur n’a pas répondu d’une manière catégorique aux observations que j’ai présentées. Il nous dit : « C’est une série d’exceptions. Le texte primitif de l’article 9 énonçait un principe général, et comme on a craint qu’il ne fût pas compris, M. le ministre est venu faire une énumération de tous les cas possibles.

Je vous ai cité le texte de la loi. Je le demande : ce texte est-il obstatif de l'interprétation que je lui donne ?

C'est, messieurs, ne tenir aucun compte des discussions qui ont eu lieu à la Chambre que de vouloir en admettre une autre : mon honorable prédécesseur, dit M. le ministre de l'intérieur, savait très bien le sens qu'il attachait à ses paroles. Je réponds : Je savais aussi le sens que j'attachais aux miennes, sens que j'ai eu soin de préciser.

Je ne me suis même occupé que de la dispense à accorder aux élèves qui n'avaient pas fait homologuer leurs certificats d'humanités par l'ancien jury central des études moyennes.

M. le ministre de l'intérieur m'a répondu : « Ils pourront faire homologuer leurs certificats. » Ces paroles ont rencontré l'adhésion de l'assemblée ; j'ai dit ensuite : « Je me déclare satisfait. » Après cela plus rien.

N'est-il pas évident que M. le ministre de l'intérieur a accepté ma manière de voir ?

Le conseil de perfectionnement, dit l'honorable ministre de l'intérieur, a voté à l'unanimité les dispositions des articles 17 et 18 du règlement ministériel ; je le veux bien ; mais je suis intimement convaincu que si le conseil de perfectionnement eût pris connaissance de la discussion qui a eu lieu dans cette chambre, il eût adopté une disposition toute différente, tellement la réponse qui m'a été faite par M. le ministre de l'intérieur est pertinente.

J'insiste donc pour qu'on revienne de cette décision qui est contraire à la loi. Il n'est pas permis, au moyen d'une circulaire ministérielle, de modifier le sens d'une disposition législative aussi importante que celle qui nous occupe.

- La discussion générale du chapitre XV est close.

On passe aux articles.

Articles 77 à 81bis

« Art. 77. Dépenses du conseil de perfectionnement de l'enseignement supérieur : fr. 4,000. »

- Adopté.


« Art. 78. Traitement des fonctionnaires et employés des deux universités de l'Etat : fr. 639,990. »

- Adopté.


« Art. 79. Bourses. Matériel des universités : fr. 138,710.

« Charge extraordinaire : fr. 30,300. »

- Adopté.


« Art. 80. Frais de route et de séjour, indemnités de séance des membres des jurys d'examen pour les grades académiques, pour le titre de gradué en lettres et pour le grade de professeur agrégé de l'enseignement moyen de l'un et de l'autre degré ; salaire des huissiers des jurys et matériel : fr. 175,120. »

- Adopté.


« Art. 81. Dépenses du concours universitaire. Frais de publication et d'impression des Annales des universités de Belgique : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 81 bis (nouveau). Subsides pour encourager la publication des travaux des membres du corps professoral universitaire et pour subvenir aux frais des missions ayant principalement pour objet l'intérêt de cet enseignement : fr. 12,000. »

- Adopté.

Chapitre XVI. Enseignement moyen

Discussion générale

M. Moutonµ. - Messieurs, je désire appeler l'attention de l'honorable ministre de l'intérieur sur un point important qui se rattache à ce chapitre.

Dans un pays constitutionnel où chaque citoyen peut avoir une part directe ou indirecte dans la puissance publique, il importe qu'il connaisse les institutions libres auxquelles il est soumis, qu'il en apprécie les bienfaits à leur juste valeur et qu'il soit bien pénétré de ses droits comme de ses devoirs.

En un mot, l'éducation politique est un objet digne de la sollicitude du gouvernement.

Or, messieurs, si l'on examine le programme de l'enseignement à tous ses degrés, on constate, sous ce rapport, une lacune regrettable.

(page 767) En effet, pour l'enseignement universitaire, à part la faculté de droit où il existe un cours de droit public constitutionnel pour l'examen de docteur en droit ou de docteur en sciences politiques et administratives, les autres facultés restent complètement étrangères à cette étude.

Ainsi voilà d'abord une fraction assez notable de la jeunesse universitaire, les élèves appartenant aux facultés des sciences, de médecine et de lettres, qui ne sont pas mis à même d'étudier le mécanisme de nos institutions

Dans l'enseignement moyen, la loi organique du 1er juin 1850 prescrit, il est vrai, pour la section des humanités et pour la section professionnelle, des notions de notre droit public.

Les articles 22 et 23 portent en effet :

« Art. 22. L'enseignement des humanités comprend :

« ... 3° Les principaux faits de l'histoire universelle et de l'histoire de la Belgique, la géographie ancienne et moderne et en particulier la géographie de la Belgique, des notions des institutions constitutionnelles et administratives.

« Art. 23. L'enseignement de la section professionnelle comprend :

« ... 3° Les éléments de l'histoire et de la géographie moderne et en particulier les éléments de l'histoire et de la géographie de la Belgique, des notions des institutions constitutionnelles et administratives. »

Mais, si mes renseignements sont exacts, je crois que dans l'exécution de cette partie du programme on glisse fort légèrement sur cette matière, on ne fait en quelque sorte que l'effleurer. Là gît le mal.

Je ne demande pas que le gouvernement crée un cours spécial dans les athénées ; je n'irai pas non plus aussi loin qu'un honorable sénateur qui préconisait l'introduction dans nos écoles primaires d'une espèce de catéchisme politique ; mais je voudrais que pour les cours supérieurs de la section des humanités et de la section professionnelle, on donnât plus de développement à la matière ; bien entendu, sans nuire aux autres branches de l'enseignement.

On y trouverait cet avantage inappréciable d'initier à la connaissance de notre charte constitutionnelle une catégorie nombreuse de jeunes gens, les uns qui se contentent de l'instruction moyenne, les autres qui, abordant les études supérieures, se font inscrire dans des facultés où le cours de droit public n'est pas une matière obligatoire du programme.

L'article 24 de la loi donne, du reste, toute latitude au gouvernement sous ce rapport, puisqu'il l'autorise à créer d'autres cours ou à modifier les cours indiqués aux articles 22 et 23 suivant les besoins des localités.

J'appelle toute l'attention de l’honorable ministre sur ce point spécial. J'espère qu'il voudra bien examiner la question que j'ai soulevée, et il reconnaîtra que je n'en ai pas exagéré l'importance.

M. Hymans. - Messieurs, je demanderai à M. le ministre de l'intérieur s'il ne consentirait pas à instituer une session extraordinaire pour l'examen d'élèves universitaires à Pâques.

Un grand nombre de récipiendaires ont été ajournés à la session de septembre, ils ont été pris en quelque sorte à l'improviste par la loi nouvelle.

Ils se trouvent aujourd'hui dans une position très difficile, placés entre la rhétorique et l'université dans l'impossibilité de continuer leurs études.

Un grand nombre sont entrés à l'université avec l'intention de passer deux examens à la fois : celui de gradué en lettres et celui de candidat en philosophie.

Cela me paraît difficile et ce serait rendre un grand service à ces jeunes gens et faire en même temps un acte de justice et de bienveillance, sans nuire à la bonté des études, que de leur accorder le droit de se représenter à une session extraordinaire de Pâques.

MiVµ. - Messieurs, le cours dont a parlé l’honorable M. Mouton est compris dans le programme des athénées et des collèges communaux ; j'ai lieu de croire que ce programme est exécuté et je veillerai à ce qu'il le soit ; je ne perdrai pas de vue les observations de l'honorable député de Liège.

Quant à la demande qu'a faite l'honorable M. Hymans, je suis tout disposé à y satisfaire.

Un certain nombre de jeunes gens qui ont quitté les athénées et les collèges à la fin de l'année dernière s'étaient fait inscrire pour l'examen de gradué en lettres. Quelques-uns d'entre eux n'ont pas pu se présenter devant le jury ou ont été ajournés.

Dans d'autres circonstances on a admis par exception, et pour une fois bien entendu, une session extraordinaire du jury. Je pense que cela pourrait se faire encore cette fois exceptionnellement.

Les jeunes gens suivant en même temps les cours des universités, s'ils pouvaient passer leur examen de gradué en lettres à Pâques, ne seraient pas exposés à perdre une année. Je suis donc disposé à me rendre au vœu exprimé par l'honorable député de Bruxelles.

