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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 10 avril 1856

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)

(Présidence de M. Delehaye.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1063) M. Maertens procède à l'appel nominal à trois heures.

M. Ansiau donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Maertens présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.

« Les membres de la chambre des notaires de l'arrondissement de Charleroi présentent des. observations sur la nécessité d'introduire, dans le projet de loi relatif aux jurys d'examen, une disposition transitoire au sujet de l'exécution de l'article 8 quant à l'épreuve préparatoire pour l'examen de candidat notaire et sur la composition du jury, d'examen pour ce grade. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner ce projet de loi.


« Plusieurs commissaires de police dans la province de Hainaut demandent que leur traitement soit fixé par l'Etat. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les sieurs Decorte et Durey appellent l'attention de la Chambre sur les collectes faites en Belgique en faveur de l'étranger. »

- Même renvoi.


« M. de Portemont, rappelé à Grammont par des affaires de famille, demande un congé de quelques jours. »

- Accordé.

Rapport sur des pétitions

M. Wasseige, rapporteur. - Messieurs, par pétition datée d'Ophain-Bois-Seigneur-Isaac, le 10 janvier 1856, la veuve Arcq réclame l'intervention de la Chambre pour que son fils Vincent soit libéré du service militaire.

Cette femme fonde sa réclamation sur ce que le nommé Tilman ayant obtenu un numéro inférieur à celui de son fils, est resté dans ses foyers, quoique ayant été reconnu propre au service ; il résulte en effet d'une réponse faite par le département de l'intérieur à une première requête de la veuve Arcq, que le nommé Tilman a dû être rayé des registres de la milice de 1855, parce qu'étant né en 1832, il appartenait à la levée de 1852 ; il est impossible d'apprécier avec ces seules données, si l'erreur commise lors de la formation des listes d'inscription pour la milice nationale dans la commune d'Ophain-Bois-Seigneur-Isaac a pu nuire aux intérêts du fils de la veuve Arcq, lequel a été désigné pour le service ; mais en tous cas, celle raison ne serait pas suffisante pour congédier du service le milicien dûment incorporé ; elle pourrait seulement donner ouverture à une action en dommages-intérêts contre les auteurs de l'erreur.

En conséquence, votre commission a l’honneur de vous proposer de passer à l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Wasseige, rapporteur. - Par pétition datée d'Anvers, le 26 février, 1856, le sieur Thierii, ancien capitaine, demande la révision de sa pension ; il prétend qu'il ne lui a pas été tenu compte des dix années de grade auxquelles il croit avoir droit. Les raisons qu'il allègue paraissent mériter un examen sérieux ; en conséquence, votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de la pétition à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.

M. Wasseige, rapporteur. - Par pétition datée de Bois-de-Villers, le 26 janvier 1856, la veuve Dosimont demande que son fils Louis-Joseph soit libéré du service militaire.

Celle femme prétend que son. fils se trouve dans la position de fils de veuve pourvoyant, et que c'est par erreur qu'il ne lui a pas été fait application de l'article 21 de la loi sur la milice nationale.

La Chambre n'étant pas compétente pour juger en appel la décision des autorités chargées d'appliquer les lois sur la milice nationale, votre commission a l'honneur de vous proposer de passer à l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Wasseige, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 25 février 1856, le sieur Simon, ancien officier pensionné, décoré de la croix de Fer, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la pension à laquelle il prétend avoir des droits.

Cette demande ayant été rejetée plusieurs fois déjà par le département de l'intérieur, attendu que le pétitionnaire ne réunissait pas les conditions requises pour obtenir la pension qu’il réclamait, et la Chambre n'ayant pas à s'immiscer dans des détails qui regardent exclusivement le pouvoir exécutif, votre commission a l'honneur de vous proposer de passer à l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Wasseige, rapporteur. - Par pétition datée de Louvain le 24 février 1856, le sieur Spinatsch, ancien sous-officier, demande la révision de sa pension.

