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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 26 novembre 1851

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1851-1852)

(Présidence de M. Verhaegen)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 111) M. Vermeire procède à l'appel nominal à 3 heures et un quart. T

M. Ansiau lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. Vermeire communique l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Plusieurs fabricants de céruse prient la chambre de n'approuver le traité de commerce avec les Pays-Bas qu'en stipulant que le droit sur ce produit sera, à l'entrée en Belgique de 6 fr.67 c. par 100 kil., et, à l'entrée en Hollande, de 6 florins des Pays-Bas, et 67 cents par même quantité. »

- Sur la proposition de M. Manilius, renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le projet de loi qui approuve le traité.


« Le conseil communal de Peruwelz prie la chambre d'accorder au sieur Maertens la concession d'un chemin de fer de Saint-Ghislain à Touroay par Peruwelz, moyennant la garantie, par l'Etat, d'un minimum d'intérêt. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


M. Visart demande un congé pour cause d'indisposition.

- Accordé.

Projet de loi sur les loteries

Rapport de la section centrale

M. Bruneau. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la section centrale qui a été chargée d'examiner le projet de loi sur les loteries.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

La chambre en fixe la discussion à vendredi prochain.

Projet de loi approuvant le traité conclu le 27 octobre 1851 entre la Belgique et l’Angleterre

Dépôt

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Messieurs, j'ai l'honneur de présenter à la chambre un projet de loi ayant pour objet l'approbation du traité conclu, le 27 octobre dernier, entre la Belgique et l'Angleterre.

- Ce projet sera imprimé et distribué.

La chambre le renvoie à l'examen des sections.

Proposition de loi modifiant le tarif des douanes

Prise en considération

M. le président. - M. Coomans a déclaré hier qu'il se référait aux développements qu'il a donnés antérieurement.

M. Coomans. - Oui, pour le cas où la prise en considération de ma proposition ne serait pas contestée.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - La prise en considération sera contestée. Nous exposerons à la chambre les raisons qui nous partent à croire que la proposition ne peut pas même servir de canevas à une réforme douanière.

M. le président. - Ainsi la discussion est ouverte. La parole est à M. le ministre des finances.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, la proposition de loi qui a été déposée par l'honorable M. Coomans, les développements qu'il y a donnés, le sens qu'il y attache, rendent indispensables des explications assez étendues de la part du gouvernement. Il est impossible d'apprécier une proposition de ce genre, sans connaître la législation qui nous régit au point de vue et de l'industrie et de la navigation et du trésor. C'est le triple aspect sous lequel les questions de ce genre se présentent naturellement.

Je serai obligé de réclamer assez longtemps l'attention de la chambre ; elle comprendra que pour exposer l'état actuel de notre législation, la législation de l'Angleterre et de la Hollande, je serai forcé d'entrer dans d'assez longs développements. Il est nécessaire que je le fasse, car on ne saurait apprécier ce que la Belgique doit faire, quelle est la voie qu’elle doit suivre, quelles sont les réformes sages, prudentes, pacifiques que l'on peut entreprendre, sans avoir pris une connaissance approfondie des réformes introduites dans la législation des deux peuples que je viens de citer.

J'ai donc à examiner d'abord ce qui concerne notre régime commercial.

Toute notre législation de douane, je viens de le dire, est conçue en vue de trois intérêts principaux : l'industrie, la navigation, le trésor.

On doit donc l'apprécier sous chacune de ces faces.

Le tarif actuel a pour origine la loi de principe du 12 juillet 1821.

Cette loi voulait que le tarif futur n'imposât en général que des droits d'entrée ne dépassant pas 3 p. c. Pour des objets qui se rattachent d'une manière immédiate aux produits de l'industrie indigène, elle fixait le maximum à 6 p. c., sauf l’établissement d’un droit plus élevé et même d’une prohibition s’ils étaient jugés indispensables.

La loi du 26 août 1822 qui intervint ensuite pour régler en détail le tarif, ne dépassa que rarement le maximum de 6 p. c. comme protection à l'industrie.

A part quelques prohibitions, commandées par des circonstances spéciales, les seules exceptions importantes s'appliquèrent aux objets suivants :

Le bétail, les charbons de terre, les fers, les tissus de coton, les cordages, certains papiers, les draps, la poudre à tirer, le zinc brut.

A l'égard de ces objets on dépassa le maximum de 6 p. c : mais cette limite ne fut point franchie pour les objets suivants :

Les tissus de lin, les tissus de laine (à l'exception des draps), les tissus de soie, les ouvrages de cuir, de bois, d'or et d'argent, de cuivre, de laiton, d'étain, de fer-blanc, les céréales, les machines, la mercerie, la quincaillerie, la coutellerie, les meubles, les armes, les munitions de guerre, la passementerie, la rubanerie, les produits chimiques, la verrerie et la cristallerie et les autres produits les plus importants de l'industrie.

Comparé au régime restrictif sous l'empire duquel l'industrie belge avait vécu pendant la réunion à la France, ce tarif était donc conçu danst un sens libéral ; il conserva ce caractère jusqu'en 1830.

Jusqu'à cette époque, les besoins commerciaux de la Hollande firent contre-poids aux prétentions des industriels.

Mais à partir de 1830 et jusqu'au moment où, en 1847, l'opinion libérale prit la direction des affaires du pays, le système protectioniste a prévalu.

En arrivant au pouvoir, nous avons pensé qu'il fallait marquer un temps d'arrêt dans ce système.

Mais durant cet intervalle, beaucoup de droits ont été considérablement augmentés.

Voici l'indication du taux auquel plusieurs d'entre eux ont été portés :

Meubles, jusqu'à 20 p. c.

Fils de lin, 30 p. c.

Tissus de lin, 58 p. c.

Tissus de laine, 24 p. c.

Fils de coton, 38 p. c.

Tissus de coton, 27 p. c.

Fers, 84 p. c.

Produits chimiques, 100 p. c.

Machines, 32 p. c.

Ouvrages de cuir, 18 p c.

Caoutchouc ouvré, 43 p. c.

Ouvrages de terre, 20 p. c.

Verrerie et cristallerie, 83 p. c.

Ardoises, 22 p. c.

A ces produits industriels si on ajoute ceux que le tarif antérieur à 1830 assujettissait déjà à un droit de plus de 6 p. c, on reconnaît que notre régime actuel est essentiellement protectionniste.

Un des principaux et des plus fâcheux résultats de ce régime a été de provoquer les spéculateurs à enfouir dans certaines industries des capitaux hors de proportion avec les bénéfices probables ; de renchérir d'abord proportionnellement le prix des produits par l'absence de concurrence et la nécessité de servir l'intérêt des capitaux engagés ; de comprimer par cela même l'essor de diverses industries secondaires, pour aboutir enfin à l'intérieur, surlJe marché réservé, à une concurrence ruineuse.

On a essayé de neutraliser par certaine mesure la fâcheuse influence de droits exagérés en permettant soit l'enlèvement temporaire de certains produits de l'entrepôt, soit la libre entrée des machines ; mais trop de formalités sont inhérentes à ces mesures pour que l'industrie puisse toujours s'y soumettre.

Je dois faire connaître maintenant le caractère de notre législation en ce qui concerne la navigation.

