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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 28 novembre 1848

(Annales parlementaires de Belgique, session 1848-1849)

(Présidence de M. H. de Brouckere, vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 91) M. Troye procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

- La séance est ouverte.

M. T'Kint de Naeyer lit le procès-verbal de la séance de samedi, dont la rédaction est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Troye fait connaître l'analyse des pièces suivantes adressées à la chambre.

« Le sieur Victor de Baré, chef de bureau rapporteur à la cour des comptes, se présente comme candidat à la place de conseiller devenue vacante à cette cour. »

- Dépôt au bureau des renseignements.


« Le sieur de Demont, blessé de septembre, réclame l'intervention de la chambre pour obtenir la pension dont jouissent quelques décorés de la croix de Fer. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Plusieurs habitants de Swevezeele demandent que le gouvernement leur fournisse les moyens de se rendre en Amérique pour y fonder une colonie. »

- Même renvoi.

« Le sieur Charles demande que le budget de la ville de Bruxelles pour 1849 ne soit approuvé que sous la condition du remboursement en numéraire, le 15 mars prochain, des bons communaux émis en 1847. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Gheel demande l'abrogation des articles de la loi du 10 février 1845, qui mettent à la charge des riverains et des communes une partie des frais de construction du canal de la Campine. »

- Même renvoi.


« Quelques électeurs communaux de Vezin signalent des irrégularités commises dans les élections communales du 22 août dernier et prient la chambre d'annuler ces élections. »

- Même renvoi.


« Quelques habitants de Tournay prient la chambre de modifier la législation sur l'expropriation forcée lorsqu'elle s'occupera du projet de loi relatif à la révision du régime hypothécaire. »

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le projet de loi.


« Quelques habitants de Wandre demandent la suppression des pensions accordées aux receveurs des contributions et aux géomètres du cadastre qui sont encore valides. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi qui modifie la loi sur les pensions.


« Le sieur Forget, brigadier des douanes, demande que les employés du service actif des douanes et des accises puissent, sur le même pied que les militaires, compter pour la pension les campagnes faites en Belgique, et prie la chambre de n'apporter, en ce qui les concerne, aucune modification à la loi sur les pensions. »

- Même renvoi.


« Le sieur Guillaume Krackrugge, ancien militaire, à Bruxelles, né à Schwerle (Prusse), demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


« Le conseil communal de Thielt demande que cette ville devienne la résidence du commissaire des arrondissements réunis de Thielt et Roulers. »

M. Toussaint. - Messieurs, j'ai l'honneur de prier la chambre de vouloir prendre, à l'égard de cette pétition, la même décision qu'elle a prise, il y a trois jours, à l'égard d'une pétition analogue de la ville de Roulers, c'est-à-dire le renvoi à la section centrale du budget de l'intérieur.

Il y a un petit nombre d'années seulement, les deux districts de Thielt et de Roulers avaient chacun leur commissaire. Lorsque M. Vanden Buicke, dernier titulaire de l'arrondissement de Thielt, a été placé à Courtray, on a trouvé bon de faire administrer le district de Thielt par le titulaire du district voisin de Roulers. Lorsque M. Van Damme, dernier titulaire du district de Roulers, a été appelé à Gand, on a fait l'inverse; on a réuni de fait les deux districts, en laissant le commissaire résider à Thielt; il faut bien que le commissaire réside quelque part, ou à Thielt, ou à Roulers. L'état financier et matériel, particulièrement déplorable, des communes du district de Thielt, milite pour que le commissaire d'arrondissement en soit rapproché le plus possible, afin de donner aux intérêts et aux difficultés administratives de ces localités les soins continus indispensables. Les convenances du service s'accordent donc avec le statu quo, et la ville de Roulers n'a qu'un intérêt d'amour-propre à le voir changer.

Comme j'ai eu l'honneur de le faire remarquer, dans une précédente séance, sur la présentation de la requête de Roulers, je pense qu'il s'agit ici d'une affaire administrative du ressort du gouvernement. Néanmoins je crois qu'il est utile de faire subir à cette pétition le même renvoi qu'à la requête rivale.

Ce renvoi, d'ailleurs, ne préjuge rien.

M. Lebeau. - C'est une marche tout à fait nouvelle. Je suis obligé d'appeler l'attention de la chambre sur ce point. Il me semble qu'ordinairement l'on renvoie d'abord les pétitions à la commission.

M. le président. - Je ferai remarquer que deux pétitions du même genre ont été renvoyées à la section centrale du budget de l'intérieur.

- La pétition est renvoyée à la section centrale chargée de l'examen du budget de l'intérieur.


M. le ministre de la guerre transmet les explications demandées par la chambre sur les pétitions de plusieurs maîtres ouvriers qui avaient réclamé contre la mesure prise de faire fournir, par un magasin central établi à Bruxelles, les objets d'équipement, etc., nécessaires aux compagnies de gendarmerie.

- Dépôt au bureau des renseignements.

Projet de loi portant le budget de la dette publique de l’exercice 1849

Discussion générale

M. le président. - La parole est à M. T'Kint de Naeyer, sur l'ensemble du budget.

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, il y a dans notre organisation financière un vice qui a déjà été signalé dans cette enceinte, c'est que les intérêts particuliers et les capitaux des établissements publics ne sont pas assez étroitement liés à la fortune nationale.

Le classement de la dette en mains fermes fait peu de progrès ; malgré les efforts que le gouvernement a tentés, nous restons, sous ce rapport, à l'égard d'autres nations, dans un état d'infériorité que rien ne justifie.

En France, les inscriptions au porteur sont l'exception. Dans un document officiel que j'ai eu sous les yeux, j'ai remarqué qu'en Angleterre il y a environ 80,000 inscriptions dont la rente n'excède pas 5 livres, et 150,000 inscriptions de 10 à 50 livres de rente. Eh Hollande les placements en fonds de l'Etat sont généralement préférés, et une partie considérable de la dette y est en quelque sorte immobilisée; aussi voyons-nous le 2 1/2 p. c. à 47 p. c, tandis que le 2 1/2 p. c. belge, qui a la même origine, ne dépasse guère le cours de 30 p. c.

L'action du gouvernement des Pays-Bas a puissamment contribué à amener ce résultat; les rentes inscrites au livre auxiliaire et au grand-livre de la dette publique à Amsterdam, au profit des communes et des établissements publics des provinces méridionales, représentaient en 1830 un capital d'environ 18,000,000 de francs; depuis cette époque, pendant une période de 18 années, les inscriptions nouvelles ont à peine atteint la somme de 2,500,000 de francs.

Le placement et le remploi des deniers des communes, des hospices, des bureaux de bienfaisance, des fabriques d'églises et des fondations de bourses, ne sont pas régis en Belgique par des dispositions précises et complètes.

La loi du 30 mars 1836 a conféré au pouvoir exécutif la haute tutelle en ce qui concerne la gestion des intérêts des établissements publics; mais de même que les arrêtés royaux qui ont fixé les règles de comptabilité communale, elle ne prescrit aucun mode d'emploi régulier et normal.

Frappé des inconvénients qui résultent de cet état de choses, M. le ministre des finances avait, en 1845, soumis à l'avis des imputations permanentes un projet de loi qui rendait obligatoire le placement en rentes de l'Etat de tous les fonds disponibles des communes et des établissements de bienfaisance.

J'ignore quelles sont les considérations qui ont empêché le gouvernement de donner suite à une mesure qui, en améliorant le crédit de l'Etat, augmenterait en même temps, par l'élévation du taux des intérêts, les ressources du budget de la charité publique. J'espère que la question, sera de nouveau mise à l'étude; elle mérite de fixer l'attention du cabinet.

S'il existe encore des préjugés surannés dans quelques administrations, il importe de les combattre et de les détruire.

Les engagements de l’État sont aussi sacrés que le principe de la propriété et le crédit public se confond désormais avec l'existence de la société elle-même.

Les inscriptions au grand-livre écartent toute crainte de destruction ou de soustraction; on peut toujours en obtenir des duplicata et elles ne sont transmissibles que par des transferts soumis à certaines formalités. Le payement des intérêts présente souvent, il est vrai, des difficultés; mais elles seraient bientôt levées si M. le ministre des finances autorisait les créanciers en nom à réclamer le payement de leurs rentes dans les chefs-lieux de province. On sait que ce payement ne peut avoir lieu qu'à Bruxelles, ce qui met les rentiers des provinces dans la nécessité de faire (page 92) un voyage à l'échéance de chaque semestre ou de recourir à des fondés de pouvoirs.

La mesure que j'aurai l'honneur de soumettre à M. le ministre des finances serait d'une exécution facile.

Tous les rentiers qui voudraient jouir du bénéfice de cette disposition devraient déclarer, en touchant le semestre de leur rente, dans quelle ville ils entendent que les payements subséquents leur soient faits.