Il prétend, que dans la liquidation de cette pension, il ne lui a pas jeté tenu compte de ses 14 années de grade d'adjudant sous-officier, et qu'il n'a obtenu que la pension de sergent ; il se fonde entre autres sur les termes de l'arrêté royal du. 23 décembre 1846 ; les raisons que le pétitionnaire allègue paraissent mériter un sérieux examen ; en conséquence, voire commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de sa requête à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.

Proposition de loi relative à la récusation des magistrats

Motion d'ordre

M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition relative à la récusation des. magistrats.

Dans une précédente séance, vous avez décidé que la section centrale se réunirait de nouveau pour examiner les rapports de la cour de cassation et des cours d'appel et l'amendement de l'honorable M. Julliot. La section centrale n'a pu jusqu'ici se réunir, parce que le rapporteur est absent. Cette question ne peut donc être discutée en ce moment. Je propose de la mettre à la suite de l'ordre du jour.

Dès que M. le rapporteur sera présent, la section centrale sera convoquée.

- La proposition de M. le président est adoptée.

Projet de loi accordant des crédits supplémentaires et extraordinaires aux budgets des ministères de l'intérieur et des travaux publics

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Le Roi m'a chargé de vous présenter deux projets de loi.

Le premier tend à allouer au département de l'intérieur divers crédits supplémentaires et extraordinaires s'élevant à 154,890 fr. 78 c.

Le second, entre autres dispositions, ouvre au département des travaux publics un premier crédit de 500,000, fr. pour exécution des travaux à entreprendre dans le but d'améliorer le régime de la Grande-Nèthe, de l'Yser, des canaux de Plasschendaele et de Nieuport.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ces projets de loi ; la Chambre en ordonne l'impression et la distribution et les renvoie à l'examen des sections.

Rapport sur une pétition

Le rapport de la commission permanente, sur des pétitions relatives au droit d’entrée sur le lin, présenté par M. Janssens, est ainsi conçu.

M. Janssens. - Messieurs, sous les dates du 4 et du 7 mars dernier, les administrations communales de Saint-Gilles-Waes, de Kemseke, de Saint-Paul, de Stekene, de la Clinge, de Meirdonck, de Vracene et de Nieukerke ont adressé à la Chambre des pétitions dans le but d'exposer le préjudice résultant, pour une partie importante de leur population, de la disposition de notre tarif de douane qui, sous la dénomination commune de lin brut, soumet à un droit uniforme le lin vert, le lin sec et le lin teillé.

Le plus simple exposé des faits suffira, messieurs, pour démontrer à toute évidence combien les observations qui vous sont adressées sont fondées et combien notre tarification, quaut, à l'article en question, est anomale et insoutenable.

Tout le monde sait que la préparation du lin donne lieu à une main-d'œuvre considérable, et que, dans plusieurs de nos communes, ce genre de travail forme l'industrie principale. Ceux qui la pratiquent achètent le plus souvent le lin sur pied, lui font subir toutes les manipulations et le revendent prêt à être mis en filature. Dans presque toutes les communes limitrophes de la Zélande, cette industrie a pris un développement particulier parce que l'on y prépare non seulement le lin cultivé sur notre territoire, mais encore une partie de celui qui se récolte par delà la frontière. Malheureusement, ainsi que les chiffres suivants rétablissent, notre droit de douane sur le lin semble fait à dessein pour enlever à nos liniers cette seconde et importante ressource.

Un hectare de terrain produit en lin vert une quantité que l'on peut estimer en moyenne à 17,500 kilogrammes. Il s'ensuit que si la récolte est importée brute elle est frappée, pour 17,500 kilogrammes, à fr. 0,50 par 100 kilogrammes, d'un droit de fr. 87 50 c., plus 16 p. c. additionnels, fr. 14, soit fr. 101 50.

