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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 30 mars 1859

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1858-1859)

(page 815) (Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Boe fait l'appel nominal à 2 heures et un quart et lit le procès-verbal de la séance précédente.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

II présente ensuite l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Les membres de l'administration communale de Buissonville prient la Chambre d'introduire, dans les élections à tous les degrés, le vote par lettre alphabétique. »

« Même demande d'habitants de Grand-Leez. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi concernant une nouvelle répartition des représentants et des sénateurs.


« Des combattants de 1830 réclament l'intervention de la Chambre pour obtenir la pension qui est accordée à leurs frères d'armes. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« M. de Haerne demande un congé de quelques jours pour cause d'indisposition. »

- Accordé.


« M. Godin, retenu pour affaires de famille, demande un congé jusqu'au 5 avril prochain. »

- Accordé.

Proposition de loi autorisant à liquider les wachtgelden et les toelagen

Lecture

M. Lelièvre, d'après l'autorisation des sections, donne lecture de la proposition suivante :

« Le soussigné a l'honneur de déposer la proposition suivante :

« Art. 1er. Le ministre des finances est autorisé à liquider, par voie transactionnelle, jusqu'à concurrence de la somme de 207,000 francs, les arriérés, en principal, des traitements d'attente (wachtgelden) et des traitements supplémentaires (toelagen) des titulaires dénommés dans le tableau ci-annexé, à l'égard desquels il a été rendu des jugements ou arrêts passés en force de chose jugée.

« Art. 2. Le crédit nécessaire à ces payements sera rattaché au budget de la dette publique de l'exercice 1859.

« Fait à Bruxelles, le 29 mars 1859.

« X. Lelièvre. »


Tableau présentant l’évaluation des arriérés, en principal, des traitements d'attente et traitements supplémentaires (wachtgelden et toelagen) des titulaires à l'égard desquels il a été rendu des jugements ou arrêts passés en force de chose jugée ,sauf vérification ultérieure, de la somme à allouer à chaque intéressé

« 1. Coupez, receveur particulier de l'Etat, à Binche : fr. 3,230 45.

« 2. Huysraan-d'Houssem, receveur général de l'Etat, à Bruxelles : fr. 25,379 19.

« 3. Marbais du Graty, receveur général de l'Etat, à Mons : fr. 26,579 31.

« 4. Van Zuylen Van Nyevelt, receveur général de l'Etat, à Bruges : fr. 43,597 33

« 5. Dethier, receveur particulier de l'Etat, à Verviers : fr. 8,877 12.

« 6. Jochams, receveur particulier de l'Etat, à Nivelles : fr. 13,315 67.

« 7. Lints, receveur particulier de l'Etat, à Louvain : fr. 17,754 23

« 8. Rabaut, receveur particulier de l'Etat, à Furnes : fr. 8,877,12.

« 9. Gillard-Namur, receveur particulier de l'Etat, à Huy : fr. 10,652 55.

« 10. Nypels, receveur particulier de l'Etat, à Ruremonde : fr. 8,015 86

« 11. Desoer, receveur général de l'Etat, à Liège : fr. 26,631,37

« 12 Robinet, receveur particulier de l'Etat, à Hasselt : -

« 13. Delecourt, receveur particulier de l'Etat, à Tournai : fr. 387 99

« 14. Orts de Bulloy, président du tribunal de première instance, à Mons : fr. 10,582 01.

« 15. Bequet de Severin, directeur des contributions, à Namur : fr. 25,925 90.

« Total : fr. 229,824 10.

« Observations. - Ces sommes représentent le principal des arriérés des traitements d'attente et des traitements supplémentaires, tels qu'ils résultent des jugements ou arrêts et des vérifications ultérieures qui ont eu lieu. Aucune somme n'est comprise dans ce tableau pour intérêts ; les ayants cause y ont renoncé ou doivent en faire abandon. »

M. le président. - M. Lelièvre demande à développer cette proposition aujourd'hui en huit.

M. B. Dumortier. - Messieurs, j'appuie la demande de développer la proposition un jour déterminé. La question dont il s'agit est d'une excessive gravité, c'est l'une des plus graves que la Chambre puisse avoir à examiner.

Il s'agit de savoir si, sur l'initiative de l'honorable M. Lelièvre, Chambre va revenir sur dix ou onze votes qu'elle a émis.

Il est donc important que la discussion sur la prise en considération soit sérieuse.

L'honorable M. Lelièvre paraît prendre goût aux propositions d'argent ; il a fait une proposition en faveur d'un honorable général, il en a fait une eu faveur de Bonne et Geens ; maintenant il en fait une où il est question de 200 et quelques mille francs. Chacun ici a le droit d'initiative, chacun a le droit d'affectionner ces sortes de propositions, mais je dis que la discussion doit être sérieuse et j'appuie, je le répète, la demande de fixer les développements à un jour déterminé.

M. Lelièvre. - Le mode de procéder de l'honorable M. Dumortier est tout à fait insolite. Avant de prendre la parole sur ma proposition, il devrait attendre que je l'eusse développée. Alors seulement il pourra la combattre. Le débat soulevé est donc tout à fait prématuré.

L'honorable membre parle de diverses propositions que j'ai soumises à la Chambre ; je n'ai pas à regretter l'initiative que j'ai prise en ces circonstances, puisque mon opinion a été partagée par les deux Chambres et que mes propositions ont été converties en lois.

Quant au projet dont nous nous occupons, je suis heureux de le déposer parce qu’il consacre un système de haute justice. Lorsqu'il s'agira de le discuter, je démontrerai que jamais la Chambre ne s'est prononcée définitivement sur la question soulevée par ma proposition, et que la législature ne peut, sans faire un véritable coup d'Etat parlementaire, se refuser à liquider des avances dont la légitimité a été reconnue par l'autorité compétente.

M. B. Dumortier. - L'honorable membre a grand tort de prétendre que le peu de paroles que j'ai prononcées sont intempestives ; j'ai le droit de demander que la Chambre fixe un jour pour la discussion sur la prise en considération et j'ai le droit de dire pourquoi je le demande.

Quant à la proposition en elle-même, l’honorable membre a beau dire, il ne fera croire à personne que la Chambre n'a pas repoussé dix ou onze fois son système. Tous les membres de la Chambre qui siégeaient alors le savent.

- La Chambre décide qu'elle entendra aujourd'hui en huit les développements de la proposition.

Projet de loi révisant le code pénal (livre II, titre VII)

Discussion des articles

Titre VII. Des crimes et des délits contre l’ordre des familles et contre la moralité publique

Chapitre III. Des crimes et des délits tendant à empêcher ou à détruire la preuve de l’état civil de l’enfant
Article 420

M. le président. - La discussion continue sur l'article 420.

M. Tack.—Messieurs, l'article 420 prescrit à toutes les personnes présentes à un accouchement de faire la déclaration de naissance conformément aux articles 55, 56 et 57 du Code civil, c'est-à-dire que, d'après les termes de la disposition, telle qu'elle est formulée dans le projet, les témoins quelconque présents à l'accouchement, aussi bien que l'homme de l'art, le médecin, le chirurgien, l'accoucheur, la sage-femme, sont obligés, non seulement de faire la déclaration du fait de la naissance, mais, en outre, d'indiquer le nom du père et de la mère, en cas de naissance d'un enfant légitime, le nom de la mère en cas de naissance d'un enfant naturel.

Sous l'empire du Code pénal actuellement en vigueur, on a débattu la question de savoir si les personnes présentes à l'accouchement, n’importe lesquelles, étaient tenues de révéler le nom de la mère ou bien pourraient se borner à faire connaître à l'officier de l'état civil le fait de la naissance.

Cette question a été décidée en sens différent par la cour de cassation de France et par la cour de cassation de Belgique.

La cour de cassation de France s'est prononcée pour la négative, en s'appuyant sur le texte de l'article 346 du Code pénal, lequel ne se réfère pas à la disposition de l'article 57 du Code civil et ne fait que rappeler les articles 55 et 56 du même Code. Or, il est à remarquer que c'est l'article 57 qui exige la mention du nom de la mère.

La cour de cassation de Belgique, se prévalant plutôt de l'esprit de la loi, et considérant l'article 57 comme le corrélatif des articles 55 et 56, a décidé, au contraire, que toutes les personnes, présentes à l’accouchement, étaient tenues, d'après l’ordre successif indiqué dans le Code civil, non seulement de déclarer le fait de la naissance, mais encore d'indiquer le nom de la mère.

C'est à la jurisprudence de la cour de cassation de Belgique que la commission spéciale chargée d'élaborer le projet de loi, s’est ralliée ; cette commission a formulé en dispositions de loi claires et précises, de façon à éviter toute équivoque, le système consacré par la Cour de cassation de Belgique.

C'est encore à cette jurisprudence que le gouvernement s'est rallié, car le gouvernement adopte la proposition, telle qu'elle a été formulée par la commission de rédaction. La commission de la Chambre, qui a été chargés d'examiner le projet (page 816) de loi, a choisi un système mixte, un système qui n'est celui, ni de la cour de cassation de France, ni celui de la cour de cassation de Belgique.

