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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 14 décembre 1858

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1858-1859)

(âge 225) (Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Vander Stichelen procède à l'appel nominal à 2 heures et demie.

M. de Moor lit le procès-verbal de la séance du 11 décembre.

- La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Vander Stichelen présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Le sieur Félix prie la Chambre de statuer sur sa demande ayant pour objet des dommages-intérêts à raison d'une détention dont il a été l'objet. »

M. de Fré. - Le pétitionnaire est ce cabaretier de Malines, condamné à trois mois de prison, pour avoir avili la religion, en vertu de l'arrêté de 1814, aboli par la Constitution. Au lieu de se pourvoir en cassation, il crut qu'il devait être gracié à l'occasion de la naissance d'un Prince royal ; mais il fut trompé dans son espoir, et le délai passé, il dut subir vingt-six jours de prison. Cette détention a ruiné l'exposant. Je demande donc un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Les membres du conseil communal de Bovigny demandent que la compagnie du Luxembourg construise l'embranchement du chemin de fer de Neufchâteau à Bastogne. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Larue, ancien gendarme, demande une pension, »

- Même renvoi.

« Le sieur Eicherperger, ancien militaire, demande un emploi de garde-frein à l'administration du chemin de fer de l'Etat. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Nives prie la Chambre d'accorder une pension au sieur Robert, ancien militaire. »

- Même renvoi.


« Des habitants de Lierre demandent que M. le ministre de l'intérieur soit invité à se prononcer sur ses intentions relatives aux réclamations qui ont été adressées en faveur de la langue flamande. »

- Même renvoi.


« La veuve Pevenage-Godislabois demande qu'il soit donné suite à la pétition des sauniers, demandant la révision de la loi du 5 janvier 1844, sur le sel.

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des habitants de Fosses demandent que la foire aux chevaux établie dans cette commune, ait lieu sur la place du Chapitre.

- Même renvoi.

M. Lelièvre. - J'appuie la pétition et j'appelle l'attention particulière de la commission sur l'objet auquel elle est relative.


« Le sieur Henri Schlemmers, employé à la société de la Vieille-Montagne, à Liège, né à Coblence (Prusse), demande la naturalisation ordinaire. »

- Renvoi à M. le ministre de la justice.


« M. le ministre de la justice transmet à la Chambre, avec les pièces de l'instruction, la demande du sieur Aerts (Jean-François). »

- Renvoi à la commission des naturalisations.


« M. de Liedekerke, obligé de s'absenter pour affaires, demande un congé. »

-Ce congé est accordé.


« Par dépêche du 14 décembre, M. le ministre de l'intérieur transmet, avec les pièces à l'appui, les procès-verbaux des opérations qui ont eu lieu à Bruxelles, le 13 de ce mois, pour l'élection d'un représentant. »

- Il est procédé au tirage au sort de la commission chargée de vérifier les pouvoirs de M. Louis Goblet. Cette commission se compose de MM. Thiéfry, Mascart, Orban, de Naeyer, Julliot, de Boe et Orts.

Projet de loi allouant un crédit supplémentaire au budget des dépenses de la chambre de 1858

Discussion des articles

Personne ne demandant la parole dans la discussion générale, la Chambre passe à la délibération sur les articles.

Articles 1 à 3

« Art. 1er. Il est ouvert à l'article unique du chapitre III du budget des dotations pour l'exercice 1858, un crédit supplémentaire de soixante-six mille huit cent cinquante-cinq francs soixante et un cent. (fr. 66,855-61), destiné à couvrir les dépenses de la Chambre des représentants, pendant ledit exercice. »

- Adopté.


« Art. 2. Ce crédit sera couvert au moyen des ressources ordinaires de l'exercice 1858. »

- Adopté.


« Art. 3. La présente loi sera obligatoire le lendemain de sa publication. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi qui est adopté à l'unanimité des 71 membres présents.

Ce sont : MM. Grosfils, Jacquemyns, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, J. Lebeau, Lelièvre, Loos, Magherman, Malou, Manilius, Mascart, Moncheur, Moreau, Muller, Neyt, Orban, Orts, Pirmez, Pirson, Rogier, Sabatier, Sayeman, Savart, Tack, Thiéfry, Thienpont, Vanden Branden de Reeth, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom , Vander Donckt, Vander Stichelen, Vermeire, Wala, Allard, Coomans, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, H. de Brouckere, Dechentinnes, de Decker, De Fré, Deliége, de Luesemans, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Ruddere de Te Lokeren, Desmaisières, Desmet, de Terbecq, de Theux, Devaux, de Vrière, Dolez, Dubus, H. Dumortier, Faignart, Frère-Orban, Goblet, Godin et Verhaegen.

Vérification des pouvoirs

Arrondissement de Bruxelles

M. Orts, au nom de la commission de vérification des pouvoirs, fait rapport sur l'élection de M. Louis Goblet, député élu par le collège électoral de l'arrondissement de Bruxelles et propose son admission comme membre de la Chambre des représentants.

- Ces conclusions sont adoptées.

Projet de loi portant le budget des voies et moyens de l’exercice 1859

Discussion du tableau des recettes (II. Péages)

Domaines

M. le président. - La discussion sur l'article Péages continue. La parole est à M. H. de Brouckere.

M. de Brouckere. - Messieurs, j'avais demandé la parole samedi dernier pendant que l'honorable M. J. Jouret prononçait son discours ; mon intention n'était nullement de prendre part à la discussion que ce discours était de nature à soulever ; au contraire, je voulais démontrer à la Chambre que cette discussion était aujourd'hui entièrement inopportune et qu'elle ne pouvait aboutir à aucun résultat. Cette démonstration ne me sera pas difficile.

L'année dernière, l'honorable M. Jouret a soumis à la Chambre une proposition ayant pour objet de faire déclarer qu'à l'avenir le péage sur le canal de Charleroi se payerait à raison du parcours, c'est-à-dire de faire déclarer que les bateaux venant du Centre ne payeraient plus, comme ils le font aujourd'hui, le même péage que ceux qui viennent de Charleroi, mais qu'ils payeraient un péage calculé sur le parcours qu'ils font sur le canal de Charleroi.

Cette proposition, après avoir passé par l'épreuve des sections, arriva à la section centrale. La section centrale, avant de se prononcer, adressa diverses questions à M. le ministre des travaux publics. Le gouvernement déclara qu'il ne pouvait pas répondre à ces questions parce qu'il ne pouvait pas traiter isolément la proposition de l'honorable M. Jouret, qu'elle devait rentrer dans un examen général des tarifs qui existent aujourd'hui sur toutes nos voies navigables. Le gouvernement déclara, en outre, que son intention était de nommer une commission qui serait chargée de cet examen.

(page 226) La section centrale suspendit donc ses travaux ; et depuis, le gouvernement a nommé la commission qu'il avait annoncée. Cette commission vient d'entrer en fonctions. Maintenant, que demande l'honorable M. Jouret ? Il demande que la section centrale, nommée l'année dernière pour examiner sa proposition, et qui a suspendu ses travaux, parce que le gouvernement déclarait ne pas pouvoir répondre aux questions qu'elle lui avait adressées ; il demande, dis-je, que cette section centrale reprenne l'examen de sa proposition.

Mais la chose est absolument impossible. Nous sommes aujourd'hui dans la même position où nous étions l'année dernière, puisque en 1857 la section centrale a déclaré ne pas pouvoir passer outre, sans que le gouvernement eût répondu aux questions qu'elle lui avait posées ; la section centrale ne peut pas plus passer outre aujourd'hui qu'elle ne le pouvait alors. Cela est de toute évidence.

D'un autre côté, c'est à cause de la proposition de M. Jouret que le gouvernement a institué la commission ; et de prime abord on distrairait des questions qu'elle est chargée d'examiner la principale, celle qui a été l'occasion de la création de la commission ! Mieux valait ne pas nommer de commission.

M. de Naeyer, rapporteur. - Ce n'est pas la Chambre qui l'a instituée.

M. de Brouckere. - L'honorable M. Jouret croit aller au-devant de toutes les objections en disant :

Ma proposition est toute simple, il suffit de l'examiner pour la résoudre sans s'occuper des autres questions.

Il n'était pas assis, qu'un honorable contradicteur se levait et démontrait à M. Jouret qu'il se trompait complétement.

Vous prétendez, disait M. Sabatier, que votre proposition est si simple qu'on peut l'envisager isolément ; je déclare que je m'oppose à ce qu'on l'examine ainsi. Vous dites qu'on peut tout d'abord opérer une diminution sur le péage du canal de Charleroi en ce qui concerne le centre ; moi je demande qu'on diminue le péage pour tout le parcours ; après nous verrons.

Si la discussion continue, nous allons entendre des orateurs qui diront : Je veux bien examiner la proposition de M. Jouret, je veux bien examiner aussi la proposition de M. Sabatier, mais si vous diminuez les péages, comme le demande M. Jouret, comme le demande M. Sabatier, alors il faut aussi diminuer les péages des autres voies navigables qui sont surchargées et on vous en indiquera trois ou quatre : il y en a seulement quatre ou cinq qui produisent des revenus, les autres sont des charges pour le trésor.

Elles disent toutes : Il n'y a pas de raison pour que nous payions plus que d'autres.

Vous allez voir surgir toutes les réclamations qui se sont fait jour dans des circonstances que vous n'avez pas perdues de vue.

