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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 3 février 1852

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1851-1852)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Ansiau procède à l'appel nominal à 3 1/2 heures, donne lecture du procès-verbal de la dernière séance dont la rédaction est adoptée, et communique l'analyse des pièces adressées à la chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Le sieur Dufranc, ancien combattant de septembre, prie la chambre de lui accorder une pension. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Van Aughem prié la chambre de décider si un milicien qui s'est fait remplacer en vertu de l'article 17 de l'arrêté royal du 3 septembre 1848 peut être autorisé, avant les dix-huit mois de service de son remplaçant, à faire le versement de la somme fixée par la loi, à l'effet d'être déchargé de toute responsabilité ultérieure à l'égard de son remplaçant. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Plusieurs fabricants de tamis demandent une loi qui interdise l'entrée des soies pour blutoir en quantité moindre de 20 mètres de longueur ou bien qui les frappe d'un droit de 50 fr. au moins par chemise de blutoir et qui soumette au même droit les cercles en bois servant à les confectionner. »

- Renvoi à la commission permanente d'industrie.


« Il est donné communication de la lettre suivante :

«M. le président,

«Je viens au nom de ma mère et de toute ma famille vous exprimer combien nous avons été sensibles à la part que la chambre a prise à la perte douloureuse que nous avons éprouvée. En se faisant représenter aux funérailles de mon malheureux père, elle a voulu prouver la sympathie qu'avait su lui inspirer le citoyen dévoué dont nous pleurons la mort.

« Veuillez être auprès de la chambre des représentants l'interprète de nos sentiments de reconnaissance et agréer en particulier l'expression de notre gratitude pour le pieux devoir que vous avez bien voulu rendre au président du sénat.

« Veuillez agréer, M.le président, l'assurance de ma haute considération.

« A. Dumon. »

Rapport sur une pétition

M. Allard, rapporteur. - Messieurs, la chambre a renvoyé à la commission une pétition que le sieur Raginel lui a adressée à la suite de la signification qui lui a été faite de quitter la Belgique. Ordre lui a été donné de quitter la Belgique dans les cinq jours.

La commission, par respect pour le droit de pétition, a l'honneur de vous proposer le renvoi au ministre de la justice.

- Ce renvoi est ordonné.

Pièces adressées à la chambre

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai l'honneur de déposer un rapport sur l'inspection des chemins vicinaux du Limbourg, du Hainaut et du Brabant pendant l'année 1851. Comme ce service a beaucoup d'importance, la chambre jugera peut-être utile d'ordonner l'impression de ce rapport bien qu'il soit volumineux.

- Il est donné acte à M. le ministre du dépôt qu'il vient de faire. La chambre ordonne l'impression et la distribution du rapport déposé.

Projet de loi relatif au renouvellement des titres des emprunts de 1848, à 5 p. c

Discussion générale

M. T'Kint de Naeyer, rapporteur. - J'avais demandé la parole hier pour répondre à M. Cools, mais M. le ministre des finances m'a laissé peu de chose à dire. Si un honorable membre est décidé à appuyer l'amendement proposé, je lui céderai mon tour de parole.

M. De Pouhon. - L'honorable M. Cools proposa, dans la séance d'hier, de reporter sur les effets au-dessous du pair la dotation d'amortissement de ceux qui le dépassent. Sa proposition n'a pas de chance, je le sais, d'être adoptée puisque M. le ministre des finances l'a combattue ; mais, comme j'ai recommandé cette idée, il y a 4 ans, à l'attention du gouvernement et des chambres, je crois devoir l'appuyer de quelques considérations qui affaibliront peut-être dans votre esprit l'effet des paroles de M. le ministre des finances.

La question de l'amortissement, comme toutes les questions, du reste, ne doit pas être envisagée sous une seule de ses faces. Il faut la considérer sous les rapports des nécessités au moment de la négociation des emprunts, de son influence sur le développementet l'élévation du crédit national ; il faut l'examiner comme mesure d'ordre et de bonne administration de la fortune publique, enfin comme moyen d'arriver à l'allégement du fardeau des dettes.

M. le ministre des finances voudrait-il nous dire si, dans sa pensée, il aurait placé au prix qu'il a obtenu, l'emprunt qu'il vient de contracter dans le cas où, pendant les mois qui a précédé la conclusion de cet emprunt, l'amortissement avait cessé de fonctionner ? Je lui demanderai aussi s'il croit qu'il eût fait admettre son emprunt par les banques, les banquiers et le public, à moins de grande différence de prix, dans le cas où il eût voulu l'émettre sans amortissement ?

Si ses réponses étaient affirmatives, je n'hésiterais pas à dire qu'il se ferait illusion. Si au contraire elles sont négatives, il reconnaîtra par là que ce n'est pas un pur sacrifice de racheter successivement une dette pour se retrouver dans le cas d'en contracter de nouvelles.

Quant au second point, celui de la possibilité de négocier un emprunt sans dotation d'amortissement, je reconnais qu'il s'est présenté des circonstances où l'on n'eût pas attaché une grande valeur à l'amortissement ; c'est alors que la sécurité était profonde, et que l'on reportait ses regards dans l'avenir sans préoccupation. L'abandon de l'amortissement n'eût plus produit que des réflexions sur les conséquences fâcheuses, mais lointaines de cette innovation.