La même quantité de lin, après le rouissage, le séchage et le teillage, conserve un poids moyen de 600 kilogrammes. Si toutes ces opérations sont faites à l'étranger, les 600 kilogrammes de lin teillé payent à leur entrée en Belgique, à raison de fr. 0-50. par l00. Kiil, fr. 3 00, plus 16 p. c. additionnels, 48 c., soit fr. 3 48.

Les pétitionnaires attribuent une valeur de 600 francs à la quantité de lin vert que l'on récolte en moyenne en Zélande, par hectare de terrais. La même quantité teilliée acquiert une valeur de 900/ rancs, et l'on peut dire que sur cette quantité 300 francs sont payés en salaires.

Ainsi le lin importé vert, qui donne lieu à un travail considérable dans le pays, est frappé d'un droit de fr. 101-50 pour une valeur de 600 francs, soit près de 17 p. c., et ce même produit, lorsque ce travail s'est fait à l'étranger, est admis avec un droit de balance de fr. 3-48 pour une valeur de 900francs, soit moins d'un demi pour cent.

Ainsi encore, la préparation du lin récolté sur la surface d'un hectare donne lieu à une distribution de salaires de 300 francs, et l'on (page 1064) trouve un avantage de près de 100 francs à faire exécuter ce travail hors du pays.

Messieurs, ce système est tellement, faux et injuste qu'il devrait suffire de l'exposer pour le faire abandonner sur-le-champ. Depuis plusieurs années, des réclamations réitérées ont été adressées à ce sujet au gouvernement, et aux Chambres, et certes on y eût fait droit si l'on n'avait eu constamment l'espoir de faire, dans un avenir très prochain, la révision complète de nos tarifs de douane. Aussi le projet qui nous fut soumis pendant la session 1853-1854 levait-il la difficulté en supprimant tout droit d'entrée sur le lin brut, et nous regrettons que, dans le projet de modification partielle qui nous est actuellement soumis, le gouvernement n'ait pas trouvé l'occasion de faire disparaître de notre tarif le vice que nous signalons. En remettant de faire cette modification, on tient en souffrance un intérêt considérable et qui mérite d'autant plus de sympathie qu'il concerne plus directement la classe ouvrière. Il ne faut pas oublier, surtout, que ces ajournements entravent une industrie quu passe la frontière, pour aller mériter la faveur que notre tarif fait en cette matière au travail étranger.

S'il s'agissait, messieurs, de discuter l'efficacité de la protection que l'on accorde au travail national, il s'élèverait, sans doute, des autorités respectables pour attaquer et pour soutenir ce système ; mais quelle voix prendrait la défense d'une protection donnée à la main-d'œuvre étrangère, contre celle qui se fait dans le pays ? et pourtant la disposition dont nous parlons n'est en fait que cela.

Que l'on ajourne, à la révision générale du, tarif, les modifications qui touchent à des intérêts opposés, rien de plus naturel. Dans ce cas, bien souvent on ne peut faire droit aux prétentions des uns, sans imposer à d'autres un sacrifice qui ne peut recevoir sa compensation que dans la loi générale ; mais, encore une fois, rien de semblable ne se présente pour la question qui nous occupe. La modification de cet article du tarif sérait un immense bienfait pour plusieurs communes des arrondissements de Saint-Nicolas, de Gand, d'Eecloo, etc., et ne contrarierait personne. Si, au contraire, une récolte nouvelle se fait sous le régime existant, on aura laissé le mal s'accroître et peut-être devenir sans remède, par le déplacement partiel de l'industrie, et, tout au moins, on aura prolongé le préjudice considérable que cause à nos ouvriers un texte de loi absurde, dont personne ne peut avoir voulu la portée. Nous ne craignons pas de dire que le mal fait par cette disposition est bien plus évident que le bien qui résulte de tous les ateliers du gouvernement crées et maintenus à grands frais.

