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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mardi 27 juin 1848

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session extraordinaire 1848)

(Présidence de M. Destriveaux, doyen d'âge.)

(page 3) M. de Perceval et M. Thibaut remplissent les fonctions de secrétaires.

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Perceval procède à l’appel nominal à 3 heures et quart.

M. Thibaut. donne lecture des procès-verbaux de la séance royale et de la séance de la chambre d'hier ; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. le président - Une réclamation contre les élections de l'arrondissement de Soignies et une réclamation contre les élections de l'arrondissement de Marche ont été reçues ce matin, et ont été transmises aux commissions chargées de vérifier les procès-verbaux de ces élections.

Vérification des pouvoirs

Arrondissement de Bruxelles

M. Vilain XIIII, au nom de la première commission de vérification des pouvoirs, fait rapport sur l'élection de MM. de Pouhon, Lebeau, E. Prévinaire, Orts fils. Verhaegen, Cans, Thiéfry, de Brouckere et Anspach, par le district de Bruxelles, et conclut à leur admission comme membres de la chambre des représentants.

- Ces conclusions sont adoptées.

M. le président. - Je prie M. de Pouhon de prêter serment.

M. H. de Brouckere - M. de Pouhon a été élu dans deux districts (Bruxelles et Verviers). Il ne doit prêter serment que lorsque les pouvoirs pour les deux arrondissements auront été vérifiés.

- MM. Prévinaire, Orts fils, Verhaegen, Cans, Thiéfry, de Brouckere et Anspach prêtent serment.

Arrondissement de Louvain

M. Lelièvre, au nom de la même commission, fait rapport sur les élections de Louvain et propose l'admission des candidats élus.

- Ces conclusions sont adoptées.

En conséquence, MM. de Man d'Attenrode, de Luesemans, Christiaens et Vandenberghe de Binckum sont proclamés membres de la chambre.

MM. Christiaens et Vandenberghe de Binckum prêtent serment.

Arrondissement de Nivelles

M. Tesch, au nom de la même commission, fait rapport sur les élections de Nivelles et propose l'admission des candidats élus.

Ces conclusions sont adoptées. En conséquence, MM. de Mérode, Trémouroux, Mercier et Mascart sont proclamés membres de la chambre.

MM. Mercier, Tremouroux et Mascart prêtent serment.

Arrondissement d'Eecloo

M. de Renesse, au nom de la troisième commission, fait rapport sur l'élection de M. Emile Van Hoorebeke, élu par le collège électoral d'Eecloo.

La commission propose l'admission de M. Van Hoorebeke comme membre de la chambre des représentants.

- Ces conclusions sont adoptées.

Arrondissement de Gand

M. Cools, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de MM. T'Kint de Naeyer, Manilius, Delehaye, d'Elhoungne, Reyntjens, Emile Vanhoorebeke et Van Grootven, élus par le collège électoral de Gand.

La commission propose l'admission de ces messieurs comme membres de la chambre des représentants.

- Ces conclusions sont adoptées.

MM. T'Kint de Nayer, Manilius, Delehaye, Reyntjens, Van Hoorebeke et Van Grootven prêtent serment.

Déclaration d'option électorale

M. Van Hoorebeke. - Je déclare opter pour l'arrondissement d'Eecloo.

Vérification des pouvoirs

Arrondissement d'Audenaerde

M. de Chimay, au nom de la troisième commission de vérification des pouvoirs, présente le rapport sur l'élection de MM. Liefmans, Raymond d'Hont et Bourdeau d'huy, représentants élus par le collège électoral du district d'Audenarde, les deux premiers au premier tour de scrutin, le troisième au scrutin de ballotage. Il y a eu (dit M. le rapporteur) une réclamation contre les résultats de ce ballotage. On a prétendu que deux électeurs qui étaient présents n'avaient pas été admis par le bureau. Mais l'article 23 de la loi électorale déclare de la manière la plus formelle qu'il faut, pour être admis à voter, être inscrit sur la liste des électeurs. Or ces électeurs ne sont pas inscrits sur la liste. Ce nombre de deux électeurs ne pouvant avoir aucune influence sur les résultats du ballotage, votre commission vous propose de ne pas vous arrêter à cette difficulté et de valider l'élection de M. Bourdeau d’huy.

- Ces conclusions sont adoptées.

MM. Liefmans, Raymond d'Hont et Bourdeau d’huy prêtent serment.

Arrondissement d'Alost

M. Lesoinne, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de MM. Van Cleemputte, Cumont-Duclercq et Bruneau, par le district d'Alost, et conclut à leur admission.

- Ces conclusions sont adoptées; en conséquence, MM. Van Cleemputte, Cumont-Duclercq et Bruneau sont proclamés membres de la chambre des représentants.

MM. Van Cleemputte, Cumont-Duclercq et Bruneau prêtent serment.

Arrondissement de Saint-Nicolas et de Termonde

M. Pierre, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de MM. Cools, de T'Serclaes et de Meester, par le district de Saint-Nicolas, et sur celle de MM. Dedecker, de Kerchove de Denterghem et Vermeire, par le district de Termonde; il conclut à l'admission de MM. Cools, de T'Serclaes, de Meester, Dedecker et de Kerchove de Denterghem; quant à l'admission de M. Vermeire, il propose de surseoir jusqu'à ce qu'il ait produit son acte de naissance.