Je prie l'honorable M. Jouret, je rends hommage à ses efforts, je comprends sa position, je le prie de ne pas insister sur la proposition dont il a saisi la Chambre, car elle ne pourrait pas être admise, quelque effort qu'il fasse, sa persistance n'aboutirait qu'à discuter pendant deux ou trois séances sans résultat possible.

Je crois que la discussion du budget des voies et moyens se prolongera encore quelques jours ; nous allons avoir la question beaucoup plus opportune des postes, de ce qu'on appelle un peu pompeusement selon moi la réforme postale, nous allons examiner la question si souvent soulevée de savoir si on établira un droit uniforme de 10 centimes pour les ports de lettres.

Cette question nous prendra quelques jours.

Si nous ajoutons des questions qui ne peuvent pas être résolues, nous discuterons longtemps, et ce sera d'autant plus fâcheux, que le Sénat est convoqué ; il se réunit aujourd'hui, et il ne serait pas convenable de lui faire attendre, trop longtemps le budget des voies et moyens qu'il doit discuter et voter avant le 1er janvier. J'insiste autant que je puis auprès de M. Jouret pour qu'il renonce aujourd'hui à sa proposition et la renouvelle quand elle pourra amener un résultat.

- M. Louis Goblet est introduit et prête serment.

M. Thiéfry. - Je ne pensais pas prendre la parole à propos du canal de Charleroi ; je me réservais d'exprimer mon opinion dans le sein de la commission ; mais ce qui a été dit à cette tribune, m'oblige à répondre aux observations qui ont été présentées. Je ne crois pas la question inopportune, parce que, pour obtenir le dégrèvement de l'impôt, même le plus injuste, il faut revenir vingt fois à la charge. Il est facile à ceux qui jouissent des avantages auxquels ils n'ont pas droit, de dire : On doit attendre. Mais ceux dont les intérêts sont lésés éprouvent vivement le besoin d'obtenir justice.

La discussion qui a eu lieu n'a point changé ma manière de voir, en ce qui concerne les péages du canal de Charleroi. Je trouve que la situation de ce canal est aujourd'hui précisément la même que celle dans laquelle il se trouvait il y a dix ans ; on disait alors que le tarif du chemin de fer ne permettait pas au canal de soutenir la concurrence des transports : ce qui était vrai en 1848 l'est bien plus encore maintenant, puisque cette concurrence lui est enlevée par les chemins de fer concèdes et que les bénéfices que font ceux-ci sont entièrement enlevés à l’Etat.

Personne ne contestera les connaissances spéciales de l'honorable M. Sabatier, chacun de nous reconnaîtra qu'il est en position d'apprécier exactement les frais de transport. Dans un rapport qu'il a présenté à la Chambre le 11 février dernier, il a établi clairement la différence qui existe entre les transports des charbons par le canal de Charleroi et par les chemins de fer concédés ; elle est au préjudice de la navigation, en y comprenant l'augmentation du halage qui prendra cours le 1er janvier prochain, savoir :

De Charleroi à Bruxelles ,de 70 centimes 1/2 ou de 1,50 1/2 par 1,000 kil. selon le lieu d'arrivée à la station du Luxembourg ou de l'Allée verte. de Charleroi à Louvain, cette différence est de 3,70 1/2. De Charleroi à Lokeren, de 2,15. De Charleroi à Gand, de 2,05 1/2.

Ces différences, si elles sont maintenues, sont plus que suffisantes pour que les transports cessent sur le canal. Des raisons particulières pourront lui donner encore pendant quelque temps une certaine activité, ce sera une activité momentanée, soutenue par les propriétaires de bateaux pour conserver des familles de bateliers qui sont à leur service depuis de longues années : toutefois la décadence est facile à prévoir, elle est certaine. Quand deux communications existent entre deux villes, il est évident que les négociants se servent de la voie la moins coûteuse. Ce ne sera que quand il y aura manque de waggons que les expéditions auront lieu par le canal. Si l'on n'en diminue pas les frais, il n'alimentera plus les marchés de Bruxelles, de Louvain, de Gand, etc.

II ne faut pas que le canal absorbe le trafic des chemins de fer, ni que ceux-ci enlèvent tous les transports au canal ; ce serait contraire aux intérêts des nombreux consommateurs ; les frais doivent donc être à peu près les mêmes de part et d'autre.

Le législateur, en votant la loi de 1834, en a fait une obligation au gouvernement. M. de Puydt a présenté alors un amendement qui a eu pour résultat d'ajouter l'article 7 à la loi : cet article exige la réduction des péages sur les canaux, au taux du péage à établir sur les chemins de fer. S'il en était autrement, les intérêts engagés dans le canal de Charleroi seraient compromis ; les propriétaires de bateaux comme les nombreuses familles des bateliers seraient réduits à la misère.

Pour n'accorder aucune diminution, on objecte l'intérêt du trésor ; il me paraît que l'exemple est mal choisi pour s'en faire un argument ; l'abaissement du droit sur le canal de Charleroi aura pour conséquence l'augmentation des recettes du trésor, puisque cela ramènera au canal des transports dont les péages entreront dans la caisse de l'Etat, tandis que ces transports ont lieu par des chemins de fer concédés dont les actionnaires se partagent les bénéfices.

Comment pense-t-on d'ailleurs effrayer la Chambre par une espèce de fantôme ? La situation financière n'a jamais été aussi bonne qu'aujourd'hui ; il y a moins d'un an, on nous assurait un excédant annuel de recettes de 4 millions pendant 6 ans, et on nous proposait des dépenses pour plus de 60 millions. Peu de mois auparavant, M. le ministre des travaux publics avait présenté à la Chambre la situation du chemin de fer : elle est des plus florissantes, l'excédant des recettes est considérable, il augmentera encore lorsque les premiers rails auront tous été remplacés ; et comme il est dit dans ce document, il arrivera une époque à laquelle la nation sera en possession d'un chemin de fer ne coûtant rien à l'Etat ; il se sera payé lui-même sur ses produits.

Les preuves que nous avons à cœur de maintenir l'Etat dans une bonne situation financière, ne manquent pas ; nous avons, dans ce but, sacrifié notre popularité, en votant une loi contre laquelle nos adversaires politiques ont ameuté tout le pays, et qu'ils ont trouvée bonne quand ils ont été au pouvoir. Nous ne voudrions certainement pas mettre M. le ministre des finances dans l'obligation de créer de nouveaux impôts. Si nous demandons une réduction de péage, c'est avec la certitude qu'il ne sera pas amené à cette extrémité.

Quant à la proposition que j'ai signée avec plusieurs de mes honorables collègues pour faire supporter les péages sur le canal de Charleroi en raison de la distance parcourue, elle est si juste que pour la combattre nos adversaires invoquent des raisons qui ne me paraissent aucunement admissibles. On a rappelé l'origine du canal, on a cité une brochure de M. Wellens, ingénieur en chef, faisant partie de la commission. J'y trouve l'exposé des motifs allégués en 1856 par MM. les ministres des finances et des travaux publics pour s'opposer aux réclamations des propriétaires de certains charbonnages. On y lit, à la page 48, l'extrait suivant d'un discours prononcé dans cette enceinte par l'honorable M. Dolez.

« Quand le gouvernement décréta la création du canal de Charleroi, il ne voulut pas que les charbonnages du Centre pussent jouir sur ceux de Charleroi, de la situation que leur position topographique allait leur donner par suite de la création de ce canal.

« Il inséra dans l'acte de concession, comme condition essentielle, que les charbons du Centre, quoique ne parcourant que la moitié de la longueur du canal, payeraient la totalité des droits comme les charbons de Charleroi qui le parcourent tout entier.

« Pourquoi cela ? Pour ne pas anéantir les charbonnages de Charleroi qui n'auraient plus pu soutenir la concurrence avec ceux du Centre, sur les marchés eu possession desquels ils étaient. »

Voilà ce qu'on appelle le système de pondération ; c'est une pondération qui procure de gros bénéfices aux exploitants aux dépens des consommateurs.

L'honorable M. Dolez prétend que l'acte de concession contient, comme condition essentielle, que les charbons du Centre, quoique ne (page 227) parcourant que la moitié de la longueur du canal, payeraient la totalité des droits. L'honorable M. Sabatier, député de Charleroi, emploie un autre raisonnement pour arriver à un résultat favorable à la localité qu'il représente ; il retourne la question, il répond à son collègue de Mons : Vous vous trompez, l'acte de concession ne dit pas que les bateaux servant au transport des charbons du Centre seraient surtaxés, mais que ceux de Charleroi ne payeraient pas plus que les premiers.

Je n'ai pas vu l'acte de concession, mais il pourrait se faire que l'entrepreneur n'ait eu en vue que la réalisation d'un plus grand profit en se faisant payer la totalité du parcours pour les bateaux venant du Centre et qu'il en ait fait une condition essentielle pour s'engager à construire le canal. Du reste il m'importe peu de savoir comment la clause dont il s'agit est conçue, je constate une iniquité flagrante, une injustice qui saute aux yeux de tout le monde, et j'emploie mon influence pour la faire disparaître.

Quand il s'agit du système de pondération, qui comme l'a fort bien dit l'honorable M. Sabatier, consiste à créer à l'intérieur du pays des marchés spéciaux, des marchés privilégiés pour certain bassin, nous trouvons alors l'appui de l'honorable député de Charleroi. Il déclare ce système essentiellement faux comme principe et comme application, il en demande la suppression parce qu'il en espère l'abaissement du péage sur le canal de Charleroi, il a mille fois raison, mais pourquoi abandonne-t-il ce raisonnement, lorsqu'il est question de payer en raison de la distance parcourue ; ce qui rentre bien dans le système de pondération que mon honorable collègue condamne si énergiquement.

