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Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 1 décembre 1856

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. de Naeyer, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 181) M. Crombez, secrétaire, procède à l'appel nominal à deux heures et un quart.

M. Tack donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Crombez, secrétaire, présente l'analyse des pétitions suivantes.

« Des facteurs de la poste aux lettres du canton de Wavre demandent une augmentation de traitement. »

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner le budget des travaux publics.


« Les commis greffiers du tribunal de première instance de Mons demandent une augmentation de traitement. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de la guerre.


« Le sieur Grochsteen, commissaire de police à Renaix, demande une indemnité pour les fonctions d'officier du ministère public qu'il exerce près le tribunal de simple police. »

- Renvoi à la commission chargée d'examiner le projet de loi sur l'organisation judiciaire.


« Des meuniers dans l'arrondissement d'Audenarde demandent de pouvoir continuer à faire usage de balances romaines. »

- Renvoi à la commission des pétitions avec demande d'un prompt rapport.


« Des marchands et détaillants de Malines présentent des observations au sujet du droit de douane sur les tulles que le gouvernement propose dans son avant-projet de loi. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Naeltjens se prononce contre la proposition du gouvernement de supprimer la différence du droit existant entre les tulles écrus et les tulles blanchis et présente des observations sur le droit établi dans l'avant-projet de loi. »

- Même renvoi.


M. de Brouwer de Hogendorp demande un congé.

- Accordé.

Projet d'adresse

Réponse du Roi

M. de Naeyer. - La commission que vous aviez chargée de présenter au Roi l'adresse votée par la Chambre a été reçue hier par Sa Majesté.

Je vais avoir l'honneur de vous faire connaître la réponse du Roi. Sa Majesté s'est exprimée en ces termes :

« Messieurs, il m'est bien agréable de recevoir les témoignages sincères des sentiments d'affectueuse confiance que vous venez de m'exprimer au nom de la Chambre des représentants.

« Les travaux de cette importante session ont été dignement inaugurés.

« Votre patriotisme intelligent saura seconder les efforts de mon gouvernement dans le but d'assurer le développement régulier du bien-être moral et matériel de la nation. »

- Cette réponse sera imprimée à la suite du discours du Trône et de l'adresse votée par la Chambre.

Motion d’ordre

Concession ferroviaire de Saint-Ghislain à Audenarde

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, à la fin de la dernière session, la Chambre a voté un projet de loi autorisant le gouvernement à concéder plusieurs chemins de fer, entre autres la ligne partant de Saint-Ghislain et aboutissant à Tournai, Ath et Audenarde. Je désirerais savoir pour quel motif la compagnie concessionnaire de cette ligne n'a pas jusqu'ici mis la main à l'œuvre. Il n'est pas nécessaire de faire ressortir de nouveau combien il importe que les Flandres, où l'industrie a pris un si grand développement, soient reliées par des communications plus rapides et plus économiques avec les grands bassins houillers du Hainaut.

Cette nécessité a été si généralement sentie que vous avez vu surgir l'année dernière plusieurs demandes de concessions ayant le même but. Le gouvernement a donné la préférence au tracé par Audenarde, je ne lui en fais pas un grief, mais c'est un devoir pour le gouvernement de veiller à ce que les engagements qui ont été contractés soient fidèlement remplis.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Des difficultés de plus d'une nature ont fait obstacle à la mise à exécution de la loi de la concession que vous avez votée à la fin de la session dernière. Une correspondance assez longue et traitant plusieurs points difficiles, a eu lieu entre le département des travaux publics et le département des affaires étrangères, relativement aux conditions auxquelles serait subordonnée la création de la société anonyme pour exploiter la concession.

Ces difficultés ne sont levées que depuis peu de temps ; c'est une des causes du retard que cette affaire a subi, et c'est ce qui fait que les efforts des concessionnaires pour mettre leur projet à exécution n'ont pas encore abouti. Cette affaire n'est pas d'ailleurs négligée. Je crois pouvoir annoncer que des démarches récentes donnent l'espoir qu'on pourra mener à bien la concession dont vient de vous entretenir l'honorable préopinant.

