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Congrès
national de Belgique
Séance du
mercredi 15 juin 1831
Sommaire
1) Communications des pièces
adressées au congrès
2) Commission des
récompenses (de Sauvage, A. Rodenbach)
3) Communications des pièces
adressées au congrès
4) Proposition ayant pour objet
d’empêcher la reprise immédiate des hostilités (Le Grelle, d’Hanis van Cannart, Jottrand, de Robaulx, Jacobs, Le Grelle, de Robaulx, d’Elhoungne, d’Hanis van Cannart, de Sécus (père), de Robaulx, de Theux, d’Hanis van Cannart, A. Gendebien, Jacobs, Le Grelle, de Robaulx, Defacqz)
5) Rapport de la commission
des pétitions (garde civique, officiers volontaires italiens (de Theux, A. Rodenbach, A. Gendebien)
6) Proposition ayant pour
objet d’empêcher la reprise immédiate des hostilités (Beyts, Le Grelle, Jottrand, Beyts, Gendebien, d’Oreye)
(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles,
Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 3)
(page 285) (Présidence de M. Raikem, premier vice-président)
La
séance est ouverte à une heure. (P. V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il
est adopté. (A. C.)
COMMUNICATION DE PIECES ADRESSEES AU CONGRES
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit une lettre de M. Davignon ,
annonçant qu'il est retenu chez lui par une indisposition, et une autre de M.
le vicomte de Bousies de Rouveroy, informant l'assemblée qu'il se rendra avant
peu de jours à son poste. (P. V.)
- Pris
pour notification. (P. V.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, donne lecture de la lettre suivante
:
«
Monsieur le président,
« L'article
2 du décret du 28 mai dernier, relatif aux drapeaux d'honneur à décerner aux
villes ou communes dont les volontaires se sont portés aux lieux menacés par
l'ennemi, ou qui ont contribué d'une manière efficace au succès de la
révolution, porte que la commission qui décernera ces drapeaux sera composée
des membres actuellement en fonctions de la commission des récompenses et de
neuf membres du congrès, nommés par l’assemblée et pris dans les différentes
provinces.
« Pour
que je puisse faire exécuter les dispositions du décret précité, j'ai l'honneur
de vous prier de vouloir bien faire nommer les membres du congrès qui devront
faire partie de la commission instituée par l'article 2, et de les inviter à
entrer en fonctions le plus tôt possible.
« Agréez,
monsieur le président, l'assurance de ma haute considération.
« Bruxelles,
le 15 juin 1831.
« Le
ministre de l'intérieur,
« E. DE SAUVAGE. »
(M. B., 17 juin, et A.)
M. le président consulte l'assemblée, qui décide
qu'elle procédera immédiatement à la nomination des membres de la commission. (M. B., 17 juin.)
M. Alexandre
Rodenbach – Je propose que les membres de chaque province se réunissent
en sections, et qu'ils désignent entre eux le membre qui fera partie de la commission.
(M. B., 17 juin.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire – C'est impossible, puisque le décret
porte que la nomination sera faite par l'assemblée. (M. B., 17 juin.)
M. Alexandre
Rodenbach – On pourrait faire la désignation en sections, et l'assemblée
la sanctionnera ensuite. (Appuyé ! appuyé !) (M. B., 17 juin.)
-
Cette proposition est mise aux voix et adoptée. (P. V.)
Les députés
de chaque province se retirent dans les sections qui leur sont désignées. La
séance est suspendue pendant quelques instants. (M., B., 17 juin.)
Les
membres désignés dans les sections sont :
Pour
la province d’Anvers, M. le comte de Robiano ;
Brabant
méridional, M. le baron Joseph d'Hooghvorst ;
Flandre
occidentale, M. Jean Goethals ;
Flandre
orientale, M. Annez de Zillebeecke ;
(page 286) Hainaut, M. Alexandre
Gendebien ;
Liége,
M. de Behr ;
Limbourg,
M. le comte Félix de Mérode ;
Luxembourg, M. Marlet ;
Namur,
M. Brabant. (M. B., 17 juin.)
-
L'assemblée décide que la commission sera composée de ces neuf membres. (P. V.)
