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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 19 juillet 1862

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1861-1862)

(page 1833) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Thienpont, secrétaireµ, procède à l'appel nominal à 1 heure et Un quart.

M. de Florisone, secrétaire, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Thienpont, secrétaireµ, présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Le sieur Charles-Louis Dufour demande à recouvrer la qualité de Belge qu'il a perdue en prenant du service à l'étranger. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Les membres du tribunal de première instance de Bruges demandent que ce tribunal soit élevé au même rang que les tribunaux de Gand, de Liège et d'Anvers. »

- Renvoi à la commission chargée de l'examen du projet de loi d'organisation judiciaire.


« La veuve Cambier réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la grâce de son fils Jean-Baptiste condamné à trois années de prison pour désertion. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« La dame Marie-Jeanne Bernard demande que son fils Félix, milicien de la levée de 1862, obtienne un congé.»

- Même renvoi.


« Le conseil provincial de Namur demande l'abolition du droit de barrière. »

M. de Montpellier. - Je demande le renvoi de cette pétition à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Les membres du conseil communal de Marche demandent que la jonction du chemin de fer de la vallée de l'Ourthe avec celui du Luxembourg, s'opère à Aye. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi des travaux publics.


« Les membres de l'administration communale de Durbuy déclarent protester contre la pétition du conseil provincial de Namur qui demande que la concession du chemin de fer de l'Ourthe ne soit accordée à la compagnie du Grand-Luxembourg qu'avec la condition expresse de construire la ligne tout entière jusqu'à Givet. »

- Même décision.


« Des habitants de Wyneghem demandent que dans le projet de concession du chemin de fer direct entre Anvers et Hasselt les mots : un chemin de fer d'Anvers à Hasselt par Aerschot et Diest soient remplacée par ceux-ci : un chemin de fer d'Anvers à Hasselt par Nylen et Westerloo. »

- Même décision.

Projet de loi érigeant la commune de Schuffers-Kappel

Rapport de la commission

M. H. Dumortier. - J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la commission spéciale qui a examiné le projet de loi relatif à la séparation de la ville de Thielt de la commune de Schuyffers-Kappel.

Ordre des travaux de la chambre

M. de Renesse. - La Chambre ayant décidé qu'elle se rendra en corps, lundi prochain, au Te Deum, l'on pourrait avoir une séance après. Si, toutefois, cette proposition n'était pas accueillie par la Chambre, j'aurai l'honneur de proposer qu'à dater de la semaine prochaine, les séances soient fixées, chaque jour, à une heure, alla de pouvoir terminer au plus tôt les travaux de la Chambre.

- Plusieurs membresµ. - Mardi !

M. Allard. - Messieurs, je, demande que mardi la séance reste fixée à 2 heures.

La plupart des convois n'arrivent qu'à une heure et si l'on voulait entrer en séance avant 2 heures il se pourrait que nous ne fussions pas en nombre.

Je demande donc que l'on ne se réunisse à 1 heure qu’à partir de mercredi.

- La Chambre décide qu'elle se réunira mardi prochain à 2 heures et les jours suivants à 1 heure.


« MM. Grandgagnage et Coppens-Bove demandent des congés. »

- Accordés.

Projet de loi relatif à l’exécution de certains travaux d’utilité publique

Discussion des articles

Article 3

M. Thibaut (pour une motion d’ordre). - Messieurs, le discours que j'ai eu l'honneur de prononcer hier à la fin de la séance n'a pas paru aujourd'hui au Moniteur.

Comme il pourrait arriver que d'honorables collègues voulussent y répondre, je tiens à expliquer pourquoi ce discours ne se trouve pas aux Annales.

Je me suis rendu hier deux fois à l'imprimerie dans la soirée. Je n'ai point trouvé de copie. J'y suis retourné ce matin et je n'ai pas été plus heureux. Mon discours est perdu ou n'a pas été recueilli.

Il faudrait cependant, me paraît-il, y suppléer, pour qu'il n'y ait pas de lacune dans la discussion. Il faut que l'on sache à quoi M. le ministre des travaux publics a répondu hier et répondra aujourd'hui.

Je demanderai à la Chambre de vouloir bien ordonner l'insertion de la pétition de MM. Lonhienne aux Annales parlementaires.

- Plusieurs membres. - Non ! non !

M. Thibaut. - De- cette manière la discussion serait à peu près complète puisque cette pétition renferme une partie des arguments que j'ai fait valoir à l'appui de mon amendement.

Je demanderai, en outre si le vote n'intervient pas aujourd'hui et que la discussion continue, le renvoi de cette pétition, et de l'amendement que j'ai déposé avec plusieurs de mes honorables collègues, à la section centrale pour qu'elle puisse faire un rapport dans la séance de mardi.

MpVµ. - M. Thibaut demande que la pétition dont il a reproduit plusieurs arguments soit insérée aux Annales parlementaires, le discours qu'il a prononcé ne paraissant pas.

M. Allard. - Si j'ai bien compris, l'honorable M. Thibaut s'est plaint de ce que son discours n'a pas été reproduit par les Annales parlementaires.

Cela provient de ce que MM. les sténographes, croyant que l'honorable M. Thibaut lisait son discours, ne l'ont pas recueilli ; et je dois dire que beaucoup d'entre nous l'ont cru également. Pour ma part, j'ai vu l'honorable M. Thibaut jeter fréquemment les yeux sur des feuillets qu'il tenait à la main et j'ai cru que son discours était écrit.

Pour éviter que de semblables erreurs se reproduisent à l'avenir, il serait désirable que MM. les membres qui se proposent de lire un discours voulussent bien en prévenir MM. les sténographes. (Interruption.)

Mais voulez-vous donc que l'on sténographie des discours écrits ?

- Un membre : Pourquoi pas ?

M. Allard. - Eh bien, si c'est possible, à l'avenir cela se fera.

MpVµ. - Les membres de la Chambre n'ont évidemment aucune initiative à prendre à cet égard.

M. Thibaut. - Je n'attache aucune importance à ce que mon discours paraisse aux Annales parlementaires, mais je voudrais, afin que tous les éléments de la question fussent réunis dans cette discussion, que la Chambre autorisât l'insertion aux Annales de la pétition de MM. Lonhienne. (Interruption.) Ce ne serait pas la première fois que cela se ferait.

M. d’Hoffschmidtµ. - Je regrette que le discours de l'honorable membre n'ait point paru aux Annales parlementaires, car je me propose d'y répondre.

L'honorable M. Thibaut demande l'insertion aux Annales du mémoire de MM. Lonhienne ; cela me paraît parfaitement inutile. D'abord l'honorable membre en a reproduit une grande partie dans son discours.

- Un membre. - Oui, mais ce discours ne sera pas publié.

M. d'Hoffschmidt. - Chacun de nous, d'ailleurs, a reçu un exemplaire de ce mémoire, et il y aurait superfétation à le publier encore par la voie des Annales.

Je le répète, ce qu'il y a d'essentiel dans ce mémoire, on le trouvera dans le discours de l'honorable M. Thibaut, qu'il peut recomposer ; il est donc tout à fait inutile de le publier de nouveau.

Quant au renvoi à la section centrale des amendements présentés par l'honorable député de Dinant, la Chambre en décidera ce qu'elle jugera convenable.

Seulement, je ferai remarquer que ce renvoi retarderait de plusieurs (page 1834) jours la clôture de cette discussion. Nous sommes aujourd'hui à la fin de la semaine. Ce n'est donc guère que mardi que la section centrale pourrait présenter son rapport ; de sorte que la Chambre devrait ajourner encore la discussion sur la pétition d'Uccle.

Si cependant la Chambre ordonnait le renvoi sollicité, la section centrale remplirait évidemment sa mission.

M. de Boe. - Je crois qu'il y a lieu de combler la lacune que présenteraient les Annales parlementaires, par suite de l'absence du discours de l'honorable M. Thibaut.

D'après ce qu'on vient de dire, l'honorable membre aurait des notes assez complètes ; je crois qu'il y aurait lieu de réclamer de sa complaisance de vouloir bien recomposer ce discours au moyen de ses notes. Ce discours serait alors inséré aux Annales avec la réserve qu'il n'est pas la reproduction textuelle du discours qui a été prononcé.

Il me paraît impossible que le discours de l'honorable membre ne soit point reproduit aux Annales ; il faut nécessairement que l'on connaisse les arguments qui y ont été développés, afin que l'on puisse y répondre.

Je prierai donc l'honorable M. Thibaut de vouloir bien se donner la peine de recomposer son discours ; pourvu qu'il paraisse aux Annales, il est indifférent que ce soit dans le corps ou à la suite du compte rendu de la séance.

M. Muller. - Je voulais présenter exactement les mêmes observations que l'honorable M. de Boe. C'est à la complaisance de M. Thibaut que nous nous adressons, pour qu'il réintègre au Moniteur le discours qu'il a prononcé hier. Il doit parfaitement se rappeler ce qu'il nous a dit et il sera aidé par le mémoire de MM. Lonhienne, auquel il a fait d'assez nombreux emprunts.

Quant à remplacer le discours d'un membre de la Chambre par le mémoire de l'un des demandeurs en concession, cela n'est pas possible. Ce n'est pas du tout la pétition des demandeurs en concession qui peut tenir lieu du discours de l'honorable M. Thibaut. La lacune dont se plaint l'honorable M. Thibaut peut être réparée s'il veut bien y consentir.

J'ajouterai que, pour l'ordre de nos discussions, MM. les sténographes devraient toujours prendre note des discours, soit que les orateurs lisent, soit qu'ils improvisent, à moins que les orateurs n'autorisent les sténographes à ne pas prendre la plume. Mais ce n'est pas aux sténographes à juger si les orateurs lisent ou improvisent.

M. Thibaut. - Je me rendrai volontiers à l'invitation de mes honorables collègues. Mais il me sera impossible de faire ce travail assez tôt pour qu'il paraisse demain. Je demanderai donc un délai jusqu'à la semaine prochaine. J'étais hier très fatigué, et peut-être serai-je obligé de prendre part aujourd'hui à la discussion.

MpVµ. - Il est donc entendu que vous rétablirez votre discours aux Annales.

M. Thibaut. - J'avais fait une seconde proposition, celle du renvoi de l'amendement et de la pétition de MM. Lonhienne à la section centrale pour le cas qui se réalisera, je suppose, où le vote n'aurait pas lieu aujourd'hui.

M. Muller. - Je demanderai pourquoi l'on ferait une exception pour cet amendement. Si, dès le principe, les amendements qui nous ont été soumis avaient été renvoyés à la section centrale, je concevrais la proposition de l'honorable M. Thibaut. Mais nous savons tous ce dont il s'agit, et la discussion éclairera suffisamment les membres de la Chambre pour qu'ils puissent se prononcer en parfaite connaissance de cause.

Le résultat d'un renvoi ne pourrait aboutir qu'à prolonger encore la durée de notre session législative.

- La proposition de renvoi à la section centrale, faite par M. Thibaut, est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.

MpVµ. - La parole est continuée à M. le ministre des travaux publics.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, je demande la permission de revenir en deux mots sur la partie de mon discours que j'ai prononcée dans la séance d'hier.

La Chambre se rappellera la thèse que j'ai soutenue hier, thèse que je crois de plus avoir démontrée d'une manière tout à fait péremptoire par la lecture de certaines pièces de mon dossier. Cette thèse est celle-ci : que la demande en concession de MM. Lonhienne, sur laquelle le gouvernement a été appelé à statuer, n'est pas antérieure en date à celles d'autres demandeurs en concession, mais qu'elle est concomitante avec la demande en concession sur les mêmes bases formulée par la compagnie du Luxembourg et par une grande maison de banque de Bruxelles.

MM. Lonhienne ne pouvaient pas ne pas savoir la différence radicale qu'il y avait entre leur première et leur seconde demande. Mais toujours peur permettre à la Chambre d'apprécier cette affaire au point de vue de l'équité, je dira que j'ai eu moi-même l'occasion de prévenir très clairement MM. Lonhienne de l'influence que la transformation de leur demande devait exercer sur la décision du gouvernement. Dans une des conversations que j'ai eues avec M. le sénateur Lonhienne, il m'a demandé si, sans préjuger le parti que prendrait le gouvernement, la compagnie du Luxembourg serait considérée comme étant encore en ligne dans le cas où eux demandeurs persisteraient dans leur première combinaison, la concession sans garantie de minimum d'intérêt.

La question était bien facile à résoudre. J'en ai fait l'observation à l'honorable sénateur. Je lui ai dit que ce n'était pas une question, que la demande de la compagnie du Luxembourg n'était de nature à être prise en considération que pour autant qu'on n'en ferait pas de plus favorable, que la première demande de MM. Lonhienne écarterait donc d'emblée la demande du Luxembourg.

Je trouve même des traces de cette conversation à mon dossier. Voici ce que M. le sénateur Lonhienne m'écrivait le 31 mars 1862 :

« Depuis la conférence que j'ai eu l'honneur d'avoir avec vous le 15 de ce mois et où vous m'avez demandé si nous consentirions à renoncer à la garantie du minimum d'intérêt que nous avons demandée au gouvernement pour la concession du chemin de fer de l'Ourthe, nous nous sommes occupés activement de la question financière et nous serons en mesure de donner, dans quelques jours, la réponse définitive que je vous ai promise. »

Le 14 avril suivant, il m'écrivait de nouveau ce qui suit :

« Il ne nous est pas possible de parvenir à former le capital nécessaire à la construction du chemin de fer de Liège à Givet, sans l'intervention du gouvernement pour garantir un minimum d'intérêt. Nous sommes donc obligés de maintenir notre demande de minimum d'intérêt. »

Ainsi, MM. Lonhienne savaient que leur première demande écartait purement et simplement la demande de la compagnie du Luxembourg, et ils viennent en 1862 déclarer qu'ils doivent maintenir leur demande avec minimum d'intérêt.

Qu'est-ce que j'ai fait alors ? Je savais que MM. Lonhienne étaient parfaitement honorables, j'avais eu avec M. le sénateur les rapports les plus amicaux ; ma décision était mentalement prise ; je savais, pour avoir examiné l'affaire à fond, lequel des deux demandeurs devait obtenir la préférence définitive du gouvernement ; le rôle du ministre était à bout ; comme homme, sans prévenir personne, j'ai engagé MM. Lonhienne à chercher à opérer une fusion avec la compagnie du Luxembourg. Pouvais-je user de plus d'esprit de conciliation, et traiter ces messieurs avec plus de bienveillance ? Ils"m'ont demandé sur quelles bases ils pourraient fusionner ; j'ai naturellement répondu que ce n'était pas mon affaire, mais intervenant toujours à titre officieux, j'ai indiqué une base. La construction d'un chemin de fer se compose de deux opérations : l'exécution des travaux et la formation du capital. MM. Lonhienne prétendaient qu'ils étaient en possession d'une grande partie de leur capital, j'ai dit : Offrez de faire apport de ce capital.

