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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 12 juin 1860

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1859-1860)

(page 1513) (Présidence de M. Dolez, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Florisone procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

M. de Boe donne lecture du procès-verbal de la dernière séance.

- La rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Florisone présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.

« Le sieur Thys demande son élargissement du dépôt de mendicité de Reckheim. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur de Noël demande une récompense honorifique pour les poésies qu'il a publiées. »

- Même renvoi.


« Le sieur Jacobs prie la Chambre de lui accorder une provision sur la somme de 448,331 francs, qu'il réclame de l'Etat. »

Même renvoi.


« Les membres de l'administration communale de Grand-Han présentent des observations contre la demande qui a pour objet le transfert du chef-lieu de canton de la justice de paix de Durbuy. »


- Même renvoi.


« Le sieur Van Heers demande une loi qui autorise la destruction du gibier lorsque, par sa multiplication, il nuit aux récoltes. »

- Même renvoi.


« Des pharmaciens à Anvers demandent que l'examen d'élève universitaire préparatoire aux études pharmaceutiques soit à l'avenir le même que celui qui est proposé par le gouvernement pour les récipiendaires qui se destinent à la candidature en science. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet.


« Le sieur Noël demande que le projet de loi sur l'exercice de l'art de guérir contienne une disposition générale contre tout praticien qui aura fait une opération ayant entraîné la mort sans y avoir préalablement été autorisé par l'avis conforme de deux docteurs en médecine. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Des négociants, armateurs et courtiers à Anvers, présentent des observations en faveur de la partie du projet de loi concernant les octrois qui est relative aux sucres. »

M. Loos. - Je demande qu'il puisse être donné lecture de cette pétition, et qu'à cet effet elle soit renvoyée à la section centrale qui a examiné le projet de loi sur les octrois ou à la commission des pétitions.

Cette pétition proteste contre une allégation produite ici par l'honorable M. de Brouckere, à savoir que le commerce d'Auvers était indifférent à la question des sucres traitée dans le projet de loi. Les négociants d'Anvers déclarent que, s'ils ne viennent réclamer qu'aujourd'hui contre les obligations produites ici, soit dans certaines pétitions, soit dans les discours, c'est qu'ils avaient confiance dans leur bon droit et dans l'énergie de M. le ministre des finances pour soutenir son projet de loi.

Je demande qu'il puisse être donné lecture de cette pétition dans la séance de demain, après qu'elle aura été examinée par la commission des pétitions.

M. Carlier. - Si l'on ne donne lecture de la pétition que demain et à la suite d'un rapport de la commission des pétitions, je n'ai rien à dire. Sinon, j'invoque le règlement qui a été appliqué il y a huit jours à peine.

- Le renvoi de la pétition à la commission des pétitions est ordonné.

« Les membres du conseil communal d’Herquegies prient la Chambre de rejeter ou d'amender notablement le projet de loi relatif aux octrois. »

- Même décision.


« M. le ministre de la justice transmet à la Chambre, avec les pièces de l'instruction, la demande de naturalisation du sieur Herben (Jacques). »

Projet de loi prorogeant la loi sur les pensions militaires

Rapport de la section centrale

M. de Moor. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi portant prorogation de la loi du 24 mai 1838, sur les pensions militaires.

- La Chambre ordonne l'impression, la distribution et la mise à l'ordre du jour de ce rapport.

Projet de loi prorogeant la loi sur les péages du chemin de fer

Dépôt

M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - J'ai l'honneur de déposer le compte rendu des opérations du chemin de fer pour l'exercice 1859.

- II est donné acte à M. le ministre du dépôt de ce document, dont la Chambre ordonne l'impression et la distribution.


M. le ministre des travaux publics (M. Vander Stichelen). - J'ai aussi l'honneur de déposer un projet de loi portant prorogation de la loi du 12 avril 1835 sur les péages du chemin de fer.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi ; la Chambre en ordonne l'impression et la distribution et les renvoie à l'examen des sections.

Projet de loi supprimant les octrois communaux

Discussion des articles

Chapitre I. Abolition des droits d’octroi et attribution d’un nouveau revenu aux communes

Article premier

M. le président. - La discussion générale a été close ; nous passons à la délibération sur les articles,

« Art. 1er. Les impositions communales indirectes connues sous le nom d'octrois sont abolies.

« Elles ne pourront être rétablies. »

Deux amendements ont été présentés à cet article :

L'un de M. Coomans est ainsi conçu :

« Art. 1er. A partir du 1er janvier 1861, toutes les impositions communales connues sous le nom d'octrois et de capitations seront abolies. »

L'autre de M. Vermeire est ainsi conçu :

« Les impositions communales directes et indirectes connues sous le nom d'octrois et de cotisations personnelles sont abolies. »

M. Rodenbach. - Je crois devoir faire connaître mon opinion sur l'article premier décrétant l'abolition des octrois.

Il y a déjà plus de quinze ans que j'ai provoqué dans cette enceinte la suppression des octrois. C'était en 1845 et en 1846, à l'occasion de la cherté des vivres, lorsque la misère était extrême. J'ai dit que les octrois étaient la lèpre du pays. En effet, on payait ici à Bruxelles et l'on paye encore aujourd'hui, sur le poisson, des droits d'octroi, de minque, etc., s'élevant jusqu'à 18 et 20 p. c. de la valeur. Je persiste toujours dans la même opinion ; je crois que les octrois sont un impôt odieux qui doit disparaître, mais non aux dépens de la justice et de la liberté.

Tout en combattant, il y a quinze ans, les octrois, j'ai parlé des capitations, j'ai parlé des abonnements dans nos Flandres. A cette époque la misère était à son comble et dans la Flandre occidentale spécialement, il a fallu élever cette contribution locale jusqu'au-delà d'un million pour adoucir le sort des malheureux.

Les huit autres provinces réunies ne payent pas en abonnement un million. Eh bien, malgré cette énorme contribution, on n'accorde aux campagnards, par tête, en moyenne, que 1 fr. 8 8 c., tandis qu'aux villes où règne l'opulence, la richesse, on rembourse et d'emblée 6 fr. 40 c. par tête. En d'autres chiffres on ne nous donne à nous, communes rurales et petites villes, que 2,300,000 fr., tandis qu'aux villes on accorde immédiatement 11 millions. Il me semble que la justice d'une pareille mesure est très difficile à démontrer ; car les campagnes sont en cette circonstance fortement lésées. Les villes à octroi obtiennent immédiatement des indemnités, tandis que les communes rurales et les villes sans octroi doivent vivre d'espérance.

Les citadins, au lieu d'être débiteurs deviennent créanciers ; ils payaient, désormais ils recevront.

Avec le projet actuel, qui est-ce qui payera le plus ? Ce sont notamment les Flandres qui sont le plus imposées. Car c'est dans cette contrée qu'on consomme le plus de bière ; et on demande à la bière les trois cinquièmes de la somme que l'on veut obtenir. Or, la bière est la boisson de l'ouvrier, la boisson du cultivateur. Il me semble que c'est une singulière justice distributive que d'imposer aussi largement cette boisson.

Messieurs, j'ai remarqué que plusieurs orateurs de la gauche, partisans de la suppression des octrois comme moi, notamment, l'honorable comte de Renesse, l'honorable comte de Baillet, M. de Florisone et plusieurs autres, ont dit : Nous voulons la suppression des octrois, mais nous désirons aussi que la boisson du peuple et que d'autres articles soient moins frappés. Ainsi, dans ma section, j'ai proposé que la bière ne payât que trois francs.

J'ai demandé aussi que la redevance sur le charbon fût de 5 p. c. au lieu de 2 1/2 p. c. En France l'industrie houillère n'est pas aussi prospère qu'en Belgique, et la redevance y est de 5 p. c. Je ne vois pas pourquoi il faut prendre toute la somme dont on a besoin sur l'agriculture et sur la boisson de la classe ouvrière, telle que la bière et le genièvre.

On nous dit que l'augmentation sur la bière ne sera que de 1/3 de centime par litre, mais le brasseur des campagnes augmentera le prix de sa bière de 1 centime, le cabaretier de 2 centimes, et en définitive, ce sera la classe ouvrière qui supportera l'augmentation.

Quant au sucre, c'est, me paraît-il, un objet de luxe bien plus que la (page 1514) bière. Je désire que l’on favorise, eu Belgique, les sucreries de betterave, le sucre indigène, comme on l'a fait en France. Car, en France, il y a une faveur pour le sucre indigène ; elle n'est peut-être pas considérable, mais elle existe, de l'avis de personnes compétentes.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est le contraire.

M. Rodenbach. - Je crois, messieurs, que le système pourrait être amélioré. Ainsi on demande au sucre une augmentation de 700,000 francs ; eh bien, le sucre est un objet de luxe et je pense qu'il pourrait même supporter 200 mille francs de plus ; mais, je le répète, il faudra trouver le moyen de favoriser le sucre indigène.

J'appuierai, messieurs, l'amendement de l'honorable M. Vermeire, et tous les autres amendements qui auraient pour objet l'abolition des cotisations personnelles, abonnement ou capitation, impôt peut-être plus odieux encore que l'octroi.

J'ai présenté aussi un amendement d'accord avec l'honorable M. Henri Dumortier. Au besoin, je pensé que nous pourrions adopter la proposition de l'honorable M. ce Naeyer. Il demande 5 millions pour les campagnes et 4 millions pour les villes ; cela me paraît infiniment plus juste que de donner d'emblée aux villes l'énorme somme de 11 millions, tandis qu'on ne donne que 2 millions 300 mille francs aux campagnes.