Projet de loi accordant des crédits supplémentaires au budget du ministère des travaux publics

Discussion des articles

M. de Naeyer. - Personne ne demandant plus la parole, la discussion générale est close.

Article premier

« Art. 1er. Des crédits spéciaux, à concurrence de 5,000,000 de francs, sont ouverts au ministère des travaux publics et affectés aux dépenses ; désignées dans les articles ci-après :

« Art. 1er. Matériel de transport : fr. 3,000,000.

« Art. 2. Matériel de traction : fr. 1,000,000.

« Art. 3. Routes et doubles voies : fr. 820,000.

« Art. 4. Extension des lignes télégraphiques : fr. 180,000.

« Total : fr. 5,000,000. »

M. de Naeyer. - Trois amendements ont été présentés :

1° M. Moncheur a proposé de substituer le mot paragraphe au mot article dans les développements de l'article 1er.

2° MM. Moncheur, de Haerne, Tack et Rodenbach, ont proposé un cinquième crédit d'un million, pour stations, maisons et loges de gardes.

3° M. le ministre des travaux publics a proposé, par sous-amendement, d'ajouter au libellé de cet amendement après « stations » ces mots : « et dépendances. »

D'après la décision de la Chambre, c'est l'amendement proposé par M. Osy à la session dernière qui est la proposition principale. Les modifications qui y seront apportées seront considérées comme amendements.

Ensuite il faut se fixer sur la portée de l'amendement proposé par M. Moncheur : la substitution du mot « paragraphes » au mot articles a-t-elle pour objet de détruire la spécialité des articles de dépense pour les confondre dans un seul chiffre ?

S'il en était ainsi, un vote unique sur l'article premier suffirait ; dans le cas contraire, il faudrait voter séparément sur chacune des dépenses dont se compose l'article premier.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je crois que M. le président vient de fixer le point le plus important du débat. Dans l'esprit du gouvernement, la qualification d'article donnée aux subdivisions de l'article premier implique, comme dans le budget, une spécialisation, si je puis le dire, de dépense qui interdit un transfert d'un numéro à l'autre. Car le budget contient un article premier portant : Il est ouvert au département des travaux publics un crédit de...,, etc. ; un article 2 portant la somme nécessaire pour couvrir la dépense sera prélevée sur telle ou telle ressource.

Mais ensuite l'article premier est subdivisé en plusieurs articles au moyen desquels le gouvernement est limité dans ses dépenses. Je crois qu'il doit en être de même dans les cas dont il s'agit ; au reste, que l'amendement de M. Moncheur soit admis ou non, chacun des crédits portés à l'article premier doit être considéré comme s'appliquant exclusivement à la dépense spécifiée au libellé, et quelle que soit la décision de la Chambre, le gouvernement s'engage à ne pas s'écarter de la spécialisation quelle que soit la qualification qu'on donne aux subdivisions : article, paragraphe ou libéra.

M. Moncheur, rapporteur. - Messieurs, mon amendement est un simple changement de rédaction. D'ailleurs vous trouverez dans le rapport de la section centrale, si vous voulez jeter les yeux sur la page 6, qu'il a été bien entendu par elle que chacun des articles ou paragraphes qu'on les nomme comme on voudra, devra avoir une destination spéciale, de manière que le gouvernement ne puisse opérer de transfert de l'un sur l'autre.

J'ai présenté mon amendement parce qu'il est contraire au style ordinaire des lois de mettre des articles dans un article. Ainsi nous sommes tous d'accord au fond.

M. de Naeyer. - Ainsi il y aura un vote spécial sur chaque paragraphe de l'article.

M. T'Kint de Naeyer. - Messieurs, j'appuie l'amendement présenté par l'honorable M. Moncheur et par l'honorable M. Tack. Jusqu'à présent cet amendement n'a pas été sérieusement combattu. Mais avant de passer au vote, je désire avoir une explication de M. le ministre des travaux publics.

M. le ministre des travaux publics nous a dit, dans la séance d'avant-hier, qu'il faudrait au moins une somme de 8 millions pour achever les stations.

(page 182) Je le crois sans peine. Mais dans l'esprit des auteurs de l'amendement, il ne peut être question de dépenses de luxe. Il s'agit uniquement de pourvoir à ce qui sera reconnu rigoureusement indispensable.