La formation d'un capital pour une entreprise de chemin de fer est une affaire lucrative, quand il s'agit d'une somme de 20 millions surtout ; il faut recourir pour cela à de puissantes maisons de banque, ces maisons prélèvent très légitimement, quand elles se tiennent dans de certaines limites, une commission de banque ; j'ai donc dit à MM. Lonhienne : Essayer la fusion sur cette base, MM. Lonhienne ont promis de réfléchir.

Ils ont réfléchi et ils m'ont informé postérieurement qu'ils ne pourraient pas admettre une fusion sur pareil pied, qu'ils ne pourraient entrer en négociation que sur cette autre base, d'être chargés à forfait de l'exécution des travaux. Messieurs, cela s'est trouvé impossible, parce qu'il entrait à cette époque dans les intentions de la compagnie du Luxembourg, comme je pense qu'il entre encore dans ses intentions aujourd'hui, et j'espère qu'elle y persistera jusqu'à la fin, il entrait à cette époque dans les intentions de la compagnie du Luxembourg de mettre les travaux en adjudication. Il est également très légitime à des entrepreneurs de travaux considérables de s'assurer un bénéfice en stipulant un prix à forfait. Mais je trouve qu'au point de vue des actionnaires et du public, qui fournit les capitaux, il vaut encore beaucoup mieux que la compagnie concessionnaire mette les travaux en adjudication.

Eh bien, messieurs, en présence de cette manière d'agir très loyale, que se proposait et que se propose toujours la compagnie du Luxembourg, il était impossible qu'un arrangement se fît reposant sur l'exécution des travaux par une somme préfixe par MM. Lonhienne ou leurs ayant droits.

Ainsi, soit que MM. Lonhienne se fussent promis un bénéfice trop (page 1835) grand sur l'exécution des travaux, soit, ce qui n'est nullement inadmissible, qu'il y eût en réalité absence de capital, il fut impossible d’arriver à la fusion que j'avais suggérée dans l'intérêt privé de MM. Lonhienne.

J'affirme donc de nouveau, après avoir rappelé ces divers incidents, mon droit de faire, au sujet de cette concession, ce que je jugeai convenable ; le gouvernement n'était lié en rien, le gouvernement était parfaitement dégagé, même en équité, vis-à-vis de MM. Lonhienne.

Je ne pousserai pas plus avant cette discussion en ce qui concerne les faits et j'aborde les considérations d'intérêt public qui dominent cette affaire, en tout état de cause, comme tout le monde en convient, MM. Lonhienne eux-mêmes.

Avant tout cependant un mot relativement à une illégalité que me reproche la brochure que M. Thibaut a rééditée ici dans la séance d'hier.

Voici comment elle s'exprime :

« La signature de la convention provisoire avenue entre le chef du département des travaux publics et la grande compagnie du Luxembourg est un acte illégal, et c'est cet acte que l'on vous demande de sanctionner.

« Prenez-y garde, messieurs, ce n'est jamais impunément que l'autorité donne exemple de la violation des lois ; si les ministres eux-mêmes ne respectent pas les règlements, s'ils se jouent des prescriptions formelles, que penseront, que feront leurs subordonnés ?

« Hâtons-nous de le dire, nous ne suspectons pas la loyauté et l'honnêteté de MM. les ministres, nous aimons même à croire que ce n'est pas avec préméditation, avec réflexion, que M. le ministre des travaux publics a commis cette illégalité ; nous voulons supposer qu'il y a été entraîné par la précipitation apportée à toute cette affaire ; mais nous sommes lésés par un acte illégal, et nous usons de notre droit en le dénonçant. »

Assurément MM. Lonhienne sont très bons de vouloir bien condescendre à me pardonner, dans une certaine mesure, l'acte illégal qu'ils incriminent, de plaider eux-mêmes les circonstances atténuantes.

Mais voyons de quoi il s'agit, voyons de quel côté sont l'irréflexion et la précipitation.

L'illégalité consisterait en ceci, que la convention aurait été signée avec la compagnie du Luxembourg, avant l'accomplissement des formalités prescrites par l'arrêté royal du 29 novembre 1836, en matière de concession.

Eh bien, je pense, et je ne rencontrerai certainement pas un seul contradicteur dans cette Chambre, je pense que l'arrêté royal du 29 novembre 1836 n'était nullement applicable dans le cas actuel.

Les auteurs de la brochure semblent ignorer que l'arrêté du 29 novembre ne doit recevoir exécution que lorsqu'il s'agit de concessions par actes administratifs. Ainsi, par exemple, si le ministre des travaux publics qui se présente devant vous, avait signé une convention ayant pour objet la concession d'un chemin de fer de moins de dix kilomètres, il est évident que dans ce cas l'arrêté royal du 29 novembre aurait été applicable ; mais il ne s'agit pas d'une concession octroyée par acte administratif, il s'agit d'une concession octroyée à l'intervention des trois branches du pouvoir législatif.

Eh bien, de pareilles concessions ne sont soumises à aucune espèce de formalité préalable ; et la preuve qu'il en est ainsi, c'est que de tous les chemins de fer compris dans le projet de loi, il n'en est pas un seul qui ait fait l'objet d'une convention, après l'accomplissement des formalités prescrites par l'arrêté royal de 1836.

Je vais plus loin : je dis que jamais la législature n'a été appelée à délibérer sur des concessions au sujet desquelles les formalités préalables prescrites par l'arrêté de 1836 auraient été remplies.

Je demande donc que le bénéfice des circonstances atténuantes me soit réservé pour une meilleure occasion, ne croyant pas avoir besoin de l'invoquer dans la circonstance présente.

Cela dit, quel était, au point de vue de l'intérêt public, l'usage que le ministre des travaux publics devait faire de son droit, d'octroyer provisoirement la concession comme il le jugeait convenir ? Cette question n'en pas une ; cela n'est pas sérieusement discutable. Je demande, non pas à des hommes intelligents comme ceux qui sont devant moi, mais au premier venu, laquelle de ces deux combinaisons est la plus avantageuse à l'Etat et au public, ou celle consistant à mettre un chemin de fer entre les mains d'une compagnie nouvelle, ou celle consistant à mettre le même chemin de fer entre les mains d'une puissante compagnie déjà existante, ayant son administration et qui peut exploiter la ligne nouvelle avec une économie énorme ? La réponse ne saurait être douteuse : la seconde combinaison est de tous points la plus avantageuse. C'est une vérité de sens commun.

Qui oserait soutenir une thèse contraire ? Mais cette énorme économie qui doit résulter, dans le cas présent comme dans tous les cas analogues, de la fusion, au profit de qui doit-elle s'opérer ici ?

Evidemment au profit du trésor, puisque le gouvernement accorde une garantie de minimum d'intérêt.

Et, pour employer une formule plus générale, l'intérêt public n'est-il pas engagé à ce que l'exploitation de la nouvelle ligne concédée se fasse aux conditions les meilleures et les plus économiques possibles.

Si cela est, la question est résolue.

Qu'objecte-t-on ?

Que la ligne pouvait vivre par elle-même, attendu qu'elle a 100 kilomètres de parcours et que peu de lignes en Belgique ont cette étendue.

La question n'est pas de savoir si la ligue peut vivre par elle-même. La question est de savoir si elle peut vivre mieux entre les mains d'une compagnie puissante qu'autrement, que restant isolée.

De ce qu'il y ait en Belgique peu de lignes qui offrent un pareil développement, en est-il moins vrai qu'une telle ligne eût-elle 200 kilomètres de longueur, l'intérêt public est engagé dans la question financière à raison de l'intervention de l'Etat ? Cela est évident. Cela ne se discute pas.

Mais, prenons-y garde d'ailleurs, la ligne n'a pas 100 kilomètres de parcours ; elle n'en a que 65. Elle a 100 kilomètres avec la section de la ligne de Luxembourg à Givet, que l'on ne s'engage pas même à construire aujourd'hui.

La garantie porte sur l'unique section de Liège à la rencontre du chemin de fer de Namur à Arlon. C'est cette section seule qu'on s'engage à construire immédiatement.

Vous n'avez donc que 65 kilomètres.

M. d'Hoffschmidt. - Ils ne veulent construire que la première section.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - En effet, je viens de le dire, MM. Lonhienne ne s'engagent à construire que la première section et ils demandent, pour cette section, 800,000 francs.

M. Wasseigeµ. - Ils disent le contraire dans leur pétition.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - J'ai lu la correspondance. Je suppose qu'ils viennent dire aujourd'hui le contraire de ce qu'ils ont dit antérieurement. Sur quoi a-t-il fallu statuer ? Evidemment sur ce que ces messieurs ont dit dans leurs diverses lettres au département des travaux publics. Je n'ai pas à statuer sur des pétitions aujourd'hui postérieures.

Vous n'avez pas, dit-on, appliqué votre principe de la fusion aux nombreuses lignes de chemins de fer que vous demandez de concéder .

Où ai-je posé un acte contraire au principe que je proclame comme fondamental ?

Est-ce que l'une ou l'autre de ces lignes a été demandée par des compagnies existantes ? Pas du tout.

Partout où j'ai pu saisir un rapport, même éloigné, entre une compagnie en exploitation et une compagnie nouvelle, j'ai cherché à appliquer le même principe.

Je vais en donner la preuve.

Quelle est la ligne qui figure en tête de la série de celles que nous demandons l'autorisation de concéder ? C'est la ligne d'Anvers à Hasselt.

Cette ligne a été demandée par plusieurs concessionnaires.

A qui ai-je donné la préférence ? Dans cette circonstance j'ai agi comme je le ferai toujours aussi longtemps que je serai ministre des travaux publics. J'ai usé du droit que j'ai de donner la concession à qui je crois qu'il faut la donner dans l'intérêt public. Je l'ai donnée au dernier demandeur en concession, à M. Bischoffsheim. Pourquoi ? Parce qu'il est le véritable propriétaire de la ligne de Louvain à Herenthals et parce que je savais bien que cela ne fût pas stipulé, que la ligne d'Anvers à Hasselt sera exploitée par l'Est belge ou par la compagnie d'Anvers à Rotterdam.

Voilà la conduite que j'ai tenue. Elle est parfaitement logique ; je n'en ai point dévié d'un pas dans aucune circonstance de ma carrière ministérielle.

M. Muller. - D'Ans à Tongres c'est la même chose.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Et pour ce qui est d'Ans à Tongres, je trouve MM. Lonhienne véritablement incompréhensibles.

Le principe de la fusion, disent-ils, vous l'appliquez contre nous, puisque vous morcelez au profit d'un tiers en lui accordant la partie nord de la grande ligne que nous avions demandée de Givet à Tilbourg par Liège et Hasselt.

(page 1836) J’avoue que je ne connais pas une demande de MM. Lonhienne en concession de la ligue de Liége à Tilbourg par Hasselt.

Il est possible que ces messieurs aient demandé cette concession, mais il est certain qu’ils ne l'ont pas poursuivie. Je n'avais aucune raison d'écarter MM. Lonhienne de cette concession, et je déclare que j'aurais été très heureux de les avoir pour concessionnaires de la ligne de Liège à Hasselt, quand la question était encore entière. Mais ils n'ont pas protesté, que je sache, contre la concession de la section de Tongres à Bilsen.

On parle de Givet, messieurs, on dit : Vous coupez notre ligne en deux pour en attribuer la principale partie à la compagnie du Luxembourg, qui n'exécutera pas la section de la ligne de Namur à Arlon vers Givet.

J'affirme, d'après l'expérience que j'ai acquise de ces sortes d'affaires, que si la section de Liège à la rencontre du chemin de fer de Namur à Arlon se fait, il y aura une vive concurrence pour la section de Givet.

Pourquoi ? Parce que ce sera une excellente entreprise qui sera ambitionnée à la fois peut être par une compagnie française, la compagnie des Ardennes ou de l'Est, et par la compagnie du Luxembourg.

Quant à l'assertion de MM. Lonhienne, que la compagnie du Luxembourg ne voudrait absolument pas de la section de Givet, j'affirme que cette assertion ne repose sur rien.

M. Thibaut. - Il faudrait la lui concéder alors.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je la lui concéderai lorsque la demande se présentera dans les conditions où je désire que toute demande de concession se présente.

La compagnie du Luxembourg demandera la concession lorsqu'elle sera sûre de pouvoir mettre la main à l'œuvre aussitôt qu'elle aurait obtenu sa concession. Elle veut agir sérieusement, et je ne puis que l'en louer.

Prenons la question d'intérêt public, à un autre point de vue ? Voici également, me paraît-il, un aspect de la question qui n'est point discutable, tellement c'est chose claire.

Je suppose qu'on eût traité avec MM. Lonhienne. Qu'est-ce que vous faisiez ? Vous engagiez 800,000 fr. pour la ligne de l'Ourthe. Et que devenait celle de Spa ?

On me demande : De quel côté est l'intérêt public ? Je vous demande ce que deviendrait la ligne de Spa par l'acceptation du projet de MM. Lonhienne !

Vous ne l'avez pas cette dernière ligne, à moins d'engager une nouvelle garantie de minimum d'intérêt.

MM. Lonhienne disent : Vous pouvez faire l'affaire de Spa avec un très mince sacrifice, par exemple, l'abandon d'une partie de la recette supplémentaire procurée par la nouvelle ligne concédée.

Par malheur, cela n'est pas exact. Quelle que fût, d'ailleurs, la somme qu'on eût eu à payer de ce chef, c'était une perte sèche ; mais pour des motifs sur lesquels il est inutile d'insister ici, le gouvernement n'a pu entrer en arrangement avec la compagnie du Guillaume-Luxembourg, sur pied d'une bonification de la recette supplémentaire qu'aurait apportée au chemin de fer de l'Etat, la ligne de Spa.

C'est à raison de cette circonstance que toute cette affaire des deux lignes de Luxembourg n'a pas été terminée depuis longtemps.

