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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 3 juin 1858

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1857-1858)

(page 1073) (Présidence de M. Orts, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Crombez procède à l'appel nominal a trois heures.

M. Vander Stichelen donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Crombez présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.

« Le conseil communal de Merxplas demande la construction de la section du canal de la Campine comprise entre Turnhout et Anvers. »

« Même demande du conseil communal de Brecht et des membres du conseil communal de Westmalle. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« L'administration communale de Tilly prie la Chambre d'accorder au sieur Delstanche la concession du chemin de fer d'Erquelinnes à Maestricht. »

- Même renvoi.


« Des habitants du canton de Nevele demandent que le canal de Deynze à Schipdonck soit ouvert à la navigation. »

- Même renvoi.


« Les membres du conseil communal d'Ath prient la Chambre de voter le crédit nécessaire pour rendre la navigation sur la Dendre régulière et permanente. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à 1 exécution de divers travaux d'utilité publique.


« Le sieur Prosper-Maximilien-Dieudonné Barella, graveur à Louvain, né dans cette ville, demande la grande naturalisation. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


« Le sieur Weinaert réclame l'intervention de la Chambre pour que les personnes qui ont reçu la médaille de Sainte-Hélène se conforment au règlement sur le port de cette décoration. »

- Renvoi à la commission des pétitions.

Motion d’ordre

M. J. Jouret. - Les trois premiers objets à l'ordre du jour, ne devant, selon toute apparence, donner lieu à aucune espèce de discussion, et la question des péages sur le canal de Charleroi, devant faire l'objet d'observations qui, peut-être, prendront une partie de la séance, je proposerai à la Chambre, par motion d'ordre, d'aborder immédiatement ce dernier objet. De cette manière la discussion à laquelle il donnera lieu ne sera pas scindée, et il n'en serait pas ainsi si l'on commençait cette discussion à la fin de la séance.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je demande que l'ordre du jour soit suivi. J'attends le vote d'un crédit, qui ne demandera pas beaucoup de temps à la Chambre.

M. le président. - On peut concilier les deux demandes en abordant immédiatement les projets de loi et en postposant les rapports de pétitions. (Adhésion.)

Projet de loi allouant un crédit supplémentaire au budget du ministère de la justice

Vote des articles et vote sur l’ensemble

Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, la Chambre passe à la délibération sur les articles.

« Art. 1er. Il est ouvert au département de la justice un crédit supplémentaire d'un million de francs, à titre d'avance pour l'exercice courant.

« Cette somme sera ajoutée à celle qui est portée à l'article 60, chapitre X, du budget du département de la justice pour l'exercice 1858. »

- Adopté.


« Art. 2. Ce crédit sera affecté à poursuivre, dans les prisons, le travail pour l'exportation. »

- Adopté.


« Art. 3. Une somme d'un million de francs sera portée au budget des voies et moyens de 1858. »

- Adopté.


« Art. 4. Il sera rendu compte des opérations aux Chambres législatives dans la session 1858-1859. »

- Adopté.


Il est procédé au vote, par appel nominal, sur l'ensemble du projet, qui est adopté à l'unanimité des 71 membres présents.

Ces membres sont : MM. Lange, Laubry, Ch. Lebeau, J. Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Magherman Mascart, Moncheur, Moreau, Muller, Nélis, Neyt, Notelteirs, Orban, Pierre, Pirson, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Saeyman, Savart, Tack, Tesch, Thiéfry, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom, Vander Donckt, Vander Stichelen, Van Overloop, Van Renynghe, Vervoort, Veydt, Wala, Allard, Crombez, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Bronckart, H. de Brouckere, Dechentinnes, de Haerne, Deliége, de Luesemans, de Mérode-Westerloo, de Muelenaere, de Naeyer, de Perceval, de Renesse, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, de Smedt, de Terbecq, de Vrière, H. Dumortier, d'Ursel, Frère-Orban, Frison, Goblet, Godin, Grosfils, Jacquemyns, Janssens, J. Jouret, M. Jouret, Julliot et Orts.

Projet de loi ouvrant des crédits supplémentaires au budget du ministère des travaux publics

Vote des articles et vote sur l’ensemble

Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, on passe aux articles.

« Art. 1er. Le crédit de quatre millions cinq cent mille francs (fr. 4,500,000), ouvert au département des travaux publics, par l'article 8, n° 1°, de la loi du 20 décembre 1851, pour le prolongement, jusqu'à Anvers, du canal de jonction de la Meuse a l'Escaut, est augmenté de cent dix mille francs (fr. 110,000.) »

- Adopté.


« Art. 2. Le crédit de deux millions six cent cinquante mille francs (fr. 2,650,000) ouvert au département, par l'article 8., n°3° de la loi du 20 décembre 1851, pour la construction d’un canal destiné à mettre la ville de Hasselt et le Demer en communication avec la ligne de jonction de la Meuse à l'Escaut, est augmenté de quatre cent cinquante mille francs (fr. 450,000). »

- Adopté.


« Art. 3. Le crédit de trois cent mille francs (fr. 300,000) ouvert, au même département, pat l'article premier, n°3° de la loi du 7 juin 1855, pour l'élargissement et l'approfondissement de la première section des canaux de la Campine, et pour l’élargissement de la tête d'écluse de Bocholt, est augmenté de cinquante mille francs (fr. 50,000). »

- Adopté.


« Art. 4. Ces crédits seront couverts au moyen d'une émission de bons du trésor. »

- Adopté.


Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi.

Le projet de loi est adopté à l'unanimité des 68 membres qui ont répondu à l'appel nominal.

Ce sont : MM. Lange, Laubry, J. Lebeau, Lelièvre, Lesoinne, Loos, Magherman, Moncheur, Moreau, Muller, Nélis, Notelteirs, Orban, Pierre, Pirson, Rodenbach, Rogier, Sabatier, Saeyman, Savart, Tack, Tesch, Vanden Branden de Reeth, E. Vandenpeereboom. Vander Donckt, Vander Stichelen, Van Renynghe, Vervoort, Veydt, Wala, Allard, Coppieters ’t Wallant, Crombez, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Bronckart, H de Brouckere, Dechentinnes, de Haerne, Deliége, de Luesemans. de Mérode-Westerloo, de Muelenaere, de Naeyer, de Perceval, de Renesse, de Ruddere de Ter Lokeren, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Vrière, H. Dumortier, d’Ursel, Frère-Orban, Frison, Goblet, Godin, Grosfils, Jacquemyns, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Thiéfry, Neyt et Orts.

Projet de loi érigeant la commune de Vieux-Turnhout

Dépôt

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau un projet de loi ayant pour objet d'ériger la commune du Vieux-Turnhout.