Je crois cependant que, vu le nombre assez restreint des récipiendaires, il serait inutile d'instituer des jurys dans les trois ressorts de nos cours d'appel et en outre un jury central à Bruxelles pour l'homologation des certificats : un seul jury suffira, on évitera ainsi des dépenses considérables. Ce jury pourrait siéger à Bruxelles et être composé de manière à présenter toutes les garanties désirables d'impartialité.

Il y aurait cependant une augmentation de dépense, et si la chambre partage ma manière de voir, je la prierai de vouloir bien revenir sur l'article 80 du chapitre 15, « Enseignement supérieur, frais de route et de séjour, indemnité des séances des membres du jury, etc., » et d'augmenter ce chiffre de 5,000 fr., somme supposée nécessaire pour payer les frais de séjour et de déplacement des membres de ce jury extraordinaire.

MpVµ. - M. le ministre de l'intérieur propose de revenir sur l'article 80, chapitre XV pour y ajouter 5,000 fr.

MiVµ. - Je ferai observer, en outre, qu'une partie des frais est remboursée au moyen de la rétribution payée par les élèves pour leur inscription et figure en recette au budget des voies et moyens.

M. B. Dumortier. - Messieurs, je suis loin de m'opposer à la proposition faite par l’honorable ministre de l'intérieur de voter une allocation spéciale de 5,000 fr. pour une session extraordinaire du jury à Pâques.

Je déclare, au contraire, que, dans mon opinion, cette dépense est absolument indispensable.

Beaucoup de jeunes gens ont été ajournés, et, comme on nous l'a dit avec raison, ils perdraient une année si l'on n'adoptait pas la mesure proposée.

Mais il est un point sur lequel j'appellerai l'attention de M. le ministre de l'intérieur, c'est sur la manière dont se passent les examens de gradué en lettres, ou, comme on voudra, d'élève universitaire.

On avait dit que l'examen aurait été rendu moins difficile qu'il y a 10 ans, alors qu'existait le grade d'élève universitaire. Eh bien, on a fait le contraire.

Après avoir réglé le nombre des matières, certains jurys ont exigé que l'élève obtînt dans l'examen écrit la moyenne des points sur chacune des tranches.

M. de Naeyer. - Le tiers.

M. B. Dumortier. - Soit, le tiers des points, tandis qu'il suffisait autrefois d'obtenir le tiers des points sur l'ensemble de l'examen.

Il en est résulté une chose vraiment extraordinaire. Nous avons vu par les journaux qu'un jeune homme qui avait obtenu le prix de grec dans le concours de tous les athénées et collèges n'avait pas été admis à l'examen d'élève universitaire.

Ce n'est que lorsque le jury a su que l'élève avait été le premier dans le concours de tous les athénées et collèges, que, se repliant sur lui-même et revenant sur son premier jugement, il a admis cet élève.

Qu'est-ce que cela prouve ? Cela prouve que de pareils jurys sont une calamité pour les études.

Remarquez, messieurs, que c'est précisément sur le grec que cet élève a échoué devant le jury.

Je demande si un fait pareil n'est pas la condamnation du système. (Interruption.)

Je voudrais bien qu'on m'expliquât lequel de ces deux jurys a le sens commun.

Est-ce celui qui reçoit le jeune homme comme premier de tous les athénées et collèges du royaume ou bien est-ce celui qui ne croit pas pouvoir lui donner le nombre de points nécessaire pour obtenir le grade d'élève universitaire ? (Interruption.)

Vous pouvez, messieurs, trouver votre ouvrage magnifique, mais vous me permettrez, quant à moi, de ne pas m'agenouiller devant lui, et je déclare que des examens qui amènent de pareils résultats sont de piètres examens.

Voilà deux jurys qui se donnent des démentis ; l'un déclare qu'un jeune homme est le premier de la Belgique pour le grec ; l'autre déclare qu'il n'est pas capable de passer un examen suffisant. Mais tout cela est bon parce que cela sort des mains du gouvernement.

Je le répète, un pareil résultat est la condamnation complète du système employé.

Maintenant, messieurs, d'où cela provient-il ? Cela provient de ce (page 768) système évidemment faux qui consiste à vouloir qu'un jeune homme ait un satisfecit sur chacune des branches de l'examen écrit. Je concevrais ce système, s'il n'y avait pas, après l'examen écrit, un examen oral, dans lequel l'élève peut récupérer en partie les points perdus dans l'examen écrit.

M. de Naeyer. - L'examen oral n'existe pas pour le grec.

M. B. Dumortier. - C'est possible, mais ce n'est là qu'un détail.

Autrefois, messieurs, le jury ne procédait pas ainsi : il exigeait un minimum de points sur l'ensemble de l'examen, et dès l'instant où le jeune homme obtenait ce minimum de points, il était admis à l'examen oral. Ainsi par exemple, étant donné un maximum de points fixé à 60, si l'élève obtenait 30 points à l'examen écrit, il était admis à l'examen oral.

Ce système est évidemment préférable à l'autre. Nous avons vu les matières d'examen sur le grec, par exemple ; eh bien, messieurs, les questions à traiter étaient réellement insolubles pour les jeunes gens ; j'oserais même dire que personne n'eût pu y répondre.

M. Muller. - Quelles étaient ces questions ?

M. B. Dumortier. - Mais, mon Dieu ! allez-vous vous constituer ici en jury ?

M. de Gottal. - Non, mais nous voudrions bien contrôler votre appréciation.

M. B. Dumortier. - Je parle des questions posées par le jury de Bruxelles.

D'où cela vient-il, messieurs ? De ce qu'on s'applique à choisir les auteurs les plus difficiles, les plus obscurs ; tandis qu'on devrait prendre un auteur clair, élégant, facile, Homère par exemple.

Procéder comme on le fait maintenant, c'est abandonner au hasard d'une question plus ou moins difficile et parfois insoluble, le sort de cette jeunesse si digne d'intérêt, qui mérite toute votre sollicitude.

Je demande donc que M. le ministre de l'intérieur veuille bien revenir aux précédents posés par son honorable prédécesseur ; c'est-à-dire que le minimum des points soit déterminé pour l'ensemble des branches de l'examen et non pas pour chaque branche séparément, et que le jeune homme qui obtient ce minimum sur l'ensemble soit admis à l'examen oral, parce que, s'il obtient le minimum des points sur l'ensemble, il y a présomption qu'il passera au moins convenablement son examen oral.

M. de Haerne. - Je dois reconnaître, messieurs, avec l'honorable préopinant que, dans les derniers examens, des erreurs, involontaires sans doute, ont été commises, que des inconvénients ont eu lieu. Ces inconvénients résultent principalement de ce que la loi nouvelle sur l'examen de gradué en lettres a été portée un peu tard et que les élèves, dans les divers établissements, n'étaient pas préparés à cet examen, ne s'attendaient pas à devoir le subir, au moins l'année dernière.

Ils ont donc été moins forts sur l'ensemble de l'examen ; et il faut bien le dire, ils se sont montrés faibles surtout en grec ; car c'est la partie des études humanitaires qui est restée le plus en souffrance dans tous les établissements moyens.

J'ai entendu dire aussi ce que l'honorable M. Dumortier vient d'avancer, savoir que des élèves qui, dans leurs classes, s'étaient distingués en grec et qui même avaient remporté la palme au concours ont échoué du chef de cet examen en grec devant le jury.

Nous avons jusqu'à un certain point une explication de cette anomalie dans une pétition qui nous a été adressée récemment et au sujet de laquelle j'ai eu l'honneur de présenter à la Chambre quelques observations.

Ce sont des élèves de rhétorique de Bruxelles qui ont réclamé ; or, c'est à Bruxelles surtout que ces anomalies se sont présentées.

Dans la pétition à laquelle je fais allusion, les élèves se sont plaints de ce que dans tel jury on dicte le passage grec à traduire, et de ce que dans tel autre jury, on écrit le passage sur le tableau.

Comme les élèves sont peu habitués à la lecture grecque, et que d'un autre côté, la prononciation diffère quelquefois notablement d'un établissement à l'autre, il arrive que lorsque le grec est dicté, les élèves l'écrivent mal. Lorsqu'on l'écrit sur le tableau, il se présente un autre inconvénient. C'est que le professeur de grec n'étant pas obligé d'être un parfait calligraphe, écrit souvent mal ; et les élèves sont exposés à faire des erreurs.

Plusieurs élèves ont réclamé à cet égard, et avec raison, selon moi. J'ai indiqué un moyen d'obvier aux inconvénients ; je crois le moyen bon, sans y attacher cependant une importance exclusive, j'ai cru devoir appeler l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur ce point qui est important dans la matière ; je l'ai prié de consulter à cet égard des hommes compétents.