Les pétitions, dont nous faisons rapport, appellent l'attention de la Chambre sur un second objet de la même nature, bien que moins important ; c'est le droit que l'on perçoit à l'entrée sur les grains en paille, au même taux que sur les grains battus.

Votre commission de l'industrie, messieurs, convaincue de la justesse des réclamations qui vous sont faites, et de la gravité de leur objet, vous propose unanimement leur renvoi A M. le ministre des finances.

M. Osy. - Messieuis, j'appuie le renvoi de ces pétitions à M. le ministre des finances.

Vous verrez, par le rapport, que si l'on fait entrer en Belgique le lin vert récolté sur un hectare de terrain, l'on doit payer un droit de 100 fr. et au-delà ; tandis que si ce même lin entre teillé, il ne paye que 3 fr. 48 c. Il y a là une anomalie qu'il importe de faire cesser.

Mais j'ai surtout pris la parole pour faire remarquer que dans le projet qui nous a été soumis par le gouvernement, relativement à l'entrée de quelques matières premières, on comprend le chanvre parmi celles de ces matières qui seront libres à l'entrée. Comme membre de la section centrale, je compte proposer d'y comprendre aussi le lin, et je pense que d'autres sections font la même proposition.

Je prierai donc M. le ministre des finances de bien vouloir, après le renvoi de la pétition à son département, examiner s'il n'y a pas lieu de rendre le lin libre à l'entrée comme le chanvre. Nos filatures ont grand besoin de lin étranger ; on doit en faire venir de fortes quantités de la Hollande et de la Russie.

M. Van Overloop. - Je demanderai à la Chambre d'ordonner aussi le renvoi de ces petitions à la section centrale chargée d'examiner le projet relatif à la révision de notre régime commercial. Plusieurs sections ont demandé, comme amendement à ce projet, la libre entrée du lin. Je crois qu'après avoir examiné l'excellent rapport de mon honorable collègue et ami, M. Janssens, le gouvernement n'hésitera plus à faire droit aux justes réclamations des administrations communales de Saint-Gilles-Waes, Kemseke, Saint-Paul, Stekene, la Clinge, Meirdonck, Vracene et Nieukerke.

Il est temps que l'on fasse droit aux réclamations qui nous sont adressées depuis trois ou quatre ans. Je demande que le gouvernement se mette, sur ce point, d'accord avec la section centrale. Ce sera un acte de justice et un acte d'humanité en même temps,

M. Rodenbach. - J'appuie également le renvoi de cette requête à M. le ministre des finances. Je trouve qu'il faut favoriser autant que possible la main-d’œuvre dans le pays. Il est prouvé dans ces requêtes que la libre entrée du lin doit procurer à l'ouvrier belge un avantage immense sur la frontière de la Hollande, et lorsqu'on peut atteindre un pareil résultat on ne doit pas reculer.

La demande des pétitionnaires tend à nous faire entrer dans un système plus large, dans un système de liberté ; je l'appuie de toutes mes forces.

M. Faignart. - Je ne m'oppose aucunement au renvoi à M. le ministre des finances des pétitions dont il s'agit ; niais je le prierai d'avoir égard à la culture du lin en Belgique. C'est une culture qui se fait sur une assez vaste, échelle pour qu'on ait quelques égards pour ses intérêts.

M. de T'Serclaes. - L'honorable préopinant craint que la modification réclamée à notre tarif de douane ne nuise aux intérêts de l'agriculture ; c'est une erreur que la simple lecture du rapport doit dissiper. Remarquez que ces pétitions émanent des communes où l'on cultive principalement le lin. Ce sont les populations qui s'occupent spécialement de cette culture, qui demandent que le lin recueilli sur les terres de Zélande puisse être importé en vert à un droit moindre que le lin teillé, de manière que le pays profite de la main-d'œuvre considérable qui résulte de la manipulation de ce produit par la nature même des choses. Cette importation ne peut s'exercer que sur une échelle restreinte et dans les communes tout à fait limitrophes de la frontière : le lin vert ne supporte pas d'être transporté au loin, et la mesure ne peut profiter qu'aux cultivateurs liniers.