En 1822, comme aujourd'hui, la Hollande avait fondé le monopole de son commerce avec les colonies sur des bases plus fermes que des droits différentiels de pavillon et de provenance. Néanmoins le tarif de 1522 établissait :

1° Des droits de provenance et de pavillon à la fois, pour les sucres bruts, les mélasses et le thé ;

2° Des droits de pavillon seulement pour le sel brut ;

3° Des droits de provenance seulement pour les épiceries ;

4° Une réduction de 10 p. c. sur les droits de douane pour toutes les autres marchandises importées sous pavillon national ;

5° Exemption de droits pour toutes les marchandises importées des colonies de l'Etat sous pavillon national.

Si le système différentiel se trouvait dans le tarif de 1822, il n'y était, certes, qu'à l'état d'embryon, et moins comme principe que comme complément de la législation coloniale.

Il n'en est plus ainsi en ce qui nous concerne actuellement : sauf quelques rares exceptions, les principaux produits exotiques qui alimentent le commerce maritime sont soumis, depuis la loi du 21 juillet 1844, à des droits qui différent selon :

1° Le pays d'où la marchandise est originaire ;

2° Le pays d'où elle est importée ;

3° Le pavillon du navire qui la transporte ;

4° Le transport direct, ou avec relâche, dans un port intermédiaire.

Il est ainsi tel produit pour lequel il existe sept droits différentiels.

L'application des moindres droits ficés pour chaque article est subordonnée à la production de justifications spéciales ; en vain tous les papiers de bord sont-ils réguliers ; la loi du 21 juillet 1844 comporte la nécessité d'autres preuves.

Si le capitaine n’en est pas muni, sa cargaison, passible de hauts (page 112) droits, se trouve repoussée de fait de la consommation en Belgique. Parfois il est ainsi forcé de la conserver à bord et de mettre à la voile pour un autre pays.

En général les navires qui partent d'un port transatlantique pour l'Europe ont l'ordre d'aborder en Angleterre pour recevoir de nouvelles instructions ou y offrir leur cargaison. Si un industriel ou un commerçant belge a l'occasion d'y faire un achat favorable, pourra-t-il en profiter ? Nullement, car à l'arrivée des marchandises en Belgique, elles seraient considérées comme venant d'un entrepôt d'Europe et soumises aux plus hauts droits, à moins que la relâche du navire n'ait pas duré plus de 3 jours.

Par ces différentes dispositions, la loi veut amener les commerçants, belges à donner la préférence pour leus achats à certains marchés ; et pour le transport des marchandises à certains navires.

Les marchés qu'elle désigne sont-ils les plus avantageux ? Les navires qu'elle protège naviguent-ils à meilleur compte que les autres ? Questions oiseuses, sans doute, car elle ne s'en occupe pas.

Restreindre le choix des marchés, des moyens de transport, c'est évidemment priver le commerce des chances favorables que fait découvrir le génie commercial ou que les événements font surgir ; c'est élever la prétention de donner pour guide au commerce des règles plus sûres que celles qu'il possède dans son intelligence, dans ses relations journalières et en quelque sorte universelles et dans une longue pratique des affaires ; c'est substituer l'action passive, inintelligente de la loi, à l'activité et à l'initiative de l'intérêt personnel. Alors que depuis 60 ans la loi civile a décrété la liberté de l'industrie et du commerce, il est fort étrange qu'une loi spéciale puisse venir dire avec autorité : Là vous achéterez le café, là le coton, là le tabac ; de deux navires qui s'offrent pour le transport vous ne pourrez employer que celui-ci I !

Les mesures que nous venons de rappeler sont les bases essentielles de la loi du 21 juillet 1844, et se résument en deux mots : droits différentiels de pavillon et de provenance combinés, pour les principales marchandises qui se transportent habituellement par mer.

Il parut sans doute aux auteurs de cette législation que le système ne serait pas assez compliqué, que l'édifice perdrait de sa grandeur, s'ils négligeaient de faire contribuer un seul produit mercantile à la future importance de notre marine marchande et de nos relations commerciales. Pour prévenir une semblable critique la loi maintient ou établit trois autres modes de protection :

1° Une réduction de 20 p. c. pour toutes les importations non autrement favorisées, lorsque les marchandises arrivent sous pavillon belge, d'un port au-delà du cap de Bonne-Espérance ;

2° Une réduction de 10 p, c. lorsqu'elles arrivent d'ailleurs ;

3° Enfin une surtaxe de 10 p. c. sur certains objets manufacturés, lorsque l'importation a lieu par navires étrangers ;

Tel est en raccourci le dédale, savant peut-être, mais certainement inextricable, que présente notre tarif en matière de navigation. Peu de fonctionnaires, moins de négociants encore, sont parvenus à pouvoir en parcourir tous les détours d'un pas assuré.

M. le ministre des affaires étrangères (M. d'Hoffschmidt). - Et nos consuls non plus.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Vous savez comment on a cherché à justifier ce système ? Il avait pour but ;

1° D'aider à la création d'une marine marchande ;

2° De créer des rapports directs entre la Belgique et les pays de production afin d'y ouvrir de nouveaux débouchés à notre industrie ;

3° De faciliter la conclusion de traités de commerce.

Voyons les résultats :

Au 1er janvier 1838 notre marine marchande se composait de 151 navires, jaugeant ensemble 21,620 tonneaux.

Au 1er janvier 1850 elle comptait 156 navires et 30,826 tonneaux.

Différence en plus 5 navires et 9,206 tonneaux.

Or, pendant le même période de temps, notre commerce par mer, entrée et sortie réunies, montait de 187 à 267 millions, soit 80 millions en 12 ans.

Cette augmentation considérable a exigé un accroissement correspondant dans le nombre des navires employés ; et tandis que dans les autres pays, un mouvement analogue se produisait dans le commerce et la navigation, notre marine restait à peu près stationnaire.

Cette loi ne nous a pas fait atteindre davantage le deuxième but de son institution.

Si de 1845 à 1848 les exportations vers les pays de production hors d'Europe et dans le Levant se sont accrues de 9 millions à 17 millions, on ne peut lui en faire honneur. En effet, dans la pensée de ses auteurs, cette loi ne devait atteindre son but qu'en substituant des relations directes aux relations établies avec les ports d'Europe qui nous servaient d'intermédiaires.

Or, tandis que, pendant cette période de 4 années, les exportations directes au long cours n'augmentaient que de 8,000,000 de fr., les exportations vers les pays d'Europe s'accroissaient de 47,000,000, et la plus forte part de ces 47,010,100 n'était que des consignations faites à Rotterdam, Amsterdam, Hambourg, Londres, le Havre, Marseille, en destination des pays hors d'Europe et du Levant. C'est donc bien moins à l'aide de nus propres relations qee de celles des ports voisins que l'amélioration signalée s'est produite, et, il importe de le remarquer, ceci s’est fait en dépit de notr système commercial.

D'ailleurs, les comptoirs belges qui se sont établis dans les pays d'outre-mer ont sans doute contribué à nous fournir de nouveaux débouchés. Or, ce sont les subsides directs du gouvernement et non les droits différentiels qui ont provoqué leur création.

L’existence de lignes de navigation subsidiées, transportant nos fabricats à fret réduit, n'a-t-elle été d’aucun secours à notre industrie ?

Nos traités de commerce sont-ils restés inopérants ?

Aucun de ces faits n'étant, paraît-il, contestable, il faut en conclure que c'est surtout par des causes étrangères à la loi des droits différentiels que de nouveaux débouchés se sont ouverts pour notre industrie.