à

Maintenant, en ce qui concerne la répartition des points, c'est, je dois le dire, une très grande question, et j'abonde jusqu'à un certain point dans l'opinion de mon honorable ami M. B. Dumortier.

Cependant, je dois faire remarquer que l'examen doit être sérieux avant tout, et que, par conséquent, pour chaque branche sur laquelle les élèves doivent être examinés, il faut nécessairement admettre un minimum de points. Sans cela, l'épreuve ne serait pas sérieuse sur des branches particulières de l'examen.

La question est de savoir s'il faut établir le même minimum pour toutes les branches.

Je ne le crois pas : je pense qu'il faudrait distinguer entre les diverses branches et déterminer les points à assigner à chacune d'elles d'après leur importance respective : on devrait exiger, pour les uns la moitié, pour d'autres un tiers, pour d'autres encore un quart.

Du reste, quant aux proportions à établir entre les diverses matières de l'examen, c'est une question de détail. Lorsque les élèves n'auraient atteint, dans certaines branches moins importantes, que le minimum absolument requis pour être admis, il pourrait y avoir une sorte de compensation, en ce sens que les points obtenus en plus dans d'autres branches, dans des parties plus importantes, seraient reportés sur les branches dans lesquelles les récipiendaires auraient été en défaut.

Ce système évidemment ne serait pas trop absolu. Pour le grec l'examen oral n'existant pas, le choix de l'auteur à traduire est très important. Si l'on prend un auteur qui est expliqué dans les établissements, on s'expose à favoriser les élèves, qui auraient vu en classe le passage proposé. D'un autre côté, on ne peut pas prendre un auteur dont le style s'écarte trop de celui des auteurs, qu'on explique généralement dans les collèges. Toutes ces choses doivent être mûrement examinées.

On pourrait établir, je pense, d'après ces données, une règle juste et qui, dans l'application, ne donnerait plus lieu à des réclamations fondées.

Je dois ajouter toutefois qu'il y a ici une question d'appréciation ; on ne pourrait pas, par exemple, ériger en règle que l'élève reconnu très faible en latin pourrait trouver dans les mathématiques une compensation à cette insuffisance.

Il faudrait donc distinguer entre les diverses branches de l'enseignement et fixer un minimum pour chacune d'elles. Je ne dis pas quel doit être ce minimum pour chaque partie : les professeurs, les hommes qui sont appelés à siéger aux jurys sont plus aptes que personne à se prononcer sur ce point ; et je crois qu'après les avoir entendus on pourrait tracer une règle uniforme à suivre par tous les jurys ; car il importe d'avoir une règle uniforme si l'on veut éviter les anomalies et les contradictions que peuvent présenter entre elles les décisions des différents jurys. C'est ce que l'on a compris la dernière fois que les jurys ont siégé ; mais il est juste de dire que les inconvénients signalés peuvent être attribués en partie à cette circonstance que c'était la première fois que la loi était mise à exécution.

J'insiste donc pour qu'on songe à établir une règle uniforme, et j'engage M. le ministre de l'intérieur à consulter sur ce point les établissements libres aussi bien que les autres.

M. Devaux. - L'observation de l'honorable M. de Haerne, pour ce qui concerne le grec, me paraît très judicieuse : je crois que ce serait une chose utile que de faire écrire le texte sur le tableau.

M. de Haerne. - J'ai dit le contraire ; j'ai dit que cela se faisait et que cela donnait lieu à des inconvénients parce qu'un professeur peut enseigner parfaitement le grec et n'être qu'un mauvais calligraphe.

M. Devaux. - Je croyais que vous aviez réclamé contre la dictée. Pour moi, je pense qu'il faudrait à la fois écrire le texte sur le tableau et le dicter. Je ne voudrais pas le voir autographier, parce que cela devrait se faire à l'avance et que dès lors il peut se commettre des abus, que des élèves pourraient être soupçonnés parfois d'avoir connu le texte avant l'examen.

Quant à l'observation de l'honorable M. Dumortier en ce qui concerne le minimum de points établi pour chaque matière, je ne puis pas me ranger à son opinion ; il voudrait qu'on rétablît ce qui existait pour le grade d'élève universitaire, qu'il n'y eût de minimum déterminé que pour l'ensemble de l'examen.

C'était précisément un des défauts qu'on reprochait à l'examen d'élève universitaire ; on disait qu'on pouvait obtenir ce grade sans savoir le grec ou le latin. C'est ce qui arriverait encore si on n'établissait pas un minimum de points pour chaque matière, on pourrait obtenir le grade sans avoir presque aucune connaissance des langues, ou même, à condition d'être fort sur les mathématiques et sur la langue française. La fixation d'un minimum pour chaque branche est donc nécessaire.

(page 769) Maintenant, ce minimum doit-il être exactement le tiers sur chaque branche ?

Remarquez, messieurs, que pour l'ensemble de l'examen le chiffre des points exigés est très peu élevé.

On a exigé cinquante points sur cent pour être admis. Cinquante sur cent, cela ne fait pas un bon devoir, mais un devoir faible. Dans le concours général, les compositions qui n'obtiennent pas cinquante points sont considérées comme ne méritant plus d'être classées ; il est interdit de donner un accessit à un élève qui n'a que 50 points ; pour avoir un accessit il en faut au moins 60 et pour un prix 70.

Quand le lauréat n'en réunit que 70, le concours passe pour faible.

Pour qu'il soit considéré comme fort, il faut que le premier prix obtienne au moins 80 points.

Si, alors que le nombre des points qu'on exige pour l'ensemble est si peu élevé, on veut encore admettre sans réserve la compensation entre les sept branches de l'examen sans fixer de minimum pour aucune en particulier, il en résultera que tel élève obtiendra le diplôme de gradué, quoique ignorant à peu près complètement une des langues anciennes ou sans connaître les mathématiques ou sans savoir rédiger en français.

En fait, messieurs, la fixation d'un minimum pour chaque branche a-t-elle donné lieu, comme on le dit, à de grands inconvénients ?

On a avancé dans les journaux que de ce chef un grand nombre d'élèves avaient échoué pour n'avoir pas atteint le tiers des points sur les mathématiques.

En ma qualité de membre du conseil de perfectionnement, j'ai eu connaissance des pièces officielles, et j'y ai recherché combien d'élèves avaient échoué par le seul fait de n'avoir pas atteint le tiers des points ; or je n'en ai pas découvert un seul.

Un dixième des élèves qui ont échoué dans l'examen n'avaient pas atteint le tiers des points en mathématiques : mais en même temps ils n'atteignaient pas non plus la moitié des points sur l'ensemble de l'examen. Ce n'est donc pas le minimum fixé pour chaque branche qui les a fait écarter.

Pour le grec je n'ai pas pu vérifier ce qui s'est passé devant le jury du ressort de la cour de Liège, attendu que les procès-verbaux ne donnent pas le détail des points obtenus pour chaque matière de l'examen écrit ; mais pour les deux autres jurys, c'est-à-dire pour les 5 provinces de Brabant, de Hainaut, d'Anvers et des deux Flandres, le nombre des élevés qui ont échoué pour n'avoir pas atteint le minimum d'un tiers des points sur le grec, ne s'élève qu'au sixième du nombre total de ceux qui n'ont pas été admis.

J'entends dire que c'est trop ; il faut cependant bien que les élèves qui ne sont pas admis échouent sur les matières les plus difficiles, c'est-à-dire sur le latin ou le grec, et quand le grec n'entre dans les échecs que pour un sixième, cela ne paraît pas excessif.

Remarquez bien, messieurs, qu'une composition qui n'obtient qu'un tiers des points est moins que médiocre. Je vous disais tout à l'heure qu'à 50 points sur 100 elle est faible. On peut dire qu'à 35 elle est mauvaise et à 20 détestable. Il ne faut donc pas croire que le tiers des points sur une matière quelconque soif difficile à atteindre ni que celui qui l'a atteint ait fait preuve d'un mérite réel, ou de connaissances bien grandes. Cependant je ne dis pas qu'il n'y aurait pas peut-être une combinaison différente à adopter.

Je ne verrais pas grand inconvénient à ce qu'au lieu du minimum d'un tiers pour chaque branche, on fixât ce minimum pour l'ensemble des quatre branches de l'épreuve écrite, en admettant la compensation d'une de ces branches à l'autre, et à ce que de la même manière il y eût un minimum fixé pour l'ensemble des trois branches de l'examen oral et non pour chacune d'elles en particulier.