Le gouvernement ne doit pas intervenir dans les opérations que peuvent faire les sociétés ; et dire aux unes : Par la construction du canal, vous réaliserez des gains trop considérables, je vais augmenter vos frais de transport pour que le taux de votre marchandise soit aussi élevé que celui des sociétés concurrentes. C'est là un privilège inique et ici il a été créé en faveur du bassin de Charleroi ; il a été accordé au préjudice des consommateurs qui, autrement, auraient le charbon à meilleur marché.

Le roi Guillaume, qui n'était pas toujours très scrupuleux lorsqu'il s'agissait de légalité, a pu poser un acte qui aujourd'hui est contraire à l'esprit de notre Constitution, elle défend d'accorder des privilèges, le gouvernement belge ne doit pas suivre les errements du roi Guillaume.

Si on use d'une route, on paye en raison de la partie que l'on parcourt, l'impôt est proportionné à l'usage que l'on fait de la route.

Il en est de même des chemins de fer ; quand on a créé ceux-ci, on n'a point augmenté les frais de transport pour les établissements métallurgiques situés à proximité d'une station, afin d'établir une compensation en faveur de ceux qui en étaient éloignés. Le gouvernement doit laisser à l'industrie le soin de se développer elle-même, et avec le plus de liberté possible, il n'est pas chargé de compenser par des facilités de transport la différence qu'il y a entre les frais des diverses exploitations. Je comprendrais une mesure exceptionnelle, si l'intérêt général l'exigeait, si, par exemple, le payement de péage, à raison de la distance parcourue devait anéantir une industrie ; ce n'est pas ce résultat qu'on doit craindre, il en résultera seulement une diminution de bénéfice pour des actionnaires qui en réalisent de très importants chaque année, et un grand avantage pour les consommateurs, qui auront le charbon à moitié prix.

Si le canal appartenait à une compagnie, il n'est pas douteux que les péages seraient réduits depuis longtemps. Et si le gouvernement n'était mû que par le désir d'augmenter les ressources du trésor, la réduction aurait également lieu, et on aviserait en outre aux moyens de tripler les transports : ou doublerait les écluses, on introduirait des cours d'eau dans le canal, comme on y est parvenu pour avoir les eaux à Bruxelles, on établirait un personnel de nuit. En bien peu d'années on récupérerait les trois ou quatre millions qu'on aurait dépensés pour obtenir ces améliorations.

L'honorable M. Jouret a exprimé des doutes sur le résultat des travaux de la commission ; je dois avouer que je partage la même opinion. Comment espérer une entente parfaite entre des hommes représentant des localités ayant des intérêts entièrement opposés dans les questions à traiter ? Aucun d'eux ne fera des concessions, au moins c'est probable. Le représentants de Mons ne consentira pas à l'abaissement des péages sur le canal de Charleroi, sans une diminution sur celui de Mons à Condé ou de Pommerœul à Antoing ?

Le représentant de Charleroi n'admettra pas le péage en raison des distances parcourues ? Les fonctionnaires, quoique ayant une grande indépendance de caractère, ne vont-ils pas trop se préoccuper de la réponse faite en 1856 par MM. les ministres des finances et des travaux publics ? Il est donc facile de prévoir toutes les difficultés qui s'opposeront à ce que la commission parvienne à indiquer un remède qui contente tout le monde. Je comprends néanmoins, qu'avant de se prononcer, la Chambre doit recevoir son travail.

M. Faignart. - Je sais parfaitement, messieurs, que la question qui nous occupe en ce moment ne peut pas recevoir aujourd'hui une solution définitive.

Néanmoins, je crois devoir présenter quelques considérations sur cette question ; je m'occuperai d'abord du discours prononcé par l'honorable M. Sabatier, dans la séance de samedi dernier.

Cet honorable membre reconnaît avec nous que le système des droits différentiels a fait son temps ; il ne veut plus du système de pondération entre les péages établis sur les différents canaux, par conséquent il ne veut plus de privilège. Et cependant croirait-on que, tout en repoussant en principe et les droits différentiels et le système de pondération, l'honorable membre fasse tous ses efforts pour en conserver l'application ?

M. Sabatier. - Je demande la parole.

M. Faignart. - Oui, messieurs, les droits différentiels existent sur le canal de Charleroi ; depuis longtemps on se récrie contre cet abus, non seulement dans la Chambre mais dans tout le pays. Depuis longtemps Charleroi use, au détriment du bassin du Centre, d'un privilège ; et ce privilège, dont nous réclamons instamment la suppression, on persiste à vouloir le maintenir.

Dans la session dernière, un projet de loi émanant de plusieurs membres de cette assemblée nous a été présenté. Les sections et la section centrale se sont réunies pour l'examiner ; il est vrai qu'aucun rapport n'a été présenté à la Chambre, et cependant nous étions sur le point d'aboutir à un résultat quand le gouvernement a jugé nécessaire, probablement pour s'assurer un nouvel atermoiement, de nommer une commission pour examiner toutes les questions relatives aux péages.

La question qui nous occupe, messieurs, a un caractère essentiellement différent de celui qu'on veut y assigner. Le péage du canal de Charleroi est uniforme : comme vous le savez, on paye autant du Centre pour parcourir 9 lieues, que de Charleroi pour en parcourir 15. Il me semble qu'il doit être évident pour tous que c'est là une flagrante injustice, et une injustice contre laquelle nous ne cesserons de réclamer.

Je ne conteste nullement que, lors de la création du canal, on ait pu reconnaître, jusqu'à un certain point, l'utilité du péage uniforme, alors surtout que le bassin de Charleroi avait besoin de protection pour se développer. Mais vous reconnaîtrez sans doute avec moi, messieurs, que les circonstances ont bien changé depuis cette époque et qu'aujourd'hui le bassin de Charleroi à l'aide de ces faveurs et des communications faciles et peu dispendieuses a pu se développer d'une manière plus considérable que n'ont pu le faire le bassin de Mons et celui du Centre. Messieurs, il est incontestable que la suppression de la surtaxe imposée au bassin du Centre doit profiter aux consommateurs. Ce qui le prouve, ce sont les nombreuses pétitions qui nous ont été adressées des différentes provinces et notamment du Brabant, des deux Flandres et de la province d'Anvers.

S'il fallait une preuve encore, je la trouverais dans l'initiative qui a été prise par plusieurs membres de cette assemblée pour la présentation du projet de loi dont nous nous entretenons.

L'honorable M. Sabatier vous a présenté différentes considérations pour faire voir la nécessité d'une révision générale des tarifs sur les voies navigables de Belgique. Toutes ces considérations présentées par l'honorable membre sont applicables tout spécialement aux péages par distance sur le canal de Charleroi.

Ainsi nous savons tous que les péages sur le canal de Charleroi sont de tous les péages sur les voies navigables les plus élevés. Mais à côté de cette question, il en est une autre, très importante et qui saute aux yeux, c'est cette différence de traitement que l'on impose à un bassin plutôt qu'à un autre.

Au reste, messieurs, je dois le déclarer ici, le bassin du Centre est assez habitué à ce traitement injuste et vexatoire.

Puisque j'ai la parole, tout en ne voulant pas entrer dans la discussion du fond, je présenterai à la Chambre quelques considérations générales.

Je dois cependant, avant d'aller plus loin, quelques mots de réponse à l'honorable M. H. de Brouckere.

Cet honorable membre prétend que l'on ne peut pas traiter isolément la question à laquelle je fais allusion.

Je crois, au contraire, qu'une injustice ne saurait être réparée trop tôt, et, si on ne l'a pas fait jusqu'ici, on a eu tort.

Il y a ici, messieurs, un fait flagrant, un fait inouï. On ne veut pas de privilèges, dit-on ; tous les citoyens doivent être égaux devant la loi. Or, nous réclamons instamment la disparition d'un privilège révoltant, et l'on nous répond : Non, le moment n'est pas venu ; il faut lier cette question à d'autres questions ; il faut la noyer dans une complication pour qu'elle ne voie pas le jour.

Messieurs, cela n'est pas tolérable, et aussi longtemps que j'aurai l'honneur de siéger dans cette enceinte, je saisirai toutes les occasions pour m'élever contre un semblable déni de justice.

Je vous disais que je désirais présenter à la Chambre quelques observations générales, quoique je sache bien que ce n'est pas le moment de traiter la question au fond. Je vais donc aborder cette partie de mon discours et je ferai remarquer à la Chambre que tout en n'espérant pas une solution immédiate, je crois cependant devoir, avec mes honorables collègues et surtout avec les signataires du projet de loi présenté dans la session dernière, faire tous mes efforts pour qu'enfin nous obtenions justice.

Depuis que la Chambre s'occupe des péages sur le canal de Charleroi, l'on a produit un déluge de chiffres, qui la plupart du temps n'avaient pour but que de noyer la vérité. Les seuls chiffres dont doivent s'occuper les mandataires de la nation, chargés de répartir entre tous les citoyens des charges et des avantages égaux, se réduisent à ceux-ci, que le bassin du centre paye pour un parcours de 9 lieues sur le canal de Charleroi autant que le bassin de ce nom pour un parcours de 15.