Le gouvernement croyait qu'il n'avait qu'un mot à dire pour traiter avec la compagnie du Guillaume-Luxembourg sur la base d'une bonification sur la recette supplémentaire ; cependant c'est le contraire qui s'est vérifié, et il fallu tout recommencer ; au dernier moment, il a fallu rechercher une combinaison entièrement nouvelle.

- Un membre. - Et le canal de l'Ourthe ?

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - A quoi bon, messieurs, discuter ce côté de la question ?

A quoi bon discuter aussi les questions de droit ? Les arguments que j'ai fait valoir m'en dispensent ; je les crois tout à fait irréfutables.

En résumé, messieurs, est-il possible d'imaginer une combinaison plus avantageuse à l'Etat que celle que nous soumettons à la ratification de la législature ? Nous avons deux lignes, avec une seule garantie d'intérêt, et les conditions de la combinaison proposée sont telles que si l'une d'elles seulement réalise des bénéfices, ces bénéfices entreront en ligne de compte pour le calcul de la garantie attribuée à toutes les deux. Ainsi je suppose que l'un des deux lignes fasse douze cent mille francs de recette nette et que l'autre ne produise rien. Eh bien, si la garantie était distincte pour chaque ligne, la ligne infructueuse jouirait de la totalité de sa garantie ; tandis que, dans notre système, le bénéfice réalisé par une ligne serait reporté sur les deux. Je le répète, peut-on imaginer une meilleure combinaison, surtout si on la compare à celle de MM. Lonhienne d'après laquelle la garantie de 800,000 francs aurait été attribuée à un capital moitié moindre.

Messieurs, je n'entrerai pas dans de plus longs développements, à moins qu'on ne m'y provoque. Je crois avoir établi de la manière la plus évidente que l'intérêt public commande l'adoption du système que nous soumettons à votre sanction. En ce qui concerne MM. Lonhienne, je crois avoir également établi d'une manière tout à fait péremptoire qu'ils n'ont pas même eu dans cette affaire un droit quelconque de priorité, un titre quelconque à la préférence.

Projet de loi relatif aux jurys d’examen universitaires

Rapport de la section centrale

M. Guilleryµ. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale sur le projet de loi portant prorogation de certaines dispositions de la loi sur les jurys d'examen universitaire.

- Impression, distribution et mise à la suite de l'ordre du jour.

Projet de loi relatif à l’exécution de certains travaux d’utilité publique

Discussion des articles

Article 3

M. de Moor. - Messieurs, s'il est agréable, pour le plus grand nombre d'entre nous, d'adresser des félicitations au gouvernement au sujet du grand projet de loi de travaux publics soumis en ce moment à nos délibérations et qui aura une si heureuse influence sur le développement moral et la richesse publique de notre pays, il n'en est pas de même pour plusieurs autres,e t c'est un devoir pour eux de venir signaler à la Chambre les lacunes qu'ils rencontrent dans ce projet de loi, d'attirer l’attention de la Chambre sur ces lacunes et de faire appel ainsi à sa haute impartialité.

Quant à moi, je ne puis me dispenser d'en signaler une qui, certes,, n'aurait pas dû se trouver dans le projet de loi que nous discutons. Je veux parler, messieurs, du chemin de fer de Sedan par Bouillon, Herbeumont, Neufchâteau à la frontière Grand-Ducale, empruntant l’embranchement de Longlier à Bastogne, premier jalon d'une ligne dont le parcours jusque Deyfeld serait de 90 kilomètres environ et relierait la Meuse française vers Sedan à Coblence.

Messieurs, la Chambre voudra bien me permettre de faire le plus brièvement possible l'historique de cette affaire.

Les études de cette voie ferrée sont dues à l'initiative de MM. Moreau, Mareschal et Houba.

Le 23 avril 1861, une convention intervint entre le gouvernement et des demandeurs en concession français. Un cautionnement fut exigé par l'Etat et déposé dans ses caisses.

Le 18 mai 1861,1e projet de loi n'avait pas été déposé. Mon honorable» ami, M. d'Hoffschmidt, par motion d'ordre, interpella le gouvernement. M. le ministre des finances, que je regrette de ne pas voir à son banc, surtout à raison du deuil de famille qui le tient éloigné de cette assemblée, et qui doit nous attrister tous, M. le ministre des finances répondait en ces termes à mon honorable ami :

« Nous avions l'espoir que ce projet de loi aurait pu être déposé, et l'honorable membre le sait, il a fallu modifier une clause de la convention, et les pièces ne sont venues que le 14 de ce mois. Nous avons le 18 ; il est, vous le comprendrez, absolument impossible que le projet de loi soit utilement présenté dans cette session. Mais, je le répète, cet engagement subsiste, et le projet de loi sera déposé au début de la session prochaine. »

« M. d'Hoffschmidt. - Ce serait difficile, en effet, dans cette session.

« M. le ministre des finances. - Evidemment ; c'est la seule raison d'un retard qui ne peut nous être imputé. »

Après ces explications, je pris acte, avec l'honorable M. d'Hoffschmidt, de la déclaration formelle que M. le ministre des finances avait faite, en l'absence de son collègue, M. le ministre des travaux publics.

Messieurs, les populations de notre pays étaient si intimement convaincues que le gouvernement ne pouvait se dispenser de déposer le projet de loi dès l'ouverture de la session actuelle, que de tous les points des localités intéressées des pétitions émanant d'administrations communales d'industriels arrivèrent à la Chambre, non pas seulement pour demander l'exécution de cette ligne, mais pour indiquer le tracé qu'il serait préférable de suivre.

La commission des pétitions en fut saisie, et le 24 janvier l'honorable M. Vander Donckt fit un rapport sur ces diverses pétitions. Dans cette séance j'engageai le gouvernement à présenter dans le plus bref délai possible le projet promis par lui, et sur la proposition que je fis, la Chambre voulut bien ordonner le renvoi de ces pétitions à M. le ministre des travaux publics avec demande d'explications.

Le 25 mars, les explications ne nous ayant pas encore été données, l'honorable M. d'Hoffschmidt, s'adressant à M. le ministre des travaux publics dans un discours qu'il prononçait, lui dit :

(page 1837) « Je prie aussi M. le ministre des travaux publics de faire en sorte que les demandeurs en concession se prononcent définitivement. Nous ne pouvons rester dans cette situation, dans cette expectative ; il faut que les demandeurs en concession s'exécutent, ou bien on doit chercher par d'autres moyens à réaliser nos espérances. »

Dans la séance du lendemain, 26 mars, M. le ministre des travaux publics, répondant à l'honorable M. d'Hoffschmidt, disait :

« L’honorable membre a fait connaître hier à la Chambre que dans l'intervalle, depuis la discussion de l'année dernière, une convention avait été passée entre le gouvernement belge et des entrepreneurs français pour l'exécution, avec l'intervention pécuniaire de l'Etat, d'une ligne de Sedan à la frontière Grand-Ducale et passant par Longlier et Bastogne, c'est-à-dire absorbant l'embranchement dont il s'agit.

« Par des circonstances fortuites et à coup sûr indépendantes de la volonté du gouvernement, cette convention, qui devait naturellement être soumise à la sanction de la législature, n'aurait pu lui être présentée avec le projet de loi tendant à la ratifier, que trois ou quatre jours avant la clôture de la dernière session.

« La dernière session n'ayant pu être utilisée, j'étais prêt, comme j'y étais du reste obligé, à déposer le projet portant ratification de la convention dont il s'agit, au commencement de la session présente, lorsque j'ai cru savoir que les demandeurs en concession se retiraient de l'affaire.

« Cependant je n'ai pas été jusqu'ici officiellement informé de cette circonstance. Les renseignements que l'honorable membre nous a donnés à cet égard étaient tout à fait nouveaux pour moi, jusqu'il y a quelques jours.

« Or, n'étant pas au courant des intentions des entrepreneurs français, je n'ai pas eu à examiner ce que le gouvernement ferait si celles qu'on leur suppose, à savoir de se retirer, venaient à se réaliser. En d'autres termes, je n'ai pas ici à examiner la question si la compagnie du Luxembourg a aujourd'hui atteint le chiffre de recette qui rendrait, suivant la portée équitable et loyale de ses conventions, obligatoire pour elle la construction de l'embranchement de Bastogne.

« Je compte m'assurer immédiatement auprès des entrepreneurs de leurs vues quant à la convention dont je viens de parler. »

Il me semble que M. le ministre se prononçait d'une manière par trop catégorique, alors qu'il n'était pas saisi officiellement de ce qu'on lui avait appris au sujet de la renonciation des concessionnaires français, MM. Lenoir et Cie.

Le 27 mars, dans un discours que j'ai prononcé, j'ai pris acte de la déclaration faite par M. le ministre des travaux publics, dans la séance de la veille. Voici ce que je disais :

« Je me borne à prendre acte de la déclaration que nous a faite hier M. le ministre des travaux publics et qui nous donne la garantie que les demandeurs en concession de la ligne de Sedan vers le grand-duché vont être mis en demeure de se prononcer d'une manière catégorique sur leur intention d'abandonner leur demande en concession ou d'y persister.

« Je désire autant que possible que le gouvernement entame des négociations avec la Prusse afin d'obtenir qu'éventuellement le chemin de fer de Sedan à la frontière grand-ducale soit continué à partir de la frontière grand-ducale jusqu'à Coblentz ; car, c'est là, messieurs, la condition principale de l'exécution de ce chemin de fer.

« Mais, dans tous les cas, j'espère bien que M. le ministre des travaux publics ne consentira pas à l'abandon de l'embranchement de Longlier à Bastogne. C'est, à mes yeux, une question d'honneur pour le gouvernement ; je dirai plus : c'est une question d'honneur pour la compagnie du Grand-Luxembourg.

« Ce que j'ai dit à cet égard en 1860, je ne puis que le répéter aujourd'hui ; et je le fais avec d'autant plus de plaisir que la compagnie du Grand-Luxembourg est aujourd'hui dans une position fort prospère. Eh bien, si équitablement et légalement le gouvernement est en position de forcer la compagnie à s'exécuter, à la place de la compagnie, je m'empresserais de m'exécuter loyalement et sans contrainte.

« Du reste, son propre intérêt l'y convie instamment. L'honorable M. d'Hoffschmidt a démontré, dans une précédente séance, que le coût moyen du kilomètre de chemin de fer serait excessivement minime, et je suis convaincu que ce tronçon rapportera des bénéfices au)delà de toute prévision. »

Enfin, messieurs, au Sénat, dans la séance du 6 mai dernier, mon honorable ami M. Ozeray interpella le gouvernement sur ses intentions, M. le ministre répondit :

« Une seconde ligne était demandée dans le Luxembourg ; messieurs, c'est celle dont vous a particulièrement entretenu l'honorable M. Ozeray. Il s'agissait d'une ligne partant de la frontière française vers Sedan et se dirigeant par le Grand-Duché vers Coblence. On a demandé le concours du gouvernement pour cette ligne, on lui a demandé non plus une garantie d'intérêt, mais une subvention à fonds perdus.

« Eh bien, le gouvernement dans un contrat qui a reçu la signature des parties a accordé cette subvention. La somme pour laquelle le gouvernement devait intervenir s'élevait à 2 millions et demi.

« Ce contrat, comme l'a rappelé l'honorable Ozeray, a été signé l'année dernière, deux ou trois jours avant la clôture de la session.

« La clôture de la session est intervenue d'une manière un peu prématurée, et c'est par cette circonstance que le contrat n'a pu être soumis en temps opportun à l'approbation des Chambres.

« Je constate donc tout d'abord que le concours qui avait été demandé au gouvernement a été accordé par lui dans la plus large mesure ; il a été accordé exactement dans la mesure où il a été réclamé ; le gouvernement ne devait pas être plus généreux, il ne pouvait pas l'être. Qu'est-il avenu de cette convention ?

« Je la considère comme abandonnée en fait, non pas par le gouvernement, qui était irrévocablement tenu ; mais par les demandeurs en concession, qui peuvent arguer de la demande tardive de la ratification à la législature. Après tous les faits qui se sont passés, je crois que cette convention doit être considérée aujourd'hui comme non avenue, mais encore une fois non par le gouvernement, mais par le fait des demandeurs en concession ; car le gouvernement non seulement était disposé à tenir ses engagements, mais il ne pouvait pas s'y soustraire. Si donc cette convention n'a pas été soumise à la législature, au commencement de cette session, c'est que le gouvernement avait la conviction que tel n'était point le désir du concessionnaire. En d'autres termes, ce concessionnaire ne maintient pas, comme c'est son droit, la convention n'ayant pas été ratifiée dans la session dernière, les engagements que celle-ci mettait à sa charge.

« Le gouvernement ne peut pas forcer la main au concessionnaire, mais je tiens essentiellement à constater ce fait que l'abandon de la convention n'est point imputable au gouvernement. »

Vous le voyez, messieurs, d'après les paroles du ministre, l'abandon de la convention n'est pas imputable au gouvernement, elle est obligatoire pour lui, car il ne pouvait pas forcer la main aux demandeurs en concession.

M. le ministre prétendait que les concessionnaires se retiraient, qu'ils abandonnaient leur projet ; mais qui lui donnait donc le droit de penser qu'il en était ainsi ?

Serait-ce parce que M. le ministre « a cru savoir » que les entrepreneurs français se retiraient ? M. le ministre, évidemment, a été mal renseigné, et, dans tous les cas, il n'a jamais été officiellement saisi d'une renonciation des concessionnaires qui, du reste, n'ont pas été davantage mis en demeure par lui de s'expliquer sur leurs intentions d'abandonner ou de maintenir leur convention.

En effet, messieurs, il y a quelque temps déjà, si je suis bien informé, M. le ministre reçut la visite des demandeurs en concession, qui s'étaient rendus chez ce haut fonctionnaire pour lui dire qu'ils maintenaient, en tout ou en partie, la convention du 25 avril 1861, qu'ils la maintenaient d'autant plus que, par suite d'arrangements qu'ils venaient de prendre, ils seraient en mesure de mener ce projet à bonne fin. De là, à renonciation, il y a loin.

Je ne veux pas discuter point par point, en ce moment, quoiqu'il me fut facile de le faire d'une manière victorieuse, la note que M. le ministre des travaux publics a fait parvenir à la section centrale, en réponse à la question que j'avais posée dans la sixième section et que la section centrale avait faite sienne. Je ne veux pas me livrer à des récriminations inutiles, suspecter l'esprit de justice du gouvernement ; il ne peut manquer de montrer, dans un avenir prochain, qu'il est animé de cet esprit de justice, en nous accordant ce qui nous était promis à la session dernière et ce que nous eussions dû obtenir tout au moins dans celle-ci.