L'adoption du mode proposé par l'honorable M. Cools présenterait l'avantage d'une plus grande régularité dans le mouvement des fonds du trésor et préviendrait les embarras qui se produisent toujours dans des circonstances difficiles, en ce qui concerne les emprunts de 1840 et de 1842 : C'est d'accumuler des réserves qui servent aux besoins courants et qui ne se retrouvent plus quand revient l'obligation de les rendre à leur destination. Une somme de 5,700,000 francs a été réservée sur la dotation de ces emprunts. Quand le moment est venu de son application qui n'avait été que suspendue, on a jugé plus commode d'oublier les conditions des contrats d'emprunt.

Si le ministère avait eu plus d'ampleur dans ses vues, il n'aurait pas hésité, après la révolution de février, de demander à l'emprunt forcé 5,700,000 francs de plus pour les rendre à l'amortissement. C'eût été un fait honorable pour une nation, et par là on eût arrêté la grande dépréciation des valeurs de l'Etat et des valeurs privées ; le crédit public eût été consolidé pour toujours.

La principale considération que M. le ministre des finances ait fait valoir contre la proposition de M. Cools, c'est que, du jour où une pareille obligation serait contractée, on accroîtrait dans une proportion extrêmement forte la dotation du 3, du 4 et du 4 1/2 p.c. ; et que l'on arriverait ainsi dans un temps très rapproché à avoir le 4 1/2 lui-même audessus du pair, de sorte que l'on appliquerait exclusivement le fonds d'amortissement au 3 et au 4 p. c. et qu'ainsi l'Etat emploierait tous les moyens en son pouvoir pour que les fonds atteignissent le taux le plus élevé possible afin de les racheter le plus cher possible. Je cite textuellement.

J'aurais cru, messieurs, que toutes ces conséquences que M. le ministre présente comme obstacle à l'adoption du mode proposé, devraient au contraire militer en sa faveur.

Le 4 1/2 p. c. s'élèverait, dit-il, dans un temps très rapproché au-dessus du pair ! Mais c'est ce qui est désirable, car il faut que le 4 1/2 p. c. soit au-dessus du pair pour que la conversion des 5 p. c. soit possible. Et M. le ministre veut la conversion puisqu'il se proposait de vous demander, quoique très intempestivement, dans la discussion actuelle, l'autorisation de convertir le 5 p. c. quand il jugerait opportun de réaliser cette opération.

Le 4 et le 5 p. c. s'élèveraient beaucoup, objecte M. le ministre, et l'amortissement devrait les racheter très cher. Grand dommage, en vérité ! Se mettre dans le cas de racheter à 75 p. c. un 3 p. c. qui a été émis à 73 en 1838, quand une caisse qui est sous la direction du ministre des finances, en vend de 63 à 65 p. c., je conçois qu'il y ait là un motif de résistance. Mais ce cours de 73 p. c. sera tout de même atteint quand la caisse des consignations n'aura plus de 3 p. c. à vendre et que l'amortissement sera forcé de se faire sentir à la bourse dans des circonstances normales.

Mais voyez, messieurs, combien cette hausse sur les 3 et 4 p. c, si elle n'était désirable, devrait peu entrer dans l'appréciation de la question. Il reste en circulation environ 70 millions, capital nominal de ces deux fonds, ce qui représente un capital effectif de 53 millions, tandis que le (page 488) 4 1/2 p. c. importeraut, après la conversion des 5 p. c, un capital de 340 millions.

La conversion étant effectuée et les dotations réunies, le 4 1/2 p c. ne jouirait que des fonds d'amortissement qui ont été consacrés par les contrats d'emprunts. Or, il faudrait des circonstances très favorables pour que l'action de l'amortissement sur 340 millions dût se reporter sur les 4 et 3 p. c. Mais si cela était, il n'y aurait qu'à s'en applaudir beaucoup, car la réduction d'intérêt du 5 en 4 1/2 n'est pas la limite des économies à faire sur la dette publique. Celle-là opérée, il y aura à réduire le 4 1/2 en 4, le 4 en 3 p. c., et pour que cela devienne possible, il faudra nécessairement que ces deux fonds atteignent et dépassent même le pair.

L'honorable M. Cools cherchait hier des enseignements en Angleterre. Je vous avouerai, messieurs, que je me préoccupe peu de ce qui se fait à l'étranger. Je ne m'en informe que pour y chercher des idées, et j'examine alors jusqu'à quel point ces idées seraient ou non utilement applicables chez nous. Ma seule source d'inspiration est dans l'observation des circonstances et des faits du pays.

Je ferai toutefois observer que c'est par des réductions successives que la dette anglaise a été réduite à 3 p. c. d'intérêt. Je crois que c'est dans le courant de cette année, ou d'une année très prochaine, que la partie de la dette qui porte encore 3 1/4 p. c., sera confondue dans la dette à 3 p. c. Le gouvernement de ce pays aura alors à juger si les intérêts généraux réclament un progrès de plus dans cette voie et vous ne pouvez prévoir les moyens que dans l'affirmative il emploiera pour en accélérer la réalisation.