(page 22) Tous les raisonnements, toutes les démonstrations, tous les sophismes produits pour justifier cette iniquité, viendront toujours se briser contre la brutalité de ces chiffres. Ils démontrent qu'à notre époque de liberté et d'égalité, un grand nombre de consommateurs et de producteurs sout encore tenus en exploitation réglée et permanente, au bénéfice d'un certain nombre de producteurs privilégiés.

Dans cette affaire, on a dit déjà beaucoup de vérités, mais pas toute la vérité, il est temps cependant qu'on la produise. Sait-on ce qui s'oppose à ce que le bassin du Centre obtienne enfin la justice qui lui est due et qu'il réclame depuis tant d'années ?

C'est une opinion généralement répandue et trop facilement admise, que ce groupe charbonnier est assez florissant et assez riche par lui-même, pour supporter toute espèce de taxe et de surtaxe.

Comment cette idée ne dominerait-elle pas dans tous les esprits, lorsque chaque année, les comptes rendus de l'administration des mines, reproduits par tous les journaux du pays, font ressortir pour chaque tonne de charbon extraite dans le Centre un bénéfice double ou triple de celui des autres bassins ?

Eh bien oui, le fait signalé est vrai. Le Centre est riche, très riche même si l’on veut, mais si la nature lui a généreusement donné des charbons de qualité supérieure et recherchés de tous les consommateurs, comprend-on que le gouvernement, contrariant les vœux de la Providence au lieu de les favoriser, s'obstine à mettre obstacle à la diffusion d'un produit recherché, pour pousser à la consommation d'un produit inférieur que le consommateur n'accepte qu'à son corps défendant ?

Que l'on y prenne garde ; persister dans cette voie, c'est faire ce que n'a point osé le socialisme, c'est surtaxer la richesse, c'est reconnaître et proclamer l'impôt proportionnel, ce système qui consiste à surtaxer tel bassin pour dégrever tel autre. Que l'on applique ce système d'individu à individu, comment l’appellera-t-on ? Spoliation ! et la conscience publique ne se trompera pas.

J'ai dit système, messieurs, et ce n'est pas à la légère, car l'iniquité contre laquelle nous protestons n'est pas un fait isolé. Chaque fois qu'il s'agit du Centre, le gouvernement, imbu des mêmes idées, applique les mêmes principes et semble ne s'attacher qu'à opérer dans la caisse des riches sociétés de ce bassin les razzias les plus fructueuses.

Que le consommateur soit, en fin de compte, la première et principale victime de ces idées étroites et d'un autre âge ; peu lui importe. Le système se poursuit envers et contre tous, fidèle aux traditions et ne déviant jamais.

Pour en citer des preuves, je n'ai que l'embarras du choix. En voici un tout récent exemple : Depuis le 1er août, l'Etat a repris l'exploitation du chemin de fer de Mons à Manage. Le Centre a applaudi à cette mesure, mais il s'attendait peu aux conséquences qu'elle devait amener. Les charbons de ce bassin s'expédient pour trois destinations principales : Mons, Manage et Baume, point de jonction du chemin de fer d'Erquelinnes. Les distances moyennes respectives sont 22 kilomètres, 10 kilomètres et 4 kilomètres. Le cahier des charges du chemin de Mons à Manage fixe le tarif maximum à 8 cent, par tonne et par kil. on payait donc lorsque la société concessionnaire exploitait elle-même son chemin de fer fr. 1-76 pour Mons, 80 cent, pour Manage et 32 cent, pour Baume.

Veut-on savoir ce que sont maintenant ces péages dans les mains de l'Etat ? 2 fr. 20 c. pour Mons, 1 fr. 60 c. pour Manage et 1 fr. 30 c. pour Baume. Ces chiffres présentent, pour les maxima fixés par le cahier des charges, des augmentations de 25 p. c. pour Mons, de 100 p. c. pour Manage et de 400 p. c, pour Baume.

Heureusement, il y a des juges en Belgique, les tribunaux vont avoir à décider si l'Etat, gardien naturel des lois, peut impunément les violer d'une manière aussi criante.

Je vais, messieurs, vous citer un autre fait aussi curieux. Le cahier des charges du chemin de fer de Mons à Hautmont impose à cette société l'obligation de transporter à Hautmont les produits du Centre, au prix maximum de 2 fr. 95 c. Cette clause a été respectée et appliquée jusqu'au 1er août dernier ; mais les changements opérés par l'Etat dans le péage vers Mons ont eu pour conséquence de relever de 2 fr. 95 c. à 3 fr. 76 c. le coût du charbon du Centre en destination d'Hautmont.

Les tribunaux auront prochainement aussi à décider jusqu'à quel point il est permis de se jouer ainsi de contrats parfaitement établis et librement acceptés.

Vous voyez, messieurs, que de quelque côté que puisse se tourner le Centre, qu'il emprunte, pour expédier ses produits, les voies navigables ou les voies ferrées, il rencontre partout les mêmes entraves dictées par un esprit d'hostilité et de mauvais vouloir. L'on s'explique d'autant plus difficilement une semblable manière d'agir, que les défenseurs naturels des intérêts rivaux reconnaissent eux-mêmes et proclament à l'envi que le système d'équilibre et de pondération a fait son temps. L'honorable M. Sabatier, dans la dernière séance, s'est montré d'accord avec nous, il abandonne l'équilibre que personne ne défend plus, et pour être logique, il ne peut s'opposer à la suppression d'un privilège qu'il condamne. Nous voilà donc d'accord sur ce point. L'honorable membre ne s'oppose plus à ce que le péage par distance soit appliqué sur le canal de Charleroi. Mais il veut que cette mesure soit précédée d'un dégrèvement général. J'admets avec lui la nécessité d'un dégrèvement, nous demandons seulement qu'il vienne après l'établissement des péages par distance et nous croyons être dans le vrai et dans le juste en insistant sur ce point. Nous demandons que la section centrale chargée de l'examen du projet de loi émanant de l'initiative de quelques membres de la Chambre dépose son rapport et qu'il soit soumis à la discussion. Qu'importent les conclusions que pourra prendre la commission spéciale récemment nommée ! Qu'elle maintienne, qu'elle diminue ou qu'elle augmente les tarifs actuels, aucune de ses résolutions ne fera jamais disparaître le grief dont nous nous plaignons, grief spécial, que chacun reconnaît, qu'aucun n'ose défendre et qui cependant reste debout, au grand scandale de la moralité, publique.

Vous comprenez, messieurs, qu'en présence de ce que je viens de dire, je ne puis donner un vote favorable au budget des voies et moyens ; je ne veux pas de recettes que je ne crois pas justes, pas plus que je ne veux de dépenses mal fondées.

M. J. Jouret. - Il m'est impossible, messieurs, de conformer ma conduite dans cette occasion aux bons conseils que m'a donnés l'honorable M. H. de Brouckere. Pour qu'il eût pu me les donner et que i j'eusse pu les suivre, il eût été nécessaire que nous ne fussions pas l'un et l'autre, dans cette occasion , les représentants d'intérêts divers et complétement en hostilité.

En demandant la parole une deuxième fois dans la séance de samedi pour répondre au discours de l'honorable M. Sabatier, j'avais pensé que la tâche qu'il m'imposait, de lui répondre, aurait été infiniment plus lourde.

Mais, en lisant son discours avec attention, je me suis convaincu que ma tâche était, au contraire, très légère et que j'avais même des remerciements à lui faire pour la manière claire et logique avec laquelle il a produit ses arguments dans une cause qui, il tenterait vainement de le nier, évidemment nous est commune.

En effet, messieurs, l'honorable M. Sabatier a prouvé qu'un péage différentiel, qu'un système de pondération créent nécessairement des marchés privilégiés et que cet état de choses fait payer le charbon plus cher aux consommateurs. C'est là précisément notre grand argument.

Il a dit qu'un système appliqué à une voie navigable et que l'on abandonne dès qu'il s'agit de routes et de voies ferrées n'est pas un système, que c'est une pratique inique et qu'il faut se hâter d'abolir. Je suis complétement de son avis à cet égard.

Il a démontré l'absurdité du système de pondération et les conséquences non moins absurdes et inadmissibles auxquelles il mènerait si l'on diminuait les péages sur le canal de plus de 50 p. c., en ce que, dans ce cas, il faudrait payer au bassin de Mons une prime pour le transport de ses charbons.

C'est encore un point sur lequel nous sommes d'accord avec lui.

L'honorable membre a dit encore que c'était sans raison qu'on invoquait l'intérêt du trésor, que le dégrèvement amène le bon marché, que le bon marché amène l'accroissement de la consommation qui amène, à son tour, une augmentation du bien-être général. C'est un point que nous avons établi dans les développements de la proposition de loi.

Il a dit que les chemins de fer concédés font une concurrence ruineuse au chemin de fer de Charleroi, il a cité les chiffres du rapport de la commission d'industrie du 11 février 1858 dont lui-même était le rédacteur ; nous les avons cités nous-mêmes, encore une fois, dans l'exposé des motifs de notre projet de loi.

L'honorable M. Sabatier a prouvé de plus que les péages du canal de Charleroi constituent un impôt qui frappe d'une manière injuste une catégorie de contribuables. Il a établi que le canal de Charleroi est racheté et payé depuis longtemps, et que cependant il rapporte à peu près autant que toutes les autres voies navigables du pays a réunies. Il a dit que les conditions de la navigation sont détestables sur le canal de Charleroi.

Eh bien, messieurs, ce sont là des considérations que nous avons établies dans les développements de notre projet de loi.

