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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 4 décembre 1860

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1860-1861)

(page 117) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Snoy, secrétaire, procède à l'appel nominal à deux heures et un quart ; il donne lecture du procès-verbal de la séance du 30 novembre ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Florisone, secrétaire, présente l'analyse des pièces adressées à la Chambre.

« Des habitants de Termonde demandent qu'il soit donné cours légal aux pièces décimales françaises en or ou du moins que ces monnaies soient reçues pour leur valeur nominale dans les caisses de l'Etat, et que le gouvernement soit autorisé à battre des monnaies d'or belges de même valeur, titre et module que l'or français. »

- Renvoi à la section centrale qui sera chargée d'examiner la proposition de loi relative à la monnaie d'or.


« Des habitants de Wyngene demandent qu'il soit donné cours légal à la monnaie d'or de France. »

« Même demande d'habitants de Warneton, Assenberghe, Vinchem, Moeres, Langemark, Rumbeke, Cachtem, Nieuwcapelle, Enghien, Vlisseghem, Clemskerke, Oudecappelle, Crombeke, Noordschote. »

- Même renvoi.


« Un grand nombre d'habitants de Tournai prient la Chambre d'adopter la proposition de loi relative à la monnaie d'or. »

- Même renvoi.


« Des facteurs de la poste à Bruges demandent une augmentation de traitement. »

- Renvoi à la section centrale du budget des travaux publics.


« Plusieurs officiers pensionnés demandent une modification à la loi du 22 février 1814, sur les pensions militaires. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur de Noël prie la Chambre de statuer sur sa demande, tendante à obtenir une récompense honorifique. »

- Même renvoi.


« Le sieur Vanden Bulck demande qu'il soit accordé une indemnité aux commissaires de police remplissant les fonctions d'officier du ministère public près le tribunal de simple police du canton. »

- Même renvoi.


« Le sieur Delmarche, maréchal des logis de gendarmerie pensionné, demande qu'il lui soit fait application de la loi du 21 juillet 1860, relative à la pension des gendarmes. »

« Même demande des sieurs Gossens, Rippet. »

- Même renvoi.


« La veuve Deloge réclame l'intervention de la Chambre pour que son fils Joseph, milicien de 1887, soit renvoyé dans ses foyers. »

- Même renvoi.


« Le sieur de Brauwer demande que l'effectif de la compagnie des chasseurs-éclaireurs de la garde civique de Bruxelles soit augmentée. »

- Même renvoi.


« Le sieur Stainier, combattant de 1830, demande que la pension dont jouissent les décorés de la croix de Fer. »

- Même renvoi.

M. De Fré. - Je demande, en outre, que la commission soit invitée à faire un prompt rapport.

- Adopté.


« Le sieur Tasset se plaint d'un abus de pouvoir dont il vient d'être la victime et demande une réparation. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Furnémont, blessé de 1830, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir une récompense »

- Même renvoi.


» Des électeurs à Doel prient la Chambre d'annuler les élections qui ont eu lieu dans cette commune, le 30 octobre dernier. »

- Même renvoi.


« Le conseil communal de Westerloo présente des observations en faveur du chemin de fer projeté de Louvain à Herenthals par Aerschot et Westerloo, et demande que le concessionnaire soit obligé de construire la ligne par Aerschot et Westerloo, suivant le tracé figuré au plan officiel du 5 janvier 1860. »

- Même renvoi.


« Les sieurs Vanden Wouwere et de Laet demandent qu'il soit accordé une marque de distinction particulière à tous les citoyens qui n'ont pas été récompensés pour la part active qu'ils ont prise à la conquête de l'indépendance nationale. »

- Même renvoi.


« Les membres du conseil communal et des habitants de Kermpt demandent l'exécution d'un chemin de fer projeté entre Louvain et Hasselt par Diest. »

- Même renvoi.


« La dame Filleul prie la Chambre de statuer sur sa réclamation au sujet d'une décision judiciaire ou bien de lui faire délivrer un passeport à l'étranger. »

- Même renvoi.


« M. le ministre de l'intérieur adresse à la Chambre 120 exemplaires du compte rendu du tir national de 1860. »

- Distribution aux membres de la Chambre et dépôt à la bibliothèque.


« Par dépêche du 27 novembre 1860, M. le ministre de l'intérieur transmet à la Chambre une réclamation de la veuve Dumont, concernant la créance laissée par feu l'architecte Dumont, à la charge de l'Etat du chef de l'exécution et de la fourniture des plans ayant pour objet l'agrandissement et l'appropriation des musées royaux, ainsi que la construction d'un palais des beaux-arts. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi de crédits supplémentaires au département de l'intérieur.


« Par lettre du 5 décembre 1860, la cour des comptes fait parvenir à la Chambre son cahier d'observations, relatif au compte définitif de l'exercice 1857 et à la situation provisoire de l'exercice 1860. »

- Impression et distribution.


« M. de Portemont, retenu chez lui par des affaires de famille, demande un congé. »

- Accordé.


« M. Van Leempoel, retenu chez lui par une indisposition, demande un congé de quelques jours. »

- Accordé.


« M. Alphonse Vandenpeereboom, retenu chez lui par des affaires administratives, demande un congé de quelques jours. »

- Accordé.


M. le président procède au tirage des sections pour le mois de décembre.

Projet de loi portant le budget du ministère de l’intérieur de l’exercice 1861

Discussion du tableau des crédits

Chapitre VIII. Fêtes nationales

Article 48bis

MpVµ. - La discussion est d'abord ouverte sur l'amendement présenté par MM. Orts, De Fré et Yan Humbeeck (article 48, paragraphe 2).

Les auteurs de cet amendement, pour rendre leur intention plus claire, ont modifié la proposition de la manière suivante :

« Art. 48, § 2 (charge extraordinaire). Frais de concours et d'expériences pour arrêter un type d'arme de guerre uniforme, à indiquer aux sociétés de tir et aux compagnies spéciales de la garde civique, 10,000 francs. »

La section centrale a adopté cet amendement modifié ainsi qu'il précède.

M. Jamar. - Messieurs, je ne comptais pas prendre la parole dans la discussion de cet amendement qui a été développé par mon honorable ami, M. Orts, avec beaucoup d'autorité et d'une manière fort heureuse ; mais les modifications apportées à cet amendement, à la suite des débats qui ont eu lieu au sein de la section centrale, me semblent altérer, légèrement il est vrai, la signification et la portée de l'amendement.

J'eusse préféré, pour ma part, voir le département de l'intérieur se borner à ouvrir un concours pour arrêter le type d'une carabine, concours dont le résultat eût pu être facilement obtenu, en laissant le département de la guerre continuer les études et les expériences sur les autres armes de guerre propres à l'infanterie.

Il est un second point sur lequel je désire appeler l'attention de la Chambre.

page 118) La rédaction de l'amendement semble limiter aux compagnies spéciales qui existent aujourd'hui, les modifications à apporter à l'armement, tandis que dans ma pensée, et aussi, je crois dans celle des signataires de l'amendement, et cette mesure doit avoir une extension plus considérable.

L'idée de l'amendement m'avait été inspirée par l'examen attentif des tableaux des résultats généraux du tir, publiés dans le budget du département de l'intérieur pour 1860, et dans les notes explicatives du budget du même département pour 1861. Ces résultats sont très significatifs.

Ainsi, l'infanterie de la garde civique avec les fusils actuels n'arrive qu'à une moyenne de 8 balles atteignant la cible sur 100 balles tirées à 100 mètres de distance.

L'artillerie arrive avec ses mousquetons à une moyenne de 18 balles, niais à 60 mètres de distance seulement.

Il existe, quant à l'armée, dis chiffres qui diffèrent dans les deux tableaux, mais j'y trouve cependant un renseignement essentiel.

Ainsi, l'infanterie de l'armée, avec les fusils à canon lisse, arrive à une moyenne de 16 balles atteignant la cible sur 100, tandis qu'avec les fusils rayés, la moyenne est de 28 balles.

On peut, d'après ces indications, déterminer dès maintenant les résultats de la mesure pour laquelle nous avons voté un premier crédit de 15,000 fr.

La moyenne de 8 balles atteignant la cible sur 100 balles tirées, obtenue aujourd'hui par l'infanterie de la garde civique s'élèverait à 14, tandis que les chasseurs éclaireurs, avec leurs carabines, arrivent à une moyenne de 33 sur 100, et que les carabiniers, avec les armes choisies par eux, atteignent une moyenne de 88 pour cent.

Quant à moi j'estime que cette moyenne de 14 balles est tout à fait insuffisante.

L'honorable ministre de l'intérieur, dans la séance du 2 février dernier, répondant à un de mes honorables collègues de la députation de Bruxelles, qui appelait son attention sur ce point, disait que l'armement de la garde civique était parfaitement suffisant pour le service d'ordre intérieur qu'elle est appelée à faire.

Dans ces condilions.je partage complètement l'opinion de l'honorable M. Rogier, mais je pense qu'en présence des préoccupations sérieuses qui dominent la situation de l'Europe, il est sage de prendre dès maintenant certaines mesures que commandent les éventualités qui jettent dans les esprits de si vives appréhensions.

Je crois que l'armement non seulement des compagnies spéciales actuelles, mais d'une partie de la garde, doit être modifié et qu'il serait utile même d'apporter certaines modifications par voie administrative. Je crois que c'est là une des premières mesures à prendre.

Il ne faut pas perdre de vue en effet, qu'il ne suffit pas d'être résolus, comme nous le sommes tous, à faire le sacrifice de sa vie pour lutter contre des soldats bien disciplinés, mais qu'il faut surtout cette force morale, cette homogénéité qui fait la force des corps où règne la discipline.

La garde civique, je ne parle que des légions d'infanterie, est-elle dans ces conditions ? Evidemment non.

Il existe, dans chaque légion, et je pourrais même dire dans chaque bataillon de la garde civique, des sociétés d'exercice formées d'hommes n'ayant qu'un désir, celui de voir la garde civique organisée d'une manière sérieuse, de façon à donner à cette institution tout le développement qu'elle comporte.

Pleins d'ardeur et de zèle, ces hommes se réunissent régulièrement et consacrent une grande partie de leurs loisirs à leur instruction militaire.

Réunis en compagnies on peut prédire à coup sûr que tous les membres de ces sociétés, officiers ou gardes, seraient irréprochables sous le rapport de la tenue et de la discipline, mais ils ne forment qu'une minorité peu importante de la garde, et en dehors de ces sociétaires, les gardes sont peu familiarisés avec leur arme et moins encore rompus aux manœuvres.

Qui faut-il en accuser ?

Est-ce l'apathie ou le mauvais vouloir des gardes ?

Est-ce l'ignorance ou le défaut de zèle des officiers ?

En aucune façon. L'armement actuel et certaines dispositions vicieuses de la loi sont les seules causes de l'état actuel des choses, auquel il est temps, je crois, de porter remède. Les fusils dont les gardes sont armés aujourd'hui, loin de leur inspirer le désir de s'exercer au tir, les en éloignent au contraire par suite de la certitude de l'infériorité des résultats constatés par les tableaux que je vous indiquais tantôt.

Quant à la loi, une des dispositions les plus vicieuses, selon moi, est celle qui fixe huit réunions seulement de 2 heures chacune par an, pour que les gardes s'exercent au maniement des armes et aux manœuvres ; c'est-à- dire à l'école de peloton et à l'école de bataillon.

Voilà donc, messieurs, 16 heures par an ; 16 heures seulement consacrées à ces exercices, alors que dans l'armée les soldats s'exercent 4 heures par jour pendant six semaines, uniquement pour apprendre l'école de soldat et l'école de peloton.