COMMUNICATION DE PIECES ADRESSEES AU CONGRES
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit une lettre par laquelle M.
d'Martigny demande un congé de dix jours. (M. B., 17 jnin.)
- Ce
congé est accordé. (P. V,)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, lit le sommaire d'une pétition par
laquelle quarante-trois habitants de Wervicq et des communes environnantes
demandent l'établissement d'un droit d'entrée sur les tabacs étrangers. (M. B..
17 juin, et P. V.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit une proposition de M. Le
Grelle, ainsi conçue :
« Je
demande que le gouvernement soit invité par un message à prendre les mesures les
plus promptes et les plus efficaces pour empêcher qu'une reprise immédiate
d'hostilités ne vienne entraver le cours des négociations, et à porter par un
ordre du jour la présente résolution à la connaissance de l'armée. »
Cette
proposition était précédée de considérants. (M. B., 17 juin.)
Plusieurs
membres se lèvent pour appuyer la proposition. (M. B., 17 juin.)
M. Le Grelle la développant – Messieurs, les
faits qui viennent de se passer à Anvers (Note de bas de page : Dans la nuit du 13 au 14 juin, une
fusillade sans but s'était engagée avec les canonnières hollandaises ; elle
s'était renouvelée dans la journée du 14), et dont vous avez tous connaissance, ont motivé ma
proposition et en sont les meilleurs de tous les développements. L'accueil que
vous venez de faire à cette proposition en vous levant spontanément pour la
soutenir me dispense d'en dire davantage. (M. B., 17 juin.)
Voix
nombreuses – Le
renvoi en sections. (M. B., 17 juin.)
M.
d’Hanis van Cannart – Je demande l'urgence. (M. B., 17 juin.)
M. Le Grelle – Messieurs, au moment où une vive
fusillade a été échangée entre nos soldats et les soldats ennemis, lorsque le
canon même s'est fait entendre et que les hostilités peuvent être reprises
d'heure en heure par suite de ces actes imprudents, remettre ma proposition de
vingt-quatre heures ce serait en compromettre le sort. Il y a de bons patriotes
à Anvers qui croient, en commettant des actes d'hostilité contre les
Hollandais, répondre aux vœux du gouvernement et du congrès ; il faut les
désabuser promptement. Nous voulons tous la guerre sans doute, si les
négociations ne réussissent pas ; nous la voulons prompte, mais nous ne la
voulons pas immédiate, ni surtout partielle. Il est urgent de faire connaître
l'opinion du congrès à cet égard. Je propose que, vu l'urgence, on se retire
immédiatement en sections pour s'occuper de ma proposition. (M. B., 17 juin.)
M.
Jottrand – Je serais aussi d'avis, puisqu'on dit qu'il y a erreur sur la véritable
opinion du congrès, que l'on fît savoir à Anvers que nous ne voulons la guerre
que quand le moment sera venu. Mais la proposition de M. Le Grelle a cet
inconvénient qu'elle renferme un article qui, en se référant à quelques
dispositions du Code pénal, mérite d'être examiné mûrement, et qu'il me serait
impossible d'admettre pour ainsi dire spontanément. Je crois donc qu'il faut
que cette disposition soit examinée en sections, et le délai de vingt-quatre
heures me semble n'entraîner aucun inconvénient. Quant au désir manifesté par
M. Le Grelle, que l'opinion du congrès soit connue, la manière dont la
proposition est accueillie ne peut laisser aucun doute à cet égard. (M. B., 17
juin.)