Je le demande, messieurs, était-ce avec raison que l'honorable M. de Brouckere disait tout à l'heure que l'honorable M. Sabatier avait prouvé que notre prétention est complétement non fondée, que nous sommes dans notre tort sur tous les points ?

M. de Brouckere. - Je n'ai pas dit cela.

M. J. Jouret. - Nous sommes divisés sur un seul point, et c'est sur ce seul point que je demande à faire quelques observations à la Chambre, parce que c'est le point fondamental du débat et que je tiens par conséquent à le consigner d'une manière claire et complète, afin que la Chambre saisisse au juste quelle est la question qu'il faudrait immédiatement résoudre.

Messieurs, vous l'aurez remarqué sans doute, dans cette partie de son discours qui touche à l'origine de l'établissement de la taxe uniforme du tarif différentiel, l'honorable M. Sabatier a été très peu explicite.

Il se borne à indiquer l'époque à laquelle la mesure a été prise, en quoi elle consistait et glisse très habilement sur les motifs, sur les raisons déterminantes, les raisons d'utilité publique qui décidèrent le gouvernement à prendre une semblable mesure.

Je vais suppléer à ce silence en faisant remarquer à la Chambre qu'il est probable que l'honorable M. Sabatier ne dit rien de ces raisons, parce qu'il sait fort bien que comme elles cessent d'exister, cette mesure ,légitime alors, absurde et inexplicable aujourd'hui, doit nécessairement disparaître avec elles.

(page 229) Le but primitif de la tarification existante sur le canal de Charleroi a été de faire arriver les deux bassins charbonniers du Centre et de Charleroi sur tous les marchés de consommation auxquels donnait accès la nouvelle voie navigable.

Cet équilibre, dans les conditions de transport, a été considéré, à l'origine, comme indispensable pour assurer le développement parallèle des deux bassins ; et on comprend qu'au développement de l'industrie minérale se rattachait tout naturellement un puissant intérêt pour le pays. Ce sont donc, messieurs, des considérations d'intérêt public qui ont présidé à l'établissement de cet ordre de choses. Il s'agissait avant tout, comme le fait comprendre M. l'ingénieur Vifquin dans son ouvrage sur les voies navigables en Belgique, de sauver les bassins du Piéton et de Charleroi.

Or, l'intérêt public dépend de circonstances nécessairement temporaires et variables.

Ainsi, des droits de douane élevés ont été longtemps considérés comme le salut de l'industrie ; ils sont condamnés aujourd'hui au nom du développement industriel, au nom de la prospérité générale du pays.

Puisqu'il n'y a là ni principe, ni système, ni équité, tout consiste à savoir si, dans les circonstances actuelles, l'intérêt public ne réclame pas qu'on en revienne au droit commun, et si le résultat qu'on a eu en vue ne sera pas mieux atteint par l'application du péage proportionnel.

Messieurs, le canal de Charleroi a été ouvert à la navigation en 1832. Dès la mise en exploitation, il est clair que cette voie navigable devait se substituer aux routes pavées, seul moyen de transport en usage jusque-là.

Le canal faisait communiquer les bassins houillers avec Bruxelles, tout le Brabant, les Flandres, Anvers. Il embrassait, en un mot, tout le nord de la Belgique. C'était une révolution complète dans l'économie des transports.

Cette révolution devait avoir pour résultat une augmentation dans l'emploi de la houille, en faisant arriver ce produit dans des lieux qui ne le consommaient pas encore, et en le rendant plus accessible à ceux qui en faisaient déjà usage.

Veuillez le remarquer, messieurs, à cette époque, l'industrie charbonnière était dans un état précaire.

L'extraction n'atteignait pas le 1/8 de ce qu'elle atteint aujourd'hui.

Les capitaux, on le comprend, s'engageaient timidement, avec infiniment de réserve dans des entreprises dont le résultat était très chanceux.

Pour ne pas décourager les exploitants ni compromettre une industrie dont la prospérité est inséparable de la prospérité du pays, il fallait entourer d'une protection égale tous les groupes de charbonnages, répartir en quelque sorte entre eux la consommation.

Il devait en être ainsi surtout pour le Centre et Charleroi.

Le Centre, dont le lieu d'embarquement est à Seneffe, jouit sur Charleroi d'un raccourcissement de parcours de 6 lieues pour toutes les localités qui allaient être desservies par la voie navigable.

Il était donc évident que le canal allait empêcher la concurrence des autres centres de production, les écraser peut-être.

L'Etat devait éviter de jeter cette perturbation dans l'industrie, la mesure avait sa raison d'être dans l’intérêt public, elle s'explique parfaitement et j'ajouterai que si nous étions de nouveau dans des circonstances semblables, gouvernement et Chambres, tous nous serions unanimes pour prendre une mesure analogue.

Mais ce que l'intérêt public exigeait alors, le demande-t-il encore aujourd'hui ? Là, est le problème à résoudre.

Messieurs, dans les séances précédentes, nous avons, l'honorable M. Prévinaire et moi, prouvé que, loin de demander rien de semblable, l'intérêt public a d'autres exigences.

Au moment où nous vivons, il ne s'agit plus d'une consommation d'un million de tonneaux, c'est la France, c'est la Belgique tout entière qui emploient notre combustible.

C'est à 8,000,000 de tonneaux que s'élèvent les besoins du pays et de l'étranger.

Il ne s'agit plus de protéger la production, les rôles sont désormais intervertis, c'est au consommateur qu'il faut venir en aide.

Et, à cet égard, il est impossible de faire une démonstration plus éloquente que les chiffres que j'ai cités à la séance de samedi dernier.

Partis d'un même point en 1834, les deux bassins producteurs arrivent en 1855 à une production, le Centre de 1,094,000 tonnes, et Charleroi à la production prodigieuse de 2,363,000 tonnes.

En d'autres termes, le Centre étend sa production dans le rapport de 100 à 332 et Charleroi, dans celui de 100 à 774.

Et c'est en faveur de ce colosse, en faveur du bassin de Charleroi que l'on ose continuer à demander un régime protecteur qui ne peut, dorénavant, se légitimer en aucune façon, et au préjudice d'un autre centre producteur, qui, pour être en progrès, n'en est pas moins resté dans des conditions infiniment plus modestes.

Voilà, messieurs, la réponse qu'il me semblait nécessaire de faire à l'honorable M. Sabatier sous le point qui nous divise.

La Chambre le remarquera : la position que prennent l'honorable M. Sabatier et ses amis n'est ni juste, ni logique. C'est ce que viennent de faire observer les honorables MM. Thiéfry et Faignart, nos honorables contradicteurs. Ils sont tout feu pour demander des dégrèvements qui leur profitent, et je ne puis que les approuver, mais lorsque le Centre, le plus maltraite de tous, réclame justice, à son tour, c'est par un froid refus qu'ils lui répondent.

Nous sommes plus justes et plus conséquents, parce que nous ne nous opposons pas à ce qu'il soit fait justice aux réclamations de Charleroi ; loin de là, nous les appuyons dans ce qu'elles ont de juste et d'admissible.

Messieurs, il me reste maintenant à répondre quelques mots à l'honorable M. H. de Brouckere. L'honorable membre a rappelé la déclaration, faite par le gouvernement, qu'il ne pouvait traiter isolément cette question ; mon honorable collègue a de nouveau cité le fait de l'institution de la commission, et il en a tiré l'argument, qu'il est absolument impossible à la section centrale de passer outre à l'examen du projet de loi qu'elle est chargée d'examiner.

Je crois que c'est une erreur, et cette erreur provient de ce que nous ne sommes pas d'accord sur les prémisses.

L'honorable M. de Brouckere croit qu'il est radicalement impossible à la section centrale de se livrer à l'examen de notre proposition de loi, sans avoir obtenu, soit du gouvernement, soit de la commission, certains renseignements qui lui seraient indispensables pour délibérer.

Je crois, de mon côté, avoir démontré que la question qu'il s'agit de décider est des plus claires et des plus simples ; que c'est une question toute spéciale qui n'a nullement besoin, pour être connue et appréciée, des investigations de la commission ; que ce n'est qu'un simple cas d'application des principes économiques qui président depuis plusieurs années et dans des cas analogues aux résolutions de la Chambre.

L'honorable M. de Brouckere croit que la section centrale se refusera à délibérer, sans être munie des renseignements qu'elle prétend lui être indispensables. Mais, messieurs, quelle raison a l'honorable M. de Brouckere d'être certain qu'il en sera ainsi ? Je le concevrais, s'il s'agissait de ces questions vastes et compliquées qui seront examinées par la commission ; mais notre question spéciale est tellement simple que la Chambre a maintenant les éléments nécessaires pour la résoudre.

C'est donc entre l'honorable M. de Brouckere et moi une question d'appréciation ; l'honorable membre dit : « La section centrale ne peut décider une semblable question, sans avoir les renseignements qui doivent lui venir de la commission ou du gouvernement. » Je dis, moi, que sur une question de droits différentiels aussi claire que celle-là, je ne suis nullement de cet avis ; à mes yeux, la question est d'une simplicité et d'une clarté extrêmes ; la Chambre en est saisie depuis de longues années, il est de la dignité de la Chambre de la vider.

En présence de tout ce qui a été dit dans cette assemblée sur cette question, en présence de l'état de l'opinion publique dont les manifestations ne peuvent paraître équivoques à personne ; j'ai, pour mon compte, je l'avoue, le plus grand espoir que la Chambre finira par partager notre manière de voir.