Je me hâte de déclarer, messieurs, que je n'ai en aucune façon l'envie de proposer l'envoi de la garde civique au camp de Beverloo. Nous trouvons dans la garde civique elle-même l'indication du meilleur remède à apporter à l'état de choses que j'ai signalé tout à l'heure.

Voyez, au jour de revue, s'avancer en tête des gardes civiques, les compagnies spéciales, dont la tenue et la discipline sont irréprochables.

Les gardes qui les composent marchent comme de vieux soldats et l'on comprend, rien qu'à leur attitude, que ce sont là des troupes d'élite, pleines de confiance dans leurs chefs et qui, à l'heure du danger, seront d'autant plus fortes qu'elles sont depuis longtemps rompues à toutes les manœuvres.

Cependant, messieurs, la même loi régit les légions d'infanterie et les compagnies spéciales. Mais, en dehors de la loi, chasseurs éclaireurs et artilleurs ont librement accepté des règlements dont la stricte exécution a fait de ces corps des compagnies d'élite irréprochables sous tous les i apports.

Je crois, messieurs, qu'il y a là une indication précieuse de ce qu'il convient de faire aujourd'hui. Il me semble qu'il y aurait lieu d'augmenter l'effectif des compagnies spéciales ou plutôt de créer, dans chaque bataillon de la garde civique, une compagnie d'élite.

Ces compagnies, armées de carabines, seraient régies par des règlements analogues à ceux des corps spéciaux.

Je suis convaincu, messieurs, que, dans l'état actuel des esprits le gouvernement n'aurait qu'à choisir parmi les hommes qui se présenteraient pour faire partie de ces compagnies, dont la réunion, pour Bruxelles seulement, pourrait constituer un corps de 1,000 à 1,200 hommes. Je suis convaincu que ce chiffre de 1,200 hommes, loin d'être exagéré, pourrait être notablement augmenté, si l'on songe que Bruxelles, qui a une population de 165,000 hommes, ne compte que 5,500 gardes civiques. On comprend aisément, messieurs, quelles ressources on peut trouver de certaines parties de la population qui ne fait point aujourd'hui partie de la garde civique.

Je n'en veux d'autre preuve que la pétition adressée il y a 3 jours à la Chambre par des hommes, qui, rentrés dans leurs foyers, après avoir gagné, par leur conduite et leur travail, les galons de sous-officier dans l'année, demandent au parlement une loi qui leur permette de continuer à défendre la patrie.

La substitution de la carabine même du fusil rayé est indispensable, car c'est surtout comme tirailleurs que ces compagnies pourraient être utilisées en campagne.

Messieurs, je n'insisterai pas plus longuement sur l'organisation de ces compagnies d'élite. C'est là une question digne des méditations les plus sérieuses du ministre de l'intérieur, et à laquelle il importe de donner une solution sans perdre de temps en études stériles, comme le disait lui-même le ministre de l'intérieur dans une circonstance récente.

Dans les communes ou la garde civique est organisée, il est évident qu'il ne faut pas l'affaiblir en créant à côté d'elle de nouveaux corps indépendants, mais il faut donner à la garde civique elle-même tout le développement qu'elle comporte en y introduisant les modifications que l'expérience indique.

Là où la garde civique n'est pas active, tout le monde est d'accord, et le ministre de l'intérieur lui-même, sur les résultats qu’on peut attendre de la formation de sociétés de carabiniers, pouvant se transformer plus tard en compagnies.

De toutes paris des sociétés analogues se sont formées qui n'attendent que le résultat du concours ouvert sur le choix de l'arme qu'on adoptera pour compléter leur organisation. En attendant le résultat du concours, le ministre devrait rendre les mesures législatives ou administratives nécessaires pour régulariser l'organisation de ces compagnies sur lesquelles gouvernement et la commune doivent exercer une action immédiate.

Je crois qu'une disposition excessivement utile serait d'accorder aux (page 119) sociétés ainsi formées des subsides plus au moins importants pour l'établissement des tirs au sein de ces sociétés. On augmenterait ainsi d'une manière notable les établissements de tir où pourraient se former de nombreux tireurs qui perpétueraient ces traditions de patriotisme et de courage dont nos anciennes confréries d'archers et d'arbalétriers firent preuve dans ces grandes luttes des communes contre la féodalité ou le despotisme de l'étranger.

C'est alors que le tir national produira les résultats en vue desquels, pour ma part, je suis disposé à accorder au gouvernement toutes les ressources qu'il jugera utile de nous demander.

C'est alors aussi seulement que nous verrons se constituer en Belgique des milices nationales ayant, comme les milices suisses, l'esprit et les habitudes de la discipline qui font la force des armées permanentes.

Mais, il faut le reconnaître, il nous reste fort à faire pour atteindre ce but. Jusqu'ici confiants dans la foi des traités, chacun dans sa sphère, ministre, savants, artistes, industriels, artisans, nous nous sommes appliqués à augmenter la grandeur, et la prospérité de la patrie. Si l'on jette un coup d'œil en arrière, si l'on compare la Belgique de 1830 à la Belgique de 1860, on éprouve une légitime fierté envoyant le résultat obtenu.

C'est une pensée patriotique, et j'en remercie M. le ministre de l'intérieur, d'avoir mis au concours l'histoire de la civilisation, des sciences, des arts et de l'industrie en Belgique. Il y aura là un utile enseignement pour tout le monde aussi bien pour nos amis que pour ceux qui doutent encore des principes de force et de vitalité que la Belgique, a en elle et de la confiance dans l'avenir qu'elle a le droit de puiser dans son passé.

M. J. Jouret. - Messieurs, dans les observations présentées par l'honorable M. Orts pour développer l'amendement qu'il a déposé avec MM. De Fré et Van Humbeeck, il a fait valoir non seulement la nécessité d'une bonne organisation des tirs nationaux, mais encore d'une bonne organisation de la garde civique. M. Jamar a exprimé des idées à peu près semblables, nos honorables collègues ont bien raison parce que c'est de celle double organisation, qu'il faut bien se garder de séparer jamais, que doit résulter, pour le pays, l'utilité de l'organisation des tirs, au seul point de vue qui leur donne de la valeur, celui de la défense du pays.

Je prie la Chambre de me permettre, à mon tour, quelques observations à ce sujet.

Messieurs, les événements qui se sont récemment accomplis en Europe ont dû, comme le faisait observer, il y a quelques jours, M. le ministre de l'intérieur, jeter notre pays dans de sérieuses préoccupations. Ces préoccupations se sont révélées dans les manifestations les plus ardentes et les plus patriotiques, et après elles, sont venus un grand nombre d'écrits dans lesquels on examine ce que la Belgique a à faire pour fortifier et compléter son système de défense nationale, et soustraire le sol de la patrie aux attaques possibles de l'étranger, de quelque côté qu'elles puissent venir.

Un de ces écrits, messieurs, œuvre éminemment patriotique et nationale, qui a pour titre les Carabiniers belges, a fait une profonde sensation dans le pays, et y a été accueilli avec la sympathie la plus vive par tout ce qui possède un cœur belge.

Cependant je crois qu'il faut se garder de certaines illusions qu'il pourrait faire naître, et qui pourraient produire pour le pays les résultats les plus déplorables.

Je m'explique.

Dans ma profonde conviction et à quelques rares excédions près, il est plus que douteux que l'on puisse attendre des sociétés, serments, confréries d'archers et d'arbalétriers, quelque chose de sérieux pour la défense du territoire. Ces sociétés généralement se sont constituées pour leur amusement et leur récréation, et c'est se faire une étrange illusion que de croire que l'on puisse jamais y trouver un élément sérieux de force pour la défense du pays.

Messieurs, cela a pu exister dans des temps qui ne sont plus ; cela serait impossible à notre époque ; d'autres temps, d'autres mœurs.

L'honorable M. Orts nous a annoncé dans les développements donnés à sa proposition « qu'une foule de sociétés de carabiniers étaient prêtes à se constituer lorsqu'elles seraient arrêtées sur l'arme à laquelle il convient de donner la préférence. »

Je crois, messieurs, qu'il faut nous garder d'illusions qui auraient, selon moi, du moins, pour résultat inévitable de nous laisser désarmés au moment du danger.

Personne ne sera plus heureux que moi, s'il en est ainsi. Mais j'attendrai que ces promesses se soient réalisées et que surtout un certain nombre de sociétés de carabiniers se soient constituées d'une manière sérieuse pour la défense du pays, avant de me féliciter d'un pareil résultat.

Mais ce qui mérite toute notre attention dans ce remarquable écrit des Carabiniers belges, c'est l'idée émise par son auteur, idée éminemment pratique et vraie, qu'en cas de danger, le gouvernement ne doit pas seulement être entouré de troupes régulières et de la Belgique officielle, mais encore de nombreux soldats citoyens qui représenteront la partie vivace et énergique de la population de toutes les provinces.

Mais pour cela, il faut que l'organisation de la garde civique réponde aux besoins de la situation.

C'est l'idée qu'émet l'auteur des Carabiniers belges, et cette partie de son travail me paraît mériter une approbation sans réserve.

« L'organisation actuelle de la garde civique, dit-il, répond-elle aux besoins de la situation ? Pour chacun la réponse sera négative. Dans la plupart des villes, cette institution n'existe que sur le papier ; de plus dans les localités où nous voyons la garde armée et habillée, les éléments qui la composent ne sont pas ceux qu'on destine à entrer en campagne.

« J'ai la conviction que le gouvernement n'a pas attendu mon avis pour s'occuper de cette grave question. Je me permettrai néanmoins de répéter, à ce sujet, une observation que j'ai déjà faite et que je prie les hommes d'Etat qui nous gouvernent de ne pas considérer comme une critique, car j'ai une entière confiance dans leurs talents et dans leur patriotisme. On n'emploiera utilement en campagne que les corps dont les éléments auront été préparés en temps de paix. Pour tout homme pratique, ces paroles sont frappantes de vérité. »

Mais, messieurs, l'organisation de la garde civique, au point de vue de la défense du pays, peut-elle se faire en temps de paix sous l'empire de notre législation ?

La loi du 31 décembre 1830, que citait, il y a quelques jours, l'honorable M. Van Humbeeck, s'exprime ainsi, article 43 :

« En temps de guerre, la garde civique se divise en 3 bans. »

Et la loi du 8 mai 1848, portant réorganisation de la garde civique, dit à son article 3 : « La garde civique su divise en garde active et en garde non active. »

L'article 7 de cette même loi s'exprime ainsi :

« En temps de guerre, la garde civique mobilisée est placée dans les attributions du ministre de la guerre.

« L'organisation de la garde civique mobilisée fait l'objet d'une loi spéciale. »

'On le voit donc, d'après le système de ces lois, nous n'avons pas de premier ban de la garde civique en temps de paix, et on ne peut conséquemment procéder à son organisation.

Je sais, messieurs, que l'on peut dire : « A quoi bon, dans notre position de puissance neutre, position garantie par les traités européens, agiter la question de savoir si nous pouvons jamais être réellement en temps de guerre ou considérés comme nous trouvant en temps de guerre ? Nous n'avons à cet égard nul souci à prendre. »

Je réponds que rien ne serait plus dangereux que de se payer de vaines paroles. Je ne concevrais jamais que dans la position où nous sommes, quelqu'un osât soutenir qu'il faut fermer les yeux et ne rien faire.

Je l'ai dit dans une autre occasion et je le répète avec une nouvelle et plus profonde conviction : les, peuples assez heureux pour posséder l'indépendance et la liberté doivent, s'ils veulent les conserver, être prêts à les défendre toujours au prix de tous les sacrifices.