Le troisième but de la loi a été atteint, car des traités de navigation et de commerce ont été conclus depuis 1844.

Mais c'est précisément en cela que notre régime offre le plus singulier contraste. On adopte une loi pour protéger la navigation sous pavillon belge et on la fait servir à quoi ? A conclure des traités qui ont précisément pour objet de supprimer cette protection.

Disons maintenant quelle situation notre régime commercial fait au trésor.

Notre tarif de douane présente beaucoup de droits dits protecteurs dont le taux excède le maximum d'impôt que peuvent supporter les produits étrangers destinés à être vendus en concurrence avec nos propres produits.

Le trésor est privé de tout revenu sur l'importation des marchandises auxquelles ces droits s'appliquent.

En effet, si ces droits concernent des objets pondéreux, ils agissent à l'égal d'une prohibition, et comme elle, ils demeurent improductifs pour le trésor.

S'ils sont établis sur des marchandises qui présentent une plus grande valeur sous un moindre volume, il arrive de deux choses l'une : ou bien les droits excessifs compriment l'importation, ou bien ils alimentent la fraude, et dans ces deux cas encore le trésor ne perçoit rien. Car si l'appât qu'ils offrent à la contrebande est suffisant, il y a impossibilité matérielle de la réprimer entièrement.

Si l'on considère ensuite les résultats financiers que peut produire la loi du 21 juillet 1844, on voit encore qu'ils sont peu favorables au trésor.

Pour chaque produit imposé, le moindre droit s'applique aux importations directes sous pavillon belge ou sous pavillon assimilé. En général ce moindre droit est inférieur à celui que fixait le tarif précédent.

Dans ce système, plus la navigation sous pavillon national ou sous pavillon assimilé acquiert d’importance et plus le revenu du trésor doit nécessairement décroître.

Tout traité de commerce a pour but, sinon, pour effet, d'améliorer la position de notre industrie et d'accorder des avantages à notre navigation. Il n'a pas d'autres raisons d'être. Conséquemment si pour le conclure on atténue les droits établis chez nous, il peut bien arriver qu'on blesse quelques intérêts particuliers, mais l'industrie et la navigation trouvent une compensation de ce qu'ils pertent d'un côté par ce qu'ils obtiennent de l'autre. Il n'en est pas de même du trésor, tout ce qu'il cède constitue pour lui une perte sèche.

Il est non moins certain que si, par des moyens artificiels, on n'avait pas provoqué l'établissement d'industries qui ne trouvent pas dans leur propre constitution la vigueur nécessaire pour soutenir les luttes de la concurrence, il nous suffirait, en général, de jouir du droit commun sur les marchés étrangers, et que nous n'eussions pas été dans la nécessité de payer fort cher les avantages précaires que les traités nous procurent.

L'amoindrissement de revenu que les arrangements commerciaux occasionnent au trésor provient donc principalement des vices de notre régime. On reste probablement au-dessous du chiffre réel en n'évaluant la perte annuelle qu'à un million et demi de francs.

Tout concourt donc dans la législation actuelle, à déprimer le revenu des droits d'entrée, et l'on peut dire que ce n'est que par les progrès de l'aisance publique et par l'accroissement de la consommation qui en est la conséquence, que ces causes ont été neutralisées dans leurs effets.

Notre régime commercial présente encore d'autres inconvénients : il occasionne des dépenses considérables de personnel et il créé aux particuliers des difficultés inextricables.

Un mot d'abord de celles-ci.

Le tarif présente une nomenclature d'environ 700 articles. Le nombre de droits applicables à chacun d'eux varie de 3 à 7 ; admettons une moyenne de quatre droits, et nous obtenons un total de 2,800 taxes différentes !

C'était bien assez déjà ; mais les traités de commerce sont venus en augmenter démesurément le nombre. Nous avons en effet un tarif pour les produits français, un autre pour ceux du Zollverein, un troisième plus compliqué pour notre commerce avec les Pays-Bas, un quatrième pour les Deux-Siciles, un cinquième pour la Russie, un sixième pour la Bolivie et enfin un septième tarif pour les Etats sardes.

Pour connaître le droit qu'il faut appliquer, la douane doit savoir, quant aux importations par mer, d’où la marchandise est originaire, où elle a été chargée si le navire est venu directement en Belgique, s'il a relâché en route ; où, quand et pendant combien de jours.

(page 113) Une réponse verbale ne suffit pas, il faut des attestations émanées des agents consulaires. Ensuite le capitaine doit faire un rapport de mer que la douane est tenue de contrôler par la déposition de l'équipage.

S'il s'agit au contraire d'une importation par terre, pour laquelle on invoque les dispositions d'un traité, l'origine ou la provenance doit encore être justifiée.

Qu'on se figure maintenant un mouvement commercial de quelque importance. Plusieurs navires sont en déchargement et les destinataires ont hâte de prendre possession des cargaisons, qui se composent d'une foule de produits. Comment la douane sortira-t-elle d'embarras ? En doublant ou triplant son personnel.

Citons encore un exemple : Il est tel bureau où le chemin de fer amène chaque jour trois ou quatre cents colis de France et de Prusse. Il faut vérifier une masse de certificats d'origine, admettre les uns, rejeter les autres, puis alors seulement procéder à 400 liquidations de droits !

En s'imposant de fortes dépenses, l'administration parvient bien à se tirer d'embarras ; mais ce qu'il n'est pas toujours en son pouvoir d'empêcher, ce sont les plaintes du commerce.

Pour le trésor, notre régime commercial a donc ce résultat, d'une part, de le priver d'une partie notable du revenu que produirait un tarif plus modéré, de l'autre, de lui occasionner de très fortes dépenses de personnel tant pour le service des bureaux de douane que pour la répression de la fraude à la frontière.

Deux chiffres résument cette situation :

En 1849 les droits d'entrée ont produit 12,700,000 fr.

Et le service des douanes a coûté 4,000,000 fr., soit le tiers du revenu.

Ce système doit-il continuer à subsister ? N'est-il susceptible ni d'améliorations ni de réformes ? Est-il même possible de le maintenir intact en présence des réformes introduites dans leur législation par les Pays-Bas et l'Angleterre ?

Quelle est, en un mot, la situation nouvelle que font à la Belgique les changements introduits dans leurs lois de douane et de navigation, par la Hollande et l'Angleterre ?

Et avant tout, en quoi consistent les changements introduits dans la législation des Pays-Bas et de l'Angleterre.

L'examen de ces questions permettra d'apprécier plus sainement les traités que la Belgique vient de conclure avec ces deux pays.

Je dois rappeler en premier lieu quel était le régime commercial de la Néerlande avant l'adoption des nouvelles lois.

Toutes les principales branches de l'industrie nationale, moins nombreuses à la vérité qu'en Belgique, étaient protégées par des droits d'entrée élevés ; on n'a pas diminué ces droits.

La navigation sous pavillon national était protégée :

1° Par des droits différentiels à l'exportation des marchandises suivantes :

Céréales, potasse et cendres gravelées, védasse et soude, boissons distillées, chanvre brut, peaux, fers, coton en laine, charbon de terre, sucre brut, fruits, vins, graines oléagineuses, sel brut.

2° Par des droits différentiels de pavillon et de provenance savoir :

Les amandes, les corinthes, l'huile d'olive, les raisins secs, le soufre brut, les figues.

3° Par une réduction de 10 p. c. sur les droits d'entrée et de sortie afférents à toutes les autres marchandises.