- Ce projet de loi est renvoyé à l'examen d'une commission spéciale qui sera nommée par le bureau.

Proposition de loi relative aux péages sur le canal de Charleroi

Discussion générale

M. le président. - La section centrale demande à pouvoir ajourner, jusqu'à la session prochaine, l'examen de la proposition de loi dont il s'agit.

M. J. Jouret. - Messieurs, en prenant la parole, pour demander, que, contrairement aux conclusions du rapport de la section centrale, la Chambre décide qu'il sera passé outre à la discussion du projet de loi.

J'ai presque la conviction de l'inutilité des efforts que mes collègues et moi pourrions faire pour atteindre ce but.

Si nous nous présentions à la Chambre, comme nous l'aurions fait si la section centrale avait été en nombre, avec un rapport favorable de cette section, l'attitude que le gouvernement a prise dans cette affaire me ferait craindre d'obtenir bien difficilement la discussion immédiate.

(page 1074) Maintenant que l’absence forcée d'un membre de la section centrale nous fait venir devant la Chambre avec une proposition d'ajournement, vous comprenez, messieurs, qu'il nous reste bien moins d'espoir encore.

Cependant, messieurs, il est de mon devoir d'insister et de déclarer à la Chambre que je suis prêt à discuter et que mes amis le sont également, bien entendu après que la Chambre aurait été mise en possession d'un rapport de la section centrale sur la question du fond, si la Chambre prenait cette résolution.

Messieurs il y a dans ce débat quelque chose de vraiment extraordinaire. La Chambre le sait, notre proposition est simple et claire : nous demandons qu'on fasse disparaître un péage différentiel qui n'a plus de raison d’être et qui, par conséquent, constitue une véritable injustice.

On ne peut le méconnaître, c’est là une affaire toute spéciale, et quelles que soient les proportions qu’on veuille donner au débat, il est certain que toujours la question spéciale, la question que nous avons proposé à la Chambre de décider, devra être abordée et résolue dans tous les cas possibles.

En effet, messieurs de ce que d’autres intérêts, fort respectables, je le reconnais, et auxquels nous ne sommes pas étrangers nous-même, tâchent de prévaloir à propos de la proposition dont nous avons pris l’initiative, il ne s'ensuit pas que notre proposition cesse d'être fondée, de ce que les marchands de charbon et les bateliers de Bruxelles demandent avec infiniment de raison que les péages soient réduits de 75 au moins de 50 p. c, si l'on ne veut pas dans un temps très prochain, voir toute navigation anéantie sur le canal, s'ensuit-il que le péage de 2 fr. ou de toute autre somme pour 9 lieues de parcours comme pour 15 soit parfaitement logique et juste ? Il est bien évident que non.

Mais je me trompe, M. le ministre des finances nous a dit cela d'une manière formelle, dans la réponse qu'il a faite à l'honorable président, rapporteur de la section centrale, dans l'une de nos dernières séances, réponse consignée au rapport de la section centrale.

Voici les paroles de M. le minière des finances : « L'on ne peut donner, avec justice, une solution isolée à cette question, parce que d'autres sont dans des conditions analogues à ceux que la proposition a en vue et que vous ne vous en occupez pas. Vous voulez supprimer une situation qui subsiste depuis fort longtemps et qui a créé certaine intérêts. »

Messieurs, nous avons examiné la question avec toute l'attention imaginable et nous pouvons donner l’assurance à la Chambre que de ces questions parfaitement analogues, le gouvernement n’en indiquera pas d’ici au moment où il donnera les renseignements demandés. Des questions analogues à celles que nous posons, des injustices semblables, le gouvernement n’en indiquera pas une seule, nous en avons la ferme persuasion.

M. le ministre des finances a ajouté à la même occasion quelque chose de bien plus grave ; il a dit :

« Les intérêts que vous voulez compromettre ont également le droit de se défendre et d'être entendus. »

De manière qu'il y aurait, s'il faut en croire M. le ministre des finances, dans cette question, des intérêts que nous voulons compromettre, auxquels nous voulons dénier le droit de se défendre, et être entendus.

Il me semble que dans les préoccupations auxquelles le ministre était en proie quand il voulait à toute force éloigner la discussion, il n'a pas tenu compte de la manière dont j'ai posé la question dans les développements que j'ai présentés à la Chambre. Je ne crois rien dire de trop fort en disant que M. le ministre n'y a pas fait la moindre attention.

Voici ce que j'ai dit :

« Il s’agit d’une seule voie navigable, deux bassins y abordant. On demande que leurs transports payent une taxe proportionnelle au parcours qu’ils effectuent ; c’est clair et logique.

« Il me semble que la justice et la logique exigent que l’on commence par donner satisfaction à nos justes doléances, et si, ensuite, une réforme générale de notre système des péages est réellement praticable, le Centre s’y conformera de grand cœur au même titre que toutes les autres parties intéressées du pays. »

Il n’y a là aucune intention de compromettre le moins du monde les intérêts de qui que ce soit.

Si M. le ministre avait lu les développements que j’ai eu l’honneur de présenter à la Chambre, il n’aurait pas dit que nous voulions compromettre les intérêts d’autres bassins que le nôtre.

Voici ce que je disais en finissant :

« Messieurs, il y a quelques jours à peine que, dans une requête présentée à la Chambre, des négociants en chabons et propriétaires de bateaux à Bruxelles, ont demandé une nouvelle réduction des péages sur le canal de Charleroi, en général.

« Cette requête a été renvoyée à la commission permanente d'industrie, qui, par l’organe de l’honorable M. Sabatier, a fait un rapport à la Chambre et qui va être discuté. Les intéressés producteurs du Centre et consommateurs ne peuvent que donner leur adhésion la plus complète aux conclusions de ce rapport. Plus que qui que ce soit au monde, ils ont intérêt à ce que les péages soient aussi bas que possible sur le canal de Charleroi qui est la voie la plus importante qu’ils possèdent, les uns pour l’écoulement de leurs produits et les autres pour les recevoir à bon marché. Seulement, quelle que puisse être la réduction de ces péages, ils demanderont toujours. avec autant de justice que de raison, que l'on fasse disparaître la surtaxe inique dont ils souffrent depuis si longtemps, et qu'ils soient enfin admis à ne payer que conformément aux distances parcourues. »

Eh bien, messieurs, vous comprenez, à la lecture du ce passage des développements que j'ai présentés, que nous ne voulons porter atteinte à aucun intérêt ; si des intérêts quelconques pouvaient être compromis, ce ne pourraient être que les intérêts du bassin de Charleroi. des négociants et des bateliers du canal ; et déjà dans la position que j’ai prise dans les développements de ma proposition, j'ai appuyé ces intérêts, loin de les exclure et de vouloir leur refuser le droit de se défendre, d'être entendus.