L'administration centrale formerait, d'après des déclarations faites au ministère des finances, des états collectifs des rentiers par province et les adresserait aux directeurs du trésor, qui seraient chargés d'en effectuer le payement contre la quittance des porteurs d'inscriptions ou des propriétaires de comptes au 2 1/2 p. c; ceux-ci auraient à justifier de leur identité de la manière déterminée par l'arrêté du 22 décembre 1814.

Déjà le grand-livre de la dette publique offre un placement aux plus faibles économies, puisque le minimum inscriptible est de 5 fr. de rente. Il importe de le populariser de plus en plus et d'en rendre l'accès facile dans tout le pays.

Si certaines administrations publiques étaient mieux éclairées sur leur véritable mission, elles ne tarderaient pas à comprendre qu'en présence de la nécessité qui menace de les accabler, il serait de leur intérêt bien entendu, d'aliéner graduellement des biens-fonds, dont la valeur, placée en rentes de l'Etat donnerait un revenu trois fois plus élevé. Je ne m'étendrai pas davantage sur ce sujet, j'aurai occasion d'y revenir plus tard : mon but a été, messieurs, d'appeler votre attention et celle du gouvernement sur les moyens qui me semblent propres à consolider notre crédit public et à le relever au niveau qui lui appartient.

M. Mercier. - Messieurs, je ne puis m’empêcher d'exprimer mon regret de ce que le gouvernement a cru devoir renoncer au mode suivi depuis 1840 relativement à l'imputation des semestres de la dette publique pour adopter un système qui, à cette époque, a été condamné comme vicieux, après mûre délibération.

Messieurs, avant 1840 les intérêts de la dette publique étaient toujours imputés sur l'exercice de l'échéance et même sur l'exercice de l'exigibilité. A cette époque, différentes observations furent faites dans la chambre et dans les sections pour démontrer que ce système entraînait de graves inconvénients surtout en ce qu’il empêchait de constater la véritable situation du trésor ; il se trouvait que lorsque la situation constatée ne révélait pas un découvert, il y avait, en réalité, un déficit de cinq ou six millions. Ainsi, par exemple, pour le 3 p. c. le semestre commence le 1er août et échoit le dernier jour de janvier suivant; eh bien ce semestre était imputé sur l'exercice de l'échéance, bien que cinq mois eussent couru dans l'année précédente et qu'en bonne comptabilité les fonds nécessaires pour faire face à ces cinq mois eussent dû être prévus au budget des recettes de l'année précédente.

La même observation se présente pour le 4 1|2 et le 5 p. c. mais là il n'y a que 2 mois qui courent dans l'année précédente. Enfin, on est allé plus loin encore. L'échéance du 2 1/2 p. c. est le 31 décembre, mais comme le semestre n’est exigible que le 1er janvier, on l'imputait sur l'exercice suivant.

En 1840, sur les observations qui avaient été faites par la section centrale, déjà plusieurs années auparavant, notamment par l'honorable M. de Brouckere, rapporteur, et par d'autres membres, j'ai reconnu tous les inconvénients de ce système, et j’en ai adopté un nouveau qui consistait à imputer sur chaque exercice l'intérêt des mois qui courent pendant cet exercice. Ce mode permet de constater la véritable situation du trésor.

Maintenant M. le ministre des finances veut renoncer à ce système; il ne porte plus en compte, sur l'exercice précédent, les intérêts écoulés pendant cet exercice et le transfère sur celui de l'échéance. Il revient donc, en très grande partie au moins, à l'ancien système. Il en résulte, messieurs, que si l'on établissait après la mise à exécution de ce système une situation financière ne présentant en apparence aucun déficit, il y aurait cependant, en réalité, un déficit de 3,760,000 fr., parce que les intérêts appartenant à l'exercice à la fin duquel on aurait arrêté cette situation se trouveraient jusqu'à concurrence de 3,760,000 fr. reportés sur l'exercice suivant.

Voilà, messieurs, le résultat de ce nouveau système ou plutôt de l'ancien système auquel on avait renoncé en 1840, après que les inconvénients en eurent été reconnus.

Le motif pour adopter un pareil changement de système, c'est qu'on a trouvé que le mode actuellement suivi présentait quelque surcroît de travail dans les bureaux de la cour des comptes et à la trésorerie générale.

Je rappellerai quelques-unes des raisons qui ont été données à la chambre en 1840 en faveur du système qui a été suivi depuis lors; le gouvernement, ayant égard, à cette époque, aux observations qui avaient été faites dans cette chambre et dans les sections, avait lui-même proposé l'adoption de ce système; il l'a justifié en se bornant à s'appuyer sur les raisons antérieurement alléguées à cette fin.

La section centrale qui avait été chargée de l'examen du budget de la dette publique, a adopté à l'unanimité le changent ni proposé.

Voici comment s'est exprimé son honorable rapporteur :

« Une question plus embarrassante, déjà soulevée, et longuement discutée dans la session précédente, mais dont on a cru devoir alors ajourner la solution, c'est de savoir à quelles échéances de la rente de 5,000,000 sera imputée l'allocation demandée.

« Avant de la résoudre, la section centrale a cru devoir poser une question de principe, savoir si pour la régularité des opération» du trésor, il faut considérer les rentes et intérêts à charge de la dette publique, comme échéant jour par jour, sans distinction des époques d'exigibilité.

« Ce principe a été admis à l'unanimité, tant par la section centrale que par M. le ministre des finances, interpellé à ce sujet.

« En effet, messieurs, ce principe, de droit commun, est à la fois celui d'une sage économie , de toute bonne comptabilité; il est consacré par l'usage dans tous les établissements commerciaux, industriels et financiers, bien administrés, qui portent toujours à leur passif les intérêts courus des obligations qu'ils ont souscrites, jusqu'à l'époque de la formation de leur bilan, comme ils portent à leur actif ceux qui peuvent leur être acquis sur leurs diverses créances. Cette règle, adoptée généralement dans la comptabilité industrielle et commerciale, est bien plus essentielle encore dans les opérations du trésor. »

Ensuite il ajoute en parlant de l'ancien système :

« L'on comprendra facilement que, tant que ce système n'a été appliqué qu'à une faible partie de nos dépenses, la chambre a pu fermer les yeux sur ses inconvénients; mais il s'agit maintenant d'une somme de plus de 6 millions, à acquitter chaque année dès le 1er janvier, sur les fonds appartenant à l'exercice précédent : somme qui s'accroîtrait encore, si, comme il est fort probable, on trouvait utile d'établir un jour un amortissement quelconque pour la partie de la dette qui doit nous être transférée en vertu du traité de paix. Une avance, ou pour mieux dire, un découvert aussi considérable, pourrait faire naître pour le trésor les plus graves embarras; c'est ce que M. le ministre des finances a eu soin de démontrer dans son exposé.

En 1840 la somme était plus forte; c'est qu’en effet on avait poussé le système défectueux encore plus loin, parce qu'on ne s'était pas contenté de faire des imputations sur l'année de l'échéance, mais on avait été jusqu'à les reporter sur celle de l'exigibilité. Maintenant la somme n'est plus de six millions; elle est cependant encore très importante, car elle s'élève à 3,760,000 francs; elle doit d'ailleurs encore s'accroître dès l'année prochaine.

Les deux emprunts forcés vont déjà augmenter les inconvénients du système qu'on veut introduire, en portant immédiatement à plus de 4 millions la somme qui sera distraite du découvert du trésor. Je ne puis donc trop condamner un pareil système. Les arguments présentés par l'honorable rapporteur de la section centrale pour le justifier ne me paraissent nullement fondés. Je les passerai successivement en revue. L'honorable membre dit d'abord que le mode actuellement suivi donne lieu à des calculs compliqués.

Mais il ne s'agit que d'un seul et unique calcul fait d'avance et appliqué à tous les coupons d'une même emprunt. L'honorable rapporteur n'entend pas sans doute qu'on répète ce calcul sur chaque coupon, on le croirait cependant lorsque l'on considère l'importance qu'il attache à cet argument. Du reste, je conviens avec M. le ministre des finances qu'il y a quelques écritures de plus à la trésorerie et à la cour des comptes. Mais cette circonstance très accessoire ne doit pas prévaloir sur l'exactitude de la situation financière.

L'honorable rapporteur a allégué ensuite « que le compte des dépenses de chaque exercice n'a de valeur qu'à la condition d'être accompagné de preuves qui en constatent la réalité. »

Mais, messieurs, les règles de la comptabilité générale doivent être appliquées avec discernement. On a parlé de la nécessité où l'on serait forcé de couper en deux chaque coupon d'emprunt. Messieurs, ne tombe-t-il pas sous le sens qu'en fait de coupons d'emprunt le doute sur le payement de tout le semestre ne peut pas exister; que le payement est constaté par la seule rentrée du coupon à la trésorerie; lorsqu'en pareille circonstance la justification d’un coupon est faite pour un exercice, ne l’est-elle pas également pour l'autre? Ne suffit-il pas d'un simple arrêt de la cour des comptes pour se référer à la constatation faite relativement à l'un des deux exercices?

