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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 26 avril 1861

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1860-1861)

(page 1237) (Présidence de M. Vervoort.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. Snoy, secrétaire, procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart et donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier.

- La rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

M. de Boe, secrétaire, présente l'analyse des pièces qui ont été adressées à la Chambre.

« Le sieur Lambert réclame contre l'exemption de service accordée au sieur Jean-Baptiste Martin, à Farciennes. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« La veuve Marée réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir la réversion, en son nom, de la pension de 250 francs dont jouissait son mari en qualité de décoré de la croix de Fer et blessé de Septembre. »

- Même décision.


« Le conseil communal de Termonde prie la Chambre d'accorder à la compagnie de Perre la concession d'un chemin de fer de Terneuzen à Lokeren. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi relatif à l'exécution de travaux d'utilité publique.


« M. Van Overloop, obligé de s'absenter, demande un congé de quelques jours. »

- Accordé.


« M. de Ridder demande un congé d'un jour, pour affaires. »

- Accordé.

Rapports sur des demandes en naturalisation

M. Thienpont et M. de Bronckart déposent des rapports sur des demandes de naturalisation ordinaire.

Projet de loi révisant le code pénal (livre II, titres I à X)

Discussion des articles

MpVµ. - Il ne reste plus que quelques articles sur lesquels la Chambre ne s'est pas encore prononcée.

Ces articles ne présentent plus guère de difficulté. Si tout le monde était d'accord, la Chambre pourrait se prononcer sur ces articles après qu'il aurâ été fait rapport sur chacun d'eux. (Appuyé.)

La parole est à M. Pirmez.

Article 229bis

M. Pirmez, rapporteur. - Votre commission, messieurs, a examiné tous les articles que vous lui avez renvoyés, les derniers du Code qui restent à voter.

Le premier est l'article 229 bis. Cet article avait été présenté par amendement et adopté par la commission ; il est ainsi conçu :

« Art. 229 bis. Tout officier ministériel qui aura altéré la vérité dans un acte de ses fonctions sans l’intention frauduleuse et sans le dessein de nuire dont il est parlé à l'article 205, sera puni d'un emprisonnement de huit jours à deux mois, et d'une amende de deux cents francs à mille francs. »

Les objections qui ont été faites à cette disposition et la considération que le pouvoir disciplinaire des tribunaux exercé avec fermeté et vigueur peut servir à réprimer le fait prévu dans cet amendement, ont déterminé votre commission à retirer cette proposition. L'article ne figurerait donc pas au nouveau Code.

- La suppression est mise aux voix et approuvée.

Article 256ter et article nouveau

M. Pirmez, rapporteur. - Votre commission, messieurs, a eu l'honneur de vous proposer deux articles qui avaient pour but d'assurer aux Chambres législatives l'exercice de leur droit d'enquête.

Ces articles sont ainsi conçus :

« Art. 256ter. Tout coupable de faux témoignage ou de fausse déclaration dans une enquête parlementaire, sera puni d'un emprisonnement d'un an à trois ans. »

« Art.... Quiconque, ayant été assigné à déposer dans une enquête parlementaire, ne comparaîtra pas sans motifs légitimes, sera condamné à une amende de 26 francs à 200 francs.

« Cette peine ne sera prononcée que sur la plainte de la commission d'enquête, après que le témoin défaillant aura été réassigné et entendu par elle.

« Si le témoin fait encore défaut sans motifs légitimes à la seconde assignation, un emprisonnement de huit jours à un mois pourra, en outre, être prononcé.

« Ces peines pourront être prononcées cumulativement ou séparément contre le témoin qui refuserait de déposer. »

En vous remettant ces articles, votre commission avait eu pour but de saisir l'occasion qui se présentait de garantir d'une manière complète un droit constitutionnel des Chambres.

Elle avait pensé qu'il n'y avait aucune difficulté à leur assurer ce droit, en prononçant ces peines, l'une contre les coupables de faux témoignage dans les enquêtes parlementaires, l'autre contre ceux qui se refuseraient à comparaître devant les commissaires des Chambres.

Vous savez, messieurs, qu'une discussion s'est élevée sur ces articles. L'examen qui a été fait de ces dispositions à la Chambre a indiqué des difficultés qui n'avaient pas d'abord été prévues.

On s'est demandé si l'on peut comprendre dans une même disposition toutes les espèces d'enquêtes auxquelles les Chambres peuvent se livrer et notamment s'il est possible de comprendre, dans la disposition qui punit le faux témoignage, les faux renseignements qui seraient donnés à une commission d'enquête.

Ainsi une enquête commerciale ou industrielle n'ayant d'autre but que de recueillir de simples renseignements doit-elle être garantie par les mêmes pénalités qu'une enquête que ferait la Chambre pour s'assurer de la réalité des faits qu'elle aurait à constater en matière de validation de pouvoirs ?

On s'est demandé, en second lieu, s'il n'y avait pas un danger à donner à la Chambre un droit absolu de faire comparaître devant elle qui elle jugerait convenable, même les fonctionnaires publics, et sur toutes les matières qui peuvent être à leur connaissance ? N'y a-t-il pas certains secrets confiés à ces fonctionnaires que la Chambre ne peut obliger à divulguer ? N'y aurait-il pas un inconvénient à voir le pouvoir législatif intervenir dans les relations les plus confidentielles des agents du pouvoir exécutif ?

Messieurs, ces difficultés ont paru graves à la commission. Elle s'est rappelé d'un autre côté que la Chambre a décidé que toutes les matières politiques seront autant que possible exclues du Code pénal. L'organisation du droit d'enquête, d'un droit constitutionnel a paru avoir ce caractère, et votre commission, se conformant à cette décision, a pensé devoir écarter du Code les dispositions concernant les enquêtes parlementaires.