- Ces conclusions sont adoptées; MM. de Meester, de T'Serclaes et Cools prêtent serment.

Arrondissement de Tournay

M. Lange, au nom de la quatrième commission, fait rapport sur l’élection de MM. de Bocarmé, Gilson, Le Hon et Dumortier, par le district de Tournay, et conclut à leur admission comme membres de la chambre.

- Ces conclusions sont adoptées.

MM. de Bocarmé, Gilson, Le Hon et Dumortier prêtent serment.

Arrondissement d'Ath

M. Lange fait aussi rapport sur l'élection de MM. Delescluse et Jouret, par le district d'Ath, et conclut à leur admission comme membres de la chambre des représentants.

- Ces conclusions sont adoptées.

MM. Delescluse et Jouret prêtent serment.

Arrondissement de Mons

M. Liefmans, au nom de la quatrième commission, fait rapport sur les élections de Mons et propose l'admission des candidats élus.

- Ces conclusions sont adoptées.

En conséquence, MM. Rousselle, Dolez, Lange et de Royer de Dour sont proclamés membres de la chambre. Ils prêtent serment.

Arrondissement de Bruges

M. de Man d'Attenrode, au nom de la deuxième commission, fait rapport sur les élections de Bruges et propose l'admission des candidats élus.

- Ces conclusions sont adoptées.

En conséquence, MM. Devaux, Sinave et Puers-Ducpetiaux sont proclamés membres de la chambre.

MM. Sinave et Puers-Ducpetiaux prêtent serment.

Arrondissement d'Ostende

M. de Man d'Attenrode, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection d’Ostende et propose l'admission de M. Van Iseghem.

- Cette proposition est adoptée.

En conséquence, M. Van Iseghem est proclamé membre de la chambre.

Il prête serment.

Arrondissement de Courtray

M. de Man d'Attenrode, au nom de la même commission, fait rapport sur les élections de Courtray, et conclut à l'admission des candidats élus.

- Ces conclusions sont adoptées.

En conséquence, MM. Ernest Vanden Peereboom, de Haerne et Boulez sont proclamés membres de la chambre. Ils prêtent serment.

Arrondissement de Furnes

M. de Man d'Attenrode, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de Furnes et propose l'admission de M. Clep.

- Cette proposition est adoptée.

En conséquence, M. Clep est proclamé membre de la chambre. Il prête serment.

Arrondissement de Thielt

M. de Man d'Attenrode, rapporteur, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de MM. Lebailly de Tilleghem et Toussaint, élus par le collège électoral de Thielt.

La commission propose l'admission de MM. Lebailly de Tilleghem et Toussaint comme membres de la chambre.

- Ces conclusions sont adoptées.

MM. Lebailly de Tilleghem et Toussaint prêtent serment.

Arrondissement d'Ypres

M. de Man d'Attenrode, rapporteur, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de MM. Alphonse Vanden Peereboom, Lucien Boedt et Van Reninghe, élus par le collège électoral d’Ypres.

La commission propose l'admission de MM. Alphonse Vander Peereboom, Lucien Boedt et Van Reninghe, comme membres de la chambre des représentants.

Ces conclusions sont adoptées.

MM. Alphonse Vanden Peereboom, Lucien Boedt et Van Reninghe prêtent serment.

Arrondissement de Dixmude

M. de Man d'Attenrode, rapporteur, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de M. de Breyne, élu par le collège électoral de Dixmude.

(page 4) La commission propose l'admission de M. de Breyne comme membre de la chambre des représentants.

Ces conclusions sont adoptées. M. de Breyne prête serment.

Arrondissement de Roulers

M. de Man d'Attenrode, rapporteur, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de M. Rodenbach, élu par le collège électoral de Roulers.

La commission propose l'admission de M. Rodenbach.

Ces conclusions sont adoptées.

M. Rodenbach prête serment.


M. de Man d'Attenrode - Je ferai plus tard un rapport sur l'élection de M. Dumortier, élu par le même collège électoral.


MM. de Man d'Attenrode et de Luesemans dont l'admission a été prononcée tout à l'heure, prêtent serment.

Arrondissement d'Anvers

M. de Luesemans, au nom de la sixième commission, fait rapport sur l'élection de MM. Rogier, Osy, Loos, Veydt et Hyacinthe de Baillet, élus par le collège électoral d'Anvers.

La commission propose et la chambre prononce l'admission de ces Messieurs comme membres de la chambre des représentants.

Ils prêtent serment.

Arrondissement de Malines

M. de Luesemans, rapporteur, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de MM. de Brouwer de Hoogendorp, de Perceval et Félix Vandenbranden de Reeth, élus par le collège électoral de Malines.

La commission propose l'admission de ces trois messieurs, comme membres de la chambre des représentants.

Ces conclusions sont adoptées.

MM. de Perceval, de Brouwer de Hoogendorp et Vandenbrande de Reeth prêtent serment.

Arrondissement de Turnhout

M. de Luesemans présente le rapport sur les élections de Turnhout. Il conclut à l'admission de MM. Albéric du Bus et Coomans, aîné, représentants élus par le collège électoral de ce district.

- Ces conclusions sont adoptées.

MM. Coomans et Dubus prêtent serment.