Je me réfère à ce que j'ai dit, il y a peu de temps, de l'utilité de l'amortissement considéré sous ses divers aspects. La force des choses a amené M. le minisire des finances à en reconnaître au moins la nécessité. Une conviction moins tardive de sa part aurait produit des conséquences qui se seraient déjà fait sentir très avantageusement pour le pays.

M. T'Kint de Naeyer, rapporteur. - Messieurs, on pourrait conclure du discours que vous venez d'entendre et de celui qui a été prononcé hier par l'honorable M. Cools, qu'il s'agit d'introduire en Belgique un nouveau système d'amortissement. Or, pour les emprunts antérieurs, nous sommes liés par des contrats qui doivent être exécutés. Pour les emprunts de 1848, le gouvernement vous propose de suivre les mêmes règles.

L'honorable M. Cools croit que l'article 5 est nouveau dans la législature ; c'est une erreur ; il a été copié pour ainsi dire textuellement dans la loi du 22 mars 1844.

L'article 2, paragraphe 3, de cette loi porte : « Les fonds de la dotation de cet amortissement qui, par suite de la disposition qui précède, se trouveront sans emploi, serviront à la diminution de la dette flottante, jusqu'à son entière extinction, et ultérieurement à telle autre destination qui sera déterminée par la loi. »

Le but de l'amortissement est, en premier lieu, ele soutenir le crédit public et, en second lieu, d'éteindre la dette. Personne jusqu'à présent n'a contesté l'utilité de l'amortissement. Il ne s'agit pas le moins du monde d'en décréter la suppression, de renoncer à tout moyen de soutenir la valeur des effets publics dans les temps de crise, on vous propose seulement, lorsque le pair sera dépassé, de donner à la réserve une destination plus profitable pour les intérêts généraux, en l'employant au remboursement de la dette flottante.

N'est-ce pas un véritable amortissement ? Et si par les impôts, vous ne réussissez pas à combler le déficit, ne serez-vous pas amenés à tôt ou tard à faire un nouvel emprunt ?

C'est à ce point de vue que, dans le rapport de la section centrale, nous avons dit qu'il ne servirait à rien de rembourser les dettes anciennes, en créant des dettes nouvelles ; que, dans le fait, on ne rembourserait rien du tout.

L'honorable M. Cools a cherché à rendre obscure cette vérité que je n'ai pas inventée et qui est dans le domaine public. L'honorable membre a compris que, dans l'opinion de la section centrale, une nation ne s'enrichirait pas en payant ses dettes ; nous n'avons jamais rien dit de semblable.

Il est évident que la nation deviendra plus riche si elle paye ses dettes en diminuant ses dépenses ou en augmentant son revenu, mais il n'en sera pas de même si elle se borne à rembourser d'une main et à emprunter de l'autre. Aucun plan financier ne saurait tenir lieu de l'esprit d'économie et de conduite.

Que diriez-vous d'un particulier qui amortirait annuellement les dettes qu'il aurait contractées, en empruntant ailleurs ?

Il est évident que sa situation, à moins que ses ressources n'augmentent, deviendra de plus en plus mauvaise, puisque à sa dette primitive il faudra ajouter les frais de ces renouvellements successifs. On a grande chance de se ruiner à force de se dégrever de la sorte.

Les théories de l'amortissement sont merveilleuses au premier abord. Mais ce serait une illusion de croire que la dette s'éteint par l'action d'un fonds indépendant s'accroissant des intérêts composts.

Pour que le capital s'augmente de la sorte, il faudrait l'employer dans une industrie productive, et les profits, au lieu d'être consommés, devraient être ajouté annuellement au capital. Mais, messieurs, ce n'est pas ainsi que les choses se passent.

Qu'arrivc-t-il en effet ? C'est que la partie des impôts qui était destinée à payer les intérêts des fonds amortis continue à être employée à un nouvel amortissement, au lieu d'être restituée aux contribuables. Voilà toute la magie de l'amortissement.

L'honorable M. Cools veut fortifier l'amortissement ; pour cela il n'y a qu'un seul moyen efficace, c'est de créer de nouvelles ressources ou d'introduire des économies dans les dépenses. On ne tire pas un trésor du néant.

L'honorable M. De Pouhon semble poursuivre un autre but ; en faisant agir l'amortissement avec plus de force sur les fonds qui ont été créés à un intérêt inférieur, il espère faciliter la conversion. Cette pensée me semble avoir dominé dans son discours.

M. De Pouhon. - C'est vrai.

M. T' Kint de Naeyer. - Messieurs, je ne crois pas qu'à l'occasion de ce projet de loi, nous puissions à priori nous prononcer sur un nouveau système d'amortissement. Nous nous trouvons, comme j'ai eu l'honneur de le dire, en présence de droits acquis.

Ce n'est pas à propos d'une fraction de nos emprunts qu'il convient d'entrer dans une voie nouvelle.