Je demanderai donc à M. le ministre de l'intérieur s'il ne pense pas qu'il y a quelque chose à faire, quelques changements à opérer à notre législation pour pouvoir, le cas échéant, organiser le premier ban de la garde civique d'une manière sérieuse, quoique dans des limites restreintes, de telle sorte que, combinée avec l'institution des tirs nationaux, cette partie la plus solide et la plus énergique de la garde civique et de la nation puisse constituer, pour les éventualités de l'avenir, un élément de force, qui serait une précieuse sauvegarde pour notre indépendance.

Je ne pense pas que cette organisation du premier ban sur le pied restreint que j'indique entraînerait à de grandes dépenses. Si, comme tout nous en donne l'espoir, notre neutralité continue à être respectée, cette organisation se bornerait à être une mesure de précaution pour l'avenir et laisserait nos jeunes concitoyens dans leurs foyers. Mais elle serait en parfaite harmonie avec le système de défense nationale récemment adopté, auquel elle viendrait donner son complément indispensable.

Elle aurait pour résultat de créer, sur toute la surface du pays, de petits groupes de citoyens jeunes et énergiques, aux mains desquels (page 120) passeraient successivement les armes du modèle adopté que le gouvernement leur confierait, et de faire que, dans un temps donné, tout citoyen belge soit capable de contribuer à la défense de l'indépendance du pays.

Messieurs, rappelons-nous ce qui s'est passé en 1831. S'il a été possible de lancer à la frontière 25,000 jeunes gens prêts à la défendre au prix de leur sang, c'est que le premier ban avait été antérieurement organisé avec soin, armé et instruit autant qu'il était possible de le faire.

Ne perdons pas de vue ce qu'un grand homme de guerre a pu faire en 1810 des milices du Portugal et rappelons-nous que notre système de défense nationale se rapproche à certains égards de ce qui a été fait alors pour sauver ce pays.

En résumé, je crois qu'une forte organisation de la partie de la garde civique jeune et énergique sur un pied restreint et combiné avec la patriotique institution des tirs nationaux est une idée fertile en bon résultats.

Les observations que je viens de faire disent assez que j'adopterai avec empressement l'amendement de MM. Orts, De Fré et Van Humbeeck.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, les questions qui ont été soulevées par les deux honorables préopinants, sont très sérieuses, très graves, et je ne voudrais pas prendre sur moi de les résoudre séance tenante.

Sur le point de départ, sur le but que nous voulons atteindre, je suis complètement d'accord avec les honorables préopinants, comme j'ai été d'accord avec les auteurs de la proposition. On veut fortifier les éléments défensifs du pays et l'on a raison. Mais il ne faut pas que le désir de voir prendre aux éléments défensifs du pays une extension nouvelle fasse fermer les yeux sur les moyens de défense que la Belgique possède.

Or, messieurs, les moyens défensifs de la Belgique sont très considérables. Qu'on ne l'oublie pas, la Belgique peut mettre sur pied une armée de cent mille hommes. La Belgique a su s’imposer de grands sacrifices, pour fortifier sa défense matérielle. Les travaux formidables qui s’exécutent à quelques lieues de la capitale témoignent assez des sentiments qui animent la Belgique.

Outre l'armée qui formera toujours le principal élément de la défense nationale, ne le perdons pas de vue, la Constitution a institué la garde civique. Celle-ci est particulièrement préposée au maintien de l'ordre intérieur. Elle est en même temps une institution patriotique où tous les sentiments nationaux se donnent en quelque sorte rendez-vous et forment un véritable foyer de patriotisme.

Cette garde civique, telle qu'elle est, a été l'objet d'attaques que je trouve injustes. Elle a été quelque peu affaiblie dans son organisation. Mais cet état de choses, j'en reporte à d'autres la responsabilité ; mes honorables collègues voudront bien se souvenir des efforts énergiques et persévérants que j'ai faits au sein de cette Chambre, pour empêcher qu'on n'introduisît dans la loi sur la garde civique des modifications qui devaient avoir pour but de l'énerver.

Mais telle qu'elle est organisée aujourd'hui sous l'empire même de la loi qui devait avoir pour effet d'en affaiblir les ressorts, je soutiens que la garde civique offre encore des garanties rassurantes pour le pays. Y a-t-il moyen de fortifier davantage l'institution ? Je le crois. Il y a des moyens moraux, il y a des moyens administratifs. Ces moyens ont été mis largement en action.

Nous pensons que la seule institution du tir national a fait, pour introduire des améliorations dans la garde civique, pour y entretenir des instincts énergiques, pour y introduire des sentiments d'ordre et de discipline, plus que toutes les lois ne pourraient faire.

Faut-il, dans l'organisation même de la garde civique, introduire des modifications qui fortifient l'institution ? Cela est possible. Mais tous les moyens proposés ne me paraissent également pas bons. Ainsi on met en avant l'augmentation du nombre des compagnies spéciales. Je suis d'avis qu'il serait utile d'augmenter le nombre de celles qui, soumises à un régime plus sévère, font preuve aussi d'un esprit de discipline plus sérieux, et fait preuve aussi d'une instruction plus solide. Mais de quelle manière parviendra-t-on à former des compagnies spéciales ? Prendra-t-on, ainsi que je l'ai entendu dire tout à l'heure, prendra-t-on dans un bataillon ce qu'il y a de plus jeune, de plus instruit, de mieux élevé, si je puis m'exprimer ainsi, pour en former une compagnie d'élite, de manière à ne plus laisser dans les autres compagnies que le caput mortuum de la garde ? Je n'admets pas ce système et je suis d'accord à cet égard avec tous les chefs de la garde civique, C'est ainsi que récemment encore j'ai reçu de la garde civique de Bruxelles une pétition couverte d'un grand nombre de signatures où l'on se prononce fortement contre un tel système. Il ne faut pas, messieurs, pour se donner la satisfaction de former un certain nombre de compagnies spéciales, énerver, annihiler en quelque sorte tout le reste de la garde civique.

Peut-être, messieurs, y aurait-il un moyen ; je ne fais que l'indiquer à la Chambre, ce serait d'admettre tous les nouveaux entrants, tous les jeunes gens qui ont atteint l'âge auquel on doit le service de la garde civique, de les admettre dans les compagnies spéciales d'où ils passeraient dans les autres compagnies après quelques années.

Ces compagnies spéciales seraient soumises à des règlements plus sévères, et appartenant nécessairement au premier ban, elles seraient plus instruites et plus aptes à faire le service de campagne si elles y étaient appelées.

En ce qui concerne les compagnies spéciales, dès 1858, à la suite des élections de la garde civique, j'ai adressé une circulaire à toutes les villes où la garde civique était en activité, pour attirer leur attention sur l'utilité de créer des compagnies spéciales et notamment des compagnies d'artillerie. Je dois dire que mon appel n'a pas été généralement entendu ; ainsi dans la capitale on n'a pas augmenté le nombre des compagnies spéciales.

M. Orts. - On a au contraire diminué le nombre de ceux qui en font partie et c'est le gouvernement qui l'a fait. Il y a un arrêté royal d'après lequel l'effectif des compagnies spéciales ne peut pas excéder le vingtième de la garde.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il y a des villes où il existe deux compagnies spéciales.

Je ne m'oppose pas à ce qu'à Bruxelles il y ait deux compagnies d'artilleurs et de chasseurs-éclaireurs.

Partout où, dans la garde civique, il se formera des compagnies spéciales dans de bonnes conditions, je ne demanderai pas mieux que de les autoriser.

Quant aux compagnies spéciales en dehors de la garde civique, j'ai, dans une occasion solennelle récente, fait connaître la pensée du gouvernement à cet égard. Il existe dans le pays un certain nombre de sociétés libres de tireurs. Si, de ces sociétés, il peut sortir des compagnies sérieuses, bien organisées, se soumettant à des règlements au moins égaux à ceux de la garde civique, je ne demanderai pas mieux que de seconder la création de ces compagnies spéciales. Messieurs, nous devons commencer par tirer parti des éléments que nous possédons et notamment de la garde civique.

Mais ce qui manque encore, dit-on, à la garde civique, ce sont les armes. Autre cause de l'affaiblissement de l'institution.

Jusqu'ici les armes distribuées à la garde civique ont suffi à son service. Sans doute le perfectionnement qui s'est introduit dans l'armement général de tous les pays exige aussi celui de l'armement de notre garde civique, et cela se fera avec le temps.

Le département de la guerre s'est occupé d'abord de la transformation de toutes des armes qui concernent l'armée. Sous ce rapport, un modèle est arrêté, et plus que cela, ce modèle est exécuté : un très grand nombre de fusils rayés ont été fabriqués et le sont encore chaque jour pour l'armée.

En dehors des fusils rayés, faut-il une autre arme pour la garde civique ? faut-il une carabine qui ne serait pas le fusil rayé, qui serait même d'un autre calibre ? Tout le monde reconnaîtra la haute utilité d'avoir le même calibre, que ce soit le fusil ou que ce soit la carabine.

Ces questions devront être examinées et résolues par la commission qui appréciera les résultats du concours ou par toute autre commission spéciale.

Mais ne perdons pas de vue que du jour où une partie de la garde civique serait appelée à faire campagne avec l'armée, il faudra presque nécessairement qu'elle soit armée de la même manière.

Si l'on adoptait deux systèmes d'armement, un armement pour l'armée, et celui-là est adopté et n'est pas à changer pour le moment, et un système de carabine pour la garde civique, il n'y aurait pas là un grand inconvénient en temps de paix ; mais en temps de guerre, je le répète, il y aurait des inconvénients pour le cas où la garde civique se mêlerait à l'armée avec un armement différent.

Voilà donc un point qui sera à examiner. Faudra-t-il un armement généralement uniforme ? Ou faudra-t-il adopter un modèle spécial pour la garde civique ?

(page 121) Le gouvernement s'est déjà occupé de l'examen de ces questions. Pendant même le tir national, j'avais engagé la commission du tir, à laquelle se serait joint le comité qui s'est chargé d'étudier ces questions, de rechercher quelle serait la meilleure arme de guerre.

Cette commission n'a pas encore terminé son travail ; elle s'occupe de l'examen d'un certain nombre d'armes qui lui sont soumises comme échantillons. Je me propose, à la suite de ce vote, de fortifier la commission, de manière qu'elle offre toutes les garanties au point de vue des lumières et de l'expérience. Lorsque la commission aura terminé son travail et que le gouvernement aura une opinion suffisamment mûrie, nous prendrons alors un parti.

Le concours pourra avoir un inconvénient, de retarder encore l'époque où le gouvernement sera mis à même de prendre un parti.

Déjà aujourd'hui nous possédons un assez grand nombre de modèles divers pour qu'on puisse se décider. Si maintenant on veut faire un appel à tous les armuriers et attendre le résultat d'un concours, ce sera un ajournement de plusieurs mois.

Dans d'autres pays on s'est occupé de la recherche de la meilleure arme. J'ai ici le rapport qui a été fait tout récemment par une commission spéciale nommée dans les Pays-Bas. Là, on s'est livré à l'étude d'une grande variété d'armes de guerre, l'on a comparé leur valeur relative, et l'on a fait un rapport que j'ai sous les yeux, dont je me dispense de donner lecture à la Chambre, mais que je pourrai communiquer à la commission.