Un peu plus bas, à la même occasion, M. le ministre des finances a dit que la question a fait l'objet d'une proposition de M. de Steenhault, proposition qui n'a pas eu de suite. La Chambre se rappellera que lors de la discussion du premier budget des voies et moyens, j'ai dit que nous attendions que le gouvernement eût manifesté son intention relativement à cette question, et que si elle n’était pas favorable je reprendrais le projet de M. de Steenhault et qu'usant de mon droit d'initiative, je le représenterais à la Chambre.

M. le ministre a dit que cette proposition n'a pas eu de suite. Il eût été difficile qu'il en fût autrement ; le gouvernement nous a suscité une foule d’embarras ; interpellé trois ou quatre fois, tantôt il nous a promis une réponse, tantôt il a répondu qu’il lui était impossible d’en donner ; enfin c'est lorsque le président de la section centrale, qui en faisait en quelque sorte une question d'amour-propre, a interpellé le gouvernement en dernier lieu, que le ministre a dit que le gouvernement avait décidé que la question serait renvoyée à une commission. On sait ce que cela signifie. Renvoyer une question aux limbes d'une commission, c’est évidemment dire qu’on ne veut pas s'en occuper, qu'on la renvoie aux calendes grecques.

Messieurs, je ferai une observation à ce sujet Je concevrais la conduite du gouvernement s'il était certain qu'il n'y a dans cette question qu'une diminution inévitable de ressources pour le trésor : les préoccupations, même exagérées, que font naître les intérêts du trésor sont une chose extrêmement naturelle chez un ministre des finances, et si j’étais certain que ma proposition pût avoir pour effet de diminuer les ressources de l'Etat, je partagerais certainement cette préoccupation. Mais, messieurs quand nous avons signalé le caractère d'urgence, au point de vue du trésor, de la mesure que nous avons proposée, quand nous avons prouvé (car ce point a été prouvé pour tout le monde, pour ceux dont nous voulons compromettre les intérêts, que nous ne voulons pas entendre et auxquels nous refusons de rendre justice, selon M. le ministre des finances) quand nous avons prouvé, dis-je , que les chemins concédés de Charleroi à Louvain, de Mous à Wavre et de Bruxelles et de Dendre-et-Waes, font au chemin de fer de l'Etat, une concurrence si désastreuse que, dans un temps assez rapproché, les transports sur ces voies de communication seront complétement perdues pour l’Etat, j'ai quelque peine, je l'avoue, à comprendre la sécurité et l’indifférence du gouvernement, bien moins son hostilité.

Qu’arrivera-t il ?

Il arrivera, dans un temps prochain, ce qui est arrivé en 1849. A cette époque, chacun le sait, c'est en quelque sorte contraint qu'un premier ou plutôt un second dégrèvement a été accordé sur le canal de Charleroi .

Eh bien, nous verrons se reproduire le même fait. Vous prétendez que le batelage est florissant sur le canal de Charleroi, que la navigation n’y laisse rien à désirer ; que tout s’y passe pour le mieux. Mais, messieurs, un pareil état de choses n’est nullement un indice de prospérité.

C’est une chose très difficile à modifier que les habitudes existant sur un canal, la navigation souffrira longtemps sans qu’on s’en aperçoive beaucoup : mais enfin elle finira par succomber et vous perdrez les produits que vous procure cette voie de communication. Qu’arrivera-t-il alors ? Vous devrez encore une fois accorder un dégrèvement beaucoup plus considérable même que celui que nous demandons, vous perdre toute la bonne grâce de la mesure, et personne alors ne vous saura gré de l’avoir prise.

Pour finir ces courtes observations, je répète, messieurs, que mes amis et moi, nous sommes prêts à discuter, si la Chambre décide qu’il en sera ainsi, après toutefois que la question aura été renvoyée aux sections pour y être l’objet d’un examen approfondi, qu’un rapport aura été fait à la Chambre. Que si la Chambre, paralysée dans ses bonnes dispositions par l’attitude que le gouvernement a prise, et croyant n’être pas suffisamment informée, se décide à accepter les conclusions de la section centrale, et reporte l’examen de cette importante affaire à la session prochaine, je crois devoir prévenir le gouvernement que, soit qu’il ait fourni les renseignements demandés et promis, soit qu’il ne l’ait pas fait, je viendra à la charge aussitôt que possible à la prochaine session et nous continuerons, mes amis et moi, à faire tous nos efforts pour qu’il soit fait droit sur cette question de justice et de réparation.

Messieurs, j’en ai la profonde conviction, cette question finira par prévaloir comme prévaut, à la longue, tout ce qui est juste et vrai.

(page 1075) M. H. de Brouckere. - Messieurs, je comprends très facilement les efforts que fait l'honorable M. Jouret, dans l’intérêt de la proposition qu'il a présentée à la Chambre ; mais vous aurez pu remarquer que, dès le début de son discours, il a en quelque sorte reconnu que la Chambre, dans la position qui lui est faite, aurait beaucoup de peine à passer outre à la discussion. Et en effet, je n'hésite pas à dire, moi, qu'il est impossible qu'une discussion soit commencée aujourd’hui.

La section centrale, chargée d'examiner la proposition de l'honorable M. Jouret, a demandé des renseignements au gouvernement. Le gouvernement a déclaré qu'il n'était pas à même de donner ces renseignements aujourd’hui, qu'il s'occuperait du travail nécessaire et que pour la session prochaine, nous aurions les renseignements.

Que pouvait faire la section central' ? Elle ne pouvait faire autre chose que ce qu’elle a fait. A l’unanimité elle vous propose l'ajournement de la proposition à la session prochaine. Comment voulez-vous que la Chambre discute en l'absence de renseignements que la section centrale croit indispensables, et même en l'absence de tout rapport ? Cela est de toute impossibilité.

M. J. Jouret. - Je n'ai pas demandé cela.

M. H. de Brouckere. - L'honorable M. Jouret me dit qu'il ne demande pas cela.

M. J. Jouret. - J'ai reconnu moi-même que cela était impossible, mais que si la Chambre décidait qu'elle discuterait la proposition, on la renverrait immédiatement à la section centrale qui ferait son rapport.

M. H. de Brouckere. - L'honorable M. Jouret dit qu'on pourrait ne pas discuter aujourd'hui, mais qu'on pourrait inviter la section centrale à faire immédiatement un rapport en l'absence des renseignements qu'elle a demandés au ministre.