En fait cependant, messieurs, ainsi que je viens de le prouver, le système actuel n'a pas entraîné encore de graves inconvénients ; n'oublions pas, dans tous les cas, qu'il s'agit d'une loi nouvelle et qu'il serait peu étonnant que la première fois qu'elle a été appliquée, son exécution n'eut pas été exempte de toute incertitude et de toute difficulté.

M. de Haerne. - Messieurs, je regrette que l'honorable préopinant m'ait mal compris ; car sur le point sur lequel il pense que nous différons, nous sommes du même avis.

Il n'était pas sans doute à la chambre lors de la discussion qui a eu lien sur une pétition où il s'agissait de l'examen et du concours en grec, je n'ai pas cru devoir répéter aujourd'hui ce que j'ai dit alors. J'avais indiqué un moyen pour éviter les inconvénients qui résultent de ce que devant un jury on dictait le texte grec, taudis que devant l'autre ou l'écrivait.

On a signalé des inconvénients d'un côté comme de l'autre. J'ai dit que soit qu'on dictât ou qu'on écrivît sur le tableau le texte grec proposé, il serait bon d'avoir un certain nombre d'exemplaires de l'auteur, pour les communiquer aux élèves, après que le passage leur eût été proposé. Le professeur sait d'avance, dans quel auteur il va prendre les passages à proposer aux récipiendaires, il peut faire l'avance, pour se procurer les exemplaires trouvés nécessaires, ou s'adresser au gouvernement pour avoir ces livres.

J'ai cru devoir signaler ce moyen pour sortir de l'embarras dont on s'est plaint avec raison ; car il y a eu des échecs qui ont étonné tout le monde, surtout en grec, et c'est à Bruxelles notamment que cela s'est présenté.

M. B. Dumortier. - Je suis heureux de voir que nous nous rapprochons, l'honorable M. Devaux et moi, quant au résultat à obtenir ; je suis bien aise que cette discussion ait été engagée ; tout ce qui intéresse la jeunesse me touche vivement, il faut rendre facile aux jeunes gens la carrière de l'instruction.

Le reproche qu'on adressait an gouvernement sous l'ancien jury d'examen, c'était de donner une valeur égale aux matières accessoires et aux matières essentielles.

Dans les six matières des humanités, se trouvent le grec et le latin, mais il y a aussi l'histoire et la géographie ; le nombre de points est le même pour l'histoire et la géographie, que pour le grec et le latin ; là est le vice.

La compensation pourrait être fâcheuse, car un jeune homme qui ne saurait pas le latin ou le grec pourrait avoir un satisfecit. Ceci a été complètement modifié par la loi.

On a supprimé ces matières accessoires ; on s'est borné à quatre matières.

Eh bien, le jour où l'on établira une espèce de compensation entre ces matières dans le sens de ce que l'honorable membre vient d'indiquer, je crois que l'on aura apporté une grande amélioration à l'examen.

Mais il est un autre point sur lequel j'ai appelé l'attention : c'est le choix des auteurs dans lesquels on puise la matière de l'examen.

Quand il s'agit de l'examen du latin, alors il importe assez peu que l'auteur on prend, et pourquoi ?

Parce que tous les auteurs classiques latins appartiennent à la même époque et an même dialecte, que la langue latine a produit sa grande époque dans un temps excessivement rapproché.

Mais il en est tout autrement du grec. Les auteurs grec s'étendent sur un cours de six à huit siècles ; les locutions deviennent tout à fait différentes ; les dialectes d'ailleurs sont tous différents.

Il n'est donc pas indifférent de savoir quel est l'auteur où l'on prend la matière d'examen.

Je pose en fait qu'un examinateur qui serait animé de peu de bienveillance pour une série qu'il examine, n'a qu'à prendre un de ces auteurs grecs très difficiles pour empêcher qu'un seul de ces élèves obtienne son diplôme.

Je voudrais donc que, surtout pour le grec, le gouvernement et le conseil de perfectionnement indiquassent les auteurs dans lesquels on doit puiser les matières d'examen, et je citerai particulièrement celui qui est dans les mains de tous, qu'on enseigne dans tous les cours et qui est en définitive le chef-d'œuvre de la langue hellénique ; je signalerai particulièrement Homère.

Si l'on exigeait que l'examen écrit fût uniquement une traduction d'un passage d'Homère à déterminer par le jury, je crois que l'on aurait fait disparaître un des plus grands inconvénients de ce genre d'examen. On n'enseigne ordinairement qu'un seul livre d'Homère dans les cours et comme ces livres sont nombreux, on pourrait choisir un passage que les jeunes gens ne connaissent pas, et alors on aurait une langue pure, une langue qui ne serait pas compliquée, et les élèves pourraient faire leurs preuves sans venir se heurter à des difficultés insurmontables sur lesquelles les plus grands savants ne sont pas même d'accord.

- La discussion est close.

Article 80 à 95bis

La proposition de M. le ministre de l'intérieur, tendante à augmenter de 5,000 fr., comme charge extraordinaire, le chiffre de l'article 80, est mise aux voix et adoptée.

Articles 82 à 95

« Art. 82. Dépenses du conseil de perfectionnement de l'enseignement moyen : fr. 5,000. »

- Adopté.


« Art. 83. Inspection des établissements d'instruction moyenne. (Personnel) : fr. 18,100. »

- Adopté.


« Art. 84. Frais de tournées et autres dépenses de l'inspection des établissements d'instruction moyenne : fr. 9 000. »

- Adopté.


(page 770) « Art. 85. Frais et bourses de l'enseignement normal pédagogique, destiné à former des professeurs pour les établissements d'instruction moyenne du degré supérieur et du degré inférieur ; subsides pour aider les élèves les plus distingués de l'enseignement normal du degré supérieur qui ont terminé leurs études, à fréquenter des établissements pédagogiques étrangers : fr. 65,720. »

- Adopté.


« Art. 86. Crédit ordinaire et supplémentaire des athénées royaux : fr. 257,994. »

- Adopté.


« Art. 87. Part afférente au personnel des athénées royaux dans le crédit voté par la loi du 8 avril 1857, en faveur des employés de l'Etat dont le traitement est inférieur à 1,600 francs : fr. 2,800. »

- Adopté.


« Art. 88. Crédit ordinaire et supplémentaire des écoles moyennes : fr. 268,200. »

- Adopté.


« Art, 89. Part afférente au personnel des écoles moyennes dans le crédit voté par la loi du 8 avril 1857, en faveur des employés de l'Etat dont le traitement est inférieur à 1,600 francs : fr. 45,000. »

- Adopté.


« Art. 90. Bourses à des élèves des écoles moyennes : fr. 15,000. »

- Adopté.


« Art. 91. Subsides à des établissements communaux ou provinciaux d'instruction moyenne : fr. 116,875. »

- Adopté.


« Art. 92. Frais du concours général entre les établissements d'instruction moyenne : fr. 22,000. »

- Adopté.


« Art. 93. Indemnités aux professeurs de l'enseignement moyen du premier et du deuxième degré qui sont sans emploi ; charge extraordinaire : fr. 12,298. »

- Adopté.


« Art. 94. Traitements de disponibilité : fr. 10,000. »

- Adopté.


« Art. 95. Encouragements pour la publication d'ouvrages classiques, subsides, souscriptions, achats, etc. : fr. 8,000. »

- Adopté.


« Art. 95 bis. Frais de rédaction du troisième rapport triennal de l'état de l'enseignement moyen ; fourniture d'exemplaires de ce rapport pour le service de l'administration centrale (article 40 de la loi du 1er juin 1850) : fr. 9,000. »

- Adopté.

Chapitre XVII. Enseignement primaire

Discussion générale

MpVµ. - La discussion générale est ouverte sur ce chapitre.

(page 773) M. Wasseigeµ. - Messieurs, depuis quelque temps des réclamations fort vives se sont élevées contre la manière, dont était appliquée parle gouvernement la loi de 1842 sur l'instruction primaire. Plusieurs de ces réclamations sont arrivées jusqu'à vous ; plusieurs pétitions ont été déposées et analysées devant vous. Je m'occuperai ici d'un grief signalé par ces pétitions et que je crois des plus sérieux ; je m'en occuperai brièvement et je réclame quelques instants l'attention bienveillante de la Chambre.

Vous le savez, la loi de 1842 a été une loi de transaction ; cette loi a été adoptée presque à l'unanimité par les deux grandes opinions qui se partageaient la Chambre, parce que ces deux opinions y ont trouvé des garanties suffisantes.