Or, messieurs, déjà dans la dernière discussion du budget des travaux publics, différents membres ont fait ressortir combien il était nécessaire que les stations auxquelles de nouvelles lignes ferrées sont venues aboutir soient mises en rapport avec leur nouvelle destination.

D'énergiques réclamations se sont encore fait entendre dans la séance d'avant-hier. On a cité la station de Courtrai, la station de Deynze et d'autres encore. La Chambre se souviendra que déjà à différentes époques des fonds avaient été votés pour des travaux de ce genre et que ces fonds ont en général reçu une autre destination.

Je demande donc qu'il soit bien entendu qu'en augmentant ce crédit d'un million, il sera pourvu spécialement à la lacune que je viens de signaler. Déjà d'honorables membres vous ont fait connaître ce qui se passe à Courtrai. En ce qui concerne Deynze que je connais plus particulièrement, je puis déclarer qu'il est impossible que le statu quo se prolonge.

La station avait été établie uniquement en vue des besoins de la localité, mais aujourd'hui, depuis que des communications sont ouvertes avec Thielt et avec Roulers, Deynze, tend à devenir de plus en plus le centre d'un très grand mouvement industriel et agricole. Trente-deux convois par jour déversent dans cette station un nombre considérable de voyageurs et beaucoup de marchandises. Eh bien, pour abriter voyageurs et marchandises, il y a à peine une station, de quelques mètres.

Je désire donc qu'il soit bien entendu que l'augmentation de crédit est spécialement destinée à pourvoir à la catégorie des dépenses urgentes que je viens de signaler. Il est temps de faire droit aux nombreuses réclamations des populations intéressées, dans la question. C’est d'ailleurs un acte de bonne administration.

M. Wautelet. - J'ai demandé la parole pour adresser aussi une interpellation à M. le ministre des travaux publics.

Si je ne me trompe, le projet, tel qu'il est aujourd'hui restreint, a été détaché d'un projet complet présenté à la fin de la session dernière. On a détaché du projet primitif, qui ne pouvait être discuté à cause, de la clôture prochaine de la session, les articles qui paraissaient d'une nature plus urgente, et comme devant être adoptés sans grandes discussions.

Je demande à M. le ministre s'il entre dans les intentions du gouvernement d'accepter ce projet tel qu'il est et de considérer l'autre comme étant retiré, ou si son intention est de présenter un nouveau projet de loi qui viendrait compléter celui que nous discutons aujourd'hui.

Moi aussi, je signalerai la nécessité d'augmenter l'étendue des stations et de les pourvoir de bâtiments convenables. On a cité plusieurs stations où le service est réellement entravé, soit par l'insuffisance de bâtiments, soit par le manque de place. Mais il n'en est pas, à mon avis, où ces inconvénients se rencontrent d'une manière plus complète que dans la station de Charleroi. Je crois que cent convois environ passent par jour dans cette station.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Cent cinq.

M. Wautelet. - Dans cette station viennent aboutir divers chemins de fer concédés, ce qui en complète considérablement le service : le chemin de fer d'Entre-Sambre-et-Meuse, le chemin de fer de Louvain à Charleroi, la ligne de Paris à Cologne. Enfin, le mouvement industriel y est tellement considérable, que l'encombrement y est constant.

Je demande à M. le ministre des travaux publics s'il a l'intention de proposer un projet complet, comprenant les sommes qui sont encore nécessaires pour achever le chemin de fer, et munir les stations des bâtiments qui y sont indispensables.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - L'honorable M. Wautelet demande quelles sont les intentions du gouvernement quant à la proposition de nouveaux crédits pour compléter le chemin de fer. Je ne puis répéter à cet égard que ce que j'ai eu l'honneur de dire dans une autre séance, que certainement il est désirable que la situation du chemin de fer soit examinée par la discussion d'un projet d'ensemble ; mais ce projet d'ensemble se rattache si intimement à la situation financière et à la réalisation d'un emprunt, dont le projet a été présenté il y a six mois, qu'il serait téméraire de dire aujourd'hui à quelle époque le gouvernement pourra saisir la Chambre d'un projet de loi destiné à remplacer celui des 21 millions dont vous venez de détacher le crédit dont il s'agit en ce moment.