4° Par l'exemption des droits d'entrée sur les produits des possessions néerlandaises d'outre-mer (à l'exception du sucre raffiné, de la mélasse et du thé.)

5° Par un droit différentiel de 50 p. c. sur l'exportation de Java des produits coloniaux.

6° Par les statuts de la société de Commerce qui l'obligeaient à réserver aux navires néerlandais, à l'exclusion de tous autres, l'intercourse entre la métropole et ses colonies.

Les faveurs indiquées aux n'°1, 2 et 3 étaient partagées, en vertu du traité de commerce, par les navires prussiens, anglais, américains, français, russes, belges, suédois, norvégiens, napolitains et grecs, pratiquant la navigation avec la Hollande.

Ce partage les ayant rendues complètement illusoires pour le pavillon national, le gouvernement néerlandais vient de les supprimer. C'est là le premier des changements introduits dans la législation antérieure.

Le second changement a pour objet d'accorder le partage des faveurs spécificées aux n°4 et 5 ci-dessus aux navires des Etats :

A. Qui assimilent le pavillon néerlandais à leur propre pavillon pour la navigation avec leurs ports, le cabotage et la pêche exceptés ;

B. Qui assimilent le pavillon néerlandais à leur propre pavillon dans la navigation avec leurs colonies, s'ils en possèdent ;

C. Qui ne perçoivent pas de droits différentiels au détriment des produits coloniaux néerlandais ou des produits d'autres contrées importés des ports néerlandais.

L'assimilation a en outre pour effet de placer le pavillon étranger qui l'obtient dans les mêmes conditions que le pavillon national, sous le rapport des droits à payer, soit dans les Pays-Bas, soit à Java ; le cabotage seul est excepté.

Quelle sera la position des navires étrangers à Java, selon qu'ils seront ou qu'ils ne seront pas assimilés au pavillon néerlandais ?

D'après le tarif colonial, les droits d'entrée se divisent en trois catégories :

Les moins élevés s'appliquent à l'importation sous pavillon néerlandais des marchandises d'origine ou de fabrication néerlandaise ;

Les droits intermédiaires s'appliquent à l'importation, sous pavillon néerlandais et d'un port néerlandais, de toutes les autres marchandises ;

Enfin, les droits les plus élevés s'appliquent à toutes les importations d'autres pays, sous pavillon néerlandais ou étranger.

Quant aux droits de sortie, ils se divisent également en trois catégories :

La première concerne les exportations vers les Pays-Bas, sous pavillon néerlandais.

La deuxième concerne les exportations vers tout autre pays, sous pavillon néerlandais.

La troisième enfin concerne toutes les exportations sous pavillon étranger.

Or, de ces droits, le pavillon assimilé payera le moins élevé, tandis que le pavillon non assimilé payera le plus élevé ; pour celui-ci, la concurrence sera donc difficile sinon impossible à soutenir.

Le pavillon néerlandais conservera un avantage marqué sur les uns et sur les autres, puisqu'on lui réserve le cabotage, qui est assez important, et les affrètements fructueux dont la société de commerce ne peut disposer qu'en faveur des navires hollandais. Ce monopole constitue à lui seul une protection des plus efficaces pour la marine marchande des Pays-Bas, car de 1,794 bâliments jaugeant 261,454 tonneaux, dont elle se composait en 1814, la moitié représentant 120,000 tonneaux, ont été emplojés entre la métropole et Java et ils ont reçu de la société de commerce l'énorme somme de 23 millions 744,000 francs à titre de fret.

Mais si les navires étrangers ne peuvent espérer de prendre part à ce mouvement, je démontrerai plus loin que les avantages qu'ils peuvent retirer de l'assimilation sont encore assez importants.

Il est à remarquer que ces changements laissent subsister les droits de faveur dont les produits néerlandais jouissent à Java, à l'exclusion de ceux de tous les autres pays. La différence dans le taux des droits est de 50 p. c.

Voyons maintenant les changements introduits dans la législation de l'Angleterre.

En Belgique, et autrefois dans les Pays-Bas, la protection pour la navigation résulte ou résultait des droits différentiels ; dans la Grande-Bretagne, au contraire, avant l'adoption de l'acte du 26 juin 1849, le tarif de droits n'était qu'un accessoire de la législation générale ; la protection que celle-ci assurait à la marine marchande anglaise était le résultat de prohibitions absolues.

Indiquer ces prohibitions, c'est donc résumer tout le système de navigation modifié en 1849.

Voici les prohibitions résultant eie la législation antérieure à la réforme.

Ne pouvaient entrer dans la consommation intérieure du Royaume-Uni, qu'autant qu'ils y avaient été importés par bâtiments anglais ou par bâtiments du piys d'origine ou du pays d'importation respectivement :

1° Les produits d'Europe ci-après : bois de construction, boissons, chanvre, écorces de chêne, fruits, garance, goudron, graines, grains ; huile d'olive, laine, liège, lin, saule, soufre, suif, sumac, tabac.

2° Les produits d'Asie, d'Afrique et d'Amérique.

Les produits désignés aux n°1 et 2, importés par bâtiments étrangers autres que du pays d'origine ou d’importation, n’étaient admis dans le Royaume-Uni, qu’à l’entrepôt pour la réexportation.

Le même régime restrictif existait pour les colonies britanniques.

Ainsi, de 1616 à 1849, l'exclusion des bâtiments étrangers a été le principe même du régime par lequel l'Angleterre réservait, dans les ports métropolitains et coloniaux, à ses propres navires la plus large part dans les transports de l'immense commerce dont elle est devenue le centre.

L’acte du 26 juin 1849 maintient cette exclusion en ce qui concerne le cabotage, mais il la supprime pour les autres mouvements. Toutefois, porte l'article 11 :

« Sa Majesté, s'il lui est démontré que des bâtiments anglais sont soumis directement ou indirectement, dans un pavs étranger, à des droits ou charges quelconques dont les bâtiments du pays sont exempts ;

« Qu'il est imposé, à des articles importés ou exportés par des bâtiments anglais, des droits qui ne sont pas imposés sur les articles similairees importés ou exportés par bâtiments nationaux ;

« Qu’un privilège quelconque est accordé, directement ou indirectement, à des bâtiments nationaux au détriment des bâtiments anglais, au préjudice des articles similaires importés ou exportés par des bâtiments anglais ;

(page 114) « Que la navigation et le commerce anglais ne sont pas placés, par ledit pays, sur le même pied que la navigation et le commerce de la nation la plus favorisée ;

« Sera, S.M., autorisée dans les cas sus-énoncés, à imposer, par ordre en conseil, aux bâtiments de ladite nation, entrant dans les ports du Royaume-Uni ou d'une possession anglaise, d'un point quelconque du monde, ou sortant desdits ports pour un point quelconque du monde, aux marchandises en général ou à des marchandises déterminées importées ou exportées par bâtiments de ladite nation, els droits que S. M. croira pouvoir compenser exactement les désavantages auxquels seront soumis comme il est dit ci-dessus, la navigation et le commerce anglais. »

Dans ce bill, l'exclusion des navires étrangers n'est donc plus qu une exception au principe de l'admission de tous les bâtiments au partage du bénéfice des transports.

Dans la forme, la différence est évidente. Au fond, les bâtiments étrangers restent toujours sous le coup de cette exclusion dont le nouvel acte a gardé le principe pour ainsi dire en dépôt dans la disposition que je viens de citer.