Les petites villes, telles que Thielt, Roulers, Iseghem ainsi que les faubourgs de Bruxelles, sont également froissés dans leurs intérêts d'une manière considérable.

Dans le projet de loi, le ministre lui-même ne peut pas dire quand les dispositions transitoires, qui sont très contraires aux communes, cesseront de sortir leurs effets.

Si l'on n'améliore pas la loi par les divers amendements dont nous sommes saisis, je crois qu'il est de mon devoir de franc et loyal député de voter contre l'ensemble de la loi.

M. E. Vandenpeereboom, rapporteur. - Messieurs, je ne dirai que deux mots et je me renfermerai dans l'article.

La discussion générale a été assez longue. Voilà trois mois que nous sommes saisis du projet, et il y aura bientôt trois semaines que la discussion est commencée. Je crois que le meilleur moyen de ne pas la prolonger outre mesure, c'est de se renfermer strictement dans l'examen des articles.

Deux amendements ont pour objet de supprimer les cotisations personnelles en même temps que les octrois. Je crois qu'il y a différents motifs pour ne pas admettre cette proposition.

D'abord, messieurs, si vous supprimez les cotisations personnelles, il faut immédiatement faire les fonds nécessaires pour remplacer ces cotisations ; et jusqu'à présent, malgré toutes les augmentations qu'on a voulu donner au fonds communal, on n'est point parvenu à atteindre un chiffre qui permît d'abolir, d'un seul coup, toutes les cotisations personnelles.

D'un autre côté, messieurs, plusieurs membres et même des membres de la droite ont dit qu'il fallait laisser aux villes la possibilité de s'imposer ; les villes auront l'occasion de le faire, et même très prochainement. Or, parmi les moyens qu'elles auront à employer, pour faire face à leurs besoins toujours croissants, figureront probablement les cotisations personnelles ; vous ne pouvez donc pas supprimer, en ce moment, ce mode d'impôt. Vous ne pouvez pas les empêcher d'être rétablies, puisqu'il y a des membres, parmi nos amis, qui ont dit que l'impôt direct était le mode le meilleur pour arriver à couvrir les dépenses des ville» ; et aujourd'hui, par l'article premier de la loi, vous iriez ôter aux villes la faculté de couvrir leurs dépenses par des capitations !

Nous avons le droit d'abolir par la loi les octrois communaux, parce qu'ils blessent l'intérêt général ; je ne sais si nous avons le droit de priver les communes, par la loi, de la faculté de s'imposer des capitations pour faire face à des dépenses nécessaires. C'est alors qu'on nous reprocherait d'empiéter sur l'autorité légale des conseils communaux.

D'ailleurs, je ne pense pas que si vous supprimiez les capitations, dans les communes rurales, vous dussiez aussi les supprimer dans les villes. Or, c'est là l'intention de l'auteur de la proposition, si je l'ai bien comprise.

Aujourd'hui vous avez des villes où il existe des capitations qui ne sont pas comprises dans le revenu à rembourser au moyen du fonds communal.

Allez-vous aussi supprimer ces capitations-là ? Ne sont comprises dans les sommes qui doivent être remboursées aux villes que les cotisations de la partie extra-muros, celles qui tiennent lieu d'octroi.

Indépendamment de ces dernières capitations, les villes en ont à l'intérieur ; vous allez les supprimer et vous voulez empêcher les villes de les remplacer. Cela peut-il se faire ?

- Un membre. - C'est peu de chose.

M. H. Dumortier. - 80 mille francs.

Ml. E. Vandenpeereboom, rapporteurµ. - C'est peu de chose aujourd'hui ; mais demain ces villes peuvent se trouver dans l'obligation de pourvoir à de très grands besoins et n'avoir d'autre moyen d'y faire face, que des cotisations.

. Allez-vous empêcher les villes de recourir à ce moyen ? Mais les cotisations personnelles ont été indiquées comme une réserve possible pour les villes. Il ne faut pas perdre de vue que prochainement, très prochainement, les villes à octroi auront à faire face à des nécessités très considérables, devant lesquelles il ne faut pas laisser les administrations urbaines sans ressources.

Je ne pense pas, quant à moi, que nous puissions supprimer entièrement les cotisations dans les communes rurales, ni ôter aux villes la faculté d'en établir, en suivant, du reste, les règles tracées par la loi communale.

En fait, le projet de loi et les amendements de la section centrale, plus encore, tendent à aider les administrations rurales, dans les efforts qu'elles feront pour la suppression des capitations ; légalement, on ne peut pas aller plus loin. Je crois donc que la Chambre fera bien en rejetant les amendements proposés sur I'aricle premier.

M. Tack. - Messieurs, j'ai compris autrement que l'honorable préopinant l'amendement de l'honorable M. Vermeire. Je ne pense pas que l'honorable M. Vermeire veuille supprimer les capitations en principe ; il se borne à demander qu'on les abolisse telles qu'elles existent aujourd'hui, parce qu'elles sont perçues d'une manière arbitraire. L'idée de M. Vermeire est évidemment qu'on pourra rétablir dans la suite les taxes locales ou les remplacer par d'autres impôts directs, sauf toujours à tenir compte du signe extérieur de la richesse et moyennant adopter des bases certaines.

L'amendement de l'honorable M. Vermeire ne me semble pas même impliquer nécessairement le remboursement intégral des capitations actuelles. Je crois en cela avoir bien saisi la pensée de l'honorable membre. Du reste, il s'en expliquera, à ce que je suppose, puisqu'il vient de demander la parole.

Pouvons-nous supprimer les capitations ? Blessent-elles l'intérêt général ? Je suis d'avis de l'affirmative. Comment ! on impose dans 1,600 communes des taxes personnelles sans qu'il y ait aucune garantie pour les contribuables ; on les impose de la manière la plus arbitraire ; on n'en fait que trop souvent un instrument de rancune, et cela ne blesserait pas l'intérêt général !

On pourrait aussi soutenir avec quelque apparence de raison que l'octroi, comme tout autre impôt indirect, ne blesse pas, en principe rigoureux, l'intérêt général, que seulement de la façon dont il fonctionne, il est contraire à cet intérêt, parce qu'il gêne les transactions, parce qu'il frappe les objets de première nécessité. Serait-une raison pour ne pas supprimer l'octroi ?

On a opposé à la proposition faite de supprimer les capitations, cette considération que ce serait faire tort aux communes qui perçoivent des centimes additionnels au lieu de capitations. Cette observation, je le reconnais, a quelque chose de fondé. Ainsi, serais-je très disposé, pour ma part, à ne pas insister pour qu'on inscrive dans la loi le principe du remboursement intégral des capitations, si je pouvais avoir en même temps quelque espoir de voir augmenter le fonds communal, afin d'arriver en fait, dans un temps peu rapproché, à la suppression des capitations.

On a dit que le remboursement intégral des capitations aurait des conséquences très graves au point de vue des intérêts des communes qui ne perçoivent pas cet impôt et qui, par contre, ont eu recours aux centimes additionnels sur le principal des contributions. Je pense qu'on a un peu exagéré ces conséquences.

On vous a distribué un tableau dans lequel figure le montant des centimes additionnels au principal des contributions prélevées en 1859, dans tout le royaume, tant pour les villes que pour les campagnes. Si l'on voulait rester dans les termes d'une comparaison admissible, il aurait fallu se borner à rechercher quel est le montant des centimes additionnels et des capitations perçus dans les communes sans octroi pour chaque province, et ne pas y amalgamer les centimes additionnels prélevés dans les villes ; alors on serait arrivé à des résultats tout différents.

En effet, la Flandre occidentale, eu égard à sa population, paye presque autant de centimes additionnels que le Brabant.

La population du Brabant est de 772,728 âmes ; celle de la Flandre occidentale de 631,859 âmes ; dans le Brabant, les centimes additionnels s'élèvent à 549,052 francs ; dans la Flandre occidentale, ils atteignent le chiffre de 376,487 fr.

D'un autre côté, le montant des cotisations personnelles est bien plus élevé dans la Flandre occidentale : il s'élève à 1,273,903 fr., tandis qu'il n'est que de 671,453 fr. dans le Brabant.

Les conséquences que l'on a entrevues ne seraient donc pas aussi graves qu'on l'a prétendu, et les provinces de Namur, du Limbourg et du Luxembourg ne seraient guère lésées par l'abolition des capitations ; dans tous les cas, je déclare encore que je suis tout disposé à ne pas exiger le remboursement immédiat des capitations du moment qu'on pourra me donner la certitude qu'il sera fait quelque chose en faveur des communes à capitations, au moyen de l'augmentation du fonds communal. Ce n'est qu'ainsi qu'on pourra leur rendre justice.

M. Vermeire. - Lorsque j'ai proposé mon amendement dans la séance du 30 mai dernier, je l'ai, eu quelque sorte, développé dans le discours que j'avais alors prononcé. Dans les considérations que j'ai fait valoir j'ai partout et toujours assimilé les cotisations des communes rurales aux octrois des villes ; j'ai fait ressortir les inconvénients que présentent l'un et l'autre de ces impôts et je crois avoir démontré qu'on pourrait fort bien les supprimer tous les deux.

(page 1515) On a objecté à ma proposition qu'il y avait une grande différence entre les cotisations des communes et les octrois des villes, en ce sens que les octrois blessent l'intérêt général, tandis que pour les cotisations des communes rurales il n'en était point de même.