Répondant à l'interpellation particulière de l'honorable membre en ce qui concerne la station de Charleroi, je ferai remarquer que si cette station est en effet une des plus importantes et l'une de celles où le service présente le plus de difficultés, ce n'est pas la station où l'on a le moins fait au moyen des crédits de 4,500,000 francs et de 9 millions, qui ont été mis à la disposition du gouvernement. Dans le cours de la campagne dernière on a construit dans cette station un hangar pour les voilures et un magasin pour les marchandises, insuffisant, il est vrai, mais proportionné au peu de terrain dont on dispose. Il en est résulté une grande amélioration dans le service.

L'honorable M. T'Kint de Naeyer indique les principes au moyen desquels il voudrait voir faire la répartition de la somme destinée aux bâtiments des stations. Dans son opinion, les points les plus importants, ceux sur lesquels l'attention du gouvernement doit surtout se porter, sont les points de jonction des chemins de fer concédés avec le chemin de fer de l'Etat. En effet des mouvements considérables de transbordement ont lien dans ces stations et il est urgent de les pourvoir de voies d'évitement, de voies de garage et de hangars pour les transbordements.

C'est dans cet esprit que le gouvernement compte procéder, car les stations où les plus grandes dépenses doivent se faire sont celle de Quiévrain, qui est mixte, et de Liège, qui est mixte.

Ces trois stations seront comprises pour une forte somme dans le crédit demandé aujourd'hui. Il s'agit ensuite de pourvoir aux loges et maisons de gardes.

Quant à la station de Deynze, le gouvernement n'avait pas l'intention de la comprendre dans le projet actuel ; le crédit serait trop faible. Toutefois, je ne puis pas prendre d'engagement à cet égard, la répartition n'étant pas faite d'une manière irrévocable.

M. Devaux. - Messieurs, je dois signaler à la Chambre un fait assez extraordinaire qui se passe sur la ligne de Bruxelles à Ostende et Courtrai. La Chambre sait qu'elle a autorisé la concession d'un chemin de fer direct de Bruxelles à Gand. Je n'entre pas dans la question de savoir si l'on a eu raison de faire ce chemin de fer, mais il existe, il est exploité et c'est même le gouvernement qui l'exploite. Le gouvernement fait de ce chef une double dépense, un double service, l'un par Malines, l'autre par le chemin de fer direct.

Je pensais qu'il entrait dans les vues de tout le monde que pour dédommager le pays des sacrifices que le nouveau chemin de fer lui impose, il pût, tout entier, profiter des avantages qui en résultent. Eh bien, messieurs, savez-vous ce qui arrive ? C'est que ce chemin de fer paraît destiné exclusivement aux communications entre Bruxelles et Gand. Quand on veut venir d'Ostende à Bruxelles, il y a quatre convois par jour, et sur ces quatre convois, il n'y en a qu'un seul qui soit en coïncidence avec la ligne directe de Gand à Bruxelles ; les voyageurs qui arrivent par les autres convois sont obligés d'aller se promener par Malines, à moins qu'ils ne préfèrent attendre quelques heures à Gand.

C'est là un état de choses qu'il sera impossible de maintenir et qui ne peut s'expliquer que par le désir de nuire à la compagnie de Dendre-et-Waes.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Elle n'y a pas d'intérêt.

M. Devaux. - Alors je ne comprends pas ce qu'on a fait, car il n'y a rien de plus facile que de mettre les convois qui parcourent la ligne de Bruxelles à Gand, en coïncidence avec ceux qui arrivent d'Ostende et de Courtrai.

Je croyais que c'était pour faire pièce à la compagnie de Dendre-et-Waes et j’aurais blâmé ce moyen-là. Le gouvernement a fait une convention ; si la compagnie de Dendre-et-Waes manque à ses obligations, ce n’est pas une raison pour le gouvernement de ne pas exécuter loyalement les siennes.