M. de Robaulx – En appuyant les observations de
l'honorable M. Jottrand, j'ajouterai que la proposition de M. Le Grelle me
paraît être conçue dans le sens d'une certaine lettre lancée par certain
général. (Murmures.) Écoutez, messieurs, les faits qui se sont passés à
Anvers ont nécessité l'intervention des généraux, du ministre de la guerre
lui-même, qui s'est rendu sur les lieux. Attendons le rapport qui sera fait sur
ces événements, avant de donner le tort aux soldats belges, comme semble le
faire la proposition. Il faut savoir, avant de rien décider, si ce sont eux, ou
l'ennemi, qui ont été les agresseurs. Nous ne pouvons pas exiger que nos
soldats restent toujours l'arme au bras en face des ennemis, et exposés à leurs
insultes sans pouvoir riposter ; attendons le retour de M. le ministre de la
guerre pour éclaircir les faits ; jusque-là, il ne convient pas de nous occuper
de la proposition. Je me joins à M. Jottrand, dans ce sens que l'intention du
congrès n'est pas de faire la guerre immédiatement et sans attendre les ordres
de l’autorité ; l'adoption de la (page
287) proposition semblerait autoriser à croire que l'autorité n'a pas été
obéie dans cette circonstance. (M. B., 17 juin.)
M. Jacobs – J'appuie la demande
d'urgence. Le seul motif invoqué pour renvoyer à demain est pris de ce qu'un
article de la proposition invoque certaines dispositions pénales contre ceux
qui provoqueraient la reprise des hostilités ; M. Jottrand a dû s'apercevoir
que cet article, ou plutôt ce paragraphe, se trouve dans les considérants de
la proposition, et certes M. Le Grelle abandonnera volontiers les considérants,
parce que d’ailleurs sa proposition se motive d'elle-même. Je dirai maintenant
un mot en réponse à M. de Robaulx. Ce n'est pas dans l'intention de donner tort
aux soldats belges que la proposition a été faite, mais dans le but de retenir
désormais leur ardeur, de les engager à attendre les ordres de leurs chefs, et
de leur faire sentir que les attaques partielles ne peuvent qu'être nuisibles à
notre cause, et que ce n'est qu'en combattant avec ordre et ensemble que l'on
peut espérer du succès. (M. B., 17 juin.)
M. Le Grelle – J'abonde tout à fait dans le sens de
M. Jacobs, et j'abandonne volontiers les considérants de ma proposition. Si le
fond de ma proposition elle-même est approuvé par le congrès, mon but est
atteint. Je répondrai maintenant à M. de Robaulx que c'est à tort qu'il m'a
accusé d’avoir voulu inculper les soldats belges. Je suis Belge aussi, moi, et
je me garderai bien d'imputer à nos soldats des faits qu'on ne saurait leur
reprocher sans être anti-Belge. Ma proposition n'est donc pas un reproche, mais
un vœu pour que le gouvernement prenne des mesures afin d'empêcher des actes
qui pourraient être la cause de la reprise des hostilités. (M. B., 17 juin.)
M. de Robaulx – Je demande la parole pour un fait
personnel. J'ai dit que la proposition de M. Le Grelle me semblait être le
pendant de la lettre de M. Belliard. Je n'ai pas voulu dire autre chose ; je
n'attaque pas les intentions de l'auteur de la proposition, parce que je ne
m'attaque jamais aux personnes, je n'attaque que les choses. J'ai demandé le
renvoi aux sections parce que suis d’ais d'éclaircir les faits avant que de
rien décider. Du reste, je combattrai la proposition, parce qu'elle implique
qu'on aurait désobéi aux ordres de l'autorité, et qu'en tout cas il me semble
inconvenant que le congrès porte un décret formel pour qu'on obéisse aux ordres
du régent. (M. B., 17 juin.)
M. d’Elhoungne – Il suffira d'un mot pour faire
rejeter l'urgence. La proposition pose en fait que les hostilités ont été
commencées par nous ; cela n'est rien moins que prouvé. Il me semble que la
chose est assez grave, et mérite bien qu'on l'examine en sections pour savoir
de quel côté ont commencé les hostilités. Je pense que sous ce rapport la
question d'urgence doit être écartée, et que ceux-là mêmes qui l'ont demandée
ne s'opposeront pas à l'ordre du jour. (M. B., 17 juin.)