D'ailleurs, je demanderai à l'honorable M. De Pouhon si l'Etat doit pousser à la conversion par des moyens artificiels. Est-il équitable de favoriser d'une manière exorbitante les porteurs des fonds à bas intérêt au détriment des autres ? Qu'arrivera-t-il en effet ? Dès que le 5 p. c. aura franchi le pair, l'amortissement cessera, parce que l'on trouve qu'une rente de 5 fr. obtenue à 110, par exemple, coûte trop cher. On n'hésitera pas cependant à payer 80 ou même le pair, pour une rente de 3 francs.

Cette hausse extraordinaire, qui l'aura produite ? La dotation du 5 p. c. La conversion s'opérera, mais à des conditions injustes.

Nous croyons, messieurs, devoir vous proposer le maintien de l'article 5 du projet de loi, parce que nous croyons que l'amortissement doit se faire dans les conditions les plus favorables possible et de la manière la moins onéreuse. On ne saurait donner à la réserve de l'amortissement une destination plus utile que celle qui lui est assignée par le projet de loi.

Si la dette flottante n'était qu'une anticipation sur les recettes annuelles, elle ne présenterait aucun danger, mais vous savez qu'en général elle représente un découvert permanent. La chambre s'étant formellement prononcée contre un pareil système, je crois inutile de vous présenter à cet égard de longs développements. Soyez-en bien persuadés,, messieurs ; si le trésor, dans des moments de crise, éprouvait des embarras, ce ne serait certainement pas parce que vous auriez éteint une partie de la dette flottante. Dans la situation où la Belgique se trouve, il faut avoir recours aux bons du trésor le moins possible, au risque même de conserver une dette constituée un peu plus forte.

M. Osy. - Messieurs, j'avais demandé la parole pour combattre le système de l'honorable M. Cools. L'honorable M. Cools voudrait que, lorsque le 5 p. c. est au-dessus du pair et que l'amortissement est suspendu, les sommes disponibles fussent employées au rachat de fonds à plus bas intérêt.

L'honorable M. De Pouhon se rapproche beaucoup de la proposition de M. Cools ; il voudrait également porter l'amortissement sur les fonds 4 1/2, 4 et 3 p. c. afin de favoriser ainsi la conversion du 3 p.c. Eh bien, messieurs, il est certain que lorsque nous ne pourrons pas amortir le fonds dont il s'agit en ce moment, nous ne pourrons pas amortir non plus les emprunts, assez considérables de 1840 et de 1842, à 5 p. c, ni celui que le gouvernement vient de contracter il y a peu de jours ; toutes les ressources de l'amortissement viendraient donc se concentrer sur les emprunts à 4 1/2, à 4 et à 3 p. c, qui monteraient ainsi à un taux extrêmement élevé, de sorte que les rachats à faire par l'Etat deviendraient tout à fait onéreux.

Il faudrait plutôt, messieurs, lorsque l'amortissement est suspendu, conserver en caisse des bons du trésor ou du numéraire et ensuite, quand les fonds seraient au-dessous du pair, reprendre l'amortissement pour le courant et pour l'arriéré. Je crois que c'est là le véritable système.

L'honorable M. De Pouhon nous dit : « Aussi longtemps que la caisse d'amortissement vendra du 3 p.c, il est impossible que ce fonds s'élève. » Je dois répondre à l'honorable M. De Pouhon que M. le minisire des finances n'a pas autorisé la caisse d'amortissement à vendre du 3 p. c. mais qu'il l'a seulement autorisée à prendre à la caisse des consignations ce dont on a besoin pour l'amortissement. Certainement le gouvernement aurait le droit de réaliser le 3 p. c. qui se trouve en caisse, mais cela porterait la perturbation à la bourse et le gouvernement a bien fait de ne pas prendre une semblable mesure.

Mais pourquoi a-t il autorisé la caisse d'amortissement à prendre du 3 p. c. à la caisse des consignations ? Parce que la spéculation s'était trop portée sur ce fonds qui est, pour ainsi dire, entièrement coté et que nous auriez vu en peu de temps monter à un taux très élevé. Je crois que la mesure prise par le gouvernement est très sage et tout à fait dans l'intérêt du crédit public.

Pour moi, messieurs, je suis partisan du système anglais ; si nous n'avions pas des engagements envers nos créanciers, je crois que le plus sage serait de n'amortir qu'avec les excédants des budgets, mais nous sommes loin de pouvoir en venir là.

Je crois, messieurs, que le gouvernement devrait faire un seul changement à l'article 5 ; ce serait d'autoriser l'emploi des bons du trésor au profit de la caisse d'amortissement. L'amortissement serait suspendu (page 489) lorsque le 5 p. c. serait au-dessus du pair, mais on le reprendrait dès que les cours baisseraient.

Je pense, messieurs, qu'il est sage pour un pays d'avoir toujours une dette flottante pour une somme modérée, parce que, dans les circonstances extraordinaires, il faudra y avoir recours ; les rentiers sont habitués à y mettre leur argent ; lorsque, pendant quelques années, vous n'auriez pas cette ressource, vous auriez peine à trouver ce même moyen d'appeler les fonds des particuliers au trésor.