Certainement tout le monde a dû croire que lorsqu'on a établi un chemin de fer direct de Gand à Bruxelles, ce chemin de fer servirait à toute la ligne.

Que dirait-on si, lorsqu'on établira un chemin de fer direct entre Louvain et Bruxelles, on obligeait tous les voyageurs de Tirlemont, de Liège et de Verviers à faire le détour de Malines en prétendant que le chemin de fer direct ne doit servir qu'aux voyageurs de Bruxelles, de Louvain et des stations intermédiaires ?

S'il y a une raison, je prie M. le ministre des travaux publics de vouloir bien la faire connaître.

La mesure est-elle temporaire ? La route ne peut-elle pas encore supporter une circulation si forte ? ou existe-t-il quelque autre motif ?

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, l'honorable membre est dans l'erreur s'il pense que c'est par système que tous les convois d'Ostende ou de Courtrai se dirigent sur Bruxelles par Malines au lieu de passer par Alost. Il suppose au gouvernement l'intention passablement déloyale de vouloir nuire à la compagnie de Dendre-et-Waes, en faisant prendre de propos délibéré la direction de Malines à tous les trains, au lieu de leur faire parcourir la ligne d'Alost.

Je ferai remarquer à l'honorable membre que si c'était un parti pris, ce ne serait pas un parti pris contre la compagnie de Dendre-et-Waes qui n'a absolument rien à percevoir sur les trajets de Bruxelles à Gand et les stations intermédiaires, si l'on en excepte celle d'Alost. Les coïncidences sont aussi exactes qu'il a été possible de les établir ; il en est de même à Termonde et à Ath ; de sorte que le résultat inévitable de ces mesures serait contraire au but qu'on suppose.

Le motif principal pour lequel les convois sont autant que possible dirigés sur Malines n'est pas que la ligne étant trop nouvelle ne se prêterait pas encore à une trop forte circulation ; la voie est bonne et on peut la parcourir sans danger. Si l'on a dirigé la plupart des trains par Malines, c'est pour procurer aux nombreux voyageurs qui n'ont pas Bruxelles pour destination, les coïncidences les plus faciles ; on établit plus aisément ces coïncidences à Malines qu'à Bruxelles. Cependant j'avoue avec l'honorable préopinant qu'il doit être de l'intérêt des voyageurs d'Ostende et de Courtrai, se rendant et devant s'arrêter à Bruxelles, d'arriver dans cette dernière ville le plus promptement possible ; je m'engage volontiers à faire examiner s'il y a moyen de faire coïncider les trains transportant les voyageurs d'Ostende et de Courtrai avec les trains qui parcourent la ligne directe de Gand à Bruxelles.

(page 183) >M. Vander Donckt. - Messieurs, je viens appuyer les observations si judicieuses des honorables MM. Devaux et T'Kint de Naeyer.

En ce qui concerne la station de Deynze, il n'est pas possible de la laisser dans le triste état où elle se trouve actuellement, et il est plus qu'urgent de prendre des mesures pour parer aux nombreux inconvénients et aux malheurs dont les voyageurs sont menacés à tout instant par la coïncidence des lignes concédées avec la ligne de l'Etat.

Il y a une autre observation que je tiens à faire à M. le ministre des travaux publics ; c'est que pour la facilité des voyageurs, il y a tous les jours un départ de Gand d'un convoi de marchandises à 3 heures qu'on pourrait utiliser.

Croiriez-vous que les voyageurs qui vont de Courtrai et des stations intermédiaires à Gand n'ont l'occasion de rentrer chez eux que le soir à 8 heures ? Il leur serait possible de retourner à 3 heures de relevée si l'on voulait admettre des voyageurs dans ce convoi de marchandises. Quelque lente que soit la marche de ce convoi, les habitants des localités intermédiaires seront heureux et préféreront de le prendre, que de rester jusqu'au soir à Gand.

Je vous le demande, est-ce que cela ne serait pas dans l'intérêt des voyageurs de toutes les stations de la ligne de Gand à Courtrai, qu'on ajoutât une ou deux voitures de voyageurs au convoi de marchandises, qui permettraient aux habitants de ces localités, qui se sont rendus à Gand, de rentrer chez eux avant la nuit, alors qu'en quittant le convoi ils ont encore une ou deux lieues de chemin à faire ? On l'a déjà dit, il y a dans l'administration un système de rigueur qui nuit aussi bien au public qu'à la bonne exploitation du chemin de fer de l'Etat.

