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Chambres des représentants de Belgique
Séance du lundi 16 mars 1857

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1856-1857)

(Présidence de M. de Naeyer, premier vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1063) M. de Perceval procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart, et lit le procès-verbal de la séance précédente.

- La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

Il présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Les membres du conseil communal et des établissements de charité de Thuin demandent la création d'une troisième chambre au tribunal de première instance de Charleroi. «

- Renvoi à la commission chargée d'examiner le projet de loi sur l'organisation judiciaire.


« Le sieur Crepin transmet une copie de sa lettre au sieur Brasseur pour rectifier des erreurs dans son exposé des fondations Jacquet. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le conseil communal de Chaumont-Gistoux demande l'établissement d'un chemin de fer d'Ottignies à Landen. »

- Même renvoi.


« Des propriétaires à Brecht prient la Chambre de rapporter la loi sur la chasse. »

- Même renvoi.


« Le sieur Gulhausen, combattant de la révolution, demande une pension. »

- Même renvoi.


« Les sieurs Euquauts et Lenoir, capitaines de la garde civique d'Anvers, dont le mandat s'est trouvé renouvelé, à la suite de leur démission, réclament contre le rang d'ancienneté qui leur est assigné. »

- Même renvoi.


« La députation permanente du conseil provincial d'Anvers transmet une pétition par laquelle le conseil communal d'Hemixem réclame contre un arrêté royal du 5 décembre 1856 qui annule les décisions des autorités administratives en vertu desquelles la prison de St-Bernard a été inscrite au rôle des impositions communales, et demandent que le gouvernement fasse un arrangement avec la commune pour la part afférente à l'Etat dans le payement des impositions à raison de la consommation des objets imposables, qui se fait dans cette prison. »

M. Osy. - C'est une réclamation de la députation permanente de la province d'Anvers contre une décision du ministre de l'intérieur, relative à la formation des budgets communaux pour l'octroi. Je demande le renvoi de cette requête à la commission des pétitions avec prière de faire un prompt rapport.

- Cette proposition est adoptée.


« Des propriétaires, industriels, exploitants de minerais et commerçants, à Villers-Potteries, prient la Chambre de donner une application temporaire aux nouveaux droits sur la fonte et le fer, d’autoriser le gouvernement à augmenter ces droits dans certaines limites et de permettre la sortie de tous les minerais de fer, moyennant certains droits de douanes. »

« Même demande de propriétaires, industriels, exploitants de minerais et commerçants à Gerpinne et Saint-Aubin. »

- Renvoi à la commission permanente de l'industrie.


« Les membres du tribunal de première instance de Marche demandent une augmentation de traitement. »

- Renvoi à la commission charge d'examiner le projet de loi sur l'organisation judiciaire.


« L'administration communale de Diest prie la Chambre de décréter l'établissement des chemins de fer projetés, de Bruxelles à Louvain et de Louvain au camp de Beverloo, par Diest ; de stipuler que ces lignes seront construites simultanément et de décider que les frais de construction de la ligne de Louvain à Diest seront à la charge de l'Etat, si ce mode est adopté pour le chemin de fer direct de Bruxelles à Louvain. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Des employés des douanes prient la Chambre de s'occuper le plus tôt possible du projet de loi concernant les traitements des employés inférieurs de l’Etat. »

- Renvoi à la commission chargé de l'examen du projet de loi.


« Plusieurs habitants de Verviers appellent l'attention de la Chambre sur la situation que font à l'agriculture les droits sur les houilles et sur les fontes. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi portant révision du tarif des douanes.


« Le sieur Philippe Dewever, ancien militaire, né à Louvain, demande à recouvrer la qualité de Belge qu'il a perdue en prenant, sans autorisation, du service militaire à l'étranger. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Un grand nombre d'habitants de Flémalle-Grande, Jemeppe, Seraing, Tilleur, Montégnée et Grâce-Berleur, réclament l'intervention de la Chambre, pour que le gouvernement n'autorise pas l'établissement, dans ces communes, d'une usine destinée à l'affinage des minerais de cuivre. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« « Des meuniers dans l'arrondissement de Malines demandent de pouvoir continuer à faire usage de balances romaines. »

- Même renvoi.


M. Dechamps, pour cause d'indisposition, demande un congé de quelques jours.

- Accordé.


Il est fait hommage à la Chambre par M. Quetelet, au nom de l'Académie royale de Belgique et de la commission royale d'histoire, d'un exemplaire du tome XXX des Mémoires de l'Académie et d'un exemplaire du tome III de la Chronique des ducs de Brabant publiée par la commission d'histoire.

- Dépôt à la Bibliothèque.

Projet de loi accordant un crédit complémentaire pour la célébration du 25ème anniversaire de la prestation du Roi

Motion d'ordre

M. de Baillet-Latour (pour une motion d’ordre). - Des démarches ayant été faites près des questeurs par des intéressés, je demanderai si la Chambre pourra bientôt voir figurer à l'ordre du jour le projet de loi concernant le crédit demandé par le gouvernement pour solder les dépenses des fêtes données au mois de juillet dernier ; les fournisseurs et les entrepreneurs réclament qu'on les paye. Il est urgent que la Chambre s'occupe de ce projet de loi avant les vacances de Pâques. M. le rapporteur pourrait nous dire si son rapport pourra bientôt être déposé, et la Chambre pourrait alors décider le jour de la discussion.

Pour la Chambre et pour le pays cette liquidation ne peut être retardée plus longtemps.

M. Coppieters. - Comme membre de la section centrale, je m'empresse de donner quelques explications à la Chambre.

La section centrale s'est déjà occupée à différentes reprises de l'examen de ce crédit et elle a été obligée, pour s'éclairer, de demander de nombreux renseignements au département de l'intérieur. Une partie de ces renseignements ont été fournis depuis quelque temps. D'autres viennent seulement d'arriver. De manière qu'il n'a pas encore été possible à la section centrale de prendre des résolutions et d'arrêter les conclusions du rapport dont l'honorable M. Coomans a bien voulu se charger.

M. Coomans. - Il me serait d'autant plus difficile de déposer le rapport, que je ne connais pas encore moi-même les dernières volontés de la section centrale, dont la prochaine réunion est fixée à mercredi.

Du reste je m'engage volontiers à hâter la présentation du rapport dès que je serai à même de le rédiger.

M. de Baillet-Latour. - Il me semble que M. le rapporteur pourrait proposer à la Chambre un crédit provisoire pour donner des à-compte aux intéressés dont j'ai entretenu la Chambre.

M. Lebeau. - Je crois avec M. le questeur qu'il serait convenable de liquider, aussitôt que possible, certaines dépenses à l'égard desquelles il y a une certaine urgence. On comprend que dans le grand nombre de dépenses de ce genre, ce sont quelquefois les créances les plus infimes qui appellent surtout la sollicitude de la Chambre.

Je demanderai que M. le rapporteur veuille bien, s'il est possible, proposer un crédit provisoire très limité, si c'est nécessaire, et qui aurait pour objet spécial certaines petites créances sur lesquelles il est impossible qu'une discussion s'établisse.

Du reste, je m'en rapporte entièrement au discernement et à la bonne volonté de M. le rapporteur de la section centrale.

M. Coomans. - Je remercie l'honorable M. Lebeau de la justice bienveillante qu'il veut bien me rendre. Mais je dois lui faire observer que je n'ai rien à proposer. Je suis, je serai l'organe de la section centrale et j'aurai l’honneur de saisir promptement la Chambre de la décision qu'elle aura prise.

Si la section centrale veut ajourner certaines dépenses et proposer à la Chambre de voter celles sur lesquelles il y aura le moins de recherche et d'opposition, je trouverai cette manière de procéder toute naturelle et je n'y ferai certainement pas obstacle.

Je ferai remarquer encore qu'on ne peut rien reprocher à la section centrale, car elle ne pouvait mettre plus de zèle, je dirai même de dévouement à cette ingrate besogne. Elle s'est déjà réunie huit fois et les trois rapporteurs qu'elle a nommés ont une lourde tâche, s'ils veulent exécuter les volontés de la section centrale qui a été unanime à prescrire des investigations approfondies relativement à certaines dépenses dont l'origine et la portée ont plus particulièrement fixé son attention.

Du reste, les livranciers et tous les travailleurs pour les fêtes du 21 juillet devaient savoir d'avance que le crédit alloué par les Chambres ne serait pas suffisant, qu'en conséquence ils ne pourraient pas obtenir le payement de leurs créances, immédiatement à la rentrée (page 1064) des Chambres, parce qu'il était juste de nous laisser le temps d'examiner, avec un certain soin, des dépenses que la Chambre n'avait pas votées.

M. de Baillet-Latour. - Des livranciers intéressés se sont mis à découvert pour des sommes considérables et qui leur font perdre des intérêts ; j'ai été informé que d'autres encore dans semblables positions étaient aussi pressés qu'on leur solde les dépenses considérables qu'ils ont dû avancer pour les travaux qui leur ont été commandés.

Je persiste à demander la discussion du projet de loi avant les vacances de Pâques.

M. de Naeyer. - Personne ne demandant plus la parole, l'incident est clos.

Projet de loi modifiant la législation sur la mendicité, le vagabondage et les dépôts de mendicité

Motion d'ordre

M. Vander Donckt. - Messieurs, depuis le 2 de ce mois, M. le ministre de la justice a déposé un projet de loi qui a pour objet de modifier la loi sur les dépôts de mendicité ; la Chambre en a ordonné l'impression et la distribution, et depuis cette époque, il n'en est plus question, rien ne nous a été distribué ; je ne sais à qui nous devons nous en prendre ; mais il y a évidemment un retard qui n'est pas justifiable.

Pour nous qui considérons ce projet de loi comme un des plus importants que la Chambre aura à examiner dans le courant de cette session et qui intéresse à un si haut degré nos communes rurales, nous insistons vivement pour qu'il soit discuté le plus tôt possible. Je demande donc que ce projet de loi nous soit distribué dans le plus bref délai possible. J'ai dit,

M. de Naeyer. - Je dois faire observer que le département de la justice s'est chargé de corriger les épreuves. Du reste, le projet de loi et l'exposé des motifs seront distribués aussitôt que l'impression en sera terminée.

M. Lebeau. - Je crois qu'un des principaux motifs du retard, c'est que l'un des imprimeurs les plus actifs de la Chambre est décédé.

M. de Baillet-Latour. - Je pense que le service des impressions de la Chambre ne sera pas interrompu. En effet, on m'a assuré que la veuve de l’imprimeur décédé poursuit les affaires de la maison ; dès lors elle continuera de travailler pour la Chambre, tant que nous n'aurons pas à nous plaindre du service et qu'elle remplira ponctuellement le contrat qui a été renouvelé, il y a peu de temps, du vivant de son mari.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l’exercice 1857

Discussion du tableau des crédits

Chapitre I. Administration générale. - Chapitre IV. Chemins de fer, postes, télégraphes, régie, service d’exécution

Discussion générale

La discussion générale continue sur le chapitre premier (Administration centrale) et le chapitre IV (Chemins de fer, etc.).

M. de T’Serclaes, rapporteur. - Messieurs, en acquit de mon devoir de rapporteur, j'ai quelques courtes observations à présenter dans la discussion générale du chapitre IV.

Lorsqu'elle a livré à votre appréciation les hypothèses qui ont occupé la Chambre la semaine dernière, la section centrale ne s'est point prononcée. Il importe de remarquer qu'elle n'a voulu assumer sur ce grave sujet aucune responsabilité ; elle s'est bornée à signaler à votre attention trois systèmes qui lui ont paru dignes d'être étudiés.

M. le ministre des travaux publics a mis fin aux débats dans la dernière séance avec un talent et une science des détails auxquels je me plais à rendre hommage ; l'opinion de la Chambre paraît être favorable aujourd'hui au maintien du système actuel, à condition que l'on y introduise les améliorations dont il est susceptible.

La section centrale a été plus loin ; elle a déclaré à l'unanimité, que dans son opinion la situation actuelle laisse beaucoup à désirer, et que cette situation réclame des améliorations urgentes.