Une troisième considération a confirmé votre commission dans cette résolution.

Les enquêtes parlementaires sont nouvelles pour nous ; nous ne les connaissons pas par les enseignements de l'expérience. Est-il sage de comprendre une matière non encore explorée dans un Code qui doit avoir un caractère de permanence particulier ? La loi que l'on ferait en cette matière ne serai-t-elle pas, après quelques essais, trouvée contenir des lacunes, renfermer des dispositions vicieuses qui demanderont à être remplies ou à être corrigées ? Il y aurait encore, à ce point de vue, un danger à comprendre dans un Code une matière pratiquement mal connue.

Cependant, messieurs, ces considérations qui portent votre commission à vous proposer de retrancher du Code pénal les articles qui nous occupent, sont loin de lui faire désirer un ajournement absolu. Il y a trop longtemps que l'on attend une loi qui garantisse les droits de la Chambre en matière d'enquête parlementaire pour que nous ne saisissions pas l'occasion qui se présente d'assurer ces droits. Elle croit donc qu'en retranchant du Code les dispositions dont il s'agit, la Chambre doit les maintenir à l'ordre du jour comme projet de loi séparé.

De cette manière, en évitant les inconvénients que je viens de signaler à la Chambre, nous atteindrons la réalisation d'un but promis depuis longtemps, mais toujours vainement.

MpVµ. - Nous réservons cette matière.

Article 23

M. Pirmez, rapporteur. - Vient maintenant, messieurs, un article qui n'a pas été voté, par suite d'un oubli. C'est l'article 263 du Code, Cet article fait partie d'un chapitre contenant trois articles ; les deux premiers avaient donné lieu à une difficulté qui a été vidée depuis, mais tout le chapitre avait été renvoyé à la commission. Celle-ci a omis de faire rapport sur le troisième article, précisément parce que, n'ayant soulevé aucune objection, il n'avait pas attiré son attention.

Voici cet article :

« Tout commandant des divisions miliaires, des provinces ou des (page 1238) places et villes, tout gouverneur ou commissaire d’arrondissement, qui aura, dans l’étendue des lieux où il a droit d’exercer son autorité, fait ouvertement, ou par des actes simulés, ou par interposition de personnes, le commerce des grains, grenailles, farines, substances farineuses, vins ou boissons, autres que ceux provenant de ses propriétés, sera puni d’une amende de trois cent francs à cinq mille francs et de la confiscation des denrées appartenant à ce commerce, sans préjudice, s’il y échec, des peines portées par l’article 352. »

Votre commission propose, messieurs, d'adopter cet article avec deux modifications.

La première est le retranchement des mots : « sans préjudice, s’il y échec, des peines portées par l’article 352. »

,

Le deuxième est la suppression des mots : « autres que ceux provenait de leurs propriétés. »

L'article défend à certains fonctionnaires de faire le commerce des grains ou d'autres denrées alimentaires, mais il excepte le commerce de denrées provenant des propriétés du fonctionnaire ; or, messieurs, c'est une chose constante en droit qu'on ne fait pas acte de commerce en vendant les produits de ses propriétés. Ces termes doivent donc disparaître.

- L'article est mis aux voix et adopté avec les modifications proposées.

Article 355bis

M. Pirmez, rapporteur, — Messieurs, vous avez renvoyé une deuxième fois à votre commission l'amendement qu'avait déposé, l'année dernière, l'honorable M. Guillery, et qui touche à une matière dépendant de la législation sur la presse. Vous savez, messieurs, qu'il s'agit de savoir si l'imprimeur ou le distributeur d'une provocation suivie d'effet, peut être, lorsqu'il a agi sciemment, poursuivi comme complice du délit ou du crime qui aurait été la conséquence de cette provocation.

La commission, messieurs, a déjà eu l'honneur de déclarer qu'elle considère la question soulevée par l'amendement de M. Guillery, bien plutôt comme un débat théorique que comme une disposition devant recevoir des applications.

L'article que vous avait proposé la commission a dorme lieu à de vives critiques et soulevé des scrupules constitutionnels sérieux.

Cette dernière circonstance, à elle seule, suffit pour que la commission ne croie pas devoir heurter de semblables scrupules par une disposition que ne réclame pas la nécessité pratique, et elle croit pouvoir adopter l'amendement déposé par M. Guillery.

La question de savoir si l'imprimeur ou le distributeur peut être puni comme complice du crime ou du délit qui a été la conséquence de la provocation qu'il a imprimée ou distribuée, recevra dès lors sa solution des principes généraux. L'imprimeur et le distributeur seront considérés comme complices du crime ou du délit qui a été la conséquence de la provocation si, d'après les principes, ils ont réellement participé à l'infraction.

Je m’explique encore ; le fait de l'impression et celui de la distribution ne constitueront pas des faits de complicité, de participation ; mais si l'imprimeur et le distributeur sont, d'après les principes ordinaires, complices des infractions qui ont suivi la provocation, ils subiront la loi commune ; ils seront punis, non pas parce qu'ils sont imprimeur ou distributeur, mais quoiqu'ils soient imprimeur ou distributeur.

Cette solution ne contrarie aucune des nécessités de la pratique ; elle respecte tous les scrupules constitutionnels ; elle aura pour résultat de satisfaire toutes les opinions qui se sont produites naguère dans la Chambre.

MpVµ. - M. le ministre de la justice se rallie-t-il à l'amendement de M. Guillery ?

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Oui, M. le président.

M. Guilleryµ. - Messieurs, il est très difficile de voter sur un rapport verbal, quelque clair qu'il soit d'ailleurs ; toutefois, je ne m'oppose pas à ce que l'on procède immédiatement au vote, s'il est bien entendu, de la part de la commission comme de la part du gouvernement, qu'il ne peut être question de complicité en matière de presse. S'il y a des coauteurs, ils tomberont nécessairement dans le droit commun ; ces coauteurs sont des auteurs.