Il est impossible que la section centrale fasse un rapport en l'absence de renseignements qu'elle croit indispensables. Vous renverriez la question à la section centrale, qu'elle vous répondrait encore : Je ne puis faire un rapport en connaissance de cause que lorsque j'aurai les renseignements.

Du reste, je suis loin de critiquer la résolution de l'honorable M. Jouret d'appeler votre attention sur cette question au début de la session prochaine. Contrairement à ce qu'il a dit, je suis convaincu que le gouvernement mettra tout l'empressement possible à faire examiner la question à fond et que dans le courant de la session prochaine, nous pourrons prendre une résolution sur la proposition de l'honorable M. Jouret.

J’appuie donc la proposition d'ajournement, qui doit être infailliblement acceptée.

M. Sabatier. - Je regrette plus encore que l'honorable M. Jouret, que la discussion du projet de loi dont il est l'auteur ne puisse pas être utilement introduite dans cette session, attendu que l’ajournement proposé par la section centrale implique aussi l'ajournement de la discussion des demandes de dégrèvement de péage sur tout le parcours du canal de Charleroi ; mais je ne partage pas du tout l'avis de l'honorable membre sur la possibilité de considérer la position du Centre comme exceptionnelle et de discuter isolément le projet de loi qui nous occupe. Une explication à ce sujet me paraît même indispensable.

La chambre voudra bien se rappeler que sur la proposition de l'honorable M. Henri de Brouckere, la discussion sur les demandes de dégrèvement de péage émanant du bassin de Charleroi, ainsi que des propriétaires d bateaux, bateliers et marchands de charbon de Bruxelles, a été ajournée à la discussion du projet de loi de l'honorable M. Jouret. Ces demandes ont même donné lieu de la part de la commission d'industrie à un rapport favorable. Il est très évident que si cet ajournement a été prononcé, c'est que la Chambre comprenait que les deux questions, celle du Centre et celle de Charleroi, étaient connexes.

M. le ministre des travaux publics partagea cet avis et récemment encore M. le ministre des finances l'a exprimé formellement. S'il en devait être autrement, mes collègues de Charleroi et moi nous aurions une chose toute simple à faire ; ce serait de déposer à notre tour un projet de loi qui nous donne satisfaction. Jusqu'à présent j'ai toujours considéré qu’il était dans les intentions de la Chambre que les questions de péage du canal de Charleroi soient discutées simultanément et je m'en tiendrai là sur ce point, en appelant de tous mes vœux le moment où nous pourrons faire prévaloir les justes réclamations que le bassin de Charleroi n'est que trop en droit de formuler.

Le moment de cette discussion n'étant pas venu, puisque la Chambre paraît disposée à entrer dans les voies de la section centrale, je crois inutile de suivre l'honorable M. Jouret dans toute son argumentation. Je ferai seulement remarquer que la position du Centre, qu'il croit être exceptionnelle, est celle par exemple du chemin de fer de Mons à Manage ; sur cette ligne les prix de transport ont été établis d'une manière uniforme à la demande même des exploitants qui viennent réclamer aujourd'hui contre l’uniformité des péages du canal de Charleroi. Ainsi ce prix est le même, quelle que soit la station de départ vers Mons ou vers Manage.

Quant aux canaux mêmes, il y a un exemple frappant à citer. C'est le canal de Louvain, qui perçoit la même taxe quel que soit le lieu de départ ; c'est aussi le canal d’Antoing, sur lequel le péage est resté établi sur le même pied que lorsque les transports devaient s'effectuer en transit par la France. Enfin, sur la Dendre, le péage est le même, que l'on parte d'Ath ou en deçà de Lessines.

Je n'entrerai pas dans d'autres détails et attendrai impatiemment la discussion qui nous est promise pour le commencement de la prochaine session.

M. J. Jouret. - Je demande à faire une simple observation en réponse à ce qu’a dit l’honorable M. H. de Brouckere.

L'honorable M. de Brouckere a dit que si le projet était renvoyé en section centrale, elle persisterait dans la pro position d’ajournement. C'est une erreur. L'honorable M. de Naeyer, qui fait partie de la section centrale, a été empêché par la maladie d'un membre de sa famille, d’assister à la réunion de cette section. Sans cela, celle-ci eût été en majorité pour la voter et si elle était renvoyée, loin que la section centrale dû persister dans les mêmes idées, il est certain qu'elle se prononcerait pour la discussion.

Quant à ce qu'a dit l'honorable M. Sabatier, je me permets de lui faire observer que nous ne nous opposons en aucune espèce de manière à ce qu’il soit fait droit aux réclamations de Charleroi et à celles des marchands de charbons et des bateliers, qui sont plus considérables que les nôtres.

Et comment nous y opposerions-nous ? Nous n'avons qu'un intérêt, c'est que le dégrèvement soit le plus large possible.

Un membre. - Il ne faut donc pas vous y opposer.

M. J. Jouret. - Ai-je dit un seul mot qui pût faire croire que je m'opposais au dégrèvement que l'on réclame ? Dans les développements à l'appui de ma proposition, se trouve-t-il une seule observation qui puisse faire croire que je m'oppose à ce qu'il soit fait droit à ces réclamations ?

Je dis ceci : c'est que notre proposition est une proposition toute spéciale. Il s'agit de faire droit à une réclamation pour un cas spécial qui devra être pesé, discuté et résolu dans toutes les hypothèses. Si cette réclamation est fondée, quel mal y a-t-il que la Chambre fasse justice à cet égard, alors que cette injustice existe depuis nombre d'années, non pas au détriment des producteurs de houille du Centre, maïs au détriment des consommateurs de Bruxelles et des deux Flandres. Si dans tous les cas vous devez faire justice, si quand on viendra avec un projet de dégrèvement générai, vous devez établir le péage proportionnel sur le canal de Charleroi, je demande quelle injustice il y aurait à établir ce péage par un projet de loi spécial, que tout le monde reconnaît fondé en équité.

Je voudrais qu'on m'expliquât cela ; mais c'est ce qu'on ne fera pas.

Je crains fort qu'en présence du rapport de la section centrale qui conclut à l'ajournement, tous les efforts que nous pourrions faire ne soient parfaitement inutiles. Mais j'ai dû, en acquit de mon devoir, protester contre les obstacles qu'on nous oppose, et dire à la Chambre, comme j'ai l’honneur de le faire, que nous continuons à faire tous nos efforts pour parvenir à les faire lever.