Et à l'occasion de la réponse que je fais en ce moment à l'honorable M. de Brouckere, je ne puis m'empêcher de présenter une observation qui me paraît assez importante. L'année dernière, lorsque je soutenais que la section centrale devait passer outre à son travail, lorsque je prétendais que la Chambre aurait pu être saisie avec fruit de la question et qu'elle aurait été à même de la décider, l'honorable M. de Brouckere s'est levé et m'a opposé, absolument dans les mêmes termes, une semblable fin de non-recevoir ; et, après un débat, il a été convenu que la question serait renvoyée à la présente session, pour être débattue, cela va sans dire, dans le courant de cette session. Eh bien, nous demandons maintenant que la Chambre exprime à la section centrale le désir qu'elle a de la voir reprendre l'examen de la proposition de loi et soumettre un rapport à l'assemblée.

Et l'on vient de nouveau nous faire la même objection et l'on nous répète qu'il est impossible qu'en l'absence des renseignements qu'elle a demandés, la section centrale examine la question et puisse proposer une solution.

Messieurs, si la même objection nous est toujours faite, je le demande en supposant que les travaux de la commission se prolongent, comme c'est à craindre, en supposant que, les travaux ayant abouti, le gouvernement ne partage pas son opinion, je puis dire cela sans l'offenser, si l'on peut toujours nous opposer des fins de non-recevoir, je demande ce que devient le droit d'initiative des membres de cette Chambre.

L'honorable M. de Brouckere a dit tantôt qu'il appréciait ma position dans le débat.

L'honorable membre, je le reconnais, en faisant cette observation n'éprouvait à mon égard qu'un sentiment de bienveillance, je n'éprouve pas le moindre doute à cet égard.

Messieurs, je défends dans cette enceinte les intérêts qui m'y ont envoyé ; quand ils me paraissent d'accord avec l'intérêt général du pays. Je les défends consciencieusement avec le peu de talent que j'ai et le mieux que je puis.

L'honorable M. de Brouckere ne fait pas autre chose, il défend aussi les intérêts de ses commettants, avec conscience, mais avec le talent supérieur dont il est doué. Sous ce rapport je puis donc lui dire, à mon tour, que j'apprécie la position dans laquelle il se trouve.

Messieurs, en prenant la parole à la séance de samedi dernier, j'avais annoncé que je ne toucherais pas au fond de la question qui nous occupe ; je n'en avais pas l'intention, je ne voulais agiter qu'une question de procédure, à laquelle se rattachait une question de dignité pour la Chambre.

(page 230) Je ne serais pas sorti du cercle que je m'étais tracé si les orateurs auxquels je réponds n'avaient abordé eux-mêmes la question du fond et ne m'avaient forcé d'abandonner la ligne de conduite que je m'étais prescrit de suivre. Nous ne pouvons pas aboutir à quelque chose de positif dans ce moment-ci, cela est malheureusement vrai ; nous ne pourrons le faire que quand la section centrale, ce qui aura lieu prochainement, j'espère, aura procédé à son travail et saisi la Chambre d'un rapport.

Ne regrettons pas cependant l'excursion presque complète que nous avons faite sur le fond ; plus notre question particulière sera connue, plus sera prochain le moment où nous la verrons triompher devant la Chambre.

En résumé, en procédant sans retard à l'examen du projet qui se trouve en section centrale, quand cette section vous aura mis en possession de son rapport, et en y donnant votre adhésion, vous poserez, messieurs, un acte de justice et d'équité éminemment utile à un grand nombre de consommateurs et d'industriels des deux Flandres et de la ville de Bruxelles, ainsi qu'à ces nombreuses populations que fait vivre la navigation sur le canal ; j'ai, de plus, la conviction la plus profonde que vous prendrez une mesure exigée par l'intérêt bien entendu du trésor de l'Etat.

M. Moncheur. - Messieurs, depuis dix ans que j'ai l'honneur de siéger dans cette enceinte, j'ai souvent signalé l'injustice flagrante qui règne dans le régime des péages sur les voies navigables, et en particulier l'injustice de la surtaxe qui pèse sur le canal de Charleroi ; le taux du péage est double, triple et même quadruple sur ce canal de ce qu'il est sur d'autres canaux du pays, et, en outre, le canal de Charleroi ayant été construit à très petite section, la navigation y est excessivement coûteuse, tandis que les dimensions des autres canaux étant beaucoup plus grandes, la navigation y est facile et avantageuse ; ce qui, joint au taux de péage trois et quatre fois plus bas dont ils jouissent, établit entre eux et le canal de Charleroi un écart immense.

Ce canal de Charleroi forme la seule voie navigable entre la Sambre et la Meuse, d'une part, et le canal de Willebroeck, d'autre part. C'est l'unique voie par laquelle les différentes industries du bassin de la basse Sambre communiquent avec le Brabant et nos ports de mer.

Les fabriques de produits chimiques, notamment, doivent faire venir par cette voie une partie considérable de leurs matières premières, tels que les sels bruts qui proviennent du port d'Ostende.

Il faut que vous sachiez, messieurs, que ce canal de Charleroi ne peut donner passage qu'à des bateaux jaugeant 70 tonnes au maximum, alors que les canaux de Mons à Condé et de Pommerœul à Antoing portent des bateaux de 220 à 240 tonnes.

Or, vous comprenez d'abord que les frais du batelage pour les bateaux de 70 tonnes sont aussi considérables que pour les grands bateaux de 240 tonnes.

Mais ce n'est pas tout : les écluses du canal de Charleroi sont construites dans de telles dimensions, que les bateaux qui y passent sont aussi profonds que larges ; d'où il résulte que quand ils quittent le canal de Charleroi, pour naviguer sur la Sambre canalisée, comme celle-ci n'a pas la même profondeur que le canal de Charleroi, on est obligé de les décharger en partie, ou plutôt on ne peut jamais donner aux bateaux qui sont destinés à passer du canal de Charleroi à la Sambre canalisée qu'une partie de leur chargement ; cette partie n'est que 55 tonnes au lieu de 70 tonnes qui forment leur tonnage entier. Cet état de choses, pour le dire en passant, ne peut pas durer ; c'est un grief que je prie M. le ministre des travaux publics de vouloir bien faire cesser le plus tôt possible. L'approfondissement de la Sambre canalisée est un travail d'une excessive urgence, et il est plus que temps qu'on l'exécute.

N'est-il pas déplorable que la Sambre canalisée se trouve sur tout le territoire belge dans un état désastreux pour l'industrie, tandis qu'elle offre de grandes facilités à la navigation sur le territoire français ? Il est indispensable que l'on crée immédiatement sur notre territoire un tirant d'eau aussi considérable que sur le territoire voisin, si on ne veut pas favoriser outre mesure les charbonnages français et ceux du couchant de Mons au préjudice de ceux de Charleroi et de la basse Sambre.

Je reviens, messieurs, au canal de Charleroi.

Il existe deux sortes d'injustices, quant aux péages sur ce canal, l'une consistant en ce que le canal est surtaxé d'une manière énorme, relativement aux autres canaux ; l'autre consistant en ce que le bassin du Centre paye autant pour parcourir neuf lieues que Charleroi, pour parcourir quinze lieues. Quelle est celle de ces deux injustices dont le redressement aura la priorité ? M. Jouret-demande que la Chambre invite la section centrale à faire immédiatement son rapport, pour arriver à la détaxe du Centre.

Quant à moi, je ne veux nullement arrêter le dépôt du rapport sur la proposition de M. Jouret ; mais à une condition cependant, c'est qu'il sera bien entendu que quand la discussion sera établie sur ce rapport, on pourra apporter au projet présenté à la Chambre tout amendement qui se reliera intimement au projet lui-même.

On pourra donc, sous forme d'amendement, proposer l'abaissement du péage sur le canal de Charleroi tout entier. Et en effet, messieurs, la section centrale est saisie d'une double proposition.

M. de Naeyer, rapporteur. - Il n'y a qu'une proposition.

M. Moncheur. - Pardon ; il y a d'abord la proposition de loi émanant de l'initiative de plusieurs membres de cette assemblée, mais indépendamment de cette proposition il y a aussi les pétitions des industriels de Charleroi et des négociants de Bruxelles, pétitions qui ont été renvoyées à la section centrale ; or ce renvoi à la section centrale a eu certes une signification, c'est que cette section s'en occupe et que la Chambre puisse s'en occuper aussi après elle.

Donc, si par suite de l'initiative prise par divers membres de la Chambre, on propose de modifier l'état actuel des choses sur le canal de Charleroi, dans le sens de cette initiative, il ne peut certainement pas être interdit à d'autres membres de l'assemblée de proposer, de leur côté, de modifier ce même état de choses sous d'autres rapports.

Mais, dit l'honorable M. Jouret, ce que je demande est si simple, l'injustice dont je me plains est tellement flagrante qu'il ne peut pas y avoir deux opinions sur cet objet, et par conséquent, il n'y a qu'un vote à émettre.

Mais, messieurs, il me semble que l'injustice de la surtaxe qui existe sur tout le canal de Charleroi en égard aux autres canaux du pays est bien plus flagrante que celle de la taxe différentielle qu'a signalée l'honorable M. Jouret.

S'il suffit qu'une injustice soit évidente, saisissable pour tout le monde pour qu'on puisse en espérer le redressement immédiat, cette surtaxe de tout le canal de Charleroi doit disparaître aussi promptement, aussi facilement que celle dont se plaint le bassin du Centre par l'organe de M. Jouret.