Je ne crains pas de trop m'avancer en disant que dans la pensée de plusieurs de nies collègues il n'est nullement impossible d'arriver à une combinaison nouvelle qui réunirait l'élément commercial et intelligent des compagnies avec la force et l'autorité de l'Etat.

Je suis convaincu que par la force même des choses et par l'irrésistible mouvement de l'opinion publique, nous serons nécessairement amenés à modifier profondément et dans ses bases essentielles le régime actuel, et cela dans un avenir très peu éloigné.

La responsabilité du gouvernement est grande aujourd'hui ; il faut que l'Etat fasse mieux que les compagnies, ce n'est qu'à cette condition, on vous l'a dit en 1856, ce n’est qu'à cette condition que son exploitation est justifiable.

Il faut que nous soyons supérieurs aux autres pour le matériel, pour les voies, pour le service, pour la sécurité des transports, les facilités du trafic.

Cependant le gouvernement a reconnu que l'on pouvait arriver à un mode nouveau : il a approuvé l'idée de faire du chemin de fer un entreprise à part, et de confier cette entreprise particulière à un syndicat auquel on remettrait un fonds spécial affecté à cette exploitation.

Cette idée, nous pourrons, dit M. le ministre des travaux publics, la réaliser quand nous le voudrons. Quant à moi, j'ai des doutes sérieux sur l'utilité d'une semblable mesure ; mais pour la mettre en pratique, il faut que nous soyons saisis d'un projet de loi spécial, contenant les dérogations qu'il sera indispensable, si l'on veut faite chose sérieuse, d'introduire aux principes de la loi générale sur la comptabilité, et ici, messieurs, j'arrive à un autre point signalé par votre section centrale.

Elle a fait remarquer que l'article 55 de la loi du 15 mai 1846 porte ce qui suit : « L'organisation définitive de la comptabilité du chemin de fer de l'Etat fera l'objet d'une loi spéciale qui sera présentée dans la session de 1846 à 1847. »

Un projet de loi a été effectivement présenté dans le délai voulu, et remplacé dans la séance du 27 janvier 1853 par une autre rédaction beaucoup plus complète, plus étendue ; l'examen de ce dernier projet a été suspendu depuis 4 ans, par suite de l'enquête à laquelle s'est livré le comité consultatif. Cependant nous sommes ici en présence d'une disposition formelle de l'une de nos lois organiques les plus importâmes : le gouvernement est obligé de s'y soumettre ; nous avons rappelé cette obligation, au moment où il s'agit d'arriver à une organisation stable. Je dois prier M. le ministre des travaux publics de nous dire si le cabinet maintient le projet de 1853, ou s'il compte se mettre en mesure d'en présenter prochainement un autre.

La comptabilité du chemin de fer nous donnera l'occasion d'examiner attentivement tout le système de l'exploitation par l'Etat, et c'est dans l'attente de cette discussion que la section centrale s'est bornée à reproduire les plans qui ont été présentés lors des précédents budgets, et à énoncer l'idée, accueillie avec faveur dans cette Chambre, d'une association entre les chemins de fer de l'Etat et ceux des compagnies. Nous n'avons point l'intention de prolonger le débat, mais je dois déclarer que dans mon opinion le gouvernement rendrait un grand service au pays et à l'administration, en nous appelant le plus tôt possible à délibérer sur la matière. C'est alors seulement que l'on pourra arrêter les principes, formuler les idées nouvelles, discuter utilement et sous toutes leurs faces les diverses opinions qui se sont fait jour.

La section centrale a pris des résolutions sur deux autres points.

1° Elle a demandé que l'on distingua nettement, dans le compte de l'entreprise, les dépenses afférentes au capital des dépenses ordinaires ou extraordinaires d'entretien.

Cette distinction a une importance qui n'échappera à personne.

2°Elle a exprimé formellement le vœu, qu'il fût dressé annuellement un bilan commercial de l'opération du chemin de fer, et que ce bilan fût communiqué aux Chambres.

C'est ce que l'on fait tous les ans, nous a dit M. le ministre des travaux publics : il est vrai que le compte rendu des opérations du chemin de fer, que le gouvernement nous communique chaque année renferme une grande partie des éléments qui doivent entrer dans le bilan. Mais ce compte rendu n'est point suffisant : il ne permet pas d'apprécier d'un coup d’œil le débit et le crédit du chemin de fer, et de voir en quoi l'entreprise prospère ou dépérit. Il faudrait que l'on fît pour le chemin de fer ce que font par exemple la Société Générale et les banques de Bruxelles, à l'égard de leurs actionnaires, ce que tous les industriels et commerçants font pour eux-mêmes chaque année, afin de se rendre compte de la situation de leurs affaires.

La Chambre ne peut pas se rendre un compte semblable de la situation du chemin de fer, au moyen du travail qui nous est soumis : ce travail est rempli de détails précieux, il paraît fort exact et bien fait, mais on ne peut saisir l'ensemble des opérations qu'au moyen de calculs difficiles et de pénibles recherches.

Le premier poste de ce bilan doit constater le coût primitif du chemin de fer ; si l'on ne parvient pas à s'entendre sur ce point avec la cour des comptes, il faut adopter un chiffre transactionnel : mieux vaut une cote mal taillée que l'absence d'un compte de balance ; une donnée conventionnelle permettra d’atteindre le but.

La section centrale, messieurs, s'est efforcée de vous mettre complètement au fait de l'organisation nouvelle que le gouvernement veut appliquer à l'administration. Elle s'est longuement étendue sur ce chapitre, c'était son devoir. Sa tâche, sous ce rapport, lui a été tracée par vos délibérations antérieures ; elle s'est étudiée à la remplir, en menant sous vos yeux tous les détails et tableaux nécessaires, pour que vous puissiez apprécier en pleine connaissance de cause.

Elle a insisté pour que l'on sorte immédiatement du provisoire, et je dois ici demander à l'honorable M. Dumon s'il adopte la rédaction du paragraphe 3 que nous proposons d’insérer au projet de loi ; ce paragraphe impose au gouvernement l'obligation de publier les arrêtés réglementaires avant le 1er juillet de cette année.

Cette organisation a déjà fait l'objet de plusieurs discussions dans la Chambre ; le comité consultatif s'en est occupé avec un soin particulier. Quant à moi je pense que l'on peut encore citer ici ce qui se passe ailleurs. C’est ainsi que, dans les sociétés, on établit une distinction fondamentale entre l'administration et l'exploitation. Ces deux services, qui doivent s'éclairer mutuellement, doivent être cependant et sont en fait partout bien nettement séparés.

En terminant et comme conséquence de ce qui précède, je dois prier le gouvernement de vouloir s'expliquer : eu premier lieu, sur l'organisation définitive de la comptabilité du chemin de fer ; en second lieu, sur la question de savoir s’il adopte le délai du 1er juillet prochain, proposé par la section centrale pour la publication des arrêtes organiques.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, il me serait impossible de répondre d’une manière catégorique à la première partie de l'interpellation de l'honorable membre. Je me souviens effectivement qu'un projet de loi a été présenté par un de mes honorables (page 1065) prédécesseurs ; que ce projet a été examiné par les sections et que dans plusieurs d'entre elles on a proposé des modifications radicales.

L'état actuel de la question ne m'est pas assez présent à la mémoire, pour que je puisse dire dès à présent si je me rallie à ce projet, ou s'il est utile d'en présenter un autre.

A la première occasion que j'aurai de traiter devant la Chambre des questions analogues, je serai, j'espère, en mesure de répondre catégoriquement à cette interpellation de l'honorable rapporteur. Quant au second point sur lequel il m'a interpellé, je n'hésite pas à déclarer que j'accepte sans discussion comme sans réserve le paragraphe nouveau que la section centrale propose d'insérer au projet de loi du budget.

M. Dellafaille. - Messieurs, je viens vous prier de me permettre de vous présenter quelques observations sur la réponse faite par l'honorable ministre des travaux publics dans la séance de vendredi à la partie du discours de M. le baron Osy relative au chemin de fer de l'Escaut à la frontière de l'Allemagne.

En présence de l'intérêt de premier ordre, de l'intérêt national que présente l'exécution d'un chemin de fer direct, le plus direct possible, des rives de l'Escaut à la frontière de l'Allemagne, je m'explique avec peine la répulsion, je dirai presque l'attitude hostile avec laquelle les hommes chargés de veiller à la prospérité et à l'avenir de l'Etat ont accueilli, l'année dernière et cette année encore, les propositions qui ont été faites au sein des Chambres belges pour doter le pays de cette voie importante de communication, la plus importante peut-être de toutes celles que la Belgique, au point de vue de sa situation internationale, puisse créer encore.

L'intérêt que cette voie présente est si grand, sa portée est si vaste, son avenir se lie si intimement à l'avenir commercial, industriel, et même militaire de la Belgique, que pour l'apprécier il suffit d'examiner les efforts des pays qui nous avoisinent, les sacrifices immenses qu'ils s'imposent pour l'emporter sur nous et par la rectitude des voies communicatives et par la célérité des moyens de transport, pour démontrer aux moins prévoyants, aux plus aveugles, qu'il s'agit entre eux et nous d'une question je ne dirai pas de plus au moins de prospérité, mais de vitalité d'existence même commerciale.

La réponse faite par M. le ministre des travaux publics, dans la séance de vendredi dernier, à mon honorable ami M. le baron Osy à ce sujet, n'a pas été de nature à nous rassurer beaucoup ni sur les sympathies ni sur l'importance que l'honorable ministre attache au railway à ouvrir en ligne directe entre l'Escaut et la frontière d'Allemagne.

Que nous a-t-il répondu en effet ? Et j'emprunte ses paroles au moniteur même : Je ne répondrai qu'une chose, a-t-il-dit, à l'honorable M. Osy sur la demande de concession du chemin de fer d'Anvers à Hasselt, c'est que cette concession me paraît tellement onéreuse, que je crois impossible de l'admettre.

Ainsi donc rejet, rejet absolu, définitif de cette voie de communication, consécration définitive de la section du railway de Malines à Liège, avec privilège d'unité d'existence, sur le sol belge, à l'exclusion de toute autre ligne, pour arriver à la frontière d'Allemagne, répulsion de tout progrès, immobilité absolue au point de vue des améliorations essentielles, indispensables même, à opérer pour nos relations les plus importantes, celles des contrées transatlantiques avec le centre de l'Europe, relations qui réagissent si directement, si immédiatement sur toutes nos industries nationales.

J'aime à croire, messieurs, que l'honorable ministre s'est placé au seul point de vue d'une route à exécuter par voie de concession et qui pouvait éventuellement priver l'Etat d'une partie des revenus de cette section de nos chemins de fer.

Mais ce n'est pas en ces termes que mon honorable ami a posé la question ; il n'est point venu vous demander qu'une route vers l'Allemagne s'exécutât par voie de concession ou de toute autre manière, il a convié l’Etat à examiner, il a indiqué à l'Etat la possibilité, l'opportunité de cette voie internationale. J'irai plus loin, messieurs, je lui signalerai l'indispensable nécessité de son exécution.

Il s'agit de savoir si, dans la lutte engagée entre la France et la Belgique, entre les ports allemands et la Belgique et surtout entre la Hollande et la Belgique, notre ancienne et souvent trop heureuse rivale, si nous nous résoudrons à déposer les armes et si nous refuserons de faire usage des moyens que la nature a mis à notre disposition pour conserver le transit vers le nord de l'Allemagne par notre territoire. Non, la question n'est pas de savoir si le railway national belge, tel qu'il existe aujourd'hui, conservera ses recettes, toutes ses recettes. Il s'agit de savoir si la Hollande plus prompte, plus directe, plus économique que nous pour transporter au sein d'une population do plus de 30,000,000 d'habitants les denrées de l'Amérique et de l'Angleterre, et en reporter les produits vers les contrées transatlantiques, nous précédera aux frontières de l'Allemagne, en stérilisant non seulement cette section du railway national qui seule semble vous préoccuper aujourd'hui, mais en neutralisant même, par des relations intelligemment créées et établies avant les nôtres, la voie directe dont la nature nous avait dotés et dont des vues d'un étroit égoïsme nous auraient empêchés de profiter dans des circonstances opportunes.