Ensuite on a dit que, s'il fallait rembourser intégralement les cotisations personnelles aux communes, il aurait fallu augmenter, d'une manière considérable, le capital que l'on sollicite de la Chambre.

Quand j'ai présenté mon amendement et tous les arguments que j'ai fait valoir en sa faveur, j'ai dit que je ne demandais pas le remboursement des cotisations personnelles, à chaque commune isolément ; mais que je ne serais contenté d'une somme égale au montant de ces mêmes cotisations prises dans leur ensemble.

J'entrais donc dans les vues de la section centrale qui avait déjà proposé d'augmenter la part des communes rurales d'environ 1 million 74 mille francs ; je disais, en outre, qu'en faisant un pas de plus nous pourrions atteindre un chiffre qui équivaudrait à celui des cotisations rurales.

J'argumentais qu'il aurait été à désirer que les cotisations fussent supprimées en même temps que les octrois. Si dans la répartition qui serait faite du fonds commun quelques communes n'obtenaient pas le montant intégral de leur cotisation, celle-ci ne pourrait plus être rétablie ; dans ce cas, ces communes seraient obligées de chercher d'autres voies et moyens pour faire face à cette insuffisance.

Le discours que j'ai prononcé au début de cette discussion avait encore pour but principal de démontrer la nécessité de remplacer les droits indirects par des droits directs.

Je crois que si le fonds était augmenté jusqu'à concurrence de la somme que je viens d'indiquer et qu'on en fît la répartition d'après les bases posées par le gouvernement lui-même, on pourrait engager les communes dont les intérêts resteraient en souffrance à combler l'insuffisance par des centimes additionnels sur les trois bases indiquées par le gouvernement, à savoir : l'impôt foncier sur les propriétés bâties, la contribution personnelle et celle des patentes. Je pense même que pour les communes qui resteraient le plus fortement grevées, quelques centimes additionnels appliqués à ces bases suffiraient pour éteindre entièrement les cotisations personnelles.

En agissant ainsi, nous ferions disparaître en même temps les octrois qui blessent l'intérêt général et les cotisations dont la répartition arbitraire blesse la justice.

Quoi de plus arbitraire, en effet, que d'établir l'impôt sur des présomptions ? A quels abus un pareil système ne peut-il pas donner lieu ? Pourquoi faire ici une exception alors que tous les autres impôts sont établis sur des bases fixes, déterminées d'avance ? Dans le premier cas, comment procède-t-on ? On présume la solvabilité du contribuable, on ne la connut pas ; on frappe en aveugle et quand celui qui doit payer veut faire des réclamations, il est obligé de faire connaître sa situation et d'initier le public dans la connaissance de ses intérêts privés ; enfin il doit soumettre à la députation la décision à intervenir entre lui et l'administration qui l'a taxé.

Tous ceux qui ont examiné la question sont d'accord pour déclarer que rien n'est plus injuste que les cotisations telles qu'elles sont établies dans la plupart de nos communes.

Je ne donne donc à mon amendement d'autre portée que celle-ci : que le projet accorde aux communes rurales prises dans leur ensemble, l'impôt intégral et collectif des cotisations perçues en 1859 ; et que pour le cas où quelques communes ne recevraient pas assez pour combler leurs d penses obligatoires, elles fussent autorisées à créer des voies et moyens, autres que les cotisations, pour y satisfaire.

M. Julliot. - Je ne comprends pas pourquoi on assimilerait les cotisations personnelles aux octrois ; si dans certaines provinces les communes ont donné la préférence à cette forme d'imposition, dans d'autres on a préféré la forme des centimes additionnels.

Dans le Limbourg on a donné la préférence au système des centimes additionnels. Nous avons des communes qui payent sur le foncier, sur le personnel, un sixième du principal comme centimes additionnels ; nous avons donc les mêmes charges sous un autre nom.

Je le demande, faut-il encore élargir le cercle des privilèges ? On dit que les villes ont des privilèges ; c'est une question qui sera à débattre plus tard. Mais veut-on maintenant favoriser les campagnes qui ont des taxes personnelles, aux dépens des autres ? Je donnerai un excellent conseil aux communes qui ont des taxes personnelles. Qu'elles transforment ces taxes personnelles en centimes additionnels et l'arbitraire aura disparu. Je n'accepte donc pas cette modification.

M. A. Vandenpeereboom. - Je désirerais, comme les honorables préopinants, qu'il fût possible d'abolir complètement les cotisations personnelles qui pèsent si lourdement, surtout sur les populations rurales des Flandres ; mais comme la plupart d'entre eux, notamment comme l'honorable M. Tack, je comprends qu'il serait très difficile d'aboutir à ce résultat.

Les Flandres, tout le monde doit le reconnaître, payent en impôts communaux des sommes beaucoup plus élevées que toutes les autres provinces. Elles les payent pour des raisons facilement appréciables. Vous n'avez pas oublié que les Flandres ont traversé des époques de crise, des époques de misère effrayantes. Alors le gouvernement stimulait les administrations communales.

Il leur disait : Faites des travaux publics ; faites des emprunts pour couvrir vos dépenses, donnez des aumônes abondantes.

Et les administrations des communes flamandes, encouragées par le gouvernement et aussi stimulées par un sentiment de charité, ont fait des emprunts considérables. Ce sont ces emprunts surtout qui pèsent encore spécialement sur les communes de la Flandre occidentale.

Une autre cause de la situation fâcheuse dans laquelle se trouvent les communes de cette province c'est que, lorsqu'il s'agit d'exécuter des travaux d'utilité publique, par exemple des travaux de voirie, à cause de la cherté des transports des matériaux, il faut que les communes votent des sommes beaucoup plus importantes pour obtenir le même résultat que d'autres provinces. Voilà les causes du mal. Elles sont faciles à signaler. Mais le remède est plus difficile à trouver. Je viens de le dire, je crois qu'il n'est pas possible, et je le regrette, de demander la suppression des abonnements.

Si l'on parvenait à cette suppression, les Flandres payeraient encore en centimes additionnels autant que la plupart des autres provinces.

J'ai fait à cet égard des calculs que je ne soumettrai pas à la Chambre. Mais je dirai que si l'amendement de l'honorable M. Dumortier et de ses collègues était adopté, c'est-à-dire si l'on remboursait aux communes des Flandres le montant de leur abonnement, en tenant compte de la part qu'elles auront dans le fonds communal, il en résulterait que, dans la Flandre occidentale, on payerait encore 78 centimes additionnels par tête pour contribution communale, tandis que, dans la province de Hainaut, la moyenne des contributions communales à payer par tête ne sera que de 13 c, et que dans la province de Namur, avec le fonds communal que propose le gouvernement, c'est-à-dire avec la somme de 3 millions, accordée aux communes rurales, somme d'après laquelle M. le ministre des finances a établi ses calculs, la contribution par tête d'habitant, centimes additionnels compris, ne sera plus que de 7 centimes par tête. Il y aura donc une inégalité regrettable, mais qu'il sera à peu près impossible de faire disparaître.

Si l'on admettait la proposition de l'honorable M. Dumortier, il en résulterait que ce serait la province de Brabant qui payerait le plus. Elle payerait 1 franc 5 centimes par tête. La province d'Anvers payerait 80 centimes ; puis viendrait, malgré l'abolition des cotisations, la Flandre occidentale. où l'on payerait encore 78 centimes par tête.

Il n'y a, selon moi, qu'un seul moyen de venir en aide aux communes de la Flandre occidentale et en même temps à toutes les communes du pays : c'est d'augmenter le fonds communal.

Je déclare très catégoriquement que, dans le cas où M. le ministre des finances ne se rallierait pas aux propositions de la section centrale, il me serait impossible de donner mon assentiment un projet de loi. Je déclare en outre que je désire voir augmenter encore dans une proportion raisonnable le fonds communal. Je proposerai peut-être même d'augmenter ce fonds.

Messieurs, il me paraît possible, je pense, d'augmenter le fonds communal sans grever les campagnes. Voici un des moyens.

Le gouvernement prélève chaque année, sur le bénéfice de la Banque Nationale, une certaine somme. Cette somme est portée au budget pour 450,000 fr. Il est évident que les bénéfices de la banque sont payés en grande partie par les villes. Si l'on ajoutait cette somme de 450,000 fr. au fonds communal, on aurait ainsi une augmentation qui ne grèverait pas les campagnes. Ce n'est pas une somme énorme ; cependant elle n'est pas à dédaigner.

Je ne fais, pas quant à présent, de proposition formelle à cet égard ; mais j'appelle sur ce point l'attention de la Chambre.

Il est encore une autre recette que l'on pourrait peut-être attribuer au fonds communal : c'est le produit des jeux de Spa.

Aujourd'hui, les étrangers qui viennent en Belgique et qui jouissent des agréments du séjour dans ce pays, payent les droits d'octroi. Il est reconnu que la plupart des bénéfices faits par les jeux de Spa sont payés par les étrangers. Le gouvernement en reçoit une part ; des communes une autre part. Un tantième de cette recette pourrait être accordé au fonds communal. C'est encore un point à examiner.

Une objection pourrait m’être faite ; en accordant le produit des jeux de Spa au fonds communal, on consacre pour ainsi dire la légalité de ces jeux et il deviendra très difficile de les supprimer un jour.

Quant à moi, je ne suis pas partisan de ces jeux, et si une bonne occasion se présente, je serai le premier à en voter la suppression.

Lorsque la loi fonctionnera, un grand nombre de communes devront encore s'imposer des cotisations personnelles, mais comme le tantième de ces cotisations ne sera plus très élevé, il sera possible de remplacer ce qui en restera par des centimes additionnels.