On a objecté aussi un retard possible dans la formation du compte de l'exercice. Quant à ce prétendu retard, c'est encore une objection qui n'a pas de fondement ; la dernière échéance des coupons étant du 1er mai, quatre mois seulement seront écoules depuis la fin de la première année, puisque le dernier coupon échoit le 1er mai. Qu'on soit d'ailleurs bien convaincu que la justification du payement des coupons d'emprunt ne sera jamais la plus difficile, et que s'il y a quelque retard, il proviendra de toute autre dépense.

L'intention du législateur dans cet article a été d'arriver à la plus grande sincérité possible dans la comptabilité de l'Etat; l'interpréter comme veut le faire l'honorable membre, c'est faire tourner l'article contre son propre but.

On a prétendu encore que le système de comptabilité proposé est plus conforme aux dispositions de l'article 2 de la loi de comptabilité ; voici cet article :

« Sont seuls considérés comme appartenant à un exercice les services faits et les droits acquis à l'Etat et à ses créanciers, pendant l'année qui donne sa dénomination à l'exercice. »

Il est d'ailleurs facile de comprendre que cette interprétation n'est pas juste ; en effet, messieurs, la loi de comptabilité a été présentée aux chambres trois ans après l'introduction du mode actuellement suivi relativement à l'imputation des semestres de nos emprunts; elle a été proposée par le ministre même qui, avec l'assentiment fortement prononcé des chambres, avait corrigé le mode vicieux auquel on veut revenir (page 93) en grande partie; c'est dans la pensée que rien ne serait changé à cet égard que l'article a été présenté et adopté. La discussion de cet article n’a donné lieu à aucune interprétation relativement au mode suivi pour l'imputation des intérêts de l'emprunt ; depuis lors plusieurs budgets de la dette publique ont été votés, bien qu'ils fussent établis selon le système actuel.

Mais voyez à quelles conséquences bizarres entraînerait une interprétation aussi opposée au vœu du législateur que celle que l'on veut faire prévaloir.

Il arrive souvent que les dépenses relatives à des travaux publics se rattachent à deux ou trois exercices qui comprennent successivement des crédits partiels.

Que le gouvernement écrive dans un cahier des charges qu'aucun payement ne sera fait avant que telle partie déterminée des travaux ne soit achevée; que cette partie ne soit terminée que dans les premiers mois du second exercice.

L’entrepreneur n'aura de droit acquis dans le sens de l'interprétation donnée à l'article par mes contradicteurs que dans le second exercice. Ce n'est cependant pas ainsi que l'on agira, ni que l'on devra agir ; le prix des travaux exécutés pendant la première année sera bien et dûment imputé sur le premier exercice.

Il doit en être de même pour les emprunts, si l'on veut rester dans le vrai; les mois écoulés d'un semestre doivent être imputés sur l'exercice auquel ce semestre appartient.

Il ne s'agit, dit encore l'honorable rapporteur, que d'une opération transitoire. Mais, messieurs, cette opération transitoire exercera son influence sur tous les exercices futurs ; toujours la situation financière sera nécessairement présentée d'une manière inexacte; jamais on ne tiendra compte des intérêts écoulés à la fin de chaque exercice, pendant cinq mois pour un de nos emprunts, et pendant deux mois pour d'autres; la différence actuelle est de 3,760,000 fr.; elle deviendra plus considérable à l'avenir en suivant le même mode.

Je bornerai là mes observations ; mon intention n'est pas de faire une proposition, la réduction apparente du budget étant une réduction à laquelle on résiste difficilement ; toutefois j'ai voulu constater ce qu'il y avait de défectueux dans le retour à un mode de comptabilité dont on avait fait justice auparavant et qui avait pour effet de fausser la situation du trésor en atténuant toujours de plusieurs millions le véritable découvert du trésor.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, quelques personnes charitables ont émis l'opinion que l'innovation proposée par le gouvernement dans le système de comptabilité suivi jusqu'à présent, était une espèce d'expédient…

M. Mercier. - Je n'ai rien dit de semblable.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'ai pas nommé M. Mercier; j'ai dit seulement que quelques personnes charitables avaient émis l'opinion que l'innovation proposée constituait une espèce d'expédient, un moyen d'induire en erreur sur la véritable situation financière du pays. On a dit que nous avons cherché surtout le moyen de présenter un excédant considérable des recettes sur les dépenses de l'Etat. Il est bon qu'on sache comment les choses se sont passées, et comment cette innovation a été introduite.

Depuis plusieurs années, les vices de notre comptabilité avaient été signalés par la cour des comptes. Votre commission des finances avait elle-même plusieurs fois signalé les abus qui, selon elle, résultaient du système suivi; et à propos de la loi des comptes de 1841, si je tiens bien, le rapporteur de la commission des finances énonça de nouveau formellement l'opinion de cette commission, qui consistait à blâmer la marche suivie jusqu'alors, et à en demander le changement. Sur la connaissance qui fut donnée à mon prédécesseur, l'honorable M. Veydt, de l'opinion formulée par la commission des finances, il annonça que, partageant entièrement les vues de celle-ci, il proposerait une modification au budget de 1849, afin de faire droit aux rares observations de cette commission qui avaient été présentées.

C'est donc en exécution d'engagements pris par mon prédécesseur, c'est pour faire droit à des observations parfaitement fondées de votre commission des finances, que le budget de la dette publique a été formulé tel qu'il se trouve sous vos yeux.

Maintenant ce système est-il bon? Vaut-il mieux que celui qui a été suivi jusqu'à présent? L'honorable M. Mercier prétend que non. Défendant avec une tendresse toute paternelle le système ancien, il soutient que le système qu'on veut inaugurer aurait pour résultat de présenter une situation financière erronée.

L'honorable M. Mercier (il importe de le constater} ne dissimule aucun des inconvénients du système qui est actuellement suivi; il ne prétend pas qu'il n'en résulte pas une complication d'écritures; il ne nie pas que ce système n'entraîne un double travail, qu'il ne faille pour une même chose une double justification. Ce sont, il le reconnaît, les inconvénients du mode maintenant usité; or, ces inconvénients sont immenses; car obliger l'administration du trésor à faire deux fois un travail qui, fait une seule fois, suffirait entièrement; l'obliger à rendre deux fois les mêmes comptes, à justifier des mêmes services, c'est évidemment un système essentiellement vicieux.

La seule objection de l'honorable M. Mercier est celle-ci : Votre situation n'est pas vraie; elle est complètement erronée! II s'étaye a cet égard de l'opinion énoncée en 1840 par le rapporteur du budget de la dette publique, qui formulait ainsi cette opinion : Un négociant qui fait son bilan y inscrit toutes ses obligations. Vous devez procéder de même. Vous devez dire dans le budget quelles sont vos obligations, toutes vos obligations.

C'est là une erreur: un budget n'est pas le bilan de la situation financière du pays. C'est uniquement l'indication de ce que l'Etat doit recevoir et payer dans le cours d'une année. Rien de plus. Si un négociant, pour me servir de l'exemple invoque par l'honorable M. Mercier, avait à fournir le tableau de ce qu'il doit payer dans le cours de l'année, évidemment il n'y comprendrait pas ce qu'il doit payer, l'an prochain.

Ainsi, le seul inconvénient signalé par l'honorable M. Mercier, celui de ne point présenter une situation financière exacte, n'existe pas, il ne peut pas exister; le budget ne doit contenir que ce que l'on doit recevoir et payer dans le cours de l'année. On ne doit donc porter au budget de la dette publique que ce qu'on doit payer dans le cours de l'année?. Or que doit-on payer dans le cours de l'année ? Les semestres d'intérêt qui viendront à échoir dans le cours de cette année. Ni plus, ni moins. Et nous vous proposons de porter au budget les fonds nécessaires pour tous les payements à faire dans le cours de 1849.

C'est là toute la question; il n'y en a pas d'autre dans toute cette affaire de comptabilité.

Et maintenant, à part tout ce qu'il y a de péremptoire dans le rapport de l'honorable M. de Man d'Attenrode, que je m'abtiens de reproduire, j'ai fait à l'honorable M. Mercier dans le sein de la section centrale, une objection insurmontable à laquelle il n'a pas répondu, à laquelle il ne répondra pas.