Les honorables auteurs de l'amendement ont proposé 10,000 fr. pour un concours. Je ne sais pas si cette somme n'est pas trop considérable. Nous voulons en faire un emploi utile ; mais dans le cas où l'on parviendrait à s'entendre sur le meilleur modèle à adopter, avec les éléments que nous possédons, sans faire de concours, je demande que l'amendement soit rédigé de telle manière que le crédit puisse être appliqué au tir national, pour le cas où l'on n'en ferait pas usage pour le concours.

Je pense que nous sommes d'accord sur ce point. De cette façon, le concours serait facultatif, mais je m'engage à prendre toutes les mesures nécessaires pour arriver à un bon résultat le plus promptement possible.

Messieurs, la Chambre voudra bien me pardonner, si je ne lui présente pas à l'heure même un système complet en réponse aux diverses propositions qui ont été faites.

Les questions qui ont été soulevées dans cette enceinte méritent au plus haut point l'intérêt du gouvernement et du pays, et l'on a grandement raison de les agiter ; mais il est plus difficile de les résoudre que de les agiter.

Je crois avoir en général répondu à ce qu'on pouvait attendre du gouvernement dans cette partie de mon administration. Je continuerai d'y donner des soins assidus et sérieux, et je demande que par une impatience qui peut s'expliquer, mais qui aurait aussi un grave inconvénient, on ne jette pas la pierre à ce qui existe aujourd'hui ; qu'on s'abstienne de critiquer, par exemple, l'organisation de la garde civique, son efficacité comme institution ; je crois que depuis quelque temps et notamment depuis l'établissement du tir national, la garde civique a pris un caractère nouveau, s'est pénétrée beaucoup plus encore de ses devoirs, et a pris beaucoup plus son rôle au sérieux.

Eh bien, il faut entretenir la garde civique dans ces excellentes dispositions. Il faut l'y encourager et il ne faut pas lui dire qu'elle est sans force, qu'elle est mal armée et qu'elle est mal organisée.

Il ne faut pas le dire parce que cela jetterait un fâcheux découragement dans ses rangs ; il ne faut pas le dire parce que ce serait contraire à la vérité.

Je rends hommage aux progrès de la garde civique, je rends hommage aux progrès de son instruction, à l'esprit qui l'anime.

Reste, messieurs, l'armement qui devra nécessairement être amélioré ; ceci est l'œuvre du temps. Il y aura une augmentation de dépense ; mais je ne doute pas que le pays ne supporte facilement un accroissement de dépenses lorsqu'il s'agira d'améliorer, de fortifier ses moyens de défense.

Si l'on s'arrêtait à l'idée de n'avoir qu'une seule arme pour la garde civique et pour l'armée, la solution deviendrait beaucoup plus simple sous tous les rapports, car avant quelques années les armes fabriquées par le département de la guerre pourraient être distribuées à la garde civique.

Si au contraire le département de l'intérieur est chargé de faire fabriquer des armes spéciales, il faudra demander des crédits spéciaux, faire des approvisionnements spéciaux, et je crois que nous rencontrerions plus d'obstacles et plus de lenteurs.

Quoi qu'il en soit, j'espère que la session actuelle ne se passera sans qu'il ait été pris un parti définitif quant à l'armement de la garde civique et des compagnies spéciales.

(page 131) M. Orts. - Je remercie M. le ministre de l'intérieur des paroles bienveillantes qu'il a eues pour le but que se sont proposé les auteurs de l'amendement en le soumettant à l'appréciation de la Chambre.

Je suis heureux de constater que le gouvernement est disposé, comme du reste l'honorable ministre de l'intérieur l'avait fait pressentir dans une circonstance récente, au mois de septembre dernier, que le gouvernement est disposé à faire tout ce qui sera nécessaire pour utiliser au profit de l'amélioration de nos moyens de défense nationale, l'incontestable élan qui anime nos populations depuis quelques mois.

M. le ministre de l'intérieur aura notamment un moyen de prouver à l'égard de la capitale, qu'il a indiquée tout à l'heure, ses bienveillantes intentions, car il n'est pas sans savoir, je pense, que le conseil communal de Bruxelles, à l'unanimité de ses membres parmi lesquels figurent deux des quatre colonels commandant les légions de la garde civique de Bruxelles, demande une augmentation des corps spéciaux et la création de nouvelles compagnies spéciales dans les bataillons ordinaires d'infanterie de la garde civique, de sorte que si la capitale a eu jamais, ce que je ne crois pas, le tort de refuser d'augmenter le nombre de ses compagnies spéciales, elle pourra prouver qu'elle s'en repent aujourd'hui.

Je crois du reste ce tort parfaitement imaginaire ; l'accusation de M. le ministre de l'intérieur repose sur des informations erronées. Les corps spéciaux de Bruxelles se développaient depuis 1848 par une augmentation successive du nombre des membres de la compagnie d'artillerie qui n'est, après tout, qu'une bonne compagnie d'infanterie et de celle des chasseurs-éclaireurs, et je le sais par expérience personnelle, car depuis 25 ans j'ai l'honneur d'appartenir à l'une de ces compagnies.

A dater de la mise en vigueur de la loi de 1853 sur la garde civique, loi à l'égard de laquelle je partage tous les sentiments exprimés par M. le ministre de l'intérieur en ce sens que je la crois détestable et que j'ai voté contre elle, je sais, dis-je, que depuis cette époque le gouvernement a insisté, non pour favoriser la tendance des corps spéciaux de Bruxelles à se développer, mais au contraire pour arrêter cette tendance, et notamment la compagnie d'artillerie de la garde civique, qui comptait 163 membres s'est vu amputer 15 membres, par voie d'autorité.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Pas par moi. Au contraire en 1858 j'ai demandé moi-même l'augmentation des compagnies spéciales.

M. Orts. - C'est possible pour 1858 ; je n'insiste pas. Du reste, puisque vous voulez faire le contraire aujourd'hui, je ne vous tiens pas rancune, mais je me borne à constater que ce n'est pas la faute de Bruxelles si les corps spéciaux ne s'y sont pas accrus.

Toutefois la responsabilité de la mesure ne peut retomber entière sur votre prédécesseur, M. le ministre de l'intérieur. Si votre prédécesseur, comme vous l'affirmez, a amputé les 15 membres de la compagnie d'artillerie de Bruxelles, dont je parlais, et fait la même opération sur la compagnie des chasseurs-éclaireurs, c'est tenant à la main un arrêté royal daté de juin 1848, et contre-signé Rogier, lequel limite au 40ème de l'effectif de la garde totale le chiffre de chaque compagnie spéciale.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Cela a été changé en 1858.

M. Orts. - C'est armé de l'arrêté royal de 1848 qui est encore en vigueur, arrêté que vous n'avez pas retiré, et dont le conseil communal de Bruxelles demande le retrait, qu'on a restreint le développement des corps spéciaux de la garde civique de Bruxelles.

Du reste, c'est là de l'histoire ancienne, et il n'est pas nécessaire d'insister.

M. le ministre de l'intérieur demande maintenant de pouvoir faire un autre emploi du crédit que notre amendement propose de lui allouer. M. le ministre semble croire que notre amendement irait directement à l'encontre de son but en ce sens qu'il retarderait le choix d'une arme à indiquer aux sociétés de tir du pays et aux corps de la garde civique qui veulent se servir d'une arme nouvelle, plutôt que d'accélérer ce choix. Vous exigez un concours, nous dit-on ; un concours est un retard.

Je ne savais pas M. le ministre de l'intérieur si avancé dans ses expériences quant au choix d'une arme-type à indiquer aux sociétés de tir et aux corps spéciaux.

Il est évident que si M. le ministre de l'intérieur, entouré de tous les renseignements, peut dès demain indiquer un type d'arme de guerre aux sociétés de tir et aux compagnies spéciales, dans la pensée de notre amendement nous aurions tort d'insister pour un concours désormais sans objet.

Un concours a été demandé par nous parce que nous croyions que le gouvernement ne s'occupait pas de la question.

Nous étions autorisés à le croire, en présence des nombreuses demandes adressées au ministère de l'intérieur, aux administrations locales et provinciales, dans le but de connaître si le gouvernement pouvait désigner une arme-type, demandes restées sans réponse.

M. le ministre de l'intérieur veut-il se décider dès demain ? Nous ne demandons pas mieux et nous consentons volontiers à ce qu eles 10,000 fr. soient affectés à une autre destination, pourvu qu'il soit bien entendu qu'une arme-type sera immédiatement désignée.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Immédiatement ! On ne peut dire cela.

M. Orts. - Soit, mettons le plus tôt possible, mais enfin si dans un bref délai une arme-type peut être désignée et qu'il ne soit pas nécessaire de recourir à des concours ordinairement très lents, nous ne demandons pas mieux, si la Chambre y consent, que d'affecter à une autre destination les 10,000 fr. offerts.

Seulement nous demandons qu'ils soient consacrés à favoriser, dans le sein des sociétés d'archers et d'arbalétriers qui veulent se transformer, substituer à leurs jouets des armes sérieuses, cette transformation ; nous prions M. le ministre de vouloir employer cette somme en subsides aux sociétés de carabiniers pour les aider à acheter des armes qui resteraient la propriété des administrations communales ou des sociétés elles-mêmes.

En définitive que veut le gouvernement, que voulons-nous et que doit vouloir la Chambre ?

Que l'usage de l'arme de guerre se répande le plus possible dans le pays, non seulement dans les rangs de la garde civique organisée, mais plus encore dans les rangs de cette population qui serait appelée un jour, dans une mesure plus large que la garde civique aujourd'hui organisée, concourir avec l'armée à la défense nationale par la mobilisation. Ce n'est pas, messieurs, dans la garde civique telle qu'elle existe maintenant que le gouvernement trouvera, au jour du danger, les ressources exceptionnelles que la population civile doit fournir pour assurer à l'armée un concours sur lequel l'organisation de la défense nationale compte et doit compter.

La défense nationale n'est pas le droit exclusif de la garde civique ; elle n'est pas davantage le droit exclusif de l'armée. La défense du pays, c'est le droit du pays tout entier.

La population à laquelle on devra s'adresser en cas de mobilisation, est ailleurs que dans la garde civique active d'aujourd'hui. Cette population fournirait une année de 100,000 combattants de l'âge de 21 à 35 ans.

En effet, tous les calculs relatifs à la mobilisation de la garde civique ont été basés sur cette donnée que la mobilisation amènerait sous les armes un cinquième de la population civile qui, par son âge, est apte à faire partie de la garde civique. Or, l'ensemble des Belges qui peuvent faire partie de la garde civique, des Belges âgés de 21 à 50 ans, s'élève à peu près à 50,000 hommes ; on trouverait donc là, en dehors de l'armée, une force de 100,000 hommes disponible en cas de mobilisation.

Or, la garde civique organisée, compte actuellement à peu près 36,000 hommes dont un cinquième environ, d'après la même proportion, serait propre à entrer dans les cadres de la garde civique mobilisée. Soit six mille hommes. Eh bien, il est de votre intérêt, il est de l'intérêt le plus sérieux du pays que les 94,000 hommes restants sachent se servir d'une arme de guerre le jour où notre patrie serait menacée. Qu'en temps de paix ces hommes puissent apprendre à manier utilement une carabine, voilà ce que nous voulons. Et- e jour où le ministre de la guerre aura besoin d'eux comme gardes mobilisés, il ne leur faudra pas une semaine pour faire de bons et habiles soldats, pour tenir avec honneur le rang que la loi et l'amour de la patrie assignent aux citoyens à côté de l'armée nationale.