J'appelle sur ce point l'attention de M. le ministre de l'intérieur. Dans plusieurs provinces les députations permanentes se montrent très difficiles à accorder un grand nombre de centimes additionnels ordinaires. Dans d'autres provinces, les députations sont plus faciles. Je crois que le gouvernement pourrait, par une circulaire, inviter les (page 1516) députations permanentes à ne pas faire d'opposition à la perception d'un nombre de centimes additionnels ordinaires plus grand que celui qui s'y perçoit aujourd'hui.

Il y aurait un autre moyen d'améliorer la position des communes rurales qui doivent conserver une cotisation personnelle : ce serait de réglementer par un arrêté, pu plutôt par une loi, le mode de perception, la base de ces cotisations. La législation qui existe sur ce point est très ancienne ; elle n'est plus en rapport avec la situation actuelle et elle est extrêmement confuse. Elle permet jusqu'à un certain point l'arbitraire.

Il me semble qu'il ne serait pas impossible d'établir par une loi les bases de cette réparation qui est, à proprement parler, un impôt sur le revenu. Cela s'est fait dans plusieurs pays, et notamment dans le grand-duché de Luxembourg en 1848.

J'ajouterai encore un mot. Plus tard, lorsque la loi sera mise à exécution, il faudra, me semble-t-il, dans la répartition, des subsides ordinaires, tenir compte, comme l'a fait observer très bien mon honorable ami M. de Florisone, de la situation financière des communes.

Ainsi s'il est telle commune qui perçoit sur le fonds communal plus que les recettes actuelles, plus même que ses besoins réels constatés, et s'il en est d'autres qui doivent payer de nombreux centimes additionnels et s'imposer encore des cotisations, il est certain que, pour les travaux de voirie, pour l'établissement de bâtiments d'école et autres dépenses pour lesquelles le gouvernement accorde des subsides, il devra être tenu compte de cette situation financière. Car les subsides ne se justifient que lorsque les revenus sont insuffisants.

Telles sont les observations que je désirais présenter actuellement à la Chambre.

M. Moncheur. - Messieurs, l'article premier déclare que « les impositions communales, connues sous le nom d'octrois, sont abolies et qu'elles ne pourront être rétablies. » Je crois nécessaire d'expliquer ou plutôt de limiter la portée du vote que j'émettrai sur cet article.

Ce vote sera approbatif ; mais je tiens à ce qu'il soit bien entendu qu'il n'implique qu'une seule chose : c'est la réprobation que j'inflige au système des octrois en lui-même. Ce système frappe les habitants des villes d'impositions assises sur une foule d'objets de première nécessité ; à ce titre, ils doivent disparaître. Les octrois sont, en outre, excessivement vexatoires, plus vexatoires même, dirai-je, que préjudiciables aux intérêts des communes rurales ; à ce point de vue encore, je désire qu'ils soient abolis.

Je voterai donc, messieurs, pour le principe déposé dans l'article premier ; mais je voudrais que ce principe fût appliqué par d'autres moyens que ceux proposés par le gouvernement.

Je ne veux donc pas qu'à la suite de ce vote approbatif, il soit le moins du monde entendu que j'approuve des dispositions aussi injustes que celles qui forment la base du projet en discussion. Je n'admettrai jamais une loi qui a pour effet de faire payer les dettes des villes à octroi par les communes rurales. Je n'admettrai jamais non plus l’augmentation de près de 100 p. c. que l'on veut établir sur l'impôt d'accise de la bière, cette boisson si nécessaire aux classes ouvrières.

Messieurs, je ne reviendrai pas sur la discussion générale. Assez d'orateurs ont prouvé que les bases de la loi sont injustes, que cette injustice est flagrante, surtout pendant la période transitoire ; or, comme on vous l'a dit aussi, cette période transitoire peut être tellement prolongée, qu'elle équivaudra à un régime définitif. Je proteste donc hautement contre ce régime.

L'amendement qui a été déposé par l'honorable M. de Naeyer améliore certainement la loi, car il admet la population comme l'une des bases de la répartition du fonds communal ; faute de mieux, je me rallierai à cet amendement ou à tel autre qui diminuerait l'injustice du projet. Je fais une réserve à cet égard.

Quant aux amendements qui sont proposés à l'article premier, je ne puis les admettre. Celui de l'honorable M. Vermeire, qui consiste à faire rembourser intégralement les cotisations personnelles qui sont si élevées dans les Flandres tandis que dans certaines provinces, notamment dans la province de Namur, elles sont remplacées par des centimes additionnels extraordinaires, cet amendement, dis-je, ne ferait qu'aggraver l'injustice du projet dû à M. le ministre des finances.

L'honorable M. Vandenpeereboom vient de proposer d'augmenter le fonds communal de deux façons : d'abord en y ajoutant la somme de 400,000 fr. environ qui forme la part du bénéfice de la Banque Nationale attribuée au gouvernement et ensuite en y ajoutant le produit des jeux de Spa.

Je repousse aussi cet amendement ; c'est en vain que l'honorable membre allègue que ces fonds proviennent des habitants des villes. Je considère, quant à moi, toutes ces distinctions sur les provenances des fonds qui forment le trésor public comme n'ayant aucune raison d'être. En effet, le trésor public s'alimente de diverses sommes ; mais du moment que l'argent provenant de ces sources différentes se trouve à la disposition du gouvernement, il forme le patrimoine de la nation tout entière, l'on ne peut former une espère de compte et de décompte entres les villes et les campagnes, de manière à créditer les unes et à débiter les autres.

il est évident que si vous créditez, par exemple, les villes des 400,000 fr. provenant de la Banque Nationale, ou bien, comme le veut, le gouvernement, du revenu des postes, ou bien encore du produit des jeux de Spa, vous devrez également créditer les communes rurales du produit d'impositions qui n'existent que dans ces communes.

Ainsi, vous devriez créditer les communes rurales du montant de la contribution foncière sur les propriétés non bâties, car je ne sache pas que ce soit dans les villes que l'on paye la contribution sur les champs de blé. (Interruption.)

Vous dites qu'il y a beaucoup de grands propriétaires de fonds ruraux qui habitent les villes ; peu importe leur domicile ! D'ailleurs il y a aussi un nombre très considérable de propriétaires de fonds ruraux qui n'ont point de domicile en ville. Il y aurait donc, dans tous les cas, un décompte à faire à cet égard. Je trouve qu'il est très puéril de faire une pareille distribution : ce qui entre dans le trésor public belge appartient à tous les Belges.

Ainsi, quand vous attribuez au fonds communal, destiné à payer le montant des octrois des villes, un million et demi puisé dans le trésor public, sous prétexte que cette somme provient de la poste qui, dites-vous, ne bénéficie que dans les villes, j'aime tout autant que vous nous disiez que ce million et demi provient soit de la contribution foncière sur les propriétés non bâties, soit de toute autre base des impôts du pays. Cela revient au même.

En effet, quand vous avez pris un million et demi dans le trésor, il faut bien que vous l'y remplaciez par une somme égale ; ou bien, si vous le conserviez, vous pourriez l'affecter à des travaux d'utilité publique ; ou bien, enfin, s'il vous était inutile, vous pourriez diminuer quelque peu les contributions.

Avez-vous, par exemple, deux millions et demi de trop, eh bien, abolissez l'impôt sur les successions en ligne directe qui, certes, est un des plus impopulaires.

En résumé, messieurs, je tenais à déclarer, à l'occasion de l'article premier, que si je désire ardemment l'abolition des octrois, je désapprouve hautement les moyens proposés par le gouvernement pour opérer cette réforme, vu que ces moyens blessent à un haut degré les principes de la justice distributive.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, à propos de l'article premier, on s'est occupé de tous les principes qui ont été examinés dans les séances précédentes et qui appartiennent à la discussion générale. On a aussi discuté des amendements qui ne sont pas encore en délibération. On a parlé ,en un mot, de toutes les questions que soulève le projet de loi, hors l'article premier. L'article premier consiste à décréter l'abolition des octrois et à décider que les octrois ne pourront plus être rétablis.

L'honorable M. Vermeire a proposé à cet article un amendement qui est d'ajouter à la suppression des octrois la suppression des cotisations personnelles. A la première vue, il semblait que l'honorable M. Vermeire demandait l'abolition des cotisations au même titre et de la même manière que l'abolition des octrois et en mettant cet amendement en rapport avec le paragraphe 2 de l'article premier, il en résultait que les cotisations ne pourraient plus être rétablies. Les explications que vient de donner l'honorable membre démontrent que l'amendement ne peut pas être maintenu.

Dans la pensée de l'honorable membre cet amendement signifie qu'il désire l'augmentation du fonds communal et qu'il désire aussi que les cotisations supprimées, déduction faite de la quote-part dans le fonds communal, soient remplacées par d'autres impôts.

Eh bien, ainsi caractérisé, l'amendement n'exprime pas la pensée de son auteur.

L'honorable membre n'a fait qu'émettre une opinion, mais sans chercher à la faire consacrer. JI essayera de faire prévaloir une partie de son opinion lorsque nous serons à la constitution du fonds communal.

L'autre partie est tout à fait étrangère à la loi. Il ne s'agit pas de déclarer par cette loi qu'on substituera aux cotisations personnelles d'autres modes d'imposition, car il faudrait dire alors à quels impôts l'on aurait recours. Dans ses termes généraux, l'amendement n'était pas trop constitutionnel, et, eût-il été constitutionnel, il ne pouvait pas être admis par la Chambre, parce que la Chambre ne peut pas décréter qu'il est interdit aux communes tout à la fois de s'imposer par voie indirecte, par la voie des octrois, et par voie directe, par la voie des capitations.