Mais si cette loi a été adoptée presque à l'unanimité par ces deux opinions, c'était à la condition qu'elle serait loyalement exécutée selon l'esprit qui avait présidé à sa confection. Cet esprit a été un hommage rendu à la liberté de l'enseignement, à la liberté communale, à l'obligation, hautement proclamée par tous, de faire dominer l'instruction primaire, par l'étude de la religion et de la morale.

L'éducation religieuse, la moralisation du peuple, disait-on lors de la discussion de la loi, est plus indispensable encore que son instruction.

Pour arriver à cette exécution loyale et à tout le bien que devait produire la loi, chacun déclarait qu'il n'y avait pas trop de toutes les forces vives de l'Etat, de la province, de la commune et des particuliers ; voici ce que disait une circulaire du 9 avril 1843, qui exprimait, disait le comte de Theux, auteur du rapport, la pensée des auteurs de la loi et qui était en quelque sorte le programme de l'administration qui avait présidé au début de cette œuvre :

« Une foule d'éléments précieux,... existent sur le sol de la Belgique, mais ils ne sont pas jusqu'à présent coordonnés : ils sont disséminés sans point de contact, lors même qu'ils ne se contrarient pas mutuellement. Ici ce sont des institutions communales ou provinciales ; là ce sont des associations religieuses ou philanthropiques ; c'est quelquefois aussi l'action généreuse de la charité privée.

« Tout en laissant à chaque institution son caractère et son allure propre, il n'est peut-être pas impossible de les réunir toutes par le lien que nous présente la loi du 23 septembre 1842.

« ... Ce n'est pas trop de tous les efforts réunis, et des administrations publiques et de la charité privée, pour soustraire la classe la plus nombreuse du peuple à la déplorable ignorance qui pèse encore sur elle.

« Gardons-nous de persister dans un système de défiance et d'isolement, dont l'effet funeste est de paralyser les bienfaits des uns par ceux des autres.

« Dans une entreprise qui a ce caractère d'utilité sociale, il ne peut être question de mesquins intérêts d'amour-propre, de futiles rivalités d'influence. » (Premier rapport triennal, premier volume, pages 11 et 12).

Qu'il y a loin de ce langage à celui de M. Rogier à la Chambre en janvier 1859 et dans son dernier rapport triennal !

Vous le voyez, messieurs, on faisait appel à tous les dévouements ; on ne repoussait personne.

Cet ordre d'idées a persisté jusqu'en 1849 ;depuis lors, des changements se sont introduits successivement. Mais c'est surtout depuis 1850 que ces changements sont devenus plus radicaux, plus graves.

Comment s'exprimait l'honorable ministre de l'intérieur dans une séance de la Chambre en 1859 ? Il disait :

« Le moment n'est pas venu de réviser la loi de 1842 parce que l'opinion libérale se trouve profondément divisée sur cette question ; mais ce n'est pas à dire qu'il n'y ait rien à faire administrativement pour améliorer le régime de l'instruction primaire ; la loi n'est pas parfaite ; mais elle donne beaucoup de latitude à l'administration pour introduire des améliorations ; nous nous en sommes déjà occupés et nous nous en occuperons encore. »

C'est, messieurs, ce qui a été fait, et ce sont ces améliorations, ou du moins c'est une de ces améliorations que je viens combattre.

Le programme du gouvernement se trouve entièrement dans le cinquième rapport triennal sur l'instruction primaire qui nous a été distribué, et notamment aux n°99 et suivants. Il résulte de ce programme que le gouvernement supprime les écoles désignées de l'article 5 et qu'il réduit les écoles adoptées à ne plus recevoir que la subvention destinée à payer l'instruction des enfants pauvres. C'est-à-dire qu'il supprime les écoles adoptées et qu'il ne laisse plus subsister que deux catégories d'écoles, l'école communale proprement dite et l'école désignée pour recevoir les enfants pauvres, en vertu de l'article 5 de la loi.

Voici la théorie que cherche à établir le ministre dans le cinquième rapport :

« L'allocation des subsides, dit le ministre, ne se justifie que par des services rendus à l'instruction des élèves pauvres. C'est la seule obligation imposée aux communes par la loi de 1842, et cette instruction doit se donner soit dans l'école communale, soit dans une école adoptée.

« Lorsque la commune a rempli cette obligation, toute autre dépense serait superflue, elle serait même une dépense dangereuse parce qu'on pourrait arriver ainsi à subventionner un établissement rival. »

Ces paroles, messieurs, sont à peu près textuellement extraites du cinquième rapport. Il en résulte donc, ainsi que je l'ai déjà dit, que d'après ce principe, le gouvernement ne fait plus que deux catégories d'écoles : les écoles désignées de l'article 5 et les écoles communales.

Quant aux écoles adoptées, conformément à l'article 3, elles sont complètement supprimées ; on n'autorise plus pour ces écoles ni traitements ni suppléments de traitements, on n'autorise plus même la commune à fournir un local.

La conséquence de ce système, messieurs, c'est la suppression de la plupart des écoles tenues par les établissements religieux et surtout par les frères des écoles chrétiennes.

Celte suppression est obtenue directement de la commune, lorsqu'elle partage la manière de voir ou qu'elle cède à la pression du gouvernement, comme cela a eu lieu, pour ne parler que de ma province, à Gembloux, à Walcourt et Namur.

Ou bien la suppression se fait directement par le gouvernement lui-même quand la commune résiste, et c'est ce dont sont menacées en ce moment les communes de Sivry et de Jambes.

Ce système est-il légal ? Est-il conforme au texte et à l'esprit de la loi ? Je ne le pense pas. Que dit l'article premier de la loi de 1842 ?

« Il y aura dans chaque commune du royaume au moins une école primaire établie dans un local convenable. »

L'article 2 dispense les communes d'établir ces écoles primaires lorsqu'il est suffisamment pourvu aux besoins de l'instruction par des écoles privées. Ce cas se présente rarement, et il faut plutôt considérer l'article 2 comme un hommage rendu à la liberté d'enseignement que comme une disposition susceptible d'un application ordinaire.

L'article 3 déclare que la commune pourra être autorisée à adopter une ou plusieurs écoles privées réunissant les conditions légales, pour tenir lieu d'école communale. Dans cet article, messieurs, les écoles que la commune peut adopter sont mises complètement sur le même rang que l'école communale elle-même.

Mais, messieurs, il y a ensuite une autre catégorie d'écoles, ce sont celles dont parle l'article 5, qui est ainsi conçu :

« Les enfants pauvres reçoivent l'instruction gratuitement. La commune est tenue de la procurer à tous les enfants pauvres dont les parents en font la demande, soit dans son école communale, soit dans celle qui en tient lieu (l'école adoptée de l'article 3), soit dans tout autre école désignée à cet effet par elle. »

Ainsi, messieurs, d'après la loi de 1842, il y a trois catégories d'écoles : l'école communale, l'école adoptée qui tient lieu d'école communale et, enfin, l'école désignée.

Cette troisième catégorie, messieurs, les écoles désignées, a toujours été reconnue jusqu'en 1849, et voici ce qu'on lit dans le premier rapport triennal sur l'instruction primaire, première partie, n°82 :

« Cette instruction doit leur être donnée (aux enfants pauvres) soit dans l'école communale, soit dans une école adoptée ou spécialement désignée à cet effet. »

Ce sont toujours les trois catégories d'écoles.

Un peu plus loin, le rapport s'exprime plus clairement encore si c'est possible, au n°95.

« Il y a deux moyens de profiter d'une école libre ; le premier consiste à demander l'autorisation de l'adopter, le second à la désigner pour recevoir un certain nombre d'élèves. »

Le rapport donne ensuite la marche à suivre pour la confection des listes des enfants pauvres, qui doivent, dans tous les cas, être soumises à la députation permanente.

Cette dénomination d'écoles désignées se trouve d'ailleurs reproduite dans plusieurs documents officiels. C'est ainsi que l'honorable M. Nothomb, auteur de la loi, écrivait au gouverneur du Hainaut, le 15 juin 1845 :

« L'adoption des écoles primaires par les communes est de deux espèces...

« Le deuxième cas d'adoption soumet purement et simplement (page 774) au régime d'inspection l'école qui en est l'objet (article 26 de la loi) ; c'est en quelque sorte une école désignée, pour l'instruction des enfants pauvres. »

Et ces mots « école désignée » se trouvent en italique dam le texte.