Il n'y a qu'un vœu à émettre dans cette circonstance, c'est que la modification du tarif ne se fasse point attendre ; depuis plusieurs années déjà, l'on réclame contre les prescriptions évidemment erronées de ce tarif. Nous sommes à une époque de la saison où la disposition, si elle était votée, pourrait encore produire ses effets utiles sur la récolte prochaine.

En appuyant donc le renvoi des pétitions, proposé par l'honorable M. Van Overloop, à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi sur ce système commercial, je demande que cette section centrale veuille bien présenter son rapport assez tôt pour que la loi puisse être discutée et votée dans cette session.

Je ne doute pas que la Chambre ne soit favorable à la proposition de la commission d'industrie. Le rapport concluant et riche de faits de l'honorable M. Janssens suffit, d'ailleurs, pour porter la conviction dans tous les esprits.

M. Faignart. - Je conçois que les cultivateurs qui exploitent des terrains en Hollande, aient intérêt à la libre entrée du lin en Belgique. Mais il n'en sera pas de même pour tous les cultivateurs ; il en est qui cultivent le lin en Belgique même, et si vous laissez entrer le lin étranger, vous allez nuire à ceux qui cultivent le lin dans le pays.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, je ne puis m'empêcher de reconnaître tout ce qu'il y a de juste dans la demande des pétitionnaires. Mais je crains que si l'on introduit un seul article nouveau dans le projet qui a été présenté, on ne cherche à en faire entrer une foule d'autres ; si une pareille conséquence venait à se produire, il serait à craindre que la loi ne fût pas volée dans cette session.

Je n'ai, du reste, pas d'autres objections à présenter.

Je dirai à l'honorable M. Faignart qu'il est dans l'erreur sur la nature de la question dont il s'agit. L'honorable membre suppose, me paraît-il, qu'il s'agit de l'importation de toute espèce de lin venant de l'étranger. Mais il ne s'agit que du lin cultivé dans quelques localités situées à l'étranger à une petite distance du territoire belge. Ainsi je pense que l'honorable membre renoncera à son objection.

Je le répète, je n'ai pas d'autre raison à opposer que la crainte de voir ajourner encore la discussion du projet qui vous est présenté et qui ne renferme que les articles soumis aux droits différentiels, et quelques autres qui sont déjà sous le régime proposé, mais seulement à titre provisoire. Au fond, je trouve la demande des pétitionnaires très fondée.

M. Manilius. - L'honorable ministre vient de reconnaître la justice de la demande des pétitionnaires, mais il craint, dit-il, qu'en touchant à la loi telle qu'elle est proposée, d'autres intérêts demanderaient également des modifications. Messieurs, il ne s'agit pas ici d'un article du tarif ; il suffirait d'un simple renvoi tel qu'il s'en trouve une quantité dans le tarif.

Il est reconnu, messieurs, que les lins dont il s'agit payent un centuple droit, car on les frappe, comme lins secs, comme lins dépouillés, c'est une anomalie contre laquelle on s'élève depuis un grand nombre d'années.

J'espère donc que d'ici au moment où nous discuterons ie projet de loi, M. le ministre pourra faire droit à la demande des pétitionnaires et les soustraire au grave préjudice qu'ils éprouvent après chaque récolte.

J'insiste précisément parce que la récolte est prochaine et si, avant notre séparation, M. le ministre veut nous présenter une petite modification, l'affaire sera terminée dans les vingt-quatre heures et on aura ainsi fait droit à une demande dont le gouvernement lui-même reconnaît le fondement.