Et en effet, messieurs, d'après le système de votre commission, le médecin, le chirurgien, l'accoucheur, l'homme de l'art, la sage-femme sont dispensés d’indiquer le nom de la mère à l'officier de l'état civil, en cas de naissance d'un enfant naturel lorsque le secret leur a été imposé, peu importe que l'accouchement ait lieu au domicile ou hors du domicile de la mère ; tandis que toute autre personne qui a été présente à l'accouchement, est tenue, non seulement de déclarer le fait de la naissance, mais encore de faire connaître le nom de la mère. La cour de cassation de France dispensait toutes les personnes présentes à l’accouchement en même temps que le médecin.

Messieurs, avant d'entrer dans le fond du débat, je crois devoir présenter une observation, au sujet de la rédaction adoptée par la commission.

La commission adopte le même texte que celui qui nous a été soumis par la commission spéciale et que le gouvernement a fait sien, sauf qu'elle ajoute un paragraphe à ce texte ; or, il me semble que ce paragraphe ne rend pas la pensée de la commission d'une manière bien claire et bien nette. Il est vrai que cette pensée est formulée en termes très catégoriques dans le rapport de l'honorable M. Lelièvre, mais cela ne suffit pas. A prendre isolément le texte du paragraphe, il prête à l'interprétation.

En effet comment l'article 420, amendé par la commission, est-il conçu ? « Toute personne qui, ayant assisté à un accouchement, n'aura pas fait la déclaration à elle prescrite par les articles 55, 56 et 57 du Code civil, sera punie d'un emprisonnement de huit jours à trois mois et d'une amende de 20 fr. à 200 fr. »

La commission ajoute : « Sans préjudice, toutefois, de ce qui sera dit en l'article 539, en ce qui concerne les médecins, chirurgiens, officiers de santé et sage-femmes. »

Quelle est la disposition de l'article 539 ? Cette disposition défend aux hommes de l'art de divulguer les secrets qui leur sont confiés à l'occasion de l'exercice de leur profession, sauf quand ils sont appelés à témoigner en justice ou quand la loi leur en fait une obligation. A part les explications données dans le rapport, ne serait-on pas tenté de dire que les mots : « sans préjudice, etc. », sont un simple avertissement donné à l'homme de l'art, ou, si l'on veut, une défense d'aller au-delà des déclarations prescrites par les article 55, 56 et 57 du Code civil, de faire d'autres révélations que celles auxquelles la loi l'oblige.

Dans un sens inverse ne pourrait-on pas prétendre que le paragraphe s'applique aussi bien, vu sa généralité, aux articles 55 et 56 qu'à l'article 57, et dans ce cas les médecins ne seraient plus tenus de faire aucune déclaration, pas même de faire connaître à l'officier de l'état civil le fait de la naissance.

La commission aurait mieux fait de dire d'une manière expresse, plutôt que de renvoyer à l'article 559, que l'homme de l'art ne serait pas tenu, en cas de naissance illégitime, de déclarer le nom de la mère quand le secret lui aura été imposé.

Entrant maintenant dans le fond de la question, je me demande quel est le but de l’article 420. C'est de protéger l'enfant, de l'entourer de sollicitude, d'assurer son état civil. Quel est ici l'élément essentiel de l'état civil de l'enfant ? C'est la filiation, la qualité de fils ou de fille de telle ou telle ; quelle est l'indication substantielle ? C'est celle du nom de la mère.

Biffez le nom de la mère de l'acte de naissance, que restera-t-il ? A la vérité l'acte de naissance constatera qu'il est né tel jour, à telle heure, un enfant du sexe masculin ou féminin, peut-être aura-t-on ajouté les prénoms, mais l'état civil proprement dit ne sera rien moins que constaté.

Que signifie un acte portant par exemple : Par devant moi, officier de l'état civil, a comparu un tel qui a déclaré qu'un enfant du sexe masculin est né aujourd'hui à Bruxelles ? Plusieurs déclarations de ce genre peuvent se faire le même jour. Quand l'enfant sera dans le cas de faire des recherches pour établir l'accouchement de sa mère et son identité, à quoi un pareil acte de naissance pourra-t-il lui servir, autant vaudrait ne pas en rédiger du tout.

Quels sont les systèmes qu'on oppose à celui que vous préconise le gouvernement ?

Le premier est celui de la commission ; il consiste à défendre à l'homme de l'art de révéler le nom de la mère pour le cas où celle-ci réclame le secret, peu importe que l'accouchement ait lieu hors du domicile ou au domicile de la femme. Mais je ferai remarquer qu'il pourra arriver que, lorsque l'accouchement a lieu en dehors du domicile, la déclaration du nom de la mère devra être faite par la personne chez laquelle l'accouchement a lieu, si elle est présente, car elle vient la première en ordre.

L'autre système est celui qui a été présenté par l'honorable M. Orts. Ce système est en quelque sorte le contre-pied de celui de la commission ! Et, en effet, d'après ce système, ce n'est pas seulement l'homme de l'art, ce n'est pas seulement le médecin, le chirurgien, la sage-femme qui sont dispensés de faire la déclaration au nom de la mère, mais ce sont toutes les personnes qui ont été présentes à l'accouchement.

D'un autre côté, la proposition de l'honorable M. Orts offre cette différence avec celle de la commission, c'est qu'elle ne s'applique qu'au cas où l'accouchement se ferait hors du domicile de la mère.

Je ne comprends pas plus la proposition de l'honorable M. Orts que celle de l'honorable M. Lelièvre.

Il me semble que, plutôt que de dispenser l'homme de l'art de faire la déclaration du nom de la mère quand l'accouchement a lieu loin du domicile, c'est alors surtout qu'il faudrait l’astreindre à déclarer le nom de la mère ; car, c'est dans ce cas que la difficulté sera plus grande pour l'enfant de rechercher un jour quelle est sa mère et d'établir ainsi son état civil. Quoi qu'il en soit, les deux systèmes offrent cette contradiction que, dans certains cas, le nom de la mère pourra et devra être déclaré et que, dans d'autres cas, son nom ne pourra ni ne devra être divulgué.

Quelles sont, messieurs, les objections que l'on fait au système proposé par le gouvernement qui est aussi celui de la commission spéciale qui a élaboré le projet de loi ? La première, c'est qu'il faut sauvegarder l'honneur de la mère.

Mais, messieurs, vous vous trouvez ici devant une option : ou bien vous êtes forcé de faire retomber sur la mère les conséquences de sa faute, ou bien vous êtes obligés de faire peser les conséquences de cette faute sur l'enfant. Entre ces deux situations, le choix n'est pas difficile. (Interruption.)

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Et l'intérêt de la société ?

M. Tack. - Oui, messieurs, la société a aussi ses droits à revendiquer ; il importe à la société, il importe à l'ordre public que l'état civil de chacun soit nettement établi. Au point de vue des droits politiques que l'enfant sera appelé à exercer un jour, au point de vue des obligations dont il est tenu en matière de milice, au point de vue des charges que peuvent occasionner à l'Etat les enfants privés d'état civil, la société a le plus grand intérêt. On ne saurait le contester. Il importe au plus haut point que l'état civil de tous les citoyens indistinctement soit bien déterminé.

Mais, dit-on, il n'y a pas seulement l'honneur de la mère, mais encore celui de la famille à sauvegarder.

Sans doute, messieurs, les faits dont il est ici question sont extrêmement regrettables quand ils se produisent dans une famille ; mais, en définitive, les fautes sont personnelles et avec ce système qui tend à ménager avant tout l'honneur des familles, on serait amené à des conséquences telles, qu'il faudrait éliminer du Code pénal un bon nombre de délits ; je ne puis, pour ma part, admettre cette conséquence.

Une autre objection que l'on fait c'est que l'indication du nom de la mère ne sert à rien ; qu'elle ne sert pas comme preuve de la maternité, à moins que la mère elle-même n'ait plus tard reconnu l'enfant.

Messieurs, il est d'abord évident que l'indication du nom de la mère servira plus tard comme un indice précieux à l'enfant pour faciliter la découverte de la mère, et lui permettre d'établir son état civil.

Au surplus, il a été admis par différentes cours que l'acte de naissance, alors même que la mère n'est point venue confirmer la déclaration, peut servir de commencement de preuve par écrit, soit contre les héritiers de la mère, soit contre la mère elle-même, et, à ce point de vue, la mention n'est point du tout superflue. Je dois reconnaître, toutefois, que cette question est controversée.

J'ajouterai que par cela même que le nom de la mère figure dans l'acte de naissance, elle sera bien plus disposée à reconnaître son enfant, que lorsque son nom n'y figure pas.

Dans ce dernier cas elle sera souvent tentée de croire que sa faute est demeurée inconnue et elle sera moins portée à en faire l’aveu. Le législateur a toujours favorisé les reconnaissances. C'est aller à l’encontre de toutes les dispositions du Code civil qui tendent à cette fin que de dispenser les témoins de l'accouchement de faire connaître le nom de la mère.

On a dit aussi, messieurs, que la déclaration du nom de la mère aura pour effet de multiplier les infanticides, de provoquer à l'avortement.

Messieurs, toutes ces objections ont été faites également à propos de la suppression des tours. On prévoyait de même que la suppression des tours aurait pour conséquence de multiplier le nombre des infanticides, le nombre des avortements. Eh bien, on vous a fait remarquer pas plus longtemps qu'hier que la suppression des tours dans la plupart de nos villes, à Tournai, à Mons, à Bruxelles, à Namur, n'a pas eu les fâcheuses suites qu'on avait redoutées. L'honorable M. de Luesemans vous le disait, le nombre d'infanticides et le nombre d'expositions n'a pas augmenté depuis que la mesure a été prise.