Je ne prête pas au gouvernement la moindre mauvaise intention à l'égard de la compagnie concessionnaire de Dendre-et-Waes ; je ne suppose pas qu'il veuille éloigner les voyageurs de cette ligne mais je lui demande d'aviser au moyen de faciliter aux habitants des stations intermédiaires entre Gand et Courtrai les moyens de rentrer chez eux avant la nuit en mettant à leur disposition le convoi de marchandises. Ils connaîtront la marche du train, ils n'auront pas à se plaindre des haltes et des retards que le service des marchandises pourra nécessiter dans les stations intermédiaires.

Ces convois, bien que marchant lentement, arrivent encore assez à temps pour permettre à ceux qui ont encore une ou deux lieues à faire à pied ou en voiture de rentrer chez eux avant la nuit.

J'appelle l'attention du gouvernement sur cet objet, j'espère qu'il sera fait droit à mon observation dans l'intérêt des habitants des localités intermédiaires entre Gand et Courtrai et dans l'intérêt bien entendu du chemin de fer lui-même.

M. Devaux. - Je suis bien aise d'apprendre que le gouvernement n'a pas de parti pris et qu'il est disposé à faire droit à mon observation. Cela sera facile, car il n'y a qu'à mettre en rapport à Gand avec les heures d'arrivée et de départ de Courtrai et d'Ostende, les départs et les arrivées de la ligne directe de Gand à Bruxelles. Et puisque ces derniers convois ne vont pas au-delà de Bruxelles, rien n'est plus facile que d'établir cette coïncidence.

Il suffit de déranger quelque peu les heures actuelles de la ligne directe par Alost.

M. Rodenbach. - Dans la réponse que M. le ministre a faite à l'honorable député de Gand, j'ai entendu avec regret que dans la répartition du million proposé pour stations et dépendances, loges et maisons de gardes, ne serait pas comprise la station de Deynze ; cependant on vous l'a dit, elle est dans un état pitoyable ; les marchandises sont laissées à la belle étoile ; vous ne pouvez pas réclamer le prix du transport de marchandises que vous détériorez ; s'il s'agissait d'une dépense considérable, je comprendrais qu'on pût se trouver dans l'impossibilité de la faire, ne pouvant disposer que d'un million.

Mais pour faire ce qui est indispensable, il suffirait d'une somme de 25 à 30 mille fr. Pour une semblable somme, je ne fais pas de proposition, mais il me semble que M. le ministre, avec un peu de bonne volonté, pourra la trouver sur le crédit mis à sa disposition.

S'il y a impossibilité absolue, lors du vote du budget des travaux publics notre devoir sera de proposer une augmentation pour cet objet.

Messieurs, on vous a parlé samedi et aujourd'hui de malheureux accidents arrivés sur notre chemin de fer ; je sais qu'ils sont infiniment moins fréquents qu'en Angleterre et aux Etats-Unis, mais aussi rares qu'ils soient, c'est toujours trop, et on ne doit rien négliger pour en empêcher le retour ; c'est un devoir d'humanité.

Je crois devoir faire remarquer que ce sont presque toujours des convois de marchandises qui occasionnent ces accidents ; je n'ai pas la prétention de dicter aux hommes habiles qui dirigent notre exploitation, ce qu'ils doivent faire, cependant je me permettrai d'émettre une idée : ne pourrait-on pas consacrer la nuit au transport des marchandises, de minuit à 6 heures du malin, par exemple, et réserver le jour jusqu'à minuit pour le transport des voyageurs.

Je sais que cela présentera quelques inconvénients pour le commerce et que le commerce fera entendre des plaintes ; mais les petits inconvénients dont se plaindraient des négociants ne peuvent être mis en balance avec des malheurs, si rares qu'ils soient, auxquels sont exposés les trains de voyageurs. La philanthropie, l'humanité la plus vulgaire même, nous fait un devoir de ne négliger aucun des moyens propres à conjurer ces accidents.