M. Pirmez, rapporteur. - Messieurs, je crois que je pourrai éclaircir en deux mots la question que soulève l'honorable M. Guillery.

Nous ne nous occupons pas de la question de la complicité en fait de presse, à écrit provocateur, mais de la complicité au crime ou au délit ordinaire, conséquence de la provocation, comme un assassinat, un pillage, un incendie.

Or, dans ce cas, nous décidons simplement que les auteurs ou les complices à ce crime ou à ce délit, seront punis d'après les principes généraux.

Ainsi, nous ne nous occupons que de la participation à un délit ou à un crime, qui n'a rien de commun avec les délits de presse ; on appréciera cette complicité ou cette participation, en dehors du fait de l'impression ou de la distribution.

Je crois que, dans ces termes, nous sommes parfaitement d'accord avec l'honorable M Guillery.

M. Guilleryµ. - Messieurs, il est excessivement important d'être très clair en pareille matière. L'article 18 de la Constitution a précisément pour but de charger complètement les principes en matière de complicité ordinaire. Il y a tel acte qui serait de la complicité en vertu des articles 59 et 60 du Code pénal et qui n'est plus de la complicité, précisément à cause de la qualité d'imprimeur ou de distributeur.

Messieurs, je ne puis accepter les réserves de la section centrale dans les termes où elles sont faites ; c'est par crainte qu'elles ne soient pas assez précises, c'est parce que j’y vois matière à interprétation ; nous devons nous en tenir aux principes qui, dans la séance de samedi dernier, ont paru réunir tous les suffrages des membres de la Chambre qui ont pris la parole.

Le principe général est celui-ci, et je tiens à ce qu'il soit bien constaté. L'article 18 de la Constitution a eu pour but de changer complètement le principe de la complicité et de soustraire les imprimeurs, éditeurs ou distributeurs à l'application des principes généraux de la matière.

Lors de la discussion de cet article au Congrès, l'honorable baron Beyts, en combattant l'amendement dont on a parlé plus d'une fois et qui avait pour but d'ajouter à l'article 18 de la Constitution les mots : « sauf la preuve de la complicité », l'honorable M. Beyts disait : « Nous ne voulons pas de complicité. »

On ne peut punir que les coauteurs ; si l'imprimeur est coauteur, il si évident qu'il doit être puni.

Voilà les principes au moyen desquels on a voulu émanciper la pensée et l'auteur.

L'honorable M. Beyts avait présenté un amendement dans ce sens. Afin de mieux préciser, il avait proposé de décider que l'imprimeur serait responsable lorsqu'il serait coauteur.

L'honorable M. Devaux répondit : Il va sans dire que l'imprimeur sera responsable lorsqu'il sera coauteur ; par conséquent cette disposition est inutile.

Le Congrès a donc écarté l'amendement comme superflu.

Je ne veux pas prendre d'exemples, ce serait faire naître peut-être des difficultés nouvelles ; chacun sait la différence qu'il y a entre le complice et le coauteur, le nouveau Code l'a précisée et en a fait une disposition législative.

Si l'on veut se borner à cette déclaration, je ne demande pas mieux. Je ne désire pas qu'on entre dans des dissertations qui ne feraient que compliquer la Ici, et je pense que nous pouvons nous en tenir au texte de l'article 18 de la Constitution et au texte de mon amendement.

Dans ces termes-là j'abandonne toute discussion, mais je ne voudrais pas qu'il pût y avoir, contre l'intention même de ceux qui les ont prononcées, des paroles qui puissent être interprétées contrairement à la volonté du législateur.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Je crois que l'article 18 de la Constitution n'a eu qu'un but, c'est de déclarer que le fait d'impression ou de distribution ne peut jamais constituer un élément de complicité.

Pour que l'esprit de l'article 18 soit bien rendu dans la loi que nous discutons, j'avais proposé un amendement dans ce sens.

J'avais proposé d'ajouter à l’article primitif que dans aucun cas le fait d'impression et le fait de distribution ne pouvaient être considérés comme des actes de complicité.

Je ne pense pas qu'il y ait lieu d'aller plus loin, et je suis, sms ce rapport, d'accord avec l'honorable M. Guillery. Acceptant ce principe comme incontestable que l'impression et la distribution ne peuvent jamais constituer un élément de complicité, il faut laisser à l'empire des principes généraux le soin de régler, de déterminer s'il y a d'autres faits qui peuvent faire considérer un inculpé comme coauteur ou comme complice.

(page 1239) Aller plus loin ce serait, je crois, sortir des termes dans lesquels le débat se trouve engagé. Nous n'aurions plus à nous occuper ici d'un délit en rapport avec le délit de presse, mais nous réglerions, comme le disait l'honorable rapporteur, la complicité des délits qui auraient été, provoqués par la voie de la presse.

Je crois donc qu'étant entendu que l'imprimeur, à raison de l'impression, le distributeur, à raison de la distribution, ne peut jamais être considéré comme complice ; il faut laisser tous les autres faits sous l'empire des principes généraux.

M. Orts. - Je crois que les explications de M. le ministre de la justice donnent toute satisfaction à la Chambre.

Il est donc bien entendu que jamais on ne pourra considérer comme complice d'un délit de provocation par voie de presse celui qui, sciemment ou non sciemment, aura imprimé, distribué, édité ou affiché l'œuvre d'un auteur domicilié en Belgique.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - J'avais déposé un amendement dans ce sens.