Je demanderai à M. le ministre des finances s'il consentirait à mettre dans l'article 5 que les fonds qui resteraient oisifs seraient employés en bons du trésor au profit de la caisse d'amortissement.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Messieurs, je pense que la discussion à laquelle on s'est livré est véritablement un hors-d'œuvre. Je n'ai pas cru devoir traiter d'une manière approfondie les questions qui ont été soulevées hier par l'honorable M. Cools et qui ont été reproduites aujourd'hui par l'honorable M. De Pouhon. J'ai dit hier que nous n'avions pas à examiner ces questions. Je comprendrais qu'on pût soumettre un projet de loi réformant la loi de 1844, érigeant un nouveau système pour l'emploi des fonds de l'amortissement qui resteraient disponibles ; mais ce que je ne comprends pas, c'est qu'à propos de cet emprunt de 37 millions, c'est-à-dire d'une fraction de nos emprunts à 5 p. c., on vienne proposer un système entièrement différent de celui qui a été appliqué aux autres 5 p. c. Si l'on veut réformer les principes qui ont été appliqués jusqu'à présent, que l'on fasse une proposition et l'on pourra la discuter.

Mais pourquoi, relativement à cet emprunt, à cette petite réserve éventuelle qui resterait disponible sur l'amortissement, statuerait-on d'une autre manière qu'on ne l'a fait pour les autres fonds d'amortissement ?

C'est donc par une fin de non-recevoir que j'écarte la proposition de l'honorable M. Cools. Il ne me paraît pas que cette question se présente d'une manière opportune. Qu'on fasse une proposition spéciale applicable à tous nos emprunts, on pourra l'examiner.

Toutefois je crois devoir rencontrer les observations qui ont été présentées tout à l'heure par l'honorable M. De Pouhon. M. De Pouhon nous dit : « M. le ministre des finances aurait-il placé l'emprunt de 26 millions qu'il vient de contracter, à d'aussi bonnes conditions, si l'amortissement n'avait pas fonctionné ? »

Je demande à l'honorable membre ce que cette question a de commun avec la thèse que soutient l'honorable M. Cools ? Je suis prêt à reconnaître avec l'honorable M. De Pouhon que l'amortissement fonctionnant a été utile pour soutenir le cours des fonds publics et que partant on a pu, dans les circonstances actuelles, contracter à de meilleures conditions.

Mais que dit l'honorable M. Cools ? Il soutient qu'il faudrait, lorsque le 5 p. c. est au-dessus du pair, employer le fonds d'amortissement au 3, au 4 et au 4 1/2 p. c. Cela, j'imagine, n'a rien de commun avec la question soulevée par l'honorable préopinant. L'emploi de l'amortissement au 3, au 4 et au 4 1/2 p. c., ai-je dit, ferait élever ces fonds à un cours extraordinaire, « Le grand malheur ! répond l'honorable M. De Pouhon ; mais si le 4 1/2 p. c. monte au pair, le 5 p. c. sera plus élevé encore ; ce qui permettra d'opérer la conversion ; c'est, coutinue-t-il,une chose extrêmement avantageuse de voir cette réduction dans le taux de l'intérêt. »

J'en conviens, mais à une condition : c'est que cette réduction d'intérêt arrive par des moyens naturels et non par des moyens artificiels.

Aux conditions que vous proposez, on pourra toujours réduire considérablement l'intérêt, élever le cours des fonds publics ; il suffira de s'imposer des sacrifices plus grands encore en faveur de l'amortissement. Mais ce sera à l'aide de l'impôt que vous parviendrez à élever ainsi le taux des fonds publics ; mais l'intérêt général pour les capitaux sur la place ne sera plus en rapport avec celui qui aura été artificiellement organisé par le trésor public. Je désire assurément une réduction de l'intérêt par suite de l'abondance des capitaux ; mais non par les moyens factices indiqués par l'honorable M. De Pouhon. L'honorable membre pousse cette thèse si loin, qu'il nous disait tout à l'heure que si le gouvernement avait eu plus d'ampleur dans ses vues, il aurait demandé en 1848 non pas 37 millions d'emprunts, mais 40 ou 50 millions, afin d'employer une partie de ses ressources à augmenter la dotation de l'amortissement.

M. De Pouhon. - Il aurait fallu demander 5 millions pour les employer à accroître la dotation de l'amortissement, et afin d'accomplir ses engagements.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - L'honorable membre me dit qu'il aurait fallu demander 5 millions afin de les employer à accroître la dotation de l'amortissement, en remplacement des cinq millions tenus en réserve, en vertu de la loi de 1844. (Interruption de M. De Pouhon.) Vous vouliez accroître la dotation des fonds d'amortissement en prélevant des impôts. Je demande si en 1848, alors que le pays avait tant de sacrifices à faire, lorsque l'on devait s'adresser à l'emprunt forcé, il se serait trouvé quelqu'un qui eût consenti à augmenter de 5 millions les charges publiques, afin de pouvoir augmenter le rachat pour, l'amortissement ?

M. De Pouhon. - Il y avait engagement.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il y avait engagement, dit l'honorable M. De Pouhon ; c'est peut-être l'opinion de l'honorable membre, mais ce n'est pas celle de la chambre en 1844 ; la chambre a précisément décidé le contraire. Je pense qu'elle a interprété les contrats loyalement et que l'on ne doit pas dire légèrement que la chambre les a violés.