Indépendamment des rentes qui se payent semestriellement, nous avons les deux emprunts du 26 février et du 6 mai 1848, dont les échéances n'ont pas été déterminées dans la loi, mais qui par l'arrêté royal porté en vertu de la loi ont été déclarées annuelles. Dans le système de l'honorable M. Mercier, en le combinant avec la loi de comptabilité, qu'arriverait-il? Qu'on devrait faire figurer au budget de 1849 les échéances de novembre et de décembre 1848, payables le 1er novembre 1849, tandis que l'exercice serait définitivement clos le 31 octobre 1849. De sorte que le même jour où vous inscririez un pareil article au budget, il vous faudrait porter une loi spéciale de crédit supplémentaire pour permettre de payer le 1er novembre un crédit périmé le 31 octobre. C'est là la conséquence inséparable du système préconisé par l'honorable M. Mercier.

Aux termes de l'article 2 de la loi de comptabilité « l'exercice commence le 1er janvier et finit le 31 décembre de la même année. Toutefois, les opérations relatives au recouvrement des produits à la liquidation et à l'ordonnancement des dépenses pourront se prolonger jusqu'au 31 octobre de l'année prochaine. »

Ainsi l'on n'aurait plus, au 1er novembre 1849, la disposition des fonds alloués au budget de 1848. L'exercice alors serait clos, les imputations ne seraient plus possibles; la cour des comptes ne permettrait plus d'imputer sur un budget définitivement clos.

Ces considérations me semblent devoir suffire pour vous engager à adopter le système proposé par le gouvernement, de commun accord avec la commission des finances et de l'avis de la cour des comptes.

Le gouvernement n'a absolument aucun intérêt à ce qu'on fasse figurer ou non ces deux millions au budget de 1849. Si on les y porte, il n'en disposera pas plus pour cela; il n'a besoin que de la somme portée au projet de budget.

L'honorable M. Mercier a objecté qu'avec notre système on ne pourra préparer les ressources nécessaires pour faire face aux obligations. C'est une erreur encore. Il est clair que notre budget des voies et moyens offrira au gouvernement les moyens de faire face à toutes des obligations portées au budget de ta délie publique.

M. de Man d'Attenrode, rapporteur. - Je suis le rapporteur de la commission permanente des finances, auquel l'honorable ministre des finances vient de faire allusion, qui a donné le jour au système que le gouvernement désire adopter, et que la section centrale vous propose également d'adopter.

Voici comment a surgi la pensée de modifier le système existant, quant à la tenue de la comptabilité des arrérages des emprunts.

C'est il y a deux ans environ. Je désirais savoir quel était le montant des intérêts afférents à l’exercice 1846 des capitaux engagés pour la construction du chemin de fer. Je tenais à constater le chiffre exact des dépenses que nous occasionnait le service des chemins de fer, administrés, par l'Etat. Je me rendis en conséquence à la direction afin d'obtenir ce renseignement. Le chef de cette direction commença par me faire quelques observations sur la difficulté qu'il y avait de constater le chiffre exact de cette dépense.

Je m'en étonnai à juste titre; il finit par me déclarer que le système de la comptabilité en usage pour nos emprunts était si compliqué que le travail que je réclamais exigeaient plusieurs jours. Un désir bien légitime de connaître les causes de ces complications et de chercher à y remédier, s'il était possible, me fit demander des éclaircissements. Je les obtint, l'exposé de l'administration fut l'objet de ma sérieuse attention. Je crus avoir constaté qu'il y avait une amélioration à introduire dans ce service, je fis des propositions à la commission des finances qui m'autorisa à les renseigner au rapport dont j'étais chargé pour le règlement des comptes de 1841 et 1842.

L'honorable M. Veydt, alors ministre des finances, y adhéra, et promit d'introduite le système propose pour le budget qu'il avait à préparer pour l'exercice 1849; voilà l'origine de la modification que le (page 94) gouvernement vous propose, d'accord avec la section centrale, pour la tenue de la comptabilité de la dette publique.

Maintenant, l'honorable M. Mercier vient de faire une foule d'objections contre le système qui est soumis à votre sanction. Je vous avoue que je ne puis attacher une aussi grande importance à cette question, elle ne mérite pas tant de blâme. C'est une question d'administration très secondaire. Cependant, comme toute question de cette nature, elle a une importance relative. Au reste, je ne vois rien de bien sérieux dans les objections que l'honorable M. Mercier a cherché à soulever contre les conclusions de mon rapport. De quoi s'agit-il, afin de simplifier cette question, de la rendre saisissable pour tous ?

Il s'agit de savoir si le gouvernement peut être tenu à porter au budget de 1849 des crédits destinés à pourvoir à des dépenses qui ne sont exigibles qu'en 1850.

Il s'agit de savoir s'il y a obligation pour lui de vous demander la disposition en 1849 des intérêts des emprunts pour les deux derniers mois de cette année, qui ne lui sont nécessaires que pendant le courant de l'exercice 1850.

Si les intérêts des emprunts pour les mois de novembre et décembre 1849 étaient exigibles en 1849, je le concevrais; mais ils ne sont exigibles que le 1er mai 1850. Il est dès lors déraisonnable de vouloir exiger que les crédits nécessaires pour couvrir cette dépense soient portés au budget de 1849.

Je me suis fondé sur l'article 2 de la loi de comptabilité pour établir la légalité du système du gouvernement. L'honorable député de Nivelles conteste l'interprétation que je lui ai donnée dans le rapport de la section centrale.

Le sens de cet article est cependant parfaitement clair. Voici comment il est conçu :

« Sont seuls considérés comme appartenant à un exercice les services faits et les droits acquis à l'Etat et à ses créanciers, pendant l'année qui donne sa dénomination à l'exercice. »

Quand des droits seront-ils acquis aux créanciers de l'Etat pour le payement des intérêts qui leur sont dus ?

Quand y a-t-il lieu de considérer comme faits, comme accomplis les services des intérêts de novembre et décembre 1849 ? Ce n'est évidemment qu'après l'échéance du semestre, après le 1er mai 1850. Car ce n'est qu'alors que les créanciers de l'Etat pourront réclamer le payement des intérêts qui leur sont dus, ce n'est qu'alors que les arrérages seront acquittés à leur profit.

Il semble donc incontestable, la loi à la main, que les intérêts des mois de novembre et décembre 1849 appartiennent à l'exercice 1850, et que le gouvernement ne peut être tenu à les porter au budget de l'exercice 1849.

Il est impossible de rien ajouter à la question de légalité. Elle est extrêmement claire; il est inutile de la discuter plus longuement.

Viennent ensuite les questions administratives. Il est positif qu'avec le système en vigueur, il est difficile de tenir la comptabilité à jour. Il importe donc d'adopter le système du gouvernement. Sans cela il est impossible d'exiger qu'on nous donne à propos les renseignements dont nous avons si souvent besoin dans les discussions parlementaires.

L'honorable ministre des finances vient de vous dire que le système suivi exige un double compte, des écritures en double, de doubles justifications. C'est aussi ce que j'ai exposé dans le rapport de la section centrale; cela me paraît parfaitement clair. Si vous entendez perpétuer le système qui met le deuxième semestre du 5 p. c. à cheval sur deux exercices, il y aura deux mois, novembre et décembre, qui seront rattachés à l'exercice 1849, et il faudra pour ces deux mois des écritures, un compte, et les justifications qui s'y rattachent nécessairement. Puis il restera quatre mois attachés à 1850, et, de ce chef, il faudra, pour le même semestre, de nouvelles écritures, un nouveau compte, de nouvelles justifications. Il faudra couper les titres en deux, si vous voulez que chaque compte ait avec lui sa justification; cela est incontestable.

Je suis étonné que l'honorable M. Mercier conteste la nécessité, la convenance que chaque compte soit entouré de toutes les justifications des faits qu'il renseigne. Avec le système en vigueur cela est impossible.

Cependant les éléments d'un compte se composent surtout de justifications. Un compte n'est complet que pour autant que toutes les pièces justificatives y soient annexées.

Déjà le gouvernement a reconnu la nécessité d'en agir ainsi pour les bons du trésor.

C'est une modification qui a été introduite par l'honorable M. Malou; je pense qu'on ne peut contester que c'est là une grande amélioration. Qu'arrivait-il auparavant? Je suppose en effet que l'on ait pris un bon du trésor à la date du 20 novembre, avec le système ancien, il fallait rattacher une partie des intérêts avec des fractions sans nombre à un exercice, l'autre partie à l'exercice suivant, et comme il y a des milliers de titres de cette espèce, il en résultait un travail qui ne présentait aucune espèce d'utilité et qui compliquait singulièrement la comptabilité. Cette complication a été supprimée pour la dette flottante, il importe de la faire disparaître pour la dette consolidée.

M. le ministre des finances a terminé son discours en faisant une application de l'ancien système aux intérêts des emprunts forcés de 1848. Il a fait ressortir de la manière la plus claire les inconvénients insurmontables du système en vigueur.