M.
d’Hanis van Cannart – Je ne vois pas dans la proposition ce qu'on veut y voir
d'injurieux aux soldats belges, et je soutiens qu'il n'y a rien qui prouve que
telle a été l'intention de mon honorable ami M. Le Grelle. Sa proposition est
dans les mains de M. le président, qu'on la relise, on verra qu'il ne s'y agit
que d'appuyer le gouvernement de l'opinion du congrès pour que ses ordres aient
la force nécessaire pour empêcher quelques individus d'occasionner la reprise
des hostilités. Je demande une seconde lecture de la proposition. (M. B., 17
juin.)
M. le président donne une seconde lecture du dispositif de la proposition.
(E., 17 juin.)
M.
le baron de Sécus (père) – Dans une reprise d'hostilités, il
peut y avoir tort des deux côtés. La force armée est et doit être
essentiellement obéissante. Si un corps est attaqué, il a certainement le droit
de se défendre, parce qu'il est alors dans le cas de légitime défense ; mais le
moment de la légitime défense passé, tout corps qui continue les hostilités
malgré ou sans les ordres de ses supérieurs se met en contradiction avec son
devoir ; ainsi, que l'on se défende lorsqu'on est attaqué, rien de plus
légitime ; mais quand les attaques ont cessé, établir des batteries offensives,
tracer des lignes, faire des travaux offensifs, et tout cela malgré les ordres
supérieurs, c'est vouloir mettre le pays à la merci de nos ennemis. Et qui vous
dit que le roi de Hollande lui-même ne désire pas la guerre ardemment ?... (M.
B., 17 juin.)
M. de Robaulx – Messieurs, il y a ici une erreur qui
domine toute la discussion ; entendez-vous rapporter le décret qui distrait le
pouvoir exécutif de l’assemblée ? expliquez-vous. Nous reprendrons le pouvoir
exécutif s'il y a lieu. Voyez où l'on nous mène ? A chaque acte
d'insubordination, à chaque germe de désorganisation, et certes il n'en manque
pas, on viendra nous consulter pour savoir ce qu'il faut faire. Mais si nous
répondons, nous sortons de nos attributions pour faire du pouvoir exécutif.
Tout ce qui concerne la paix ou la guerre est du ressort du gouvernement et non
du nôtre. Adopter la proposition c'est usurper le (page 288) pouvoir du gouvernement. Aujourd'hui vous approuverez la
proposition, mais demain il me sera permis d'en faire une toute contraire ; le
congrès deviendra la convention nationale. Il administrera, il exécutera, en un
mot il confondra tous les pouvoirs que nous avions soigneusement séparés. Ce
n'est pas ainsi qu'il faut agir. Je veux laisser au régent tout son pouvoir.
Vous parlez de lui donner des forces, mais ce n'est pas en proclamant que son
autorité est méconnue que vous la fortifierez. Nous sommes ici pour faire des
décrets, rien de plus. Aujourd'hui, M. Le Grelle vient nous proposer un décret
pour empêcher la reprise des hostilités ; si vous vous croyez en droit de
l'adopter, demain peut-être on viendra vous proposer un décret tout contraire,
et alors que devient le droit constitutionnel du régent ? Je demande la
question préalable sur l'urgence et le renvoi de la proposition aux sections,
parce qu'ainsi le veut le règlement. Du reste les nouvelles que M. Le Grelle
nous a communiquées avant la séance nous prouvent que tout est tranquille à
Anvers et que rien ne s'est passé la nuit dernière. (M. B., 17 juin.)
M.
le chevalier de Theux de Meylandt – Je demande la parole pour une motion
d'ordre. Toute proposition, pour être discutée, doit être mise à l'ordre du
jour la veille. Hier nous avons décidé que nous nous occuperions de la loi sur
la garde civique, suivons l'ordre du jour. Que la proposition soit d'ailleurs examinée
demain en sections, je ne m'y oppose pas ; mais nous en occuper immédiatement
ce serait perdre notre temps sans utilité, car il n'y a aucun inconvénient à
attendre à demain. (M. B., 17 juin.)