Du reste, messieurs, est-ce que, dans notre pays, avec cette jurisprudence que le gouvernement demande à faire consacrer par un texte formel, les cas d'infanticide ont été plus nombreux qu'ailleurs où l'on a appliqué une jurisprudence différente ? Je ne le pense pas.

Déjà sous la législation ancienne, des peines sévères étaient comminées contre le médecin qui négligeait de faire la déclaration du nom de la mère. Déjà dans la loi de 1792, ces peines avaient été comminées. Le Code civil a reproduit cette disposition, mais il avait omis la sanction. On a senti aussitôt la nécessité de reproduire cette sanction dans le Code pénal. Seulement le texte du Code pénal a donné lieu, du moins en France, à une interprétation qui tendait à dispenser les médecins et les hommes de l'art de faire la déclaration du nom de la mère.

(page 817) Pour ces divers motifs je ne puis adopter la proposition faite par la commission, ni celle faite par l'honorable M. Orts et je compte me rallier à la disposition du gouvernement.

M. Lelièvre, rapporteur. - Je crois devoir maintenir le système de la commission en tant qu'il dispense les médecins, chirurgiens, etc., de faire connaître le nom de la mère, qui n'a réclamé leurs soins que sous le sceau du secret. Le rapport déduit les motifs de cette opinion.

Ne perdons pas d'abord de vue que la cour de cassation de France admet entièrement l'opinion de la commission.

Or, quand une autorité aussi élevée consacre un principe aussi important, on comprend qu'il n'y a là rien de compromettant pour l'ordre public ni pour des intérêts sociaux qui doivent être sauvegardés.

Plusieurs cours d'appel de France ont également partagé l'avis de la cour suprême. On ne fait qu'une objection qui mérite examen.

Dans l'intérêt de l'enfant, on doit déclarer le nom de la mère. Or, c'est cet intérêt qui est digne de la sollicitude des pouvoirs publics.

La réponse n'est pas difficile : quand il s'agit de maternité naturelle, renonciation du nom de la mère dans l'acte de naissance ne confère aucun droit à l'enfant.

La recherche de la maternité est permise, mais cette maternité ne peut résulter que de faits émanés de la mère. Ainsi elle doit avoir reconnu son enfant naturel, et à défaut de cette reconnaissance, l'enfant, a besoin d'un commencement de preuve par écrit, c'est-à-dire d'actes émanés de la mère qui rendent vraisemblable le fait allégué.

L'acte de naissance dans lequel se trouve énoncé le nom de la mère ne confère donc aucun droit à l'enfant naturel qui ne peut puiser les éléments de preuve de la filiation naturelle que dans d'autres documents.

En conséquence renonciation du nom de la mère naturelle dans l'acte de naissance n'a pour résultat que de décréter solennellement le déshonneur de la mère sans intérêt pour l'enfant.

En cette occurrence, je pense que nous devons sanctionner un principe moral et juste tout à la fois.

L'homme de l'art, qui, sous la foi du secret, donna ses soins à une malheureuse femme en péril imminent de perdre la vie ne peut être forcé à une révélation incompatible avec la dignité de son caractère.

Il n'est pas un homme d'honneur qui consente à trahir la confiance qu'on lui a accordée en pareil cas.

Or, la loi ne doit jamais arrêter des prescriptions qui répugnent à la conscience d'un honnête homme.

La loi doit être fondée sur le juste et l'honnête ; elle ne doit pas exiger des choses impossibles, des choses contraires à la conscience et à la moralité publiques.

Quant à l'amendement de l'honorable M. Orts, il me semble douteux que l'on puisse étendre aussi loin l’obligation du secret. Qu'elle soit imposée aux hommes de l'art dont on réclame forcément le ministère, je le conçois, mais qu'elle s'applique même à de simples particuliers, c'est ce que j'admettrais difficilement.

Toutefois la question est digne d'un examen sérieux et approfondi.

C'est pour ce motif que je persiste à demander le renvoi de l'article à la commission qui s'occupera d'un travail spécial sur la difficulté dont nous nous occupons.

Je pense que pour le moment une discussion est prématurée, puisque nécessairement elle devra être reprise après le travail de la commission. Celle-ci s'acquittera de sa tâche avec toute l’attention que mérite la question et elle soumettra à la Chambre le résultat de ses délibérations. Alors la discussion pourra commencer avec fruit et en connaissance de cause.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je n'ai demandé la parole que pour dire à la Chambre que je ne fais pas d'opposition au renvoi de l'article à l’examen de la commission. Comme vous l'a dit l'honorable M. Lelièvre, c'est une question très grave, et quoique jusqu'à présent je sois bien décidé à maintenir le projet du gouvernement, je crois qu'un nouvel examen ne peut être qu'utile. Mais si d'autres orateurs, dans cette assemblée, voulaient encore prendre la parole, je n'y verrais pas d'inconvénient ; cela ne pourrait qu'éclairer la discussion.

M. Orts. - Si personne ne s'oppose à la demande de l'honorable M. Lelièvre, je m'y rallie volontiers. Je désire qu'une question aussi délicate soit mûrement examinée et soit surtout éclairée par le rapport que la commission veut bien nous promettre.

- Le renvoi de l'article à la commission est ordonné.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - La commission pourra s'occuper eu même temps d'un amendement proposé par le gouvernement et qui consiste à autoriser les tribunaux à prononcer séparément soit l'emprisonnement soit une amende, tandis que, d'après le projet primitif, il fallait que les deux peines fussent prononcées cumulativement.

La commission sera chargée d'examiner tous les amendements.

Article 421

« Art. 421. Sera punie des peines portées à l'article précédent, toute personne qui, ayant trouvé un enfant nouveau-né, ne l'aura pas remis, dans les trois jours, à l'officier de l'état civil, ainsi qu'il est prescrit par l'article 58 du code civil.

La présente disposition n'est point applicable h celui qui aurait consenti à se charger de l'enfant, et qui aurait fait sa déclaration à cet égard devant l'autorité communale du lieu où l'enfant a été trouvé.

M. Savart. - Messieurs, l'article 421 est une répétition de l’article du Code pénal de 1810 sauf que dans le dernier paragraphe, on a substitué « l'autorité communale » à « la municipalité ». Je pense qu'il vaudrait mieux dire : « devant l'officier de l'état civil ».

Lorsqu'on trouve un enfant nouveau-né, on doit le remettre à l'officier de l'état civil. Lorsqu'on veut garder l'enfant, il me semble que c'est aussi devant l'officier de l'état civil qu'on doit en faire la déclaration car l'autorité communale devrait renvoyer devant l'officier de l'état civil, aux ternies de l'article 58 du Code civil ; soit qu'on garde l'enfant, soit qu'on le remette, il faut qu'il soit dressé procès-verbal, et ce procès-verbal, c'est l'officier de l'état civil qui doit le dresser.

L'article 58 est ainsi conçu : (L'orateur donne lecture de cet article.)

Or, c'est l'officier de l'état civil qui est chargé de tout cela, et dès lors il me semble qu'il est tout naturel que la déclaration dont il s'agit, se fasse devant l'officier de l'état civil.

M. de Luesemans. - Messieurs, je crois que la rédaction du gouvernement doit être maintenue. Le procès-verbal dont il est parlé à l'article 58 est relatif à l'état civil de l'enfant, mais il s'agit ici d'une simple déclaration à faire devait l'autorité, que celui qui a trouvé l'enfant consent à le garder. Cela ne concerne pas son état civil, et l'officier de l'état civil n'a pas qualité pour recevoir cette déclaration.

Il n'y a d'ailleurs aucun motif de convenance pour agir autrement. Il existe dans les bureaux des administrations communales des registres destinés à recevoir des déclarations de cette nature, qui, sans constituer l’un des éléments de l'état civil, s'y rattachent néanmoins. Ainsi les enfants d'étrangers nés dans le pays qui, aux termes de l'article 9 du Code civil, déclarent dans l'année qui suit leur majorité que leur intention est d'acquérir la qualité de Belges, font leur déclaration devant l'autorité communale dans des registres spéciaux ; erratum, page 831) (ceux qui étant nés dans le territoire cédé, ont fait de semblables déclarations, les ont faites devant la même autorité communale. Dans les bureaux de l'état civil, où tout est pour ainsi dire réduit en formules, il n'y a pas de registres pour ce genre de déclaration, et il me semble inutile d'en exiger.

M. Lelièvre, rapporteur. - D'après les considérations développées par M. de Luesemans, je pense qu'il est préférable de maintenir la rédaction du gouvernement, d'autant plus qu'elle est conforme à semblable disposition du Code civil qui n'a jamais donné lieu à aucun inconvénient. Le Code civil portait « la municipalité ». Le projet remplace ces mots par « l'autorité communale ». Il me semble convenable de ne pas faire de changements à la législature sans de justes motifs.