- La discussion est close.

La proposition de M. Moncheur de substituer le moi « paragraphes » au mot « articles » est mise aux voix et adoptée.

« 1er. Matériel de transport : fr. 3,000,000. »

- Adopté.

« § 2. Matériel de traction : fr. 1,000,000. »

- Adopté.

« § 3. Routes et doubles voies : fr. 820,000. »

- Adopté.

« § 4. Extension des lignes télégraphiques : fr. 180,000. »

- Adopté.

« § 5 (proposé par M. Moncheur, sous-amendé par M. le ministre des travaux publics). Stations et dépendances, maisons et loges de gardes : fr. 1,000,000. »

- Adopté.

L'ensemble de l'article premier est ensuite mis aux voix dans les termes suivants :

« Des crédits spéciaux, à concurrence de 6 millions de francs, sont ouverts au ministère des travaux publics et affectés aux dépenses désignées aux paragraphes ci-après :

« § 1er. Matériel de transport : fr. 3,000,000.

« § 2. Matériel de traction : fr. 1,000,000.

« § 3. Routes et doubles voies : fr. 820.000.

« § 4. Extension des lignes télégraphiques : fr. 180.000.

« § 5. Stations et dépendances, maisons et loges de gardes : fr. 1,000,000.

« Total : fr. 6,000,000. »

- Adopté.

Article 2

« Art. 2. Ces dépenses seront couvertes provisoirement par des bons du trésor. »

- Adopté.

Vote sur l’ensemble du projet

La Chambre, après avoir décrété l'urgence, adopte définitivement les amendements introduits dans le projet de loi.

Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du projet de loi qui est adopté à l'unanimité des 50 membres qui prennent part au vote, sept membres (MM. de Renesse, Devaux, Frère-Orban, Rogier, Thiéfry, de Baillet-Latour et Delexhy) s'étant abstenus.

Ont pris part au vote : MM. F. de Mérode, de Moor, de Paul, de Perceval, de Pitteurs-Hiegaerts, de Rasse, de Ruddere de Te Lokeren, de Sécus, Desmaisières, Steenhault, de Theux, de T'Serclaes, Dumon, Goblet, Jacquess, Lambin, Landeloos, Lange, Le Bailli de Tilleghem, Lebeau, Lesoinne, Loos, Mascart, Mercier, Moncheur, Moreau, Orts, Prévinaire, Rodenbach, Rousselle, Sinave, Tack, Tesch, Thienpont, TKint de Naeyer, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom, Vander Donckt, Van Iseghem, Van Overloop, Vilain XIIII, Wautelet, Boulez, Coomans, David, Dedecker, de Haerne, de Kerchove, de Liedekerke et de Naeyer.

M. le président invite les membres qui se sont abstenus à motiver leur abstention.

M. de Renesse. - Déjà à plusieurs reprises je me suis opposé à une trop grande émission de bons du trésor.

Dans un moment où la situation du trésor nous indique un déficit de près de 22 millions de francs, je n'ai pu donner un vote favorable à une plus grande extension de ces bons, et quoique je reconnaisse l'utilité d'améliorer et d'augmenter le matériel du chemin de fer, j'ai cependant dû m'abstenir, ne pouvant approuver les moyens affectés aux dépenses prévues par le projet de loi.

M. Devaux. - Je n'ai pas vu qu'il y eût des motifs suffisants pour ne pas voter un projet de loi d'ensemble où l'on eût indiqué les moyens de faire face à la dépense.

M. Frère-Orban. - J'ai fait connaître, dans la discussion, les motifs de mon abstention.

M. Rogier. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs qua M. Devaux.

M. Thiéfry. - Je me suis abstenu par les motifs qui ont été indiqués dans la discussion par M. Frère-Orban.

M. de Baillet-Latour. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs que l'honorable M. de Renesse.

M. de Lexhy. - Je me suis abstenu par les mêmes motifs que M. Frère-Orban.

- La Chambre fixe la séance de demain à 2 heures.


Il est procédé, par la voie du tirage au sort, à la composition des sections du mois de décembre.

- La séance est levée à 3 heures trois quarts.