M.
d’Hanis van Cannart – Si l'urgence n'est pas reconnue, je serais d'avis de suivre
l'ordre du jour en admettant la motion d'ordre de M. de Theux. J'avais du reste
demandé la parole pour répondre à M. de Robaulx que le but de la proposition de
M. Le Grelle n'est pas la critique d'un acte du gouvernement, mais de faire
connaître à l'armée l'opinion du congrès sur la reprise des hostilités ; il est
loin de nous de vouloir affaiblir le pouvoir du régent, ni de lui porter la
moindre atteinte. (M. B., 17 juin.)
M.
Alexandre Gendebien – La proposition de M. Le Grelle a atteint son but. Son auteur
voulait que l'opinion du congrès fût connue, elle le sera ; car les journaux
feront connaître les détails de cette séance, ces détails seront connus à
Anvers comme ailleurs. On saura que nous ne voulons pas de guerre partielle,
mais une guerre faite avec ordre et avec ensemble ; c'est la seule qui puisse
nous garantir des succès. Quant à l'urgence, je ferai remarquer que si M. le
ministre de la guerre avait répondu aux interpellations qui lui furent faites
dans le comité secret, il aurait, comme le vœu lui en fut exprimé, fait une
proclamation pour expliquer au peuple et à l'armée les intentions du
gouvernement ; il les aurait rassurés sur les préparatifs de guerre, qui leur
causent des inquiétudes très légitimes. Mais depuis trois mois on ne fait rien
ou on semble ne rien faire pour la guerre. Que M. le ministre fasse une
proclamation à l'armée, qu'il envoie un document à Chassé pour lui dire qu'à la
moindre entreprise qu'il permettrait, contraire au droit des gens, la nation
entière prend un engagement d'honneur d'user de représailles. (M. B., 17 juin.)
M. Jacobs – Toute cette discussion me
prouve que la proposition est plus urgente que jamais. Les soldats ne lisent
pas les journaux : on a besoin pour les soldats de la voie ordinaire des ordres
du jour pour leur faire connaître ce qui se passe. On dit que si le ministre
avait fait une proclamation, les faits que nous déplorons ne seraient pas
arrivés. Si le ministre ne fait pas ce qu'il doit, ce n'est pas une raison pour
que le congrès s’endorme et ne veille pas aux intérêts du pays. (M. B., 17
juin.)
M. Le Grelle – Et de quoi s'agit-il, messieurs ?
d'exprimer ce que vous avez tous dans votre cœur (sourire), que vous ne
voulez pas de guerre partielle. (M. B., 17 juin.)
M. le président consulte l'assemblée sur la question suivante
: S'occupera-t-on aujourd’hui de la proposition de M. Le Grelle ?
- La
première épreuve est douteuse. (M. B., 17 juin.)
M.
d’Hanis van Cannart – L'appel nominal ! (M. B., 17 juin.)
- On
procède à l'appel nominal ; 114 membres y répondent : 63 se prononcent pour
l'affirmative, 51 pour la négative. (P. V.)
Ont
répondu négativement : MM. Helias d'Huddeghem, Alexandre Rodenbach,
Eugène de Smet, Liedts, Van der Looy, Bredart, Fransman, de Labeville, Charles
Coppens, Drèze, l'abbé Van Crombrugghe, Watlet, Jottrand, Brabant, le vicomte
Desmanet de Biesme, Alexandre Gendebien, Delwarde, Isidore Fallon, Marlet, Du
Bus, Dams, Blargnies, le comte de Robiano, Demelin, Snick, Frison, Seron, le
baron de Woelmont, Ooms, Rosseeuw, Cols, Van der Belen, Masbourg, d'Elhoungne,
Pirson, Defacqz, de Robaulx, l’abbé Van de Kerckhove, Doreye, le baron Beyts,
Baugniet, le chevalier de Theux de Meylandt, le baron d'Huart, de Behr, Raikem,
Roeser, Van Meenen, (page 289) le
vicomte de Bocarmé, le baron de Meer de Moorsel… (M. B., 17 juin.)
M. le président – La proposition
sera-t-elle renvoyée aux sections ou à une commission ? (J. B., 17 juin.)
- Le
congrès décide qu'elle sera renvoyée à une commission nommée par M. le
président. (M. B., 17 juin.)