Il faudrait d'ailleurs ajouter pour être juste, pour être équitable, qu'on leur interdit aussi de percevoir des centimes additionnels. De cette manière il serait interdit aux communes de s'imposer d'une manière quelconque. Je ne pense pas que l'intention de la Chambre puisse être de consacrer un pareil système. Je convie donc l'honorable membre à retirer son amendement ; ce retrait serait la conséquence logique des explications qu'il vient de donner.

M. Vermeire. - Messieurs, mon amendement n'a pas la portée que vient d'y attribuer l'honorable ministre des finances. Il a seulement pour objet de déclarer que quand on rembourse aux villes l’intégrité du produit de leurs octrois, il serait juste et convenable aussi de rembourser aux communes l'intégrité du montant de leurs cotisations personnelles parce que, dans ma manière de voir, les cotisations personnelles sont l'équivalent de l'octroi.

Je ne demande pas que l'on rembourse à chaque commune l'intégrité (page 1517) du montant de sa cotisation personnelle (et c'est la concession que je fais à la distinction qui a été établie entre l'un et l'autre de ces impôts, distinction que je n'admets pas entièrement, mais que j'apprécie à certains égards). Mais je demande que, globalement, toute la somme perçue dans le pays à titre de cotisation personnelle soit remboursée aux communes, c'est-à-dire que le fonds communal soit augmenté d'une somme suffisante pour qu'on puisse distribuer aux communes rurales une somme d'environ 4,000,000 de fr., montant approximatif des cotisations de toutes les communes de la Belgique, si je ne me trompe.

Déjà une première augmentation est proposée par la section centrale ; elle s'élève, je crois, à 1,074,000 fr.

Si ou pouvait y ajouter 500,000 ou 600,000 francs, on arriverait au chiffre que je viens d'indiquer.

Mon amendement ne comporte pas autre chose, au fond, et si la forme ne convient pas à la Chambre, je ne verrais aucun inconvénient à ce qu'on la modifie de manière à exprimer exactement l'idée que j'ai expliquée.

M. E. Vandenpeereboom, rapporteur. - Messieurs, l'amendement de la section centrale et le projet lui-même font ce qu'il est possible de faire pour que les cotisations soient diminuées en fait. Nous donnons des subsides aux communes, pour qu'elles puissent supprimer en partie ces cotisations ; et le meilleur mode à suivre pour arriver à la suppression des cotisations, c'est d'entrer dans la voie où est entré ela section centrale, c'est-à-dire d'augmenter le fonds commun.

Ainsi les cotisations tomberont d'elles-mêmes, parce que le fonds communal augmentant chaque année, les communes seront mises à même de changer ce mode de répartition totalement dans un très grand nombre de communes, et en grande partie dans d'autres.

J'engage donc l'honorable M. Vermeire à retirer son amendement et à appuyer la proposition de la section centrale, tendante à augmenter le fonds commun, sauf à aller plus loin si c'est possible.

C'est là, me semble-t-il, la véritable voie où nous devons entrer, pour détruire en fait les capitations ; mats je ne pense pas qu'on puisse admettre l'amendement, tel qu'il est conçu en ce moment.

M. le président. - Je prie M. Vermeire de vouloir bien déclarer s'il maintient son amendement.

M. Vermeire. - M. le président, comme je donne à cet amendement une portée restrictive, je crois devoir là maintenir.

M. H. Dumortier. - Messieurs, l'honorable rapporteur vient de dire, si je l'ai bien compris, que la section centrale a fait tout ce qu'elle devait et pouvait faire pour amener en fait la suppression des capitations. Mais c'est là résoudre la question par la question. Nous croyons que vous n'avez pas assez fait ; vous croyez que vous avez fait assez. C'est là ce qui nous divise. Ainsi affirmer que la section centrale à fait ce qu'elle pouvait et devait faire, c'est ne rien prouver.

Les observations que l'honorable M. Vermeire vient de présenter me donnent la preuve qu'au fond sa pensée est la même que celle qui nous animait, lorsque cinq de mes honorables collègues et moi, nous avons déposé un amendement tendant à rembourser l'intégrité des capitations.

Il me semble donc que l'honorable M. Vermeire pourrait se rallier à cet amendement qui se rattache à l'article 3 et au sujet duquel nous nous réservons de dire encore quelques mots, lorsque l'article sera mis en discussion.

M. Loos. - Messieurs, de toutes les communes du pays, celle où l'abolition des octrois produira les plus grands embarras financiers est, sans contredit, la ville d'Anvers. C'est sous l'influence des graves appréhensions qu'inspire cette situation pour le présent et pour l'avenir, que la ville d'Anvers, qui n'a pas moins que les autres localités du pays applaudi au principe de la grande réforme qui nous est proposée, en rendant hommage à la courageuse initiative de M. le ministre des finances, s'est abstenue de toute démonstration publique.

Pour les intérêts de la ville d'Anvers, l'abolition des octrois arrive d'une manière inopportune, quel que soit le mode de répartition qu'on adopte. La perception toujours progressive des taxes de l'octroi forme, en effet, une partie essentielle des voies et moyens affectés à une opération financière très importante que la ville vient à peine de réaliser ; cette ressource venant à lui manquer, avant même que les augmentations de taxes votées par le conseil communal aient pu se percevoir, il lui faudra créer des ressources nouvelles, sans qu'il lui soit tenu compte de celles qu'elle doit abandonner. Voilà pour le présent.

Pour l'avenir, et pour un avenir très prochain, sa position sera plus difficile encore. Quand il s'est agi de l'agrandissement de son enceinte, la ville n'a pas craint de s'engager à reprendre pour 10 millions les terrains militaires actuels.

Pour remplir cet engagement, l'administration a dû naturellement compter sur l'augmentation notable qu'éprouveraient les recettes de l'octroi, par la participation des nombreuses populations de ses faubourgs destinées à entrer dans la nouvelle enceinte. Cette augmentation de ressources n'était pas évaluée à moins de 300 mille fr.

La suppression des octrois renversera ces prévisions qui paraissaient certaines et créera pour la ville des difficultés immenses, inextricables même, si le gouvernement ne lui vient en aide. Voilà certes, messieurs, une situation des plus critiques qui explique et qui justifie la réserve dans laquelle a dû se renfermer la ville d’Anvers,

Je me suis demandé si, en présence d'une situation pareille, je pouvais, je devais voter l'abolition des octrois ; si à raison de la position exceptionnelle qu'occupe la ville d'Anvers dans la question, je devais repousser une réforme que le pays entier réclame depuis si longtemps. Mon patriotisme, messieurs, n'a pas hésité à répondre qu'il fallait faire à l'intérêt général du pays le sacrifice des intérêts spéciaux que je représente, chercher à réaliser avec vous cette importante réforme dont le pays pourra s'enorgueillir et qui ajoutera à la gloire du règne déjà si glorieux de notre Roi bien-aimé.

Je voterai donc l'abolition des octrois et en faisant cette déclaration, je ne crains pas d'être désavoué par la ville d'Anvers, dont la patriotisme s'est en toutes circonstances mis à la hauteur des sacrifices qui lui étaient réclamés dans l'intérêt du pays.

- Personne ne demandant plus la parole la discussion sur l'article premier et les amendements y relatifs est close.


M. le président. - Je mets d'abord aux voix l'amendement de M. Vermeire.

Cet amendement est ainsi conçu :

« Les impositions communales directes et indirectes, connues sous le nom d'octrois et de cotisations personnelles, sont abolies. »

- Des membres. - L'appel nominal.

- Il est procédé à cette opération.

En voici le résultat :

101 membres sont présents.

85 membres répondent non.

16 membres répondent oui.

En conséquence l'amendement n'est pas adopté.

Ont répondu non : MM. De Fré, de Gottal, De Lexhy, de Liedekerke, Deliége, de Mérode-Westerloo, de Montpellier, de Moor, de Naeyer, de Paul, da Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, Deridder, de Rongé, de Ruddere de te Lokeren, de Terbecq, de Theux, Devaux, d'Ursel, Frère-Orban. Frison, Goblet, Grandgagnage, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Janssens, Joseph Jouret, Martin Jouret, Julliot, Koeler, Lange. Laubry, Charles Lebeau, Joseph Lebeau, Lesoinne, Loos, Manilius, Moncheur, Moreau, Muller, Nélis, Nothomb, Orban, Pierre, Pirmez, André Pirson, Prévinaire, Rogier, Royer de Behr, Sabatier, Saeyman, Savart, Snoy, Tesch, Thibaut, Alphonse Vandenpeereboom, Ernest Vandenpeereboom, Vanderstichelen, Van Dormael, Van Humbeek, Van Iseghem, Van Leempoel, Van Volxem, Vervoort, Vilain XIIII, Allard, Ansiau, Beeckman, Carlier, Crombez, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Bronckart, Dechamps, Dechentinnes, de Decker, de Florisone et Dolez.

Ont répondu oui : MM. de Haerne, de Muelenaere, de Smedt, B. Dumortier, Henri Dumortier, Faignart, le Bailly de Tilleghem, Magherman, Notelteirs, Rodenbach, Tack, Thienpont, Vander Donckt, Van Overloop, Van Renynghe et Vermeire.


M. le président. - Je mets aux voix l'amendement de M. Coomans.

Cet amendement est ainsi conçu :

« A partir du 1er janvier 1861, toutes les impositions communales connues sous les noms d'octrois et de capitations seront abolies. »

- Cet amendement n'est pas adopté.