M. Orts. - Avec cette explication, cela est parfaitement exact, est je crois que les paroles de l'honorable M. Guillery sont allées un peu plus loin que sa pensée, quand il a dit qu'il était impossible qu'il y eût d'autres délits que des délits de presse. Ainsi, j'admets qu'il peut y avoir, en matière de presse, d'autres coupables que des coauteurs ; qu'il peut y avoir des complices d'un délit de presse. Si quelqu'un, fût-ce l'imprimeur d'un journal, par exemple, paye un écrivain pour écrire un article calomnieux, il tombe évidemment, non' pas sous l'application des lois sur la presse, mais sous l'application des principes généraux en matière de complicité.

Mais il reste bien entendu que, pour avoir publié, imprimé, distribué, affiché, etc., un écrit contenant une provocation, on ne peut être considéré comme complice quand l'auteur est connu et domicilié en Belgique.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Nous sommes d'accord.

M. Guilleryµ. - Je demande pardon à la Chambre d'insister ; mais il s'agit d'une question dont elle ne méconnaîtra pas, je crois, l'importance.

Je ne puis partager entièrement l’opinion de l'honorable préopinant et je tiens beaucoup à ce que la mienne soit clairement exprimée, je tiens à l'accentuer de la manière la plus nette possible, afin qu'il n'y ait pas de malentendu.

Je ne crois pas, et je le dis d'une manière générale et absolue, qu'il puisse y avoir de complicité en matière de presse. L'exemple que vient de citer l'honorable M. Orts est un fait de coauteur et même d'auteur principal.

Voici un exemple : un individu qui, voulant faire calomnier quelqu'un, fait, à ces frais, écrire par un écrivain sans consistance, par un de ces hommes qui font de leur plume un vil métier, un article calomnieux et le publie.

Il est évident que cet individu est plus que coauteur ; il est certainement l'auteur principal de la calomnie par la voie de la presse et doit être poursuivi comme tel.

Voilà donc le cas d'un individu qui, ayant payé un article calomnieux, est évidemment auteur.

Mais il peut arriver tel cas où il en serait autrement, par exemple si l'imprimeur avait payé l'auteur de l'écrit sans lui enjoindre d'écrire dans un sens déterminé.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - C'est une question de fait.

M. Guilleryµ. - Evidemment ; il peut l'avoir payé pour rédiger un journal et non pas pour écrire des articles calomnieux, et l'on ne pourra pas prétendre, dès lors, qu'il se soit rendu coupable de complicité en fournissant les instruments du délit.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - C'est évident.

M. Guilleryµ. - Les tribunaux ont malheureusement varié sur cette question. C'est pourquoi je tiens, puisqu'elle se présente maintenant devant la législature, à la voir trancher d'une manière nette et précise.

Nous avons entendu samedi les hommes les plus considérables de la Chambre et du Congrès nous rappeler quelles ont été les intentions du Congrès. Permettez-moi, messieurs, de vous rappeler ce qui a été dit dans notre assemblée constituante.

Voici, d'abord, ce que disait l'honorable M. Devaux, dont l'opinion a un grand poids dans un pareil débat, car elle révèle de la manière le plus précise l’expression de la véritable pensée du Congrès en votant l'article 18 de la Constitution.

« Le projet, disait-il ( il s'agissait de l'amendement qui tendait à dire « sauf la preuve et la complicité »), le projet (de la section centrale) rétablit ensuite la possibilité de complicité des imprimeurs alors que l'écrivain est connu. Depuis que des procès de presse existent en Belgique, cette disposition a soumis la presse, non pas « à la censure du pouvoir, mais à celle des imprimeurs. » On a cru remédier au mal par l'addition : « sauf la preuve de la complicité.’

« Mais on oublie que ce n'est qu'après les poursuites que la preuve s'acquiert. » Il en résulterait donc « que les imprimeurs seraient toujours exposés à être poursuivis. » Quand l'auteur est connu et domicilié en Belgique, on a « toutes les garanties nécessaires à la loi. » On a dit : Il se peut qu'un imprimeur soit complice d'intention... « Mais n'a-t-on pas assez d'une victime ? L'imprimeur devra donc toujours trembler d'être mis en cause ? »

Mais n'a-t-on pas assez d'une victime.

Voilà, messieurs, le mot qui, me paraît-il, résume tout l'esprit de la loi. Le Congrès n'a voulu qu'une victime.

« L'imprimeur devra donc toujours trembler ! »

Le Congrès ne voulait pas que les imprimeurs fussent poursuivis.

Et ailleurs, l'honorable M. de Brouckere disait qu'il « ne voulait pas déférer aux juges l'appréciation des facultés intellectuelles des éditeurs et des imprimeurs. »

Il ne faut donc pas qu'on aille chercher l'intention des imprimeurs, des éditeurs, il y a assez d'une victime ; quand l'auteur est connu, on ne doit s'occuper que de lui. C'est là, me paraît-il, une citation qui vous montre d'une manière bien précise que jamais on n'a voulu que dans aucun cas il pût être question de complices.

Sans doute, je ne cesse de le répéter, l'imprimeur peut être lui-même auteur, mais, comme le disait l'honorable M. Devaux, en discutant l'amendement de M. Beyts, il est inutile de parler de ce cas dans la loi : si l'imprimeur est lui-même auteur, il va sans dire qu'il ne sera pas mis hors de cause, il aura à répondre du délit qu'il aura commis.

De même si, pour cet acte complètement étranger à sa profession d'imprimeur, il s'est rendu complice ou auteur d'un délit, de celui, par exemple, d'avoir fourni des armes, il sera nécessairement reconnu coupable et condamné.

M. le ministre des finances (M. Frère-Orban). - Nous sommes d'accord.

M. Guilleryµ. - Tant mieux ; mais j'ai dû répondre à l'honorable M. Orts lorsqu'il a exprimé l'idée que j'étais allé un peu loin. Il était donc nécessaire de bien préciser la pensée de la Chambre, à savoir que, quant aux délits de presse, il ne peut jamais y avoir de complicité.