M. Savart. - Messieurs, l'officier de l'état civil aura l'autorité que vous lui donnerez, et puisqu'il faut un procès-verbal, il me semble qu'il est bien naturel de donner à celui qui est chargé de dresser ce procès-verbal l'autorité nécessaire pour recevoir la déclaration dont il s'agit.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, l'article, tel qu'il est rédigé, reproduit la disposition du Code pénal actuel et n'a donné lieu jusqu'ici à aucune difficulté. Il est donc plus prudent de maintenir cette rédaction que d'y introduire des changements qui pourraient peut-être amener des inconvénients qu'on ne prévoit pas dès maintenant.

Dans l'article 421, il ne s'agit pas de dresser un acte de l'état civil ; il s'agit d'un engagement à prendre et il convient, ce me semble, de faire intervenir l'autorité communale.

- L'article 421, tel qu'il est proposé par le gouvernement, est mis aux voix et adopté.

Article 422

« Art. 422 (projet du gouvernement). Seront punis de la réclusion, les coupables de suppression d'un enfant, de substitution d'un enfant à un autre, ou de supposition d'un enfant à une femme qui ne sera pas accouchée.

« La même peine sera appliquée à ceux qui auront donné l'ordre de commettre l'un de ces crimes, si cet ordre a reçu son exécution. »

« Art. 422, deuxième paragraphe (projet de la commission). La même peine sera appliquée à ceux qui auront donné la mission de commettre l'un de ces crimes, si ce mandat a reçu son exécution. »

Le gouvernement a proposé de dire : « cette mission », au lieu de : ce mandat. »

- L'article, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.

Article 423

« Art. 423. Quiconque aura enlevé ou fait enlever un enfant âgé de moins de sept ans accomplis, sera puni de la réclusion, quand même l'enfant aurait suivi volontairement le ravisseur.

« Quiconque aura recelé ou fait receler un enfant au-dessous de cet âge, sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de cent francs à cinq cents francs.

(page 818) « La même peine sera appliquée à celui qui aura donné la mission de commettre l'un de ces délits, si cette mission a reçu son exécution. »

M. Savart. - Je demande si l'article 423 atteint l'homme qui enlève son propre enfant, alors qu'en cas de divorce, la justice l'a confié, par exemple, à sa femme.

Nous ne pouvons pas confondre la culpabilité d'un homme qui enlève un enfant étranger avec la culpabilité du père qui se laisse entraîner par la nature et qui reprend son enfant, bien que la justice l'ait confié à sa femme.

M. Lelièvre, rapporteur. - Il est évident que cet article n'est pas applicable à celui qui enlève son propre enfant. En effet, la rubrique porte : « Des crimes et délits tendants à empêcher ou à détruire la preuve de l'état civil de l'enfant ». La rubrique, comme on sait, règle l'étendue des dispositions auxquelles elle est relative. Or, bien certainement celui qui enlève son enfant dans le cas dont parle M. Savart, ne commet pas le crime prévu par notre disposition qui ne s'applique qu'aux enfants étrangers au ravisseur.

Les motifs qui ont dicté notre disposition et même le sens littéral de celle-ci ne permettraient pas une extension contraire au vœu du législateur.

M. Savart. - Je prends acte de ce que l'article ne peut s'appliquer qu'à celui qui enlève un enfant étranger.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il n'est entré ni dans la pensée de la commission, qui a élaboré le projet de loi, ni dans celle du gouvernement qui l'a présenté, ni dans celle de la commission de la Chambre qui l'a examiné, de mettre sur la même ligne le père qui enlève son enfant et l'homme qui enlève un enfant étranger ; l'article 423 n'est donc pas applicable au cas prévu par l'honorable M Savart.

- L'article 423, tel qu'il est amendé par M. le ministre de la justice, est adopté.

Article 424

« Art. 424. Ceux qui auront porté ou fait porter à un hospice un enfant au-dessous de l'âge de sept ans accomplis, qui leur aurait été confié, seront punis d'un emprisonnement d'un mois à six mois et d'une amende de vingt-six francs à cent francs.

« Toutefois, aucune peine ne sera prononcée, s'ils n'étaient pas tenus ou ne s'étaient pas obligés de pourvoir gratuitement à la nourriture et à l'entretien de l'enfant, et si personne n'y avait pourvu. »

- Adopté.

Article 425 (disposition particulière)

« Art. 425. Seront punis d'un emprisonnement de huit jouis à un an et d'une amende de vingt-six francs à cent francs, ceux qui, étant chargés d'un enfant au-dessous de sept ans accomplis, ne le représenteront point aux personnes qui ont le droit de le réclamer. »

- Adopté.

M. de Luesemans. - Messieurs, je n'ai pas voulu interrompre la discussion du chapitre, pour faire une observation relative au compte-rendu de la séance d'hier. Hier, j'ai répondu à un discours de l'honorable M, Lelièvre ; j'ai vainement cherché ce discours avant ma réponse ; je l'ai trouvé beaucoup plus loin. Il y a eu une interversion. Je demande s'il n'y aurait pas lieu de faire un nouveau tirage.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - En effet, messieurs, il y aura lieu de faire un nouveau tirage. Moi-même, j'ai dû faire des recherches assez longues, pour trouver une partie des observations de l'honorable M. Lelièvre. Ce sera, du reste, un simple remaniement à opérer.

Chapitre IV. De l’enlèvement des mineurs
Articles 426 et 427

M. le président. - Nous reprenons la discussion du projet de loi. Nous sommes arrivés à l'article 426.

M. Lelièvre, rapporteur. - Je demande que la Chambre discute en même temps l'article 426 et l'art. 427.

- Adopté.

« Art. 426. Sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans celui qui, par violence, ruse ou menaces, aura enlevé ou fait enlever des mineurs.

« Art. 427. Si la personne ainsi enlevée est une fille au-dessous de l'âge de seize ans accomplis, la peine sera celle de la réclusion. »

M. Lelièvre. - Je ferai une observation qui me semble décisive en faveur de la réduction de peine proposée par la commission. Aux termes de l'article 425 déjà voté, l'enlèvement d'un enfant âgé de moins de sept ans est puni de la réclusion.

Il est rationnel de frapper d'une peine moindre l'enlèvement d'un enfant âgé de plus de sept ans, mais en dessous de seize.

Sans cela nous punissons de la même peine deux faits qui n'ont pas la même gravité. Pour conserver l'harmonie entre les articles 423 et 427, il :ne paraît préférable d'adopter la proposition de la commission.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, d'après la nouvelle rédaction, l'article 426 serait ainsi conçu :

« Sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans celui qui par violence, ruse ou menace, aura enlevé ou fait enlever des mineurs. »

D'après l'article 423 qu'a cité l'honorable M. Lelièvre, la peine comminée en cas d'enlèvement d'un enfant de moins de 7 ans, est la réclusion.

M. Lelièvre, rapporteur. - Il s'agit de l'article 427.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - La peine est la même dans les cas prévus par les articles 423 et 427. C'est la réclusion ; mais on comprendra facilement les raisons qui font prononcer la même peine dans les deux cas.

Dans l'article 423, il s'agit à la vérité de l'enlèvement d'un enfant âgé de moins de 7 ans, mais il ne fait pas de distinction entre le sexe de l'enfant, et n'exige pas que l'enlèvement ait eu lieu par violence, ruse ou menace ; le crime existe alors même que l'enfant aurait suivi volontairement le ravisseur.

L'article 427 prévoit le cas d'un enlèvement par violence, ruse ou menace vis-à-vis d'une fille âgée de moins de 16 ans ; si donc d'un côté le fait prévu par l’article 429 est moins grave en raison de l'âge de la victime que celui prévu par l'article 423, de l'autre il l'est beaucoup plus en raison des circonstances de violence, de ruse de menace ou qui sont exigées et dès lors c'est avec raison, que la même peine est prononcée dans les deux cas.

M. Lelièvre, rapporteur. - En ce qui me concerne, je pense que l'emprisonnement de deux à cinq ans est une peine plus que suffisante. Il s'agit en effet d'un acte qui d'ordinaire est le résultat d'une passion violente à laquelle l'agent a obéi sans qu'il y eût une perversité bien grande de sa part, les faits de cette nature me paraissent ne devoir être punis que d'une peine correctionnelle. La réclusion, peine criminelle, me semble excéder les nécessités de la répression. Je ne puis donc à cet égard partager l'avis du gouvernement.

M. Muller. - Je comprends parfaitement que l'on commine la peine du la réclusion dans le cas de l'article 427, quand l'enlèvement a pour but de satisfaire à de mauvaises passions ; mais ce que je ne m'explique pas, c'est que dans la nouvelle rédaction du ministre on ait confondu le tout ; ainsi si on enlève une fille âgée de 7 ans et un mois, sans la circonstance aggravante dont parlait M. le ministre delà justice, la peine serait la réclusion.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il faut qu'il y ait violence, ruse ou menace dans les deux cas.

M. Muller. - Mais vous aviez ajouté dans votre projet primitif : dans le but d'abuser, de prostituer ou d'épouser. Ces mots expliquent votre pensée ; ils devraient être maintenus dans le texte de la loi.

M. Pirmez. - Je crois que la convenance de supprimer les mots que vient de rappeler l'honorable préopinant est parfaitement démontrée ; il s'agit de faits tellement différents, qu'on ne peut décemment les mettre sur la même ligne : l'enlèvement dans le but d'abuser, d'épouser ou de prostituer la personne enlevée.