M. le président. - Je mets aux voix l'article premier du projet de loi.

Cet article, auquel la section centrale se rallie, est ainsi conçu :

« Art. 1er. Les impositions communales indirectes, connues sous le nom d'octrois, sont abolies.

« § 2. Elles ne pourront être rétablies. »

- Des membres. - L'appel nominal !

- Il est procédé à cette opération.

En voici le résultat :

101 membres prennent part au vote.

100 membres répondent oui.

1 membre (M. de Mérode-Westerloo), s'abstient.

En conséquence, l'article premier du projet de loi est adopté.

Ont répondu oui : MM. De Fré, de Gottal, de Haerne, de Lexhy, de Liedekerke, Deliége, de Montpellier, de Moor, de Muelenaere, de Naeyer, de Paul, de Pitteurs-Hiegaerts, de Portemont, de Renesse, Deridder, de Rongé, de Ruddere de Te Lokeren, de Smedt, de Terbecq, de Theux, Devaux, H. Dumortier, d'Ursel, Faignart, Frère-Orban, Frison. Goblet, Grandgagnage, Grosfils, Guillery, Hymans, Jacquemyns, Jamar, Janssens, J. Jouret, M. Jouret, Julliot, Koeler, Lange, Laubry, le Bailly de Tilleghem, C. Lebeau, J. Lebeau, Lesoinne, Loos, Magherman, Manilius, Moncheur, Moreau, Muller, Nélis, Notelteirs, Nothomb, Orban, Pierre, Pirmez, A. Pirson, V. Pirson, Prévinaire, Rodenbach, Rogier, Royer de Behr, Sabatier, Saeyman, Savart, Snoy, Tack, Tesch, Thibaut, Thienpont, A. Vandenpeereboom, E. Vandenpeereboom, Van der Donckt, Vanderstichelen, Van Dormael, Van Humbeek, Van Iseghem, Van Leempoel de Nieuwmunster, Van Overloop, Van Renynghe» Van Volxem, Vermeire, Vervoort, Vilain XIIII, Allard, Ansiau, (page 1518) Beeckman, Carlier, Crombez, Dautrebande, David, de Baillet-Latour, de Bast, de Boe, de Bronckart, Dechamps, Dechentinnes, de Decker, de Florisone et Dolez.

M. le président. - J'invite M. de Mérode à faire connaître les motifs de son abstention.

M. de Mérode-Westerloo. - Je me suis abstenu parce que, d'un côté, je suis favorable à l'abolition des octrois, et que, d'un autre côté, j'aurais voulu connaître, avant de la voter, quels seront les voies et moyens adoptés pour remplacer cet impôt.

Ordre de discussion des articles

M. le président. - Nous avons maintenant à régler l'ordre de nos discussions ultérieures.

Je devrais mettre à présent l'article 2 en discussion ; mais, d'après l'ordre logique des idées, il serait plus rationnel, je pense, de passer immédiatement aux dispositions du chapitre II qui indique les nouveaux impôts dont il est fait application dans les articles 2 et suivants. Il me paraît difficile de voter ces articles avant d'avoir déterminé le sort de tout le chapitre II.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je partage l'opinion de M. le président qu'il serait assez difficile de statuer sur ces dispositions du projet sans connaître le vote de la Chambre sur les autres articles. Mais je me demande s'il ne serait pas préférable, pour l'ordre de la discussion et pour arriver à une solution satisfaisante, de mettre en discussion les articles 2, 3 et 14, auxquels se rattachent, en réalité, les amendements qui constituent des systèmes et qui ne peuvent guère être examinés isolément.

Ainsi, on devrait discuter, par exemple, à propos de l'article 2, un amendement de l'honorable M. Tack ; mais cet amendement se lie lui-même aux autres propositions qu'il a faites est qui sont relatives à l’article 14.

Ainsi nous aurions également, à cet article, à examiner les dispositions proposées par l'honorable M. de Naeyer dont le système se lie aussi à l'article 14.

Je me demande donc si ce ne serait pas faciliter la solution des difficultés que de mettre d'abord en discussion les articles auxquels se rattachent ces propositions. Si l'on maintient le système du projet de loi, nous reprendrons alors les articles dans l'ordre où ils sont classés. Si, au contraire, on attend la discussion des articles pour mettre en délibération les systèmes formulés dans les amendements, je ne vois pas trop comment nous pourrons arriver à les discuter convenablement.

MPDolezµ. - Les différents systèmes ne sont, en définitive, que des conséquences des dispositions différentes proposées pour les nouveaux voies et moyens.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Je le veux bien ; mais le chapitre II est relatif aux modifications aux lois d'accise ; et lorsqu'on aura statué sur ce point, on pourra encore rejeter les systèmes proposés et s'ils étaient rejetés, il aurait été parfaitement inutile de discuter le chapitre II. Au surplus, je n'insiste pas.

M. le président. - Je persiste à croire qu'il serait plus rationnel d'examiner d'abord le chapitre II.

M. de Naeyer. - Je ne pense pas que M. le ministre des finances s'y oppose formellement.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Certainement non ; j'indique le mode de procéder qui me paraît le plus rationnel.

M. le président. - Si donc il n'y a pas d'opposition, nous passerons maintenant au chapitre II, en réservant les articles 2 et suivants.

Chapitre II. Modifications à quelques droits d'accise

Vins et eaux-de-vie provenant de l'étranger
Article 5

« Art. 5. § 1. Les droits d'accise sur les vins et les eaux-de-vie provenant de l'étranger sont augmentés dans une proportion égale au droit d'octroi moyen réparti sur la consommation totale du royaume, d'après les faits constatés pour l'année 1858.

« § 2. Le gouvernement déterminera le taux des nouveaux droits à percevoir. »

- Adopté.

Eaux-de-vie indigènes
Article 6

« Art. 6. § 1er. Le droit d'accise établi sur la fabrication des eaux-de-vie par la loi du 27 juin 1842 modifiée (Moniteur de 1853, n°227) et par la loi du 30 novembre 1854 (Moniteur, n° 335), est fixé à 2 fr. 45 c. par hectolitre de contenance des vaisseaux imposables.

« § 2. Ce droit est porté à 3 fr. 85 c. lorsqu'il est fait usage de fruits secs, mélasses, sirops ou sucres. »

- Adopté.

Article additionnel

M. le président. - La section centrale propose un article additionnel ainsi conçu :

« La déduction, mentionnée à l'article 5 de la loi du 27 juin 1842, modifiée (Moniteur de 1853, n°327), est fixée à 10 p. c. »

M. le ministre des finances se rallie-1-il à cette disposition ?

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Non, M. le président. Je crois qu'il n'y a pas lieu de modifier, tout au moins par fa loi actuelle, la condition qui est faite aux distilleries agricoles.

Il résulte des faits la preuve que, malgré la protection qui a été successivement augmentée, les distilleries agricoles ont diminué. On peut donc maintenir la situation actuelle. Si, ultérieurement, des inconvénients graves venaient, à se révéler, on pourrait alors soumettre une proposition à la Chambre. Mais je crois qu'il importe de ne pas compliquer la loi actuelle de difficultés nouvelles.

M. E. Vandenpeereboom, rapporteur. - En proposant cet article additionnel, la section centrale n'a pas eu en vue, elle l'a fait remarquer, d'introduire un changement fiscal très important ; mais elle s'est demandé s'il fallait augmenter encore la faveur accordés aux distilleries agricoles. Du moment que M ; le ministre des finances est disposé à examiner cette question dans une autre occasion, je crois pouvoir abandonner, au nom de la section centrale, la proposition qu'elle vous a soumise.

M. le président. - L'article est donc considéré comme non avenu.

Articles 7 et 8

« Art. 7. Le taux de la décharge est fixé à 35 francs par hectolitre d'eau-de-vie à 50° degrés Gay-Lussac, à la température de 15 degrés centigrades. »

- Adopté.


« Art. 8. La quotité de l'accise établie par la loi du 27 juin 1842 modifiée (Moniteur de 1853, n° 2-27), sur la macération, la fermentation et la distillation des fruits à pépins et à noyaux, sans mélange d'autres matières produisant de l'alcool, est portée à 1 franc 85 centimes par hectolitre.

- Adopté.

Bières et vinaigres
Article 9

« Art. 9. § 1er. Le droit d'accise établi sur la fabrication des bières et vinaigres par la loi du 2 août 1822 (Journal officiel, n°32), modifiée par la loi du 24 décembre 1853 (Moniteur, n°362), est fixé à quatre francs.

« § 2. Le taux de la décharge, ainsi que les réductions accordées aux vinaigriers sur le montant de l'accise, sont maintenus dans la proportion existante aujourd'hui. »

M. de Naeyer propose au paragraphe premier l'amendement suivant :

« Le droit d'accise établi sur la fabrication des bières et vinaigres par la loi du 22 août 18-22, modifiée par la loi du 24 décembre 1853, est fixé à 3 fr. »

(page 1518) M. Carlier. - Messieurs, 76 matières ont été, jusqu'ici, tributaires de l'octroi. Suivant le projet qui vous est soumis, quatre de ces matières sont condamnées à payer la rançon des 72 autres ; ces quatre matières tristement privilégiées sont les eaux-de-vie, les vins, les sucres et les bières.