Arrondissement de Hasselt

M. de Luesemans présente le rapport sur les élections d'Hasselt.

Il conclut à l'admission de MM. de Theux et de Pitteurs, représentants élus par le collège électoral de ce district. M. de Pitteurs (ajoute-t-il) n'a pas produit son acte de naissance; mais il est de notoriété publique qu'il est Belge et âgé de plus de 25 ans.

M. Dumortier - D'après les précédents de la chambre, tout membre admis pour la première fois à faire partie de l'assemblée nationale doit prouver qu'il réunit les conditions d'éligibilité. Je suis convaincu que rien ne sera plus facile à M. de Pitteurs que de fournir cette preuve par la production de son acte de naissance. Aussi n'est-ce pas pour lui que je fais cette observation; c'est pour ne pas poser un précèdent. Il importe que la chambre ne dévie pas des règles qu'elle a admises.

Si les membres élus représentants pour la première fois ne produisaient pas leur acte de naissance, quelle garantie aurions-nous qu'ils sont Belges et âgés de plus de 25 ans? On nous a d'ailleurs demande à tous la production de cette pièce, la première fois que nous sommes entrés dans le parlement.

M. le président. - Bien que je sois convaincu que M. de Pitteurs est Belge et qu'il a l'âge requis par la loi électorale, je consulterai la chambre.

M. Dedecker. - Permettez, M. le président. La chambre ne peut se déjuger. On vient de suspendre l'admission de M. Vermeire, jusqu'à ce qu'il ait produit son acte de naissance.

M. le président. - C'est juste. S'il n'y a pas d'opposition, l'admission de M. de Pitteurs est suspendue jusqu'à ce qu'il ait produit son acte de naissance. (Adhésion.)

- Les conclusions de la commission de vérification des pouvoirs sont adoptées, en ce qui concerne M. de Theux, qui prête serment.

Arrondissement de Tongres, Maeseyck, Neufchâteau, Bastogne et Arlon

M. de Luesemans présente successivement le rapport sur les élections de Tongres, Maeseyck, Neufchâteau, Bastogne et Arlon. Il conclut à l'admission de MM. Max de Renesse, Julliot, Vilain XIIII, Julien, d'Hoffschmidt et Tesch, représentants élus par les collèges électoraux de ces districts.

- Ces conclusions sont adoptées.

MM. de Renesse, Julliot, Vilain XIIII, Jullien, d'Hoffschmidt et Tesch prêtent serment.

M. Tesch, juge au tribunal d'Arlon, déclare, avant de prêter serment, qu'il opte pour le mandat de représentant.

Arrondissement de Virton

M. de Luesemans, au nom de la même commission, fait rapport sur l'élection de M. Pierre, par le district de Virton et propose son admission comme membre de la chambre.

Ces conclusions sont adoptées.

M. Pierre prête serment.

Arrondissement de Marche

M. de Luesemans - J'ai maintenant à vous faire rapport sur les élections du district de Marche.

Le nombre des volants était de 385; majorité absolue, 193.

M. Th. Jacques a obtenu 199 suffrages.

M. Orban, 184.

M. Jacques a été proclamé membre de la chambre des représentants.

Nous n'avons pas trouvé au dossier la justification des conditions d'éligibilité de M. Jacques. Mais il a fait partie, nous a-t-on dit, du congrès national ; il peut donc être dispensé de produire cette justification.

Il existe une réclamation contre l'élection de M. Jacques. Elle est assez longue, et le temps nous a manqué pour en faire l'analyse. Si la chambre le désire, nous pouvons lui en donner lecture.

M. Le Hon. - Il me semble que la lecture d'une réclamation ne peut être utile dans la délibération que pour autant qu'elle puisse influer sérieusement sur le vote de la chambre. Si la commission la trouve vague, insignifiante et sans preuves, je crois que nous devons d'abord entendre ses explications et ses conclusions.

Je demanderai donc que M. le rapporteur fasse connaître à la chambre quelle est l'opinion de la commission sur la portée réelle de la protestation des opposants.

M. de Luesemans, rapporteur. - MM. La commission a été unanimement d'avis que la requête manquait de précision, qu'elle se maintenait dans des termes vagues, et que surtout l'élu n'avait à s'imputer aucun des faits dont on se plaint.

Cette requête s'appuie principalement sur ce fait qu'une sorte d'intimidation aurait été exercée contre des électeurs, mais par des personnes étrangères; aucune accusation n'est portée de ce chef contre M. Jacques.

Quant à cette pression, à cette intimidation qui aurait eu pour but d'éloigner les électeurs du scrutin, voici qu'elle a été la pensée dominante de la commission.

Il y a dans l'arrondissement de Marche, 420 électeurs ; sur ces 420 électeurs, 385 ont pris part au vote. Il a donc semblé à votre commission qu'il était parfaitement inutile de s'arrêter à des faits qui n'ont aucun caractère de précision ; qu'il était évident que tous les électeurs avaient voté en parfaite connaissance de cause, et s'étaient rendus en nombre suffisant aux élections pour que toute idée d'intimidation fut définitivement éloignée.

Voilà quelle a été la pensée de votre commission, et elle m'a chargé, à l'unanimité, de vous proposer l'admission de M. Jacques.

M. Dumortier - J'avais demandé la parole pour répondre aux observations qui avaient été présentées par l’honorable M. Le Hon.