M. de T'Serclaes. - Messieurs, il me semble que la question a déjà fait un grand pas : on a reconnu qu'il s'agit uniquemeni de favoriser le travail national et nullement de préjudicier à aucune autre industrie. On demande d'importer librement une matière première brute, dont toutes les préparations se font dans l'intérieur du pays ; cette importation est forcément restreinte et ne peut, en aucune manière, nuire aux cultivateurs qui produisent du lin dans des localités plus éloignées des frontières.

Quant à l'observation de M. le ministre des finances qui craint que si l'on accueille cette modification au projet de loi sur la réforme (page 1065) commerciale, la Chambre ne se laisse entraîner à des modifications plus sérieuses et plus étendues, je ne pense pas que l'on doive appréhender cette conséquence. Nous sommes prévenus ; le gouvernement reconnaît la justice de la demande ; plusieurs sections ont déjà spontanément proposé d'introduire les mots « lins verts » immédiatement après celui de chanvre dans le projet de loi. On peut donc espérer que l'on ne soulèvera pas une discussion sur un objet d'aussi minime importance. La récolte d'un hectare en lin vert paye à l'entrée 101 fr. 50 c ; la même récolte après le rouissage, le séchage et le teillage, ne paye aujourd'hui que 3 fr. 48 c ; serait-il possible de trouver dans tout notre tarif de douane une seconde disposition aussi absurde ?

M. Sinave. - Messieurs, j'avais demandé la parole lorsque l'honorable M. Faignart a présenté son observation, mais il vient de reconnaître qu'il était dans l'erreur.

Il y a une autre observation, c'est celle de M. le ministre des finances qui dit qu'il est difficile d'admettre un nouvel article dans le projet de loi ; mais cet article se trouvait dans la loi proposée par l'honorable M. Liedts ; je ne comprends pas pourquoi on ne l'a pas fait figurer dans le nouveau projet de loi. C'est sans doute le résultat d'un oubli.

Je pense donc que M. le ministre des finances peut consentir à l'introduction libre du lin, dans les limites que l'on vient d'indiquer.

M. Van Overloop. - Messieurs, j'insiste d'autant plus pour que la libre entrée soit décrétée dans le nouveau projet de loi, que c'est exclusivement la classe ouvrière des communes limitrophes de la Zélande que la disposition intéresse. J'espère donc, je le répète, que le gouvernement n'hésitera plus et que la section centrale n'hésitera pas davantage à introduire un amendement dans le projet de révision de notre régime commercial. Je demande, en conséquence, que la Chambre prononce le double renvoi de la pétition à M. le ministre des finances et à la section centrale.

M. Deliége. - Messieurs, je ferai remarquer, pour abréger la discussion, que la question devra être forcément examinée par la section centrale, la section dont je faisais partie ayant admis l'amendement à l'unanimité.

- Le double renvoi de la pétition à M. le ministre des finances et à la section centrale, dont il s'agit, est mis aux voix et prononcé.

Projet de loi portant le budget des recettes et des dépenses pour ordre de l'exercice 1857

Discussion du tableau des crédits

Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on passe aux articles.

Fonds de tiers déposés au trésor et dont le remboursement a lieu avec l'intervention du ministre des finances (correspondants du trésor)

Articles 1 à 5

« Art. 1er. Cautionnements versés en numéraire dans les caisses du trésor, par les comptables de l'Etat, les receveurs communaux et les receveurs des bureaux de bienfaisance, pour sûreté de leur gestion, et par des contribuables, négociants ou commissionnaires, en garantie du payement de droits de douanes, d'accises, etc. : fr. 9000,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Cautionnements versés en numéraire par les entrepreneurs, adjudicataires, concessionnaires de travaux publics, et par les agents commerciaux : fr. 400,000. »

- Adopté.


« Art. 3. Subsides offerts pour construction de routes (loi du 10 mars 1838) : fr. 150,000. »

- Adopté.


« Art. 4. Fonds provinciaux

« Versements faits directement dans la caisse de l'Etat : fr. 400,000.