(page 121) M. Allard. - Je demande la parole, non pas pour entrer dans le fond du débat, mais uniquement pour dire que, selon moi, si l'on fait un concours, le gouvernement devrait se réserver le bénéfice de l'invention qui aura obtenu la prime. Je ne comprendrais pas, quant à moi, que le lauréat, après avoir obtenu la prime offerte aux concurrents, conserxvâ encore le droit de prendre un brevet et de conserver en monopole l'exploitation de son invention.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si un fabricant d'armes produisait un chef-d'œuvre, il est évident qu'il ne céderait pas la propriété de son invention pour une prime de 5,000 francs.

M. Allard. - Il me semble que si un fabricant obtient 8,000 à 10,000 francs à titre de prime pour l'invention d'une arme reconnue préférable à toute autre, il ne doit pas lui être permis de prendre, le lendemain, un brevet qui lui assure l'exploitation exclusive de son invention.

M. Orts. - Je ne demande la parole que pour présenter une simple observation à l'honorable M. Allard. Il est incontestable que, si vous voulez dépouiller de son invention le fabricant de la meilleure aime à mettre en mains de toute la population, ce n'est pas 10,000 francs, mais 100,000 francs qu'il faut porter au budget ; peut-être ne sera-ce pas encore assez.

M. Allard. - Mais enfin, si l'on adoptait l'arme de cet inventeur, il n'y aurait donc que lui qui pourrait confectionner toutes les armes de ce modèle qui seraient nécessaires à la garde civique ; et cela nonobstant la prime que lui aurait accordée le gouvernement ! J'avoue que cela me paraît exorbitant et il me semble que, dans les conditions du concours, le gouvernement devrait faire certaines réserves à cet égard.

M. Guilleryµ. - L'observation de l'honorable M. Allard me paraît très juste.

Le gouvernement choisit une arme-type ; il la proclame indispensable ; cette arme doit donc être généralement adoptée.

On laisse à l'auteur le monopole de l'exploitation de son invention : cette position est évidemment anomale. Ne faut-il pas que le gouvernement en couronnant le lauréat, en rendant son invention indispensable, prenne des précautions pour s'en assurer la propriété ? Les deux choses marchent évidemment de pair, et il importe que, d'une manière quelconque, le gouvernement, trouve avant le concours, la solution de ia difficulté qui est soulevée en ce moment. En d'autres termes, s'il y a invention et dès lors lieu à brevet, le gouvernement ne peut se dispenser d'acquérir les droits d'auteur.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - S'il y a un concours, il y sera nécessairement attaché des conditions auxquelles les concurrents devront se soumettre pour être admis à concourir. Maintenant, en supposant que le concours produise une arme tout à fait exceptionnelle, qui réunisse tous les suffrages, qui présente plus de valeur qu'aucune autre, il y aura à examiner si, en indemnisant convenablement le propriétaire, on ne pourrait pas obtenir la propriété de cette arme. Mais si un fabricant fait une grande invention, ce n'est pas pour 8,000 à 10,000 francs qu'il consentira à en abandonner la propriété.

MpVµ. - Je mets aux voix l’amendement de MM. Orts, Van Humbeeck et De Fré.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - a faculté de transfert est-elle consentie ?

M. Orts. - Oui, pourvu que ce ne soit pas là une cause de retard à l'adoption d'une mesure définitive. M. le ministre ne voudrait-il pas limiter cette faculté pour le cas où l'emploi du crédit n'aurait pas été fait dans l'année ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - ertainement. Mon but, c'est de faire profiter le tir national de la somme dont on n'aurait pas eu besoin.

MpVµ. - Voici donc comment l'article serait libellé : « Frais de concours et d'expériences pour arrêter un type d'arme de (page 122) guerre uniforme, à indiquer aux sociétés de tir et aux compagnies spéciales de la garde civique, avec faculté de transfert au paragraphe précédent pour le cas où la somme ne serait pas entièrement absorbée par les frais de concours et d'expérience : fr. 10,000. »

- Cet amendement est adopté.

Chapitre XIII. Industrie

Article 70

MpVµ. - Nous passons à l'article 70. - Je viens de faire demander à l'imprimerie quand les pièces relatives aux ateliers d'apprentissage pourraient être distribuées. Elles le seront ce soir ; la Chambre veut-elle renvoyer la discussion à jeudi prochain ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je dois faire remarquer que l'article relatif aux ateliers d'apprentissage se trouve amendé par la diminution de 6,000 francs que j'ai proposée en reportant cette somme à l'enseignement industriel. Ne pourrait-on pas voter l'article amendé, sauf à y revenir au second vote. De cette manière, on n'ajournerait pas le vote de tout le budget jusqu'à jeudi.

M. Wasseigeµ. - Il me paraît qu'il s'agit d'une affaire assez importante pour ne pas procéder comme le propose M. le ministre de l'intérieur. Ce serait un précédent singulier de voter sans discussion au premier vote une disposition pour reporter toute la discussion au second vote.

C'est une question très controversée que celle des ateliers d'apprentissage ; elle rencontre des adversaires qui veulent faire prévaloir un principe opposé à celui de l'honorable ministre, qui ne veulent pas de la permanence du crédit, qui demandent au contraire que la somme allouée aille s'affaiblissant, et diminue de jour en jour jusqu'à sa complète disparition.

Un vote sans discussion sur une semblable question pour y revenir ensuite, serait un précédent défavorable aux adversaires du crédit ; je pense qu'il faut laisser la question entière et rie la voter qu'après l'avoir discutée d'une manière approfondie. Je demande qu'on remette à jeudi la discussion de l'article 70.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne veux pas escamoter l'article, puisque je demande qu'on le réserve ; le vote d'aujourd'hui ne décide rien, car il ne sera émis que sous la réserve de revenir sur toute la discussion.

Si une nouvelle réduction, voire même la suppression du crédit est proposée, vous avez le droit de la voler, puisque l’article n'aura été adopté au premier vote qu'avec un amendement. Je demande donc à la Chambre de ne pas tenir le vote du budget suspendu deux jours encore pour un seul article amendé.

M. Wasseigeµ. - Si le vote ne signifie rien, comme le dit M. le ministre de l'intérieur, je ne vois pas pourquoi on l'émettrait. Que le budget de l'intérieur soit voté quelques jours plus tôt ou quelques jours plus tard, je ne vois pas ce que nous gagnerons à cela ; il n'y a pas péril en la demeure, le sort de la Belgique ne dépend pas de ce que le budget de l'intérieur soit voté aujourd'hui plutôt qu'un autre jour.

On aura beau dire, une question n'est plus entière quand el'e a été résolue par un premier vote comme le propose M. le ministre de l'intérieur, on a beau se réserver de la reprendre à un second vote ; le premier vote émis est déjà un préjugé. Je persiste à demander que le vote de l'article 70 n'ait pas lieu aujourd'hui et qu'il soit renvoyé à jeudi.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne comprends pas l'opposition que l'honorable membre persiste à faire à ma proposition, c'est une véritable chicane après la déclaration que je viens de faire. En adoptant cette proposition la Chambre gagnera de ne pas ajourner le vote du budget de l'intérieur à samedi. Si vous ne votez l'article 70 que jeudi, comme il faut deux jours d'intervalle entre le premier vote et le second, vous ne pourrez avoir le second vote que samedi prochain.

J'insiste sur ma proposition, eile ne présente aucun inconvénient, tous les droits étant réservés. J'ai des raisons très sérieuses de croire que l'article 70 passera cette année comme les autres années à une très grande majorité. Si après cela l'opinion de M. Wasseige est partagée par un grand nombre de ses amis, je ne veux pas faire de cela une grosse question, la Chambre décidera.

M. B. Dumortier. - Messieurs, ce que demande M. le ministre de l'intérieur est parfaitement conforme au règlement.

En effet, l'article 45 porte : Lorsque des amendements auront été adoptés ou des articles d'une proposition rejetés, le vote sur l'ensemble aura lieu dans une autre séance.

« Dans la seconde seront soumis à une discussion et à un vote définitif les amendements adoptés et les articles rejetés. Il en sera de même des nouveaux amendements qui seraient motivés sur cette adoption et ce rejet. »

Il est donc évident qu'un article amendé doit être remis en discussion au second vote.

M. Wasseigeµ. - Il n'est pas question de contester à la Chambre le droit de réserver un article au premier vote, pour y revenir au second vote ; je n'ai jamais contesté ce droit, mais c'est introduire un singulier système que de voter un article avant la discussion, pour le discuter après, c'est un système complètement nouveau ; pour éclairer la discussion on ordonne l'impression de documents, on décide qu'on ne discutera pas un article à son rang d'ordre, et aujourd'hui que les pièces vont nous être distribuées, que nous pourrons nous éclairer, on déciderait qu'on votera avant d'avoir pu examiner et qu'on discutera après.

C'est lorsque M. Tack a fait sa proposition d'ajournement que M. le ministre aurait dit : Commençons par voter l'article ; comme il y a un amendement, nous pourrons le discuter au second vote.

Aujourd'hui, je le répète, que nous sommes sur le point de recevoir les documents que nous avons jugés nécessaires pour nous éclairer, voter sans discussion serait un système trop bizarre pour que je puisse m'y rallier.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il n'y a rien dans ma proposition qui puisse la faire qualifier de bizarre ; s'il y a ici quelque chose de bizarre, c'est le raisonnement de l'honorable membre. Dix fois il est arrivé à la Chambre d'ajourner une discussion au second vote, je fais appel au souvenir de tous les membres ; très souvent on a voté un article amendé sans rien préjuger, se réservant de le discuter au second vote.

Voilà les antécédents ; l'opinion de l'honorable M. Wasseige est donc contraire aux précédents parlementaires. Si je voulais surprendre la Chambre, enlever son vote, je comprendrais son opposition, mais on est d'accord de réserver entièrement la discussion.

M. Wasseigeµ. - Pourquoi n'avez-vous pas fait cette observation quand M. Tack a proposé d'ajourner la discussion de l'article ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Voici pourquoi ; parce qu'alors jè croyais que les documents seraient imprimés et distribués avant la fin de la discussion du budget. Je ne demandais pas mieux que.de laisser à chacun le temps de s'éclairer. Il se trouve maintenant que ces documents ne sont pas distribués ; mais ils le seront ce soir : d'ici à jeudi la Chambre aura le temps de les examiner, nous discuterons jeudi prochain aussi longuement, aussi profondément qu'on le jugera utile ; rien n'est préjugé, le vote n'engage pas la Chambre, c'est un vote provisoire.

Le Sénat se plaint souvent de n'être pas saisi de projets de loi, surtout des budgets, assez à temps pour pouvoir les examiner avant le 1er janvier.

Eh bien, il importe que nous convoquions le Sénat, mais avant de convoquer le Sénat, il faut que nous ayons la certitude de lui apporter quelques projets votés par la Chambre ; sinon, le Sénat pourra trouver singulier que nous le convoquions avant que les budgets aient été votés par la Chambre.

Voilà notre unique raison, et je ne pense pas qu'on puisse insister dans son opposition, quand on fait une proposition aussi simple et qui se justifie d'ailleurs par un très grand nombre de précédents.

MpVµ. - M. Wasseige persiste-t-il dans son opposition ?

M. Wasseigeµ. - Je m'en rapporte à la décision de la Chambre, mais je crois avoir raison, et j'insiste.

- La proposition de voter provisoirement l'article 70, sauf à y revenir au second vote, est mise aux voix et adoptée.

« Art. 70. Subsides aux ateliers d'apprentissage, et écoles manufactures ; distribution de métiers, etc., charge extraordinaire : fr. 60,000. »

MpVµ. - M. le ministre de l'intérieur a proposé de réduire cet article de 6,000 francs, ce qui fixe le chiffre à 54,000 francs.