Je ne demande pas autre chose.

M. Pirmez, rapporteur. - Une expiration bien simple va mettre un terme à ce débat.

Il n'est pas le moins du monde question dans l'article de savoir si l'on peut ou non être complice d'un délit de presse. S'il y a une divergence d'opinions entre les honorables MM. Orts et Guillery, nous n'avons pas à la trancher. (Interruption.) Dans tous les cas, la seule complicité dont j'aie parlé est celle qui s'attache, non pas au fait de la provocation faite par l'écrit, mais au délit que la provocation a pu engendrer.

L'honorable M. Guillery vient de dire que la commission et lui sont d'accord sur ce point ; que le fait de l'impression ou de la distribution ne constitue pas un fait de participation à une infraction auquel, du reste, on n'a pas pris part par d'autres moyens, mais que ces autres moyens peuvent constituer une participation.

Or, c'est là tout ce qui ressort de l'article en question. S'il y a une difficulté sur la participation à la provocation, elle est en dehors du débat.

M. Nothombµ. - Je demande un instant la parole pour faire cette simple déclaration que j'accepte l'amendement avec l'interprétation que lui a donnée l'honorable M. Orts et que M. le ministre de la justice vient de confirmer, c'est-à-dire que le fait seul de l'impression ou de la distribution ou de l'affichage d'un écrit, fait sciemment ou non sciemment, ne ^peut jamais être envisagé comme un élément de complicité ; que dès lors, l'individu qui aura posé l'acte ne pourra jamais être ni poursuivi ni recherché de ce chef ; que, pour le poursuivre ou le rechercher, il faut absolument qu'il y ait un autre mode de participation différent de ceux que nous venons d'indiquer, et c'est alors et seulement alors que la poursuite sera recevable ; en d'autres termes, l'immunité constitutionnelle disparaît devant un fait qui ne se rattache plus à la presse et le droit commun reprend son empire. C'est en ce sens que je vote l'amendement.

(page 1240) MpVµ. - Je mets aux voix l'amendement de M. Guillery.

« Ceux qui auront sciemment contribue d'une manière quelconque à la publication ou distribution d'un écrit contenant une provocation à un crime ou à un délit, soit que la provocation ait été ou non suivie d'effet, seront considérés comme complices des provocateurs.

« Néanmoins, lorsqu'ils ont fait connaître la personne de qui ils tiennent l'écrit ou lorsque l'auteur ou l'imprimeur sont connus et domiciliés en Belgique, les crieurs, afficheurs, vendeurs ou distributeurs seront exempts de toute peine.

« Il en sera de même de l'éditeur ou de l'imprimeur, lorsque l'auteur est connu et domicilié en Belgique. »

- L'amendement est mis aux voix et adopté.

Article 680

M. Pirmez, rapporteur. - J'ai maintenant à vous faire rapport sur l'article qui punit les cris séditieux, le port public de signes extérieurs de ralliement non autorisés par les règlements de police et l'exposition dans des réunions ou dans des lieux publics, la distribution ou mise en vente de tous signes ou symboles destinés à troubler la paix publique.

Cet article a eu une destinée assez variée. Il se trouvait d'abord dans un chapitre du titre VI qui a été supprimé. Il a été renvoyé au titre IV ; il est descendu de là au titre X comme simple contravention ; la dernière discussion a eu pour résultat de le replacer de nouveau dans les matières correctionnelles. C'est ce qui fait que j'ai à vous en faire rapport.

Dans la séance de mercredi dernier, l'honorable M. Orts a fait remarquer que les faits prévus par cet article ont un cas caractère politique et que dès lors on arriverait à une situation assez singulière quant à la compétence, si on considérait ces faits comme de simples contraventions. En effet, les crimes et les délits politiques doivent être soumis au jury, mais aucune disposition ne porte qu'il en est de même des contraventions.

Or, il paraît difficile de soumettre au tribunal de police des faits politiques, alors que dans l'intention du corps constituant ces faits ne peuvent être déférés aux tribunaux correctionnels.

Cette observation très fondée a déterminé votre commission à ne pas comprendre des faits politiques dans la matière des contraventions.

Ce point acquis, il s'agissait de savoir quels étaient les faits de la nature de ceux prévus par cet article, qui devaient continuer à être punis.

L'article était rédigé de la manière suivante :

« Seront punis de huit jours à six mois d'emprisonnement et d'une amende de vingt-six francs à cinq cents francs ;

« 1° Tous cris séditieux publiquement proférés. »

Votre commission a pensé qu'il y a là un fait qui doit nécessairement être réprimé.

Certainement ce fait, dans la plupart des cas, n'aura aucune gravité, aucune importance.

Mais le calme et la paix dont nous jouissons ne sont pas malheureusement l'état permanent d'un peuple.

II peut arriver que certaines excitations dangereuses se produisent, que l'esprit public soit jusqu'à un certain point disposé à les accueillir. En semblable circonstance, la police doit avoir une action, et l'on ne peut tolérer que l'on profère publiquement des cris pouvant avoir des conséquences déplorables.

La seconde disposition de l'article est celle-ci :

« 2° Le port public de tous signes extérieurs de ralliement non autorisés par les règlements de police. »

Cette disposition est évidemment trop large ; il y a quantité de signes de ralliement qui n'ont rien d'illicite ni de séditieux et qui ne doivent pas être punis.

On ne doit pas obliger une société de musique qui porte un drapeau, à demander une autorisation à la police avant de porter ces signes parfaitement inoffensifs.

Votre commission pense donc qu'il y a lieu de supprimer en grande partie cette disposition et de ne punir que les signes qui ont un caractère dangereux pour l'ordre public.