Vous ne l'ignorez pas, messieurs, les relations commerciales s'établissent lentement, insensiblement : mais une fois établies, elles se déplacent difficilement et il est bien plus aisé à ceux qui arrivent les premiers de les obtenir que de les conquérir ensuite ; et cette difficulté dans l'occurrence serait d'autant plus grande, elle présenterait d'autant plus de dangers que les avantages que nous pourrions offrir au point de vue de la rectification à opérer à nos voies ferrées comparées à celles de la Hollande seraient moins considérables.

Vous n'ignorez pas les efforts faits par la Hollande pour nous ravir les transits vers l'Allemagne. A peine avions-nous en 1849 abaissé les tarifs de nos transports par le déclassement de nos marchandises en leur faisant subir une réduction de 25 p. c. sur les prix antérieurs, que la Hollande en 1850 présenta à la législature un ensemble de mesures ayant toutes pour objet de réduire les charges maritimes... Bientôt après, un arrêté royal réduisit les droits de pilotage, et cette modification ne fut même présentée que comme une mesure provisoire destinée à être ultérieurement complétée ; elle l'a été par la loi du 1er janvier 1856, qui a entièrement aboli le droit de tonnage.

Toutes ces mesures portées à la connaissance du commerce étranger par des circulaires, sur lesquelles la Chambre de commerce d'Anvers avait eu soin d'attirer l'attention du gouvernement belge, ont eu pour résultat de réduire de moitié les frais de transport de Rotterdam à Cologne et de les porter à environ 8 fr. par tonneau, tandis que les nôtres s'élèvent à 17-20.

Les conséquences de cet état de choses ont été d'accroître dans une proportion considérable le chiffre du transit par la Hollande et de réduire de la même manière le mouvement commercial qui s'effectuait par la Belgique.

On me dira que nous aussi nous n'aurions qu'à réduire encore nos tarifs, mais il est, vous le savez, messieurs, des limites à toutes choses, et les gouvernements pas plus que les particuliers ne peuvent opérer des transports sans réaliser des bénéfices. A cet état de choses il n'est qu'une solution, il n'y a qu'un remède, et il réside dans l'économie et la rectitude de la voie même que vous pourrez offrir au commerce.

La voie directe de l'Escaut vers l'Allemagne, dont l'honorable baron Osy vous a entretenus, réaliserait une rectification de 40 kilomètres. Sur la voie existante en évitant de franchir des plans inclinés et des rampes très fortes, d'Anvers à Cologne le trajet se fait actuellement en 8 heures ; par la ligne nouvelle, il se ferait en 5. Un voyageur de première classe avec 100 kilos de bagage économiserait outre le temps 6 fr. 08 c, et le transport d'un waggon de marchandises de 6,000 kilos présenterait à égalité de tarifs 24 fr. d économie. Ce chemin de fer desservirait sur le territoire belge une population de 485,000 habitants et de Maestricht à Aix-la-Chapelle une population de 91,500. Louvain, Liège et Verviers n'ont rien à perdre à l'exécution de ce chemin de fer, elles n'ont qu'à gagner à débarrasser leur voie des marchandises en transit pour l'Allemagne qui ne leur rapportent rien et dont l'encombrement empêche souvent leurs propres transports.

Ce n'est pas d'ailleurs en écartant la concurrence seulement que l'Etat fera ses affaires, c'est en cherchant à créer des relations nouvelles et spéciales qu'on ne puisse pas lui enlever et à tirer le meilleur parti possible du railway national ; et si son tracé est impropre à lui conserver le transit de l'Escaut vers l'Allemagne du nord, ne peut-il pas porter ses vues vers l'Allemagne centrale en le prolongeant de Verviers vers Coblence ?

C'est en vain que vous chercheriez à contraindre le commerce à suivre les voies les plus longues et les plus dispendieuses, le commerce abandonnera vos communications défectueuses et vieillies, et le railway belge sera déserté pour les voies nouvelles et économiques dont la Hollande intelligente aura su doter son territoire.

Vous aurez peut-être remarqué, messieurs, que dans le cours des observations que j'ai eu l'honneur de vous présenter, j'ai évité de donner à la voie nouvelle dont il s'agit, la dénomination sous laquelle elle a été présentée à cette Chambre... Je n'ai pas voulu vous parler ici du chemin de fer d'Anvers à Hasselt, mais bien de cette grande artère internationale qui doit lier les rives de l’Escaut aux frontières de l'Allemagne, le grand centre européen Je n'ai pas voulu prononcer ici le nom d'Anvers ni vous parler des droits qu'elle pouvait avoir à la sollicitude nationale, parce que toute question qui revêt un nom, s'amoindrit aussitôt aux proportions mesquines d'une question de localité.

Non, messieurs, si les rives de l'Escaut, solitaires et délaissées, n'offraient à la Belgique qu'un port national sans ville et sans habitants ce port seul, cause et source de votre richesse, suffirait pour mériter vos plus ardentes sympathies et vous trouverait tous ici jaloux de sa défense.

Et qu'importe dans la question qui nous occupe l'active et opulente population qui habite les bords du fleuve ; elle ne lui ôte elle ne lui ôtera jamais son grand cachet d'artère vitale de la nationalité belge ; c'est ce fleuve dont il faut aujourd'hui prolonger le cours d'une manière intelligente, plus intelligente que par le passé, jusqu'aux frontières d'Allemagne. C'est cette situation qui réclame aujourd’hui vos plus sérieuses réflexions, c'est un intérêt purement, exclusivement national qui vous convie à lutter victorieusement contre la France, l'Allemagne et la Hollande coalisées contre vous.

Ce n'est donc pas aux craintes des pertes éventuelles qu'une section du railway de l'Etat pourra subir qu'il faut vous arrêter, c'est la perte presque totale de son revenu et celle du commerce national qu'il faut savoir conjurer.

Je sais que bien des personnes ne considèrent dans le commerce de transit que les bénéfices de la commission et de la manipulation (page 1066) prélevés au port d'embarquement et de débarquement ; ce sont déjà là des avantages, qui certainement ont leur importance : mais comptent-elles pour rien les relations créées par cet immense mouvement commercial ?

Le commerce, messieurs, ne vit et ne se développe que par les rapports qu'il établit entre les négociants el les industriels des différents pays ; c'est à côté du transit que s'établit le siège de toutes les autres affaires, et il existe une solidarité telle, entre toutes les branches du négoce, qu'en distraire une des plus importantes, le transit, ce serait s'exposer à ruiner en partie nos riches industries, et jeter une perturbation profonde dans les relations internationales.

Non, messieurs, il ne suffit pas, comme le gouvernement se borne à le faire, d'opposer un refus pur et simple à la demande de concession qui lui est faite ; il lui importe d'examiner si l'industrie privée, en lui révélant un grand intérêt, que M. le ministre, par ses paroles mêmes, vient de reconnaître, ne lui indique pas un objet digne de ses plus sérieuses études.

Je suis loin, pour ma part, de venir en ce moment solliciter du gouvernement son acquiescement à une demande de concession pour un projet d'une si haute importance, et je ne viens pas demander à la Chambre de décider la question de savoir s'il faut livrer l'exécution du chemin de fer en ligne directe de l'Escaut à la frontière d'Allemagne à une société ou si l'Etat doit l'exécuter lui-même.

C'est à l'Etat qu'appartient l'étude de semblables questions. Quand les corps constitués ont fait leur devoir ; quand les chambres de commerce ont signalé la gravité de la situation et les progrès toujours croissants du commerce de transit de nos voisins au détriment du nôtre ; quand l'industrie privée a offert son intelligent concours et ses capitaux pour doter le pays à ses seuls risques et périls de la voie de communication la plus essentielle à ses intérêts.

Quand les délégués de la nation ont signalé le danger que court le pays à subir de plus longs retards, c'est à ceux qui tiennent en mains les rênes du pouvoir à agir ou à porter la responsabilité de l'avenir du pays compromis par leur faute.

Sachons agir, messieurs, quand il en est temps encore.

C'est l'œil fixé sur les lignes rivales qui de la mer à la frontière allemande traversent le territoire de la France et de la Hollande, que l'Etat belge doit apprécier le valeur de son railway national et lui imprimer avec intelligence, sans reculer devant les sacrifices à faire, les redressement et la direction que ses intérêts les plus chers lui commanderont.

Chargeons M. le ministre des travaux publics de se livrer à l'étude approfondie du chemin de fer en question, qu'il nous en signale, non d'une manière vague et superficielle, mais détaillée et consciencieuse, les dangers comme les avantages ; que dans un avenir peu éloigné, il communique aux Chambres les utiles résultats de son travail ; et le pays nous saura gré d'avoir su sauvegarder ses intérêts et veiller à son avenir et à sa prospérité.

M. Sinave. - Dans la dernière séance, l'honorable ministre des travaux publics, en défendant le système du tarif différentiel sur le chemin de fer, a posé le principe suivant :

« En Belgique nous ne faisons pas une règle générale du tarif différentiel el les arrangements relatifs à des réductions sur le tarif n'ont lieu que dans des circonstances exceptionnelles, etc., etc. »

Je ne conteste pas qu'un pareil système, strictement appliqué, soit favorable à l'intérêt du trésor et ne nuise pas à l'intérêt privé. Mais je proteste contre l'application injuste el inadmissible en ce qui concerne certaines catégories toutes de même nature que l'honorable ministre nous indique à l'appui.

Je pourrais citer toutes ces catégories, mais je me bornerai à une seule.

L'honorable ministre s'exprime en ces termes :

« Voici un exemple : Les bateaux à vapeur du Moerdyk à Rotterdam brûlent du charbon anglais. La différence de prix était telle que si l'on accordait une légère réduction sur le prix du transport on pourrait brûler du charbon belge. Il me semble qu'il n'y avait pas à hésiter et qu'il fallait l'accorder. »

Ce sont donc de véritables primes à l'exportation dont profiterait une industrie à l'exclusion d'autres.

La Chambre s'occupe de supprimer les primes. Il est donc impossible de les rétablir, sous quelque forme que ce soit. Je suis certain que cette citation suffira pour engager l'honorable ministre à retirer des faveurs qui ont été accordées contrairement à la loi.

Evidemment, le tarif différentiel ne peut être appliqué qu'au transit, et encore pour des quantités considérables. Je prie M. le ministre de nous donner ses intentions à cet égard.

L'honorable ministre a aussi déclaré dans la dernière séance que la concession que demandent les honorables représentants d'Anvers d'un chemin de fer d'Anvers à Hasselt, serait tellement onéreuse au trésor, qu'il lui est impossible de l'accorder. Quant à moi, cette concession est de la plus haute importance pour le pays, en présence de la récente concession faite par la Hollande du chemin de fer de Flessingue au Rhin. Dès que cette nouvelle voie sera mise en circulation, malgré toutes les mesures que nous pourrions prendre, le trésor est expose à une perte annuelle de quatre à cinq millions de francs.

Flessingue, par sa position exceptionnelle, est accessible malgré la saison d'hiver, c'est-à-dire malgré les glaces. En outre, les marchandises pour être expédiées de là en Allemagne mettront moins de temps que n'en auront besoin les navires qui monteront l'Escaut jusqu'à Anvers. Dans cet état de choses Anvers perdra la majeure partie de son transit vers l'Allemagne.

C'est par conséquent au gouvernement belge d'étudier la question et de chercher s'il y a moyen de conserver au pays ce commerce important.

Sans rien préjuger il me semble que ce moyen consiste dans la concession du chemin de fer si instamment demandée par les honorables représentants d'Anvers.

M. Vandenpeereboom. - Je demanderai à la Chambre la permission d'adresser quelques questions à M. le ministre des travaux publics.

Dans une de nos précédentes séances, l'honorable M. Vermeire a appelé l'attention du gouvernement sur le mode de tarification et sur la difficulté de contrôler le prix perçu pour le transport des marchandises par les chemins de fer.

Il a démontré que la partie fixe des prix de transport se compose d'un nombre d'éléments tel, qu'il est impossible de vérifier si le tarif est bien appliqué. Celte vérification est très difficile pour l'application du tarif général du chemin de fer de l'Etat, et elle est complètement impossible quand il s'agit d'objets transportés et par le chemin de fer de l'Etat et par des chemins de fer concédés ; il y a là une complication réelle et des plaintes presque générales sont adressées aux autorités qui se trouvent souvent, par suite de la complication de la tarification, dans l'impossibilité de donner même des explications. Du reste, l'application actuelle des tarifs aux transports mixtes me paraît souverainement injuste.