Mais il y a plus : dans un arrêt de la cour de cassation, rendu en 1857, et que M. le ministre invoque à l'appui de son opinion dans le cinquième rapport, cette distinction est encore parfaitement établie.

II s'agissait de savoir si une institutrice de la commune d'Esplechin pouvait recevoir un subside ; la cour de cassation a déclaré qu'il n'y a pas lieu d'accorder le subside réclamé. Voici les considérants de cet arrêt :

« Considérant que, notamment, la loi exige aux articles 3, 4 et 5, que l'adoption ou la désignation de l'école privée soit autorisée par la députation et que la fixation du subside à payer à cette école soit également approuvée par la même autorité ;

« Considérant que le conseil communal d'Esplechin n'a pu adopter ou désigner l'école de la défenderesse pour l'instruction des enfants pauvres sans l'autorisation de la députation, ni s'obliger, sans son approbation, à payer une subvention quelconque, etc. »

Vous le voyez, messieurs, les termes « école adoptée » et « école désignée » sont encore catégoriquement mentionnés dans l'arrêt ; et si l'arrêt a décidé qu'il n'y a pas lieu d'accorder un subside, c'est certainement parce que l'autorisation nécessaire, dans les deux cas, n'avait pas été donnée par la députation permanente ; l'arrêt décidait une question de fait, à savoir que les conditions exigées par la loi n'avaient pas été remplies, et c'est pour cette raison seule que le subside n'a pu être accordé à l'institutrice. Mais l'arrêt, en décidant en ce sens, déclare positivement dans ses considérants qu'il y a encore des écoles adoptées et des écoles désignées.

II résulte donc bien à l'évidence de tous les documents que je viens d'avoir l'honneur de citer devant vous qu'il y a trois catégories d'écoles, les écoles de l'article premier, celles de l'article 2 (pour mémoire), celles de l'article 3 et celles de l'article 5 ; et c'est fausser la loi que de ne reconnaître plus que deux catégories.

Il résulte encore des textes et des discussions que toutes les écoles qui sont dans la loi y sont au même titre, et c'est gratuitement qu'on affirme que les écoles privées n'y sont qu'à titre d'exception. Il serait peut-être plus juste de dire, en examinant la loi, que ce sont les écoles communales qui s'y trouvent à titre d'exception. Car que dit l'article premier ?

« II y aura dans chaque commune au moins une école primaire. » La loi ne dit pas école communale.

L'article 2 « dispense la commune d'instituer cette école primaire, lorsqu'il est suffisamment pourvu aux besoins de l'enseignement par des écoles privées. »

Enfin, l'article 23, paragrahe premier, porte :

« A défaut de fondations, donations ou legs, qui assurent un local et un traitement à l'instituteur, le conseil communal y pourvoit au moyen d'une allocation sur son budget. »

On pourrait donc inférer du rapprochement de ces trois articles, que s'il y a une école qui se trouve dans la loi à titre d'exception, c'est bien l'école communale.

Mais, messieurs, la véritable règle, c'est l'article 17 de la Constitution qui proclame la liberté de l'enseignement ; en vertu de cet article, toutes les écoles existent au même titre ; et les administrations communales ont le droit de choisir en toute liberté. (Interruption.)

Mais dit le gouvernement, soit ! pour l'instruction gratuite des enfants pauvres, je veux bien vous l'accorder ; mais cela ne donne lieu qu'à une subvention spéciale applicable à ce genre d'élèves, je vous l'accorde encore ; mais je ne puis pas vous accorder davantage : l'article 26 s'oppose à ce que les traitements et suppléments de traitements ainsi que des locaux soient donnés à des écoles adoptées ; il faut par conséquent, dans les communes où cela existe, ou supprimer ces écoles ou imposer aux communes l'obligation de nommer les instituteurs adoptés, instituteurs communaux, c'est-à-dire, pour la plupart des cas, renvoyer les corporations religieuses chargées de l'instruction primaire et notamment les frères de la doctrine chrétienne.

D'abord la commune ne doit-elle l'instruction qu'aux enfants pauvres ? Je crois que c'est aller trop loin que de prétendre cela. La loi, en voulant l'existence d'une école primaire dans chaque commune, n'a pas eu en vue exclusive l'instruction des enfants pauvres, mais celle de tous les enfants de la commune.

Que dit le premier rapport triennal ? Il déchue que la commune donne l'instruction primaire aux habitants ; qu'elle la donne à ses frais ; de sorte qu'une commune qui n'aurait pas un seul indigent, devrait cependant avoir une école primaire.

Cela prouve que la commune n'a pas satisfait à toutes ses obligations, alors qu'elle se borne à donner l'instruction gratuite aux enfants pauvres.

Dans les écoles communales, les parents aisés payent l'écolage de leurs enfants ; la commune vient, au moyen d'un subside, parfaire la part des élèves indigents.

Mais le traitement de l'instituteur le met au service de tous, des payants comme des indigents, et de ceux-ci comme de ceux-là, la loi ne distingue pas.

Si donc la commune trouve son avantage dans l'adoption d'une école privée à laquelle elle alloue un subside moins élevé que le traitement, cela est parfaitement justifié, et rien dans la loi n'interdit cette mesure à la commune.

Mais l'article 26 défend-il d'accorder aucun subside ? Cet article porte :

« Aucune école ne pourra obtenir ou conserver un subside ou une allocation quelconque, si l'autorité qui la dirige ne consent à la soumettre au régime d'inspection établi par la présente loi. »

Mais, messieurs, si cet article 26 n'autorise pas l'administration communale à donner un subside, il lui indique cependant certaines circonstances où elle doit retirer le subside ; mais il me paraît que si l'article défendait à la commune d'accorder un subside, il serait par trop niais de dire que dans certaines circonstances le subside devra être retiré !

Mais il y a d'autres articles d'où je puis inférer qu'un traitement peut être alloué aux écoles adoptées. C'est d'abord l'article 21 qui, sans aucune distinction, déclare que le traitement de l'instituteur est fixé par le conseil communal, sans s'inquiéter si c'est un instituteur communal ou adopté.

Trouvez-vous que cet article ne soit pas suffisamment clair ? Je vais vous en citer un autre, parfaitement catégorique et qui le déclare en toutes lettres. C'est l'article 24 ; il est ainsi conçu :

« Los fonds votés par les provinces en faveur de l'instruction primaire sont destinées aux objets suivants : »

Est-ce suffisamment catégorique ? Je demande si les instituteurs qui tiennent lieu d'instituteurs communaux ne sont pas des instituteurs adoptés, car je ne chercherai ni à prévoir ni à combattre les objections futiles, presque ridicules que l'on pourrait faire à cette interprétation.

Mais vous direz peut-être encore : « Cet article ne s'applique qu'aux fonds votés par les provinces. »

Or, messieurs, rappelez-vous que les provinces ne doivent venir au secours des communes pour l'instruction primaire que lorsque les communes n'ont pas de ressources suffisantes ; que les fonds provinciaux ne peuvent être appliqués que de la même manière que les fonds communaux ; il est donc de toute évidence que si les fonds provinciaux peuvent être appliqués aux suppléments de traitement des instituteurs qui tiennent lieu d'instituteurs communaux, ce n'est que parce les fonds communaux peuvent recevoir la même destination.

Car si la commune ne pouvait le faire, la province n'en aurait pas le droit.

L'obligation de ces deux corps est identique, elle naît de la même loi.

Il me paraît que cet argument est irréfutable et que le texte de la loi prouve à l'évidence que des suppléments de traitement peuvent être accordés aux instituteurs communaux et à ceux qui en tiennent lieu.

Voilà pour le texte.

Est-ce que les discussions ont été moins claires que le texte ?

Les discussions, messieurs, ont été parfaitement conformes à l'explication que je viens de donner du texte.

Voici quelques extraits qui, me paraît-il, établiront parfaitement la chose..

L'auteur du cinquième rapport affirme que nulle part dans le cours de la discussion il ne s'est agi de fournir des locaux aux instituteurs adoptés.

Je déclare, moi, que nulle part cette défense n'a été formulée ; mais la question a été posée formellement dans la séance du 19 août et résolue contre le système suivi actuellement.