Je ne veux pas revenir sur cet argument, auquel il est impossible de répliquer et auquel, en effet, l'on n'a rien répondu. Messieurs, il me semble avoir justifié suffisamment les propositions de la section centrale.

Cette question est facile à saisir pour celui qui l'a examinée avec un peu d'attention. Je pense que l'expose de la section centrale, que j'ai cherché à rendre aussi clair que possible, l'établit d'ailleurs suffisamment.

Il me reste un mot à dire en réponse au discours de l'honorable député de Gand qui a débuté dans cette discussion.

Il a fait valoir qu'il serait utile que les établissements publics, tels que les communes, les bureaux de bienfaisance, les hospices, fissent le remploi de leurs fonds libres en fonds belges, que ce serait un moyen de confondre les intérêts des établissements publics du pays avec les intérêts de l'existence nationale, d'en faire un seul faisceau.

J'ai réclamé, il y a deux ou trois ans, du gouvernement une mesure à cet égard. L'année dernière, je pense, le cabinet actuel a fait une circulaire afin d'engager les établissements publics à faire l'application du système qu'a développé l'honorable M. T'Kint de Naeyer. Mais, jusqu'à présent le gouvernement s'est borné à un simple avertissement. Je pense qu'il serait utile que ce système fût consacré par une loi et fût rendu obligatoire pour les communes. Je ne voudrais cependant pas aller jusqu'à les obliger à convertir leurs biens-fonds en fonds publics; ce serait porter une sorte d'atteinte à la liberté communale. J'ai cru comprendre que l'honorable membre voulait aller jusque-là. S'il en était ainsi, je ne pourrais le suivre aussi loin.

Je profiterai de cette circonstance pour vous rappeler ce qui est arrivé à la suite de cette circulaire du gouvernement. La Société Générale, qui fait le service du caissier de l'Etat, s'était habituée à profiter de tous les réemplois des établissements communaux et autres. Elle fit son possible pour détruire les effets de cette circulaire; et cette circulaire fut la cause de beaucoup d'embarras pour le gouvernement à cette époque. J'espère que le gouvernement prendra des mesures pour assurer à l'avenir sa complète indépendance financière.

Je saisirai cette occasion pour demander si le gouvernement se dispose à nous présenter bientôt le projet que prévoit l’article 58 de la loi de comptabilité.

Le paragraphe 3 de cet article 58 porte : « Le service du caissier de l'Etat sera organisé par une loi spéciale avant le 1er janvier 1850.» Il est donc grand temps que l'administration dépose un projet sur cette matière importante, sur une question qui intéresse si vivement l'organisation de nos finances et je dirai même du crédit public.

Le crédit public belge, messieurs, a été bien languissant jusqu'à présent ; il importe de l'organiser, et cette organisation peut être une des gloires du cabinet, un titre à la reconnaissance publique, s'il veut l'entendre comme elle doit l'être, dans l'intérêt du pays. Je lui recommande donc spécialement cette grave question.

M. Cools. - Messieurs, de même que l'honorable rapporteur de la section centrale, je dirai que la question de comptabilité qui se débat en ce moment ne présente pas un bien grand intérêt. Aucune pensée d'économie ne peut s'y rattacher ; soit que nous votions le chiffre proposé par le gouvernement, soit que, préférant le système ancien, nous en votions un plus élevé, la charge qui pèsera sur le pays sera exactement la même.

Cependant la question présente assez d'importance sous un rapport : c'est sous celui de notre fonds d'amortissement. Je désire en dire quelques mots.

Messieurs, je trouve que, dans notre pays, on n'a pas toujours été assez pénétré de l'importance d'un bon fonds d'amortissement; je doute qu'on ait bien compris les services que peut rendre une caisse d'amortissement bien organisée.

Ce n'est pas un reproche que j'adresse spécialement à M. le ministre ou à son prédécesseur. Cette indifférence, que je crois avoir remarquée, date déjà de loin. C'est ainsi que pendant plus de quinze ans, la caisse d'amortissement a été en quelque sorte abandonnée à elle-même. Ce n'est guère que depuis deux ou trois ans qu'on a pensé à organiser l'institution et la commission de surveillance qui a été créée vient à peine d'entrer en fonctions.

Lorsqu'il s'est agi de discuter la loi sur la caisse d'amortissement, le ministre des finances, qui était, je crois, l'honorable M. Veydt, a proposé au dernier moment de payer les fonds par semestre. Un honorable membre, M. Osy, a fait remarquer qu'il ne savait pas si ce mode de procéder donnerait toutes les garanties nécessaires à l'amortissement; si, en payant seulement les fonds par semestre, on pourrait racheter dans les moments indiqués par les contrats. Vous savez, messieurs, que pour quelques-uns de nos emprunts l'amortissement est suspendu quand les fonds sont au-dessus du pair, et qu'il doit opérer, lorsque les fonds sont au-dessous du pair. Nous faisons une triste expérience que cette dernière situation peut malheureusement se prolonger assez longtemps.

M. le ministre, répondant à l’honorable M. Osy, déclara que la remise par semestre à la caisse des dotations, devant servir à l'amortissement, n'était pas un obstacle à ce que les achats se fissent à l'époque indiquée par les contrats et sous forme d'échelonnement, parce que la loi, en partant de payements semestriels, ne disait pas que ces payements se feraient le dernier jour du semestre.

Il sembla résulter de là que la pensée de M. le ministre était de mettre les fonds à la disposition de la caisse d'amortissement anticipativement. Du moment que la loi porte qu'on payera par semestre, et que M. le ministre a déclaré que cela n'empêcherait pas qu'on s'entendît avec la caisse pour acheter en temps opportun , il est évident que les fonds doivent être mis à la disposition de la caisse anticipativement.

Cependant la question pourrait paraître douteuse ; j'avais espéré qu'elle aurait été éclaircie par les arrêtés royaux qui ont été pris en exécution de la loi; mais, je dois le dire, je crois remarquer une lacune à cet égard dans un arrêté royal qui a paru deux ou trois jours avant (page 95) notre réunion; cet arrêté laisse la question indécise. Le 2 novembre, a paru un arrêté royal destiné à régler le mode de procéder de la caisse d'amortissement. L'article 8 est ainsi conçu :

« Le ministre des finances décide du mode et de l'opportunité des rachats, en se conformant aux contrats d'emprunt et après avoir entendu la commission. »

Ainsi, messieurs, il n'y a aucune règle fixée; le ministre décide. Pour ce qui me concerne, j'aurais préféré qu'on eût décidé que l'amortissement se fît en quelque sorte tous les jours, et au moins hebdomadairement, parce que, à mes yeux, le meilleur amortissement est celui que opère régulièrement.

Si on ne fait pas agir l'amortissement régulièrement, on favorise l'agiotage. On ne doit pas oublier que la caisse d'amortissement est impuissante à soutenir le crédit ; elle peut y aider voilà tout. C'est la confiance publique qui peut seule soutenir le crédit. Si la caisse d'amortissement achète seulement par moment, les spéculateurs en grand, qui connaissent fort bien les ressources du gouvernement, savent quand les achats de la caisse devront s'arrêter, et il se fait alors des manœuvres d'agiotage dont les spéculateurs sérieux pâtissent. Rien n'était plus facile que de prescrire une marche régulière dans l'arrêté du 2 novembre dernier.

Je pense que le nouveau système de comptabilité, proposé par M. le ministre des finances dans le budget de la dette publique, constitue un nouveau recul à l'égard de la caisse d'amortissement. Il me paraît démontré que du moment où, par exemple, pour les mois de novembre et de décembre, des fonds ne sont pas votés au budget de 1849, l'amortissement, pendant ces deux mois-là, n'aura pas de fonds à sa disposition. Il est impossible que les espérances que M. Veydt avait fait concevoir puissent se réaliser.

Je crois que M. le ministre des finances parviendra à éclaircir la question et que ce n'est qu'une difficulté de forme ; mais je pense qu'il est utile que quelques explications soient données.

Je demanderai donc au gouvernement s'il entend appliquer à la caisse d'amortissement ces principes de droit civil, que les fonds lui sont acquis jour par jour; c'est un principe de droit civil inscrit, si je ne me trompe, en toutes lettres dans l'article 586 du code civil ; je demande si les fonds sont acquis à la caisse jour par jour, quoique le terme de payement soit différé. Si le gouvernement ne me donnait pas d'explications satisfaisantes, j'y verrais un motif de plus pour me prononcer contre le nouveau système de comptabilité proposé par M. le ministre des finances. Je n'attache pas, à la vérité, une grande importance à cette question de comptabilité, mais je pense que le gouvernement n'aurait pas dû y voir une question de budget ; c'est une question de règlement de compte.