Je n'ai pas besoin de démontrer en ce moment l'immense utilité d'un chemin de fer de la frontière française se reliant à Deyfeld à la ligne des Grand-Duché à Spa. Il suffit de jeter les yeux sur la carte du pays et des pays voisins ; d'une part, vous voyez le chemin du Luxembourg parcourant cette province et une grande partie de la province de Namur seule et, sur les deux côtés de cette puissante voie internationale, on aperçoit deux territoires considérables, déshérités jusqu'ici de voies ferrées, l'un se dessinant vers la France, l'autre vers le Grand-Duché et la Prusse.

Je désire, messieurs, vous citer certain passage du discours que l’l'honorable M. Ozeray a prononcé au Sénat dans la séance du 6 mai dernier, en parlant de ces territoires déshérités de voies de communication rapide.

(page 1838) « Ce sont deux mailles essentiellement manquant au réseau des chemins de fer belges, français et allemands.

« Ces lacunes disparaîtraient par l’établissement du chemin de Sedan vers Coblence.

« Ce chemin, qui ne présente, du reste, aucune difficulté sérieuse d'exécution, aurait un long parcours, condition excellente pour le succès de ces sortes de voies de communication ; il relierait la vallée de la Meuse vers Sedan avec le pays de Coblence, il traverserait trois parties de pays riches et peuplées, industrielles, commerçantes, et une quatrième, la partie luxembourgeoise, qui, pour ne l'être pas autant que les autres, n'en produit pas moins une grande quantité de matières pondéreuses très propres à l'alimentation des transports ; enfin il fournirait nécessairement un contingent considérable en voyageurs et surtout en marchandises à la ligne actuelle du Luxembourg et sans doute à la ligne en projet de Liège vers le Grand-Duché.

« L'importance de ce chemin est réelle ; elle n'a été contestée par personne et elle a été reconnue par le gouvernement qui a accueilli favorablement la demande des concessionnaires et qui a pris la résolution de présenter à la Chambre la convention avec un projet de loi tendant à la ratifier.

« En l'absence de ce projet, les considérations que j'ai l'honneur de présenter sembleront peut-être prématurées. Je crois néanmoins devoir les faire, parce qu'elles peuvent être de nature à déposer dans vos esprits le germe d'une conviction qui sera fort utile plus tard, dans l'éventualité que j'appelle de mes vœux. »

Maintenant, si comme l'a dit le gouvernement, par des circonstances fortuites indépendantes de sa volonté (circonstances qu'il ne nous a pas fait connaître jusqu'ici), ou de l'erreur dans laquelle il avait versé en pensant et en disant que les concessionnaire renonçaient à leur demande, s'est trouvé dans l'impossibilité de présenter le projet de loi dont il s'agit, ce que je me refuse à admettre d'une manière absolue, je lui demande de se montrer bienveillant, équitable, en rassurant et promettant à l'industrie du bassin ardoisier de la Semois, en un mot à toutes les populations intéressées, qu'il déposera le projet si vivement attendu et qui vient encore d'être l'objet d'un vœu que le conseil provincial du Luxembourg a émis à l'unanimité dans sa session dernière, en faveur de la construction d'une ligne dont la haute utilité ne sera contestée par personne.

Quoique je ne me trouve pas parmi les satisfaits, je n'en voterai pas moins de grand cœur les projets qui intéressent une grande partie du pays.

Je voterai avec plus grand cœur encore les lignes qui intéressent le Luxembourg. La concession de la ligne de l'Ourthe a fait hier l'objet d'un discours froidement violent de la part de M. Thibaut. (Interruption.)

Ne faut-il pas que la violence ait aveuglé l'honorable membre pour qu'il ait cru pouvoir faire à M. le ministre l'injure de le supposer capable de subir la loi de la compagnie du Luxembourg, à laquelle il fait également injure, sans doute parce que dans le cabinet actuel se trouve un administrateur du Grand-Luxembourg qui, par son énergique coopération, est parvenu, aidé par ses collègues du conseil d'administration de la compagnie, à rendre la ligne prospère et prospère au-delà de toutes les prévisions, malgré les lamentables prédictions de vos amis avant la mise en exploitation de cette importante voie de communication. Et êtes-vous bien venu à supposer la pression exercée dans le cabinet par un de ses membres ?

N'y a-t-il donc pas dans cette Chambre, sur vos bancs, des membres qui occupent dans les chemins de fer belges et étrangers, dans les sociétés particulières de toute espèce, des positions d'administrateurs ? Il en est qui redeviendront ministres (j'espère que ce sera le plus tard possible), ils conserveront alors les positions qu'ils occupent dans ces sociétés, comme ils les ont conservées dans le passé lorsqu'ils étaient ministres.

Je ne veux pas citer de noms propres ; mais jamais sur ces bancs, et vous devez bien le reconnaître, nous n'avons suspecté ces honorables membres, jamais nous n'avons supposé de leur part une pression qu'ils auraient cherché à exercer sur leurs collègues ministres, dans les questions qui intéressaient l'Etat ou le pays, et eux-mêmes ! Non jamais, nous n'avons adressé semblable injure aux amis de l'honorable M. Thibaut.

J'aurais peut être voté l'amendement des honorables députés de Philippeville, Namur et Dinant et j'en aurais proposé un de mon côté tendant à ce que le gouvernement soit autorisé à concéder un chemin de fer partant de la frontière française près Bouillon, traversant le Luxembourg et s'arrêtant à la frontière de Prusse vers Deyfeld, si M. le ministre, en répondant à l'honorable M. De Decker, n'avait déclaré de la manière la plus formelle que son projet revu et corrigé ne pouvait être augmenté, qu'en un mot il était un et indivisible ! Le sort réservé aux amendements qui se sont produits jusqu'ici vous le connaissez, il est facile de prédire celui qui attend ceux qui sont encore debout.

Je désirerais, quant à moi, que le point d'interjection des deux lignes de l'Ourthe et du Luxembourg ne fut pas plus fixé, dans le projet de loi, à Aye qu'à tout autre point de la ligne du Luxembourg. Il faut que des études sérieuses soient faites à ce sujet avant que le gouvernement puisse se prononcer.

Si un entrepreneur sérieux se présente et sollicite la concession du tronçon vers la France, je ne doute pas que le gouvernement et nous-même ferons à cette demande l'accueil le plus sympathique.

M. d’Hoffschmidt, apporteurµ. - Messieurs, je croyais que l'article 3 du projet de loi ne soulèverait pas une longue discussion. J'étais autorisé à le croire, d'abord parce que toutes les sections, sauf une qui s'est prononcée contre le minimum d'intérêt, ont voté l'article 3 et parce que la section centrale l'a voté à l'unanimité.

Mais un honorable député de Dinant a, dans la séance d'hier, combattu très vivement cette partie du projet en s'appuyant surtout sur un mémoire de MM. Lonhienne, qui vous a été distribué. L'honorable ministre des travaux publics, que vous avez entendu dans les séances d'hier et d'aujourd'hui, a répondu de la manière la plus complète, la plus victorieuse, aux arguments employés dans le mémoire de MM. Lonhienne. J'aurais donc pu me dispenser, messieurs, de prendre la parole. Mais l'honorable M. Thibaut a accusé la section centrale d'avoir passé sous silence la demande de MM. Lonhienne frères. Ensuite l'honorable membre m'a fait l'honneur de citer quelques passages de discours que j'ai prononcés, je crois, il y a quinze années.

Si la section centrale ne s'est pas occupée de la demande en concession de MM. Lonhienne, c'est pour un motif bien simple : d'abord l'exposé des motifs n'en disait pas un seul mot. Dans les sections, on n'en a pas parlé. J'ignore si l'honorable M. Thibaut a assisté aux travaux de la section.

M. Thibaut. - J'étais malade.

M. d’Hoffschmidtµ. - Je ne fais aucun reproche à l'honorable M. Thibaut. Il nous dit qu'il était malade ; c'est un motif plausible. Mais enfin aucun député ni de Namur ni de l'arrondissement de Dinant n'a formulé une observation quelconque en ce qui concerne la demande en concession de MM. Lonhienne. Par conséquent je ne comprends pas comment la section centrale aurait pu s'en occuper. Elle n'a été saisie d'aucune proposition, pas même d'une seule observation.

Le projet de loi a été présenté dès le 24 juin, M. le ministre des finances nous a lu les conclusions où il était question de la concession accordée pour la vallée de l'Ourthe, comment se fait-il qu'on se soit tu jusqu'à présent sur la demande de M. Lonhienne ?

C'est seulement à la veille de terminer la discussion, que MM. Lonhienne ont envoyé leur mémoire et que l'honorable député de Dinant est venu formuler un amendement.

Il me semble que si les demandeurs en concession pour la vallée de l'Ourthe avaient cru devoir poursuivre avec chance de succès leur demande, ils auraient mieux fait de se présenter plus tôt à la Chambre, de manière que les sections et la section centrale pussent en délibérer et se renseigner auprès de M. le ministre, des travaux publics. Mais non, c'est à la veille de la clôture de la discussion, que nous sommes saisis d'un mémoire et d'observations relativement à cette demande en concession.

Ce n'est donc pas le silence de la section centrale qui doit paraître étonnant ; c'est le long silence des demandeurs en concession et de l'honorable préopinant.

Si le projet de loi, messieurs, ne contient pas la concession d'un chemin de fer partant de la station d'Aye, pour aboutir à la frontière de France, je le regrette. Comme M. Thibaut, je considère cette ligne comme fort utile. J'appartiens un peu au magnifique canton de Rochefort, j'y ai des intérêts importants ; j'ai donc tous les motifs possibles pour désirer l'exécution de ce chemin.

Mais est-ce être une raison suffisante pour que nous risquions de compromettre l'excellente combinaison du projet de loi, combinaison excellente au point de vue des intérêts du pays, par une proposition qui n'assurerait pas même, comme le ministre s'en est expliqué tout à l'heure, l'exécution de l'embranchement d'Aye ou de Jemelle à la frontière de France.

On ne peut pas tout faire à la fois. Le projet de loi comprend déjà 650 kilomètres de chemin de fer. C'est déjà très bien, ce me semble, et l'on ne déclare pas que, dès la session prochaine, par exemple, d'autres (page 1839) projets de chemins de fer ne seront pas encore présentés. Je crois au contraire que M. le ministre des travaux publies persistera dans la voie si féconde où il est entré depuis qu’il est au département des travaux publics.

Ainsi, il n y a pas de motifs pour que ce projet qui n'est pas présenté dans cette session, ne le soit pas dans la session prochaine, et j'ai entendu avec une vive satisfaction M. le ministre nous déclarer tout à l'heure que la société du Luxembourg était elle-même tout à fait disposée à demander la concession de cette ligne. Eh bien, qu'on me permette de le dire, je crois qu'il y a là un motif puissant de compter sur l'exécution de cette ligne. Il y a là une combinaison favorable à tous égards, qu'il faut bien se garder de compromettre par trop d'exigence. Nous devons avoir pleine confiance dans les efforts d'une puissante société qui a déjà dépensé dans le pays 60 millions de francs, et qui, après l'exécution des lignes comprises dans le projet, aura dépensé près de 100 millions. Certes, ce sont là des éléments de succès ; entre ces éléments de succès et la combinaison de MM. Lonhienne, il n'y a évidemment pas de comparaison.

MM. les conseillers provinciaux de l'arrondissement de Dinant se sont beaucoup émus de la présentation du projet de loi actuel. IIlen est même qui ont prétendu que ce projet de loi sacrifiait la province de Namur. Ils pensent, ainsi que l'honorable préopinant, que le chemin de fer de la vallée de l'Ourthe sera un obstacle à l'exécution de la ligne vers Givet.

Je crois, avec M. le ministre des travaux publics, que l'intérêt de la compagnie du Grand Luxembourg est la plus forte garantie que l'on puisse avoir de l'exécution de la ligne vers la frontière de France.

Il est certain que non seulement la compagnie du Luxembourg, mais d'autres demandeurs en concession, sachant que la ligne de Liège peut être prolongée jusqu'à la frontière française, ne manqueront pas de demander cette concession, et déjà même des demandes sont déposées au département des travaux publics.

Ensuite, est-ce que le chemin de fer de la vallée de l'Ourthe ne sera pas aussi fort utile aux populations des cantons de Rochefort et de Beauraing ?

N'auront-elles pas une voie bien plus courte pour se rendre à Liège que quand elles étaient forcées d'aller par Namur ?

Messieurs, le projet de MM. Lonhienne, que l'on semble aujourd'hui tant regretter, existe depuis 1855, et il n'a rien produit. J'en avais entendu parler dans le temps. Je trouvais ce projet très favorable aux intérêts du pays ; mais tout à coup on n'en a plus rien dit et on le croyait complètement oublié, quand il a surgi de nouveau. Ce projet n'a donc rien produit jusqu'à présent dans l'intérêt des populations des cantons de Rochefort et de Beauraing. Pourquoi donc vouloir y attacher toutes ses espérances ?

Maintenant une combinaison nouvelle se présente, celle du projet de loi, et cette combinaison amènera insensiblement l'exécution de la ligne de chemin de fer réclamée par l'arrondissement de Dinant.

Les chemins de fer amènent l'exécution d'autres chemins de fer, c'est évident. Nous le voyons aujourd'hui par les propositions qui nous sont soumises.

J'ajouterai, messieurs, que dans le canton de Rochefort on n'est pas du tout d'accord ; il y a un projet qui se dirige vers Aye ; il y en a un autre qui aboutit à Jemelle.

J'ai lu une pétition fort bien motivée de l'administration communale de Rochefort, qui se prononce pour la direction de Jemelle, tandis qu'au conseil provincial on a réclamé la direction vers la station d'Aye.

Maintenant, messieurs, quand le gouvernement nous propose l'exécution d'un chemin de fer, la Chambre a deux questions principales à examiner ; la première, c’est l'utilité de cette voie de communication ; la seconde, c'est la combinaison adoptée par le gouvernement. Quant à l'utilité du projet dont il s'agit, il est inutile de la démontrer. Elle est incontestable. Quant à la combinaison, que voyons-nous ?

Le gouvernement a traité avec deux puissantes compagnies, avec la société du Luxembourg et avec la société Guillaume-Luxembourg. C'est là une garantie énorme de l'exécution des chemins de fer concédés.