Quant à l’élévation de la peine, elle se justifie parfaitement par cette circonstance qu'il s'agit ici d'enlèvement de jeunes filles, fait qui, quel qu'en ait été le mobile, a toujours une gravité plus grande que l'enlèvement d'un garçon ; leur réputation est toujours plus ou moins entamée par un fait de cette nature.

Ce motif justifie parfaitement la peine plus sévère dans l'article 427 que dans l'article 423.

- Les articles 426 et 427 proposés par M. le ministre de la justice sont successivement mis aux voix et adoptés.

Articles 428 et 429

« Art. 428. Dans les cas prévus par les articles précédents, les coupables pourront étlre condamnas à l'interdiction, conformément à l'article 44. »

- Adopté.


« Art. 429. Lorsque la fille au-dessous de l'âge de 16 ans aura consenti à son enlèvement ou suivi volontairement le ravisseur, celui-ci sera puni d'un emprisonnement de deux ans à cinq ans, s'il est majeur ; et d'un emprisonnement de trois mois à un an, s'il est mineur. »

- Adopté.

Article 430

« Art. 430. Les peines portées par l'article précédent ne sont pas applicables à celui qui aura enlevé des mineurs émancipés. »

M. Lelièvre. - Dans l'impression des amendements de M. le ministre, il s'est glissé une erreur. On a énoncé l'article 439 au lieu de l'article 430.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il y avait une faute d'impression dans l'article proposé par la commission. Cet article porte : Les peines portées « par les articles précédents » ne sont pas applicables à celui qui aura enlevé des mineurs émancipés ; il faut dire : « par l'article précédent ».

- L'article 430, proposé par M. le ministre de la justice, est mis aux voix et adopté.

Article 431

(page 819) « Art. 431. Le ravisseur qui aura épousé la fille qu'il a enlevée, et ceux qui auront participé à l'enlèvement, ne pourront être poursuivis qu'après que la nullité du mariage aura été définitivement prononcée. »

- Adopté.

Article 430

M. Orts. - Il vient de se glisser une erreur matérielle, je le crains, dans le vote de l'article 430 ; la pensée du gouvernement et de la commission a été de déclarer que les peines prononcées par le Code contre celui qui enlève une fille mineure dans le cas prévu par l'article précédent sans violence sans ruse ni menace, de son plein consentement, ne sont pas applicables lorsqu’il s'agit d'une mineure émancipée ; que, par exemple, celui qui aura enlevé une jeune femme mineure, mais émancipée par le mariage, n'est pas frappé de peine cornue celui qui aura enlevé une jeune fille.

C'est là, je pense, la pensée qu'on a voulu exprimer ; mais il me semble que l'article 430 de la rédaction nouvelle votée par la Chambre ne traduit pas cette pensée exactement. On a voulu dire que les peines portées par l'article 429 ne sont pas applicables à celui qui aura enlevé des mineurs émancipés, et l'on dit que les peines de l'article ne sont pas applicables aux mineurs émancipés. C'est-à-dire que le texte applique à l'auteur du délit ce que l'esprit applique à la victime.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est évidemment dans ce sens que la Chambre a entendu voter l'article 430. Le doute pouvait naître de ce que, dans l'impression des amendements, on a omis les mots « à celui qui aura enlevé des mineurs émancipes ».

M. le président. - En résumé, la Chambre a adopté l'article proposé par le gouvernement, par la commission, sauf qu'on a substitué « l’article précédent » à « les articles précédents », de sorte que l'article 429 seulement n'est pas applicable à celui qui aura enlevé des mineurs émancipés.

M. B. Dumortier. - Bien que je sois complétement étranger aux matières dont nous nous occupons et que je me sois abstenu jusqu’à présent de prendre part à la discussion, je dois cependant faire remarquer qu'il y a, dans les observations présentées par l'honorable M. Orts, quelque chose qui me semble contraire aux principes de la morale. L'honorable membre a l'air de croire que celui qui enlève une jeune femme serait moins coupable que celui qui enlève une mineure.

M. Orts. - C'est conforme au Code pénal actuellement en vigueur.

M. B. Dumortier. - Cela ne me paraît nullement concluant. Puisque nous faisons un nouveau Code, ce n'est pas pour y reproduire les défectuosités du précédent.

Comment ! la femme mariée pourrait être impunément enlevée ! Mais n'a-t-elle donc pas des engagements sacrés envers son mari et peut-elle impunément les violer ?

M. Orts. - C'est l'affaire du mari. (Interruption.)

M. B. Dumortier. - A quo bon faire une loi pénale alors ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je demande la parole pour faire remarquer...

M. B. Dumortier. - Permettez, M. le ministre, je n'ai pas fini ; vous êtes bien pressé ; la discussion marche cependant assez vite ; jusqu'à présent je n'y ai pris aucune part.

Je dis, messieurs, que, selon moi, l'enlèvement d'une femme mariée est un fait nécessairement grave. Il est possible que le Code actuel ne le punisse pas, mais nous faisons un Code nouveau précisément pour obvier au vice de l'ancien ; et je demande, pour mon compte, une explication bien précise et qui résolve la question dans un sens conforme aux justes exigences de la morale publique.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - J'ai demandé la parole tout à l'heure, en interrompant l'honorable M. Dumortier, pour faire remarquer que l'article 420 et les articles relatifs à l'enlèvement sont adoptés. L'honorable M. Orts faisait simplement une observation quant à la rédaction de l'article 430, sur sa forme matérielle, si je puis ainsi dire, à propos d'une omission de trois mots, qu'il avait cru remarquer dans cet article. A cette occasion l'honorable M. Dumortier discute de nouveau toute la théorie du Code relative à l'enlèvement.

Je n'ai pas à examiner son appréciation, je ferai remarquer seulement que si l'honorable M. Dumortier est d'avis qu'il faille punir l'enlèvement de femmes mariées ou de filles majeures qui ont consenti à se faire enlever, il aurait dû déposer un amendement. Nous aurions pu alors examiner son opinion qui, je dois le dire, est assez nouvelle.

M. B. Dumortier. - Et si l'enlèvement a lieu sans leur consentement ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Alors le fat tombe sous l'application d'autres articles du Code. Du moment que vous enlevez quelqu'un contre son consentement, vous portez atteinte à la liberté individuelle, vous l'arrêtez, vous le séquestrez, vous tombez sous l'application d'autres articles du Code.

II s'agit ici de l’enlèvement de personnes qui n'ont pas la disposition d'elles-mêmes, qui ne peuvent pas donner un consentement valable, et ; ce fait est puni selon le degré de gravité qu'il présente, selon les circonstances dans lesquelles il est commis.

Mais, quand il s'agit d'une femme mariée ou d'une fille majeure, qui ont l'une et l'autre la libre disposition de leur personne, la loi n'atteint pas le ravisseur. Le système de l'honorable M. Dumortier est donc nouveau et s'il veut qu'il soit examiné il doit le formuler par amendement.

M. Lelièvre. - Je prie l'honorable M. Dumortier de ne pas perdre de vue l'objet de l'article 430 et du chapitre en discussion., Il s'agit de l'enlèvement des mineurs. Or à ce point de vue nous disons que l'enlèvement des mineurs émancipés ne tombe pas sous la disposition de l'article 430 parce que les mineurs, ayant par leur mariage ou leur émancipation l'administration de leurs personnes et de leurs biens, sont présumés avoir l'intelligence nécessaire, tandis que les mineurs non émancipés que nous voulons protéger spécialement n'ont pas aux yeux de la loi cette intelligence.

Mais celui qui enlèvera une femme mariée sera atteint, suivant les circonstances, par d'autres dispositions. Il pourra être poursuivi du chef d'adultère, si le mari porte plainte.

Si l'enlèvement a eu lieu contre le consentement de la femme, il y aura lieu à l'application des dispositions concernant la séquestration ou l'arrestation arbitraire.

En conséquence des dispositions pénales ne feront pas défaut ; seulement celles relatives aux mineurs ne seront pas applicables, à raison de la qualité de mineure émancipée dans la personne de la femme.

Chapitre V. De l’attentat à la pudeur et du viol
Articles 432 à 436

« Art. 432. Tout attentat à la pudeur commis sans violence ni menaces, sur la personne ou à l'aide de la personne d'un enfant de l'un ou de l'autre sexe, âgé de moins de quatorze ans accomplis, sera puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans.

« La peine sera la réclusion, si l'enfant était âgé de moins de onze ans accomplis. »

- Adopté.


« Art 433. L'attentat à la pudeur, commis avec violences ou menaces, sur des personnes de l'un ou de l'autre sexe, sera puni d'un emprisonnement de six mois à cinq ans.

« Si l'attentat a été commis sur la personne d'un enfant au-dessous de l'âge de quatorze ans accomplis, le coupable subira la réclusion. »

- Adopté.


« Art. 434. Il y a attentat dès qu'il y a commencement d'exécution. »

- Adopté.

« Art. 435. Sera puni de la réclusion quiconque aura commis le crime de viol, soit à l'aide de violences du de menaces graves, soit en abusant d'une personne qui, par l'effet d'une maladie, par l’altération de ses facultés ou par toute autre cause accidentelle, avait perdu l'usage de ses sens, ou eu avait été privée par quelque artifice.