Le troisième fait puni était le suivant :

« 3° L'exposition, dans des réunions ou des lieux publics, la distribution ou la mise en vente de tous signes ou symboles destinés à troubler la paix publique. »

Il y a là encore un fait punissable. On ne doit pas permettre de porter des signes dont la conséquence serait un attentat à l'ordre public. Déjà la loi belge avait empêché, à une époque qui heureusement est loin de nous, un fait semblable. Il a été défendu de porter les emblèmes d'une puissance étrangère avec laquelle nous étions en guerre. Le même cas peut se présenter, et il est évident qu'il est utile d'avoir pour la même éventualité le même moyen de sauvegarder la tranquillité.

Voici la rédaction que propose la commission :

« Seront punis de huit jours à trois mois d'emprisonnement et d'une amende de vingt-six à cinq cents francs, tous ceux qui auront publiquement ou proféré des cris séditieux, ou exposé ou arboré des signes ou emblèmes ayant ce caractère. »

Il est clair que le délit sera soumis à la cour d'assises, puisqu'il constitue un fait politique dans lequel l'intervention du jury est nécessaire.

J'ajoute que cet article viendrait à la suite de l'article qui vient d'être adopté tel qu'il a été amendé par l'honorable M. Guillery dans le titre V.

M. Orts. - Quel que soit le légitime désir de la Chambre de terminer la discussion du Code pénal, je demande l'impression de l'amendement et son appréciation à une lecture un peu plus sérieuse et plus calme qu'une simple audition.

Je trouve que l'article est d'un vague réellement effrayant et qu'il punit des choses que, pour ma part, je ne crois pas punissables, que je ne crois pas utile de punir.

Je n'aime pas les pénalités portées contre les cris séditieux sans définition aucune ; je ne vois pas grande nécessité pour la société de les réprimer.

Je ne veux pas de lois qui n'ont pas pour but de punir les faits réellement immoraux contre lesquels la société a à se défendre, mais qui sont des armes mises entre les mains du parti vainqueur pour opprimer le parti vaincu.

Je connais des lois sur les cris séditieux sous l'empire des troubles révolutionnaires du siècle dernier en France ; j'en connais dans les mauvais jours de la restauration. Mais un cri séditieux qui n'est rien qu'un simple cri, qui ne constitue ni une injure envers un des pouvoirs publics, ni une injure envers la personne du Roi ou un membre de la famille royale, un cri séditieux qui n'est pas une provocation à la révolte, à la désobéissance, n'est pas une chose bien dangereuse, et c'est une chose qui n'a pas de définition.

Prenons un exemple. Je suppose que quelqu'un, dans les rues de Bruxelles, crie : « Vive la République ! » La société ne sera pas le moins du monde troublée par cet écart d'imagination qui est plus souvent l'œuvre d'un ivrogne que celle d'un homme de bon sens.

Si, au contraire, un individu, au lieu de faire appel à une autre forme de gouvernement, a manifesté ses idées à cet égard par un cri, proféré, dans un temps calme, des paroles injurieuses pour le chef de la monarchie belge, je conçois qu'en les réprime. Mais pourquoi ?

Parce que c'est une offense envers la personne du Roi et non un cri séditieux. Que, dans un moment de trouble, quelqu'un profère les mêmes cris en présence de gens qui les attendent comme une provocation à la rébellion, je conçois qu'on les réprime encore, mais comme une provocation à la rébellion.

M. Nothombµ. - Et s'il y a vingt-cinq personnes qui crient : « Vive la république » ?

M. Orts. - S'il y a vingt-cinq personnes qui crient : « Vive la république » et si elles se bornent à ce cri, il n'y a pas plus dd danger que si une seule personne le proférait. Nous avons traversé 1848, et cette époque était celle où le cri de « vive la république » pouvait avoir le plus d'importance. Eh bien, quoique beaucoup de cris aient été proférés, on n'a arrêté personne et cela n'a pas fait arriver la république.

Quant aux signes qui seraient exposés, aux emblèmes qui seraient arborés dans des réunions publiques, c'est encore d'un vague inouï. Qu'est-ce que c'est que ces signes ? Donnez-moi une indication. Je ne sais ce que vous voulez punir. Je le répète, ce sont là des armes de part'. Nous vivons depuis 1830 au milieu de toutes les excitations imaginables ; nous n'avons pas eu besoin de semblables lois pour vivre calmes et tranquilles. 1Il y a eu une loi temporaire en 1834. Eh bien, cette loi, qu'on s'était donné la peine de faire voter par les deux Chambres, n'a jamais reçu d'application, tant elle était peu utile, peu nécessaire à la défense des intérêts publics.

- La Chambre, consultée, renvoie la discussion à demain.

Articles 585 et 586

M. Pirmez, rapporteur. - La Chambre a réservé les articles 585 et 586, qui donnent la définition du délit d'escroquerie. Votre commission avait cru, messieurs, pour tout à la fois préciser ces délits si multiformes et pour comprendre dans la loi tous les faits qui méritent d'être réprimés par une peine, devoir diviser ces faits en deux catégories, l'une comprenant ceux qui se passent en dehors d'un contrat (page 1241) sérieux , l'autre comprenant ceux qui le commettent dans une convention réelle ; les uns ont pour but d'obtenir la chose d'autrui sans un contrat, les autres ont pour but d'obtenir la chose d'autrui par un contrat.

M. le ministre de la justice a pensé qu'il y aurait danger à introduire dans une matière aussi pratique une distinction toute nouvelle avec laquelle les tribunaux seraient longtemps peut-être à se familiariser.

Votre commission a accueilli cette objection.

D'un, autre côté votre commission avait proposé de restreindre dans des limites plus étroites l'incrimination qui se trouve inscrite dans le projet du gouvernement.