M. le président – Voici les noms des membres de la
commission chargée d'examiner la proposition de M. Le Grelle : MM. Le Grelle,
de Robaulx, Defacqz, l'abbé Boucqueau de Villeraie, Barbanson, Jottrand. (M.
B., 17 juin.)
M.
de Robaulx – Je n'accepte pas. (M. B., 17 juin.)
M.
Defacqz – Je
vous prie de m'excuser aussi. (M. B., 17 juin.)
M. le président désigne, en remplacement de MM de
Robaulx et Defacqz, MM. le baron Beyts et Blargnies. (M. B., 17 juin.)
- La
commission se retire à l'instant. (M. B., 17 juin.)
M.
le chevalier de Theux de Meylandt fait, au nom de la commission des pétitions, un
rapport sur une pétition de soixante habitants d'Ostende, relative à la loi sur
la garde civique, qui est en discussion. Cette pétition donnera lieu à un amendement
à proposer sur l'article relatif aux exemptions.
Il
fait ensuite un rapport sur une pétition de plusieurs réfugiés italiens qui
sont venus pour servir dans l'armée belge, ignorant l'article de la
constitution qui empêche de conférer des grades ou donner des places aux
étrangers non naturalisés. Ces réfugiés italiens demandent qu'on leur donne les
moyens de retourner en France, où ils ont leur dépôt. La commission propose le
renvoi de la pétition au ministre de l'intérieur, afin qu’il prenne des
renseignements sur les pétitionnaires, et qu'il leur alloue, s'il y a lieu, sur
les fonds des dépenses imprévues, la somme nécessaire pour retourner en France.
(M. B., 17 juin.)
M. Alexandre
Rodenbach – Les Italiens pétitionnaires venaient servir dans l'armée
belge après avoir combattu pour la liberté dans leur patrie ; je ne crois
pas qu'il y ait une loi qui leur défende de servir comme volontaires. (M. B.,
17 juin.)
M.
le chevalier de Theux de Meylandt – Parmi les réfugiés il y a des
officiers avancés en grade à qui il répugnerait peut-être de servir comme
simples volontaires. (M. B., 17 juin.)
M. Alexandre
Rodenbach – En France on a vu des maréchaux eux-mêmes combattre comme
volontaires. Il y a autant de gloire pour le soldat que pour le général
à combattre pour la liberté. (M. B., 17 juin.)
M.
Alexandre Gendebien – Je demande, outre le renvoi au ministre de l'intérieur, que
la pétition soit renvoyée au ministre de la guerre. (M. B., 17 juin.)
- Le
double renvoi est ordonné. (P. V.)
M. le chevalier de Sauvage, ministre de
l'intérieur – D'après le renvoi de la pétition, si elle est fondée, est-il entendu que
le ministre pourra compter des fonds aux pétitionnaires. (Oui 1 oui !) (M.
B., 17 juin.)
- La
séance est suspendue. Elle est reprise au bout de trois quarts d'heure. (M. B.,
17 juin.)
M. le président donne la parole à M. Beyts,
rapporteur de la commission chargée d'examiner la proposition de M. Le Grelle.
(M. B., 17 juin, et P. V.)
M. le baron Beyts, faisant le rapport de la
commission, s'exprime en ces termes – C'est sans doute, messieurs, avec un
sentiment de regret que devant les circonstances où nous nous trouvons, la
commission s'est vue forcée de prendre des conclusions contraires à la
proposition de notre honorable collègue. Les membres de la commission, ayant
pesé mûrement la proposition, ont vu avec regret qu'elle renfermait une petite
inconstitution1alité. (On rit.) La majorité a été d'avis de la rejeter,
tandis qu'à l'unanimité elle a été d'avis de désapprouver les actes d'hostilité
commis ces jours derniers à Anvers. Nous nous sommes demandé ce qu'il convenait
de faire dans ces circonstances. Quatre membres contre deux, ont été d'avis de
lasser à l'ordre du jour en le motivant.