M. Dubus avait demandé : « A-t-il été dans l'intention de M. le ministre et de la section centrale de mettre les frères de la doctrine chrétienne dans l'impossibilité d'accepter les fonctions d'instituteur communal ? »

M. Nothomb avait répondu : « L'honorable préopinant a tort d'assimiler les frères de la doctrine chrétienne, là où l'on a recours à eux, comme à des instituteurs proprement dits : leurs établissements sont des établissements subventionnés, et l'on se bornera à allouer une somme à ces établissements. »

(page 775) M. Dubus continua : « Je ne me fais pas une idée bien nette de la distinction que vient d'établir M. le ministre. Je citerai la ville de Bouillon. Le conseil communal de cette ville a confié l'école communale à des frères de la doctrine chrétienne ; il leur a fourni un local et leur paye à chacun un traitement de 600 francs ; moyennant ce traitement, les frères donnent l'instruction gratuite à tous les enfants. Je ne sais si on peut appeler un semblable établissement, un établissement subventionné : car la commune fournit le local et fait tous les autres frais de l'enseignement, s

A cette question nettement spécifiée, M. Nothomb répondit : « J'admets même ce cas ; je suppose un arrangement de ce genre : les frères de la doctrine chrétienne ont institué, d'accord avec la commune, une école, etc. » Un peu plus loin le ministre explique que les frères ne pouvant, d'après leurs statuts, percevoir des rétributions scolaires, on leur payera les 600 francs « à titre de traitement ou de subvention ».

Ainsi le ministre déclare qu'il admet le cas proposé par M. Dubus, dans lequel « la commune fournit le local et fait tous les autres frais d'enseignement ; » il admet les 600 fr. par instituteur « à titre de traitement ou de subvention » pour donner l'instruction « à tous les enfants, » aisés ou pauvres ; et cependant il ne considère pas les frères comme instituteurs communaux : car un peu après, répondant à M. de Smedt, il disait (p. 651, premier paragraphe) :

« Pourquoi voulez-vous considérer les établissements des frères comme établissements communaux dans la stricte rigueur du terme ? Vous feriez naître la question de la nomination et de la révocation de ces instituteurs. Un établissement de frères ne peut être qu'un établissement subventionné, adopté par la commune. Il est de leur intérêt qu'il en soit ainsi. »

On voit ici que le ministre a voulu laisser à l'institut des frères sa libre allure pour le placement et le déplacement de ses membres dans les écoles où ils seraient appelés.

On voit aussi que l'adoption ne suppose nullement l'existence préalable d'une école privée bien organisée, comme on l'affirme au troisième paragraphe de la page 138 du cinquième rapport, et que c'est une erreur de dire (ibidem) que « lorsque la commune intervient pour la création et l'entretien, l'institution, qu'on le veuille ou non, ne saurait être qu'une école communale (première catégorie.) »

Mais, dit le cinquième rapport, les communes qui ont des ressources doivent au moins avoir des écoles communales.

La loi ne dit cela nulle part. La loi ne distingue pas entre les communes qui ont des ressources et celles qui n'en ont pas.

Elle laisse aux communes leur entière liberté. Elle déclare que la commune doit avoir une école primaire, mais elle ne spécifie pas. Ce pourra être une école communale ou une école adoptée. La loi ne distingue pas entre les communes qui ont des ressources et celles qui n'en ont pas.

M. Muller. - Lisez l'article 4.

M. Wasseigeµ. - Je vais donner encore quelques extraits du premier rapport qui établiront à l'évidence que les intentions des auteurs de la loi n'étaient pas celles que l'on veut leur prêter aujourd'hui.

« Le législateur, dit-il, ménager des deniers du contribuable, n'a point voulu décréter des dépenses inutiles, mettre à la charge du budget communal des frais que l'instruction privée pourrait lui épargner ; il dit aux communes : Profitez d'abord des ressources que vous trouvez à votre portée, dans la localité même. Il ne fait pas de distinction entre les communes qui ont des ressources et celles qui n'en ont pas. »

Quant à l'infériorité, messieurs, dont on veut quelquefois accuser les établissements religieux, mais vous avez toutes vos garanties à cet égard. Vous avez l'inspection, car ces établissements sont soumis au même régime que les écoles communales. Vous avez en plus la garantie de leurs règles et la surveillance de leurs chefs.

Je crois, messieurs, pouvoir me résumer et dire que par la manière dont le gouvernement interprète la loi il supprime une catégorie d'écoles ; que d'après le texte et l'esprit de la loi, d'après les documents officiels et la manière dont la loi a été appliquée jusqu'en 1859, il y a trois catégories d'écoles et que le gouvernement en supprime une : l'école adoptée dont il ne fait plus qu'une simple école désignée, qu'enfin il raye de la loi son article 3, l'un des plus importants et sur le sens duquel on était tellement d'accord qu'il fut adopté sans discussion.

On fausse ainsi le texte et l'esprit de la loi, on y introduit administrativement et sans notre intervention des changements qu'on n'oserait proposer directement.

J'espère que vous ne suivrez pas le gouvernement dans cette voie dangereuse.

- Plusieurs membres à droite. - Très bien !

(page 770) .M. Dechamps (pour une motion d’ordre). - Messieurs, l'heure est déjà très avancée. Le séance de demain doit, d'après l'usage adopté, être consacrée aux rapports sur les pétitions. La discussion actuelle se trouverait donc scindée.

Je demanderai que la Chambre veuille bien, dans une question comme celle-ci, déroger à ses habitudes et que la séance de demain soit consacrée à la discussion du budget de l'intérieur.

MpVµ. - Messieurs, l'honorable M. Dechamps propose à la Chambre de consacrer la séance de demain à la discussion du budget de l'intérieur.

Il y a une décision générale par laquelle la Chambre a résolu d'employer la journée du vendredi à la discussion des prompts rapports et des rapports ordinaires et aux naturalisations.

La Chambre veut-elle déroger demain à cette décision ?

- Cette proposition est adoptée.

.M. Dechamps. - Comme il y a d'autres orateurs inscrits sur le chapitre, je demanderai à ne parler que demain parce que je devrais couper mon discours.

M. de Renesse. - Messieurs, peu partisan, en général, de l'augmentation des budgets des dépenses de l'Etat, j'ai souvent, dans cette enceinte, défendu le système d'une sage économie.

Si, surtout dans l'intérêt des contribuables, je demande que les dépenses administratives ne s'accroissent pas constamment, que l'administration supérieure cherche à réorganiser plus économiquement les divers départements ministériels et à restreindre, autant que possible, la bureaucratie qui, actuellement, laisse beaucoup en arrière celle du gouvernement des Pays-Bas, déjà assez paperassière, je crois cependant que, dans un avenir très rapproché, il faudra nécessairement améliorer le sort de la plupart de nos fonctionnaires.

Sous ce rapport, il est notoire que les inspecteurs cantonaux de l'instruction primaire sont très peu rétribués pour les soins incessants qu'ils doivent donner à cette partie si essentielle de l'enseignement public. Ces modestes et si utiles fonctionnaires méritent toute la sollicitude des Chambres législatives et du gouvernement.

Si donc je me départis du système d'économie que je n'ai cessé de préconiser, ce n'est, par exception, qu'en faveur de l'instruction publique à tous les degrés.

Il reste encore beaucoup à faire, surtout pour une bonne, solide et complète organisation des écoles primaires, afin que cette institution soit plus généralement répandue dans nos communes rurales.

Il est donc de notre devoir de stimuler le zèle de nos inspecteurs cantonaux, en améliorant leur position, de manière qu'ils puissent s'occuper principalement de la surveillance et de l'inspection des écoles primaires, et, en effet, le véritable intérêt du pays me semble exiger que l'enseignement primaire soit plus répandu dans le pays, et définitivement organisé.

Je désire surtout que, dans nos écoles primaires, l'on donne une instruction suffisante et morale ; que, en, outre, l'on y enseigne quelques notions sur l'agriculture, ainsi que sur les droits et les devoirs du citoyen belge, afin que nos populations y apprennent à connaître que dans la Belgique régénérée, pays de liberté et d'égalité, chacun peut, dans sa sphère d'action, prendre une part active aux affaires administratives et politiques de la nation. Il faut donc donner une certaine éducation politique à nos populations pour qu'elles puissent réellement apprécier la valeur de toutes nos grandes et belles libertés.

J'appuierai de mon vote toutes les demandes que le gouvernement croirait utile de nous soumettre ; je pense que c'est plus spécialement à l'honorable ministre de l'intérieur de postuler les crédits nécessaires pour que les bienfaits de l'instruction primaire s'étendent successivement et plus généralement dans toutes les diverses parties de nos provinces, pour pouvoir provoquer en outre une plus prompte construction de bonnes et saines maisons d'école, dont un assez grand nombre de nos communes rurales sont encore entièrement privées, et aussi pour contribuer à améliorer le sort de ceux qui s'adonnent à l'enseignement public et sont, sous ce rapport, si dignes de toute notre bienveillance.