Je ne partage pas l'avis qu'il suffit que la commission ait examiné une réclamation et ait passé outre, pour que la chambre ne doive pas statuer sur cette réclamation. Ce n'est pas la commission, c'est la chambre qui, aux termes de la constitution, vérifie les pouvoirs. Si donc des réclamations sont faites, c'est à la chambre de statuer sur ces réclamations.

Ceci s'applique aussi à ce que vient de dire l'honorable rapporteur. Je voudrais, quant à moi, entendre la lecture de la réclamation. Car j'ai oui dire qu'il y avait eu à Marche des irrégularités excessivement graves en matière d'élection.

Remarquez-le, messieurs, ce n'est pas la première fois que des faits semblables se passent dans ce district. J'ai eu l'honneur, il y a quelques années, d'être rapporteur pour les élections de ce même district, et il a été constaté alors, qu'un grand nombre de personnes, 20 à 30 je crois, qui n'avaient pas le droit de voter, avaient été admises à voter. Il s'est présenté plusieurs fois des irrégularités dans ce district. C'est une raison de plus pour examiner attentivement si les élections d'aujourd'hui sont régulières.

J'ajouterai que j'ai vu hier un des membres du sénat, un des hommes les plus éclairés de cette honorable assemblée, qui me disait que dans tout le pays on se récriait sur l'irrégularité de cette élection.

L'élu n'a eu que cinq voix de majorité.

M. Lesoinne - Comme son prédécesseur, quand il a été élu.

M. Dumortier - Cela ne fait rien à la question. Lorsque son prédécesseur a été élu, personne n'est venu dire qu'il y avait eu des irrégularités dans l'élection.

Je dis, messieurs, que l'élu n'a eu que 5 voix de majorité. Or, nous ne savons pas si les irrégularités que l'on signale, n'ont pu opérer un déplacement de 5 voix. C'est lorsque la majorité est faible, et que l'on signale des faits de nature à vicier l'élection, qu'il importe que la chambre ne juge qu'en connaissance de cause.

Je demande donc à la chambre de ne pas émettre légèrement un jugement sur cette élection. J'insiste sur l'observation que j'ai faite: je pense qu'il est désirable qu'on donne lecture de la pétition ou qu’on en ordonne l'impression au Moniteur. Mais il serait plus convenable d'en donner lecture; la chambre saurait immédiatement de quoi il s'agir.

M. H. de Brouckere - Messieurs, je suis persuadé qu'il n'est entré dans les intentions ni de la commission qui a vérifié les opérations électorales du district de Marche, ni de l'honorable rapporteur de trancher la question d'admission. La commission et l'honorable rapporteur savent très bien que c'est la chambre qui, en dernière analyse, décide. Mais c'est à la commission à formuler des conclusions et la commission vous présente ses conclusions à l'unanimité.

Que dit la commission? Elle déclare, à l'unanimité, qu'il n'y a pas eu la moindre irrégularité....

M. Dumortier - Cela n'est pas exact du tout.

(page 5) M. H. de Brouckere - Je prie M. le président de me maintenir la parole.

La commission déclare, à l'unanimité, qu'il n'y a pas eu la moindre irrégularité dans les opérations électorales de Marche. Il y a une réclamation; mais l'honorable rapporteur vous dit que cette réclamation est tellement vague qu'on n'en peut tirer aucun fait positif.

Il le dit et je le crois, je le crois d'autant plus qu'il y a eu unanimité dans la commission.

Maintenant, on rappelle à la chambre que ce n'est pas la première fois que des irrégularités se sont glissées dans les élections de Marche. On aurait mieux fait de dire que ce n'était pas la première fois qu'on réclamait contre les élections de Marche. Il est très vrai, messieurs, que, pour ainsi dire, à chaque élection qui se fait à Marche, la chambre est saisie de réclamations; mais ce qui est tout aussi vrai, c'est que ces réclamations ont toujours été déclarées non fondées.

Lorsque l'honorable M. Jadot a été nommé, il est arrivé une réclamation; la chambre l'a écartée. Plus tard, c'est un autre candidat qui a été élu : nouvelle réclamation ; la chambre l'a encore écartée. Eh bien, je suis persuadé que, cette fois comme les précédentes, la chambre écartera la réclamation dont on vient de l'entretenir, parce que cette réclamation n'est appuyée sur aucun fait positif.

Je répète donc que cette fois, comme les précédentes la protestation dont on vient d'entretenir la chambre, n'est basée que sur des faits vagues, sur des faits non prouvés, et qu'elle n'est pas de nature à faire déclarer l'élection nulle, puisque la commission qui a examiné les pièces relatives aux opérations électorales a été unanime sur ce point.

M. Le Hon - Je n'ai que deux mots à répondre à l'honorable membre qui a relevé ma première observation. Que l'honorable M. Dumortier désire connaître la protestation dont on parle, je trouve ce désir fort naturel et il peut l'exprimer à la chambre ; c'est à elle d'en décider. Mais que l'honorable M. Dumortier, pour me combattre, m'attribue une opinion que je n’ai pas émise, c'est ce que je n'admets pas et ne puis tolérer.