« Si le crime a été commis sur la personne d'un enfant au-dessous de l'âge de quatorze ans accomplis, le coupable subira la peine des travaux forcés de dix à quinze ans. »

- Adopté.


« Art. 436. Si le viol a causé la mort de la personne sur laquelle il a été commis, le coupable sera puni des travaux forcés de quinze à vingt ans. »

- Adopté.

Article 437

M. le président. - M. le ministre de la justice a proposé une nouvelle rédaction de l'article 437, ainsi conçue :

« Art. 437. Le minimum des peines des articles précédents sera levé des deux tiers de la distance qui sépare le minimum du maximum :

« Si les coupables sont les ascendants de la personne sur laquelle ou à l'aidé de laquelle a été commis l'attentat ;

« S'ils sont de la classe de ceux qui ont autorité sur elle ;

« S'ils sont ses instituteurs ou ses serviteurs à gages, ou les serviteurs des personnes ci-dessus désignées ;

« Si l'attentat a été commis, soit par des fonctionnaires publics ou des ministres des cultes, qui ont abusé de leur position pour le commettre ;

« Soit par des médecins, chirurgiens», accoucheurs ou officiers de santé, dans les prisons, les hôpitaux, les hospices ou autres établissements publics où ils exercent leurs fonctions, et envers des personnes confiées à leurs soins ;

« Enfin, si dans les cas des articles 433, 435 et 436, le coupable, quel qu’il soit, a été aidé, dans l'exécution du crime ou du délit, par une ou plusieurs personnes. »

M. Lelièvre, rapporteur. - L'amendement proposé par le gouvernement est une véritable amélioration. Il ne punit d'une peine plus (page 820) grave les membres des cultes que quand ils ont abusé de leur position pour commettre le crime. Je pense que les règles de la justice justifient cette disposition.

- L'article, rédigé comme le propose M. le ministre, est adopté.

Article 438

M. le président. - M. le ministre de la justice a proposé de rédiger l'article 438 comme suit :

« Art. 438. Dans les cas prévus par le présent chapitre, les coupables seront toujours condamnés à l'interdiction de l'exercice des droits énoncés aux numéros 3, 4, 5 et 7 de l'article 42.

« Si l'attentat a été commis par le père ou la mère, le coupable sera en outre privé des droits et avantages à lui accordés sur la personne et sur les biens de l'enfant par le Code civil, livre I, titre IX, « de la puissance paternelle ».

- Cet article est adopté.

Chapitre VI. De la prostitution ou corruption de la jeunesse
Article 439

« Art. 439. Quiconque aura attenté aux mœurs, en excitant, facililant ou favorisant habituellement, pour satisfaire les passions d'autrui, la débauche ou la corruption des jeunes gens, de l'un ou de l'autre sexe, au-dessous de l'âge de vingt et un ans et au-dessus de l'âge de quatorze ans accomplis, sera puni d'un emprisonnement de trois mois à deux ans et d'une amende de vingt-six francs à deux cents francs. »

M. Pirmez. - Le rapport de la commission décide une question qui a fait l'objet d'une vive controverse : c'est celle de savoir s'il est nécessaire qu'il y ait pluralité de victimes pour que le délit existe.

Le Code actuel porte :

« Quiconque aura excité à la débauche ou à la corruption de la jeunesse. » On avait fait résulter de ce terme collectif la nécessité de plusieurs victimes pour que la disposition fût applicable.

La commission a pensé que cette circonstance n'était pas essentielle au délit, elle a attaché à la substitution des termes « jeunes gens », le mot « jeunesse », la portée de trancher cette difficulté. Je désire savoir si M. le ministre de la justice partage cette manière de voir. Son adhésion tranchera définitivement cette controverse toujours renaissante.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je partage complétement la manière de voir de la commission.

Je ne pense pas qu'il faille pluralité de victimes ; seulement il faut la multiplicité des faits, quand même il n'y aurait qu'une seule victime, pour tomber soirs l'application de l'article 439.

Il ne pourra plus s'élever de difficulté sur ce point.

M. Lelièvre, rapporteur. - Je pense qu'il n'est pas nécessaire qu'il y ait pluralité de victimes. Il suffit de faits réitérés sur la même personne. C'est en ce sens que la commission soumet l'article au vote de la Chambre.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il faut, en deux mots, la multiplicité des faits, sans qu'il faille pluralité de victimes.

- L'article est adopté.

Articles 440 et 441

« Art. 440. Sera punie d'un emprisonnement de deux ans à cinq ans et d'une amende de cinquante francs à cinq cents francs, toute personne qui aura attenté aux mœurs, eu excitant, facilitant ou favorisant, pour satisfaire les passions d'autrui, la débauche ou la corruption des jeunes gens de l'un ou de l'autre sexe, au-dessous de l'âge de quatorze ans accomplis. »

- Adopté.


« Art. 441. Le fait énoncé à l'article précédent, sera puni de la réclusion, s'il a été commis envers un enfant qui n'avait pas accompli sa onzième année, sans néanmoins que la simple tentative puisse être poursuivie. »

- Adopté.

Article 442

« Art. 442. Le minimum des peines portées par les articles précédents, sera toujours porté aux deux tiers du maximum, fixé par les mêmes dispositions :

« Si les coupables sont les ascendants de la personne prostituée ou corrompue,

« S'ils sont de la classe de ceux qui ont autorité sur elle,

« S'ils sont ses instituteurs, ses serviteurs à gages ou eerviteurs des personnes ci-dessus désignées,

« S'ils sont fonctionnaires publics ou ministres d'un culte. »

Le gouvernement a proposé l'amendement suivant :

« Le minimum des peines des articles précédents sera élevé des deux tiers de la distance qui sépare le minimum du maximum (le reste comme au projet).

- L'article, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.

Article 443

« Art. 443. Dans les cas prévus par le présent chapitre, les coupables seront toujours interdits de l'exercice des droits spécifiés aux n° 3, 4, 5 et 7 de l'article 42, conformément aux articles 43 et 44.

« Si l'attentat a été commis par le père ou la mère, le coupable sera en outre privé des droits et avantages à lui accordés sur la personne et les biens de l'enfant par le Code civil, livre I, titre IX, de la puissance paternelle. »

- Adopté.

M. le président. - Le gouvernement a proposé les modifications suivantes :

« Supprimer les mots : conformément aux articles 43 et 44, ajouter : les coupables pourront de plus être placés sous la surveillance spéciale de la police pendant cinq à dix ans ».

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je ferai observer, messieurs, que le paragraphe additionnel que je propose doit arriver à la fin de l'article.

La commission avait proposé de faire de cette disposition un article à part ; mais je pense qu'il vaut mieux en faire le paragraphe final de l'article 443.

- La proposition du gouvernement est mise aux voix et adoptée.

Chapitre VII. Des outrages publics aux bonnes mœurs
Article 445

« Art. 445. Quiconque aura exposé, vendu ou distribué des chansons, pamphlets ou autres écrits imprimés ou non, des figures ou des images contraires aux bonnes mœurs, sera condamné à un emprisonnement de huit jours à six mois et à une amende de vingt-six francs à cinq cents francs.

« Toutefois, aucune peine ne sera appliquée à l'éditeur, à l'imprimeur ou au distributeur d'écrits imprimés, lorsque l'auteur est connu et domicilié en Belgique. »

- Le gouvernement a proposé la suppression du deuxième alinéa.

M. Lelièvre. - J'admets la suppression du second alinéa mais seulement comme inutile. Il est bien entendu que le principe constitutionnel consacré par cette disposition ne recevra pas moins son exécution.

Il en est de même de la suppression proposée par le gouvernement à l'article suivant. Cette suppression est uniquement fondée sur l'inutilité d'une disposition formelle. Voilà comment je comprends l'amendement du gouvernement.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est pour le motif que vient d'indiquer l'honorable rapporteur, que je propose la suppression de ce paragraphe. Il ne fait que reproduire un principe qui est écrit dans le Constitution.

- L'article 445, tel qu'il est modifié par le gouvernement, est mis aux voix et adopté.

Article 446

« Art. 446. Dans le cas prévu par l'article précédent, l'auteur de l'écrit, de la figure ou de l'image, celui qui les aura imprimés ou reproduits par un procédé artistique quelconque, sera puni d'un emprisonnement d'un mois à un an et d'une amende de cinquante francs à mille francs, sauf, toutefois, l'application à l'imprimeur de l'écrit, du principe posé au paragraphe 2 du précédent article. »

- Le gouvernement propose de supprimer les mots : « Sauf, toutefois, etc. »

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est par la même raison que j’ai donnée tout à l'heure. Ces mots sont inutiles.

- L'article, tel qu'il est modifié par le gouvernement, est mis aux voix et adopté.

Article 447

« Art. 447 Quiconque aura publiquement outragé les mœurs par des actions qui blessent la pudeur, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à un an et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs. »

- Adopté.

Article 448

« Art. 448. Dans les cas prévus au présent chapitre, les coupables pourront de plus être interdits de l'exercice des droits indiqués aux n° 3, 4, 5 et 7 de l'article 42, conformément à l'article 44. »

Le gouvernement propose de supprimer les mots : « Conformément à l'article 44 ».

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Chapitre VIII. De l’adultère et de la bigamie
Article 449

« Art. 449. La femme convaincue d'adultère sera condamnée à un emprisonnement de trois mois à deux ans.