Il ne suffit pas d’accorder une concession, il faut que le concessionnaire présente des garanties.

Combien de fois n'avons-nous pas voté des concessions qui n'ont pas eu de suite ! Aujourd'hui on a traité avec deux compagnies puissantes, et nous avons la certitude que les deux lignes seront exécutées.

Ensuite, messieurs, comme l'a fort bien dit l'honorable ministre des travaux publics, il importe de ne pas multiplier les concessions ; il est de l'intérêt public d'agrandir plutôt celles qui existent.

En France, il y a six grandes compagnies qui se partagent en quelque sorte tous les chemins de fer de ce pays, et le gouvernement tient essentiellement à cette combinaison : partout où il y a des embranchements à faire, il les accorde à l’une de ces puissantes compagnies. Il y trouve d’abord des garanties de bonne et prompte exécution ; ensuite, c’est le meilleur système au point de vue de l’exploitation.

Messieurs, j’ai eu longtemps à me plaindre de la grande compagnie du Luxembourg, comme député de Bastogne. Cette compagnie cherchait toujours à éluder l'obligation d'exécuter l’embranchement, malgré les engagements solennels qu'elle avait contractés. J’espère que le nouvel engagement qu'elle va prendre, elle le remplira exactement, et j'espère que le gouvernement y tiendra la main, et que, parce qu'il s'agit d'une ligne moins importante que la ligne principale, il ne permettra pas qu'elle soit de nouveau laissée en arrière.

Quant à moi, je serai une sentinelle vigilante et j'aurai soin de rappeler souvent que nous ne pouvons pas attendre plus longtemps l'exécution d'un chemin de fer promis depuis 1814.

Mais, messieurs, si j'ai eu à me plaindre de la société du Luxembourg, ce n'est pas une raison pour être injuste à son égard.

Il faut bien reconnaître que cette société avait entrepris une œuvre bien difficile en 1846, et que personne ne voulait entreprendre. Elle a déjà dépensé plus de 60 millions, elle a mené à bien son entreprise, et elle présente aujourd'hui toute garantie pour l'exécution du chemin de fer qu'elle réclame.

L'honorable M. Thibaut m'a dit hier que, dans un discours que j'ai prononcé en 1851, j'ai prétendu que l'embranchement de Bastogne ne coûterait que 1,200,000 francs ; c'est possible ; je n'ai pas pu vérifier le fait.

Dans les premiers moments où cette question était agitée, il y avait différents tracés ; il y avait un tracé qui passait beaucoup plus près de Bastogne que la ligne actuelle.

M. l'inspecteur de Moor avait fait différents projets ; il y en avait un qui se rapprochait beaucoup de Bastogne.

Mais maintenant l'embranchement de Bastogne aura 29 kilomètres, en partant de Longlier.

On peut évaluer à 100,000 francs, le coût kilométrique, ce qui reviendrait à environ 3 millions. Voilà ce que doit coûter l'embranchement de Bastogne.

M. Thibaut. - On ne l'a jamais estimé aussi haut.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - C'est qu'on l'a estimé trop bas.

M. d’Hoffschmidt, rapporteurµ. - Comme j'ai eu l'honneur de le dire tout à l'heure, il y avait différents tracés, et le tracé qui a été définitivement adopté est celui qui s'éloigne le plus de Bastogne ; or, une garantie de 70,000 fr. sur 3 millions, cela fait 21/3 pour cent.

Dès que la commission obtiendra 5,000 fr. brut par kilomètre, elle n'aura plus besoin de réclamer le bénéfice de la garantie d'intérêt.

Or, il ne peut pas y avoir le moindre doute concernant une recette aussi faible.

Maintenant, messieurs, pour la ligue de Spa, nous avons toute espèce de garantie que cette ligne sera exécutée par la compagnie Guillaume-Luxembourg.

Cette compagnie a fait ses preuves, elle a exécuté des travaux admirables dans le Grand-Duché de Luxembourg.

Or, une subvention de 5 millions de francs lui est accordée par ce petit pays pour la partie Grand-Ducale depuis Ettelbruck jusqu'à la frontière de Belgique.

Elle aura en outre une garantie d'intérêt pour la partie belge ; de plus le gouvernement néerlandais attache la plus haute importance à l'exécution de ce chemin de fer.

Si je ne me trompe, il y a eu, dans ce but, des démarches actives de la part de ce gouvernement près du gouvernement belge. Il aura soin, par conséquent, d'insister fortement près la compagnie pour la prompte exécution de la ligne. Il y a donc certitude, on peut le dire, que le chemin de fer sera exécuté dans le délai fixé et très probablement dans un délai plus rapproché.

Voilà encore un des avantages du projet présenté par le gouvernement.

Messieurs, je dois cependant exprimer le regret que dans le projet qui vous est soumis, on n'ait pas été plus précis en ce qui concerne la désignation des aboutissants des divers chemins de fer. Ainsi pour Spa, il est resté des inquiétudes dans l'esprit des populations. Elles se sont tout à coup alarmées ; de nombreuses pétitions sont arrivées ; on fait une foule de suppositions, qui ne sont pas fondées sans doute ; on craint que le chemin de fer n’aboutisse pas à Spa, on craint même qu’il ne traverse pas les canton de Vielsalm et de Houffalize.

(page 1840) Tout cela provient de ce qu'on n'a pas été plus précis en ce qui concerne l'indication de la direction du chemin de fer.

Je serais très charmé que M. le ministre des travaux publics pût nous donner des explications rassurantes à cet égard et qu'il voulût même indiquer clairement la direction de ce chemin de fer.

Il en est de même de Bastogne ; on a mis « près de Bastogne » ; dans tous les projets de loi, Bastogne avait été indiqué comme aboutissant. Or, il n'y a aucune difficulté résultant de la configuration du terrain.

Trois plans ont déjà été faits et les tracés passent tous par Bastogne.

Je demande donc instamment que M. le ministre des travaux publics y tienne la main, lorsqu'il aura à approuver un projet définitif ; il ne faut pas qu'il y ait déception lorsqu'on arrivera à la construction du chemin de fer.

Je crois donc que sous tous les rapports il y a lieu d'adopter la proposition qui nous est faite par le gouvernement. Quelles que soient nos sympathies pour le chemin de fer qui est réclamé par les honorables M. Thibaut et Wasseige, il m'est impossible de le voter aujourd'hui. Cela ferait beaucoup plus de mal que de bien à l'intérêt qu'on veut servir.

II est certain que l'amendement des honorables membres remet tout en question, qu'il laisse parfaitement à l'écart et la ligne de Spa et celle de Bastogne ; qu'il ne s'occupe que de la seule ligne de Liège à Givet. Or, nous sommes assurés de l'exécution de la ligne de Liège jusqu'à Marche ; et quant à l'autre, vous avez entendu M. le ministre dire que MM. Lonhienne eux-mêmes ne sont pas disposés à s'engager à exécuter le prolongement vers la frontière de France.

Ainsi, l'amendement qui est proposé par les honorables MM. Thibaut et Wasseige, remettrait, je le répète, la combinaison et peut-être le projet de loi tout entier en question ; or, quel que soit l'intérêt qu'on porte à une petite ligne de 35 kilomètres, il me semble que cet intérêt n'est pas assez grand pour que nous puissions y avoir égard, en compromettant le sort du grand projet de loi qui nous est soumis et qui est appelé à exercer une si grande influence sur la prospérité du pays.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, je demande la parole pour faire connaître à la Chambre une légère modification de rédaction dans l'article premier du cahier des charges arrêté avec la compagnie Guillaume-Luxembourg pour la construction de la ligne de Spa.

L'honorable préopinant vient de rappeler les préoccupations qui semblent s'être emparées de certains esprits quant à la direction que suivrait la ligne du grand-duché vers Spa. On a été jusqu'à dire et à écrire que la ligne du grand-duché vers Spa pourrait prendre la direction de Wiltz et de l'Emblève et venir par l'Ourthe à la rencontre de la ligne de Liège à Namur.

Eh bien, j'avoue que je ne comprends pas comment une aussi fausse interprétation a pu surgir. Quand la loi dit qu'il s'agit d'un chemin de fer se dirigeant de la frontière du Grand-Duché à Spa, il est évident que si même la convention laissait un doute, il faudrait l'interpréter à la lumière de la rédaction du texte de la loi. Si la convention disait le contraire de la loi et si, sans demander une modification à la loi, je laissais s'exécuter une pareille convention, ce serait un cas de responsabilité ministérielle, auquel je veux pas m'exposer.

Je pense donc que puisque cette préoccupation existe, et que d'autre part l'intention commune du gouvernement et de la société concessionnaire est diamétralement contraire à l'interprétation qu'on a donnée à la convention, ce qu'il y a de plus sage à faire, c'est de donner satisfaction aux populations, en exprimant plus clairement ce qui était dans l'intention des parties.

J'ai donc l'honneur d'annoncer à la Chambre qu'une modification à la convention relative à la ligne de Spa, a été arrêtée et signée, et que, par suite de cette modification, l'article premier du cahier des charges a été rédigé comme suit :

« Art. 1er. Le chemin de fer prendra son origine à la frontière nord du grand-duché de Luxembourg et se dirigera vers Spa, en passant par ou près Vielsalm et Trois-Ponts, pour se raccorder au réseau des voies ferrées belges, à un point à déterminer, sur la ligne de Pépinster à Spa.

« Le point de jonction et les conditions du raccordement, à la frontière, avec le réseau des chemins de fer de la société royale grand-ducale Guillaume-Luxembourg, ainsi que les conditions de l'exploitation internationale, seront arrêtés ultérieurement de concert avec le gouvernement du grand-duché de Luxembourg.

« Avant la mise en exploitation de la ligne concédée, il interviendra une convention spéciale réglant les rapports de cette ligne avec les lignes de l'Etat. Le service mixte, qui sera établi en vertu de cette convention, profitera de toutes les facilités en usage, afin que les relations soient favorisées le plus possible, dans l'intérêt réciproque des deux parties. »

Je crois que, dans ces termes, tout doute doit disparaître.

MpVµ. - La parole est à M. Thibaut.

M. Thibaut. - Je la cède à mon honorable ami Wasseige.

MpVµ. - La parole est à M. Wasseige.

M. Wasseigeµ. - Messieurs, je n'ai pas l'intention de rentrer dans le cœur de la discussion. Je me bornerai à dire quelques mots pour justifier, à mon point de vue, l'amendement que l'honorable M. Thibaut et moi avons signé avec nos honorables collègues de Namur.

Je commencerai par protester contre la qualification de discours froidement violent donné par l'honorable M. de Moor au discours de mon honorable ami, M. Thibaut ; nous avons tous pu juger que ce discours était sérieux, serré, rempli de faits ; mais certes personne n'a pu y découvrir la moindre trace de violence froide, de violence quelconque.

Quant à la critique consciencieusement faite d'un acte posé par un ministre, si l'honorable M. de Moor voit dans cette critique une injure, je lui ferai observer que de 1855 à 1857 bon nombre de ses amis se sont rendus coupables d'injures bien graves et bien souvent répétées.

Messieurs, je ne parlerai pas de la question de priorité. Les raisons militant en faveur de MM. Lonhienne contre la compagnie du Luxembourg, ont été développées par mon honorable ami M. Thibaut ; les raisons contraires ont été exposées par M. le ministre des travaux publics ; je laisse à la Chambre à juger les unes et les autres.

Mais ce qui est certain, c'est que deux sociétés se sont présentées pour exécuter un chemin de fer de la vallée de l'Ourthe vers le chemin de fer du Luxembourg ; que l'une de ces sociétés n'a demandé cette concession que jusqu'au chemin de fer du Luxembourg ; que l’autre l'a demandée jusqu'à la frontière française, jusqu'à Givet ; l'une a demandé une concession d'un parcours de 65 kilomètres et qui est utile à deux provinces seulement ; l'autre a demandé une concession de 103 kilomètres et qui est utile à trois provinces.

M. le ministre des travaux publics a choisi la première, c'est ce que je ne puis admettre ; c'est ce que je ne puis m'expliquer.

En prenant cette mesure, il a sacrifié, à mon avis, la province de Namur, attendu que la concession accordée vient s'arrêter précisément à sa frontière.

Je disais, messieurs, que les deux sociétés avaient demandé chacune une ligne différente, et je le maintiens, contrairement aux allégations de nos adversaires.

On vous a dit que la société Lonhienne ne demandait qu'éventuellement la ligne d'Aye à Givet ; je crois, messieurs, que c'est une erreur ; ces messieurs le disent positivement dans la pétition qu'ils vous ont adressée et voici en quels termes :

« Le 13 octobre 1861, nous transmettions à M. le ministre des travaux publics le plan et le profil définitivement arrêtés de notre ligne entière de Givet à Liège. Nous y joignions un projet de convention par lequel nous prenions l'engagement d'exécuter toute la ligne dans le délai de trois ans, à dater du jour de l'octroi de la concession définitive et nous offrions de déposer le cautionnement provisoire dans les trois jours. »

Vous voyez donc qu'il était bien question d'un projet à l'exécution duquel on était décidé à mettre immédiatement la main.

M. le ministre me paraît avoir commis une autre erreur encore lorsqu'il a prétendu que la garantie de minimum d'intérêt de 800,000 fr. n'était attribuée par MM. Lonhienne qu'à la partie comprise entre Liège et la ligne du Luxembourg.

Ces messieurs disent encore à la page 17 de leur pétition :

« Ainsi, quand nous avons demandé nous-mêmes une garantie de 800,000 fr. pour nos 103 kilomètres de Liège à Givet, songions-nous à une simple réversion de la garantie du Grand-Luxembourg, et nous l'aurions précisé si le gouvernement nous avait procuré l'occasion de nous expliquer à cet égard.

« Aujourd'hui encore, nous ne demanderions pas autre chose que d'être inscrits en second sur ce crédit, et de n'en jouir que pour autant que le Grand-Luxembourg n'en ait lui-même pas besoin. »

Il est enfin à remarquer, messieurs, que les frères Lonhienne, pour l'exécution de toute leur ligne, ne demandaient qu'une garantie de minimum d’intérêt éventuelle.

Ils demandaient seulement à être inscrits après la compagnie du Luxembourg.

Quelle raison pouvait avoir le ministre d'avantager un concessionnaire plutôt qu'un autre, puisque l'un ne grevait pas le trésor plus que l’autre, qu'il demandait un parcours plus long et qu'il satisfaisait trois provinces au lieu de deux ? Je l'ignore.