M. Dumortier - Je demande la parole.

M. Le Hon - L'honorable M. Dumortier s'est constitué le défenseur des règles établies; eh bien, c'est précisément pour défendre ces règles que j'ai fait une observation fort simple et qui est, sans doute, partagée par beaucoup de mes honorables collègues ; c'est qu'il ne peut pas être au pouvoir d'une personne étrangère à la chambre de nous imposer la lecture de pièces insignifiantes et d'une longueur démesurée. Le droit d’examen que vous déléguez à vos commissions emporte avec lui votre confiance dans leur témoignage sur les faits.

Si la commission vient nous déclarer unanimement qu'il y a une pièce insignifiante, assurément des membres parmi nous peuvent désirer la connaître; mais c'est à la majorité à juger si cette communication doit l'éclairer, eh bien, ce que j'ai dit n'a pas eu d'autre but.

C'est donc le mal interpréter que d'y voir une erreur sur les pouvoirs attribués à vos commissions; l'observation que je vous ai soumise est conforme à la saine raison et à vos précédents.

M. de Mérode - Messieurs, lorsqu'il s'agit d'élections, il faut prendre les plus grandes précautions pour ne pas admettre des membres qui n'auraient pas été élus selon toutes les formes voulues. La commission propose l'admission du membre dont il est question et elle croit qu'il n'y a pas d'irrégularité dans l'élection. Cependant comme il n'y a que cinq voix de majorité on conviendra que cette majorité est bien faible et que telle irrégularité qui peut ne pas paraître à la commission avoir de l'importance, peut en avoir réellement aux yeux de la majorité de la chambre. Tel membre peut ne pas découvrir dans une élection un vice que tel autre peut y découvrir.

On nous dit : Mais vous avez déjà repoussé deux fois des réclamations venus de l'arrondissement de Marche. C'est que probablement ces réclamations n'étaient pas fondées, mais cela ne prouve nullement que la réclamation dont il s'agit aujourd'hui, ne soit pas fondée non plus.

Quant à moi, messieurs, il me serait difficile de voter sans connaissance de cause sur la question dont il s'agit. Je désirerais aussi, comme d'honorable M. Dumortier, connaître les motifs pour lesquels la commission propose l'admission, et savoir si réellement la réclamation qui nous est adressée, n'est fondée en aucune manière.

Il me semble qu'il n'y a aucun inconvénient à ce que la chambre soit saisie de cette réclamation, à ce que tous les membres puissent en prendre connaissance. Lorsque les renseignements seront connus de nous tous, nous déciderons, non pas en aveugles, mais avec connaissance de cause complète.

On dit : Si vous acceptez toutes les réclamations quelconques, vous n'en finirez pas. Cela est vrai ; et si la chambre était accablée de réclamations qu'elle n'aurait pas le temps d'examiner, je serais d'avis de passer à l'ordre du jour; mais nous ne sommes pas dans ce cas, puisque toutes les autres élections ont été validées sans opposition quelconque.

Il n'y a jusqu'à présent que la seule élection de Marche qui soulève ces réclamations, et il me semble dès lors qu'il est très facile de donner satisfaction à tout le monde en permettant soit l'insertion au Moniteur, soit la lecture immédiate de la protestation. Il ne s'agit pas ici de faire un coup de majorité, de déclarer que la majorité se trouve suffisamment éclairée ; il me semble que lorsqu'une minorité quelque peu nombreuse demande des éclaircissements il faut les lui accorder sauf ensuite, à chacun, à voter suivant sa conscience.

- Plusieurs membres. - La clôture !

M. Dumortier - Si on veut lire la pièce, je renoncerai volontiers à la parole.

- Plusieurs membres. - Oui ! oui ! la lecture.

M. Dumortier - Ou même une simple analyse, car enfin la pièce n'a pas été seulement analysée.

M. de Luesemans, rapporteur. - J'ai eu l'honneur de dire qu'on était venu m'appeler et que je n'avais pas eu le temps de faire l'analyse de la protestation, qui est assez longue, mais je me suis mis aux ordres de la chambre pour en donner lecture.

- La chambre consultée, décide qu'il sera donné lecture de la réclamation.

M. de Luesemans lit cette pièce, qui est ainsi conçue :

« A MM. les membres de la chambre des représentants. Messieurs,

« Nous croyons remplir un devoir en dénonçant à votre haute juridiction les opérations électorales qui ont eu lieu le 13 juin dans la ville de Marche. La Belgique aurait cessé d'être la terre classique de l'ordre et de la liberté, si le plus sacré de nos droits politiques pouvait y être entravé par de pareils excès, si une élection viciée par la violence, par l'intimidation et par les manœuvres les plus blâmables pouvait être ratifiée par vous.

« Dès le 9 juin, une atteinte des plus graves fut portée à la liberté du vote. Une députation composée d'un grand nombre d'habitants de Marche se rendit chez ceux des électeurs de cette ville que l'on supposait favorables à la réélection de M. Orban, pour leur demander, au nom de la ville, de prendre l'engagement de voter en faveur de son concurrent. Une pareille démarche ne pouvait manquer d'atteindre son but, les électeurs auxquels elle s'adressait ayant eu leurs propriétés dévastées trois années auparavant peur avoir voté selon leurs convictions.