Ainsi, par exemple, pour la catégorie des objets qu'on appelle de petite messagerie, il arrive qu'un petit paquet transporté à deux lieues, mais sur deux chemins de fer, coûte beaucoup plus cher que s'il était transporté exclusivement par le chemin de fer de l'Etat sur toute sa longueur. Ainsi, de Harlebeke à Menin, il y a 11 kilomètres ; un petit paquet paye 75 centimes, tandis que de Verviers à Ostende, il n'en payerait que 50. Evidemment, il y a là quelque chose à faire.

Je sais qu'il y a deux tarifs dont on doit faire l'application, le tarif de l'Etat et celui du chemin concédé, qui résulte des conventions faites avec le gouvernement ; mais on pourrait négocier avec les compagnies afin d'obtenir une réduction pour les transports de ce genre le gouvernement pourrait aussi faire un sacrifice ; c'est indispensable, surtout quand il faut emprunter successivement plusieurs lignes concédées ; car quand un petit paquet doit traverser trois chemins de fer concédés et le chemin de fer de l'Etat, il supporte trois ou quatre fois le droit fixe. J'appelle sur ce point l'attention de M. le ministre, je crois qu'il est possible d'apporter remède au mal que je viens de signaler.

La deuxième observation que je voulais faire, messieurs, est celle-ci : L'honorable ministre des travaux publics a dit que, dans quelques circonstances il accorde les réductions de tarifs pour le transport de certains produits. Si mes renseignements sont exacts, cette faculté ne serait pas toujours laissée aux compagnies concessionnaires, notamment à celles qui jouissent de la garantie d'un minimum d'intérêt. Le gouvernement part de cette idée que si l'on réduit les tarifs, on diminue les recettes, et que dès lors on augmente les sommes à payer par l'Etat du chef de la garantie d'intérêt. Si cependant le gouvernement, sur ses propres lignes, croit pouvoir réduire les tarifs, je ne sais pas pourquoi il n'autoriserait pas les compagnies à le faire.

Ainsi sur la ligne de Courtrai à Poperinghe, le transport du charbon est impossible.

Il serait de l'intérêt de la Compagnie d'obtenir ce transport. La distance n'est que de 10 à 15 lieues entre le bassin houiller et la ville de Poperinghe et cependant tout le charbon est transporté par eau et parcourt 90 à 100 lieues.

Si la Compagnie pouvait réduire son tarif, elle aurait ces transports ; ce serait un grand avantage pour le consommateur ainsi que pour la compagnie et, par conséquent, pour l'Etat.

J'appelle l'attention de M. le ministre sur ces différentes questions.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, en répondant l'autre jour à l'honorable M. Osy, relativement au chemin de fer dont il préconisait la construction, le chemin de fer d'Anvers à Hasselt, mon intention n'a pas été de dire qu'il n'y eût rien à faire en présence de l'attitude prise par le gouvernement des Pays-Bas, dans la lutte d'intérêts qui paraissait devoir s'ouvrir entre ce pays et la Belgique. Comme l'a dit l'honorable membre, la chambre de commerce a appelé l'attention du gouvernement sur ce point. Mais une question sur laquelle le gouvernement n'est pas fixé, c'est que le moyen proposé soit le meilleur.

Le gouvernement ne perdra pas cet objet de vue ; mais, quant à présent, il me serait impossible de me rallier à la proposition qui est faite.

L'honorable M. Sinave a traité un autre point qui a déjà occupé une partie de la dernière séance, c'est la réduction accordée dans certains cas sur les prix de transport. L'honorable M. Sinave critique les exemples que j'ai cités, parce qu'ils portent tous sur l'exportation, et il y voit un retour au système des primes d'exportation qui a été condamné (page 1067) par la Chambre. Il est vrai, messieurs, que les exemples cités sont dans ce cas ; mais, au lieu d'y voir une prime à l'exportation, l'honorable M. Sinave aurait dû y voir une prime au transport par le chemin de fer de l'Etat.

Messieurs, je ne méconnais pas l'importance de la question qui a été soulevée par l'honorable M. Frère et que l'honorable M. Sinave vient de rappeler. Aussi mon intention est de ne continuer le système actuel qu'après m'être entouré de tous les renseignements et avoir étudié la question d'une manière complète.

L'honorable M. Vandenpeereboom m'adresse une interpellation relativement à un fait à l'égard duquel je crains qu'il ne soit pas complètement renseigné.

Quelquefois les compagnies concessionnaires demandent au gouvernement la permission d'accorder des remises que le gouvernement accorde sur ses propres lignes ; une difficulté de cette nature a surgi pour la compagnie à laquelle l’honorable M. Vandenpeereboom a fait allusion, mais la contestation ne porte pas sur le point de savoir si la compagnie a le droit de faire des réductions, elle porte sur le point de savoir si la compagnie est obligée de faire homologuer ces réductions par le gouvernement. Comme la base des tarifs est l'égalité pour tout le monde et que le gouvernement se réserve d'homologuer les tarifs, il me semble qu'il doit aussi se réserver d'homologuer les dérogations aux tarifs.

Il va sans dire que s'il s'agissait de modifications maladroites, de nature à compromettre les recettes de compagnies jouissant d'un minimum d'intérêts, le gouvernement devrait s'y opposer. Quant aux autres dérogations, l'Etat devrait, en toute justice, appliquer aux compagnies les règles qu'il s'applique à lui-même.

L'honorable M. Vandenpeereboom a parlé des droits fixes. Les droits fixes ne chargent que le transport fait par les compagnies qui n'ont pas de contrats pour le service mixte avec le gouvernement. Cela ne s'applique qu'à des cas assez rares, puisque la plupart des compagnies ayant de semblables contrats, les droits fixes sont supprimés sur presque toutes les lignes.

Mais ce qui n'est pas supprimé c'est le minimum de la taxe. Quand un paquet très petit, ne payant que le minimum de la taxe, doit parcourir plusieurs lignes, chacun prend ce minimum pour sa part, or, trois fois le minimum font déjà un prix considérable pour un petit colis qui ne pèse souvent qu'un quart de kilogramme. C'est la première fois que cette question est soulevée ; je ne la perdrai pas de vue et je verrai ce qu'il y aura à faire pour améliorer la situation signalée par l'honorable M. Vandenpeereboom.

M. Sinave. - Quoi qu'on en puisse dire, messieurs, une réduction sur les prix du tarif, en faveur de l'exportation, est un avantage accorde à certains industriels au détriment d'autres industriels. Quant à moi il m'est impossible de concourir à l'établissement d'aucune prime, directe ou indirecte ; il faut mettre tout le monde sur la même ligne.

M. Loos. - Messieurs, l'année dernière j'avais conseillé au gouvernement d'établir les taxes calculées sur les distances à vol d'oiseau. Dans une de nos dernières séances cette idée a été reproduite, et l'honorable ministre des travaux publics a déclaré qu'il ne pouvait pas s'arrêter à ce système parce qu'il en résulterait, suivant lui, une injustice envers certaines compagnies concessionnaires de chemins de fer. Il en résulte, messieurs, que si l’honorable ministre ne peut adopter ce système et que d'un autre côte il croie qu'il serait contraire aux intérêts du chemin de fer de l'Etat d'autoriser la concession d'une ligne plus directe vers l'Allemagne, dès lors, dans l'opinion de l'honorable membre, les choses doivent rester dans leur état actuel.

L'honorable M. Sinave vous a déjà fait entrevoir la concurrence dont la Belgique est menacée.

Il me semble que parmi les moyens qui oui été proposés pour éviter les effets de cette concurrence, celui qui consiste à abaisser les tarifs mérite de fixer l'attention. Je crois que, comme il s'agit surtout de marchandises et non de voyageurs, l'abaissement des tarifs pourvoit au moyen d'éviter la dépense de construction d'une nouvelle ligne.

Mais j'ai vu avec regret par la réponse qui a été faite à l'honorable M. Vermeire, que l'honorable ministre repoussait ce moyen comme devant constituer envers quelques lignes concédées un déni de justice qui répugne à l'honorable ministre.

S'il est vrai que le moyen proposé constitue une injustice à l'égard des compagnies concessionnaires, et que d'un autre côté on se refuse à construire une ligne plus courte, nous sommes réellement dans une impasse dont je ne sais comment on sortira. Il faudra voir le transit passer à l'étranger, le pays privé des bénéfices qu'il en retire et se croiser les bras. Mais il me semble que c'est là le pire des systèmes.

Je crois que M. le ministre ferait bien d’étudier cette question et de s’arrêter soit à la construction d’une ligne plus directe vers l’Allemagne, soit à l’abaissement des tarifs en prenant pour base la distance à vol d'oiseau. On ne peut, je le répète, vouloir se croiser les bras, laisser causer au pays le préjudice immense dont il est menacé, et ne pas s'en soucier. Je crois qu'il est du devoir du gouvernement de veiller, à ce que des relations péniblement requises ne se déplacent pas et à ce que le pays ne soit pas privé des avantages que sa position lui permet d'acquérir.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - L'honorable M. Loos n'a pas bien saisi ma pensée. Ma réponse relativement à la tarification à vol d'oiseau était faite à l'honorable M. Vermeire, qui préconisait cette tarification d'une manière générale pour toutes les lignes de l’Etat, et j'ai dit, sans condamner le système, quelles étaient les objections qui se présentaient à mon esprit. Mais il y a loin de ce système de l'application générale, de la tarification à vol d'oiseau à une réduction qui ne s'appliquerait qu'aux seules expéditions d'Anvers pour l'Allemagne, de manière à assurer à la Belgique le maintien de l'étal de choses actuel.

Comme l'a dit l'honorable M. Loos, le remède à apporter au mal dont nous sommes menacés ne peut être que de deux natures : ou l'établissement d'une ligne plus courte, ou un abaissement de tarif, avec des facilités de douanes, une réduction de droits de douane, une diminution des frais de fanal, etc.

En rappelant les objections qui se présentent à première vue contre la tarification à vol d'oiseau, je n'ai donc pas voulu dire que, dans mon esprit, il n'y eût rien à faire quant au maintien sur le territoire belge du transit entre Anvers et Aix-la-Chapelle. Une réduction de tarif dans ces conditions me paraît très possible ; mais je crois qu'elle ne peut s'appliquer à tous les points du pays, où une quantité de lignes ont été concédées, dont plusieurs avec garantie d'un minimum d'intérêt. Ma réponse a donc été faite au point de vue général et non au point de vue particulier dont vient de s'occuper l'honorable M. Loos.

M. de Theux. - Dans la session dernière, j'ai, à deux reprises, appelé l'attention de la Chambre sur la nécessité d'une ligne directe d'Anvers vers l'Allemagne. Je persiste encore dans cette opinion.

La Chambre n'a pas oublié que c'est sut tout dans l'intérêt du commerce maritime que le gouvernement a pris l'initiative de rétablissement des voies ferrées. Eh bien, du moment où il sera démontré par la comparaison des lignes qu'on construit en Hollande et de celle qui existe en Belgique que les nécessités commerciales exigent une communication plus directe vers l'Allemagne, je crois qu'on devra considérer la question comme résolue.

On a parlé d'obvier à cet inconvénient du raccourcissement des lignes qu'on exécute en Hollande par un abaissement de tarif d'Anvers vers la frontière prussienne. Je crois que cet abaissement de tarif nuirait plus aux intérêts du trésor peut-être que l'exécution d'une ligne directe.

D'autre part on perdra toujours le temps, ce qui est une circonstance importante.

On ne doit pas non plus perdre de vue que, dans certaines circonstances, des guerres peuvent survenir et que la ligne directe d'Anvers vers l'Allemagne pourrait suppléer à la ligne actuellement existante, si elle se trouvait entravée. Une telle ligne peut encore avoir pour la Belgique une importance stratégique considérable.

Ce sont ces divers points que je signale à l'attention du gouvernement.