« Impôts recouvrés par les comptables de l'administration des contributions directes, douanes et accises, déduction faite des frais de perception : fr. 3,400,000.

« Revenus recouvrés par les comptables de l'administration de l'enregistrement et des domaines, déduction faite des frais de perception : fr. 450,000.

« Ensemble : fr. 4,250,000. »

- Adopté.


« Art. 5. Fonds locaux. Versements des communes pour être affectés, par l'autorité provinciale, à des dépenses locales : fr. 380,000. »

- Adopté.

Article 6

« Art. 6. Caisse des veuves et orphelins des officiers de l'armée : fr. 300,000. »

- Adopté.

M. Osy. - Messieurs, vous aurez pu remarquer dans le rapport de l'honorable M. Moreau, que, dans l'opinion de la section centrale, il y a lieu, de la part du gouvernement, à faire figurer au budget des recettes et des dépenses pour ordre deux articles nouveaux, l'un concernant les caisses des veuves et orphelins du pilotage et des officiers de la marine, l'autre ayant pour objet la masse d'habillement des employés du chemin de fer. J'engage les deux ministres que la chose regarde à examiner sérieusement s'il ne convient pas de faire droit à l'observation de la section centrale dans le projet de budget des recettes et des dépenses pour ordre de 1858.

M. le ministre des affaires étrangères (M. Vilain XIIII). - Je me rends volontiers au désir de M. le baron Osy ; j'examinerai la question. Je ne prévois pas d'obstacle à ce que pour l'exercice 1858 les recettes et les dépenses de la caisse des veuves et orphelins de la marine figurent au budget. Toutefois, je me réserve d'examiner.

- L'article 6 est mis aux voix et adopté.

Article 7 à 22

« Art. 7. Caisse des veuves et orphelins du département de la justice : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Art. 8. Caisse des veuves et orphelins des affaires étrangères : fr. 30,000 »

- Adopté.


« Art. 9. Caisse des veuves et orphelins de l'intérieur : fr. 80,000. »

- Adopté.


« Art. 10. Caisse des veuves et orphelins des finances : fr. 500,000. »

- Adopté.


« Art. 11. Caisse des veuves et orphelins des travaux publics : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Art. 12. Caisse des veuves et orphelins de l'ordre judiciaire : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 13. Caisse des veuves et orphelins des professeurs de l'enseignement supérieur : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Art. 14. Caisses provinciales de prévoyance des instituteurs primaires : fr. 100,000. »

- Adopté.


« Art. 15. Caisse centrale de prévoyance des instituteurs et professeurs urbains : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 16. Caisse des veuves et orphelins des membres du corps administratif et enseignant des établissements d'instruction moyenne régis par l'Etat : fr. 50,000. »

- Adopté.


« Art. 17. Caisse spéciale de pensions en faveur des militaires rengagés par l'entremise du département de la guerre : fr. 160,000. »

- Adopté.


« Art. 18. Recettes effectuées par l'administration des chemins de fer de l'Etat pour le compte des sociétés concessionnaires et des offices télégraphiques avec lesquels elle est en relation : fr. 2,000,000. »

- Adopté.


« Art. 19. Recettes effectuées (service des bateaux à vapeur entre Ostende et Douvres), pour le compte des autres services de transport belge et étrangers, avec lesquels il est en relations : fr. 100,000. »


« Art. 20. Caisse générale de retraite instituée par la loi du 8 mai 1850 : fr. 240,000. »

- Adopté.


« Art. 21. Produits des examens universitaires et des examiens de professeur agrégé de l’enseignement moyen de l’un et de l’autre degré : fr. 85,000. »

- Adopté.


« Art. 22. Fonds de toute autre nature versés dans les caisses du trésor public pour le compte de tiers : fr. 10,000. »

- Adopté.