« Le 13 juin, dès huit heures du matin, les rues et les avenues de Marche étaient remplies d'une multitude enivrée et furieuse qui se portait à la rencontre des électeurs, cherchant à s'emparer d'eux pour violenter leur vote et poursuivant leurs adversaires de leurs injures et de leurs menaces. Le bruit était répandu partout que les maisons voisines du local où avaient lieu les élections étaient approvisionnées de pavés destinés à assaillir les électeurs de la campagne; que dans le cas où le candidat de la ville de Marche viendrait à succomber, le bureau devrait être brisé et le résultat du scrutin anéanti par le peuple. C'est sous l'influence de cette intimidation et dans un local en quelque sorte assiégé par une multitude menaçante qu'a eu lieu le scrutin électoral.

« Pendant les opérations, un électeur, condamné plusieurs fois correctionnellement pour actes de violence, se promenait, armé de deux pistolets, dans l'intérieur de la salle. A la porte même de l'assemblée, l'explosion d'une arme à feu se fit entendre et, pour augmenter le découragement et la démoralisation, le bruit des cloches qui devait annoncer le triomphe de M. Jacques est venu surprendre les électeurs, alors qu'un grand nombre n'avait pas encore voté.

« Le secret du vote n'a pas été respecté plus que la liberté des électeurs. Plus de la moitié des votes donnés à M. Jacques étaient conçus dans des termes qui permettaient d'en reconnaître les auteurs. Tel de ces bulletins disait : Je vote pour M. Jacques, le bienheureux entrepreneur de routes

« Un autre : Les extrêmes se touchent; je vote pour M. de Favereau et pour M. Jacques, etc., etc.

« À la lecture de ces bulletins, l'on désignait dans l'assemblée les électeurs auxquels ils avaient été imposés. M. Jacques placé auprès du bureau tenait en main une liste où se trouvait inscrit à côté des bulletins reconnus le nom des électeurs qui devaient les imposer. L'on comprend tout ce que cette circonstance acquiert de gravité, quand on réfléchit à l'imposition officielle de M. Jacques et à ses rapports avec les bourgmestre et échevins qui doivent être soumis dans peu de temps à une nomination nouvelle à faire sur ses propositions.

« Pendant que les opérations se poursuivaient, les dispositions de la foule avaient pris un caractère tel, que d'après les conseils de nos adversaires, nous dûmes évacuer la salle, et que la plupart d'entre nous quittèrent même la ville avant que l'on eût connu le résultat de l'élection et que l'on ne sût si un scrutin de ballottage ne serait pas nécessaire. Deux ou trois amis de M. Orban restèrent seuls pour surveiller le dépouillement des bulletins, et M. le procureur du roi dut leur offrir de les accompagner à leur sortie pour les protéger de sa présence.

« Tel est, MM. les représentants, le tableau affaibli et incomplet des faits qui ont accompagné l'élection de Marche, et qui rendraient désormais impossible, pour une partie des électeurs de cet arrondissement, l'exercice du droit de voter, si vous n'y pourvoyiez dans votre sagesse et dans votre haute impartialité. Mais nous aurions rempli incomplètement notre tâche si le lendemain de l'adoption d'une réforme parlementaire, motivé sur l'abus des influences administratives, en matière d'élection, nous négligerions de signaler l'abus que M. Jacques a fait de sa position de commissaire d'arrondissement pour se faire élire.

« Investi du droit de réclamer d'office, sans frais et dans l'intérêt de la loi, contre les inscriptions électorales, M. Jacques a usé manifestement de ce droit dans son intérêt et contre son adversaire. Nombre d'électeurs qui figuraient antérieurement sur les listes et contre lesquels il ne (page 6) s’était point pourvu, quoiqu'une élection eût eu lieu l'année précédente, ont été de sa part l’objet de demandes en radiation. La plupart de ces demandes, et notamment celle qu'il avait dirigée contre M. Orban et deux de ses frères, ont été rejetées par la députation. Nombre d'électeurs, au contraire, qui étaient notoirement sans droit, mais dont il connaissait les dispositions favorables, sont restés à l'abri de ses pourvois.

« M. Jacques était chargé de choisir le local où devait se faire l'élection. Ce local qui, les années précédentes, était hors de la ville et dans une maison isolée fut placé au centre de la ville et sous l'action de la populace. Nous ajouterons qu'avant que le choix de ce local ne fut connu, M. le commissaire avait eu soin d'accaparer pour son compte tous les cabarets du voisinage.

« Enfin, messieurs, parmi des faits nombreux qui dénotent l'abus de l'influence administrative, nous pouvons citer une commune à laquelle la promesse d'un subside de 1,000 francs a été faite en cas d'élection de M. Jacques. Nous ferons entendre à ce sujet le témoignage d'un membre de l'administration de cette commune.

« Il est d'autres faits non moins graves que nous n'énoncerons point ici, mais que nous sommes prêts à établir dans une enquête publique.

« Nous ne doutons point, messieurs, de la résolution que vous prendrez dans votre sagesse et dans votre justice. Pour l'honneur du pays, vous répudierez le résultat d'une élection due à un système d'intimidation et de violence jusqu'à ce jour sans exemple en Belgique. Dans un pays voisin où la corruption administrative a entraîné les plus funestes conséquences, l'élection d'un député a été annulée parce qu'une promesse avait eu lieu de faire construire un chemin de fer par une société. Vous ne vous montrerez point moins sévères pour les faits bien autrement graves qui vous sont dénoncés. Nous ajouterons qu'en cas d'élection nouvelle, et dans les circonstances où nous sommes, aucun électeur indépendant ne voudrait s'exposer aux désagréments et aux dangers qu'ils ont rencontrés à Marche, si des mesures efficaces n'étaient prises pour faire respecter la liberté du vote.