- Ce chiffre est adopté.

Chapitre XV. Instruction publique. Enseignement supérieur

Article 79

« Art. 79. Traitements des fonctionnaires et employés des deux universités de l'Etat : fr. 638,590. »

MpVµ. - M. le ministre a demandé que ce crédit soit augmenté de 1,400 fr., ce qui le porterait à 639,990 fr.

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

MpVµ. - M. le ministre a proposé d'ajouter à l'article 79 un deuxième paragraphe, ainsi conçu :

(page 123) « Dépenses pour subvenir à l’augmentation des pensions à accorder aux professeurs de l'enseignement supérieur qui étaient en fonctions avant le 21 juillet 1844, et qui sont déclarés émérites, en exécution des articles 83, 84 et 85 de l'arrêté du 24 septembre 1816 : fr. 500. »

- Ce paragraphe est adopté.

Chapitre XVII. Enseignement primaire

Article 99

« Art. 99. Traitements de disponibilité pour des professeurs des écoles normales de l'Etat : fr. 3,500. »

MpVµ. - M. le ministre a proposé d'augmenter ce chiffre de 2,470 fr., ce qui porte le crédit à 5,970 fr.

- L'article, ainsi amendé, est adopté.

Chapitre XVIII. Lettres et sciences

Article 102

« Art. 102. Subsides et encouragements ; souscriptions, voyages et missions littéraires, scientifiques ou archéologiques ; fouilles et travaux dans l'intérêt de l'archéologie nationale ; sociétés littéraires et scientifiques ; dépenses diverses ; secours à des littérateurs ou savants qui sont dans le besoin ou aux familles de littérateurs ou savants décédés ; subsides aux dames veuves Weustenraad, Van Ryswyck, Vankerckhoven et Gaucet ; subsides à des élèves de l'enseignement supérieur libre ; prix quinquennaux fondés par les arrêtés royaux du 1er décembre 1845, du 6 juillet 1851 et du 25 novembre 1859 ; publication des Chroniques belges inédites, table chronologique des chartes, diplômes, lettres patentes et autres actes imprimés, concernant l'histoire de la Belgique ; publication de documents rapportés d'Espagne ; exécution d'une description géographique et historique du royaume de Belgique ; charge ordinaire : fr. 92,900.

« Charge extraordinaire : fr. 12,400. »

MpVµ. - M. le ministre de l'intérieur a proposé de substituer le nom de la veuve Denis Sotiau à celui de la veuve Weustenraad, et d'ajouter au libellé de cet article : « Bureau de paléographie », sauf à effacer ces mêmes mots au libellé de l'article 112.

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Article 112 à 115

« Art. 112. Archives du royaume. Bureau de paléographie ; personnel ; charge ordinaire : fr. 35,650.

« Charge extraordinaire : fr. 1,800. »

M. le ministre de l'intérieur a proposé d'effacer de cet article les mots : « Bureau de paléographie ».

- L'article, ainsi modifié, est adopté.


« Art. 113. Archives du royaume. Matériel ; charge ordinaire : fr. 3,500.

« Charge extraordinaire : fr. 1,000. »

MpVµ. - Le gouvernement demande de transférer de l'article 115 à l'article 113 une somme de 1,200 fr. comme charge permanente et d'ajouter au libellé de l'article après le mot : « matériel », ceux- ci : « atelier de reliure pour la restauration des documents » ; le chiffre des charges permanentes serait ainsi de 4,700 fr. »

- L'article, ainsi modifié, est adopté.


« Art. 115. Frais de publication des Inventaires des archives ; frais de recouvrement de documents provenant des archives tombés dans des mains privées ; frais d'acquisition ou de copie de documents concernant l'histoire nationale ; dépenses de matériel des dépôts d'archives dans les provinces ; subsides pour le classement et pour la publication des inventaires des archives appartenant aux provinces, aux communes, aux établissements publics ; dépenses diverses relatives aux archives. Recouvrement d'archives restées au pouvoir du gouvernement autrichien ; frais de classement, de copie et de transport, etc. ; charge ordinaire : fr. 7,000.

« Charge extraordinaire : fr. 7,000. »

MpVµ. - Le chiffre des charges ordinaires doit être réduit de 1,200 fr., et fixé ainsi à 5,800 fr.

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Chapitre XIX. Beaux-arts

Article 121

« Art. 121. Conservatoire royal de musique de Bruxelles. Dotation de l'Etat destinée, avec les subsides de la province de Brabant.et de la ville de Bruxelles, à couvrir les dépenses tant du personnel que du matériel : fr. 55,340. »

MpVµ. - M. le ministre propose d'ajouter un deuxième paragraphe à cet article, ainsi conçu :

« Premier tiers de la part du gouvernement dans les frais d'acquisition d'un grand orgue ; charge extraordinaire et temporaire, 13,000 fr. »

- L'article, ainsi modifié, est adopté.

Article 127

« Art. 127. Entretien du monument de la place des Martyrs, des jardins et des arbustes ; salaire des gardiens. Frais de surveillance et d'entretien de la colonne du Congrès. Traitement du personnel préposé à la surveillance et à l'entretien du palais de la rue Ducale. : fr. 4,680. »

MpVµ. - Le gouvernement propose d'ajouter un paragraphe à cet article comme suit :

« Frais d'entretien des locaux du palais de la rue Ducale ; frais de surveillance du musée moderne à établir audit palais ; frais relatifs au jardin (salaire du jardinier et entretien du jardin) ; chauffage des locaux habités par les concierges, 4,000 fr. Ce qui porte le total de l'article à 8,680 francs. »

- La section centrale adopte cette proposition.

M. Jamar. - Les expositions triennales des beaux-arts ont eu lieu à diverses reprises dans des locaux provisoires qui présentaient de très grands inconvénients. Le plus sérieux de ces inconvénients'était, selon moi, de distraire, du montant de la recette de l'exposition, la somme nécessaire pour combler le déficit qui existait entre le coût de ces constructions provisoires et le subside accordé par le gouvernement. La somme affectée aux encouragements et aux achats se trouvait donc forcément réduite, mais les artistes se consolaient aisément des pertes qu'ils subissaient par la manière dont leurs œuvres étaient exposées.

Dans ces constructions provisoires l'air et la lumière, distribués avec une intelligente profusion, faisaient admirablement ressortir les tableaux et les sculpteurs et les artistes étrangers emportaient le meilleur souvenir de l'hospitalité artistique de la Belgique. Je regrette que la dernière exposition qui a été faite au palais Ducal n'ait pas eu lieu dans les mêmes conditions. Il y a eu, messieurs, de sérieux mécompteseit des mécontentements très légitimes de la part d'artistes d'un très grand mérite dont les œuvres avaient été exposées d'une manière très fâcheuse. »

Ils ont été blessés cette fois, non plus seulement dans leurs intérêts, mais surtout dans leur légitime amour-propre d'artiste ; ils ont vu compromettre, faute d'espace et de lumière, des œuvres qui, exposées d'une manière plus convenable, eussent valu à leurs auteurs les applaudissements de la foule.

Je n'ai jamais mieux compris qu'en parcourant les salles de la dernière exposition, les considérations si justes que contenait le remarquable rapport de notre honorable collègue M. Ernest Vandenpeereboom, sur la nécessité d'édifier un palais des beaux-arts, dans la capitale d'un pays sur lequel l'art projette un si glorieux rayonnement.

C'est dans ce palais des beaux-arts qu'il faut, selon moi, établir le musée moderne dont la place n'est pas au palais Ducal. C’était aussi le sentiment de M. le ministre de l'intérieur qui, dans la séance de la Chambre des représentants du 27 août 1859, faisait connaître un extrait du rapport d'une commission présidée par l'honorable M. de Brouckere et où il était dit :

« La commission a pensé que pour les fêtes publiques, il fallait un autre local et que cette destination pouvait être donnée au palais Ducal ; elle a jugé qu'il ne serait ni convenable ni prudent d'avoir de grandes réunions publiques dans les mêmes locaux où se trouvaient les grandes collections. »

Messieurs, je crois qu'il ne faut pas forcer la destination primitive des monuments, <\ qu’on ne fait dans ces cas-là rien de bon, rien de beau. Le palais Ducal s'approprie merveilleusement à une partie de sa destination actuelle, c'est-à-dire comme salle de fêtes, concerts, cérémonies publiques ; mais je crois qu'il serait très utile de réserver les expositions des beaux-arts et le musée moderne pour le palais des beaux-arts. J'adjure, quant à moi, M. le ministre de l'intérieur qui en tant d'occasions etpar tant de mesures généreuses a donné aux artistes des preuves de ses sympathies, de consacrer toute son activité, toute son énergie à réaliser cette grande pensée de la création d'un palais des beaux-arts.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, la création d'un palais des beaux-arts, comme l'élévation des monuments en général, sourit beaucoup à mes goûts et ne déplairait pas, je crois, à la capitale ; mais dans une discussion précédente j'ai pris la liberté de demander quelle était la destination d'un palais des beaux-arts. Si c'est d'y mettre des œuvres d'art, je vais dire tout de suite ma pensée : en fait d'œuvres d'art, je tiens beaucoup plus au contenu qu'au contenant, (page 124) et si nous avions, par exemple, 3 ou 4 millions à dépenser pour créer ce qu'on appelle un palais des beaux-arts destiné à recevoir les œuvres de nos artistes ou les œuvres d'artistes étrangers ou d'artistes anciens, j'aimerais mieux consacrer ces 3 ou 4 millions, ou même la moitié seulement de cette somme, à faire des commandes à nos artistes ou à acquérir des œuvres remarquables d'artistes étrangers ou d'artistes anciens : de cette manière la Belgique serait beaucoup plus riche en monuments que par la création d'un palais qui serait un corps sans âme.

Messieurs, il ne faut pas faire fi du palais Ducal ; je crois que ce palais tel qu'il est et avec les améliorations qu'il peut encore recevoir, peut être jusqu'à certain point considéré comme un palais des beaux-arts. Pour ma part, je ne voudrais pas consentir à le voir démolir. Il existe un projet qui devait coûter, je pense 2,800,000 francs et qui consistait à abattre le palais Ducal pour y substituer deux pavillons.

Je crois que c'eût été dommage de voir disparaître ce monument. Je le répète, il est digne d'être appelé palais des beaux-arts et de recevoir le musée moderne. Et ce n'est pas là, messieurs, une innovation, c'est l'exécution de la loi même. La loi qui accorde un crédit de 300,000 fr pour approprier le palais Ducal, déclare qu'il doit être approprié non seulement aux solennités publiques, mais qu'il doit servir de musée moderne. Le paragraphe 18 de l'article premier de cette loi est ainsi rédigé :

« Travaux d'appropriation au palais Ducal pour les expositions des beaux-arts, le musée moderne et les solennités publiques. »

Or, il arrive, messieurs, qu'à une année de distance le palais Ducal a servi en quelque sorte à cette triple destination et la Chambre apprendra avec plaisir que le créditt alloué n'a pas été dépassé et qu'il n'y aura pas de crédit supplémentaire à demander.

A peine achevé, le palais Ducal a servi à une grande solennité publique, dont le pays entier gardera longtemps le souvenir ; je veux parler de la réunion de tous les conseillers provinciaux du royaume. Cette réunion eut été impossible sans l'existence du palais Ducal.

Il a servi à l'exposition des beaux-arts et il servira au musée moderne.

En outre, messieurs, nous y transporterons les deux Académies royales, l'Académie des sciences et belles-lettres et l'Académie de médecine, de telle manière que le palais Ducal revêtira le caractère d'un monument à la fois artistique et scientifique, où siégeront les représentants de la science et les représentants des arts, non loin des représentants de la nation.