(page 1841) L'honorable M. de Moor a dit hier en interrompant M. Thibaut : qu'il y avait privilège pour la compagnie du Luxembourg.

M. de Moor. - Non, pas privilège, mais un droit de préférence.

M. Wasseigeµ. - Soit, un droit de préférence à cause de ses embranchements obligés vers l'Ourthe et vers Bastogne.

C'est là une erreur reconnue par M. le ministre des travaux publics lui-même.

En 1859, répondant à l'honorable M, d'Hoffschmidt, qui réclamait, en sentinelle vigilante, comme il le sera toujours, d'après sa déclaration d'aujourd'hui, l'embranchement vers Bastogne si vivement, si chaleureusement défendu par mon honorable ami M. Nothomb, le ministre s'exprimait ainsi :

« Je vais donner sur-le-champ à l'honorable M. d’Hoffschmidt les explications qu'il réclame.

« La question est extrêmement simple et je suis heureux d'avoir l'occasion de m'en expliquer.

« Le gouvernement n'use vis à-vis de la compagnie du Luxembourg, dans cette circonstance ni dans aucune autre, d'aucun genre de complaisance. Il ne lui demande pas l'exécution des embranchements vers l'Ourthe et vers Bastogne, tout simplement parce qu'il croit n'en pas avoir le droit, et c'est là le point que je vais démontrer à la Chambre. »

C'est le point que je vais démontrer à la Chambre.

Il n'y a donc pas de raison, à propos de ces embranchements, de donner un droit de préférence à la compagnie du Luxembourg.

Voici, messieurs, en deux mots, la question réduite à sa plus simple expression.

Deux compagnies se présentent, réclamant de la part de l'Etat la même intervention, le même minimum d'intérêt ; l'une se chargeant de faire une ligne de 103 kilomètres, une ligne internationale, une ligne parcourant trois provinces ; l'autre ne voulant avoir qu'une concession restreinte, utile surtout à la ligne principale du Luxembourg ; car, remarquez-le, cet affluent est le plus productif que la compagnie puisse jamais avoir pour alimenter sa ligne de Bruxelles à Arlon, et dans cette situation l'on éconduit la première et l'on choisit la seconde. Peut-on dire que dans cette circonstance l'intérêt public a été le seul mobile du gouvernement ?

Mais, dit-on, prenez patience, votre ligne d'Aye à Givet se fera un jour. Des demandes en concession sont parvenues au département des travaux publics, nous n'aurons que l'embarras du choix.

Mais pourquoi s'en remettre à l'avenir ? Sommes-nous certains de l'avenir ?

S'il n'y avait pas actuellement de demandes en concession, je comprendrais l'opposition du gouvernement, mais c'est le contraire qui est vrai et il ne repousse pas cette ligne parce qu'il craint qu'elle ne puisse pas se faire, mais pour une raison dont on peut difficilement se rendre compte.

Je n'en trouve qu'une et j'ai peine à l'exprimer ; je la dirai cependant.

- Plusieurs membresµ. - Dites.

M. Wasseigeµ. - C'est qu'avec la minimum de 800,000 fr., M. le ministre des travaux publics s'est dit : Je peux faire la ligne de l'Ourthe et la ligne de Spa, deux lignes dans la province de Liège, deux lignes désirées par la compagnie du Luxembourg.

Avec cette même somme, je pourrais, il est vrai, en faire une aussi dans la province de Namur, mais Liège n'en aurait plus qu'une seule. Si l'une des deux provinces doit être sacrifiée, évidemment ce doit être celle de Namur. (Interruption.)

Raison politique, mais mauvaise politique, voilà la seule raison que j'ai pu trouver.

Mais, dit-on, la ligne se fera.

Oui elle se fera si la compagnie du Luxembourg le veut bien ; si elle y voit son intérêt, car vous ne trouverez aucun concessionnaire sérieux qui veuille compromettre ses capitaux pour faire une ligne de 35 kilomètres, s'il n'était pas d'accord avec la compagnie du Luxembourg toute-puissante dans ces parages et qui va devenir plus puissante encore. Donc si cette Compagnie ne la veut pas, la ligne ne se fera pas, c'est évident.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Et l'Est français.

M. Wasseigeµ. - Si ce qui l'on dit est vrai, une entente cordiale s'est établie entre l'Est français et le Nord ; alors l'Est français n'a pas d'intérêt à se raccorder avec cette ligne. Il a sa direction (interruption) par Givet et par la vallée de la Meuse.

Je suis donc autorisé à dire qu'elle ne se fera pas si la compagnie du Luxembourg ne le veut pas.

Les mauvaises langues disent même que c'est pour cette raison que dans le projet du gouvernement on n'a pas indiqué nettement le point de jonction des deux lignes. Or, pour que la ligne de l'Ourthe puisse se prolonger utilement jusqu'à Givet, le point de jonction doit être Aye. S’il était à Marloye ou à Jemelle, le chemin de fer de Givet serait beaucoup plus difficile à exécuter, il serait plus long de 5 à 6 kilomètres et il exigerait des travaux d'art considérables, des ponts, etc., qui ne sont nullement nécessaires avec le tracé par Aye.

Je demanderai donc à M. le ministre, si réellement, comme j'aime à le croire, il désire que cette ligne se fasse dans l'avenir, de vouloir bien dans le cas où notre amendement ne serait pas accueilli, consentir à un changement de rédaction du n°1° de l'article 3, dans ces termes :

« Un chemin de fer se dirigeant de Liège par la vallée de l'Ourthe vers le chemin de fer du Luxembourg à Aye. »

En consentant à ce changement de rédaction, il donnera un encouragement à des intérêts qui devront probablement attendre encore longtemps et il leur prouvera que s'il ne peut leur donner satisfaction complète en ce moment, il est disposé à la leur procurer dans l'avenir autant que cela dépendra de lui.

M. Frisonµ. - Messieurs, je ne viens pas vous demander un nouveau chemin de fer pour mon district, mais vous prier de lui laisser un chemin de fer qui lui a été concédé par une loi, et que l'honorable M. Allard veut lui retirer. Oui, messieurs, tandis que beaucoup d'entre vous sollicitent de nouveaux avantages, je me vois réduit à défendre les droits acquis de mes commettants contre M. Allard.

En 1856, la compagnie Hainaut et Flandres fut déclarée concessionnaire d'une ligne principale et de deux embranchements, l'un passant par Péruwelz et aboutissant à Tournai, l'autre reliant Saint-Ghislain à Ath par Beloeil.

La ligne principale seule est construite aujourd'hui, la construction des lignes accessoires n’est pas encore commencée. Différentes fois nos honorables collègues de Tournai ont prié M. le ministre des travaux publics de forcer la compagnie à s'exécuter en ce qui concernait leur localité. M. le ministre leur a constamment répondu que la situation financière de cette compagnie ne lui permettait pas de réaliser ses engagements et que des poursuites contre elle n'aboutiraient pas.

L'honorable M. Martin Jouret et moi, nous n'avons jamais demandé en séance publique l'explication du retard que mettait la compagnie à construire l'embranchement aboutissant à Ath, l'explication était connue de tout le monde, et nous craignions en pressant trop vivement la compagnie d’ajouter à ses embarras financiers et d'aller ainsi contre le but de nos vœux qui ne peut être atteint que par l'amélioration de sa position financière.

Il faut penser que la patience que nous avons mise à attendre la réalisation de nos droits, a fait supposer à M. Allard que nous les dédaignions, et que si par son amendement il fait si bon marché de notre chemin de fer, c'est qu'il croit que nous-mêmes nous en faisons peu de cas. En cela il se trompe très fort.

Voici en quoi consiste la combinaison de notre honorable collègue : la faire bien comprendre à la Chambre, c'est le principal objet de mon discours, car la bien faire connaître, c'est la réfuter.

Je vous l'ai déjà dit, messieurs, la compagnie Hainaut et Flandres est en retard d'exécuter deux embranchements, l'un dans l'intérêt de l'arrondissement de Tournai, l'autre dans l'intérêt de l'arrondissement d'Ath, mais la compagnie n'a pas d'argent pour exécuter ces deux lignes. M. Allard va la tirer d'affaire, il lui donnera un minimum d'intérêt pour exécuter la ligne de son arrondissement, et quant à la ligne destinée à notre arrondissement il dispense la compagnie de l'exécuter. C'est être généreux, mais avec la bourse d'autrui. Que dirait M. Allard si nous lui demandions de commencer par exécuter notre ligne et de nous attribuer le minimum d'intérêt qu'il réclame pour sa localité, sauf à la compagnie à s'exécuter envers ses commettants quand elle le pourra ? Que dirait M. Allard si lui et moi nous étions créanciers d'une tierce personne incapable de nous satisfaire tous les deux et si je demandais à être payé tout seul immédiatement, sauf à lui de s'arranger plus tard avec le débiteur !

Il faut convenir, messieurs, qu'il est impossible d'être traité avec plus de sans façon que nous ne le sommes par M. Allard, qui s'est laissé entraîner trop loin par son zèle pour ses commettants. L'arrondissement qu'il représente et le mien sont limitrophes, il devrait avoir plus d'égards pour ses voisins.

Je possède dans le canton de Péruwelz des nombreuses et chères relations, mais je ne puis leur sacrifier les droits de mes commettants sans forfaire à mon mandat et sans charger ma conscience.

Je crois en avoir dit assez pour gagner la cause de l'arrondissement d'Ath. Vous avez compris, j'espère, qu'il s'agit de dépouiller une localité du bénéfice d'une loi au profit d'une autre localité, et vous ne pouvez donner les mains à une pareille injustice.

(page 1842) MpVµ. - Messieurs, voici l'amendement de M. Wasseige :

« Art. 3. Le gouvernement est autorisé à concéder, aux clauses et conditions qu'il déterminera :

« 1° Un chemin de fer de Liège à la frontière française vers Givet, par la vallée de l'Ourthe, Aye, Rochefort et Beauraing.

« 2° Le reste comme dans le projet.»

- L'amendement est appuyé.

M. M. J. Jouret (pour une motion d’ordre). - Messieurs, le prétendu amendement que vous a présenté dans la séance d'hier l'honorable M. Allard n'est en réalité, il faut bien en convenir, qu'une proposition nouvelle qui n'est pas comprise dans le projet en discussion et qui, par conséquent, n'est pas à l'ordre du jour.

Dans cette circonstance je demande que la Chambre décide comme elle l'a fait en pareil cas dans la séance du 2 juin 1855, qu'il y a lieu de renvoyer la proposition de M. Allard et de suspendre toute discussion sur cette proposition.

M. Nothombµ. - J'ai entendu avec satisfaction M. le ministre des travaux publies nous lire la nouvelle rédaction de la convention en ce qui concerne le tracé du chemin de jonction Grand-Ducale. Par là il sera fait droit à de légitimes inquiétudes. (Interruption.)

M. le ministre m'interrompt et conteste le mot « légitimes » : disons alors des inquiétudes motivées... (Interruption.) Oh ! ne chicanons pas sur les adjectifs ! Je disais donc que je me réjouis de ce que la nouvelle rédaction vient bannir les alarmes des populations intéressées et remettre le calme chez elles. Ainsi il est entendu désormais que le tracé du chemin en question se dirigera de Spa par Stavelot et Vielsalm. (Interruption.)

Je ne comprends pas l'interruption, car il est bien manifeste que du moment que l'on passe par Vielsalm il est impossible que l'on ne passe pas par Stavelot ou du moins tout contre.

Je désire aussi que M. le ministre montre la même disposition quant au tracé du chemin de fer de l'Ourthe et stipule qu'il se réunisse à celui du Luxembourg par Marche vers Aye. Il y a là un intérêt respectable à satisfaire, et en cela je me rencontre avec M. le ministre lui-même, car dans la réponse qu'il a faite à la section centrale il a reconnu qu'il y avait en quelque sorte un droit acquis en faveur de la ville de Marche et que l'équité commande que l'on fasse tout pour le respecter.

Je me rallie donc aux honorables MM. Thibaut et Wasseige, en demandant que le point de jonction soit placé à la station d'Aye.

Mais, messieurs, ce n'est pas uniquement pour cela que j'ai demandé la parole. J'ai un but plus important à mes yeux : je veux avoir une explication relativement à la répartition du maximum d'intérêt de 800,000 francs accordé pour les deux grands chemins de l'Ourthe et de la jonction grand-ducale.

J'avoue que sous ce rapport, la rédaction du projet de loi et surtout de l'exposé des motifs jette un grand doute dans mon esprit. Je me demande comment la répartition se fera entre les deux lignes. Voici ce que dit l'exposé des motifs :

« Ces lignes, dans le système adopté et au point de vue du service de la garantie, sont considérées comme indivisibles, et la garantie est affectée non proportionnellement à chacune des deux lignes séparément, mais à ces deux lignes étant censées n'en former qu'une. »

Faut-il comprendre ceci en ce sens qu'il n'y aura distribution des 800,000 fr. que quand les deux lignes seront complètement achevées ? A prendre à la lettre ce passage, il semblerait que la réponse dût être affirmative, car pour que les deux lignes n'en forment qu'une, il faut nécessairement qu'elles soient achevées l'une et l'autre. Cependant cette interprétation ne me paraît point admissible.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Ce n'est pas ainsi non plus qu'il faut l'entendre.

M. Nothombµ. - Il est donc entendu, au contraire, que si une seule des lignes s'exécute, elle aura droit au minimum d'intérêt. Jusqu'ici nous sommes d'accord, mais reste une question : d'après quelle base se fera la répartition ?

Je crois que les deux lignes se feront, j'en suis même convaincu ; mais enfin supposons l'hypothèse, improbable bien que possible, qu'on n'en exécute qu'une seule.

Qu'arrivera-t-il alors ? Cette ligne isolée jouira-t-elle de la totalité de la garantie des 800,000 fr. ? Je ne le crois pas, et l'indivisibilité dont vous parlez ayant cessé quant au fait, quant aux charges, sera-t-elle maintenue quant au bénéfice ? Cela ne me paraît pas possible. Car enfin supposons que la ligne de l'Ourthe soit seule établie ; elle aura seulement 65 kilomètres ; est-il possible, je le demande, de lui attribuer la totalité de 800,000 fr., c'est-à-dire la même garantie que la compagnie du Luxembourg possédait pour la ligne de Namur à Arlon d'une étendue plus que double ? (Interruption.)