« Agréez, MM. les représentants, l'hommage de notre profond respect.

« (Suivent les signatures.) »

M. Dumortier - Messieurs, il me semble que les faits qui sont signalés dans la réclamation sont d'une telle gravité, que nous ne pouvons nous empêcher d'ajourner, au moins à demain, notre décision sur l'élection. Pour mon compte, je désire vivement lire de nouveau la réclamation au Moniteur où elle sera nécessairement imprimée, puisqu'il en a été donné lecture à cette tribune.

Je dis que la pétition contient des plaintes extrêmement graves. On nous signale en particulier un électeur qui circule dans la salle deux pistolets à la main. Si ce n'est pas là de l'intimidation, véritablement il n'en existe plus. On peut dire que si la chambre tolérait de pareils faits, il n'y aurait plus d'élections sincères possibles.

Un autre fait qui m'a paru très grave, c'est la présence d'hommes armés en dehors de la salle des élections.

Ces deux faits sont de nature à faire voir ce qui arriverait un jour, si la chambre tolérait de pareilles choses. Si nous ne voulons pas faire naître parmi nous la guerre civile, eu matière d'élections, montrons-nous fermes, mais justes, pour que les élections aient toute la sincérité qu'elles doivent avoir.

Un autre fait qui présente de la gravité, c'est qu'une grande quantité de bulletins étaient marqués, et qu'un des électeurs, au profit de qui ces bulletins étaient faits, se tenait près du bureau pour vérifier ces bulletins.

En présence de pareils faits, que devient le scrutin secret qui est expressément ordonné par la Constitution et par nos lois ? Si vous tolérez de semblables irrégularités, alors admettez mieux que cela, admettez le vote public avec toutes ses conséquences. Pour moi, j'ai toujours désiré et je désire encore le vote public; mais tant que la loi qui a décidé le contraire, existe, respectons-la.

Messieurs, la réclamation dont il s'agit a une grande portée ; nous ne pouvons point passer légèrement sur des faits semblables. Je n'hésite pas à déclarer que si cette protestation avait été adressée à la chambre, il y a quelques années, la chambre aurait ordonné une enquête.

Je demande que la chambre ne se prononce sur l'élection que dans la séance de demain ; d'ici à demain chacun de nous aura pu lire de nouveau la réclamation au Moniteur, et puiser dans sa conscience la résolution qu'il doit prendre en cette circonstance.

M. de Brouckere. - Je commencerai par faire remarquer à la chambre que la réclamation dont on vient de donner lecture, a été imprimée et que beaucoup de membres de l'assemblée en ont eu connaissance...

M. Dumortier. - Je ne l'ai pas vue.

- D’autres membres. - Et nous non plus.

M. de Brouckere - Pour ma part, j'ai devant moi un exemplaire imprimé de la réclamation.

L'honorable préopinant dit que si une pareille pièce avait été produite à une des sessions précédentes, la chambre aurait ordonné une enquête; eh bien, je suis persuadé que dans aucune des sessions de la chambre on n'eût prêté la moindre attention à une réclamation qui n'est appuyée d'aucune preuve quelconque, et qui, comme je l'ai dit en premier lieu, ne repose que sur des assertions vagues.

L'honorable préopinant s'est appuyé particulièrement sur deux circonstances. D'abord un électeur se serait promené dans la salle des élections, portant deux pistolets, et ce serait là, selon l'honorable membre, une cause d'annulation. Mais à ce prix, il dépendrait d’un seul individu, dans chaque arrondissement, de faire annuler les élections.

Comment donc un candidat peut-il empêcher un électeur qui lui est favorable ou même qui lui est contraire, de se montrer armé de deux pistolets. Mais si ces deux pistolets avaient eu un but d'intimidation, si l’on en avait fait un usage quelconque, il est bien certain que le président du bureau aurait fait sortir l'électeur armé.

La seconde circonstance sur laquelle on s'appuie, c'est qu'un grand nombre de bulletins auraient été rédigés de telle manière qu'il était facile de reconnaître leur auteur.

D'abord, cela ne constituerait pas une nullité; ensuite, les réclamants ne citent que deux bulletins qui auraient été rédigés de cette manière. En éliminant ces deux bulletins, l'élu aurait encore la majorité absolue.

Mais pour savoir ce qui s'est passé dans les bureaux électoraux, à quelles pièces devons-nous avoir recours? Aux procès-verbaux.

Or les procès-verbaux ne font pas mention de ces circonstances, et pour moi, je les tiens comme n'étant pas exactes, puisque les procès-verbaux n'en font pas mention, et que je ne sache pas que des électeurs aient protesté au moment des élections. C'est une pièce faite après coup.

D'après cela, la chambre fidèle à ses antécédents, passera outre, et ne donnera nulle attention à une pièce qui n'en mérite aucune.