Je pense donc que de deux choses l'une : ou il faut que la question tout entière se présente à la Chambre, et que la Chambre puisse prendre une détermination sur tout ce qui concerne le péage du canal de Charleroi, ou il faut attendre que la commission ait terminé ce travail auquel elle se livre, et qui, j'espère, pourra être achevé dans un bref délai.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je crois qu'il est temps de clore cette discussion ; de l'aveu de tous les membres qui y ont pris part, elle ne peut aboutir maintenant à aucun résultat.

On réclame une solution de cette question des péages, mais rien que la discussion qui a lieu démontre à la Chambre la difficulté si ce n'est l'impossibilité, l'impossibilité actuelle à coup sûr, d'arriver à une conclusion pratique. Il est indispensable, messieurs, de faire étudier, d'une manière complète, approfondie, impartiale, loyale, toutes les questions qui se rattachent aux péages de nos voies navigables. Comme vous avez pu le voir, chacune de ces voies navigables a une plainte à formuler, de toutes parts il y a quelque grief, quelque prétention, qui, prise isolément, peut offrir un certain caractère de justice. Mais comme, au fond, tout cela se lie à une immense question économique qui intéresse le pays entier, on ne peut toucher qu'avec la plus grande prudence à l'un ou à l'autre de ces péages.

Selon l'honorable M. Jouret, qui défend avec une grande énergie, qu'il me permette de le dire, avec une certaine passion même, les intérêts qui lui sont confiés, il y a une iniquité qu'on ne peut pas tolérer un seul instant de plus, dans la perception de ce péage unique, quelle que soit la distance parcourue sur le canal de Charleroi ; c'est, dit-on, une surtaxe qui grève injustement le Centre.

Et d'abord, messieurs, si la question était de savoir si, le canal étant à construire, on l'établirait à la condition que le bassin du Centre payerait la surtaxe ou n'aurait point le canal, soyez assurés qu'à l'heure qu'il est le bassin du Centre déclarerait, comme à l'origine, qu'il accepte avec empressement la surtaxe à la condition d'avoir le canal.

M. Faignart. - C'est évident ; mais l'injustice n'en existerait pas moins.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Cela n'était pas considéré comme une injustice à l'origine, l'honorable M. Jouret vient de le déclarer.

M. Faignart. - Nous ne sommes plus à l'origine.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je répète que, de l'aveu de l'honorable M. Jouret, cela ne paraissait pas injuste à l'origine.

M. J. Jouret. - Ce n'est pas pour cette raison-là...

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je ne m'empare de votre déclaration, que pour vous dire que de cette déclaration se déduit nécessairement la conséquence qu'il y a lieu de soumettre la question à un très sérieux examen ; et c'est ainsi qu'il apparaît que la question n'est pas aussi simple qu'on veut bien le dire.

On reconnaît donc que la surtaxe ne paraissait pas injuste a l'origine. (Interruption.) L'honorable M. Faignart ne veut pas le concéder, mais l'honorable M. Jouret en est convenu.

M. Faignart. - Je vous concède qu'il pouvait y avoir à l'origine des motifs pour établir la surtaxe.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'en demande pas davantage. La surtaxe ne renfermait en soi rien d'inique ; en soi elle était juste.

M. de Naeyer, rapporteur. - Non ; jamais !

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable M. de Naeyer ne veut pas m'accorder ce que l'honorable M. Jouret m'a concédé ; ce que l'honorable M. Faignart, après quelque résistance, a fini par me concéder également. Encore un peu et j'espère bien obtenir la même concession de la part de l'honorable M. de Naeyer.

(page 231) Il n'était pas du tout nécessaire de faire un canal de Charleroi à Bruxelles dans la direction du Centre ; on a fait le canal dans cette direction dans l'intérêt du bassin du Centre, et on a dit à ce bassin à l'origine : Comme condition de la concession qui vous est faite, voilà le péage qui sera perçu sur cette voie navigable. Et le gouvernement, en accordant la concession du canal à cette condition, a été béni par les charbonnages du Centre.

M. de Naeyer, rapporteur. - Je ne suis pas encore convaincu.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Cela viendra peut-être.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je n'ai pas l'espoir de convaincre tout le monde ; mais au moins j'espère parvenir à convaincre une grande partie de la Chambre par les aveux mêmes des orateurs qui ont parlé avant moi.

L'honorable M. Jouret nous dit : Cette iniquité, qui n'existait pas à l'origine, se produit aujourd'hui, parce que des faits nouveaux se sont manifestés, parce que les conditions économiques d'autrefois se sont profondément modifiées. Il en conclut qu'il y a nécessité de faire disparaître la surtaxe.

Messieurs, c'est là une question très grave ; c'est un ensemble de faits qu'il importe d'examiner. Ce n'est plus, en effet, sur la prétendue iniquité de la surtaxe que vous auriez à vous prononcer purement et simplement. Ce sont là des faits tout nouveaux à examiner et pour l'appréciation desquels vous ne possédez aucun élément.

Messieurs, ce péage unique, quelle que soit la distance, représenté comme une chose tout à fait exceptionnelle, applicable exclusivement au canal de Charleroi dans un cas donné, est-il donc un fait extraordinaire en Belgique ? Cela existe sur beaucoup de voies navigables. Cela existe sur vos propres chemins de fer. Il y a des concessions qui ont été faites à la condition d'avoir un prix unique pour les transports à des distances diverses.

Enfin, il y a le péage de l'Escaut. Mais le péage de l'Escaut est un péage unique, quelle que soit la distance parcourue. (Interruption.) Vous seriez parfaitement libres de régler les conditions de remboursement comme vous le voulez ; vous auriez la liberté de dire que vous rembourserez en raison de la distance parcourue. Vous voyez donc que ce qui vous paraît si étrange sur le canal de Charleroi existe aussi sur l'Escaut. Le navire qui ne parcourt qu'une petite distance pour aller à la mer, est tenu d'acquitter le même péage que celui qui remonte tout l'Escaut jusqu'à Anvers.

M. de Naeyer, rapporteur. - Presque tous remontent jusqu'à Anvers.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il y en a qui vont à Terneuzen et ensuite à Gand par le canal de Terneuzen. Il ne s'agit pas de savoir, d'ailleurs, s'il y en a peu ou beaucoup ; et même ce petit nombre qu'on nous oppose serait un argument contre l'honorable M. de Naeyer, car on pourrait dire : S'il y a peu de navires, c'est parce que le péage est uniforme. Si vous n'aviez pas un péage unique, beaucoup de navires quitteraient l'Escaut et iraient vers Gand.

Vous ne vous élevez pas contre ce péage unique sur l'Escaut ; vous ne le trouvez pas inique ; vous ne le trouvez pas tellement révoltant qu'il faille le faire disparaître sur-le-champ.

Ensuite ce principe du péage unique, quelle que soit la distance parcourue, n'est-ce pas ce que vous demandez pour la poste ? Vous demandez qu'on transporte les lettres dans tout le pays pour une taxe unique, quelle que soit la distance. Ainsi, vous voyez que ce principe d'une taxe unique, quelle que soit la distance parcourue ! Et vous n'accusez pas le caractère révoltant et inique d'une pareille mesure !

Maintenant est-ce avec le dessein d'empêcher une solution de cette difficile question que le gouvernement a institué une commission, comme on nous l'a reproché ? Mais assurément non. Il faut le dire franchement, c'est à cause de la difficulté de présenter une solution, que nous avons institué la commission.

Quand, dans cette Chambre, on vient sommer le gouvernement de prendre une résolution, d'apporter un système, et que ce système n'est pas trouvé, n'est-il pas assez juste que les personnes qui somment le gouvernement d'agir soient mises en présence ? C'est ce que nous avons fait en nommant la commission. Nous avons mis en présence les honorables membres qui insistaient plus particulièrement pour la réforme des péages sur nos voies navigables. Ils examineront, ils verront les difficultés. S'ils ont une solution à indiquer, nous le saisirons avec empressement ; s'ils n'en trouvent pas (c'est l'objection que me fait l'honorable M. Jouret), la question sera dans la position où elle est actuellement. Si la commission ne présente pas de solution, le gouvernement avisera.

Messieurs, quant à examiner isolément la proposition de l'honorable M. Jouret, il est évident que cela ne se peut. En effet supposez que cette proposition qui est en section centrale soit rapportée, supposez qu'elle soit mise à notre ordre du jour ; les mêmes difficultés que vous rencontrez aujourd'hui se présenteront. La Chambre prononcera l'ajournement jusqu'à plus ample informé, jusqu'à ce qu'on ait pu examiner si, comme l'affirme M. Jouret, les conditions sous l'empire desquelles a été construit le canal, sont maintenant réellement modifiées.

M. Sabatier. - Messieurs, il est un point sur lequel nous sommes à peu près tous d'accord, c'est que la discussion actuelle, durât-elle huit jours encore, ne saurait aboutir, non pas, comme le prétend l'honorable M. de Brouckere, parce que toutes les questions relatives aux péages ont été renvoyées à une commission spéciale, j'ai exprimé à cet égard dans la séance de samedi toute ma pensée, mais parce que nous ne sommes réellement en présence d'aucune proposition formelle, ou s'il en a surgi une de la part de l'honorable M. Jouret, le rapport de la section centrale ne nous a pas été présenté.