Quant à l'eau-de-vie, l'article est voté, je n'ai rien à en dire ; quant au vin, sa situation n'est nullement aggravée ; pour les sucres, ils acceptent de payer ; seulement ils ressemblent au débiteur qui offre de s'acquitter, mais à la condition qu'on ne lui enlève pas les ressources qui lui seront nécessaires au jour de l'échéance ; pour la bière, sa situation est la pire de toutes, elle est évidemment rançonnée à outrance ; les chiffres que je vais citer parlent plus haut que tous les raisonnements ; des dix millions et demi demandés pour la rançon des 72 matières qui échapperont à l'octroi, la bière est appelée à fournir, non pas 6 millions cent mille francs, mais sept millions deux cent mille francs, comme je le démontrerai tout à l'heure.

Ou demande donc à la bière les sept dixièmes de la contribution qui doit servir à remplacer les produits de l’octroi.

Bien de gros tributaires vont cependant se trouver libérés, témoins le bétail et la viande qui payaient 2,700,000 fr., le beurre, qui paye environ 250,000 fr., le bois, grevé de plus de 450,000 fr., les briques, qui rapportent près de 200,000 fr., la houille, dont le produit s'élève à 1,100,000 fr., le foin, qui donne 220,000 fr., le gibier et la volaille, taxés à 150,000 fr., les grains, dont le rapport s'élève à 800,000 fr., les huiles, grevées de 140,000 fr. et le poisson, qui solde 320,000 fr.

Celte nomenclature, qui ne comprend que dix matières, représente un ensemble de 6,340,000 fr. de produits.

En vous signalant l'injustice flagrante que les chiffres que je viens de citer constatent, je ne me sers pas du thème qui a été produit maintes fois durant la discussion.

Je suis d'accord avec l'honorable ministre des finances qui regrette la disparate que cette partie de son projet présente avec l'ensemble, qui regrette que, malgré son désir d'exonérer de tout impôt de consommation des denrées de première nécessité, il ait dû faire une exception pour la bière.

Je suis d'accord avec la section centrale qui a laissé voir d'une manière bien évidente son regret de ne pouvoir parer à ce grave inconvénient, et qui s'est lavé les mains de la condamnation inique qu'elle devait prononcer. La bière a été sacrifiée à une nécessité, à la nécessité de rencontrer une imposition quelconque qui pût produire les 6 millions cent mille francs nécessaires à l'exécution du projet.

La section centrale a rencontré, chez l'un de ses membres, la proposition de réduire le droit à 3 francs au lieu de 4 francs ; elle a repoussé cette proposition par deux motifs principaux : le premier, c'est qu'en ne frappant dorénavant la bière que d'un droit d'accise de 3 francs, l'on dégrèverait la consommation des bières dans les villes. Je crois que ce motif n'en est réellement pas un ; je suis même étonné qu'il ait été produit, car il est contraire à l'ensemble du projet. En effet, on dégrève les autres objets de consommation de première nécessité, on dégrève la viande des villes, le pain des villes, le beurre, en un mot, toutes les autres denrées, je ne vois pas pourquoi, quand ce dégrèvement général est accordé, la bière seule ne pourrait pas profiter de la porte qu'on ouvre à tous ces prisonniers de l'octroi ; je ne vois pas de motif pour continuer à frapper la bière, quand ou cesse de frapper les autres objets de consommation ; je ne conçois pas pourquoi le litre de bière que boira le charbonnier d'Hornu ou de Frameries devra supporter une aggravation d'accise, alors que la viande que mangera le mécanicien ou l'armurier de Liège sera dégagée de l'impôt qu'on lui a fait supporter jusqu'ici.

Ce premier motif de la section centrale n'a donc rien de décisif, au contraire.

La deuxième objection, c'est que la réduction à 3 fr. causerait dans les voies et moyens du projet un déficit de 3 millions Je reconnais que c'est là une objection très grave, très importante, mais je ne la crois pas parfaitement fondée. Pour vous le démontrer, permettez-moi d'entrer dans quelques détails qui vous feront voir que je me rends parfaitement compte des chiffres que l'on a fait valoir en section centrale.

Le déficit, dont chacun de vous a pu constater l'importance dans l'exposé des motifs, serait selon ses données, non de 3,000,000, mais de 3,453,000 fr. Voyez page 25 de l'exposé du projet de loi. Je trouve à cet égard plusieurs rectifications à faire. Et d'abord, je crois que le déficit ne sera que de 2,340,000 fr., c'est-à-dire 1,100,000 fr. de moins que le déficit appréhendé par la section centrale. En effet, en 1858 l'accise sur la bière a rapporté 7,639,626 fr. 20, c'est-à-dire que l'impôt a porté sur 3,708,000 hectolitres de cuve-matière.

Or, avec le droit nouveau de 4 francs, la même fabrication produira 14,834,224 fr., donc 1,094,598 francs de plus que ne l'indique l'exposé des motifs ; or, ces 1,894,598 francs réduisent le déficit à 2,340,310 fr.

C'est là le vrai déficit, tel qu'il est établi par les éléments livrés à la discussion.

On me dira vraisemblablement que ces 1,100,000 fr. figurent dans les voies et moyens dont disposera le gouvernement, et qu'ils viendront en aide au fonds communal ; que cela produira pour les communes une augmentation de leur quote-part.

A cet égard je dois faire remarquer que le gouvernement ne donnera sur les 14,854,222 francs, que 34 p. c. et que le fonds communal ne sera pas augmenté de ces 1,100,000 francs. S'il en était autrement, je devrais cesser mes critiques ; mais de ces 1,100,000 fr. une faible partie seulement entrera dans les caisses des communes ; tandis que 66 p. c. seront perçus au profit de l'Etat.

Mais j'en reviens à ce déficit de 2,340,000 fr. et aux moyens de le combler.

Je vous propose, à cette fin, d'amender l'article 2 et l'article en discussion, et de remplacer l'augmentation de la taxe sur la bière, par 20 centimes additionnels sur la contribution personnelle, ce qui ferait 2 millions ; par 5 centimes additionnels sur la contribution foncière, ce qui ferait 280,000 fr. et par une augmentation de 15 fr. sur les ports d'armes, ce qui produirait 100,000 fr.

- Plusieurs membres. - Et la houille ?

M. Carlier. - Je viendrai tout à l'heure à la houille, si la Chambre veut bien me permettre de continuer. Le système que je propose n'est (page 1520) pas si hostile à ses idées qu'elle ne puisse en entendre au moins l’énonciation.

Je sais que de graves objections se sont élevées au sein de la section centrale, et que certains membres ont soutenu qu'il valait mieux majorer l'accise sur la bière que de mêler l'impôt direct à l'impôt indirect. Je ne reconnais là ni un danger, ni un inconvénient.

Je trouve, au contraire, dans certaines allégations, dans certaines raisons fournies par la section centrale, la démonstration que les impôts sur lesquels j'indique que des centimes additionnels pourraient être prélevés au profit du fonds communal, sont désignés à l'avance pour faire face à ce qui pourrait manquer aux voies et moyens de la loi en discussion.

Voici ce que dit à cet égard l'honorable rapporteur de la section centrale :

« On a choisi ces trois bases, c'est-à dire les trois bases du calcul de la répartition, la contribution foncière sur les propriétés bâties, la contribution personnelle et les patentes, parce que la consommation des objets sur lesquels pèsent les impôts qui fournissent un revenu aux communes est en proportion du degré d'aisance de celles-ci, et, en général, le signe le plus apparent, le plus stable et le moins trompeur de l'aisance d'une localité, c'est le montant du principal des trois contributions indiquées à l'article 3. »

Il résulte évidemment de ce raisonnement que la contribution personnelle, la contribution foncière sur les propriétés bâties et les patentes sont une sorte de constatation de l'état d’aisance des citoyens, que l'aisance contribue à la consommation, et qu'en atteignant les citoyens dans cette aisance, dans cette consommation présumée, on va chercher chez lui un genre d'impositions qui a infiniment de ressemblance et d'affinité avec les impositions indirectes auxquelles on a eu recours pour fournir les voies et moyens du projet de loi.

Une autre objection a été produite en section centrale, et le rapport en fournit la trace ; c'est qu'on ne pouvait proposer, pour tenir lieu des voies et moyens indiqués dans le projet, aucun élément d'imposition qui ne fut pas susceptible d'augmentation, de progression et qui ne présentât pas ainsi les mêmes conditions de prospérité pour le fonds communal que tous les éléments qui ont concouru à la formation du projet de lot.

Eh bien, je crois que la progression incessante de la contribution personnelle et de la contribution foncière sur les propriétés bâties, progression qui a été révélée dans toutes les constatations faites par le gouvernement dans les nombreux documents mis à notre disposition, doit rassurer complètement, quant à cette partie des voies et moyens que je mettrais à la disposition du gouvernement.

Nous savons encore pas les mêmes indications et de l'exposé des motifs et du rapport de la section centrale que, dans la production de ces trois impôts, les campagnes figurent pour 45 p. c. seulement et les villes pour 55 p. c. v

Un des griefs les plus graves qui ont été articulés contre le projet de loi, c'est que la répartition ne se fait pas de manière à fournir aux communes une part assez considérable, tandis qu'elle se fait de façon à donner aux villes une part beaucoup trop importante.

Or, si je fais verser dans le fonds commun une espèce de contribution que les communes rurales ne payent à l'Etat que sur le pied de 45 p. c, tandis que les communes à octroi le fournissent sur le pied de 55 p. c,

j'aurai en partie fait droit au grief qui a été articulé et qui, selon mol, a une certaine importance dans cette discussion.