Quel usage le gouvernement anglais fera-t-il de cette arme ?

L’ouverture aux bâtiments étrangers, du commerce métropolitain et colonial, sera-t-elle un acte de générosité sans condition ?

Nullement, les cargaisons des navires belges sont dès à présent frappées en Angleterre et dans ses colonies, d'après un acte de 1826, d'une surtaxe de 20 p. c. à cause de nos droits différentiels, cela suffit pour leur interdire toute importation sur ces marchés qui s'étendent jusqu'aux confins du monde.

On a vu que le cabotage est réservé au pavillon anglais ; voici des indications propres à faire apprécier la portée de cette réserve, l'importance de ce que l'Angleterre offre de partager et de ce qu'elle garde pour elle.

Au 31 décembre 1849, l'effectif de la marine marchande d'Angleterre était de 25,902 navires et le tonnage de 5 millions 485,958 tonneaux.

Le mouvement de la navigation avec les colonies et les pays étrangers a donné 74,675 navires et 14,004,388 tonneaux ;

Le cabotage, 312,846 navires et 28,636,504 tonneaux.

Ensemble, 390,521 navires et 42,640,892 tonneaux.

L'Angleterre se réserve donc les 2/3 du mouvement de sa navigation, comme la Hollande en garde à peu près la moitié.

Il reste à jeter un coup d'oeil sur le tarif de droits de la Grande-Bretagne.

Jusqu'en 1842, sous la double pression des énormes besoins financiers du Royaume-Uni et des idées protectionnistes qui y régnaient, le tarif des douanes présentait outre 28 prohibitions ou restrictions à l'entrée ou à la sortie, des taxes d'importations extrêmement élevées. On s'aperçut enfin qu'en diminuant le tarif de certains droits, on obtiendrait un plus fort revenu, et le nouveau tarif de 1842 fut un premier pas dans cette voie. Les actes de 1845 et de 1846 réalisèrent ensuite une réforme importante.

En 1826, Huskisson avait érigé en maxime d'Etat que dans la politique commerciale de la Grande-Bretagne, tout devait être subordonné à la prospérité de la navigation. En 1845, Robert Peel fit prévaloir l'intérêt industriel, et dans cette vue le tarif de 1845, révisé en 1846, réduisit ou supprima les droits qu'il crut susceptibles d'exercer une influence défavorable sur le taux des salaires, sur le prix des matières premières brutes et même ouvrées, et sur le bien-être des classes inférieures. Mais, soit dans l'intérêt du trésor, soit pour obvier à une trop vive concurrence, des droits d'entrée élevés, des prohibitions et des restrictions d'entrée figurent encore dans le tarif. On comprend d'ailleurs que la situation insulaire de la Grande-Bretagne permet d'y exiger un plus fort impôt de douane qu'on ne peut le faire dans d'autres pays, dont les frontières étant plus accessibles sont plus exposées aux entreprises de la fraude.

A cause de leur importance toute spéciale, les grains et les sucres font l'objet de tarifs particuliers.

On sait qu'un régime très libéral a été adopté pour les premiers, et que les seconds cesseront seulement en 1854 d'être passibles de droits différentiels.

En ce qui concerne les autres marchandises, quelques faits suffiront pour faire ressortir l'esprit du tarif eu vigueur.

Sont exempts de tous droits : les produits chimiques ; les couleurs non préparées ; les matériaux pour constructions navales ; les agrès pour la marine ; les matières premières non ouvrées ; les drogueries ; la fonte, le fer et la houille ; les semences de graines ; les huiles ; les cuirs tannés, les soies greges ; les objets d'art ; le zinc brut.

Sont assujettis à des droits élevés : les vins, par hectolitre 151 fr. ; les boissons distillées, par hectolitre 93 à 251 fr. ; le tabac, par 100 kilog. de 827 à 2,481 fr. ; les cartes à jouer, par 12 jeux 100 fr. ; le carton, par 100 kilog. 75 à 83 fr. ; les chandelles, par 100 kilog. de 12-30 à 69 fr. ; les chapeaux de copeaux par 100 kilog. 965 fr. ; idem de paille par 100 kilog. 13-78 fr. ; idem de feutre par pièce, 2-50 fr. ; idem de soie, 2-50 fr. ; les chaussures par 12 paires, de fr. 5-62 à fr. 17-50 ; les tissus de coton, de 10 à 20 fr, ; les livres par 100 kilog. 246-08 ; le papier, par 100 kilog. 103 fr. ; les fourrures, 20 p. c ; la soie moulinée par 100 kilog., 551 fr. ; les lissus de soie de 15 à 25 p. c. ou par 100 kilog. de 551 à 3,859 fr.

Pour beaucoup d'autres articles le droit varie de 10 à 20 p. c.

Les prohibitions ou restitutions sont au nombre de 28.

Enfin la plupart des produits originaires et venant des possessions anglaises jouissent d'une réduction de droit de 50 p. c.

Deux changements importants ont été introduits dans le régime commercial des colonies britanniques : à partir du 25 mars 1848, les navires étrangers assimilés ont été admis, sur le même pied que les navires anglais, à y importer et à exporter de ce pays des marchandises ; de plus un acte du 8 mars 1850 a étendu l'assimilation au cabotage.

Sauf quelques rares exceptions, les marchandises ne sont assujetties dans les possessions britanniques qu'au droit de 5 ou de 10 p. c.

Il nous faut rechercher à présent quelle est l'importance du commerce avec Java et l'Inde anglaise.

Java et ses dépendances possèdent une population de 5 millions d'âmes.

Avant d'entrer dans les détails de sa navigation, de son commerce et de ses relations, il est utile de dire un mot de ses cultures.

Le système de culture adopté depuis longtemps réserve au gouvernement le cinquième de terres cultivables, et, à titre de corvée, le tiers environ du travail des paysans javanais.

Au lieu de cultiver par lui-même les terres qu'il s'est réservées, le gouvernement les concède à des particuliers qui les exploitent et mettent à profit le travail de corvée dû par les paysans. Le contrat désigne le genre de culture que le gouvernement veut faire exploiter sur les terrains concédés, et il assure en même temps au concessionnaire les avances de fonds nécessaires pour monter l'établissement. De son côté, celui-ci s'engage à livrer ses produits au gouvernement moyennant un prix convenu, sur lequel sont prélevés les frais de l'avance et ordinairement un dixième du capital prêté. Ces contrats, qui se concluent pour dix ou vingt ans, s'appliquent à presque toutes les cultures ; leurs conditions assurent toujours au concessionnaire de larges bénéfices, et le gouvernement voit chaque année s'accroître la quantité des produits que la société de commerce exporte, par navires hollandais exclusivement, pour les marchés de la métropole. Ce système, quelque opinion qu'on puisse s'en former d'ailleurs, profite ainsi à l'industrie, au commerce et à la navigation de la Hollande.

Les 3/9 de la superficie totale de Java sont cultivables, et, sur ces 3/9, deux sont cultivés aujourd'hui. Voici les principaux articles de production :

Riz. On évalue à 1 million 65,000 hectares l'étendue des terres propres à sa culture, et à 1,550 millions de kilogrammes la production annuelle. Le riz s'exporte pour Banca, Sumatra, Singapore, Bali, les Moluques, les Célèbes, Bornéo et l'Europe. C'est le produit le plus considérable de Java.

Café. On évalue la production totale à 70 millions de kilogrammes.