M. le ministre de la justice s'est rallié à cette proposition.

Dans ces termes, messieurs, la commission et M. le ministre de la justice ont arrêté de commun accord la rédaction suivante :

« Art. 485. Quiconque, dans le but de s'approprier une chose appartenant à autrui, se sera fait remettre ou délivrer des fonds, des meubles ou des obligations, dispositions, billets, promesses, quittances ou décharges, soit en faisant usage de faux noms ou de fausses qualités, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l'existence de fausses entreprises, d'un pouvoir ou d'un crédit imaginaire, ou pour faire naître l'espérance ou la crainte d'un succès, d'un accident ou de tout autre événement chimérique, ou pour abuser autrement de la confiance ou de la crédulité, sera puni d'un emprisonnement d'un mois à cinq ans et d'une amende de vingt-six francs à trois mille francs.

« Le coupable pourra de plus être condamné à l'interdiction conformément à l'article 44. »

Telles sont, messieurs, les dispositions sur lesquelles votre commission m'a chargé de vous faire rapport.

- La Chambre décide que la proposition de la commission sera imprimée et distribuée et qu'elle sera discutée dans la séance de demain.

Article 256

MpVµ. - La Chambre veut-elle aborder maintenant la discussion de l'article 256, relatif aux enquêtes parlementaires ? L'article précédent a été voté, mais la commission propose de retrancher ces dispositions du Code pénal pour en faire l'objet d'une loi spéciale, qui resterait à l'ordre du jour.

M. E. Vandenpeereboom. - Je ne sais si la Chambre discutera immédiatement cette proposition ou si elle renverra la discussion après l'impression du rapport. Quant à moi, je suis prêt.

M. Devaux. - Laissons imprimer le rapport. Nous pourrions nous occuper maintenant du rapport de M. Carlier.

M. E. Vandenpeereboom. - Je ne m'oppose pas à l'impression du rapport.

MpVµ. - Le rapport sera imprimé et distribué.

Article 675

MpVµ. - M. Carlier a proposé, au nom de la commission, de rédiger l'article 675 de la manière suivante :

« Ceux qui mèneront sur le terrain d'autrui des bestiaux, de quelque espèce qu'ils soient et à quelque époque que ce soit, dans les prairies artificielles, dans les vignes, oseraies, houblonnières, et dans les plants ou pépinières d'arbres fruitiers, ou autres faits de main d'homme. »

M. Carlier, rapporteur. - Messieurs, il s'est glissé une erreur dans l'impression de mon rapport ; j'ai parlé du droit de pasage, on a imprimé passage.

M. de Theux. - Messieurs, si j'ai bien compris le rapport, la pensée de la section centrale est de ne porter atteinte à aucun droit actuellement existant ; mais je pense qu'elle entend également n'accorder aucun droit nouveau.

Je crois, en un mot, messieurs, que lon reste complètement sous l'empire des dispositions existantes, telles qu'elles ont été appliquées jusqu'ici.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il n'est porté aucune atteinte aux droits civils.

M. Carlier. - La commission entend maintenir les droits anciens et ne rien innover. C'est pour ce motif qu'elle s’est attachée à reproduire, dans la disposition qu'elle propose, les termes de l'ancien article du Code rural, qui a été ensuite inséré dans le Code pénal.

- L'article 675, tel qu'il est proposé par la commission, est mis aux voix et adopté.

Ordre des travaux de la chambre

M. Jamar. - Messieurs, dans la séance du 9 mars dernier, la commission d'industrie a fait rapport sur un grand nombre de pétitions dont l'analyse avait été présentée à la Chambre en juin 1860.

Il y a une question qui intéresse de très nombreux industriels ; il serait désirable que la Chambre pût, avant de se séparer, se prononcer sur les conclusions de la commission d'industrie.

J'ai donc l'honneur de proposer à la Chambre de s'occuper de cet objet immédiatement après les articles du Code pénil sur lesquels elle doit encore voter.

M. Royer de Behrµ. - Messieurs, je ne ferai qu’une seule observation : c'est que le rapporteur, l'honorable M. Sabatier est malade.

Il est très désirable que le rapporteur soit présent.

M Jamarµ. - La commission d'industrie propose simplement le renvoi des pétitions à M. le ministre des finances. Je ne pense pas que la présence de l'honorable rapporteur soit indispensable.

- La proposition de M. Jamar est mise aux voix et adoptée.

Prise en considération de demande de naturalisation

Prise en considération de la demande en grande naturalisation du sieur Lambert-Joseph Breukers

Nombre de votants, 65.

Boules blanches, 54

Boules noires, 11.

En conséquence, la demande en grande naturalisation du sieur L.-J. Breukers est prise en considérationµ. Cette résolution de la Chambre sera transmise au Sénat.

Prise en considération de demandes de naturalisation ordinaire

Nombre de votants, 64.

Majorité absolue, 33.

Benoni-Zéphyr Fontaine, maréchal des logis au 3ème régiment d'artillerie, né à Clairfontaine (France), le 11 novembre 1809, obtient 52 suffrages.

Henri Mennig, mécanicien, né à Cologne, le 20 mai 1806, domicilié à Molenbeek-Saint- Jean (Brabant), 58.

Henri-Louis Fitzky, commissionnaire en marchandises, né à Coblence, le 26 juillet 1828, domicilié à Anvers, 58.

Edouard Sury, hôtelier et propriétaire, né à Londres, le 21 décembre 1812, domicilié à Spa, 56.

Jean-Joseph Slaat, brigadier à la compagnie d'ouvriers d'artillerie, né à Zierikzee (Pays-Bas), le 7 mars 1783, domicilié à Anvers, 55.