Elle a décidé que les sommes qui n'auraient pas été employées à l'amortissement seraient appliquées à l'extinction de la dette flottante et ultérieurement à d'autres destinations et, par exemple, à réduire le montant des emprunts que l'on aurait encore à contracter ; elle a décidé, en un mot, que les ressources n'étaient plus applicables au rachat du 5 p. c.

L'opinion de l'honorable M. De Pouhon ne me paraît donc pas soutenable et je ne pense pas qu'elle aurait prévalu si elle avait été produite en 1844.

L'honorable membre a dit, en terminant, que la force des choses m'avait amené à reconnaître que l'amortissement était utile, qu'il regrettait que ma conviction eût été un peu tardive, que, plus prompte, elle eût été utile au trésor. (Interruption.)

Je pense que ce sont bien les paroles de l'honorable membre. J'ai été amené à le prier de répéter ses paroles, car son langage était inintelligible pour moi ; mais après l'avoir entendu une seconde fois, je déclare que je ne l'ai pas compris davantage. Je ne sais pas ce que l'honorable membre veut dire. A quelle occasion ai-je discuté l'utilité de l'amortissement ? Jamais. Je ne me souviens pas d'avoir exprimé une opinion défavorable à l'amortissement. Je ne me prononce pas sur une théorie ; mais en présence des faits et des contrats, je ne discute pas.

J'ai prouvé, par des actes, qu'il ne fallait pas suspendre l'amortissement ; et dans les moments de crise, lorsque les fonds fléchissaient, j'ai contribué de tout mon pouvoir, notamment en 1848, à faire en sorte, en appuyant les emprunts forcés, que l'amortissement continuât à fonctionner dans notre pays. L'amortissement a continué à fonctionner au milieu des circonstances les plus difficiles où nous nous sommes trouvés.

Je ne sais donc pas en quoi le reproche que m'adresse l'honorable membre peut être fondé.

Je répète que nous n'avons qu'une seule chose à examiner, c'est celle de savoir si nous devons décider si la réserve éventuelle provenant de la suspension de l'amortissement de l'emprunt de 37 millions, sera appliquée comme on l'a décidé en 1844. Je ne pense pas qu'on puisse hésiter. L'honorable M. Osy demande cependant qu'on fasse une modification à l'article 5 en ce sens qu'on ferait emploi de cette réserve en bons du trésor au profit de la caisse d'amortissement.

Je ne vois pas l'utilité de l'opération non plus que les moyens de la pratiquer. Comment l'entend-il ? Les fonds seraient versés à la caisse d'amortissement qui émettrait des bons du trésor ! Je ne comprends pas bien.

M. Osy. - Je voudrais que les fonds disponibles fussent employés en bons du trésor dont l'intérêt serait versé à la caisse d'amortissement pour être employé avec la dotation quand le fonds serait descendu au-dessous du pair.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Ce système se confond avec celui de M. Cools. Il tend à nous faire décider que les fonds non employés à l'amortissement parce que le 5 est au-dessus du pair, resteront à la disposition de la caisse pour être employés au rachat de ce fonds s'il descend au-dessous du pair. C'est, au fond, la même idée que celle de M. Cools, avec cette différence que M. Cools propose d'affréter les fonds non employés, indifféremment à toute espèce de fonds, tandis que M. Osy propose de les réserver pour le fonds 5 p. c.

Je ne pense pas que la chambre puisse décider que les fonds qui seraient sans emploi parce que l'amortissement d'un fonds serait suspendu, sereient appliqués, n'importe en quel temps, au rachat de ce fonds. Il pourrait se trouver en caisse des sommes considérables ; comment, en temps de crise, le trésor les mettrait-il à la disposition de la caisse d'amortissement ? Il est plus utile que l'Etat conserver à sa disposition ces fonds pour diminuer la dette flottante ou les emprunts qu'il devrait contracter. Vous avez une dette flottante, eh bien, cette dotation servira d'abord à la diminuer, et si la réserve augmente, il sera facile d'en trouver l'emploi.

Dans le contrat concernant l'emprunt de 26 millions, la stipulation est formelle, elle ne laisse prise à aucune équivoque. Il a été clairement expliqué que les fonds non employés à l'amortissement, quand le fonds serait au-dessus du pair, pourraient être employés aux dépenses générales de l'Etat. Pour l'emprunt de 37 millions, aucun engagement n'a été pris, l'Etat vient spontanément proposer de créer un amortissement, il n'y a pas lieu d'insérer dans la loi une stipulation plus rigoureuse. Si ultérieurement on le juge nécessaire, on pourra faire telle proposition qu'on voudra, et il convient assurément de ne pas aliéner le droit de la chambre.