Vous m'interrompez, M. le ministre ; mais permettez que je vous oppose à vous-même. Tout à l'heure vous faisiez de ceci un argument contre MM. Lonhienne. Vous trouviez exorbitant qu'ils réclamassent les 800,000 francs pour cette ligne de l'Ourthe et vous aviez raison. Et maintenant trouveriez-vous cela naturel quand il s'agit de la compagnie du Luxembourg ? Comment arrangez-vous cela ?

Je veux bien accorder à la ligne de l'Ourthe, dans la garantie d'intérêt, une part proportionnelle raisonnable, équitable, large même ; mais je n'entends pas qu'on lui attribue 800,000 francs pour une exploitation de 65 kilomètres, alors que cette même somme avait été jugée suffisante pour une ligne double.

Je prie M. le ministre des travaux publics de vouloir bien me donner une explication sur ce point, dont personne ne peut contester l'importance.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Je dois d'abord un mot d'explication aux auteurs de l'amendement proposé au n°1° de l'article actuellement en discussion.

Nous demandons, par cet article, l'autorisation de concéder un chemin de fer se dirigeant de Liège vers le chemin de fer du Grand-Luxembourg par la vallée de l'Ourthe. A cette rédaction, les auteurs de l'amendement proposent de substituer celle-ci :

« Un chemin de Liège à la frontière française, par Givet, la vallée de l'Ourthe, Aye, Rochefort et Bastogec.»

Messieurs, que veulent les honorables auteurs de cet amendement ? Je ne dis pas que telle soit leur intention, mais leur amendement constituerait une véritable équivoque ; et il importe que nous en expliquions dans l'éventualité de l'adoption de cet amendement.

Eh bien, dans ma pensée et je dois insister sur ce point, la convention conclue avec la Compagnie du Grand-Luxembourg subsisterait, nonobstant l'amendement ; de sorte que si, dans notre pensée, l'adoption de votre amendement devait emporter le renversement de cette convention, il faudrait le rédiger autrement.

C'est là un premier point très important, sur lequel il faut nécessairement s'entendre.

Second point de fait : est-ce que la convention proposée par MM. Lonhienne comportait la construction de la ligne complète de Liège à Givet avec la garantie d'intérêt ? Non ; la garantie d'intérêt ne portait que sur la section de Liège à la rencontre du chemin de fer du Luxembourg.

j'en trouve la preuve dans la correspondance échangée entre MM. Lonhienne et le gouvernement ; cette correspondance, je vais vous la lire, et vous verrez qu'il n'y a aucun doute possible sur ce point. Voici une première lettre du 1er mai 1862.

M. Wasseigeµ. - C'est postérieur.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Vous allez voir que ce n'est pas postérieur et que MM. Lonhienne ne rendent pas un compte exact de ce qu'ils ont écrit au gouvernement. Voici donc cette lettre du 1er mai 1862 :

« Monsieur le ministre,

« Nous avons l'honneur de vous faire connaître que nous sommes prêts à verser le cautionnement de cent mille francs, en prenant l'engagement d'établir la première section du chemin de fer de Liège à Givet, par la vallée de l'Ourthe et Marche, s'étendant depuis le chemin de fer de l'Etat à Angleur, jusqu'à la ligne du Luxembourg.

« La seconde section d'Aye à Givet serait exécutée si, dans les dix ans, le gouvernement français concédait et faisait exécuter une ligne de Givet jusqu'à la frontière belge à la rencontre de notre ligne. Nous demandons en outre la préférence à titre d'extension pour la ligne de l’Emblève.

« Pour faciliter la construction de la première section de ce grand travail d'utilité publique, si ardemment réclamé par une partie notable du pays, nous demandons une garantie d'un minimum d'intérêt de huit cent mille francs et le libre parcours sur la ligne de l'Etat de Liège à Angleur. »

Il me semble que c'est clair : 800,000 fr. pour la première section. C'est la première section qui devait être garantie par cette somme, si c'est cette première section seulement qu'ils s'engageaient à construire.

M. Wasseigeµ. - Ils disent le contraire dans leur Mémoire.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Mais vous voudrez bien reconnaître que ce n'est pas ma faute s'ils disent le contraire dans leur brochure. Voici une autre pièce, la dernière où ils parlent de la garantie d'intérêt.

Je fais allusion au projet de convention qu'ils ont envoyé au département par lettre du 13 octobre 1861, c'est celle dont ils font mention dans la brochure.

« Monsieur le ministre,

« Nous avons l'honneur de vous adresser le plan et le projet modifiés (page 1843) du chemin de fer projeté dans la vallée de l'Ourthe. Nous y joignons un projet de convention, et nous croyons que le cahier des charges du chemin de fer concédé de Louvain à Herenthals peut servir à celui de l'Ourthe.

« Projet de convention.

« Art. 1er. Les seconds nommés ci-dessus s'engagent à établir, sous la surveillance du gouvernement, et dans un délai de trois ans à compter du jour de l'octroi de la concession définitive, 1° la première section du chemin de fer de Liège à Givet par la vallée de l'Ourthe et par Marche, s’étendant depuis le chemin de fer de l'Etat, à Angleur, jusqu'à la ligne de Luxembourg à Aye ; 2° l'exécution de la seconde section d'Aye à Givet, dans un délai de deux ans, si le gouvernement français concédait une ligne de Givet jusqu'à la frontière belge, à la rencontre de la ligne de Liège à Givet. Cette ligne sera construite aux risques et périls des concessionnaires de second part et conformément aux clauses et conditions du cahier des charges à convenir entre les parties.

« Art. 3. Pour faciliter aux contractants de seconde part l'accomplissement de leurs engagements, le premier nommé présentera aux Chambres législatives, dans le courant de cette année, un projet de loi autorisant le gouvernement à concéder aux seconds nommés, aux clauses et conditions du cahier des charges, le chemin de fer de Liège à Givet, en leur accordant un minimum d'intérêt de huit cent mille francs sur la première section de Liège a Age, et le droit de parcours sur la ligne de l'Etat d'Angleur à Liége. »

Ici ils demandent deux ans ; le 1er mai ils demandaient dix ans ; est-ce une erreur de plume ? Où est-elle ? Est-ce dans la première ou dans la seconde pièce ? Ou bien ces messieurs ont-ils modifié leur système ? Je fournis les deux pièces. Il est clair qu'ils ne demandaient pas la garantie pour la deuxième section. Ils la demandaient pour la première, pas pour la seconde. La seconde n'était donc pas garantie, si ce n'est sur le crédit personnel de la société à constituer. Est-ce que demain nous ne serons pas devant le premier concessionnaire, solide, venu, dans la position où nous nous serions trouvés vis-à-vis de MM. Lonhienne ?

Doutez-vous qu'il s'en présente ? Moi je n'en doute pas ; il est certain que la concession serait disputée entre la compagnie du Luxembourg et l'Est français. Vous dites que l'Est français n'a pas intérêt. Au contraire il a le plus grand intérêt à avoir cette ligne. Celle de Namur à Givet n'est pas aussi utile à la ligne de l'Est français que celle dont il s'agit, à titre d’affluent, parce que par la ligne de l'Ourthe elle voit tous les produits de la vallée de l'Ourthe lui échapper, elle les aurait par la ligne d'Aye à Givet ; vous qui connaissez les localités vous pouvez en juger ; la construction du prolongement vers la frontière française est une chose certaine.

Si j'avais à me prononcer sur l'exécution de cette ligne, je n'hésiterais pas. Faut-il la décréter aujourd'hui, accepter l'amendement des honorables membres ? Je ne le crois pas ; d'abord parce que la personne du concessionnaire n'est pas connue ; de plus parce que il y a certains points très importants à déterminer. Vous voulez aboutir à Givet ; ne vaut-il pas mieux porter le chemin un peu plus vers le sud, vers le cœur des Ardennes ?

Vous voudriez commencer dès à présent, vous auriez tort au point de vue des intérêts pour lesquels vous réclamez. Vous ne savez pas ; il faut donc étudier, et pour étudier ajourner, attendre le concessionnaire qui se présentera certainement. J'en dis autant pour le point de raccordement.

Vous dites que je ne sais pas où il devra aboutir ; pour bien faire, il faut établir le point de raccordement de façon qu'il soit le plus facile possible d'atteindre la frontière française.

Vous devez donc vous contenter de la déclaration du gouvernement, puisque nous sommes d'accord au fond.

Puisque j'en suis au Luxembourg, je dirai deux mots sur le discours de M. de Moor. Je n'ai rien à reprendre dans la déclaration que j'ai faite à la section centrale, elle est exacte, conforme aux faits ; mais laissons le passé, parlons de l'avenir.

Le gouvernement avait conclu des conventions pour un chemin de fer coupant transversalement le Luxembourg ; l'Etat intervenait pour une somme assez forte ; or pour que l'Etat ait passé de pareilles conventions, il fallait qu'il fût convaincu que la ligne était bonne ; il n'aurait pas donné de l'argent, son concours dans une si large mesure, s'il n'avait pas cru que c'était une entreprise qui devait être fructueuse.

Pour finir, je dirai un mot de l'amendement relatif à la ligne d'Ath. Je dois dire que cet amendement présenté dans l'intérêt de Tournai est un peu égoïste, il ne tient pas suffisamment compte des intérêts de l'arrondissement d'Ath. Je crois qu'il y a quelque chose à faire. Il est avéré que la position de la compagnie Hainaut et Flandres ne lui permet pas d'achever ses embranchements ; il faut tirer la compagnie de cette position, elle n'est pas avantageuse au pays et elle nuit beaucoup à la compagnie par la dépression qu'exerce sur ses valeurs cette question indécise des embranchements. Il faudrait avoir recours à une sorte d'arrangement transactionnel ; nous délibérons ; nous avons un point de départ ; nous espérons arriver à la prochaine session, avec une combinaison nouvelle qui satisfasse tout le monde autant que la situation de la compagnie le permet.

L'honorable M. Allard n'hésitera pas à se rallier à cette déclaration.

Quant à la répartition dont a parlé l'honorable M. Nothomb, c'est plutôt une question théorique ; elle n'a pas d'importance pratique ; il n'est pas douteux que la compagnie Guillaume-Luxembourg est disposée à construire la ligne de Spa et que la compagnie du Grand-Luxembourg fera la ligne de la vallée de l'Ourthe, il n'est pas douteux que l'une et l'autre compagnie moyennant les conventions passées à droite et à gauche, sont en état d'exécuter ces lignes.

Ainsi, pour la ligne du Grand Luxembourg, ainsi que l'a rappelé l'honorable M. d'Hoffschmidt, la compagnie du Guillaume-Luxembourg est en possession d'une subvention de 5 millions que lui octroie le gouvernement du Grand-Duché pour la section grand-ducale ; et avec la garantie d'intérêt que nous ajoutons, elle peut parfaitement, à l'aide de son crédit personnel, construire la ligne entière.

Cela étant, je répète que, selon moi, la difficulté est purement théorique, mais enfin si le cas prévu arrivait, qu'en résulterait-il en droit ? Que deviendrait la convention ? Voici, d'après moi, ce qui arriverait. Voici comment j'interpréterais la convention. Mais je ne puis que l'interpréter ; n'ayant évidemment pas le droit d'en fixer le sens positif.

Je suppose que ce soit la ligne de Spa qui ne soit pas faite. Deux questions se présentent ici. Est-ce qu'en l'absence de l'exécution de la ligne de Spa, la ligne de l'Ourthe serait privée de sa garantie de minimum d'intérêt ? Cela n'est pas possible.

Il y aurait donc une garantie d'intérêt. Laquelle ? Eh bien, je crois que jusqu'au moment où l'affaire de la ligne de Spa serait reprise par un tiers, la garantie serait de l'intégralité des 800,000 fr. Mais je crois que le gouvernement pourrait substituer un tiers à la compagnie du Guillaume-Luxembourg. En effet, voici ce que porte l'article 7 de la convention entre le gouvernement belge et la compagnie du Luxembourg :

« La ligne dite : de l'Ourthe, pourra être livrée à l'exploitation par sections successives. Ce cas échéant, la garantie de huit cent mille francs est, transitoirement, et jusqu'à la mise en exploitation de la ligne de Spa seulement, affectée en totalité à ladite ligne de l'Ourthe et courra partiellement, au profit de chaque section livrée à l'exploitation, au prorata de la longueur de cette section. »

L'esprit de la convention, tel qu'il ressort clairement du texte, est donc celui-ci : que l'intégralité de la garantie est affectée à la ligne de l'Ourthe, mais que l'intégralité de la garantie n'est affectée à la ligne de l'Ourthe, pour me servir des termes de la convention, que transitoirement et jusqu'à la mise en exploitation de la ligne de Spa.

M. Thibaut. - Cela peut durer longtemps.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Qu'est-ce que cela fait ?

Ce qu'il importe de constater, et c'est le plus grand intérêt que puisse avoir le gouvernement, c'est que si quelqu'un se présente pour reprendre les obligations de la compagnie du Guillaume-Luxembourg, pour la ligne de Spa, ce quelqu'un pourra être substitué à cette compagnie.

Eh bien, je crois que ce droit ressort clairement du cahier des charges. J'en doute si peu que je n'hésite pas à dire que si le signataire de la convention passée avec le Guillaume-Luxembourg avait été à Bruxelles, s'il n'avait pas été à l'étranger, comme la difficulté m'avait été signalée, je n'aurais pas eu la moindre peine pour satisfaire complètement quelques honorables membres, à introduire une disposition nouvelle qui fixât les obligations des parties.

Je pense que ces explications paraîtront suffisantes à la Chambre.

M. Allard. - Messieurs, je veux justifier l'amendement que j'ai proposé hier.

Il ne s'agit pas ici de vouloir enlever à la ville d'Ath un chemin de fer qui a été voté il y a quelques années. J'ai dit simplement : Il existait un minimum d'intérêt sur la ligne d'Audenarde à Gand. Ce minimum d'intérêt était basé sur une somme de 1,800,000 fr.

Puisque l'on accorde de nouveau un minimum d'intérêt à la compagnie du Luxembourg qui va construire de nouvelles lignes dans cette province, qu'on rétablisse le minimum d'intérêt auquel on a forcé la compagnie Hainaut et Flandres de renoncer, pour obtenir les ligne de Saint-Ghislain à Audenarde, en faveur de la ligne de Péruwelz à Tournai.