Chapitre II. Fonds de tiers déposés au trésor et dont le remboursement a lieu sans l'intervention du Ministre de finances (correspondants des comptables)

Articles 23 à 28

« Administration des contributions directes, douanes et accises »

« Art. 23. Répartition du produit des amendes, saisies et confiscations en matière de contributions directes, douanes et accises (caisse du contentieux) : fr. 120,000. »

- Adopté.


« Art. 24. Fonds réservé dans le produit des amendes, saisies et confiscations : fr. 8,000. »

- Adopté.


« Art. 25. Frais d'expertises pour l'assiette de la contribution personnelle : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 26. Impôts et produits recouvrés au profit des communes : fr. 2,600,000. »

- Adopté.


« Art. 27. Masse d’habillement et d’équipement de la douane : fr. 250,000. »

- Adopté.


« Art. 28. Sommes versées pour garantie de droits et d’amendes éventuellement dus : fr. 600,000. »

Articles 29 à 31

« Administration de l'enregistrement et des domaines »

« Art. 29. Amendes diverses et autres recettes soumises et non soumises aux frais de régie : fr. 1,100,000. »

- Adopté.


« Art. 30. Amendes et frais de justice en matière forestière : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 31. Consignations de toute nature : fr. 3,000,000. »

- Adopté.

Articles 32 à 36

« Administration des chemins de fer, postes et télégraphes »

« Art. 32. Primes ou remises, en cas d'exportation, sur les prix des tarifs pour le transport des marchandises : fr. 350,000. »

- Adopté.


« Art. 33. Encaissements et payements effectués pour le compte de tiers par suite du transport des marchandises : fr. 250,000. »

- Adopté.


« Art. 34. Prix de transports afférant au parcours en dehors des limites des chemins de fer, dans l’intérieur du pays (Ports au-delà) : fr. 3,000. »

- Adopté.


« Art. 35. Articles d'argent confiés à la poste et rendus payables sur mandats à vue : fr. 3,200,000. »

- Adopté.


« Art. 36. Prix des abonnements aux journaux et payements divers encaissés par les agents du service des postes, pour compte de tiers : fr. 600,000. »

- Adopté.

Vote de l'article unique et sur l’ensemble du projet

- L'article unique du projet de loi est ainsi conçu :

« Les recettes et les dépenses pour ordre de l'exercice 1857 sont évaluées respectivement à la somme de vingt-deux millions trois cent quatre-vingt-un mille francs (22,381,000). »


Il est procédé au vote par appel nominal sur ce projet. Il est adopté à l'unanimité des 66 membres qui ont répondu à l'appel. Il sera transmis au Sénat.

Ont répondu à l'appel nominal : MM. Rodenbach, Rousselle, Sinave, Tack, Thibaut, Thienpont, T'Kint de Naeyer, Vanden Branden, de Reeth, Vandenpeerehoom, Vander Donckt, Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Overloop, Van Renynghe, Verhaegen, Vervoort, Vilain XIIII, Visart, Wasseige, Ansiau, Anspach, Brixhe, Coomans, Coppieters 't Wallant, David, de Baillet-Latour, de Bronckart, Rogier, de Decker, de La Coste, Delfosse, de Liedekerke, Deliége, F.de Mérode, de Mérode-Westerloo, de Naeyer, de Perceval, Dequesne, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, de Steenhault, de T'Serclaes, Frère-Orban, Goblet, Jacques, Julliot, Lambin, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Lejeune, Lesoinne, Loos, Maertens, Magherman, Malou, Manilius, Mascart, Matthieu, Mercier, Moreau, Osy et Delehaye.


M. le président. - L'ordre du jour appelle la discussion sur le projet de loi relatif à la surveillance des fabriques de sucre de betterave Le rapport sera distribué ce soir. La discussion aura lieu demain.


- M. Thienpont demande un congé de quelques jours pour affaire de famille.

- Accordé.

La séance est levée à 4 heures.