Naturellement je ne demande pas une décision immédiate. Mais je crois qu'il y a un intérêt national à ce que cette question soit examinée sous toutes ses faces ; et lorsqu'elle sera examinée, je crois qu'on en viendra à la construction d'une ligne que je préférerais voir établir aux frais du trésor plutôt que de la voir concéder.

Je me rappelle qu'en 1836, il y a eu dans cette enceinte et au Sénat de grandes discussions sur les concessions de chemins de fer du Midi de la Belgique vers la France. Ces projets de concessions rencontraient alors de grandes difficultés. On voulait que l'Etat exécutât des lignes internationales.

Il en a exécuté deux, et puis il en a concédé plusieurs sans opposition. Toutes les craintes qu'on avait en 1836 de voir concéder de nouvelles lignes de la France vers le midi de la Belgique, qui se trouveraient en concurrence avec les lignes du gouvernement, toutes ces craintes avaient disparu.

Je crois qu'il en serait de même de l'opposition qui se manifeste aujourd'hui contre une ligne directe d'Anvers vers l'Allemagne. Je suis persuadé que le temps seul amènera la solution de la question.

- La discussion est close.

La Chambre passe à la délibération sur les articles du chapitre premier (administration centrale)

Chapitre I. Administration centrale

Article 1 à 3

« Art. 1er. Traitement du Ministre : fr. 21,000. »

- Adopté.


« Art. 2. Traitements des fonctionnaires, employés et gens de service : fr. 521,700. »

- Adopté.


« Art. 3. Frais de route et de séjour du Ministre, des fonctionnaires et des employés de l'administration centrale : fr. 35,200. »

- Adopté.


Article 4

« Art. 4. Salaires des hommes de peine, des ouvriers, etc. : fr. 29,085. »

M. de T'Serclaes, rapporteur. - La section centrale a fait sur l'article 2, l'observation qui suit :

« Un membre fait observer qu'il résulte du tableau annexé au rapport de 1856 (documents parlementaires, n. 190, session de 1855-1856, page 99), qu'une somme de 14,800 francs a été prélevée, en 1855, sur l'article 2 pour les frais de surveillance des chemins de fer concédés, et que le gouvernement propose, en outre, pour faire face à la même (page 1068) dépense, pour l'exercice 1857, un transfert de 25,000 francs de l'article 70, au même littera d de l'article2 (note préliminaire du budget, page 42), ce qui élèverait le crédit affecté à ce service à la somme de 30,800 francs évidemment supérieure aux besoins. »

Cette observation conclut à une demande d'explications que je prie M. le ministre des travaux publics de nous donner.

M. le président. - Cet article est voté.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Les chiffres cités contiennent une erreur matérielle ; le chiffre de 25,000 francs, qui a servi de base l'année dernière, sert également de base cette année pour la surveillance des chemins de fer concédés. Les renseignements fournis par le gouvernement sont exacts.

- L'article 4 est adopté.

Articles 5 et 6

« Art. 5. Matériel, fournitures de bureau, impressions, achats et réparations de meubles, chauffage, éclairage, menues dépenses : fr. 50,000.

- Adopté.


« Art. 6. Honoraires des avocats du département : fr. 30,000. »

- Adopté.

Chapitre IV. Chemin de fer, postes, télégraphes, régie, service d’exécution

Première section. Voies et travaux
Article 60

« Art. 60. Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés : fr. 200,843. »

M. de Theux. - Messieurs, j'ai à présenter quelques observations relativement au chemin de for concédé de Hasselt à Landen. Il n'y a que des éloges à donner sous le rapport du matériel et du personnel à la compagnie de Maestricht qui exploite cette ligne. Mais le matériel est d'une nature telle, que la voie primitive se trouve trop peu solide pour supporter ces convois. De là il résulte plusieurs inconvénients. Des convois ont parfois déraillé, et souvent ils arrivent trop lard, de manière que les voyageurs de Maestricht et de Hasselt qui ne peuvent pas se rendre à Liège, sont obligés de s'arrêter à Landen pour attendre un autre convoi.

D'autre part, on n'a pas construit de bâtiment de station ; ce ne sont que des baraques provisoires à Landen, à Saint-Trond et à Hasselt.

J'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics sur ce point important. Je n'inculpe pas la compagnie, parce qu'elle repris le service à une époque où il n'était pas possible d'exécuter les travaux d'amélioration et d'achèvement nécessaires ; mais j'espère qu'au moins M. le ministre des travaux publics voudra bien exiger que dans cette campagne les divers travaux soient exécutés, de manière à ne plus donner lieu aux plaintes qui se sont élevées pondant cet hiver.

J'ai à faire une observation sur un autre point : c'est que la station pour les voyageurs se trouve établie à une assez grande distance de Hasselt ; ce qui constitue un inconvénient notable pour les habitants. J'espère que M. le ministre des travaux publics voudra bien prendre cet objet en considération.

M. de Smedt. - Je prendrai à mou tour la liberté de demander à M. le ministre des travaux publics, si l'administration ne fera pas enfin quelque chose pour la ville de Deynze ; si les voyageurs auront bientôt un abri, et les marchandises un hangar...

M. le ministre des travaux publics me fait un signe négatif. Vraiment, c'est inconcevable. La ville de Deynze doit-elle être mise hors du droit commun ? Ne paye-t-on pas là comme ailleurs ? Pourquoi la laisser sans abri pour les voyageurs et sans magasin pour les marchandises ? C'est incompréhensible comment une station de troisième classe qui donne de bons produits ne peut avoir de réduit pour mettre à l'abri de la pluie et du mauvais temps les voyageurs, et un hangar pour héberger les marchandises ! On devrait soupçonner que le gouvernement a le projet de déplacer cette station et de la placer ailleurs.

Oui, elle est inconcevable l'insouciance que le département des travaux publics met à l'égard de la ville de Deynze. C'est une injustice même, car quand on reçoit des voyageurs et des marchandises à transporter, et quand on reçoit les péages, c'est une injustice, dis-je, que de ne pas accorder à cette station ce que l'on donne à toutes les autres des chemins de fer.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Messieurs, les renseignements fournis par l'honorable M. de Theux sont très exacts. La compagnie de Hasselt à Aix-la-Chapelle a construit la route avec des matériaux de première qualité, qui lui ont permis d'adopter un système de très fortes voitures. Mais la compagnie doit exploiter deux lignes, l'une à rails très forts, l'autre à rails très faibles (celle de Landen à Hasselt), elle est donc forcée de ralentir considérablement la vitesse des trains sur cette dernière route, pour éviter les accidents. J'ajoute que la compagnie a fait les efforts les plus louables, même pendant l'hiver, pour apporter à cette ancienne section toutes les améliorations possibles, et je ne doute pas que dans le courant de l'été, le mal ne soit convenablement réparé.

Un autre point qui a été signalé par l'honorable membre, c'est le manque d'abris à Landen, à Saint-Trond et à Hasselt. Je ne me rappelle pas l'état de la question, quant à Saint-Trond ; mais pour Landen, je puis assurer qu'il sera prochainement construit, entre la voie de l'Etat et celle de la compagnie, une station qui permettra aux voyageurs d'aller d'un train dans un autre, sans être exposés aux intempéries des saisons.

Le motif pour lequel les convois descendent, non à la station, mais à la halte de Hasselt, tient encore à l'état défectueux de la route ; quand la voie sera améliorée, tous les trains d'une vitesse moyenne entreront dans la station proprement dite ; l'on n'arrêtera plus à la halte que les trains de grande vitesse pour lesquels un retard de quelques minutes est souvent une affaire très importante.

L'honorable M. Desmet a appelé de nouveau mon attention sur l'état de la station de Deynze. En proposant un crédit de 6 millions pour l'amélioration du matériel du chemin de fer, j'ai déclaré à la Chambre que dans ces 6 millions une somme de 800,000 fr. seulement était destinée aux stations ; que des stations bien plus importantes que celle de Deynze réclamant des améliorations d'un caractère urgent, je ne pouvais pas promettre qu'il serait pris une somme quelconque sur les 800,000fr. en faveur de la ville de Deynze. Si donc les adjudications n'apportent pas de réduction sur les prévisions de l'administration, je ne pourrait faire construire, dans la campagne prochaine, le bâtiment réclamé pour la station de Deynze.

M. de Smedt. - L'honorable ministre des travaux publics nous dit qu'il ne peut répondre favorablement à notre juste demande, et dit qu'il n'a pas de fonds disponibles. Il est d'abord étonnant que l'administration n'ait pas signalé au ministre, quand il a préparé son budget, l'état déplorable où se trouve la station de Deynze ; on l’aurait mis à même de demander la somme nécessaire, et certainement cette somme ne doit pas être si lourde, pour que l'on puisse facilement la trouver.

D'ailleurs, que M. le ministre la demande encore, il n'aura pas beaucoup de difficultés à l'obtenir de la législature.

Je suis assuré que notre Chambre l'accorderait sans la moindre difficulté, je dirai même avec empressement, car elle est trop raisonnable et trop juste, pour refuser des fonds pour la construction de quelques bâtiments qui sont d'une première nécessité.

Si donc le ministre ne veut pas se donner la peine de faire cette demande, je pourrai dire que c'est l'effet d'une mauvaise volonté, et que l'administration veut traiter Deynze en paria, qu'elle ne veut pas donner ce que toutes les stations possèdent, et qu'elle traite la ville de Deynze plus mal que la plus petite halte qui se trouve sur le chemin de fer.

Mais aussi quand je vois une telle injustice, et que je puis signaler comme un acte de mauvaise administration, il me sera impossible de voter le budget.

M. Moncheur. - Messieurs, je vois avec peine que l'honorable ministre des travaux publics allègue, pour ne pas faire des dépenses reconnues urgentes au chemin de fer de l'Etat, l'insuffisance des crédits mis à sa disposition.

S'il n'a pas des crédits suffisants à ut effet, c'est parce qu'il ne les a pas demandés.

Chaque fois que le gouvernement a demandé formellement à la législature des crédits pour les travaux du chemin de fer, il les a obtenus. J'ai vu, il est vrai, assez souvent depuis huit ou neuf ans, les ministres des travaux publics qui se sont succédé dans cette période ne point oser demander les crédits qu'ils jugeaient eux-mêmes tout à fait nécessaires ; ils reculaient devant cette tâche à cause des plaintes dont l'administration et l'exploitation étaient, à tort ou à raison, l'objet ; mais jamais, quand le gouvernement s'est décidé à mettre les Chambres en demeure de lui accorder les fonds dont il justifiait la nécessité, jamais ces fonds ne lui ont été refusés.

Le crédit de 21 millions qu'il a sollicité au mois de mai dernier, n'a pas pu être voté, parce qu'il avait été proposé tardivement à la législature et que la Chambre ne s'est pas trouvée en nombre suffisant pour délibérer, le dernier jour de sa session, jour où la discussion en a eu lieu ; mais il est bien certain que si cette discussion eût pu arriver quelques jours plus tôt, le projet eût été adopté à une très grande majorité.

A l'appui de ce projet, M. le ministre lui-même a constaté les besoins très considérables et très urgents du railway ; or, depuis lors, ces besoins n'ont certes pas diminué sensiblement, puisqu'il n'y a que quelques mois à peine que nous avons voté un crédit égal à un peu plus du quart de celui que le gouvernement avait demandé. Je regrette donc que celui-ci semble perdre de vue aujourd'hui ces besoins ou du moins qu'il ne se mette pas en mesure d'y satisfaire au plus tôt.

- L'article. 60 est mis aux voix et adopté.

Articles 61 à 63

« Art. 62. Salaires des agents payés à la journée : fr. 1,609,050. »

- Adopté.


« Art. 62. Matériel (billes, rails et accessoires, engins et accessoires, outils et ustensiles) : fr. 1,095,500.

« Charge extraordinaire : fr. 600,000. »

- Adopté.


« Art. 63. Travaux et fournitures : fr. 583,000. »

- Adopté.

Section 2. Traction et arsenal
Articles 64 et 65

« Art. 64. Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés : fr. 165,860. »

- Adopté.


(page 1069) « Art. 65. Salaires des agents payés à la journée : fr. 1,927,700. »

- Adopté.