(page 821) « Le mari restera le maître d'arrêter l'effet de cette condamnation, en consentant à reprendre sa femme. »

- Adopté.

Article 450

« Art. 450. La peine portée par l'article précédent sera appliquée au complice de la femme adultère.

« Les seules preuves qui pourront être admises conte le prévenu seront, outre le flagrant délit, celles qui résulteront de lettres ou autres pièces écrites par le prévenu. »

M. Orts. - Messieurs, je demanderai au gouvernement et à M. le rapporteur de la commission de vouloir bien me donner une réponse à la question que voici :

En déclarant dans le premier paragraphe de l'article 450, que la peine comminée contre la femme adultère sera appliquée à son complice, en rappelant ainsi pour ce cas spécial la règle générale que le complice doit être puni comme le coupable principal, on paraît avoir obéi à cette pensée, commune au gouvernement et à la commission, qu'en matière d'adultère il est par la nature des choses impossible d'appliquer les principes généraux sur la complicité et qu'il n'y a ici d'autre complice que le co-auteur.

Je crois que telle a été la pensée du gouvernement et de la commission, parce que, sans cela, il était fort inutile de dire que le co-auteur serait puni comme l'auteur principal, la chose allait de soi. Je crois qu'on a voulu donner satisfaction à une doctrine et à une jurisprudence généralement suivies jusqu'à présent.

Mais, pour faire disparaître toute controverse à cet égard, je demande à la commission et au gouvernement si, dans leur pensée, il est possible qu'il y ait une autre complicité de l'adultère de la femme, que celle dont je viens de parler ; si l'on pourrait punir comme complices, par exemple, ceux qui auraient facilité le délit, ou ceux qui auraient procuré les moyens de le commettre ou de le cacher.

M. Lelièvre, rapporteur. - Je partage complétement l'avis de l'honorable Orts. Les règles générales relatives à la complicité ne sont pas applicables à l'adultère. Il s'agit ici d’une complicité spéciale qui fait l'objet du chapitre en discussion et à l'égard de laquelle on ne peut invoquer les principes de la complicité ordinaire.

Ainsi c'est le co-auteur de l'adultère qui seul peut être puni d'après notre chapitre que forme un tout complet sur la matière.

De même il est bien entendu, comme l'énonce mon rapport, qu'en cas d'adultère du mari, la pénalité n'est pas étendue à la concubine. C'est en ce sens que la commission soumet au vote de la Chambre les articles 450 et 451

Lorsque le projet veut punir le complice, il s'exprime d'une manière formelle à cet égard, notamment dans l'article 450, en ce qui concerne le complice de l'adultère de la femme.

La commission ne propose pas d'étendre à la concubine la pénalité prononcée contre le mari, parce qu'elle ne veut pas qu'on prononce contre elle aucune peine quelconque. Nous adoptons à cet égard ce que nous considérons comme la meilleure jurisprudence.

Quant à la nature de la complicité prévue par l'article 450, il est évident d'après le texte et l'esprit de cet article, que le co-auteur seul est atteint par la loi.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Messieurs, c'est aussi dans ce sens que le gouvernement entend cette disposition. Il y a peu de temps encore, je l'ai examinée très mûrement avec un des membres de la commission qui a rédigé le projet de loi, et nous sommes tombés d'accord que le seul complice punissable est celui dont s'occupe l'article que nous discutons.

- L'article 450 est mis aux voix et adopté.

Article 451

« Art. 451. Le mari convaincu d'avoir entretenu une concubine dans la maison conjugale, sera condamné à un emprisonnement d'un mois à un an.

« La femme pourra arrêter l'effet da cette condamnation, en demandant l'élargissement de son mari. »

- Adopté.

Article 452

« Art. 452. La femme ne pourra être poursuivie pour adultère que sur la plainte du mari, qui sera privé de cette faculté, s'il est dans le cas prévu par l'article précédent.

« Le mari qui aura entretenu une concubine dans la maison conjugale, ne pourra être poursuivi que sur la plainte de la femme, qui sera privée de cette faculté, si elle est dans la cas prévu par l'article 449. »

L'amendement suivant a été présenté par M. Pirmez :

« La femme ne pourra être poursuivie que sur la plainte du mari, le mari sur la plainte de la femme.

« Aucune peine ne sera prononcée lorsque le conjoint du prévenu aura été condamné du chef d'adultère pour un fait antérieur à celui qui donne lieu aux poursuites.

« Toutefois, cette exemption de peines ne pourra résulter d'une condamnation antérieure au fait qui donne lieu aux poursuites, ni de faits antérieurement couverts par la réconciliation ou la prescription. »

La parole est à M. Pirmez pour développer son amendement.

M. Pirmez. - Messieurs, l'amendement que j'ai l'honneur de soumettre à la Chambre a été l'objet de l'examen le plus attentif dans une réunion qui a eu lieu entre M. le ministre de la justice, M. le professeur Haus et moi ; c'est après l'adhésion de ces jurisconsultes éminents que j'en propose l'adoption à la Chambre.

L'adultère de l'un des époux ne peut être poursuivi que sur la plainte de son conjoint ; c'est un principe ancien recueilli par notre législation et dont la convenance est plus que jamais incontestable. La publicité donnée aujourd'hui aux débats des tribunaux augmente les désagréments des poursuites et chacun doit avoir le droit d'écarter de l'intérieur de sa famille les regards indiscrets d'un public avide d'émotions et de scandales.

Sur ce point nulle difficulté, mon amendement maintient ce qui est dans le Code de 1810 auquel le projet est conforme. Mais d'autres questions s'élèvent.

Si l'un des époux a lui-même manqué à la foi conjugale, peut-il faire punir son conjoint qui l'a violée ?

La solution négative de cette question, généralement admise, repose sur la réciprocité des engagements des époux et sur cette considération que celui dont l'inconduite peut-être a été une provocation à la faute de son conjoint est mal venu à le faire frapper par la justice.

Le Code actuel a admis partiellement ce principe : il déclare que la plainte du mari contre sa femme est non recevable s'il a entretenu lui-même une concubine dans la maison commune. Cette disposition est sans réciprocité, la femme ne peut jamais voir sa faute devenir une fin de non-recevoir contre la plainte qu'elle porte contre son mari.

Si donc, le mari et la femme ont tous deux déposé une plainte, l'instance née de la plainte de la femme, dont l'instruction n'est subordonnée a aucune condition, marchera d'abord : son résultat déterminera le sort de la plainte du mari, qui en cas de condamnation de celui-ci, devient non recevable.

Ce système, outre l'absence de réciprocité, présente un grand inconvénient, c'est qu'une faute du mari postérieure à celle de la femme peut assurer l'impunité à celle-ci, qui cependant a la première violé la fidélité conjugale.

Le projet du gouvernement apporte une modification à ce système, il étend la non-recevabilité existante pour la plainte du mari à la plainte de la femme.

Mais cette amélioration quant au fond, à cause de la nature de la procédure dans laquelle elle intervient, amène la situation la plus contradictoire et la plus insoluble.

Supposons que les époux portent respectivement plainte, le mari contre sa femme, la femme contre son mari.

L'un e1 l'autre ne manqueront pas d'exciper de la non-recevabilité de ta plainte, qui seule peut donner lieu à ce qu'il soit passé outre à l'instruction.

Voilà donc le tribunal saisi de la plainte du mari, obligé d'attendre pour savoir si le mari sera condamné dans une autre instance, et s'il prononcera par conséquent la non-recevabilité de la plainte contre la femme.

Mais le juge, qui doit statuer sur le sort du mari, devra, de son côté, surseoir jusqu'à ce que la femme ait été jugée, pour pouvoir apprécier si sa plainte peut être admise.

Les deux tribunaux ou les deux instances, si le même tribunal doit connaître des deux actions, se tiendront donc réciproquement en échec.

Comme cette situalion ne peut avoir de fin, aucune des deux plaintes n'aura effet.

Or, comme il est toujours loisible à l'époux prévenu de déposer une plainte contre son conjoint, il lui sera toujours permis d'empêcher l'action de la justice.

Ce résultat ne peut évidemment être admis.

Mon amendement a pour but d'y pourvoir.

D'où vient le vice du système du projet ?

Evidemment de ce que sa disposition consiste dans l'admission d'une fin de non-recevoir qui paralyse l'instruction des faits.

Il y a un moyen simple de porter remède à cet inconvénient, c'est de changer la faute du plaignant qui constitue maintenant une fin de non-recevoir, en une excuse péremptoire, et tout en permettant ainsi aux débats d'avoir leur cours, d'exempter de peine celui dont l'infidélité a été précédée d'une faute semblable de son conjoint.

Reprenons la position que j'indiquais tantôt de deux plaintes déposées en même temps par deux époux.

Comme il n'y a plus de fin de non-recevoir, les deux instances suivraientl eur cours jusqu'au jugement d'acquittement ou de constatation de l'adultère. Je suppose que toutes deux aient abouti à ce dernier résultat et que les deux prévenus demandent l'application de l'excuse résultant de la faute de son conjoint ; dans chaque instance, évidemment, on consultera le jugement rendu contre le plaignant, et dans celle où les faits constatés à sa charge se trouvent antérieurs à ceux du prévenu celui-ci sera exempt de toute peine.