M. de Naeyer, rapporteur. - Je pense avec plusieurs honorables membres qui viennent de prendre la parole, que toute discussion est impossible pour le moment, puisque nous ne sommes pas même saisis d'un rapport de la section centrale sur la question qui devrait être discutée.

Je crois, d’ailleurs, que cette question n’a rien à perdre à être examinée de près. J’invite le gouvernement à en faire l’objet de ses investigations les plus sérieuses et à constituer, dans le plus bref délai possible, la commission qui lui paraît encore nécessaire, malgré toutes les études qui ont déjà été faites.

Plus la question sera élucidée, plus il sera évident pour tout le monde qu'il s'agit ici de poser un acte de justice. Cette considération seule m'a déterminé à m'associer à une proposition qui n'intéresse pas directement l'arrondissement qui m'a fait l'honneur de m'envoyer dans cette enceinte.

J'«jouterai que l'ajournement proposé par la section centrale porte également sur la question de connexité soulevée par l'honorable M. Sabatier.

A cet égard je me contenterai de dire, pour le moment, que je ne partage en aucune manière l'opinion énoncée par cet honorable membre. Suivant moi, la connexité dont il a parlé n'existe pas, parce que la réduction réclamée par l'honorable M. Jouret s'appuie sur des motifs tout particuliers ; elle a pour objet d'abolir une injustice d'un caractère tout spécial, il s'agit de faire cesser une taxe différentielle, perçue à raison des lieux de provenance, c'est là une anomalie et une iniquité dont il n'existe d'exemple sur aucune autre voie navigable faisant partie du domaine public de l'Etat.

Vous avez, messieurs, supprimé les droits différentiels dans notre régime douanier ; il serait pas trop absurde de les maintenir dans notre régime économique intérieur, car c'est principalement en vue des relations des Belges entre eux que la Constitution a proclamé l'égalité devant la loi.

L'honorable M. Sabatier a cité, à l'appui de la thèse contraire, le chemin de fer de Mons à Manage. D'abord je ferai remarquer que c'est là un chemin de f r concède et exploité jusqu’ici par une compagnie, et par conséquent la comparaison n'est pas juste.

Ensuite, il y a, dans le tarif différentiel qui régit ce chemin de fer, des compensations à ceux qui sont lésés pour les transports dans telle direction, sont favorisés pour les transports dans la direction opposée. J’ajouterai que ce régime est accepté par les intéressés et ne soulève pas de réclamations ; enfin, veuillez remarquer qu'il existe une différence (page 1076) essentielle entre les péages perçus sur les canaux et le tarif réglant les prix des transports sur les chemins ; dans ce dernier cas, il s'agit, à proprement parler, de la rémunération de services rendus par l'industrie voiturière, qui doit nécessairement plier aux circonstances pour augmenter sa clientèle. ( Interruption.) Sur un canal, le gouvernement n'est pas voiturier ; il laisse voiturer, voilà tout. D'ailleurs le chemin de fer de Mons à Manage vient de passer dans les mains de l’Etat, et il n'est pas décidé que l'état de choses actuel sera maintenu.

Quant au canal de l.ouvain, dont M. Sabatier a également parlé, ce canal est une propriété communale et n'a rien de commun avec le domaine public, appartenant à l'Etat.

Je pourrais entrer dans plus de développements sur cette question, je tenais seulement à signaler l'erreur où est tombé M. Sabatier quant à la connexité. Il s'agit d'une question ayant un caractère tout spécial, le gouvernement peut le faire examiner séparément ou avec d'autres, mais il ne faut pas que deux choses différentes deviennent une seule et même chose.

M. Sabatier. - En présence des observations de M. de Naeyer, je dois revenir à ce que j'ai dit tout à l'heure. La Chambre en ajournant il y a trois mois les questions des péages, a décidé implicitement que ces questions étaient connexes, du moins en ce qui concerne le canal de Charleroi. La discussion a été alors remise précisément parce que l'honorable M. Jouret venait de déposer son projet de loi.

Du reste, messieurs, la chose et assez indifférente en elle-même, puisque, je le répète, j'aurai toujours la ressource d'user de mon initiative parlementaire pour déposer à mon tour un projet de loi qui aurait pour objet un dégrèvement de péage sur le parcours entier du canal.

Toute autre discussion serait en ce moment superflue.

Décision d'ajournement

- L'ajournement à la session prochaine est mis aux voix et adopté.

L» Chambre adopte également la seconde proposition de la section centrale, qui a pour objet le renvoi à MM les ministres des finances et des travaux publics, de la pétition des propriétaires, industriels et négociants de Charleroi, qui présentent des observations contre la réduction partielle des péages sur le canal de cette ville à Bruxelles.

Rapports de pétitions

M. Tack, rapporteur. - Par pétition datée du 14 avril 1858, plusieurs habitants des communes de Bavichove, Hulste, Oyghem et Cuerne demandent la suppression du droit perçu sur les voitures, sur les chevaux et sur le bétail, au passage du pont de la Lys à Haerelbeke.

Les pétitionnaires tous industriels, négociants et cultivatsurs, exposent à la Chambre que depuis la date de la construction de la route pavée qui relie entre elles les deux routes de première classe de Courtrai à Bruges et de Courtrai à Gand, ils sont astreints, lorsqu'ils quittent leurs communes respectives, avec leurs chevaux ou avec leur bétail, pour suivre, la direction de Gand, de Courtrai ou se rendre vers l'Escaut, d'acquitter, pour un parcours de deux kilomètres demi, trois péages, dont l'un consiste dans la perception qui se fait au pont d'Haerelbeke sur la Lys et les deux autres dans le prélèvement de deux droits de barrières.

Les pétitionnaires entrent dans certains développements rétrospectifs pour démontrer que, si autrefois la ville d'Haerelbeke a pu percevoir une taxe au passage du pont, à charge de l'entretenir, les circonstances étant venues à changer, le gouvernement n'aurait point dû continuer la perception du droit.

La perception d'un triple péage pour des distances aussi rapprochées que celles qu'ils signalent, paraît aux pétitionnaires entachée d'illégalité. Sans s’appesantir sur cette question de droit, on est fondé à dire que la perception qui s'effectue au pont d'Haerelbeke n'est pas en opposition formelle avec le texte de la loi du 10 mars 1838 sur les barrières, au moins elle est peu en harmonie avec son esprit. La loi du 10 mars 1838 exige que les poteaux des barrières soient espacés de 5,000 mètres, sauf la tolérance connue de 1,000 mètres, en ce qui touche le placement des poteaux. Qu'a voulu par-là le législateur de 1858 ? Qu'en fait de barrières il ne fût point établi de taxes multiples dans un petit rayon, de manière à faire peser la charge de l'impôt sur quelques-uns, alors que d'autres en seraient exempts.