Article 66

« Art. 66. Primes d'économie et de régularité : fr. 82,000. »

M. Allard. - Je désirerais voir supprimer les primes d'économie et de régularité. Je ne comprends pas trop qu'on accorde des primes de régularité ; si les employés ne remplissent pas bien leur devoir on peut les rappeler à l'ordre. Je ne comprends pas davantage les primes d'économie, je ne sais pas comment les machinistes peuvent faire des économies de coke ; ils doivent consommer ce qui est nécessaire pour la conduite du convoi ; pour que l'économie puisse leur rapporter quelque chose il faut qu'elle soit considérable, ce que je ne puis admettre.

En effet, pour qu'un machiniste fasse une économie de 200 kilog., il faut dans certains cas, notamment quand le parcours est de 40 kilomètres, il faut qu'il économise un cinquième de ce qu'on lui accorde. Dans une note remise par le ministre des travaux publics, à la section centrale, il dit que si on supprimait les primes, il faudrait augmenter le salaire des machinistes, qu'en moyenne la prime rapporte 80 centimes par jour à chaque machiniste.

Je suppose un convoi de voyageurs, composé d'une locomotive et de dix voitures, ayant 40 kilomètres à faire, et ce trajet répété quatre fois par jour.

La locomotive a droit pour allumage à 140 kilog., ci, 140 kilog.

Elle a droit à 3 6/10 par kilomètre, donc pour 1 60 kilomètres, 476 kilog.

Une voiture a droit à 3/10 de kilo de coke, chaque voilure doit parcourir 160 kilomètres x 10 = 1,600 kilomètres parcourus, à 3/10 de kilog. par kilomètre, 480 kilog.

Total par convoi, 1,096 kilog.

Eh bien, sur ces 1,096 kil., il faut que le machiniste fasse 200 kilog. d'économie pour obtenir ses 80 cent. On lui accorde trop s'il parvient à faire un cinquième d'économie. Le département des travaux publics accorde cette prime parce qu'il est nécessaire d'augmenter le traitement des machinistes, j'aimerais mieux qu'on l'augmentât tout de suite ; je crains que la prime de régularité et d'économie ne devienne une prime accordée au vol, elle doit engager les agents attachés aux machines à rogner un peu sur les waggons chargés de charbons ou de coke pour pouvoir alimenter leurs machines.

Je suis loin de vouloir porter une accusation contre des employés de l'Etat, mais ce qui m'amène à faire cette observation, c'est qu'il se commet des vols sur les waggons et que ces vols s'élèvent quelquefois à 500 et même à 700 kil. par waggon.

Je dois le dire, ceux qui doivent recevoir des quantités de charbons et qui trouvent un déficit, pensent qu'en accordant des primes aux machinistes on les excite à prendre un peu de charbons sur les waggons. C'est plus grave qu'on ne croit.

J'engage le gouvernement à bien payer ses machinistes. On n'a pas à craindre que le machiniste, comme les anciens conducteurs de diligences, s'arrête de cabaret en cabaret pour boire un verre de bière, il est pressé d'arriver, exposé à l'air comme il l'est ; s'il éprouve un retard ou doit l'attribuer à des causes atmosphériques.

Ensuite, les conditions des machinistes pour obtenir la prime ne sont pas les mêmes, le coke n'est pas toujours de même quantité, les machines, ne sont pas toujours aussi bonnes. Voyez la situation d'un machiniste ayant du coke inférieur ou une machine détraquée. D'un autre côté, croyez-vous que le public soit satisfait de voir qu’on accorde des primes pour faire des économies qui ont lieu à son détriment ?

Puisque j'en suis à parler des machinistes, j'engage le gouvernement à ne nommer à ces emplois que des gens qui connaissent les machines. Souvent, ce sont des chauffeurs qui sont nommés, ils ne sont pas mécaniciens. De sorte que, quand il y a un accident, un écrou, un boulon à mettre, ils ne sont pas en état d'y pourvoir. J'ai eu l'occasion moi-même de m'en assurer.

J'insiste donc pour que le gouvernement supprime les primes d'économie et de régularité, et pour qu'il ne nomme que des mécaniciens à l'emploi de machinistes.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Il m'est impossible de me rallier aux observations de l'honorable préopinant qui me semble tenir trop peu de compte de l'importance de l’économie de combustible que peut faire un agent intelligent, stimulé par une légère prime.

En effet, l'attention que cet agent apporte au degré de pression de la vapeur, le soin qu'il met à entretenir le feu, à jeter du sable sur la voie, toutes ces petites circonstances peuvent influer considérablement sur la quantité du combustible consumée.

Il n'y aurait d'ailleurs, en suivant cette manière de voir, aucune économie, puisqu'il faudrait payer un salaire plus élevé au mécanicien. Il semble qu'il convient de ne pas renoncer facilement à un moyen qui ne saurait être un assez fort stimulant, puisqu'on l'applique sur toutes les ligues de chemins de fer.

L'honorable M. Allard fait remarquer que le machiniste doit économiser le cinquième du combustible pour avoir droit à une prime de 80 centimes. Mais il ne fait de calculs que sur le convoi en marche. Or ce calcul n'est pas exact. Il faut tenir compte du combustible brûlé, en stationnement, en réserve, dans les mouvements, dans les stations et pour l'allumage. Il y a ainsi mille et un détails d'où il peut résulter une dépense ridicule ou une économie raisonnable.

Les primes d'économie sont admises partout. Elles ont l'immense avantage d'intéresser l'ouvrier au bénéfice de l'opération. C'est un travail intéressé. Vous intéressez l'ouvrier au bénéfice de l'opération.

L'honorable M. Allard signale la possibilité d'un abus. Il dit que des machinistes peuvent enlever du coke pour alimenter les machines, et qu'ainsi ils peuvent obtenir par fraude la prime d'économie. A cela je répondrai que les plaintes sur des manquants de coke sont très rares.

S'il y a un abus, il faut le faire cesser ; mais je le répète, cette circonstance ne serait pas un motif pour se priver d'un stimulant dont les avantages ont été appréciés partout.

L'honorable M. Allard parle encore de différences dans la qualité de coke ; mais cette hypothèse ne peut pas exister, il n'y a pas de différence ; si le coke est d'une certaine qualité pour les uns, il l'est, également pour les autres, puisque tous les machinistes vont au même tas.

Quant à l'état des machines, les chefs d'atelier le connaissent parfaitement. Ils savent donc qui mérite une prime d'économie.

Quant aux primes d'exactitude, l'honorable M. Allard se trompe sur les conditions qui la font obtenir ; car il ne s'agit pas de marcher à toute vapeur, ce qui ne peut, se faire qu'avec une grande quantité de combustible. Le problème à résoudre est d'observer la plus grande vitesse possible en consommant le moins de combustible possible.

L'honorable M. Allard parle de chauffeurs devenus mécaniciens qui seraient incapables de mettre un écrou ou un boulon. Si je savais à qui cette observation s'applique, j'y mettrais ordre. Mais elle a lieu de me surprendre. Nos machinistes sortent des ateliers. Les chauffeurs peuvent le devenir aussi, mais ce n'est qu'après un examen ; les chauffeurs ne sont pas les plus mauvais machinistes, parce qu'ils ont l'habitude de la voie et de la manœuvre de la machine en marche. Les mécaniciens qui sortent des ateliers sont beaucoup plus rétribués. Si nous devions prendre là tous les machinistes, il en résulterait un surcroît de dépense pour le trésor, sans aucune utilité.

- L'article 66 est adopté.

Article 67 à 69

« Art. 67. Combustibles et autres consommations pour la traction des convois : fr. 2,362000. »

- Adopté.


« Art. 68. Entretien, réparation et renouvellement du matériel : fr. 2,402,500.

Charge extraordinaire : fr. 450,400. »

- Adopté. »


Art. 69. Redevances aux compagnies : fr. 275,000. »

- Adopté.

Section III. Transports
Article 70

« Art. 70. Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés : fr. 875,686. »

M. de Portement. — Messieurs, quoique M. le ministre des travaux publies, en réponse au discours de mon honorable collègue M. de Ruddere, nous ait donné l'espoir que prochainement le nombre des convois serait augmenté sur le chemin de fer de Bruxelles à Gand par Alost et de Dendre-et-Waes, je crois devoir lui soumettre les observations suivantes.

Il me semble que l'Etat ne retire pas de cette nouvelle ligne que, par parenthèse, il doit exploiter, tous les avantages qu'il pourrait en obtenir. C'est ainsi que malgré l'achèvement de ce railway destiné à diminuer les distances on continue à donner la préférence à l'ancienne ligne dont le raccourcissement a été jugé nécessaire.

Je citerai à l'appui de mon assertion les villes de Bruxelles et de Gand qu'on a voulu rapprocher. Eh bien, quoique le chemin de fer direct de Bruxelles à Gand par Alost abrège considérablement la distance qui les sépare, on conserve sur la ligne la plus longue un plus grand nombre de convois que sur la plus courte.

N'est-il pas évident, messieurs, que cet état de choses est contraire aux exigences d'une bonne administration ?

Voici un autre point que je prie l'honorable ministre des travaux publics de faire examiner : Le gouvernement a le libre transit sur la ligne de Dendre-et-Waes ; ne devrait-il pas, dans son intérêt, faire passer par cette voie ferrée les convois de Calais et de Tournai vers Bruxelles ? Il y gagnerait d'abord un parcours moins long et ensuite une diminution dans la part à payer à la société du chemin de fer de Tournai à Jurbise.

Il me reste à signaler à l'attention de M. le ministre des travaux publics quelques points défectueux de l'organisation du service sur la ligne de Dendre-et-Waes. Les villes de Lessines, Grammont et Ninove n'ont que deux convois directs par jour pour Bruxelles ; le premier à 6 heures 45 minutes du matin, le second à 7 heures 25 minutes du soir. Cependant, ces localités ont des relations très suivies avec la capitale.

Le service n'est pas beaucoup mieux organisé entre les villes de la vallée de la Dendre ; car, depuis 6 heures 30 minutes du matin jusqu'à 4 heures de relevée, il n'y a pas de correspondance entre Ath, Termonde et Lokeren, Le tableau des heures de départ indique, il est vrai, un (page 1070) convoi partant d'Ath à 10 heures du matin pour ces localités ; mais c'est évidemment une erreur ; car, arrivés à Alost, les voyageurs doivent y attendre patiemment que le convoi de 3 heures 30 minutes du soir les transporte au lieu de leur destination.

Je bornerai là mes observations, et j'aime à croire que M. le ministre des travaux publics voudra bien y avoir égard. En faisant droit aux réclamations dis habitants de la vallée de la Dendre, il sauvegardera en même temps les intérêts de l'Etat.

M. Coppieters. - Je dois faire une observation dans le genre de celle que l'honorable préopinant vient de soumettre à la Chambre, relativement au peu de services que rend le chemin de fer direct de Bruxelles vers Gand. Cette ligne est depuis bien longtemps dans un état de parfaite viabilité. Il est vraiment inconcevable que le gouvernement n'en fasse pas un usage plus utile pour l'intérêt du trésor et pour le public.

Depuis que cette communication existe, elle ne sert en quelque sorte à rien pour les habitants des deux Flandres. On dirait que ce chemin de fer n'a été construit que pour donner aux habitants de la capitale et des localités intermédiaires la facilité de faire quelques voyages d'agrément.

Ainsi, il n'y a aucun convoi direct par cette ligne pour les habitants des deux Flandres. Les habitants de ces provinces qui doivent se rendre pour leurs affaires à Bruxelles sont obligés, comme lorsque ce chemin de fer n'était pas construit, de perdre leur temps et leur argent en faisant le détour par Malines.

Déjà, il y a quelque temps mon honorable ami M. Devaux a appelé l'attention de M. le ministre des travaux publics sur ce point assez important pour les relations des différentes villes avec la capitale, et M. le ministre a promis d'avoir égard à ses observations ; jusqu'à présent cependant rien n'a été fait.