Le gouvernement exploite, par ses contractants, les 4/5 des cafés de Java. Le dernier cinquième est produit par l'industrie particulière.

Le café du gouvernement est livré à la succursale de la Société de commerce ; elle l'expédie à la Société en Hollande, qui le vend à l'encan pour le compte de l'Etat.

Le café des particuliers, soit environ 14 millions de kilogrammes, est en majeure partie réalisé à Java même, et expédié dans les diverses parties du monde.

Sucre. La production annuelle monte à 68 millions 200,000 kilogrammes, dont 9/11 sortent des fabriques exploitées par le gouvernement, et 2/11 des fabriques particulières.

Indigo. Java produit annuellement près de 1 million de kilog. d'indigo, dont la qualité n'égale point encore celle du Bengale, mais tend chaque jour à s'améliorer, grâce aux encouragements du gouvernement colonial.

Thé. Le chiffre de la production est de 350,000 kilog.

Cochenille. Sa production commencer à se répandre à Java.

Le tabac figure à l'exportation pour une somme de 4 1/2 millions de francs.

Le poivre se cultive à Java, mais réussit mieux à Sumatra. La cannelle présente une production de 125,000 kilog.

L'étain mérite aussi une mention. On l'extrait des mines de Banca et on l'apporte sur le marché de Batavia, où le gouvernement le vend aux enchères publiques lorsqu'il ne l'expédie pas pour son compte à la société de commerce en Europe.

L'etain de Banca est le meilleur qui existe. En 1844 l'exportation s'est élevée a 4 millions 393,000 kilog. et la valeur à 7 millions 286,000 francs.

L'ensemble des mouvements maritimes de Java et Maduta s'est élevé, en 1846, à 2,702 navires et 501,000 tonneaux.

(page 115) Le mouvement par pavillons s’est réparti de la manière suivante : (tableau non repris dans la présente version numérisée).

Le mouvement par pays présente les résultats suivants : (tableau non repris dans la présente version numérisée).

Ainsi le pavillon néerlandais effectue les 4/5 des transports |et, dans l'ensemble, l'intercourse directe avec la Hollande forme la moitié du mouvement général.

La navigation de la Belgique avec Java a présenté, en 1849, les résultats suivants :

Sortie pour Java, 2 navires étrangers et 734 tonneaux.

Entrée de Java, 2 navires étrangers et 1225 tonneaux, 3 navires belges et 1347 tonneaux. Total : 7 navires et 3303 tonneaux.

Les villes banséatiques, qui n'ont pas de droits différentiels dans leur tarif, ont employé, en 1846, 14 navires dans la navigation avec Java. Ce mouvement s'accroîtra par suite de la suppression des surtaxes à Java, ainsi que des progrès constants de la culture et du commerce dans cette riche colonie.

Il est à remarquer que si l'assimilation des pavillons étrangers an pavillon néerlandais ne s'étend pas au cabotage dans les possessions néerlandaises, le mouvement de la navigation avec les autres îles de l'Archipel oriental n'est pas sans importance. En 1846, ce mouvement a été avec Sigapore, de 25,200 tonneaux, avec Bali, de 12,000 tonneaux, avec les Moluques, de 8,800 tonneaux et des Célèbes, de 5,600 tonneaux.

Les navires d'Europe peuvent ainsi se livrer h des opérations de courte durée et employer avec profit le temps qu'ils passent dans les mers de l'Indo-Chine, au transport des nombreux produits qui viennent s'entreposer à Batavia, Rhio, Singapore et Manille.

L'ensemble du commerce de Java avec les divers pays a présenté ert 1846 les résultats suivants : importations, 58,039,000 fr. ; exportations, 123,297,000 fr.

Voici les pays entre lesquels s'est réparti le mouvement général d» la colonie : (tableau non repris dans la présente version numérisée).

Ce relevé indique que les transactions directes avec la Hollande forment les 4/7 environ (105 millions sur 181) du mouvement total des opérations ; il reste 76 millions au commerce avec les autres pays.

On attribue aux traités que l'Angleterre a conclus avec les Pays-Bas le 17 mars 1824 et le 27 octobre 1837, et à celui que la France a conclu avec le même Etat le 25 juillet 1840, la part qu'ils ont prise respectivement dans ces échanges.

Les principaux articles d'importation d'Europe, d'Amérique et du Cap, ont été en 1846 : (tableau non repris dans la présente version numérisée)

L'exportation se compose:

1° Des produits coloniaux de Java, provenant en majeure partie des. cultures organisées par le gouvernement ;

2° Des articles importés à Java et qui sont réexportés à toutes destinations. Ces derniers viennent principalement des îles qui forment l'Archipel oriental, Sumatra, Bornéo, Banca, Célèbes, les Moluques, etc.

Les ports de Java, Batavia, Samarang, Sourabaya, sont pour la navigation européenne, le centre des échanges. Les produits étrangers à Java, apportés par navires indigènes de faible tonnage, sont embarqués pour l'Europe à bord des navires de toute nation, mais, pour la plus forte part, sur les bâtiments frétés par la Société de commerce des Pays-Bas.

Le café, le sucre, le riz, l'indigo, l'étain, le tabac, les épices et le thé, forment, en valeur, plus des 4/5 des exportations de Java (100 millions sur 125).

Le mouvement des entrepôts de Batavia, Samarang et Sourabaya, a présenté en 1846, entrée et sortie réunies, un total de fr. 13,729,000.

Pendant la même année, les exportations de la France vers Java ont consisté dans les objets suivants : (tableau non repris dans la présente version numérisée).

(page 116) En 1849, les exportations de la Belgique vers Java ont été de : (tableau non repris dans la présente version numérisée).

L'importation de Java en Belgique a été de 1 million 207 francs, dont : café, 391,000 fr., poivre, 87,000 fr., sucres bruts, 324,000 fr., riz, 307,000 fr., rotins, 61,000 fr. et tissus de soie, 13,000 fr.

La richesse et la consommation de cette importante colonie augmentent dans une rapide proportion. En 1846, elle a reçu en produits européens : de la Hollande, 23,475,000 fr., d’autres pays d'Europe, 13,530,000 fr. dont 11,535,000 francs de l'Angleterre seule.

Pendant longtemps les étrangers s'étaient plaints de ne rien trouver à acheter sur le marché de Java, dont la société de commerce accaparait et enlevait tous les produits. Il n'en est plus de même aujourd'hui ; l'extension de la propriété particulière a multiplié la production générale, et, grâce aux progrès des cultures, les propriétés privées livrent maintenant à la vente libre une masse de marchandises telle que le commerce étranger a pu acheter, en 1846, pour 25 millions de francs. La richesse, et avec elle la consommation des habitants, en produits européens, va croissant, et nul ne peut dire où s'arrêtera ce mouvement.

Je m'occupe maintenant du commerce avec les possessions britanniques, et en premier lieu aves les Indes orientales anglaises.

En 1834, un acte du parlement mit fin au monopole commercial de la compagnie des Indes, et réduisit à des attributions administratives et politiques le pouvoir illimité dont elle avait joui si longtemps.

Les contrées de l'Indoustan directement soumises au gouvernement britannique, et qui se composent, en majeure partie, des trois présidences du Bengale, de Madras et de l'île de Ceylan, occupent une superficie de 185 millions d'hectares et comptent une population de cent millions d'habitants.