C'est évidemment aller à l’encontre de ce but que d'ajouter à ces taxes des péages onéreux sur des ponts qui font, en quelque sorte, partie intégrante des routes.

Ce n’est pas non plus sans fondement que les pétitionnaires voient quelque chose de très anomal dans la circonstance que les habitants des communes circonvoisines de la ville d’Haerelbeke sont seuls obligés d'acquitter le péage, tandis que, par une espèce de faveur, par un véritable privilège, les habitants de la ville d’Haerebeke sont parvenus à s’en affranchir, grâce à des stipulations particulières faites jadis entre l'administration communale et le gouvernement ; ainsi tous les transports en destination d Haerelbeke, ou dont le point de départ est à Haerelbeke, échappent à l'impôt.

Les pétitionnaires font encore observer que la recette brute qui est de 900 fr. est presque entièrement absorbée par les frais de perception ; et en effet le traitement du préposé à la recette est de 750 fr., ce qui équivaut à plus de 80 p. c. du droit perçu ; un pareille taxe est condamnée par ses conséquences.

L'impôt est au surplus onéreux sous plus d'un rapoort : d'abord parce qu'il retombe sur quelques-uns, ensuite parce qu'il frappe non seulement sur les véhicules et les attelages, mais aussi sur le gros et le menu bétail.

Ainsi, il y a là préjudice pour l'agriculture et pour le commerce et point de profit pour le trésor. On peut même soutenir qu'il y a perte pour le fisc ; aujourd'hui, on évite le passage du pont d Haerelbeke, on le pratique aussi rarement que possible : qu'on abolisse le péage et aussitôt la circulation sur les routes de l'Etat s'accroîtra et avec elle la perception des taxes de barrière. Une dernière considération à faire valoir, c'est que le péage au pont d'Haerelbeke est le seul de cette nature qui existe encore en Flandre.

Toutes ces raisons ont paru fondées à votre commission, s'il était possible de soutenir qu’en strict droit le péage pourrait être maintenu, d’autre part, l'équité comme l'intérêt du commerce et de l'agriculture réclament son abolition.

Déjà la question a été soulevée dans cette enceinte et comme l'honorable ministre des travaux publics a déclaré qu'il en ferait une étude approfondie et qu'elle ferait l'objet de sa sollicitude, votre commission se borne à vous proposer de lui renvoyer la demandé des pétitionnaires.

M. le ministre des travaux publics (M. Partoes). - Messieurs, l'honorable rapporteur vient de nous entretenir d’un péage établi sur le pont d’Harelbeke.

Les communes qui se servent de ce pont ont adressé au gouvernement des requêtes pour demander l’abolition de ce péage, qui faisait, en effet, une exception dans la matière. J'ai l'honneur de déclarer que le gouvernement a reconnu que la réclamation était fondée, et des mesures ont été prises pour y faire droit. J'espère que d'ici à peu de temps le péage pourra disparaître.

M. de Haerne. - Après la déclaration que vient de faire M. le ministre des travaux publics, je renonce à la parole.

M. H. Dumortier. - Je remercie également M. le ministre des travaux publics de la bienveillance avec laquelle il a examiné cette affaire. Si je demande la parole, ce n'est que pour ajouter un mot sur une question qui présente de l'analogie avec celle-ci.

En quittant la route provinciale de Warcoing à Avelghem, pour aller à la commune d'Escanaffles, il faut payer, sur une distance de trois kilomètres, deux droits de barrière et un droit de péage sur le pont d'Escanaffles.

Le droit de barrière est un droit parfaitement équitable ; ceux qui se servent les routes doivent concourir à les payer ; cependant le législateur n'a pas entendu faire du droit de barrière un impôt extrêmement onéreux ; il a déterminé lui-même une limite dans laquelle un droit de barrière doit être payé.

Or, comme dans l’espèce le droit de barrière se complique d'une question de péage de pont, il en résulte une charge très onéreuse pour les habitants intéressés ainsi que pour l'industrie et l'agriculture.

M. Allard. - Messieurs, je ne comprends pas comment le gouvernement pourrait exempter du payement de droit de pont. La commune a été autorisée à construire un pont moyennant un droit de péage. Le pont a été construit, il y a deux ans. Le gouvernement, ni la législature ne peuvent accorder l'exemption du droit de péage que la commune perçoit sur ce pont.

M. H. Dumortier. - Messieurs, il me semble que l'honorable M. Allard, en revendiquant les droits de la commune d'Escanaffles, a donné un coup d’épée dans l'eau, passez-moi le mot, et qu'il est à côte de la question. Je n'entends pas contester à la commune le droit de percevoir le péage sur le pont. Je signale seulement qu'indépendamment de ce péage, et à la distance d’un kilomètre de chaque côté, il y a un droit de barrière à payer, et je demande au gouvernement d'examiner s'il n'y a pas moyen de combiner ces droits de barrières de telle sorte qu'on n'ait pas à payer trois impôts sur une distance de 3 kilomètres.

M. le président. - Personne ne demandant plus la parole, je mets aux voix les conclusions de la commission, qui sont le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics.

M. Tack, rapporteur. - En présence de la déclaration que vient de faire M. le ministre, en pourrait se borner à déposer la pétition au bureau des renseignements.

- Cette proposition est adoptée.


M. Tack, rapporteur. - Par pétition datée de Lille-St-Hubert, le 17 avril 1858, le conseil communa1 de cette commune demande la construction d'une route de Brée à Lille-St-Hubert par Gerdingen, Rippel, Bochlot et Coutelle.

Les pétitionnaires exposent que la voie de communication dont ils sollicitent la construction constitue l'artère principale du mouvement commercial ente les habitants des cantons de Brée et d'Achel et traverse d'immenses plateaux de terres incultes qui dans un temps peu (page 1077) éloigné seront livrés au défrichement ; que cependant ce chemin est laissé dans l'état d'abandon le plus déplorable, au point d'être impraticable pendant une partie de l'année.

L'administration communale de Lille-St-Hubert offre de céder gratuitement à l'Etat,s’il consent à se charger de la construction de la nouvelle route, les biens communaux qui pourraient être compris dans le tracé.

Votre commission vous propose le renvoi à MM. les ministres des travaux publics et de l'intérieur.

- Adopté.


M. Tack, rapporteur. - « Par deux pétitions datées de Mazy le 6 avril 1858, l'administration communale et plusieurs habitants de cette commune demandent la construction d'un chemin de fer de Louvain à Jemeppe, avec station principale à proximité de Mazy. »

Les pétitionnaires s'attachent à démontrer l'utilité qu'il y aurait à établir une communication directe entre Louvain et la Sambre par la vallée de l’Orneau.