Précédemment au moins, lorsque les habitants de nos Flandres avaient été appelés par leurs affaires à Bruxelles, ils pouvaient rentrer chez eux au moyen d'un convoi direct. Ceci n'existe même plus aujourd'hui, les habitants des Flandres, lorsqu'ils rentrent chez eux ; le soir, sont obliges, non seulement de faire le détour par Malines, mais de prendre un convoi qui les force à changer deux ou trois fois de voiture. Pendant tel hiver, ils ont eu le grave désagrément, lorsqu'ils arrivaient à Malines, de devoir chercher, dans la boue et la neige, et souvent dans une obscurité profonde, les convois qui devaient les conduire à Gand. Lorsque, arrivés à Gand, ils devaient prolonger leur route, même désagrément et même perte de temps.

Je pense qu'il est important dans l'intérêt d'une partie des habitants du pays, comme dans celui du trésor, de faire rendre à cette ligne tous les services qu'on est en droit d'en attendre. J'insiste donc vivement auprès de M. le ministre des travaux publics, pour qu'il veuille faire étudier cette question et pour qu'à l'ouverture de la nouvelle période, il fasse en sorte que ces plaintes légitimes n'aient plus lieu de se produire.

M. le ministre des travaux publics (M. Dumon). - Je prendrai note des demandes des honorables membres, et je crois pouvoir dire qu'il sera possible d'y faire droit pour la période d'été. Mais ce ne sera pas sans grands sacrifices pour le trésor. Car les relations entre Gand et Bruxelles sont déjà desservies par un nombre considérable de convois.

- L’article 70 est adopté.

Articles 71 à 74

« Art. 71. Salaires des agents payés à la journée et des manœuvres : fr. 1,330,610. »

- Adopté.


« Art, 72. Frais d'exploitation : fr. 401,600. »

- Adopté.


« Art. 73. Camionnage : fr. 294,000. »

- Adopté.


« Art. 74. Pertes et avaries : fr. 80,000. »

- Adopté.

Section IV. Télégraphes
Articles 75 à 77

« Art. 75. Traitements et indemnités des fonctionnaires tt employés : fr. 109,000. »

- Adopté.


« Art. 76. Salaires des agents payés à la journée : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 77. Entretien : fr. 26,000. »

- Adopté.

Section V. Services en général (chemins de fer, postes et télégraphes)
Article 78 à 81

« Art. 78. Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés : fr. 47,650. »

- Adopté.


« Art. 79. Salaires des agents payés à la journée : fr. 40,460. »

- Adopté.


« Art. 80. Matériel et fournitures de bureau : fr. 200,000. »

- Adopté.


« Art. 81. Subside à la caisse de retraite et de secours des ouvriers de l'administration : fr. 20,000. »

- Adopté.

Section VI. Régie
Articles 82 et 83

« Art. 82. Traitements et indemnités des fonctionnaires et employés : fr. 36,500. »

- Adopté.


« Art. 83. Frais de bureau et de loyer : fr. 3,500. »

- Adopté.

Section VII. Postes
Discussion générale

M. Rodenbach. - A l'occasion de la discussion de la section VII relative à la poste, je crois devoir déclarer à la Chambre ainsi qu'à M. le ministre des travaux publics, que je persiste dans mon opinion, que si l'on adoptait la taxe uniforme de 10 centimes par lettre pour tout le royaume, le produit atteindrait bientôt le chiffre de 2 millions indiqué par la législature.

Messieurs, à l'époque où l'on a introduit, en 1839 en Angleterre, la réforme postale, on ne transportait que 77 millions de lettres, et aujourd'hui on en transporte 500 millions. C'est à tel point que la moyenne est par année de 17 lettres par individu. Je sais bien que sous ce rapport l'Angleterre est dans de meilleures conditions que la Belgique, mais en Belgique aussi l'augmentation du transport des lettres a augmenté d'année en année, malgré la taxe de 20 cent.

Il ne s'agit pas seulement, messieurs, d'augmenter le produit, mais il s'agit aussi de développer les relations commerciales.

Remarquez, messieurs, que le transport des lettres nous coûte fort peu de chose : nous avons les chemins de fer, nous avons les facteurs ruraux et les messageries, tout cela est parfaitement organisé pour transporter les lettres à très bon compte.

M. le ministre dans son budget vous dit que la recette brute de la poste s'élève à 4,570,000 fr., mais il paraît qu'on a beaucoup de peine à se mettre d'accord sur le produit net ; le ministre l'évalue à 1,002,797 francs, tandis que d'après d’autres calculs il serait plus considérable.

On est parvenu aujourd'hui à rendre les chiffres très élastiques, mais, d'après les judicieux calculs reproduits par la section centrale et qui sont, je crois, de l'honorable M. Vandenpeereboom, le produit net s'élèverait bien à 2 millions indiqué par la législature.

Je ne veux pas, messieurs, réduire les revenus de l'Etat, mais je suis convaincu que quel que soit le chiffre actuel, nous aurons certainement 2 millions si nous admettons la taxe uniforme de 10 centimes.

M. le ministre, dans la dernière séance, a parlé de quelques modifications à introduire dans le régime postal ; je crois qu’il y a encore beaucoup à faire ; ainsi en France, par exemple, avant 1847, les lettres chargées n'étaient qu'au nombre de 177,000 et cette année-ci, à la suite des changements adoptés, on transportera au-delà de 600,000 lettres chargées.

Ces lettres ne payent, pour un poids de 100 grammes, que 80 centimes, tandis qu'en Belgique on paye jusqu'à 1 fr. 60. Vous savez, messieurs, que le chargement est un mode très utile pour les lettres importantes, pour celles, par exemple, qui contiennent des valeurs ; et on a vu des délits et des condamnations qui seraient évités si l'usage de charger ces sortes de lettres était plus général.

Je pense que si le prix du chargement des lettres était réduit de moitié on obtiendrait un meilleur résultat et en même temps on augmenterait le revenu.

Il y a un autre fait sur lequel il serait important d'introduire des modifications, c'est le transport de l'argent. Il paraît qu'en France il est question de réduire le prix du transport des espèces par la poste de 2 à 1 p. c.

Je crois, messieurs, que nous devons progresser, comme on le fait dans d'autres pays et surtout en Angleterre. Nous avons été les premiers à marcher sur les traces de l'Angleterre en adoptant la réduction à 10 et 20 centimes, nous ne devons pas en rester là et, je le répète, si nous adoptons la taxe uniforme de 10 centimes, nous obtiendrons bien un produit de 2 millions.

M. Vandenpeereboom. - Messieurs, à l'occasion de la discussion du budget des voies et moyens, j'ai eu l'honneur de présenter à la Chambre quelques observations sur la nécessité de compléter la réforme postale, c’est-à-dire de réduire de 20 à 10 centimes la taxe des lettres transportées à l’intérieur du pays. On a pensé à cette époque qu'une question aussi importante, aussi grave, ne pouvait être discutée incidemment, et il a été décidé qu'on l'examinerait à l'occasion du budget des travaux publics. L’honorable ministre qui dirige ce département a promis de fournir les renseignements nécessaires pour nous mettre à même d'apprécier la question, c'est-à-dire de juger si, en réalité, l'éventualité prévue par la loi est aujourd'hui réalisée.

Messieurs, la loi de 1849 a été interprétée diversement. L'article 10 de cette loi est ainsi conçu :

« Le gouvernement est autorisé à appliquer aux lettres transportées à une distance excédant 30 kilomètres la taxe de 10 centimes par lettre (page 1071) simple, dès que le produit net de la poste aura atteint la somme de deux millions de francs par année.

Dans mon opinion (et je pense que cette opinion est partagée par un grand nombre de membres qui depuis 1849 siègent dans cette Chambre), cet article, bien que, par sa forme, il ne semble donnerait gouvernement qu'une faculté, lui impose néanmoins une obligation, sinon positive, an moins morale vis-à-vis de la Chambre.

Rappelez-vous, messieurs, dans quelles circonstances il a été introduit dans la législation. Le gouvernement avait présenté un projet de loi ayant pour objet de fixer à 20 centimes le taux de la lettre simple transportée à l'intérieur du pays. A cette taxe de 20 centimes la Chambre, à une immense majorité, substitua la taxe de 10 centimes. Transmis au Sénat, le projet voté par la Chambre rencontra une grande opposition ; la commission en proposa le rejet, et ce fut grâce aux efforts de l'honorable M. Rolin qu'on arriva à une transaction et que l'on introduisit dans la loi l'article dont je viens de donner lecture.

Vous savez, messieurs, que récemment au Sénat l'interprétation que je soutiens a été attaquée avec une certaine vivacité ; mais je crois devoir faire observer que tous les arguments présentés ont été ceux que faisaient valoir les membres opposés au projet en 1849 ; or, cette argumentation n'a point prévalu alors, puisque le Sénat a adopté l'amendement, et par conséquent elle n'a aucune valeur quant à l'interprétation de l'article 10.

On a encore argumenté de ce que la première rédaction de l'article 10 imposait au gouvernement l'obligation de réduire la taxe à 10 centimes lorsque le revenu net de la poste aurait atteint le chiffre de 2 millions ; mais il faut tenir compte, messieurs, des circonstances où l'on se trouvait alors : on craignait d'imposer au gouvernement une obligation absolue de réduire la taxe dans un moment où cette réduction aurait pu être inopportune.

La révolution de 1848 venait d'éclater, on ne pouvait prévoir quelles en seraient les conséquences ; une guerre générale pouvait désoler l'Europe et notre pays en particulier. C'est donc la préoccupation des événements politiques qui fit surtout modifier la première rédaction de l'amendement soumis au Sénat.

Heureusement, messieurs, les éventualités que l'on pouvait craindre ne se sont pas réalisées ; l'Europe est aujourd'hui prospère, le mouvement commercial se développe de plus en plus, le produit des impôts indirects augmente et le gouvernement trouve la position tellement favorable, qu'il n'hésite pas à proposer à la Chambre l'augmentation de plusieurs dépenses permanentes. Je pense donc que le moment est favorable, aussi pour achever une réforme que je considère comme éminemment utile.

Du reste, messieurs, la Chambre n'aurait pas admis l'amendement du Sénat si elle n'avait pas eu l'espoir qu'à une époque rapprochée on arriverait à la taxe uniforme de 10 c.

Qui, dans cette enceinte, contesterait que l'abaissement de la taxe des lettres ne soit un bienfait pour le pays en général ?

L'abaissement des droits de péage et des impôts n'a-t-il pas exercé toujours une influence heureuse sur le développement industriel et commercial du pays ? Nos chemins de fer surtout, grâce aux tarifs qui ont été adoptés, n'ont-ils pas eu, à ce point de vue, des résultats infiniment plus importants que toutes les natures de protection dues à l'initiative des divers cabinets qui ont occupé le pouvoir en Belgique depuis 1834 ?

Dans l'ordre moral, comme dans l'ordre matériel, toutes les mesures qui facilitent et les relations des citoyens entre eux, et la transmission des idées, sont aussi d'une incontestable utilité. La facilité des correspondances, les communications rapides par le chemin de fer ont beaucoup fait pour resserrer l'union entre les habitants des diverses provinces, pour former en Belgique cet esprit national dont nous sommes fiers. Il est évident que, quand on peut employer de pareils moyens, il ne faut pas les négliger.

Ou a parlé plusieurs fois du transport des imprimés et des journaux, et on a dit que ce service était onéreux, que l'Etat était constitué en perte ; c'est possible, mais je demande si, dans un pays constitutionnel comme la Belgique, il n'est pas infiniment désirable que les imprimés et les journaux périodiques se multiplient, ; il faut que chaque citoyen puisse connaître les actes des grands pouvoirs de l'Etat, les discussions des assemblées législatives ; car tous les pouvoirs en Belgique émanent de la nation ; il importe que la nation juge ses mandataires et le gouvernement. La presse, d'ailleurs, contribue largement au développement de l'éducation politique du pays.

En présence de semblables résultats, je n'hésite pas à dire que je me préoccupe très peu d'une légère réduction dans les recettes.

Sous ce rapport, la loi de 1849 a produit un effet immense ; pendant la période de 1847 à 1856, le nombre des journaux transportes par la poste s’est élevé de 4,200,000 à 19,669,000 par an.

Lorsque eu 1849, on a parlé pour la première fois de la réforme postale, ou a craint que le trésor ne subît une perte énorme, une perte de plusieurs millions ; on a soutenu qu'on ne parviendrait à couvrir les pertes subies par le trésor que longtemps après la promulgation de la loi.