Nous ne pouvons donc pas continuer à discuter sur un objet qui n'est pas soumis à nos délibérations ; aussi j'abandonne momentanément le fond du débat pour ne répondre que quelques mots aux honorables MM. Thiéfry, Faignart et Jouret qui semblent vouloir me mettre en contradiction avec moi-même dans l'opinion que j'ai émise au sujet du système de pondération actuellement en vigueur.

J'ai dit et je répète que les bassins du Centre et de Charleroi sont intimement liés, c'est-à-dire, sont mis par la force des choses sur le même pied vis à-vis du système général de pondération. Je ne comprends pas dès lors que ces messieurs prennent la peine de constater que les arguments présentés en faveur du bassin de Charleroi soient en bien des cas les mêmes que ceux invoqués par le Centre, ou en d'autres mots soient applicables au Centre. Peut-on en conclure que je trouverais fort juste, que l'on dégrevât le Centre ? Mais jamais là n'a été ma pensée.

J'ai rappelé le texte même de l'arrêté de concession du canal pour montrer une fois de plus que l'intérêt des deux bassins est inséparable, et que si l'on touche au péage de l'un d'eux, le second doit être compris dans le même dégrèvement. Maintenant je reconnais volontiers que si les péages du canal de Charleroi étaient ramenés à ceux des autres canaux du Hainaut, on pourrait arriver au dégrèvement partiel en faveur du Centre, puisque alors la différence proportionnelle des taxes n'aurait presque plus d'importance. Je condamne le principe qui ne permet pas aux industries de profiter de leur position naturelle, mais ceci n'est pas applicable au bassin du Centre qui se trouve, vis-à-vis du bassin de Charleroi, dans une situation spéciale qui consacre entre eux une espèce de solidarité d'intérêts.

Je borne là mes observations, me réservant de traiter la question à fond lorsque le moment en sera venu.

M. de Naeyer, rapporteur. - Je pense avec M. le ministre des finances que la discussion ne peut aboutir en ce moment, et voilà pourquoi je m'abstiendrai d'imiter l'honorable ministre, je ne traiterai pas la question du fond. Je dirai toutefois que les observations qu'il a présentées sont loin de me paraître péremptoires ; il serait facile d'y répondre. Mais j'ajourne cette réponse jusqu'à un moment plus opportun.

Je me borne pour le moment à faire remarquer que la section centrale ne peut se dispenser d'examiner dans la session actuelle la proposition de loi que vous a présentée l'honorable M. Jouret. La section centrale est même liée à cet égard par un vote de la Chambre.

En effet vous vous rappellerez qu'au mois de mai dernier, un rapport vous a été fait par l'honorable président de la section centrale, M. Orts. Dans ce rapport, la section centrale concluait en demandant l'autorisation d'ajourner l'examen de la proposition dont il s'agit, jusqu'à la session prochaine, c'est-à-dire jusqu'à la session actuelle.

Or ces conclusions ont été adoptées par la Chambre.

Ainsi l'examen de la question a été ajourné à la session actuelle et en vertu du vote de la Chambre la section centrale doit procéder à cet examen.

J'ajouterai, puisque j'ai la parole, que dans ma manière de voir, les questions que soulève la proposition de l'honorable M. Jouret sont entièrement indépendantes d'une réforme générale de notre système de péages. La réforme générale des péages soulève une foule de questions d'utilité et d'administration. Ce qui domine dans la proposition de l'honorable M. Jouret, c'est une question de justice, et cette question de justice, il est de la dignité de la Chambre de la décider et de ne pas l'ajourner indéfiniment.

Quant à moi, j'ai la conviction intime que quand la question aura été bien approfondie, la Chambre décidera, à une imposante majorité, que l'injustice qui existe aujourd'hui ne peut être maintenue plus longtemps.

On nous dit que la discussion actuelle prouve que la solution de la question sera très difficile, qu'il surgira une foule de réclamations qui viendront à rencontre de la proposition de l'honorable M. Jouret.

Mais qu'est-ce que cela prouve ? Parce qu'une question est difficile, faut-il l'ajourner indéfiniment ? Croyez-vous qu'elle sera moins difficile, lorsque la grande commission que vous avez instituée aura dit son dernier mot ? Peut-être, au contraire, la solution deviendra plus difficile qu'aujourd'hui. Car, je dirai franchement ma pensée, parce que j'ai l'habitude de le faire, il me semble que l'intention du gouvernement est de compliquer la question, et en la compliquant, on en rendra la solution de plus en plus difficile.

J'insiste donc pour que, conformément à la résolution qui a été prise par la Chambre, la section centrale ne laisse pas passer la session actuelle sans présenter en temps utile un rapport complet sur la proposition de l'honorable M. Jouret.

M. J. Jouret. - Je pense, comme l'honorable M. de Naeyer, que dans le moment actuel nous ne pouvons arriver à un résultat ; mais je crois aussi que la section centrale est dans l'obligation d'examiner la question et d'en saisir immédiatement la Chambre. En attendant que nous puissions la discuter, il m'est impossible de ne point répondre à deux observations de M. le ministre des finances.

Il vous a dit que nous avions reconnu que l’iniquité n’existait pas à l’origine. Nous n’avons pas reconnu que l’iniquité n’existait pas à l’origine, (page 232), mais nous avons dit que cette iniquité on l'a subie en silence dès l’origine de cet état de choses, en présence d'un intérêt plus grave, d'un intérêt public ; nous avons dit que la mesure pouvait s'expliquer, dans le principe, par la nécessité de se conformer aux exigences de l'intérêt public, mais quant à en reconnaître la justice, jamais. Messieurs, nous n'avons rien dit de semblable.

C'est la première rectification que j'avais à faire.

Une autre rectification me paraît nécessaire.

M. le ministre des finances a touché incidemment la question du tracé du canal, et en le faisant, il a commis une grave erreur. L'honorable ministre vous a dit qu'on avait détourné la direction du canal au profit du Centre. Il n'en est absolument rien.

- Plusieurs membres. - Oui ! oui !

M. J. Jouret. - Les études qui ont été faites pour le tracé du canal en 1660, par ordre des magistrats de Bruxelles, celles qui ont été faites en 1801 par l'ingénieur français Vionnois, et celles qui ont été faites en 1825 par M. l'ingénieur Vifquin, ont toutes indiqué le tracé actuel et le bief de partage au point de Betrefaite, sans qu'il ait jamais été question d'un tracé qui aurait fait passer le canal par Nivelles.

C'est tellement vrai, que le but principal de l'établissement du canal (l'honorable M. Dolez le sait tout aussi bien que moi ) était de joindre le canal à creuser dans la vallée de la Senne aux canaux de la province de Hainaut et au haut Escaut. Du reste si mes honorables collègues veulent lire à cet égard f ouvrage de M. l'ingénieur Vifquin, ils y trouveront la preuve que jamais autre tracé n'a été considéré comme possible.

Voilà, messieurs, le second point très important sur lequel je désirais répondre immédiatement pour ne pas laisser, jusqu'à l'époque prochaine, j'espère, où nous reprendrons plus efficacement cette discussion, sous l'impression de ce qu'avait dit l'honorable ministre des finances à cet égard.

M. H. de Brouckere. - Est-ce que M. Jouret persiste dans sa proposition.

M. J. Jouret. - Messieurs, il n'y a pas de proposition. Il est entendu que le projet est en section centrale et que la section centrale est dans l'obligation de l'examiner et de faire son rapport à la Chambre.

M. le président. - Il n'y a pas de proposition. Je déclare le débat clos.

- Le chiffre de 3,170,000 francs est mis aux voix et adopté.

« Rivières et canaux : fr. 3,170,000. »

« Routes appartenant à l'Etat : fr. 1,600,000.

« Ensemble : fr. 4,770,000. »

- Adopté.

Discussion du tableau des recettes (I. Impôts)

M. Orts. - Messieurs, il y a quelques articles qui ont été sautés ; on pourrait les voter maintenant, ils ne sont pas de nature à donner lieu à discussion.

Contributions directes, douanes et accises

Accises

« Sel : fr. 5,065,000.

« Vins étrangers : fr. 2,350,000.

« Eaux-de-vie étrangères : fr. 225,000.

« Eaux-de-vie indigènes : fr. 6,000,000.

« Bières et vinaigres : fr. 7,400,000.

« Sucres de canne et de betterave : fr. 4,500,000.

« Glucoses et autres sucres non cristallisables : fr. 15,000.

« Ensemble : fr. 25,565,000. »

- Adopté.

«Garantie

« Droits de marque des matières d'or et d'argent : fr. 225,000. »

- Adopté.

Recettes diverses

« Droits de magasin des entrepôts, perçus au profit de l'Etat : fr. 180,000. »

« Recettes extraordinaires et accidentelles : fr. 40,000.

« Ensemble : fr. 220,000. »

- Adopté.

Enregistrement et domaines

Droits additionnels et amendes

« Enregistrement (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 12,900,000.

« Greffe (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 260,000.

« Hypothèques (principal et 26 centimes additionnels) : fr. 2,650,000.

« Successions (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 7,980,000.

« Droit de mutation en ligne directe (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 1,570,000.

« Droit dû par les époux survivants (principal et 30 centimes additionnels) : fr. 130,000.

« Timbre : fr. 3,700,000.

« Naturalisations : fr. 5,000.

« Amendes en matières d'impôts : fr. 150,000.

« Amendes de condamnations en matières diverses : fr. 130,000.

« Ensemble : fr. 29,475,000. »

- Adopté.

M. le président. - Nous passons maintenant à l'article Postes.

- De toutes parts. - A demain ! à demain !

- La séance est levée à 4 heures et demie.