Je suis persuadé d'ailleurs que l'honorable ministre de l'intérieur sentira la nécessité de s'occuper activement de la bonne et complète organisation de nos écoles primaires, afin que l'instruction publique puisse être répandue par tout le pays.

M. Royer de Behrµ. - Je n'ai que deux mots à dire. Je désire appuyer les réclamations de l'honorable M. de Renesse, en faveur des inspecteurs cantonaux de l'instruction primaire. Je crois, comme lui, que c'est une catégorie de fonctionnaires extrêmement utiles ; et qu'ils ne sont pas assez rétribués.

Je pourrais, messieurs, détailler devant la Chambre le travail considérable des inspecteurs cantonaux de l'instruction primaire ; mais je crois pouvoir m'en dispenser.

Je sais que le gouvernement est animé des meilleurs sentiments de bienveillance à l'égard de tous les fonctionnaires, et il est probable que ces sentiments se traduiront en faits à l'occasion des budgets de 1863. Il pourrait cependant y avoir quelque doute à l'égard des inspecteurs cantonaux de l'instruction primaire, attendu que ces fonctionnaires n'ont pas droit à la pension et ne reçoivent, au lieu d'un traitement, qu'une simple indemnité qui, pour certains d'entre eux ne s'élève qu'à 400 fr.

M. de Renesse. - Par canton.

M. Royer de Behrµ. - Evidemment.

M. Muller. - Et l'on réunit parfois plusieurs cantons dans une même inspection.

M Royer de Behrµ. - Oui, mais je répète qu'il est des inspecteurs cantonaux qui ne touchent que 400 francs.

Or, messieurs, vous savez combien est considérable le travail de ces fonctionnaires, et vous pouvez juger si ce travail est en rapport avec une pareille rémunération.

Quant à moi, je dirai que si ces fonctionnaires sont réellement utiles, on ne doit pas leur donner une rémunération réellement illusoire ; si, au contraire, ils n'exercent que des fonctions purement honorifiques et qui (page 771) ne méritent qu'une simple indemnité, alors il ne faut pas exiger d'eux un travail aussi soutenu,

Je demanderai donc à M. le ministre de l'intérieur ce qu'il compte faire dès à présent, en faveur des inspecteurs cantonaux de l'instruction primaire et je le prierai, si le moment actuel ne semble pas opportun de songer à eux lors de la formation du budget de 1863.

Ordre des travaux de la chambre

M. Orts (pour une motion d’ordre). - Nous assistons, messieurs, à une discussion qui dure depuis quelque temps déjà, celle du budget de l'intérieur. Cette discussion prendra certainement plusieurs séances encore à la Chambre. Nous sommes à une époque de l'année déjà bien avancée et cependant il nous reste encore à voter les budgets des affaires étrangères et des travaux publics, lequel, à son tour, donne toujours lieu à des discussions assez longues.

D'un autre côté, nous ne sommes encore saisis d'aucun des budgets que, d'après les règles d'une bonne comptabilité, nous devons discuter et voter en 1862.

Je demande donc à la Chambre de vouloir bien prendre une mesure qui permette d'activer quelque peu la marche de ses travaux.

Nous avons remis depuis longtemps, en règle générale, nos séances à deux heures et nous avons supprimé la séance du lundi. Quant à ces séances qui commencent à 2 heures, elles ne durent guère plus de 2 1/2 heures ; et nous voyons même des orateurs trouver fort désagréable de devoir commencer un discours alors même qu'il n'est pas encore 4 1/2 heures et demander que la suite de la discussion soit renvoyée au lendemain.

Enfin, messieurs, nous avons consacré un jour de la semaine à l'examen des pétitions ; il y en a parfois d'importantes, mais il y en a aussi, et c'est le plus grand nombre, qui ne le sont pas du tout.

Quoi qu'il en soit, voilà encore un jour enlevé aux travaux réguliers de la Chambre.

Je demande donc que l'assemblée veuille bien décider que ses séances commenceront désormais à une heure, tout au moins, jusqu'à ce que nous ayons voté tous les budgets de 1862.

Je me réserve, si cette mesure ne suffit pas, de proposer de la compléter en rétablissant la séance du lundi.

M. Allard. - C'est fort commode pour les députés de Bruxelles !

- La proposition de M. Orts est mise aux voix et adoptée.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1862

Discussion du tableau des crédits

Chapitre XVII. Enseignement primaire

Discussion générale

MiVµ. - Je m'empresse de répondre a l'honorable M. Royer de Behr. Les inspecteurs cantonaux civils, dont il vient de parler, sont des fonctionnaires provinciaux ou du moins ils sont rétribués par les provinces et c'est par conséquent aux provinces qu'il appartient de décider s'il y a lieu d'augmenter leurs émoluments. Il faudrait donc, pour arriver à ce résultat, négocier avec les provinces ou bien accorder à celles-ci des subsides sur les fonds de l'Etat.

Messieurs, on a cherché déjà depuis quelque temps à améliorer la position de ces fonctionnaires ; comme l'indemnité qu'on pouvait leur accorder était limitée par la loi, on a réuni, autant que possible, plusieurs cantons dans une même inspection. Voici exactement, d'après la dernière organisation, les traitements moyens des différents inspecteurs cantonaux,

Anvers, 1,255 fr., Brabant 1,800 fr., Flandre occidentale 2,400 fr., Flandre orientale 1,450 fr. Hainaut 1,163 fr., Liège 1,314 fr., Limbourg 1,300 fr., Luxembourg 800 fr., Namur 750 fr.

Si le traitement est moins élevé dans la province de Namur que dans d'autres provinces, cela tient à ce que le travail y est moins considérable et à ce que les inspecteurs y ont moins de cantons à surveiller ; les cantons y sont assez éloignés et les exigences du service n'ont pas permis de les réunir.

Quant aux inspecteurs ecclésiastiques, le montant des indemnités qu'ils reçoivent s'élève à 3,000 fr. par diocèse, en tout à 18,000 ; il se répartit d'une manière inégale par les évoêues.

Dans certains diocèses, il y a un grand nombre d'inspecteurs, dans d'autres il est plus restreint.

La moyenne des indemnités est de 122 fr.

Dans le diocèse de Malines, il est de 125 fr., de Bruges de 375 fr., de Gand de 214 fr., de Tournai de 100 fr., de Liège de 85 fr. et de Namur de 83 fr.

Il y a en tout 147 inspecteurs ecclésiastiques : 24 dans le diocèse de Malines. 8 dans celui de Bruges, 14 dans celui de Gand, 30 dans celui de Tournai, 35 dans celui de Liège et 36 dans celui de Namur.

Le montant de l'indemnité dépend donc de la manière dont les évêques groupent les cantons ; d'ailleurs, ces inspecteurs ecclésiastiques ont d'autres fonctions ; ils sont doyens ou curés. Quand il s'agira de réviser les traitements en général, il y aura lieu de consulter les députations permanentes des provinces.

M. Royer de Behrµ. - Je remercie M. le ministre de ses bonnes paroles. Je ferai observer qu'il n'est pas exact de dire que les inspecteurs cantonaux ont de 1,200 à 2,400 fr. de traitement, car il faut déduire de cette somme les frais de tournée qui sont assez considérables. Dans certaines provinces, les inspecteurs qui réunissent plusieurs cantons sous leur contrôle, ont jusqu'à cent écoles à inspecter et ils doivent faire deux visites à chaque école.

Il en résulte une dépense considérable pour eux ; ils doivent de plus tenir sept ou huit conférences par année, ce qui augmente encore leurs frais.

J’espère que M. le ministre tiendra compte de mes observations et qu'il fera ce qu'il pourra pour améliorer la situation des fonctionnaires que je recommande à sa bienveillance.

- Plusieurs voix. - A demain ! à demain !

M. Allard. - Il n'est que quatre heures et demie.

- Plusieurs voix : Il est près de cinq, heures, il est quatre heures trois quarts.

M. Allard. - On demande que les séances soient fixées à une heure pour pouvoir terminer les budgets et dès quatre heures et un quart les orateurs refusent de prendre la parole. (Interruption) Il était quatre heures et un quart quand M. Dechamps a refusé de parler parce que l’heure était trop avancée.

.M. Dechamps. - Il était quatre heures et demie.

M. Allard. - On demande qu'on se réunisse à une heure à l'avenir. Demain la Chambre ne sera pas en nombre.

- Plusieurs voix. - A demain ! à demain !

La séance est levée à quatre heures trois quarts.