Mais, dit-on, le palais Ducal ne vaut rien pour les expositions, et des artistes se sont plaints.

D'abord, je demanderai à l'honorable membre qui connaît les artistes, qu'il veuille bien me citer une exposition quelconque dans laquelle il n'ait pas rencontré des artistes qui se sont plaints.

- Des membres. - Ils se plaignent toujours.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Pour moi, j'ai vu beaucoup d'expositions, j'en ai vu dans des locaux différents ; mais je ne me souviens pas d'en avoir vu une seule qui n'ait donné lieu à aucune plainte.

Il est impossible d'approprier un local de manière que tout le monde soit également bien placé. Mais qu'on ne le perde pas de vue : qu'est-ce que le palais Ducal ? C'est l'ancien palais d'un prince qui avait réuni des tableaux de premier ordre, tableaux qui ont fait l'admiration de l'Europe et qui figuraient parfaitement dans les salons avec des jours beaucoup plus insuffisants que ceux que nous y avons substitués.

Ja ne dis pas que tous les tableaux ont été également bien placés ; il y a eu des parties du palais où le jour était insuffisant, je le reconnais ; mais, à mon avis, on a tiré le meilleur parti possible du palais, tel qu'il se présentait.

L'on aura beau faire des palais, jamais on ne parviendra à attribuer à tous les artistes des places qui les satisfassent complètement. .

Un artiste qui ne réussit pas, commence par déclarer qu'il est mal placé. C'est une consolation qu'il se donne ou qu'on lui donne.

Pour l'avenir, nous tâcherons d'améliorer les salles d'exposition : les salles du rez-de-chaussée probablement ne serviront plus aux expositions.

J'ai entendu critiquer l'idée de placer le musée moderne au palais Ducal. Pourquoi ne pas mettre dans ce palais les tableaux et les sculptures modernes, qui sont ou éparpillés dans différents locaux, ou qui sont horriblement placés (le mot n'est pas trop fort) dans le musée actuel ? Je veux parler des sculptures qui sont exposées dans un souterrain humide, à peine abordable. Ne fût-ce que pour les sculptures, il conviendrait d'opérer un déplacement. Or, on ne dira pas que les sculptures seront mal placées dans le palais Ducal.

Les tableaux modernes ne sont pas d'ailleurs tellement nombreux, qu'on ne puisse pas leur trouver une place convenable dans le palais Ducal.

J'ai entendu dire qu'il ne convient pas que le local destiné aux solennités publiques reçoive les tableaux de nos artistes ; mais où est l'inconvénient de placer les œuvres de nos artistes dans un centre destiné à de grandes solennités ? C'est là leur place véritable. Il faut, à mon avis, en remplir autant que possible tous les locaux, tous les bâtiments consacrés à de grandes réunions publiques. C'est dans ce sens que je voudrais voir le palais de la Nation mieux décoré qu'il ne l'est ; c'est dans cette pensée aussi que nous travaillerons à le décorer le mieux possible.

Ainsi, je ne trouve pas de raison sérieuse contre la destination que l'on réserve au palais Ducal.

Dans trois ans, on pourra remédier à certains inconvénients qui se sont présentés cette année. Mais ce qu'il faut surtout pour que les expositions produisent les effets qu'on doit en attendre, ce qu'il faut, ce n'est pas seulement une bonne place pour les tableaux, mais il faut encore et surtout de bons tableaux pour les places ; et voilà ce que nous devons recommander particulièrement à nos artistes.

C'est de se préoccuper longtemps à l'avance des expositions, de ne pas improviser en quelque sorte, de n'envoyer que des œuvres longtemps étudiées, sérieuses, qui fassent époque ; alors, je vous réponds que tous les tableaux, qui sont envoyés à l'exposition, et quelle que soit leur place, seront toujours assez remarqués.

Puisque j'ai la parole, j'ajouterai un mot, et ce mot sera favorablement accueilli par la Chambre, puisqu'il a pour but de vous proposer une économie.

Dans ce but d'économie, j'ai fait transférer au palais Ducal les bureaux des beaux-arts et de la voirie vicinale, qui occupaient un hôtel particulier, rue Royale. Cet hôtel coûtait 3,600 fr. de loyer, et le propriétaire nous demandait pour 1861 5,000 fr. Nous n'avons pas cru der voir continuer le bail. Il y a donc là une économie.

Bien que le chiffre du matériel ait été voté par la Chambre et me soit acquis, je demande une réduction sur ce chiffre qui forme l'article 3 ; seulement je ne propose pas une réduction égale au montant du loyer. Les locaux du palais Ducal sont d'un entretien plus coûteux ; ils sont plus difficiles à chauffer, à éclairer, à entretenir.

En outre, le déménagement a occasionné certaines dépenses ; il faudra encore faire certains frais d'appropriation, de telle manière que si je retranchais la totalité du loyer, j'aurais un déficit ; je demande donc qu'on ne réduise l'article 3 que de 1,500 fr. pour l'année 1861.

M. Hymans. - Mon intention n'est pas de discuter maintenant la question du palais des beaux-arts. Le gouvernement nous a annoncé, il y a quelques jours, qu'il présenterait à la Chambre le complément des travaux publics de 1859. A cette occasion, nous aurons à nous occuper tout naturellement de la question que soulève le rapport de l'honorable M. Vandenpeereboom ; nous aurons à nous en occuper d'autant plus naturellement que nous sommes en possession d'un plan pour cet édifice ; je me trompe, de deux plans. Nous n'aurons que l'embarras du choix.

Mais qu'il me soit permis d'adresser une observation à M. le ministre, sur un mot qu'il a dit tout à l'heure. Il aimerait mieux consacrer deux à trois millions à faire des commandes à nos artistes, que les employer à la construction du palais des beaux-arts.

Ici nous tournons depuis longtemps dans un cercle vicieux.

On nous dit qu'on veut faire des commandes avant de construire un musée ; or l'honorable M. Rogier et d'autres ministres avant lui ont déclaré dans maintes circonstances qu'il n'était pas possible de commander aux artistes de grands tableaux d'histoire parce qu'on ne savait pas où les placer, et la preuve en est qu'on a été obligé de meubler de ces tableaux les sections de la Chambre, c'est qu'il y en a à la cour de cassation et dans plusieurs autres locaux où ils se trouvent placés dans les conditions les plus défavorables.

Je ne veux pas, messieurs, traiter cette matière à fond, ce n'est pas le moment, mais je poserai à M. le ministre une question qui me paraît mériter une réponse.

D'après ce qui vient d'être dit, le palais Ducal contiendra d'ici à trois ans l'Académie des sciences et des lettres...

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Et l'Académie de médecine.

M. Hymans. - Encore une de plus. Ces Académies occuperont probablement un certain espace. Le musée moderne va être transféré au pilais Ducal ; je suppose qu'il occupera également quelques-uns des salons.

Un grand orgue va être construit ; cet orgue demandera encore une partie de l'espace qu'on pouvait consacrer aux tableaux.

(page 125) Enfin, a dit M. le ministre de l'inférieur, il est probable que les salles du rez-de-chaussée, dans lesquelles les tableaux étaient mal placés, ne serviront plus, aux prochaines expositions à cette destination.

Je me demande où l'on fera les expositions triennales quand toutes les choses que je viens d'énumérer auront été mises au palais des beaux-arts.

Ferez-vous déloger les Académies ? Approprierez-vous de nouveau ces caves que vous appelez improprement des salles de rez-de-chaussée ?

Enlèverez-vous votre grand orgue de la place qu'occuperait cette année un immense tableau d'histoire qu'on n'aurait pas, je pense, pu placer ailleurs ?

Il est indispensable, vous le voyez, qu'on songe sinon à construire un palais des beaux-arts, du moins à construire un local convenable pour les expositions. Il est indispensable qu'on s'en occupe dès maintenant ; sans cela nous serons, dans trois ans, dans la nécessité de faire de nouveau du provisoire, et sous prétexte d'économies nous ferons de nouveau des dépenses toujours stériles et toujours à renouveler. Ce système rallierait peu de suffrages ; il est condamné ; la Chambre, au contraire, voterait, j'en suis certain, les fonds nécessaires pour la construction d'un beau monument, digne des arts et du pays, à la condition, bien entendu, qu'un édifice, dont le devis serait d'un million ne dût pas coûter, trois ou quatre ans après, le double ou le quadruple.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il faut être prévoyant en administration, mais il ne faut pas pousser la prévoyance jusqu'à l'excès.

Nous sortons à peine d'une exposition triennale. Nous avons trois ans devant nous pour décider où se placera la prochaine exposition. Nous avons donc le temps d'y réfléchir.

L'honorable préopinant critique, au point de vue de l'exposition, les locaux du palais Ducal. Je conviens avec lui qu'une partie de ce palais n'est pas tout à fait convenable ; mais en dépit de l'orgue et des tableaux modernes, je pense que le palais peut parfaitement atteindre cette destination au moyen d'annexes à faire sur place.

On a parlé souvent de dépenses exorbitantes pour des constructions provisoires et éphémères.

On a dit : ce sont des dépenses folles ; il faut construire un local permanent, un palais des beaux-arts.

Faisons le compte ? Un palais des beaux-arts, pour être digne de sa destination, coûtera de 3 à 4 millions, représentant 200,000 fr. d'intérêt par an, ce qui fait 600,000 fr. pour chaque exposition triennale.

Or, quelles que soient les constructions provisoires que l'on fasse, elles sont loin d'atteindre cette somme ; 40,000 francs, 50,000 francs, au maximum. Il ne faut donc pas se montrer adversaire par trop absolu des locaux provisoires. Ils peuvent parfaitement s'approprier à leur destination, et c'est là le grand avantage pour les artistes. On fait un local provisoire exclusivement pour l'exposition, mais on ne peut faire un palais des beaux-arts exclusivement pour les expositions, et s'il n'a pas cette destination exclusive, vos artistes trouveront toujours qu'ils ne sont pas placés aussi bien les uns que les autres, et il y aura toujours des réclamations.

Lorsqu'on parvient au contraire, sur un terrain suffisant, à faire un grand local uniformément éclairé, de plain-pied pour tout le monde, les plaintes se produisent bien encore, car elles se produisent quoi qu'on fasse, mais elles n'ont plus de raison d'être.

Je ne puis donc pas condamner a priori et d'une manière absolue les locaux provisoires, et lorsqu'on fait le compte, je crois qu'il y a plus d'économie à faire tous les trois ans une construction provisoire coûtant de 40,000 à 50,000 francs, que d'élever un édifice dont la dépense serait de 600,000 fr. pour chaque exposition.

M. Guilleryµ. -Messieurs, je vois avec autant de regret que d'étonnement M. le ministre de l'intérieur revenir à l'idée des locaux provisoires.

Je m'étonne surtout de le voir (lui qui apprécie en général les choses de très haut et qui a montré pour les beaux-arts une protection éclairée), supputer quel pourrait être l'intérêt du capital consacré à un palais des beaux-arts de Bruxelles.

Evidemment, ce n'est pas l'honorable M. Rogier qui parle. Quelque comptable aura laissé des notes que M. le ministre a prises par mégarde dans son dossier.

Lorsqu'on a eu l'idée d'élever un palais aux beaux-arts, il n'est venu à l'esprit de personne qu'on justifierait sou par sou, denier par denier, l'économie qui en résulterait pour le budget de l'intérieur. Il y a là une grande pensée qui, je pense, n'a pas besoin d'être développée devant vous.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si ! si ! elle a besoin d'être développée.