On le voit, la différence vient de ce que, dans le système du projets l'instruction et, par conséquent, la constatation sont impossibles. Dans celui de mon amendement, au contraire, rien n'empêche de constater tous les faits ; on surseoit seulement, pour prononcer la peine, jusqu'à ce que l'excuse puisse être appréciée.

(page 822) Non seulement la réciprocité est conservée, mais le résultat est en définitive de faire tomber seulement la peine sur le premier coupable.

Un seul des époux sera puni, celui qui n'a pas dans un fait antérieur une cause d'excuse.

Voici le texte que je propose sur ce point :

« Aucune peine ne sera prononcée lorsque le conjoint du prévenu aura été condamné du chef d'adultère pour un fait antérieur à celui qui donne lieu aux poursuites. »

Mais, messieurs, il est d'autres points que nous ne pouvons laisser indécis.

Doit-il être permis à un époux d'invoquer, pour se soustraire à la peine, des faits anciens dont une réconciliation a effacé le souvenir, qui remontent à une époque antérieure à la prescription ou qui ont été, sur sa plainte, expiés par une condamnation ? Nous ne le pensons pas.

Dès l'instant où la réconciliation a réuni les deux époux, ici comme en matière civile, il y a un pardon qui défend de raviver les faits sur lesquels il porte : une ère nouvelle s'est ouverte pour les époux, le passé est comme s'il n'avait pas été.

L'époux qui alors viole ses devoirs conjugaux ne peut donc fouiller le passé pour en exhumer une excuse ; s'il est le premier qui apporte de nouveaux troubles dans le ménage réuni, il doit en subir la peine.

Pour des raisons qu'il est inutile d'indiquer, la loi a établi un terme au-delà duquel elle ne permet pas de remonter pour rechercher des faits punissables.

Ces faits ne peuvent pas plus sortir de l'oubli pour servir d'excuse que pour recvoir la peine qu'ils méritent.

Dès que la prescription est acquise, le fait ne peut donc plus être invoqué ; quand un laps de trois ans s'est écoulé après une faute, elle n'est évidemment plus la cause des égarements du conjoint.

Enfin si l'adultère de l'un des époux a été l'objet d'une condamnation, il est impossible qu'il justifie l'infidélité de l'autre postérieure à cette condamnation ; la peine doit expier le délit ; celui qui a invoqué la force des lois contre son époux ne doit pas tomber dans la même faute, il serait mal venu à invoquer comme excuse, un fait semblable à celui qu'il a fait punir. Ici encore l'égalité doit être la règle, celui qui obtient une condamnation doit montrer ensuite le respect des engagements qu'il a fait sanctionner, et subir la même condamnation s'il les viole encore.

Consacrer ce triple résultat, tel est le but du dernier alinéa de l'amendement que je propose ; il est ainsi conçu :

« Toutefois cette exemption de peines ne pourra résulter d'une condamnation antérieure au fait qui donne lieu aux poursuites, ni de faits antérieurement couverts par la réconciliation ou la prescription. »

Ainsi faire frapper celui qui a le premier violé la foi conjugale, et excuser l'autre époux, mais établir une barrière qui empêche l'effet des fautes d'être éternel, tels sont les résultats que la proposition que j'ai eu l'honneur de soumettre à la Chambre me paraît attendre.

Les graves questions qu'elle soulève sont dans tous les cas dignes d'un sérieux examen.

M. Lelièvre, rapporteur. - Je ne m'oppose pas à ce que l'amendement de l'honorable M. Pirmez soit renvoyé à l'examen de la commission. Toutefois, en ce qui me concerne, je ne pourrais adopter cet amendement, d'abord parce que sa rédaction n'est évidemment pas admissible et doit être changée.

En second lieu, ne perdons pas de vue que l'article 452, tel qu'il est proposé par le gouvernement et admis par la commission, est absolument semblable à une disposition de même nature écrite dans le Code pénal relativement aux mêmes dispositions et qui n'a jamais donné lieu à aucun inconvénient et à aucune difficulté dans la pratique.

Or, dans ces circonstances, est-ce le cas d'admettre des innovations et de substituer à un texte clair une disposition obscure qui, à mon avis, est complétement inutile puisque les difficultés qu'elle soulève peuvent être résolues d'après les principes du droit.

Mon rapport est explicite à cet égard et l'article 452 ne peut dans son exécution donner lieu à aucune difficulté sérieuse.

Toutefois, je désire que l'amendement soit examiné par la commission, et s'il contient quelque chose d'utile, nous nous empresserons d'y faire droit.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je ne vois aucune objection à faire au renvoi à la commission. Le système proposé par l'honorable M, Pirmez, d'accord avec le gouvernement, est selon moi, préférable à celui que consacre le Code pénal, à celui du projet primitif et à celui de la commission de la Chambre ; cependant il est utile qu'il soit soumis à la commission ; et je suis convaincu qu'après examen l'honorable M. Lelièvre reviendra de l'opinion qu'il vient d'exprimer.

M. Pirmez. - Je ne m'oppose pas au renvoi à la commission, mais je veux relever une erreur commise par M. Lelièvre.

L'honorable membre se trompe en disant que le projet du gouvernement reproduit la disposition actuelle du Code pénal en vigueur.

D'après cette législation, si la femme peut faire déclarer la plainte du mari non recevable en produisant un jugement de condamnation pour adultère ou en en obtenant un, il n'y a pas de réciprocité, la plainte de la femme ne peut être repoussée par une semblable fin de non-recevoir.

Dans ce système, en cas de plainte des deux conjoints, celle de la femme sera donc toujours instruite d'abord et elle aboutira à un jugement que rien ne peut empêcher.

Le projet qui nous est soumis introduit la réciprocité ; c'en au fond une amélioration que j'admets. Mais à cause de la forme qui est la non-recevabilité des plaintes, il sera toujours impossible de commencer l'une ou l'autre des deux poursuites. Dans l'instance contre le mari, il faudra attendre le résultat de l'instruction de la plainte déposée par lui contre sa femme, instruction qui tend à le faire échapper aux poursuites. De même, dans l'instance où la femme est prévenue, il faudra attendre que le mari soit jugé pour statuer sur la recevabilité de sa plainte.

Des deux côtés il faut donc attendre, et tout résultat est impossible.

On voit qu'il y a loin de ce système à celui du Code actuel, où la marche est très simple.

- Le renvoi à la commission est mis aux voix et ordonné.

M. le président. - D'autres articles on' été renvoyés à la commission, la commission ne pourrait-elle pas s'en occuper demain et faire un rapport à l'ouverture de la séance ?

M. Orts. - il y a encore un article à voter.

M. Lelièvre. - Je pense qu'il n'y a pas lieu de s'occuper, pour le moment, des articles qui ont été renvoyés à la commission. Celle-ci a décidé qu'elle attendrait que la discussion de tout le Code fût terminée avant de se livrer à l'examen des articles réservés. C'est ainsi que dans les titres déjà votés un grand nombre d'articles doivent de nouveau être examinés. Il me semble donc qu'il n'y a pas lieu de s'occuper actuellement des dispositions tenues en réserve, concernant le titre VII.

Du reste, je suis aux ordres de la Chambre, et si elle le désire, la commission sera convoquée pour s'occuper des articles du titre VII qui lui ont été renvoyés.

M. le président. - Quelques articles du titre VII ont été renvoyés à la commission, la Chambre entend-elle renvoyer l'examen de ces articles après le premier examen de tout le Code pénal ou veut-on après chaque titre reprendre les amendements et les articles renvoyés à la commission ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Jusqu'à présent 'a commission avait décidé de ne s'occuper des articles renvoyés qu'après le vote des différents titres ; c'est ainsi que différents articles des titres du livre II ont été renvoyés à la commission sans que la commission s'en soit occupée depuis.

J'accepterai te système qui conviendra le mieux à la commission ; si elle veut faire son rapport sur les différents articles qui lui ont été envoyés, sans attendre le vote du dernier titre, je me prépare/ri pour la discussion. Je suis aux ordres de la commission comme aux ordres de la Chambre.

M. Pirmez. - Je dois faire remarquer que la Chambre a réservé dans des titres précédents divers articles sur lesquels il n'a pas encore été statué parce qu'ils doivent être mis en corrélation. Il me semble que le même motif doit nous engager à procéder pour le titre VII comme nous l'avons fait pour les autres. La marche inverse nous conduirait à reprendre aussi les articles réservés dans des titres, et il en est plusieurs qui ne peuvent être examinés qu'après que des dispositions non encore adoptées l'auront été.

M. le président. - Ainsi on maintiendrait la marche qui a été suivie jusqu'à présent.

Article 453

« Art. 453. Quiconque, étant engagé dans les liens du mariage, en aura contracté un autre avant la dissolution du précédent, sera puni de la réclusion. »

- Adopté.

M. le président. - Nous avons maintenant le titre VIII.

- Plusieurs membres. - A demain.

M. le président. - Demain nous avons des travaux en sections et nous avons plusieurs sections centrales. Je réunirai pour midi et demi la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à l'augmentation du nombre des membres des représentants et des sénateur-.

Je prie MM. les présidents des autres sections de régler leur réunion en conséquence.

- La séance est levée à 4 1/2 heures.