Dominique-Joseph-Hubert-Antoine Schyrgens, tailleur, né à Maestricht, le 9 février 1821, domicilié à Vottem (Liège), 58.

Pierre Brouwers, négociant et propriétaire, né à Grondsveld (partie cédée du Limbourg), le 24 janvier 1811, domicilié à Saint-Josse-ten-Noode-lez-Bruxelles, 55.

Loeb Stein, marchand d'antiquités, né à Schwebhelm (Bavière), le 4 janvier 1810, domicilié à Bruxelles, 55.

Godefroid Verbruggen, agréé-facteur au chemin de fer de l'Etat, né à Heythuysen (partie cédée du Limbourg), le 7 mars 1821, domicilié à Malines, 55.

Jean-Barthélemi-Théodore Starmans, ébéniste, né à Heerlen (partie cédée du Limbourg), le 1er mai 1825, domicilié à Liège, 57.

Louis-Frédéric-Guillaume Wolfers, fabricant orfèvre, né à Minden (Prusse), le 31 décembre 1820, domicilié à Bruxelles, 55.

Charles-Edouard Sennewald, musicien au régiment des guides, né à Kleinnenhausen (Saxe-Weimar), le 24 juin 1814, domicilié à Bruxelles, 55.

David Samuel, négociant, né à Lixheim (France), le 18 novembre 1838, domicilié à Arlon, 56.

François Elias, trompette à la compagnie d'artillerie, né à Gand, le 7 août 1798, domicilié à Anvers, 55.

Antoine-Théophile Schroeder, mécanicien-constructeur, né à Cologne, le 26 janvier 1830, domicilié à Couillet (Hainaut), 58.

Louis-Antoine Duhamel, cultivateur, né à Leers-Nord (province de Hainaut), le 26 mars 1833, domicilié à Leers-Nord (Hainaut), 57.

Paul Cholet, ancien officier vétérinaire, né à Dole (France), le 2 juin 1788, domicilié à Molenbeek-Saint-Jean (Brabant), 57.

Louis-Hubert-Joseph Fuchs, architecte de jardins et professeur de l'école d'horticulture de Vilvorde, né à Barmén (Prusse), le 9 mai 1818, domicilié à Ixelles (Brabant), 58.

Pierre Wester, meunier et propriétaire, né à Monnerich (grand-duché de Luxembourg), le 11 février 1823, domicilié à Fouches (Luxembourg), 59.

(page 1242) - Ces diverses demandes de naturalisation ordinaire, ayant obtenu la majorité absolue des suffrages, sont prises en considération. Cette résolution de la Chambre sera transmise au Sénat.


MpVµ. - La Chambre veut-elle statuer maintenant sur la naturalisation ordinaire demandée en faveur du sieur Isaac Yanni ?

M. de Boe. - Je demande à la Chambre de tenir cette question en réserve ; elle est identique ) celle qui est relative au sieur Salamé. La commission des naturalisations que la Chambre a saisie de l'affaire du sieur Salamé, après le renvoi fait par le Sénat, ne tardera pas à présenter son rapport à la Chambre.

M. Van Hambeeckµ. -Messieurs, je pense que la seule décision à prendre par la Chambre quant à présent, s'est de renvoyer l'affaire du sieur Yanni à la commission des naturalisations. La commission a été saisie par la Chambre de l’examen de l'affaire du sieur Salamé.

Ces deux questions sont absolument identiques, il me paraît donc qu'elles doivent recevoir la même solution.

M. de Boe. - Messieurs, le gouvernement a présenté un projet de loi pour accorder la naturalisation ordinaire au sieur Yanni ; la commission des naturalisations, constituée en quelque sorte en commission spéciale, a conclu à l'adoption. Mais de son côté le Sénat n'a pas cru devoir adopter le projet de loi accordant la naturalisation ordinaire au sieur Salamé ; il s'est borné à voter la prise en considération, et la Chambre, de nouveau saisie, a renvoyé l'affaire à la commission des naturalisations qui l'examine.

Si l'assemblée partage la manière de voir du Sénat a cet égard, la seule marche à suivre, c'est que le gouvernement retire le projet de loi.

Le gouvernement n'a pas encore pris de décision. Je demande qu'en attendant, la question soit mise à la suite de l'ordre du jour.

M. Van Humbeeckµ. - Je me rallie à cette proposition.

M. le ministre de la justice (M. Tesch). - Il serait très utile que la commission des naturalisations voulût bien examiner la question.

Si la commission trouve que la marche suivie par le gouvernement est irrégulière et que celle qui a été suivie par le Sénat est au contraire régulière, elle pourrait annuler le projet de loi présenté par le gouvernement ; mais je ne pense pas qu'il y ait lieu, de la part du gouvernement, de retirer le projet de loi dans aucun cas.

M. de Brouckereµ. - Messieurs, la commission des naturalisations, qui s'est réunie ce matin, a examiné l'affaire du sieur Salamé ; elle est restée unanimement d'avis que la marche suivie par le gouvernement et adoptée par la Chambre était parfaitement régulière, et un rapport lui sera fait dans ce sens. Mais la commission a pensé qu'il n'y avait pas lieu à établir un conflit entre les deux Chambres, à l'occasion d'une affaire d'aussi peu d'importance ; elle proposera donc à la Chambre comme conclusion, et à titre de concession seulement, de suivre la marche adoptée par le Sénat.

Je crois donc que ce qu'il y a de mieux à faire, c'est que la Chambre attende le rapport sur l'affaire Salamé et que l'affaire dont il a été question tout a l'heure soit postposée de manière qu'elle reçoive la même solution qu'aura reçue ici l'affaire Salamé.

- La Chambre décide que la demande de naturalisation du sieur Issac Yanni sera remise à la suite de l'ordre du jour.

- La séance est levée à quatre heures et demie.