Quant aux ports d'armes, ils se sont payés pendant très longtemps au prix de 36 francs. C'est, je crois, le taux auquel ils ont été fixés depuis 1810 jusqu'en 1840. Il est possible que je sois dans l'erreur ; dans tous les cas, ce n'est pas très important pour la thèse que j'ai l'honneur de soutenir.

Depuis lors, on les a augmentés de 2 fr. Mais deux choses sont évidentes pour moi ; c'est que la valeur de 30 fr. de 1810 à 1840 était bien supérieure à la valeur de 45 fr. aujourd'hui, et que d'autre part, le chasseur qui veut se donner un port d'armes, qui s'accorde cette satisfaction entièrement de luxe, sacrifiera volontiers dans ce but une somme de 45 fr. On pourrait donc là, me paraît-il, rencontrer une source d'imposition très convenable pour augmenter le fonds communal. Dans tous les cas, ce n'est qu'un équivalent du droit d'octroi perçu sur le gibier.

Messieurs, en indiquant à la Chambre ces voies et moyens, je n'entends pas lui faire une proposition qui doive dorénavant et à toujours rester parmi les voies et moyens du projet en discussion.

J'estime, avec grand nombre de mes honorables collègues, que l'on peut trouver, pour remplacer l'impôt sur la bière, nombre d'impositions prises sur des objets de consommation de moins grande nécessité, plus luxueux, moins essentiels que la bière, et que l'on peut ainsi parfaire les voies et moyens du projet de loi autrement qu'en augmentant les centimes additionnels sur les impositions directes que je signalais tout à l'heure à la Chambre. Ainsi, il n'y a pas de doute pour moi qu'il y a lieu d'étudier et d'étudier sérieusement s'il n'y a pas lieu de frapper une imposition sur les actions industrielles et même sur les fonds publics.

Cela existe en France, et je ne vois pas pourquoi cette partie notable de la fortune de certains citoyens, entièrement exempte d'impôts jusqu'ici, ne devrait pas, dans l'avenir, fournir sa part dans les ressources du trésor.

Il en est de même du système d'assurances, de l'impôt sur le tabac, de l'impôt sur la houille et d'autres impôts dont il a été question dans cette discussion. J'estime que chacune de ces impositions possibles, mérite un examen approfondi fait avec toute la maturité nécessaire ; mais je crois que, dans l'état actuel de la discussion, il serait impossible de fournir un système complet sur chacun de ces objets. Ce serait donc à titre purement provisoire que j'entendrais proposer les moyens que j'ai l'honneur de vous indiquer.

Que si la Chambre ne croyait pas devoir admettre le système que je propose, je me servirais de leur indication pour poser un jalon à l'aide duquel je pourrais venir ensuite entretenir la Chambre de chacun des articles que j'ai indiqués, et demander de dégrever l'impôt qu'elle frappe à regret sur la bière, pour arriver plus tard à modifier la loi d'une façon qui achève de la perfectionner et de lui mériter l'immense popularité qui l'a accueillie.

Je dois ajouter encore quelques mots en ce qu, me concerne : c'est qu'en faisant à la Chambre cette proposition, je m'entends nullement cependant à faire acte d'hostilité contre le projet de loi qui a été si justement applaudi au-dedans et au-dehors de cette enceinte. Alors, donc que mon amendement ne serait pas accueilli, je ne me croirais nullement engagé à voter contre la loi. Je lui promets au contraire l'appui le plus sincère et le plus dévoué.

(page 1518) 91. de Naeyerµ. - Messieurs, j'ai déjà eu l'honneur de dire qu'il me sera impossible, absolument impossible de voter l'augmentation proposée sur la bière, c'est-à-dire de doubler le droit sur cette boisson, boisson populaire par excellence, boisson nationale par excellence. Cela m'est impossible ; quel que soit mon désir d'arriver à la suppression des octrois, ma raison se révolte à l'idée que cette suppression ne serait possible qu'à cette condition.

Tout le monde est d'accord pour faire l'éloge de la bière et pour lui attribuer les qualités les plus précieuses ; comment se fait-il donc que, d'accord sur les prémisses, on arrive à des conclusions diamétralement opposées ? Quant à moi, je pense que la logique est du côté de ceux qui, en faisant l'éloge de la bière, reconnaissent la nécessité de ménager cette boisson indispensable à nos populations et qui repoussent la proposition réellement exorbitante du gouvernement ayant pour objet de doubler d'un seul coup le droit qui existe aujourd'hui et qui est entré dans nos habitudes par un long usage.

N'est-il pas déplorable qu'un projet fait dans l'intérêt des classes ouvrières doive avoir la conséquence de frapper avec une rigueur privilégiée un objet qui touche si directement aux besoins, aux habitudes, aux affections du peuple ?

On a dit, dans cette enceinte, que le cabaret est le forum du peuple. Or, je vous le demande, quand le peuple est réuni dans ces nombreux forums disséminés sur toute la surface du pays, n'est-ce pas la bière qui contribue principalement à faire son bonheur, sa joie et ses délices ? Et voilà cependant l'objet sur lequel s'appesantissent en quelque sorte toutes les charges de la réforme qui nous occupe.

II y a, dans le rapport de la section centrale, un argument qui me fait de la peine ; c'est celui qui consiste à nous citer ce qui existe en Angleterre et en France pour justifier la surtaxe qu'on veut imposer à la boisson du peuple. Le régime anglais peut être excellent pour les Anglais, le régime français peut être excellent pour les Français, tous les régimes du monde peuvent être bons pour ceux qui les ont adoptés ; mais pour nous, il n'y a qu'un régime qui nous convienne, c'est le régime belge ; il se compose de nos institutions, de nos mœurs et de nos usages ; ce régime c'est notre vie, et quant à moi, j'aime mieux mourir que de ne pas vivre de ce régime-là.

Tenons fermement, messieurs, à tout ce qui forme les traits caractéristiques de la nation belge, à tout ce qui peut contribuer à constituer notre individualité nationale, et je ne crains pas de dire que sous ce rapport la boisson que vous voulez frapper d'une manière exorbitante, a son (page 1519) importance. Je crois que nous lui devons des ménagements et même des respects.

L'honorable M. Carlier a prouvé de la manière la plus lucide qu'il n'est pas vrai de dire qu'une diminution d'un franc sur le droit doive amener une diminution de trois millions sur le produit et à l'appui des observations présentées par l'honorable membre, je me permettrai de renouveler une observation qui n'est pas sans valeur, c'est que si vous adoptez le chiffre de 4 francs, vous allez restreindre la consommation. Le gouvernement est en aveu à cet égard, car cette prévision forme un des éléments de ses évaluations. Or, c'est déjà un mal immense que de restreindre la consommation d'une boisson aussi nécessaire et aussi bienfaisante pour les classes ouvrières. En ne mettant, au contraire, qu'un droit de 3 francs, au lieu de restreindre la consommation vous l'augmenterez ; je vais le prouver.

Il en est de la bière comme de beaucoup d'autres objets destinés à l'alimentation, qui donnent lieu, en quelque sorte, à deux genres de consommation : la consommation répondant aux besoins les plus directs, les plus impérieux de la vie ; puis la consommation répondant à des besoins moins pressants et qu'on peut limiter plus facilement. La première a surtout lieu dans les campagnes ; ce qu'on prend là en fait de bière, c'est bien en général ce qui est nécessaire pour ranimer et restaurer les forces du travailleur, tandis que l'autre consommation a lieu plus particulièrement dans les villes.

Maintenant, à quoi arrivez-vous si vous augmentez d'un franc le droit qui existe aujourd'hui ? Cette augmentation, qui n'est pas exagérée, n'exercera guère d'influence sur cette partie de la population qui prend la bière comme breuvage nécessaire, parce que le besoin est toujours là et qu'il faut bien y pourvoir.

En ce qui concerne les villes, si vous n'augmentez que d'un franc, il y aura dans beaucoup de localités une diminution considérable. Ainsi à Gand, l'impôt communal, que vous allez supprimer, est de 3 francs ; à Bruxelles, Anvers et Liège de plus de 2 francs ; enfin dans presque toutes les villes, le droit d'un franc ou plutôt de 94 centimes que je propose serait inférieur au droit d'octroi actuellement établi.

Eh bien, vous ouvrez là incontestablement une augmentation de consommation, eu égard à cette circonstance, je ne crains pas de dire que le déficit n'atteindra pas même le chiffre de 2 millions.

Eh bien, messieurs, il vaut mieux faire le sacrifice de cette somme que de frapper si rudement la boisson populaire. Adopter la taxe exagérée qu'on vous propose, serait dénaturer le caractère du projet de loi dont le but est réellement populaire.

Messieurs, je crois inutile d'insister plus longuement sur la nécessité de réduire la proposition faite par le gouvernement. Cependant, je dirai qu'il ne s'agit pas, pour le moment, de savoir s'il faut absolument quatorze millions dans les caisses de l'Etat pour remplacer les octrois et si l'on n'exigera aucun concours spécial des grandes villes, dont les charges locales vont être si considérablement allégées ; mais en supposant même que l'on persiste dans cette idée fixe de quatorze millions, je dis que la proposition de frapper les bières d'une surtaxe aussi lourde, doit être écartée comme une véritable impossibilité morale.

Il y aurait lieu alors de faire un nouvel appel au zèle de la section centrale ; il est évident qu'à force de chercher elle parviendra à trouver quelque chose qui froisse moins les habitudes du peuple, si tant est que l'on ne veuille pas renoncer à l'idée fixe que je viens de signaler et que je compte combattre ultérieurement.

- La séance est levée à 4 heures et demie.