Eh bien, l'expérience a démontré que ces craintes ont été pour ainsi dire chimériques. Les recettes brutes ce la poste, depuis 1850 jusqu'à 1855, ont augmenté, chaque année, en moyenne, de 234,000 fr. ; de 1851 à 1853, l'accroissement annuel moyen a été de 206,000 fr., et de 280,000 fr. pour les deux dernières années. Sous ce rapport donc, les prévisions des pessimistes ne se sont pas réalisées.

Les recettes nettes se sont également accrues d'une manière considérable ; la recette nette n'était en 1850 que de 1,415,000 fr., et pour 1855, elle s'est élevée à 2,441,000 fr. Voilà donc un accroissement de plus d'un million dans une période de cinq années.

Cette augmentation est beaucoup plus grande qu'on n'aurait pu l'espérer. Une note, communiquée en 1849 à la section centrale par l'honorable M. Cans, je pense, qui était grand partisan de la réforme., estimait que le produit brut de la poste dépasserait, en 1855, de 512,000 fr. les recettes de 1848. Qu'est-il arrivé ? C'est que la recette brute de 1855 dépasse la recette brute de 1848, non pas de 512,000 fr., mais de 873,000 fr. ; de sorte qu'ici encore le résultat a dépassé toutes les espérances.

Lors de la discussion du projet de loi relatif à la réforme postale, d'honorables membres de la Chambre et du Sénat crurent que la réforme n'aurait pas pour résultat d'accroître, du moins dans une proportion considérable, le mouvement des lettres. Eh bien, encore une fois ces prévisions ne se sont pas réalisées ; voyez, en effet, les résultats obtenus. En 1847, le nombre des lettres transportées à l'intérieur, non compris les lettres non chargées, et celles de et pour l'étranger, avait été de 6,462,000 ; en 1855, il s'est élevé à 13,442,000, c'est-à-dire que le mouvement des lettres a plus que doublé.

Dans la même note dont je viens de parler et qu'on taxait d'exagérée en 1849, on évaluait le nombre des lettres à transporter en 1855 à 17,000,000, en y comprenant les lettres de et pour l'étranger ; eh bien, le chiffre de ces lettres confiées à la poste, en 1855, a été réellement de 18,000,000 environ. Ainsi, sous tous les rapports, les prévisions des adversaires de la loi ont été trompées ; celles, au contraire, des partisans de la réforme ont obtenu gain de cause, elles ont même été dépassées.

La réforme a-t-elle fait subir une perte considérable au trésor ?

Non, messieurs, de 1843 à 1848, le produit net de la poste avait été de 2 millions environ.

Malgré les circonstances fâcheuses au milieu desquelles le pays s'est trouvé depuis 1849, malgré des crises politiques, industrielles, commerciales et financières, quelle somme le trésor public a-t-il perdu en huit ans par suite de la loi de 1849 ? Je crois être dans le vrai en disant que depuis 1848 jusqu'à ce jour la perte totale n'excède pas 400,000 a 500,000 francs.

Il restera à examiner si le cas prévu par l'article 10 de la loi de 1849 est, oui ou non, un fait aujourd'hui.

Le gouvernement a transmis à la section centrale une note sur les résultats de l'année 1856. Cette note est insérée au rapport.

Je ne puis admettre les calculs produits par l'honorable ministre des travaux publics. Je demanderai d'abord pourquoi on a choisi l'année 1856 dont l'exercice n'est pas clos, plutôt qu'une autre année. Le résultat qu'on donne n'est et ne peut être qu'approximatif. Quand les comptes seront apurés, on pourra reconnaître, je pense, que les recettes sont plus importantes qu'on ne l'indique. Depuis 1848, les chiffres des évaluations budgétaires (article Postes) ont été constamment dépassés. Pour 1856, le budget prévoit une recette de 4,700,000. M. le ministre ne la porte qu'à 4,570,000 fr. ; différence 130,000 fr. au-dessous de l'évaluation du budget.

Quant à ces calculs mêmes, je ne puis les reconnaître comme exacts.

Je devrai les examiner avec quelque détail ; c'est très peu récréatif pour la Chambre, je le regrette, mais je dois les lui présenter pour justifier mes allégations.

Le gouvernement évalue les recettes à 4,570,000 fr. Il en retranche d'abord les sommes à rembourser aux offices étrangers, et ensuite la valeur des timbres-poste en circulation, c’est-à-dire non annulés.

Quant aux remboursements à faire aux offices étrangers, je n'ai aucune observation à faire ; mais je ne puis admettre le calcul présenté pour les timbres-poste en circulation ; je dirai plus, j'avoue que je ne le comprends pas ; je les ai étudiés avec le plus grand soin et j'ai cru d'abord qu'ils étaient le résultat d'une combinaison de mathématiques supérieures ; puis j'ai réfléchi longtemps encore et je n'ai pas compris davantage ; j’ai pensé alors que mon intelligence était en défaut, et ce n'est qu'après avoir consulté plusieurs mathématiciens très compétents et des industriels très au courant de la comptabilité, que je me suis rassure, en apprenant qu'ils ne comprenaient pas davantage, et qu'ils ne comprenaient pas, parce que les calculs sont incompréhensibles. Le gouvernement, en effet, porte en recettes en compte la valeur des timbres-poste débités et en dépenses le montant de la différence de la valeur de ceux-ci et des timbres annulés ; ce calcul est juste.

Ainsi pour 1849 il a déduit 106 mille francs de ce chef ; niais, en 1850, après avoir déduit une première fois cette valeur, ou devait croire que cette somme de 106,000 fr. représentant le prix les timbres non annulés de 1849 ne reparaîtrait plus ; erreur : les 106 mille francs sont produits une seconde fois en 1850, et on y ajoute 53 mille francs pour cette année, puis on déduit ces deux sommes de la recette brute de 1850. En 1851 on voit reparaître encore les 106 mille fr. de 1849, plus les 53 mille fr. de 1856, ensuite 54,000 fr. pour 1851. En 1852 on (page 1072) continue la même opération que l'on poursuit jusqu'en 1856. L'on arrive de cette manière à défalquer des recettes brutes opérées pendant huit ans huit fois les chiffres de 106,000 fr. de 1849, sept fois celui de 1850, six fois celui de 1851, cinq fois celui de 1852, et ainsi de suite jusqu'en 1856.

C'est ainsi qu'au compte de ce dernier exercice on parvient à faire figurer en dépense fr. 797,000 dont il a été tenu compte en partie les années antérieures et cependant la valeur des timbres-poste débités et non annulés en 1856 n'est que 270,000 francs. Pour peu qu'on continue ce système, on n'arrivera jamais à un produit de 2 millions ; il y a plus, chaque année le chiffre des timbres en circulation ou égarés croît, la somme à déduire augmentera et l'on finira inévitablement par démontrer que les produits nets de la poste se réduisent à zéro, tandis qu'il est constant que les recettes croissent d'année en année. Je ne comprends pas comment de pareils calculs ont été présentés.

Je ne veux pas croire un instant qu'ils aient été transmis à la Chambre pour qu'ils ne fussent pas compris, c'est-à-dire pour abuser la législature, mais je ne puis pas admettre non plus qu'on les ait présentes sérieusement. Un fonctionnaire quelconque chargé de la statistique, quelque élastique qu'elle soit, ne peut pas commettre de pareilles erreurs. Quoi qu'il en soit, je ne veux pas en faire remonter la responsabilité jusqu'à M. le ministre ; je sais qu'un chef de département ne peut pas s'occuper de pareils détails ; mais je le prie de recommander à ses bureaux d'examiner à l'avenir avec plus de soin les documents réclamés avant de les transmettre à la Chambre.

Je refuse donc de reconnaître comme exacts, sous ce rapport, les chiffres du gouvernement.

Je crois que quand on a déduit une année la valeur des timbres vendus et non employés, on ne doit plus les déduire l'année suivante. Si le gouvernement contrôlait les écritures tenues et vérifiait la caisse, il serait étonné d'y trouver deux millions au moins de plus qu'il ne croit avoir reçu d'après les calculs qui sont présentés.

Le gouvernement déduit ensuite de la recette les dépenses portées au budget pour le personnel de l'administration des postes ; c'est juste, mais il déduit en second lieu les dépenses afférentes aux chemins de fer pour le transport des dépêches.

La somme est de 517,000 fr., elle se compose de deux éléments : d'abord des frais de traction des bureaux ambulants, puis des transports des dépêches. Le gouvernement évalue à 30 centimes par kilomètre les frais de traction des bureaux de poste ambulants. D'après le compte rendu des opérations du chemin de fer, exercice 1855, la dépense moyenne par voiture-kilomètre du chemin de fer n'a été par voiture à voyageurs que de 0,2691 fr., par waggon à marchandises que de 0,1565 fr.

Or, je ne vois pas pourquoi on évalue les frais de traction des bureaux ambulants a un taux plus élevé que ceux des voitures ordinaires de marchandises ou de voyageurs ; les bureaux ambulants de la poste sont en général moins lourds que les autres véhicules, car ils sont peu ou point chargés.

Quant au transport des dépêches par convois ordinaires, le gouvernement fixe les frais à 60 centimes par dépêche. Il est difficile de contrôler l'exactitude de cette évaluation de la dépense, mais on peut prendre des points de comparaison.

Il est évident que les transports par chemin de fer se font dans des conditions plus économiques que ceux par diligence. Or le gouvernement payait jadis et paye encore aux entrepreneurs de messageries une somme ronde de 20 fr. par an et par lieue pour toutes les dépêches à prendre et à remettre sur la route.

Si j'applique ces conditions au transport des dépêches vers Anvers, j'arrive à ce résultat : la distance de Bruxelles à Anvers est de 44 kilomètres ou 8 lieues 4/5 ; à raison de 20 fr. par lieue, on payerait par an 476 fr. ; de plus, pareille somme pour retour, et en supposant 7 convois ou départs par jour et vice versa, on trouve que la somme totale à payer par an aux entrepreneurs de voitures publiques ne dépasserait pas 2,464 francs pour le transport des dépêches sur la ligne du Nord.

D'après les évaluations du gouvernement, cette somme serait bien insuffisante. Aujourd'hui, elle ne permettrait, au taux indiqué de 60 centimes, d'expédier chaque jour à peu près 11 dépêches ; or, il est évident que le gouvernement en transporte infiniment plus, et, par conséquent, le transport par chemin de fer serait plus onéreux que celui qui se fait par les diligences, ce qui est impossible, inexact.

On pourrait appliquer le même calcul à la ligne du Midi. Pour cette ligne le transport se ferait par diligence au prix de 3,200 francs en supposant cinq départs par jour ; d'après les évaluations du gouvernement, nous payons au moins dix fois cette somme au chemin de fer.

Mais, messieurs, si l'on porte en dépense des frais semblables, que l'Etat se paye à lui-même, je ne sais pas pourquoi l'on ne porterait pas en recettes la valeur des services que la poste rend aux autres administrations.

Or, en procédant ainsi, on arriverait à un produit infiniment plus considérable que celui que l'on vous accuse et que celui que nous constatons nous-même.

Le transport des dépêches administratives donnerait une recette immense ; le nombre des dépêches de service s'élève à peu près à trois millions par an, et, en général, ces dépêches ne sont pas légères ; elles forment souvent de très gros paquets ; à Bruxelles, leur transport des ministères au bureau de la poste se fait parfois au moyen de petites voitures à bras, tant leur poids et leur volume sont considérables.

Si l'on taxait, fictivement bien entendu, ces dépêches d'après le tarif des articles 1 et 2 de la loi du 22 avril 1849, la poste pourrait faire figurer en recette des sommes très importantes ; il est évident pour moi que le chiffre net de deux et même de trois millions serait dépassé.

Il ne serait que juste, au fait, de tenir compte à la poste des services qu'elle rend aux autres administrations, si les autres administrations ont le droit de faire payer les services qu'elles rendent à la poste...

- Plusieurs membres. - A demain !

M. Vandenpeereboom. - Je continuerai demain si on le désire ; mais je suis à la disposition de la Chambre.

- La séance est levée à quatre heures trois quarts.