Si on ajoute à ces chiffres les pays simplement alliés ou tributaires du Royaume-Uni, qui forment dans l'Inde une étendue à peu près égale, avec 50 ou 60 millions d'âmes, on trouve, pour l'ensemble de cette vaste domination britannique, approvisionnée autrefois par l'ancienne compagnie des Indes et aujourd'hui par le commerce libre qui la remplace, un total de près de 300 millions d'hectares, ou presque six fois l'étendue de la France, et environ 160 millions de consommateurs !

En suivant, à travers ses longues vicissitudes, l'existence commerciale de la compagnie des Indes, et en comparant les faits des 25 dernières années à ceux qui les ont précédés, on peut facilement se convaincre que depuis l'abolition du monopole, les relations de l'Angleterre avec l'Indostan ont pris un développement considérable, dû en très grande partie à l'abaissement, sur le marché de Londres, du prix des produits de cette contrée ; abaissement qui, non moins que la paix, détermina un progrès immense dans la consommation du pays, et, par suite, un accroissement correspondant de débouchés.

En 1844, année de sa plus grande extension, cette exportation s'élevait à environ 240 millions de yards (219 millions de mètres) de tissus de coton.

Pareil progrès se fait remarquer sur presque tous les autres produits.

Le mouvement d'affaires des trois présidences, Calcutta, Madras et Bombay, avec l'Angleterre, l'Italie et les autres pays d'Europe, qui, en 1822, était d'environ 115 millions de francs, s'élève actuellement à une moyenne de 600 millions.

Le mouvement maritime du commerce anglais avec l'Inde, qui n'était en 1838 que de 466 navires et de 243,019 tonneaux, avait presque doublé à sept ans de là, en 1845. Pour 1847, il s'est élevé (entrée et sortie réunies) à 1,045 navires et 517,816 tonneaux.

Voici la valeur en francs de l’importation dans ces colonies de quelques-uns des produits de l’industrie britannique. C’est la moyenne de 1840 à 1846: (tableau non repris dans la présente version numérisée).

L'exportation totale s'est élevée à 157 millions.

La Grande-Bretagne reçoit actuellement de l'Inde, des quantités considérables de café, de coton, de laine, d'épiceries, de chanvre, de peaux, d'indigo, de riz, de soie grége, de sucre, enfin de tout ce qui compose les retours des pays d'au-delà du Cap.

Le commerce de la France avec les Indes anglaises a présenté en 1849 les résultats suivants :

Elle y a exporté : (tableau non repris dans la présente version numérisée). Total : 2,281,000 fr.

Elle a reçu des Indes anglaises des produits coloniaux pour une valeur de 25 millions de francs.

Son intercourse a donné lieu à un mouvement de 58 navires et 17,837 tonneaux.

En 1849, la Belgique a reçu de l'Inde anglaise et de la Chine des produits pour une valeur de 212,000 fr. ; elle y a expédié pour une valeur de 515,000 fr.

L'intercourse adonné lieu à un mouvement de 10 navires et de 4,640 tonneaux.

Le commerce avec les Indes occidentales anglaises doit aussi être mentionné.

L'esclavage dans ces colonies a été aboli en 1839.

Elles ont exporté en 1846 : café, 3,500,000 kilogrammes ; sucre, 127,000,000 de kilogrammes.

Les autres principaux articles expédiés en Angleterre sont le rhum, la mélasse, les bois exotiques, le poivre, le gingembre et la laine.

Parmi les produits industriels qu'on y a reçus d'Europe on remarque les suivants : (tableau non repris dans la présente version numérisée)

L'intercourse entre l'Angleterre et les colonies donne lieu à un mouvement de 411,000 tonneaux.

L'Australie anglaise commence à donner lieu à un commerce important.

Au ler janvier 1849, la population de cette colonie était de 220,474 âmes.

En 1848, l'importation a été de 39 millions et l'exportation de 48 millions ; en total 84 millions. A l'exportation les deux principaux produits de la colonie ont figuré : La laine pour fr. 31 millions. Le suif pour fr. 3 1/2 millions.

Entre autres articles on y a reçu d'Angleterre : (tableau non repris dans la présente version numérisée)

L'ensemble donne un chiffre de 31,389,000 fr.

En 1850, un seul chargement de marchandises y a été expédié de Belgique.

(page 117) Les colonies anglaises d'Afrique ne doivent pas être passées sous silence.

En 1841 » la population du Cap de Bonne-Espérance était de 162,000 âmes ; ses dépendances sont plus papuleuses.

Les importations de la colonie se sont élevées, en 1846, à 28 millions de francs, et les exportations à 12 millions ; ensemble 40 millions.

Les importations consistent surtout dans les articles suivants : Tissus de coton, de laine, de lin, de soie, habillements, cuir ouvré, verrerie et cristaux, papeterie.

Les exportations se composent de laine, vins et peaux.

En 1845, le mouvement commercial de l'île Maurice a représenté, à l’entrée, 30,800,000 fr ; à la sortie, 31,400,000 fr. Total : 62,200,000 fr.

L’Angleterre figure dans ce mouvement pour 37 millions, dont 9 à l’entrée et 28 à la sortie.

Ainsi, en résumé, la population de Java et des îles anglaises est d'environ 200 millions d'âmes.

La navigation y présente (entrée et sortie réunies) un mouvement de 4,000 navires et de 1 million et demi de tonneaux.

Le commerce libre de Java et celui des possessions anglaises représente un chiffre de 892 millions de francs.

C’est non seulement sur les marchés de leur métropole, mais encore sur celui de ces populeuses et riches colonies, que la Grande-Bretagne et la Néerlande convient toutes les nations aux luttes pacifiques de la libre concurrence.

L’Allemagne y a pris part de plein droit parce qu'elle n'a pas fait le singulier calcul de s'exclure de la navigation de la plus grande partie du monde connu, pour se réserver celle de son petit commerce. La Suède, la Hollande et les Etats-Sardes ont déjà répondu à l'appel de l'Angleterre, par la suppression des restrictions commerciales dont on leur demandait l'anéantissement.

La Belgique entrera-t-elle dans cette nouvelle confédération maritime pour en recueillir les avantages politiques et commerciaux ?

Doit-elle vouloir s'isoler dans ce mouvement qui finira par entraîner toute l’Europe ?

Elle le voudrait qu'elle ne le pourrait pas.

Sa résistance aux réclamations des autres gouvernements appellerait infailliblement des complications et des représailles. Déjà les marchandises importées dans la Grande-Bretagne, par nos navires, sont frappées d'une surtaxe de 20 p. c. ; nous n'y échapperons ailleurs qu'à la faveur des traités.

Le mouvement d'expansion qui se fait sentir dans le monde entier et tls véritables intérêts du pays, d'ailleurs, ne permettraient pas à la Belgique de s'abstenir.

Les principaux Etals dont nous avons à redouter la concurrence industrielle et commerciale vont pouvoir donner à leurs relations réciproques une extension toute nouvelle.

Par la levée de toute entrave pour leurs navires, les occasions d'échange seront plus fréquentes pour eux et le fret subira une baisse. Ils verront s'agrandir leurs débouchés sur les immenses marchés de l'Inde. Ils en recevront les matières premières et les denrées à meilleur prix que nous. Nes ports signalés partout comme d'un accès dangereux par les vexations douanières, verront s'éloigner les navires étrangers pour aller porter leurs cargaisons dans les ports voisins. Nous verrons ainsi languir tout à tout notre industrie et notre commerce, car nos débouchés en souffriront.