Les difficultés indiquées par M. le ministre des finances et par l'honorable rapporteur existent. (Interruption.) L'honorable M. Mercier le conteste; mais je suis de cet avis. Seulement je pense que la loi de comptabilité, telle qu'elle est formulée, fournissait des moyens de lever les difficultés. Je sais bien que ce cas n'est pas formellement prévu par la loi; mais il y a encore d'autres cas qui n'ont pas été prévus et qu'on tranche, en leur appliquant la loi par voie d'analogie.

Voici un exemple, entre autres : la loi dit, en ce qui concerne les fonds spéciaux, lorsque les travaux ne sont pas terminés à la clôture de l'exercice, qu'une partie de la dépense est reportée à l'exercice suivant. Maintenant la loi ne parle pas des recettes ; il n’en est pas moins vrai que depuis que la loi de comptabilité est promulguée, on a également appliqué la disposition que je viens d'indiquer aux recettes, parce que le principe est le même.

Je pense que pour la difficulté qui se présente à l'égard de la dette publique, on aurait dû recourir à l'article 30 de la loi de comptabilité et en faire l'application par analogie. Cet article est ainsi conçu :

« Lorsqu'à la clôture d'un exercice, certaines allocations du budget sont grevées de droits en faveur de créanciers de l'Etat, pour travaux adjugés et en cours d'exécution, la partie d'allocation nécessaire pour solder la créance est transférée à l'exercice suivant, après décompte vérifie préalablement par la cour des comptes. »

Au surplus, quoique la question du nouveau mode de comptabilité n'ait pas une grande importance, je me prononcerai cependant pour le maintien du mode actuel.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, si je suis étonné des craintes qui ont été exprimées par l'honorable préopinant au sujet de l'amortissement, je suis encore plus surpris des conclusions de son discours. J'avais compris d'abord que l'honorable membre, sans trouver de grands avantages au système nouveau, reconnaissait néanmoins qu'il valait mieux que le système précédent; il annonce pourtant, en terminant, qu'il votera pour le maintien du système ancien.

Il n'est pas sans intérêt de dire à la chambre ce qui se pratique ailleurs sur cette question.

En France, on a aussi un amortissement, on a aussi des budgets comme les nôtres, on a, dans l'ensemble, une manière d'opérer analogue à la nôtre. Qu'y fait-on quant à la question qui nous occupe en ce moment ? Précisément ce que nous proposons. La même chose se pratique encore dans d'autres pays; on n'y trouve aucun inconvénient; on n’y conçoit aucune inquiétude ni pour les intérêts, ni pour l'amortissement; pourquoi voulez-vous qu'il en soit autrement chez nous? Chez nous, de 1830 jusqu'à 1840, on a suivi encore le système auquel nous croyons qu'il faut revenir, Personne n'a manifesté alors aucune crainte, aucune plainte sérieuse n'a été formulée. Pourquoi voulez-vous qu'il en soit autrement aujourd'hui ?

Cependant, l'honorable membre soutient que si, quant à l'amortissement, on doit mettre à la disposition de la caisse, d'une manière anticipative, les fonds qui lui sont nécessaires, le budget ne comprendrait pas les sommes dues pour faire face à l'amortissement pour les deux derniers mois de l'année.

Messieurs, à cet égard, le raisonnement de l'honorable membre repose sur une erreur. Les fonds ne sont pas dus à la caisse d'amortissement jour par jour, ils ne sont pas dus anticipativement, ils sont dus à l'échéance du semestre. Voilà donc toute l'objection de l'honorable membre qui s'évanouit. A l'échéance tout le semestre est dû à la caisse d'amortissement qui le reçoit et opère au moyen de cette échéance mise à sa disposition.

La loi du 15 novembre 1847 n'a nullement décidé la question dans le sens indiqué par l'honorable membre; les explications données alors par mon prédécesseur ne viennent pas du tout corroborer l'opinion émise par M. Cools. L'article premier porte que la caisse est chargée de faire l'emploi régulier des fonds affectés à l'amortissement suivant les conventions et les lois ou contrats d'emprunts. Ce qu'il s'agit donc d'examiner, ce sont les lois et contrats d'emprunts.

Or, s'ils ne sont pas tous également explicites, la plupart sont conçus dans des termes propres à lever tous les doutes. Les contrats d'emprunts, notamment celui fait avec la Société Générale pour la première partie de l'emprunt de 86,940,000 fr., ne laissent aucun doute; l'intérêt et l'amortissement ont pris cours à partir du 1er mai 1840, et le contrat stipule que le fonds d'amortissement devra être employé semestre par semestre, à dater du 1er novembre 1840. Dans le contrat fait avec la Société Générale et la maison Rothschild, pour la seconde partie de cet emprunt, le 10 novembre 1840, il est encore stipulé que le fonds de l'amortissement et l'intérêt prendront cours à partir du 1er mai 1840; et par l'article 3 il est formellement stipulé que les fonds pour la partie à racheter à Paris, devront être faits 15 jours avant l'échéance de chaque semestre. Cette dernière disposition se trouve aussi dans le contrat de l'emprunt de 50,850,8000 fr. 3 p. c. du 21 juin 1858. C'est donc à l'échéance du semestre et non par anticipation que le semestre est dû. Les fonds seront mis par conséquent à la disposition de la caisse d'amortissement en temps utile; de sorte que ni pour les intérêts ni pour l'amortissement la proposition du gouvernement ne présente d'inconvénient.

M. T'Kint de Naeyer. - L'honorable rapporteur de la section centrale n'a pas bien interprété les observations que j'ai eu l'honneur de soumettre à la chambre.

Mon but a été de provoquer la présentation d'une loi qui imposerait aux établissements publics, qui ne sont eux-mêmes qu'une délégation du pays, l'obligation de faire le remploi de leurs fonds disponibles en dette nationale. Je n'ai jamais eu la pensée de contraindre ces administrations à aliéner les biens-fonds qu'elles seraient dans le cas de posséder. J'ai dit qu'en présence de besoins croissants et de la nécessité qui menace de les accabler, il serait de leur intérêt d'aliéner graduellement des biens-fonds dont le revenu ne dépasse guère 2 pour cent pour en placer le montant en rentes sur l'Etat et se créer ainsi un revenu trois fois plus élevé.

M. Mercier. - Je désire qu'il soit bien entendu que si je n'ai pas nié les difficultés que peut présenter le mode actuel, je n'en trouve pas moins qu'elles ont été singulièrement exagérées et par le ministre des finances et par M. le rapporteur et qu'elles ne sont pas de nature à légitimer la déviation d'un mode qui permettait d'établir une situation plus vraie.

On a présenté comme une objection à laquelle il me serait, disait-on, impossible de répondre, cette circonstance que les intérêts des emprunts forcés étant réglés pour une année entière au lieu de l'être pour un semestre, le système actuellement suivi ne pourrait leur être appliqué. Messieurs, ce n'est pas par esprit systématique que je voudrais qu'on maintînt le mode en vigueur, mais uniquement pour que la vérité existât toujours dans les comptes de la situation du trésor.

Déjà la section centrale, en 1840, avait fait observer que s'il ne se fût agi que d'une somme peu considérable elle n'aurait pas jugé nécessaire de proposer un changement.

Maintenant que, pour les emprunts forcés, le gouvernement a cru devoir établir l'intérêt par année, je ne trouverais pas non plus d'inconvénient à ce que, pour ces emprunts seulement, il soit fait une exception à la règle; d'ailleurs, l'existence de ces emprunts n'est que temporaire, et cette exception n'empêcherait aucunement que la règle fût maintenue.

Quant à l'interprétation de l'article 2, toutes les circonstances, je le répète, militent pour que le sens que je lui ai attribué soit le véritable. Lorsque la loi de comptabilité a été discutée, le mode actuel d'imputation du semestre de l'emprunt existait ; aucun membre de la chambre n'a parlé de le modifier à l'occasion du vote de l'article 2. Après la promulgation de cette loi, plusieurs budgets établis, selon ce mode, ont été votés sans observations ; par conséquent mon interprétation est nécessairement la seule qui soit exacte.

Les chambres qui ont voté la loi de comptabilité et les budgets de la dette publique depuis 1844 n'auraient pu avoir d'autre pensée sans tomber dans la plus étrange contradiction. Ainsi, messieurs, c'est bien le nouveau mode que l'on veut introduire qui déroge aux prescriptions de l'article 2 de la loi de comptabilité.

(page 96) M. de Man d'Attenrode. - L'honorable M. Mercier est revenu à diverses reprises sur la nécessité d'une situation sincère du trésor. Je désire comme lui que cette situation soit sincère. Mais je crois que son insistance provient de ce qu'il confond le budget et le compte de gestion. C'est ce compte de gestion qui doit être la représentation fidèle de ce qui s'est passé pendant l'exercice. Ce compte n'a jamais été rendu, mais il le sera, la loi de comptabilité en fait un devoir à l'administration.