(page 1844) Il est certain qu'avec la garantie sur un capital de 1,800,000 francs, l'on ne peut pas aboutir à la construction des deux embranchements.

Or, l'embranchement de Péruwelz à Tournai fera le prolongement d'une ligne directe qui ira de Liège à Calais.

Voyez la carte : de Namur, on arrive à Charleroi ; de Charleroi on va arriver par Marchienne à Beaume ; de Beaume à Mons, de Mous à Saint-Ghislain. De Saint-Ghislain, on arrivera à Tournai par Péruwelz, et de Tournai l'on prendra la nouvelle ligne vers Lille et Calais.

Ce sera donc la ligne la plus directe ; elle conduira plus facilement et plus vite de Liège à Calais, que la ligne qu'on veut rectifier aujourd'hui par Louvain et Hal.

Or, il est très naturel par conséquent, que c'est l'embranchement de Péruwelz à Tournai qui doit le premier être construit.

N'cst-il pas d'ailleurs plus important de réunir de grands centres de population comme Mons, Tournai et Lille, que des localités comme Saint-Ghislain et Ath ? Qu'est-ce que vous avez entre Saint Ghislain et Ath ? Vous n'avez que des bruyères, tandis que le chemin de fer dont je demande la construction, relierait des populations des plus nombreuses et des plus intéressantes.

Je ne retirerai donc pas mon amendement. Je le maintiens, parce que je dis que du moment que l'on accorde encore un minimum d'intérêt sur les lignes du Luxembourg, il y a lieu aussi de l'accorder pour les lignes de Tournai.

MpVµ. - M. Martin Jouret a proposé le renvoi de l’amendement de M. Allard à la section centrale.

Je mets cette proposition aux voix.

- Cette proposition n'est pas adoptée.

M. Thibaut. - Je suis heureux de pouvoir remercier M. le ministre des travaux publics et l'honorable rapporteur de la section centrale de la sympathie qu'ils ont témoignée pour le prolongement de la ligne de Liége de l'Ourthe jusqu'à la frontière de France vers Givet. Seulement je voudrais que cette sympathie prît un corps dans la loi. Je prierai donc M. le ministre des travaux publics de nous donner une nouvelle garantie sur ce point en admettant dans son projet un amendement qui lui donnerait l'autorisation de concéder cette partie de la ligne.

M. le ministre a déclaré qu'il était disposé et décidé à accorder la concession lorsqu'il se présenterait un concessionnaire. Eh bien, je demande que l'autorisation d'accorder cette concession fasse partie de la loi actuelle. Sans cela, il faudra attendre un nouveau projet de travaux publics peut-être pendant un an, mais peut-être aussi pendant deux ou trois ans.

Si le ministre des travaux publics voulait accepter cette transaction, je serais pour ma part, et je crois que mes honorable collègues partageraient mon opinion, disposé à retirer l'amendement que nous avons présenté.

Quant à la préférence donnée à la compagnie du Luxembourg aux dépens de MM. Lonhienne, elle soulève des questions sur lesquelles je me suis expliqué hier ; je n'y reviendrai pas.

Permettez-moi seulement de dire un mot de l'embranchement de Bastogne, au sujet duquel l'honorable M. d'Hoffschmidt a répondu à ce que j'ai allégué hier. L'honorable membre nous a dit que le coût de cet embranchement ne s'élèverait pas à moins de 3 millions, et que l'intérêt que l'on garantirait ne serait donc que d'environ 2 p. c. Eh bien, j'ai interrompu l'honorable nombre en disant que l'on n'avait jamais estimé la dépense à une somme aussi élevée. En effet, messieurs, en 1846 il y avait deux projets, la dépense de l'un était de 1,900,000 fr., l'autre devait coûter environ 1,600,000 fr.

M. d’Hoffschmidtµ. - 2,500,000 francs.

M. Thibaut. - Je vous demande pardon. En 1851, la section centrale pour le projet de loi de travaux publics supposait que la dépense monterait à 1,500,000 fr., et l'honorable M. d'Hoffschmidt a déclaré que les ingénieurs étaient d'accord pour la porter à 1,200,000 fr. seulement. (Interruption.)

Je répète que M. d'Hoffschmidt a déclaré que l'embranchement de Bastogne ne coûterait que 1,200,000 fr., que M. l'ingénieur de Moor et M. l'ingénieur Splingard étaient parfaitement d'accord sur ce chiffre.

Il en résulte donc, messieurs, qu'en garantissant 70,000 fr. de revenu net, l'Etat garantit un minimum de plus de 5 p. c sur le capital qui sera probablement dépensé.

Messieurs, je me borne à cette rectification.

J'insiste pour que M. le ministre des travaux publics accepte ma proposition.

Cela ne peut le gêner, ni l'embarrasser en aucune manière : c'est une proposition en quelque sorte transactionnelle.

M. le ministre ne peut avoir aucun motif de s'y opposer, alors surtout qu'il espère qu'il y aura même concurrence pour la ligne dont il s'agit.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - L'honorable député de Dînant ne peut pas exiger de moi que je traite autrement son amendement que les différents autres amendements, la situation étant la même.

Qu'est-ce que j'ai dit aux honorables député de Termonde ? Je ne vois aucune espèce d'inconvénient à votre amendement, mais il y a danger d'ouvrir la porte à une foule de propositions. Je dis la même chose à l'honorable M. Thibaut : L'amendement est bon, sauf le danger que j'ai signalé en ce qui concerne la direction vers Givet. Eh bien, de deux choses l'une, ou il se présentera un concessionnaire sérieux, ou il ne s'en présentera pas ; dans le dernier cas, la loi serait une lettre morte. S'il s'en présente un, je m'engage, aussi longtemps que je serai ministre des travaux publics, à saisir la première occasion de présenter un projet de loi à la Chambre.

M. Thibaut. - Spécial ?

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Spécial ou général, selon les circonstances.

M. Wasseigeµ. - Messieurs, nous avons tous, me paraît-il, le même désir de voir se prolonger la ligne de l'Ourthe jusqu'à la frontière française. M. le ministre dit avoir l'espérance qu'elle se fera bientôt, je ne suis malheureusement pas aussi convaincu que lui, je n'ai que l'assurance que l'amendement que j’ai signé ne réunirait pas dans la Chambre une majorité suffisante pour le convertir en loi ; je ne veux pas exposer la ligne que je réclame à un précédent fâcheux que l'on pourrait interpréter contre elle, si cet amendement était rejeté ; je conviens d'ailleurs que les explications de M. le ministre sont, jusqu'à certain point, rassurantes ; j'en prends acte, je lui rappellerai souvent ses promesses, et quant à moi, je retire mes deux propositions.

M. Nothombµ. - Je désire uniquement, messieurs, faire en deux mots mes réserves contre l'interprétation donnée par M. le ministre des travaux publics à la question que je viens de poser.

Il paraît admettre que, dans l'hypothèse qu'on ne ferait qu'une seule ligne elle jouirait de l'intégralité des 800,000 fr. A mon sens, c'est outrepasser l'esprit des conventions qui sont d'ailleurs rédigées d'une manière obscure, embrouillée, et qui feront probablement naître un jour des contestions judiciaires.

Dans mon opinion, l'Etat belge ne doit devenir débiteur de la totalité des 800,000 fr. de garantie que dans l'éventualité accomplie de la construction des deux lignes qui sont déclarées, de par l'exposé des motifs, indivisibles et une. (Interruption.) En français intelligible, ces expressions doivent signifier que l'une et l'autre doivent exister, qu'il faut leur coexistence pour constituer un tout indivisible et un. Sinon, il serait par trop étrange de prétendre qu'une seule ligne, c'est-à-dire la division n'en continuerait pas moins à faire l'indivisibilité. Il s'agit, en définitive de savoir si l'Etat sera engagé d'une manière indéfinie, absolue, pour le tout, pour les 800,000 fr. alors que les deux autres parties contractantes, déclarées une, n'auraient exécuté que la moitié du contrat.

On pourrait soutenir, d'après le texte des projets, que l'Etat ne doit rien aussi longtemps que les deux lignes ne sont pas exécutées. Mais, je le répète, je ne veux pas aller jusque-là toutefois, et par contre aussi, je trouve qu'il serait juste et rationnel que tînt qu'il n'y aura qu'une seule ligne l'Etat ne paye qu'une part proportionnelle des 800,000 francs. A exécution complète, garantie entière, mais aussi à exécution incomplète, garantie partielle. Position égale.

J'entends demander la clôture ; je ne prolonge pas ce débat pour mon plaisir, mais je trouve qu'une question de ce genre, celle de savoir si le trésor public ne sera pas un jour grevé d'une si lourde charge, mérite bien qu'on s'y arrête un peu. Comment ! il s'agit de savoir si l’Etat devra éventuellement payer 800,000 fr. ou seulement la moitié, ou le tiers, et quelques membres se montrent impatients ! Qu'ils me permettent d'achever. Ce sera bientôt fait.

Je m'attendais à l'objection que la difficulté que j'élève resterait purement théorique, puisque les deux lignes se feront et que d'ailleurs, bonnes par elles-mêmes, il n'est nullement à prévoir qu'elles dussent jamais absorber la totalité de la garantie. J'admets tout cela, j'estime aussi que les lignes seront productives ; toutefois, ces prévisions peuvent échouer ; des crises, des guerres, des perturbations prolongées peuvent arriver, et c'est cette éventualité qu'il faut aussi un peu prévoir. D'ailleurs, l'objection même, je la retourne, et puisque les lignes seront fécondes, que rien ne doit faire craindre qu'elles auront besoin de toute la garantie, pourquoi l'accorder ? Si une part quelconque assure le but, il me semble que l'Etat belge ne doit pas, par excès de générosité, aller au-delà de ce qui est nécessaire.

Je connais la compagnie Guillaume-Luxembourg, j'ai en elle, messieurs, la (page 1845) plus grande confiance ; mais enfin, je suppose qu'elle n'exécute pas ; dans ce cas, je trouverais exorbitant que la compagnie du Grand-Luxembourg pût exiger les 800.000 francs pour la seule ligne de l'Ourthe. Il en serait de même dans l'hypothèse inverse, où la compagnie du Grand-Luxembourg n'exécutât pas sa ligne ; garantirez-vous dans ce cas les 800,000 francs à une compagnie étrangère ? Pour moi, je réponds : Une part, oui ; la totalité, non.

- De toutes parts. - Aux voix ! Aux voix !

- L'amendement de M. Allard est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

L'article 3 est ensuite mis aux voix et adopté.

Article 4 (nouveau)

MpVµ. - M. de Theux a proposé un article 4 nouveau ainsi conçu :

« Les compagnies seront tenues de transporter les électeurs aux prix réduits accordés par le gouvernement sur les lignes qu'il exploite et d'organiser les convois d'arrivée et de départ suivant les prescriptions du gouvernement. »

M. de Theux. - Messieurs, je crois qu'il est bon d'inscrire ce principe dans les concessions qui font l'objet du projet de loi en discussion et dans celles qui seront accordées à l'avenir.

Quant aux concessions qui sont déjà accordées, M. le ministre des travaux publics a, à chaque instant, des occasions favorables pour demander aux compagnies d'accéder à ce principe ; à tout moment les compagnies viennent solliciter auprès du gouvernement des facilités quelconques, et le gouvernement en profitera pour leur demander d'adopter et de mettre en pratique le principe dont il s'agit. J'aime à croire que les compagnies, voyant la législature consacrer le principe, y donneront leur adhésion spontanément.

- De toutes parts. - Appuyé ! appuyé !

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Messieurs, est-ce que l'honorable auteur de l'amendement voudrait imposer cette obligation aux compagnies ?

M. de Theux. - Oui, pour les conventions qui sont à faire.

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - Mais si les compagnies s'y refusent ?

M. Gobletµ. - Messieurs, je ne puis pas admettre cette observation de M. le ministre des travaux publics. Nous sommes parfaitement libres de modifier les conditions du cahier des charges ; tant que nous n'avons pas adopté, le cahier des charges n'est pas un acte définitif et irrévocable.

Mais je pense qu'aucune compagnie ne reculera devant l'adoption du principe ; c'est parfaitement rationnel, et tous, nous devons insister, je pense, pour que la disposition soit inscrite dans la loi. (Oui ! Oui !)

M. de Theux. - Je n'ajouterai qu'un mot : Si une compagnie pouvait se refuser à contracter cette obligation, elle ne serait pas digne d'obtenir la concession.

- La proposition de M. de Theux est adoptée.

Article 5

« Art. 4 (devenu l'article 5). La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication.

- Adopté.


MpVµ. - La section centrale propose de renvoyer à M. le ministre des travaux publics les différentes pétitions qui sont analysées à la fin du rapport.

Je mets cette proposition aux voix.

- Adopté.

Second vote des articles et vote sur l’ensemble

La Chambre décide qu'elle procédera, séance tenante, au vote définitif du projet de loi.

Elle confirme les divers amendements qui ont été introduits dans le projet de loi lors du premier vote.


Il est procédé à l'appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

88 membres sont présents.

87 membres répondent oui.

1 membre (M. de Lexhy) s'abstient.

En conséquence le projet de loi est adopté. Il sera transmis au Sénat.

Ont adopté : MM. de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, d'Hoffschmidt, H. Dumortier, Dupret, d'Ursel, Faignart, Frison, Goblet, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Janssens, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Kervyn de Lettenhove, Kervyn de Volkaersbeke, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Lesoinne, Magherman, Mercier, Moreau, Mouton, Mulier, Notelteirs, Nothomb, Orban, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Royer de Behr, Sabatier, Snoy, Tack, Thibaut, Thienpont, Van Bockel, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vanderstichelen, Van de Woestyne, Van Humbeeck, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Renynghe, Van Volxem, Vermeire, Verwilghen, Wasseige, Allard, Beeckman, Braconier, Carlier, Coppens, David, de Baillet-Latour, de Boe, de Breyne, de Bronckart, de Brouckere, Dechamps, Dechentinnes, de Decker, de Florisone, De Fré, de Haerne, de Man d'Attenrode, de Mérode, de Montpellier, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Renesse, de Ridder et Vervoort.

MpVµ. - M. de Lexhy, qui s'est abstenu, est prié de faire connaître les motifs de son abstention.

M. de Lexhyµ. - Messieurs, je me suis abstenu, parce que dans l'ensemble des travaux publics qui viennent d'être votés et dont je reconnais l'utilité, je ne puis approuver le tronçon de Namur à Geest-Gerompont.

- La séance est levée à 4 heures.