M. Cools. - Je suis encouragé à prendre une seconde fois la parole parce que j'ai cru comprendre que M. le ministre des finances était assez disposé à entrer dans des idées de conciliation. Il serait fâcheux, quand nous nous occupons de questions d'intérêt public, quand nous cherchons à faire la meilleure loi possible, que l'on voulût de quelque part se roidir sur des questions de détail. Je crois que pour atteindre mon but je dois d'abord convaincre M. Frère que je ne demande rien d'exorbitant,que ma proposition a été mal comprise, qu'il lui a attribué une portée beaucoup plus grande que celle que j'ai voulu lui donner.

De quoi nous occupons-nous ? D'une loi de régularisation. Il s'agit de (page 490) faire entrer l'emprunt de 1848 dans le droit commun. Ce que nous avons à faire, c'est d'examiner sérieusement, consciencieusement, quel est ce droit commun, ne rien innover, mais donner à la loi l'interprétation qui a toujours été dans la pensée du législateur quant aux emprunts 5 p. c.

Que propose-t-on ? On propose de faire cesser l'action de l'amortissement, quand le fonds est au-dessus du pair. Sous ce rapport, nous n'élèverons aucune réclamation ; c'est le droit commun depuis 1844. On propose une deuxième chose ; de tenir les fonds momentanément sans emploi par suite de l'élévation du fonds, en réserve. Voilà encore une disposition expresse des lois de 1844, en ce qui concerne le 5 p. c. Je me renferme dans ce fonds pour ne pas compliquer la question.

Il est donc stipulé par la loi de 1844 que les fonds non employés par suite de la suspension de l'amortissement seront tenus en réserve. Vient maintenant l'article 5. Ici M. le ministre propose d'ajouter une disposition qui ne se trouve textuellement dans aucune de nos lois concernant le 5 p. c. Demandons-nous si elle est dans l'esprit de nos lois. M. le ministre propose de donner au mot « réserve » une interprétation ; ce serait celle-ci : qu'on pourrait faire servir les fonds qui la constitueraient à réduire la dette flottante et au besoin à couvrir les dépenses générales du pays.

Je prétends que cette interprétation est contraire à la pensée du législateur de 1844. Quand il s'est agi de créer un fonds de réserve, on s'est expliqué de part et d'autre et l'on a dit : La réserve doit être entendue en ce sens qu'elle sera représentée par des valeurs quelconques et qu'en cas de conversion elle servira à émettre d'autant moins de nouvelles obligations.

Je fais cet appel au souvenir de mes collègues ; du reste la discussion est là, on peut y recourir, c'est bien là le sens qu'on a donné au mot « réserve ».

C'est tellement incontestable que, dans la loi relative aux rachats, on a décidé qu'on pourra faire servir le fonds à la diminution de la dette flottante, disposition toute différente de celle qui concerne l'emprunt 5 p. c.

J'ai dit pour quel motif exceptionnel on a pris cette disposition, en ce qui concerne le fonds de rachat à 4/2, je n'y reviendrai pas.

Mais toujours est-il vrai que.par opposition à ce qui est stipulé pour le 4 1/2 p. c. du fonds de rachat, on ne peut faire usage du 5 p. c. pour la réduction de la dette flottante.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est tout le contraire.

M. Cools. - L'erreur de l'honorable ministre s'explique très facilement ; il ne faisait pas alors partie de cette assemblée ; mais j'en appelle au souvenir de mes collègues qui étaient alors membres de la chambre.

M. T'Kint de Naeyer, rapporteur. - Il y a eu deux lois portées en 1844.

M. Cools. - C'est précisément cela, il y a eu deux lois portées en 1844 : l'une concerne exclusivement le fonds de rachat, l'autre notre système général, et, dans cette dernière loi, il est stipulé que, quand les fonds publics seront au-dessus du pair, le fonds d'amortissement sera tenu en réserve, c'est-à-dire que ce fonds devra toujours être respecté, de manière qu'il puisse en être fait emploi quand le moment sera venu.

Si vous voulez faire servir la réserve à la réduction de la dette flottante, n'est-il pas évident que lorsqu'on voudra faire usage de la réserve, il faudra créer de nouvelles valeurs, de nouveaux impôts, c'est-à-dire que votre réserve sera comme si elle n'existait pas ?

M. Mercier. - Je demande la parole.

M. Cools. - C'est le système que je combats. Je demande qu'on reste dans l'esprit de la loi.

Je sais que l'honorable M. Mercier, qui demande en ce moment la parole, va invoquer les précédents qu'il prétendra être passés en force de chose jugée ; il vous dira qu'avec le consentement de la chambre on a appliqué la réserve aux besoins courants et que personne n'a réclamé ; que de la sorte il y a au moins consentement tacite de la chambre.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Ce n'est pas exact.

M. Cools. - Soit ! je dirai, si vous le préférez, qu'on s'est dispensé d'émettre des bons du trésor. Ne discutons pas sur les mots, alors que nous sommes parfaitement d'accord sur la chose. Mais, comme je l'ai dit hier, je m'appuie sur le droit et non sur le fait. Je prétends que l'interprétation qu'on a donnée au mot « réserve » est contraire au texte et à l'esprit de la loi.