Quant au budget, il doit être la représentation de ce que le gouvernement a à payer et à recevoir éventuellement, et rien de plus, pendant l'année qui donne son nom à l'exercice.

Un honorable député de Saint-Nicolas aurait voulu que le gouvernement insérât dans le règlement d'administration, qu'il a publié par suite de la loi récente concernant la caisse d'amortissement, l'obligation de donner à l'amortissement une action journalière et continue. Il y a divers systèmes à cet égard. Tout le monde n'est pas du même avis.

Quant à moi, je penche à croire qu'il est utile pour soutenir le crédit public, que l'action de l'amortissement soit aussi continue que possible.

Mais je crois que le gouvernement a bien fait de n'en pas faire une obligation dans son règlement, surtout depuis que nous possédons une loi qui concerne le service de l'amortissement, loi qui a entouré ces opérations d'une surveillance salutaire, au moyen d'une commission, dont l'un des membres est élu par cette chambre, parmi nous, et un autre par le sénat.

Il importe, en effet, de laisser à cette commission quelque liberté d'action ; elle est tenue à vous faire un rapport annuel sur ses opérations, elle exposera ses travaux ; vous pourrez alors critiquer ses actes s'il y a lieu.

J'ai un mot à ajouter pour en finir.

Le but de l'amortissement est non seulement de rembourser les emprunts, mais aussi de soutenir le crédit. Mais pour que l'amortissement produise cet effet, il importe que les rachats se fassent avec une publicité convenable; afin que chacun puisse y prendre part.

Or, voici, si mes renseignements ne me trompent pas, ce qui arrive quelquefois : il arrive que les agents de change, au lieu de donner à leurs rachats toute la publicité nécessaire, en les faisant au parquet, opèrent entre eux en bourse à l'exclusion du public, afin de réaliser quelques bénéfices.

Je recommande cette observation à M. le ministre des finances et à la commission de surveillance. Je pense qu'il aura suffi de signaler cet abus pour qu'il ne se renouvelle plus à l'avenir.

- La discussion générale est close.

Discussion du tableau des crédits

La chambre passe à la discussion sur les articles.

Chapitre premier. Service de la dette

Articles 1 à 6

« Art. 1er. Arrérages de l'inscription au grand-livre des rentes créées sans expression de capital, portée au nom de la ville de Bruxelles, en vertu de la loi du 4 décembre 1842 : fr. 300,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Arrérages de l'inscription portée au même grand-livre au profit du gouvernement du royaume des Pays-Bas, en exécution du paragraphe premier de l'article 63 du traité du 5 novembre 1842 : fr. 846,560. »

- Adopté.


« Art. 3. Intérêts des capitaux inscrits au grand-livre de la dette publique, à 2 1/2 p. c, en exécution des paragraphe 2 à 6 inclus de l'article 63 du même traité : fr. 5,502,640 78. »

- Adopté.


« Art. 4. Frais relatifs à cette dette : fr. 3,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Intérêts de l'emprunt de 30,000,000 de francs à 4 p. c, autorisé par la loi du 18 juin 1836 : fr. 1,200,000.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt : fr. 300,000.

« Ensemble : fr. 1,500,000. »

- Adopté.


« Art. 6. Frais relatifs au payement des intérêts et à l'amortissement du même emprunt : fr. 3,000. »

- Adopté.

Article 7

« Art. 7. Intérêts de l'emprunt de 50,850,800 fr. à 3 p. c., autorisé par la loi du 25 mai 1838, et du capital de 7,624,000 fr., à 3 p. c, émis en vertu des lois du 1er mai 1842 et du 24 décembre 1846 (depuis le 1er janvier jusqu'à l'échéance du 1er août 1849) : fr. 1,023,309.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt pendant la même période : fr. 341,103.

« Ensemble : fr. 1,364,412. »

- Un amendement proposé à cet article par M. Cools, consistant à porter le chiffre à 2,338,992 fr., est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

L'article est adopté avec le chiffre de 1,364,412 fr.

Articles 8 à 13

« Art. 8. Frais relatifs aux payements des intérêts et à l’amortissement de ladite dette : fr. 22,750. »

- Adopté.


« Art. 9. Intérêts de l'emprunt de 86,940,000 francs, à 5 p. c, autorisé par la loi du 26 juin 1840 (depuis le 1er janvier jusqu'à l'échéance du 1er novembre 1849 ) : fr. 3,622,500.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt pendant la même période : fr. 724,500.

« Ensemble : fr. 4,347,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Frais relatifs au payement des intérêts et à l'amortissement dudit emprunt : fr. 108,333 33. »

- Adopté.


« Art. 11. Intérêts de l'emprunt de 28,621,718 fr. 40 c., à 5 p. c, autorisé par la loi du 29 septembre 1842 (depuis le 1er janvier jusqu’à l'échéance du 1er novembre 1849 : fr. 1,192,571 60 c.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt pendant la même période : fr. 238,514 32

« Ensemble : fr. 1,431,085 92. »

- Adopté.


« Art. 12. Frais relatifs au payement des intérêts et à l'amortissement dudit emprunt : fr. 37,500. »

- Adopté.


« Art. 13. Intérêts de la dette de 95,442,832 francs, à 4 1/2 p. c, résultant de la conversion autorisée par la loi du 21 mars 1844 (depuis le 1er janvier jusqu'à l'échéance du 1er novembre 1849) : fr. 3,579,106 20.

« Dotation de l'amortissement de cette dette, pendant la même période : fr. 795,356 93.

« Ensemble : fr. 4,374,463 43. »

- Adopté.

Article 14

« Art. 14. Frais relatifs au payement des intérêts et à l'amortissement de ladite dette (article 2 de la loi du 21 mars 1844) : fr. 12,500. »

M. de Pouhon. - A l'occasion de cet article, je me permettrai de recommander à M. le ministre des finances de prendre des mesures pour garantir les rentiers belges à l'étranger contre les exactions auxquelles ils sont exposés de la part des maisons qui sont chargées du payement des intérêts.

Dernièrement, une maison m'écrivait : « Nous avons envoyé à Paris environ 150,000 fr., coupons belges 4 1/2 p. c. M. de Rothschild ne paye pas autrement qu'avec 1/4 p. c. commission. Veuillez, s'il vous plait, avoir l'extrême bonté de nous dire ce que vous nous conseillez de faire; le gouvernement belge s'étant engagé à les payer à Bruxelles, Anvers ou Paris au choix du porteur, il est impossible que nous perdions 1/4 p. c. »

Je dois ajouter que, par suite des réclamations qui ont été faites par cette maison, la commission de 1/4 p. c. a été restituée. Mais il n'en est pas moins vrai que ce 1/4 p. c. avait été perçu indûment, et que de semblables prétentions produisent un tort réel pour le crédit de notre pays.

Ce n'est pas seulement à Paris que des abus de cette nature se sont passés. Dans les derniers jours d'octobre, avant l'échéance du semestre du 5 p. c, le correspondant du gouvernement belge à Londres répondit à une personne qui s'informait si l'on pourrait recevoir chez lui les coupons, qu'il ne les payerait pas, que cependant il les achèterait à 26 fr. L'échéance n'était pas arrivée, sans doute; mais des faits semblables sont de nature à amener de la part des détenteurs de fonds des réflexions fâcheuses pour le crédit belge. Les exigences des maisons qui opèrent le payement des intérêts constituent un véritable abus, puisque les coupons sont payables à Londres et à Paris et que des allocations considérables sont portées au budget pour couvrir les frais de cette opération.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je tiens note des observations de l'honorable M. de Pouhon. Je ferai en sorte que des erreurs de cette nature, car je ne puis attribuer cela qu'à l'erreur, ne se reproduisent plus. Il est évident qu'on ne doit rien pour le payement des coupons, puisque le gouvernement fait les fonds et se charge des frais.

M. Osy. - Messieurs, j’appuie entièrement ce que vient de dire l'honorable M. de Pouhon. C'est certainement un inconvénient que de devoir payer à l'étranger les coupons de plusieurs de nos emprunts; mais je reproduirai ici une idée que je crois déjà avoir suggérée à M. le ministre.

Après les événements de février, l'honorable M. Veydt a pris une mesure extrêmement sage. Pour ne pas devoir déplacer des sommes trop fortes, il a, près d'un mois avant l'échéance de mai, annoncé qu'il payerait en Belgique les coupons d’un taux assez élevé, mais cependant laissant encore au pays un grand bénéfice.