Si les considérations qui précèdent ont quelque valeur, elles paraissent faire un devoir au gouvernement, et si l'on me permet de le dire, à l’opinion qui a la direction des affaires, de provoquer la révision de notre régime commercial.

Dans plusieurs de ses dispositions, notre tarif établit des taxes trop élevées qui entravent le développement d'une foule d'industries et qui tarissent une des principales sources de revenu pour le trésor.

Le régime différentiel a créé, sans utilité réelle pour aucun intérêt légitime, des taxes et des complications inextricables qui éloignent le commerce de nos ports et provoquent les représailles de l'étranger.

Différents objets, et notamment des produits à l'usage exclusif des classes aisées, sont soumis à des droits insignifiants qui ne produisent presque rien au trésor, tandis qu'il serait facile d'en obtenir un revenu assez important.

Dans son ensemble, notre législation forme un dédale de dispositions douanières où le redevable s'égare et où l'administration elle-même ne se meut qu'à l'aide d'un nombreux personnel qui lui occasionne de fortes dépenses, dont la déchargerait en partie un tarif simplifié.

Enfin des motifs sérieux, puisés dans des considérations politiques et commerciales de premier ordre, nous font une nécessité de compter avec la situation nouvelle qui résulte pour nous des changements introduits dans le régime commercial de plusieurs autres pays.

La nécessité et l'opportunité de la révision de nos lois commerciales sont évidentes.

Le gouvernement n'a pas attendu la proposition de l'honorable M. Coomans pour le reconnaitre. Il a annoncé depuis longtemps ses intentions.

Mais, il l’a toujours déclaré aussi, les intérêts nombreux qui se rattachent aux différentes branches d'industrie et de commerce, qui ont été créées ou qui se sont développées sous la législation actuelle, exigent que la transition à un système nouveau, que toute innovation, soient ménagées de telle sorte que personne n’ait à craindre une perturbation violente. Il faut donc, ici surtout, deux choses indispensables : de la prudence et du temps.

Il pourra convenir à certaines personnes qui se déclarent protectionnistes, d'imiter les allures étranges de l'honorable M. Coomans, dans la préface de son projet de loi, et, pour avoir constaté les vices de notre législation, de nous accuser de ne pas faire table rase sur-le-champ du système qui nous régit. Nous leur répondrons que nous voulons améliorer et non révolutionner.

Par suite de la réforme commerciale réalisée par d'autres pays, le premier objet qui appela notre attention fut le régime de notre navigation. Le gouvernement dut rechercher les changements qu'il convenait d'introduire dans la loi des droits différentiels. Il reconnut bientôt qu'un très grand nombre de marchandises soumises à ce régime ne donnaient lieu qu'à un mouvement commercial peu considérable, et que, pour débarrasser la navigation d'entraves inutiles, il y avait lieu de supprimer les surtaxes de provenance et de pavillon pour ces marchandises.

C'est sous l'influence de ces idées que le gouvernement vient de conclure deux traités, l'un avec la Grande-Bretagne et l'autre avec les Pays-Bas.

Ils forment le point de départ de la réforme dans nos lois de navigation ; ils font une brèche dans le système des droits différentiels.

Nos plénipotentiaires à Londres et à la Haye ont eu pour instruction d'offrir, contre équivalents, la suppression des droits différentiels sur un certain nombre d'articles ; et nous sommes parvenus, grâce à cette mesure qui était commandée d'ailleurs par les véritables intérêts du pays, à obtenir, sans restriction ni réserve, le bénéfice du nouveau régime libéral inauguré dans ces deux pays. Le traité avec l'Angleterre consacre en notre faveur : 1° La levée exceptionnelle des droits de port qui grevaient nos navires en Angleterre ; 2° La levée de la surtaxe qui frappait leurs cargaisons ; 3° La jouissance pleine et entière de la nouvelle législation britannique, tant dans les ports de la mère patrie que dans les colonies.

Le traité avec les Pays-Bas nous assure également tous les avantages des nouvelles lois de navigation de ce pays.

Ce serait, peut-être, l'occasion de dire un mot de ce traité, qui paraît si injustement et si incroyablement attaqué.

M. Osy. - Je demande la parole.

- Un membre. - Est-ce que nous allons discuter le traité ?

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Non, nous ne discuterons pas le traité aujourd'hui. Mais je dois prémunir la chambre et le pays, l'occasion est assez opportune, ce me semble, contre les préventions que l'on essaye de faire prévaloir. Si vous voulez juger le traité avec impartialité, écoutez les explications que je veux vous donnera.

L'article 14 du traité est celui qui sert de thème à l'opposition. Il supprime les droits différentiels sur trente-cinq articles donnant lieu à une importation annuelle de 20,000 tonneaux seulement.

Je tiens qu'aucune critique sérieuse n'est possible sur ce point ; car, en retour, les faveurs des nouvelles lois de navigation dans les Pays-Bas nous sont assurées.

Mais, et voici l'objecti n, l'article 14 stipule que ces marchandises, importées de Hollande en Belgique, ne payeront que le moindre droit du tarif, tandis qu'arrivant des autres entrepôts d'Europe, elles resteront assujetties au plus haut droit. Et l'on s'écrie que nous sacrifions ainsi toutes nos relations avec les autres pays au commerce des ports néerlandais !

Comment n'a-t-on pas compris que la conséquence de cette stipulation, c'est la suppression des droits différentiels sur les trente-cinq articles énumérés dans le traité ? N'est-il pas évident qu'un nouveau tarif doit être introduit pour ces marchandises, que sous peine de faire une chose absurde, un droit uniforme doit remplacer les droits différentiels, et que, dès lors, les provenances des divers pays seront également favorisées ?

M. Osy. - On ne le savait pas.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il n'y avait qu'un mot d'explication à demander.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Et c'était si facile ! Je crois même qu'avec un peu de bonne volonté on aurait pu deviner ce que je viens de dire.

Il est clair que le gouvernement ayant embrassé d'un point de vue élevé, d'une manière générale, la réforme qu'il trouvait nécessaire d'introduire dans notre régime commercial, ayant reconnu que l'on pouvait, sans inconvénients, supprimer immédiatement 35 articles de nos droits différentiels, a sagement agi en négociant d'abord, comme il l'a fait, avec les cabinets de Londres et de la Haye. Il ne pouvait obtenir à meilleur prix le bénéfice des lois de navigation de l'Angleterre et des Pays-Bas.

J'aurais maintenant à m'occuper de la proposition de l'honorable M. Coomans Elle a la prétention, si j'en crois son auteur, d'inaugurer une réforme importante, et d'introduire dans notre législation commerciale les principes du régime du free-trade. Elle n'y introduirait, à mon sens, que le désordre et la confusion. Loin de préparer la voie des réformes et des améliorations, elle est destinée à consacrer de nouveau, à consolider, à aggraver, à exagérer le système des droits différentiels. Ce n’est pas sérieusement que l’honorable M. Coomans a pu annoncer que (page 118) l’adoption de cette proposition serait un premier pas vers la liberté commerciale.

Mais l'heure est trop avancée pour continuer la discussion. Je la reprendrai le jour qu'il plaira à la chambre d'indiquer.

M. Coomans. - Si l'honorable ministre des finances ne peut assister à la séance de demain, je crois qu'il faut ajourner la discussion à après-demain.

- La chambre remet la suite de la discussion à après-demain.

La séance est levée à 4 heures 3/4.