Si l’on veut que la question reste entière, et je suis tout disposé à y consentir, il y a un moyen bien simple, c'est de retrancher l'article 5S en faveur duquel on ne peut invoquer le texte d'aucune loi antérieure applicable au fonds 5 p. c.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est une erreur. Voici le texte que nous invoquons : « Les fonds de la dotation de l'amortissement, qui, par suite de la disposition qui précède, se trouveront sans emploi, serviront soit à la réduction de la dette flottante, jusqu'à son entière extinction, et ultérieurement à toute autre destination, qui sera déterminée par la loi. »

M. Cools. - Ceci est une question de fait. Je persiste dans mon opinion. Nous n'avons aucun intérêt à nous envoyer des démentis l'un à l'autre. D'ici à demain, M. le ministre des finances pourra se convaincre que cette disposition ne se trouve pas dans la loi générale, la loi de conversion, la seule où il est parlé du 5 p. c.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Qu'est-ce que cela fait ?

M. Cools. - Cela fait qu'on veut transformer une disposition exceptionnelle en principe général. Les honorables membres qui ont parlé aujourd'hui en ont fait ressortir les inconvénients ; l'honorable M. De Pouhon a parlé dans le même sens que moi ; l'opinion qu'a exprimée l'honorable M. Osy se rapproche beaucoup de la mienne. Il est évident que la disposition de l'article 5 est exorbitante.

Qu'y a-t-il à faire ? Evidemment le seul emploi qu'on puisse faire de la réserve, si on veut lui conserver ce caractère, c'est de la faire servir à l'achat de fonds publics ou d'autres valeurs équivalentes.

Je ne veux pas discuter une question théorique ; je persiste à penser que ce serait faire chose utile que de l'appliquer à l'achat d'autres parties de notre dette constituée. Si cependant M. le minisire y voyait des inconvénients, on pourrait se faire mutuellement des concessions ; mais je tiens au principe que la réserve doit être respectée et qu'on ne peut la faire servir ni à la réduction de la dette flottante, ni aux besoins généraux du pays.

L'honorable M. Osy a fait une concession : il veut qu'on remette à la caisse d'amortissement des bons du trésor, portant intérêt à son profit. Comme l'a fait observer l'honorable ministre des finances, cette idée se rapproche beaucoup de la mienne ; comparativement au projet, ce serait une amélioration. Elle consacrerait un principe qui a été en vigueur en France, pendant tout le règne de Louis-Philippe.

Cependant je ne puis me dispenser de vous faire remarquer qu'elle offrirait des inconvénients assez sérieux, entre autres celui-ci : c'est que la caisse ne recevant provisoirement que des bons, des chiffons de papier, le trésor public se trouvera dans l'embarras, quand il faudra en faire le remboursement au profit de la caisse d'amortissement et que chaque fois que le 5 p. c. descendra au-dessous du pair, il faudra créer des ressources pour opérer ce remboursement ; d'autre part, si le 5. p. c. se maintient au-dessus du pair jusqu'au moment de la conversion, l'embarras se produira, mais d'une manière encore plus intense, au moment de cette conversion.

Maintenant si la chambre veut des modifications .à ma proposition, qu'on en fasse une autre. On pourrait dire que la réserve se composera de fonds étrangers ou d'autres valeurs ; mon but serait atteint ; je suis prêt à me rallier à une proposition en ce sens.

Mais si le ministre maintient l'article 5, je suis forcé de maintenir ma proposition ; car cet article est en opposition avec le texte et l'esprit de la loi de 1844 ; elle donne au mot « réserve » une interprétation qui en fait une lettre morte et elle me mettrait dans l'obligation de voter contre la loi.

(page 491) M. De Pouhon. - Le mode proposé par l'honorable baron Osy satisfait à ce qu'exigent les engagements contractés par l'Etat envers ses préteurs. Il tend aussi, quoique indirectement et moins efficacement, à seconder le but que j'ai surtout en vue. Mais il présente l'inconvénient de créer des embarras en cas de crise, car alors il faut encaisser ou vendre les bons du trésor pour opérer des rachats de la dette consolidée et, dans ces circonstances, les acheteurs de bons du trésor sont plus rares, et il faut recourir à eux pour d'autres besoins.

Quant à la réserve des fonds d'amortissement des emprunts de 1840 et 1842, quelle que soit la résolution qui ait été prise, je n'hésite pas à dire que l'Etat est en défaut envers les détenteurs des titres, car aux termes des contrats, l'amortissement ne doit être que suspendu, lorsque le fonds est au-dessus du pair. Or, suspendre n'est que différer, ajourner, c'est une espèce de surséance. L'action de l'amortissement devrait reprendre son cours dès que le fonds retomberait au pair.

M. le ministre des finances me reproche de l'avoir supposé contraire à l'amortissement. A cet égard, je me bornerai à dire qu'il a présenté le projet d'emprunt pour les travaux publics sans dotation d'amortissement et que j'avais présenté un amendement pour faire consacrer cette dotation.

Projet de loi accordant un crédit extraordinaire au budget du ministère de l’intérieur

Rapport de la section centrale

(page 490) M. Vermeire. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi allouant un crédit extraordinaire de 110,000 fr. au département de l'intérieur.

- La chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et met le projet à la suite de l'ordre du jour.

La séance est levée à 4 heures et demie.