Je crois que comme le gouvernement a toujours les fonds faits d'avance, puisqu'il annonce deux et trois mois avant l'échéance qu'on peut recevoir les intérêts, il ferait bien d'annoncer chaque fois, un mois avant l'échéance, qu'il payera les coupons à un taux plus haut que le pair, en se rapprochant du cours du change sur l'étranger.

J'engage le gouvernement à méditer sur ce moyen, qui, selon moi, éviterait un envoi considérable de fonds à l'étranger, tout en procurant un avantage aux Belges.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il est vrai que l’an (page 97) dernier, mon honorable prédécesseur a offert, un certain temps avant l'échéance, le payement du coupon à un cours favorable. Mais il est également vrai que cette mesure n'a pas produit de grands résultats. Ces résultats, si mes souvenirs sont exacts, ont été à peu près nuls.

Cela tient à diverses causes, notamment à ce que, le titre étant déprécié, lorsque le coupon en est détaché, on ne le sépare point avant l'échéance et alors l'avantage qu'on aurait voulu faire se trouve perdu. Il en résulte que le coupon est présenté en payement soit à Londres, soit à Paris, et que le gouvernement n'a rien gagné en offrant d'anticiper.

J'ai encore offert cette année d'anticiper, sans présenter, il est vrai, le même avantage, mais encore une fois je n'ai obtenu aucun résultat.

M. Osy. - Messieurs, depuis nombre d'années, le ministre des finances a annoncé, trois mois avant l'échéance, qu'il payerait les coupons du 5 p. c. à 25 fr. 20 c. Il est certain que quand le change sur Londres était de 40 50, personne ne se présentait au trésor belge.

Mais ce que je demande, c'est qu'un mois avant l'échéance, pour ne pas beaucoup déplacer les fonds et les envoyer à l'étranger, ce qui dans certaines circonstances peut être très dangereux, vous annonciez qu'on paye en Belgique à bureau ouvert à un taux approchant du cours réel du change sur l'Angleterre, comme l'honorable M. Veydt l'a fait au mois d'avril.

- L'article est adopté.

Articles 15 et 16

« Art. 15. Intérêts de l'emprunt de 84,656,000 francs, 4 ½ p.c., autorisé par la loi du 22 mars 1844 (depuis le 1er janvier jusqu'à l'échéance du 1er novembre 1849) : fr. 3,174,600.

« Dotation de l'amortissement de cet emprunt, à 1/2 p. c. du capital, pendant la même période : fr. 352,733 33. »

- Adopté.


« Art. 16. Frais relatifs au payement des intérêts et à l'amortissement du même emprunt (article 2 de la loi du 22 mars 1844) : fr. 10,833 33. »

- Adopté.

Article 17

« Art. 17. Intérêts des deux emprunts à 5 p. c, décrétés par les lois du 26 février et du 6 mai 1848, pour la période du 1er janvier au 1er novembre 1849, sur un capital approximatif de 37,768,000 francs : fr. 1,573,666 06. »

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Un arrêté royal récent a réglé que l'échéance des deux emprunts serait annuelle. L'échéance semestrielle seulement ayant été supposée dans l'allocation proposée, je demande que la somme soit portée à 1,888,400 francs, et que l'on ajoute au libellé ces mots : « pour une année du 1er novembre 1843 au 1er novembre 1849. »

M. de Man d'Attenrode, rapporteur. - M. le ministre ayant fait l'amendement que je comptais proposer, je renonce à la parole.

- L'article 17 est adopté avec l'amendement présenté par M. le ministre des finances.

Articles 18 à 23

« Art. 18. Frais relatifs au payement des intérêts de ces deux emprunts : fr. 2,800. »

- Adopté.


« Art. 19. Intérêts et frais présumés de la dette flottante : fr. 550,000. »

- Adopté.


« Art. 20. Rentes viagères (charges extraordinaires et temporaires) : fr. 4,975 36. »

- Adopté.


« Art. 21. Intérêts à payer aux anciens concessionnaires de la Sambre canalisée (charges extraordinaires et temporaires) : fr. 1,765 87. »

- Adopté.


« Art. 22. Indemnité annuelle pour travaux à exécuter au canal de Terneuzen (articles 20 et 23 du traité du 5 novembre 1842) : fr. 105,280 10. »

- Adopté.


« Art. 23. Rachat des droits de fanal mentionnés au paragraphe 2 de l'article. 18 du traité du 5 novembre 1842 : fr. 21,164 02. »

- Adopté.

Chapitre II. Rémunérations

Articles 24 à 26

« Art. 24. Anciennes pensions ecclésiastiques tiercées (charges extraordinaires), fr. 165,000.

« Pensions civiles et autres accordées avant 1830 (charges extraordinaires) : fr. 106,000.

« Pensions civiques (charges extraordinaires) : fr. 143,000.

« Pensions militaires et pensions des Indes : fr. 2,350,000.

« Pensions des veuves et orphelins de l'ancienne caisse de retraite (charges extraordinaires) : fr. 525,000

« Pensions de l'Ordre Léopold : fr. 23,000.

« Arriérés de pensions de toute nature : fr. 5,000.

« Total : fr. 3,317,000. »

- Adopté.


« Art. 25. Remboursement à faire au trésor néerlandais, en exécution du paragraphe 7 de l'article 68 du traité du 5 novembre 1842, pour arrérages de pensions du 1er janvier au 18 avril 1849 (charges extraordinaires) : fr. 2,539 68. »

- Adopté.


« Art. 26. Traitements d'attente (wachtgelden) (charges extraordinaires) : fr. 21,700.

« Traitements ou pensions supplémentaires (toelagen) (charges extraordinaires) : fr. 11,150.

« Secours annuels (jaerlyksche onderstanden) (charges extraordinaires) : fr. 4,350.

« Total : fr. 37,200. »

- Adopté.

Chapitre III. Fonds de dépôts

Articles 27 et 28

« Art. 27. Intérêts des cautionnements versés en numéraire dans les caisses de l'Etat, pour la garantie de leurs gestions respectives, par des fonctionnaires comptables de l'Etat, par des receveurs communaux, des receveurs de bureaux de bienfaisance, par des préposés de l'administration du chemin de fer, par des officiers payeurs et divers préposés de l'administration de l'armée, des courtiers, des agents de change, etc., soumis à fournir un cautionnement, et par des contribuables, des négociants, des commissionnaires , etc., pour garantie du payement de droits de douanes, d'accises, etc., dont ils pourraient être éventuellement redevables : fr. 387,000.

« Intérêts arriérés sur des exercices clos : fr. 3,000.

« Ensemble : fr. 390,000. »

- Adopté.


« Art. 28. Intérêts des consignations faites dans les caisses de l'Etat : fr. 70,000. »

- Adopté.

Vote des articles et sur l’ensemble du projet

La chambre passe au texte du budget qui est adopté dans les termes suivants :

« Article unique. Le budget de la dette publique est fixé, pour l’exercice 1849, à la somme de 29,782,776 fr. 85 c, conformément au tableau ci-annexé. »

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget.

En voici le résultat :

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 85 membres présents. Il sera transmis au sénat.

Ont voté l'adoption : MM. Van Renynghe, Verhaegen, Vermeire, Veydt, Vilain XIIII, Allard, Anciaux, Anspach, Boedt, Cans, Christiaens, Clep, Cools, Coomans, Cumont, David, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Latour, de Bocarmé, Debourdeaud'huy, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, Debroux, Dedecker, de Haerne, Delehaye, Delescluze, Delfosse, de Liedekerke, Deliége, de Luesemans, de Man d'Attenrode, de Meester, de Mérode, de Perceval, de Pitteurs, de Pouhon, de Renesse, Destriveaux, Devaux, d'Hoffschmidt, d'Hont, Dolez, Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Gilson, Jouret, Jullien, Julliot, Lange, le Bailly de Tilleghem, Le Hon, Lelièvre, Lesoinne, Manilius. Mascart, Mercier, Moreau, Moxhon, Osy, Peers, Pierre, Pirmez, Prévinaire, Reyntjens, Rodenbach, Rogier, Rolin, Rousselle, Sinave, Tesch, Thibaut, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Toussaint, Tremouroux, Troye, Vanden Berghe de Binckum, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Grootven, Van Iseghem et de Brouckere (Henri).


M. le président. - Je viens de recevoir une lettre de notre collègue, M. de T'Serclaes, qui, devant s'absenter pour affaires urgentes pendant huit jours, demande un congé.

- Le congé est accordé.

Projet de loi qui proroge la loi sur le transit

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban) dépose un projet de loi sur le transit. . ,

La chambre en ordonne l'impression, la distribution et le renvoi à l'examen des sections.


M. le président. - J'ai l'honneur de proposer à la chambre de ne se réunir demain en séance publique qu'à trois heures et de s'occuper d'un rapport de pétitions.

- Cette proposition est adoptée.

La séance est levée à 4 heures 3/4.