Les
deux membres de la minorité ont insisté pour qu'il fût envoyé un message au
gouvernement pour le prier de désapprouver les actes d'hostilité. Le congrès
demandera peut-être où nous avons trouvé l'inconstitutionnalité de la
proposition. Dans l'article 68 de la constitution, qui attribue le droit de
paix et de guerre au chef de l'État : (page
290) c'est cet article qui fait que la majorité a combattu jusqu'à l'idée
d'adresser un message au régent. Car que lui dire ? M. le régent, veuillez dire
aux soldats de ne pas commencer la guerre ? (On rit.) Mais un quart
d'heure après qu'on lui aura fait cette demande, il voudra, lui, que la guerre
soit faite. C'est son droit, et nous ne pouvons pas l'en empêcher ; nous avons
donc vu là une petite inconstitutionnalité. (On rit plus fort.) Voici
donc ce que j'ai l'honneur de vous proposer au nom de la commission : c'est
d'abord l'ordre du jour motivé pour lequel a opine la majorité, ensuite la
résolution adoptée par les deux membres formant la minorité.
Ordre
du jour.- « Le
congrès national, considérant que le droit de reprendre les hostilités est
exclusivement dans les pouvoirs constitutionnels du régent ; »
« Considérant
que le patriotisme des soldats belges donne à la nation une garantie suffisante
qu'il ne sera fait de leur part, sans les ordres de leurs chefs, aucune
tentative ni acte d'hostilité qui pourraient compromettre le succès des plans
du gouvernement ;
« Considérant
d'ailleurs qu'il n'y a point de doute que si les ordres du gouvernement étaient
méconnus, cette violation ne reçoive un châtiment exemplaire ;
« Déclare
qu’il n'y a pas lieu de s'occuper de la proposition. »
Voici
la résolution de la minorité : « Le gouvernement sera invité par un message à
porter, par un ordre du jour, à la connaissance de l'armée que le congrès
national désapprouverait hautement des actes d'hostilité qui seraient commis de
la part des Belges sans ordre supérieur. »
Vous
aurez à choisir entre ces deux propositions. (M. B., 17 juin, et P. V.)
M. le président – La discussion
est ouverte sur les conclusions de la commission. (P. V.)
M. Le Grelle, membre de la minorité de la
commission, soutient la nouvelle rédaction qu’il a proposée. (E., 17 juin.)
M. Jottrand, M. le baron Beyts et M. Le Grelle soumettent encore quelques
observations. (E., 17 juin.)
M. le président lit de nouveau les conclusions de la
majorité pour consulter le congrès. (E., 17 juin.)
M. Gendebien demande qu'on vote séparément sur
chaque considérant. (E., 17 juin.)
Le
premier et le second sont adoptés ; ils sont ainsi conçus :
«
Considérant que le droit d'ordonner la reprise des hostilités est exclusivement
dans les pouvoirs constitutionnels du régent ;
« Considérant
que le patriotisme des soldats belges donne à la nation une garantie suffisante
qu'il ne sera fait de leur part, sans les ordres de leurs chefs, aucune
tentative ni acte d'hostilité qui pourraient compromettre le succès des plans
du gouvernement. » (P. V.)
M. Doreye demande de remplacer, dans le troisième
considérant, les mots : ne reçoive un châtiment exemplaire, par ceux de
: serait punie conformément aux lois (A)
- Le
considérant ainsi amendé est adopté en ces termes :
«
Considérant d'ailleurs qu'il n'y a point de doute que, si les ordres du
gouvernement étaient méconnus, cette violation serait punie conformément aux
lois. » (P. V.)
L’assemblée
adopte ensuite le dispositif, qui est ainsi conçu :
« Déclare
qu'il n'y a pas lieu de s'occuper ultérieurement de la proposition. » (P. V.)
M. Eugène de Smet demande qu'il soit
inséré au procès-verbal qu'il a voté contre cette résolution. (P. V.)
M. le président – Les
dispositions que vous venez d'adopter ne formant pas un décret, mais une
résolution, seront seulement inscrites au procès-verbal, et l'ensemble n'en
sera pas voté par appel nominal. (J. B., 17 juin.)
La
séance est levée à cinq heures. (P. V.)