Il y a 27 ans, disent-ils, qu'il fut question du projet de construction d'un canal entre Louvain et Jemeppe ; mais plus tard cette idée fit place au projet d'établissement d'un chemin de fer, dont les études furent ordonnées par un arrêté ministériel du 7 octobre 1843. Dans la pensée des réclamants, la nouvelle voie serait appelée surtout à faciliter le transport des richesses minérales de tout genre, telles que les houilles demi-grasses, les marbres, les minerais de fer, la pierre de taille qui abondent sur les rives de la basse Sambre, ainsi que les bois de construction, les écorces, les produits chimiques et les produits ouvrés, d'une foule d'établissements industriels très importants.

Elle mettrait les industriels de ces contrées en état de lutter avec leurs concurrents des bassins de Liège, du Centre, de Charleroi et de Mons qui ont sur eux l'avantage d'être dotés de nombreuses voies de communication rapides et peu dispendieuses, au moyen desquelles ils se sont assuré des débouchés vers tous les centres importants de consommation.

Votre commission, messieurs, vous propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

M. Lelièvre. - Le chemin énoncé à la pétition a un caractère d'utilité incontestable. Je recommande cet objet à l'attention spéciale de M. le ministre des travaux publics. Il s'agit d’un œuvre dont l'importance est généralement reconnue. J'appuie donc les conclurions de la commission, et je prie M. le ministre de vouloir faire droit aux justes réclamations de nombreuses populations.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.


M. Tack, rapporteur. - Par pétition en date du 21 mars 1858, des propriétaires et habitants à Peer, Houthaelen et Genck, demandent la continuation de la route de Hamont à Peer.

Les pétitionnaires se plaignent de l'isolement complet dans lequel se trouvent les localités situées entre Peer et Genck faute des roues praticables pour les besoins de l'agriculture ; ils supplient la Chambre de faire cesser cet état de choses en ordonnant le prolongement de la route indiquée.

Votre commission propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. Tack, rapporteur. - Par pétition datée de Moen le 28 avril 1838, des habitants de cette commune réclament l'intervention de la Chambre pour que les chemins communaux ne soient ni supprimés ni changés, par les concessionnaires de Bossuyt à Courtrai.

Plusieurs pétitions conçues dans le même sens sont déjà parvenues à la Chambre. Les réclamants font de nouveau connaître les dommages permanents qu'éprouvera l'agriculture dans la commune de Moen par suite de la construction du canal de Bossuyt à Courtrai, si les voies actuelles de communication, connues sous le nom de Meersch-straet et Commine-straet, qui la traversent, ainsi que le pavé de Moen à Saint-Genois ne sont point maintenus ou subissent des déplacements préjudiciables ; ils insistent pour que ces communications soient respectées, comme cela se pratique dans les autres communes par où passe le même canal.

En fait, il n'est point de localité ou le morcellement des propriétés nécessité par la construction du canal de Bossuyt ouvre des conséquences plus fâcheuses au point de vue de l'agriculture que dans la commune de Moen. Partant, il convient autant que passible, de ne pas aggraver encore le mal dont se plaignent les intéressés par la suppression ou le déplacement dommageables des chemins vicinaux de petite ou de grande communication : s'il est possible pour les fermiers qui habitent la commune de Moen de se voir lésés par la réduction forcée que subissent les exploitations qu’ils cultivent, il ne le serait pas moins pour eux d'être privés de routes, dont ils ont un indispensable besoin, et dont la suppression ou le changement de direction les placeraient par continuité dans des conditions d’exploitation plus onéreuses.

L'équité réclame évidemment que le préjudice occasionné soit restreint dans ses plus étroites limites.

Votre commission estime, par conséquent, qu'il y a lieu de renvoyer la demande des habitants de la commune de Moen à M. le ministre des travaux publics, afin qu'il puisse aviser aux moyens dont il peut disposer pour concilier au mieux les divers intérêts qui se trouvent ici en présence.

M. H. Dumortier. - Messieurs, en présence du rapport que vous venez d'entendre, il est impossible de méconnaître ce qu'il y a d’équitable dans la réclamation des habitants de Moen.

Il est rarement arrivé, et cela même de l'aveu des concessionnaires du canal de Bossuyt, qu'une commune ait éprouvé autant de dommages par suite de l'exécution de grands travaux d'utilité publique. Je ne prétends pas toutefois que l'intérêt communal ne doive pas céder devant l'intérêt général ; aussi, mon intention est-elle de ne soutenir ici les réclamations dont il s'agit que dans ce qu'elles peuvent avoir de raisonnable, d'admissible.

Ces réclamations se sont produites d'une manière très vive depuis longtemps à la commission d’enquête, ainsi que par plusieurs pétitions adressées tant au gouvernement qu'à la chambre ; et cependant les travaux du canal de Bossuyt continuent toujours, sans que jusqu'ici les habitants de Moen aient quelque espoir qu'il sera fait droit à leurs réclamations.

M. le ministre des travaux publics (M. Partoes). - Messieurs, il est impossible de conduire un canal sans troubler quelque peu la circulation des chemins vicinaux. Lorsqu'on a fait les travaux préparatoires du canal de Bossuyt, on a établi une enquête, comme c'est l'usage, et il a été reconnu qu’il y avait certains passages qui devaient être maintenus. Je pense qu'on a pourvu aux besoins sérieux des populations. C'était au moment de l’enquête que la réclamation aurait dû se produire ; la commission d'enquête aurait été à même de l'apprécier.

Du reste, la pétition me sera renvoyée, et je ne me refuse pas à en faire l’objet d'un examen attentif.

M. H. Dumortier. - Messieurs, je vois avec plaisir que M. le ministre des travaux publics prend l'engagement d'examiner la réclamation avec la bienveillance qu'il met toujours dans l'appréciation des demandes raisonnables qui lui sont adressées. Je veux seulement rectifier un point de fait : c'est que, contrairement à ce que pense M. le ministre, les réclamations se sont produites, et même avec beaucoup de vivacité, comme je le disais tout à l'heure, à la commission d'enquête et que ces réclamations ont été renouvelées par des pétitions adressées au gouvernement depuis lors.