M. Guilleryµ. - Ce n'est pas, dans tous les cas, à la fin d'une séance qu'on pourrait le faire convenablement. Ce n'est pas à l'improviste qu'on développe des idées semblables, elles ont d'ailleurs été développées, il y a un an, au nom de la section centrale, avec un talent que je ne pourrais imiter.

Je fais appel à des principes sur lesquels je pensais qu'on était d'accord, c'est qu'une nation, lorsqu'elle élève de grands monuments, ne calcule pas l'intérêt de l'argent qu'ils peuvent coûter ; c'est qu'une nation tient son indépendance autant de l'éclat que jettent sur elle les beaux-arts, les sciences et les lettres que de telle ou telle mesure militaire.

Vous demandez que je développe ce que c'est qu'un palais des beaux-arts, ce qu'il peut être pour le pays. Mais tous vous avez encore présent à la mémoire un des plus beaux mouvements d'éloquence d'un des plus brillants orateurs du parlement belge, qui disait à la fin de la dernière session : « Que n'y a-til en Belgique un Périclès qui puisse entraîner le pays dans ces dépenses qui feraient sa force et sa gloire ! »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, ce n'est pas du tout une note de comptable égarée dans mon dossier que je vous ai fait connaître tout à l'heure ; c'est ma pensée tout entière que j'ai exprimée, et j'en prends toute la responsabilité.

Je l'ai exprimée, du reste, dans d'autres circonstances.

Je suis un grand partisan des monuments et j'ai, pour ma part, contribué à l'érection et à la restauration d'un assez grand nombre ; mais je veux des monuments utiles, qui puissent se justifier et je me demande ce que sera le palais des beaux-arts et ce que l'on y mettra.

Je commence par déclarer que si j'avais 4 millions à ma disposition, je préférerais les consacrer à acheter des œuvres d'art que je-mettrais plus tard dans un palais que de les employer à l'érection d'un palais où je n'aurais rien à mettre.

M. Guilleryµ. - Vous avez cent tableaux que vous ne savez où placer.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il n'y en a pas cent ; et tous ceux que nous possédons peuvent être convenablement placés dans le palais Ducal. Mais je ne sais ce que viendraient faire cent tableaux dans le palais des beaux-arts tel que votre imagination se le figure, tel que votre goût éclairé le désire, c'est-à-dire un monument digne de la capitale, digne d'un peuple riche et éclairé.

Eh bien, un tel monument serait trop grand pour nos richesses artistiques et je dis qu'il vaudrait mieux consacrer des millions, si on les avait, à s'enrichir d'abord d'œuvres d'art avant de songer à établir des locaux destinés à ces futurs contingents que nous ne possédons pas.

Messieurs, ce ne sont pas les monuments qui nous manquent, et si l'on veut les monuments comme moyen d'offrir des issues, en quelque sorte, aux œuvres d'art, nous en avons plusieurs à offrir aux artistes. Nous aurons l'église de Laeken, qui est un monument où nos artistes trouveront à placer utilement et glorieusement leurs œuvres, nous avons le palais de justice qui offrira d'autres occasions de placements.

M. De Fré. - Nous l'aurons.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Il est décrété ; les fonds ont été votés.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Nous aurons le palais royal où les artistes pourront également apporter les produits de leur génie. Voilà déjà, messieurs, trois monuments qui deviendront en quelque sorte des palais des beaux-arts, si les beaux-arts sont appelés à les embellir. Mais, je le déclare, ce qu'on appelle un palais des beaux-arts ne peut pas jusqu'à présent entrer dans mon esprit comme une chose urgente et très utile. J'ai vu des monuments ayant de la grandeur, mais ayant aussi un caractère d'utilité.

Eh bien, pour le moment, je ne vois pas la nécessité de ce qu'on appelle un palais des beaux-arts. Les locaux que nous avons, les anciens Musées suffisent parfaitement aux tableaux anciens, et quant aux tableaux modernes, ils ne remploient pas à eux seuls la grande salle du palais des beaux-arts. Quand les deux Académies auront été déplacées, le local actuel des Musées se prêtera à certaines destinations qu'il ne peut pas remplir aujourd'hui. Ainsi, nous avons besoin de locaux pour agrandir la bibliothèque et les musées d'histoire naturelle et d'industrie ; et je le (page 126) répète, les locaux du Musée actuel n'ayant plus à loger des Académies, se prêteront facilement à cette destination.

Quand nous nous serons enrichis d'œuvres artistiques, quand nos artistes auront produit un plus grand nombre d'œuvres importantes, alors peut-être pourrons-nous songer, dans l'avenir, à créer ce palais des beaux-arts et, pour ma part, je serai toujours heureux, soit comme ministre, soit comme représentant, de prêter les mains à tout ce qui peut contribuer à faire la gloire et la grandeur du pays.

M. B. Dumortier. - Je ne comprends pas comment, après avoir encouragé le gouvernement à donner au palais de la rue Ducale la destination qu'il a reçue, on puisse songer à entraîner l'Etat dans une dépense de plusieurs millions pour ériger un palais des beaux-arts. Quant à moi, j'étais partisan de cette idée de conserver au palais Ducal son caractère primitif et de construire un palais des beaux-arts ; mais l'idée contraire ayant prévalu, il me semble fort extraordinaire qu'on veuille, a peine cette idée est-elle réalisée, l'abandonner pour entreprendre à nouveaux frais une construction ayant la même destination.

Il y a dans ce qu'a dit M. le ministre de l'intérieur beaucoup de choses très fondées.

Avant de construire un palais d'une grandeur démesurée, il faudrait, me semble-t-il aussi, avoir de quoi le garnir : faire un palais de vaste dimension et n'avoir rien à y mettre, serait une véritable superfétation.

D'un autre côté, il y a, dans les reproches formulés par certains membres au sujet de la distribution du palais Ducal appliqué aux beaux-arts, quelque chose qui ne manque pas non plus de fondement.

Il est évident, en effet, que, sauf la grande salle et quelques petites salles particulières, les locaux offraient les conditions les plus défavorables pour une exposition d'objets d'art.

Il faudra donc, dans trois ans, probablement en revenir encore à du provisoire, car ainsi qu'on l'a fait remarquer avec infiniment de raison, si l'on transportait les Académies et beaucoup d'autres choses encore dans le palais Ducal, il n'y aura plus moyen, dans trois ans, d'y faire l'exposition des beaux-arts. A cela M. le ministre n'a pas répondu et ne saurait pas répondre.

De sorte que nous aurons voté l'aliénation d'un magnifique palais pour l'affecter à une destination nouvelle à laquelle il ne pourra servir qu'imparfaitement. Eh bien, messieurs, si nous devons avoir encore du provisoire, je prends la confiance d'appeler sérieusement l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur ce qui a été fait en 1854, je pense.

A cette époque un architecte de grand mérite que la Belgique a eu la douleur de perdre, M. Dumont, avait disposé l'ancienne cour de manière telle que si l'on avait voulu on aurait pu s'en contenter pendant 20 à 30 ans sans avoir tous les trois ans à dépenser des sommes considérables et en pure perte.

Si donc il y a nécessité de créer encore du provisoire, je demande qu'on reprenne, en l'améliorant si c'est possible l'idée mise à exécution par M. Dumont, idée si heureuse qu'au dire des artistes, jamais à aucune époque les œuvres d'art n'avaient été exposées dans de meilleures conditions. On pourrait ainsi, au moyen d'un faible sacrifice, arriver à avoir un local convenable pour nos expositions des beaux-arts.

Maintenant y a-t-il un intérêt réel à déplacer les Académies de leurs locaux actuels et à les placer dans le palais Ducal ?

Quant à moi, j'en doute fortement ; aujourd'hui chaque Académie a son local et cela est indispensable aussi bien pour leurs réunions que pour leurs bibliothèques.

Or, dans le palais Ducal, on ne pourra leur affecter que la grande salle et elles n'y trouveront certainement pas les facilités qu'elles ont aujourd'hui. Voilà donc un palais qui aura été détourné de sa destination dans un but donné et qui, en définitive, ne pourra pas servir à sa nouvelle destination.

Il serait plus sage, je pense, de laisser les Académies où elles sont.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - C'est une chose faite ; les Académies ont consenti à leur déplacement.

(page 131) M. Orts. -Je ne veux pas discuter la question du palais des beaux-arts ; elle viendra en son temps. Mais je tiens dès aujourd'hui à constater un fait, et je le constate avec douleur : M. le ministre de l'intérieur semble oublier que dans la discussion des grands travaux publics en (page 132) 1859, la disjonction des crédits qui se rapportaient aux travaux à exécuter à Bruxelles a eu lieu pour les affecter à la construction d'un palais des beaux-arts. Si on renonce maintenant, comme semble le désirer M. le ministre, à construire un palais des beaux-arts, la ville de Bruxelles sera la seule ville du pays qui n'aura pas profité de cette immense distribution de travaux publics (interruption), à l'aide de laquelle on a fait voter les fortifications d'Anvers.

Je le maintiens, la ville de Bruxelles sera privée, au moins en partie, de la compensation qu'on voulait lui donner. La section centrale a affecté au palais des beaux-arts les sommes qui devaient être consacrées à d'autres dépenses à faire à Bruxelles ou pour Bruxelles.

Le gouvernement se trompe lorsqu'il se croit si pauvre en objets d'art qu'il n'ait nul besoin de construire un palais pour les recevoir. Le gouvernement possède des tableaux dispersés partout, déposés jusque dans les antichambres des ministères faute de pouvoir les placer ailleurs.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Chez moi, il n'y en a pas !

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Ce n'est pas pour ces tableaux-là qu'il faudrait construire un palais.

M. Orts. - Je reconnais volontiers que ce ne sont pas les meilleurs ; mais s'ils valaient la peine d'être achetés par vous, ils valent probablement la peine d'être placés quelque part, d'être conservés. Et lorsque vous ne voyez dans le Musée de Bruxelles qu'une collection de tableaux modernes à déplacer, vous vous trompez encore. Vos sculptures, vos statues, comme vous venez de le dire, sont enfouies dans une cave faute d'emplacement convenable. Les y laisserez-vous ? Votre Musée historique, que personne ne connaît malgré son incontestable mérite, votre Musée historique est relégué lui au grenier. Et c'est pourquoi on ne le connaît pas. L'y laisserez-vous ? Mais non, mille fois non. Vous l'Etat, vous n'auriez pas de quoi meubler dignement un palais des beaux-arts !

Dans un pays artistique par excellence comme la Belgique, dans un pays où abondent les œuvres d'art anciennes et modernes, l'Etat ne peut pas dire qu'il n'a pas de quoi utiliser un palais des beaux-arts. Vous êtes plus riche que vous ne pensez, M. le ministre, et vos richesses valent la peine d'être conservées ; au nom de Bruxelles, je vous en prie, ne l'oubliez pas.

- Plusieurs voix. - A demain ! à demain !

Ordre des travaux de la chambre

M. B. Dumortier. - Quand donc aura lieu l'examen de ma proposition en sections ?

MpVµ. - Les sections seront convoquées pour demain.

Je propose à la Chambre de mettre à la suite de l'ordre du jour le projet de loi relatif au rétablissement du grade d'élève universitaire, et le projet de loi relatif aux caisses de retraite. (Adhésion.)

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Presque tous les articles du budget de l'intérieur sont votés, je demande qu'on fixe le second vote à jeudi.

(page 126) MpVµ. - Un membre s'est fait inscrire pour parler sur l'article 127.

M. Orts. - Demain, vous demanderez l'urgence.

- La séance est levée à 5 heures.