M. de Theux - Messieurs, l'honorable préopinant vous apprend que la pétition a été imprimée, il suppose qu'elle a été distribuée; je déclare que je n'en ai pas eu connaissance, et un grand nombre de mes collègues qui siègent sur ces bancs ont déclaré la même chose. Ce fait donc est irrelevant, quant à la décision que vous avez à prendre.

L'on dit que la pétition ne contient que des assertions vagues. Je conviens que parmi les faits allégués, il y en a qui ont ce caractère; mais il en est d'autres qui, s'ils étaient prouvés, seraient tellement concluants, qu'il serait impossible à la chambre de valider l'élection.

On dit : ce sont des assertions évidemment fausses, puisqu'on n'a pas administrés la preuve de la vérité des faits allégués. Mais il y a vingt personnes qui ont signé la pétition, et qui prennent donc sur elle l'affirmation des faits qu'elles ont allégués. Je conviens que le témoignage de ces vingt personnes ne constitue pas une preuve pour la chambre. Mais je dis que c'est un motif suffisant pour que la chambre fasse une enquête sur les faits. Cette enquête fournira la preuve de l'existence ou de la non-existence des faits. Mais il ne dépend pas des pétitionnaires de donner l'authenticité aux faits qu'ils allèguent. C'est le fait des autorités administratives et judiciaires.

M. H. de Brouckere - Cela ne s'est jamais fait.

M. de Theux - On a souvent demandé une information administrative sur les faits allégués dans des pétitions. Je l'atteste, cela est arrivé plusieurs fois.

Comment, la chambre pourrait-elle se prononcer si elle n'avait pas le droit d'enquête, si elle n'en usait pas suivant la gravité des circonstances? Nous serions donc obligés de nous prononcer sur le silence des procès-verbaux ou sur les allégations des pétitionnaires. Cela n'est pas admissible.

La chambre a un droit et un devoir : c'est de s'assurer si l'élection est sincère, si les membres qu'il s'agit de recevoir dans son sein peuvent être reconnus comme représentants. Les faits que j'ai entendus m'ont paru assez graves pour que je croie devoir appuyer la proposition faite par M. Dumortier de continuer la discussion à demain, de surseoir à toute discussion, jusqu'à ce que nous ayons eu le temps de peser, après lecture, l'importance des faits qui ont été allégués.

M. le comte de Baillet - On demandait tout à l'heure si la pétition qui fait l'objet de la discussion a été distribuée. Si la chambre le désire, je lui donnerai, à ce sujet, des éclaircissements. (Parlez, parlez.)

Hier on s'est présenté au greffe pour demander l'autorisation de faire distribuer aux membres de la chambre cette pièce qui est imprimée. Comme mon mandat de questeur est expiré et que je n'en fais fonction qu'en attendant mon remplacement; comme d'ailleurs la pièce n'était pas signée, je n'ai pas cru devoir en autoriser la distribution.

M. de Luesemans, rapporteur. - Si la chambre n'a pas suffisamment ses apaisements, j'aurai l'honneur de donner connaissance à la chambre du raisonnement qui a déterminé la commission à prendre les conclusions soumises à la discussion.

Les deux faits relevés par M. Dumortier, consistent le premier à dire qu'un individu se serait promené dans la salle où se faisaient les élections armé de deux pistolets. M. Dumortier a trouvé à ci fait une gravité telle, que si la chambre, a-t-il dit, tolérait de tels abus, il n'y aurait plus d'élections en Belgique. La commission s'est posé cette question, et voici la réponse qu'elle y a faite. Si l'on devait attacher un si grand caractère de gravité à cette circonstance qu'un individu se serait promené en faisant quelques menaces dans la salle où se font les élections, si un tel fait pouvait avoir assez d'importance pour invalider une élection, on devrait s'attendre à ce qu'un candidat qui prévoirait qu'il doit échouer ferait promener dans la salle des élections deux ou trois individus armés jusqu'aux dents.

(page 7) - Plusieurs membres. - Le président l'en empêcherait.

M. de Luesemans - Le fait n'en serait pas moins avéré. On enverrait d'ailleurs des hommes adroits qui ne montreraient leurs armes qu'à ceux qu'ils voudraient effrayer.

Voilà pourquoi la commission n'a pas trouvé dans ce fait un motif pour invalider l'élection.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier) - Les pétitionnaires ont-ils fait, lors de l'élection, une réclamation qui ait été consignée au procès-verbal?

M. de Luesemans - Non, il n'y a aucune réclamation dans le procès-verbal qui est tout ce qu'il y a de plus simple, contenant simplement le nombre des votants, le chiffre de la majorité, le nombre des suffrages obtenus par les deux concurrents.

Quant au second fait consistant en ce que un ou deux bulletins porteraient, je ne dirai pas une désignation insuffisante, mais une désignation plus que suffisante, nous nous sommes dit que les nullités sont de strict droit, que la loi frappe de nullités les bulletins signés mais non les bulletins où se trouve une désignation plus que suffisante. Voilà ce qui a déterminé votre sixième commission à vous proposer l'admission de M. Jacques.

Les motifs allégués par les pétitionnaires ne nous ont paru ni pertinents, ni suffisants; enfin, nous n'y avons pas trouvé la gravité qu'on vient d'y attribuer.

- L'ajournement proposé par M. Dumortier est mis aux voix et prononcé après deux épreuves.

La séance est levée.