Il existe une différence radicale entre ce que demandent les habitants de la commune de Moen et ce que la compagnie concessionnaire voudrait accorder. Ces questions ne sont pas tranchées ; on n'a pas pris de mesure définitive, et comme, d'un autre côté, je le répète, les travaux du canal de Bossuyt sont poussés avec une extrême vigueur - je le constate à la louange des entrepreneurs du canal - on comprend que les habitants de la commune de Moen voient avec une certaine crainte continuer l'exécution des travaux, sans qu'ils reçoivent une réponse à leurs nombreuses réclamations.

- Le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics est mis aux voix et prononcé.


M. Tack, rapporteur. - « Par pétition datée d Oisy, le 2 avril 1858, les bourgmestres des communes de Baillamont, Oisy, Bellefontaine, Aile, Grosfays, Laforet, Vresse, Petitfays et Clairière demandent la construction d'une route de Baillamont vers Sedan, par Oisy, Clairière et Aile.

Les pétitionnaires exposent que cette voie de communication, d'un développement de 25 kilomètres, dont ils sollicitent la construction depuis plus de dix ans, procurerait à l'agriculture et au commerce du pays qu'elle traverserait, des avantages considérables, principalement en facilitant le transport de la chaux, si indispensable au défrichement dans le Luxembourg.

Ils ajoutent qu'il existe sur le territoire d'Aile et de Rochault des mines de fer et des carrières d'ardoises, dont l'exploitation est entravée par suite du mauvais état des routes, ce qui met le plus grand obstacle à l'extension de ces industries.

Les pétitionnaires terminent leur requête en suppliant la Chambre de tirer les contrées dont l’administration leur est confiée de l'oubli et de l'isolement dans lesquels ils végètent et de leur accorder à leur tour une part dans les faveurs qui ont servi et servent encore à doter la Belgique de routes qui font sa prospérité et assurent son développement industriel et agricole.

Votre commission, convaincue que toutes les questions qui se rattachent à la création de nouvelles voies de communication méritent un examen attentif, vous propose le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

M. Wala. - Messieurs, j'appuie les conclusions de la commission, et je dois appeler l'attention de M. le ministre des travaux publics sur l'importance de cette route qui est réclamée depuis plusieurs années par le gouvernement provincial qui a fait l'objet d’études préliminaires et dont la nécessité se fait sentir au plus haut degré, à raison, comme le disent parfaitement les pétitionnaires, du développement de l'agriculture, du défrichement des propriétés et de l'exploitation de certaines carrières et de certains produits qui se trouvant a portée.

C'est une partie du pays qui est privée de communications, et je suis persuadé que M. le ministre des travaux publics examinera cette affaire avec sollicitude.

- Le renvoi de la pétition à M. le ministre des travaux publics est mis aux voix et prononcé.

(page 1078) M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Bouguimont, le 26 janvier 1858, le sieur Duroy, ancien préposé des douanes, demande la révision de sa pension.

Le sieur Duroy expose qu'il a toujours servi avec zèle et distinction, qu'il a été atteint d'une infirmité grave, par suite des fatigues de sa profession ; que lors de la liquidation de sa pension en 1857, il n'a obtenu que 224 francs, tandis qu'il croyait avoir droit au maximum ; il demande eu conséquence la révision de sa pension.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des finances.

-Adopté.


M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Genappe, le 5 mars 1858, le sieur Crabs, combattant de la révolution, prie la Chambre de lui faire obtenir la pension dont jouissent les blessés de septembre.

Cette pétition n'étant accompagnée d'aucune pièce venant prouver les allégations du sieur Crabs, votre commission a l'honneur de vous proposer l'ordre du jour.

- Adopté.


M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 18 mars 1858, d'anciens officiers qui ont pris du service en 1830, demandent que, dans la liquidation de leur pension, il puisse être tenu compte du service rempli par eux dans leur dernier grade, et ce au prorata du nombre d'années et de mois passés dans ce grade.

Ces officiers exposent que, répondant à l'appel fait en 1830 au dévouement et au patriotisme des anciens militaires, ils ont pris du service à un âge relativement avancé ; que mis à la retraite par application de la loi qui fixe à 55 ans la limite de l'âge, ils se trouvent placé, pour la fixation de leur pension, dans une position inférieure à ceux qui, entrés plus jeunes dans l'armée, n'ont pas rendu à la patrie les mêmes services qu'eux.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 19 avril 1858, le sieur Laout, ancien militaire pensionné, demande une augmentation de pension.

Le sieur Laout fait valoir qu'outre l'amputation d'un pied qu’il a dû subir par suite d'un accident arrivé au service, une infirmité grave survenue depuis le met dans l'impossibilité de travailler, pour recourir sa mère veuve et infirme.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Frameries, le 17 avril 1858, la veuve André demande un congé provisoire ou du moins une prolongation de congé pour son fils Jean-Baptiste, milicien au premier régiment des carabiniers.

La veuve André expose qu'elle est âgée de 66 ans, malade et sans ressources, qu’elle n'a plus qu'une fille qui est son seul soutien et qu'elle croit que l'article 91 de la loi sur la milice lui est applicable La pétition est appuyée par un certificat de l'autorité communale de Frameries attestant l'état de maladie et d'indigence de la pétitionnaire.

Votre commission a l'honneur devons proposer le renvoi à M. le ministre de la guerre.

- Adopté.


M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Gand, le 17 avril 1858, le sieur Bouxsan, facteur de la poste pensionné, demande un secours.

Le sieur Bouxsan, âgé de 77 ans, atteint d’infirmité grave contractée par suite de fatigue dans l'exercice de ses fonctions, demande une augmentation de pension.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Leefdael, le 20 avril 1858, la veuve du sieur Vandenhoeck, ancien cantonnier sur la route de Tervueren, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une pension ou une gratification.

La pétitionnaire expose que son mari a été pendant 18 ans cantonnier ; que se fondant sur ce qu'il avait toujours versé à la caisse des veuves et orphelins, elle s'est adressée au ministre des travaux publics, pour obtenir une pension ou une gratification, mais que sa demande a été rejetée.

Votre commission n'ayant pas les éléments nécessaires pour apprécier la justesse de cette réclamation a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Adopté.


M. d'Ursel, rapporteur. - Par pétition datée de Malines, le 24 avril 1858, le sieur Lotte, blessé de septembre, demande la pension de 250 fr. dont jouissent quelques décorés de la Croix de fer.

Le sieur Lotte dit que ses titres à l'obtention de la faveur qu'il sollicite sont au ministère de l'intérieur. Votre commission n'ayant aucun renseignement pour les apprécier, a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre de l'intérieur.

- Adopté.


M. le président. - Les autres rapporteurs ne sont pas présents ; la Chambre veut-elle aborder les autres objets ?

- Plusieurs voix : Non ! non ! A demain !

- La séance est levée à 4 heures trois quarts.