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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 5 mai 1855

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1854-1855)

(Présidence de M. de Naeyer, vice-président.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1033) M. Vermeire procède à l'appel nominal à 1 heure et un quart.

Il donne lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est approuvée.

Il présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Le sieur Lefebvre, médecin vétérinaire, réclame l'intervention de la Chambre pour obtenir un subside qui le mette à même de faire une publication française de sa méthode préservative et curative contre la pleuropneumonie épizootique. »

- Sur la proposition de M. Laubry, renvoi à la commission des pétitions, avec prière de faire un prompt rapport.


« M. Van Overloop, oblige de s'absenter, demande un congé de six jours. »

- Ce congé est accordé.

Rapports sur des pétitions

M. Wasseige, rapporteur. - Des habitants de Coutisse et hameaux circonvoisins s'adressent à la Chambre et à M. le ministre de l'intérieur afin que ce village, dépendant de la commune d'Andenne, en soit séparé et érigé en commune distincte. Cette pétition a été renvoyée à la com mission avec demande d'un prompt rapport.

Les pétitionnaires allèguent à l'appui de leur demande des faits nombreux qui, s'ils étaient vrais, seraient de nature à la justifier complètement ; mais on conçoit qu'il est impossible à la Chambre de les admettre sans vérification ultérieure. Néanmoins la persistance des pétitionnaires qui déjà à plusieurs reprises se sont adressés à la législature dans le même but, un premier vote du conseil provincial de Namur émis dans sa séance du 12 juillet 1855, et favorable à la demande en séparation, toutes ces circonstances sont de nature à donner un caractère de grande probabilité aux raisons invoquées par les pétitionnaires ; en conséquence la commission a l'honneur de vous proposer le renvoi de cette pétition à M. le ministre de l'intérieur afin qu'il la fasse instruire de nouveau pour prendre ensuite telle mesure qu'il appartiendra.

- Ces conclusions sont adoptées.


M. Wasseige, rapporteur. - « Plusieurs habitants de Gembloux réclament l'intervention de la Chambre pour obliger la compagnie du chemin de fer du Luxembourg à ouvrir immédiatement au public la section de Bruxelles à Gembloux. »

Les faits allégués par les pétitionnaires sont exacts et de nature à faire prendre leur demande en sérieuse considération. En effet, tous les services publics de transport ont cessé entre Bruxelles et Gembloux, et les habitants de celle ville et des localités environnantes qui veulent se rendre à Bruxelles, sont obligés de venir prendre le chemin de fer à Namur, c'est-à-dire de faire 25 lieues au lieu de 9.

D'un autre côté, le chemin de fer direct entre Bruxelles et Namur est terminé jusqu'à Gembloux, et chaque jour des waggons circulent sur cette voie, comme pour narguer les malheureux qui ne peuvent en faire usage.

La société du chemin de fer du Luxembourg a aussi intérêt à ce que cette section soit ouverte et rendue productive le plus tôt possible, et nous croyons pouvoir affirmer qu'elle joint ses instances à celles des habitants de Gembloux. En présence d'un tel état de choses, il est du devoir du gouvernement de chercher à y remédier, dès l'instant que le remède à appliquer ne nuit point à l'intérêt général ; or, nous pensons que si, dans la position actuelle des parties, il pouvait y avoir quelque inconvénient à autoriser purement et simplement la compagnie du chemin de fer de Luxembourg à exploiter la ligue entre Bruxelles et Gembloux, ces inconvénients disparaîtraient complètement et facilement à l'aide de réserves très expresses que le gouvernement pourrait exiger de la compagnie et que celle-ci serait probablement très disposée à accepter, puisque en définitive il s’agirait aussi de ses intérêts.

C'est dans le sens de ces explications que nous vous proposons le renvoi de la pétition des habitants de Gembloux à M. le ministre des travaux publics, en priant ce haut fonctionnaire de vouloir bien examiner sérieusement et le plus promptemenl possible une question dont la solution est attendue impatiemment par des populations nombreuses.

- Ces conclusions sont adoptées.

Projet de loi sur les poids et mesures

Discussion des articles

Article 15

M. le président. - La discussion continue sur l'article 15 et les amendements.

La parole est à M. Deliége pour développer l'amendement qu'il a déposé hier.

M. Deliége. - Messieurs, mon amendement a nécessairement été un peu improvisé dans la séance d'hier, et je crois devoir y faire un léger changement. Je crois que la première partie de cet amendement doit être mise en rapport avec l’article 4 de la loi que nous discutons et où il est dit : « Il est défendu de posséder ou d'employer des poids et mesures autres que ceux établis par la loi. Cette défense s'applique partout ou les poids et mesures sont employés aux transactions et servent de base à des perceptions à charge des particuliers. »

Je crois devoir, en conséquence, ajouter à la première partie de mon amendement et dire : « les lieux où se font habituellement, soit des transactions, soit des perceptions à charge des particuliers et pour lesquelles on emploie des poids et mesures, sont soumis à la visite des fonctionnaires, agents ou employés dénommés à l'article qui précède. »

Messieurs, comme membre de la section centrale, je n'avais adopté la disposition qui a été présentée par cette section, qu'avec quelques scrupules.

D'abord qu'entend-on par le mot « assujettis » ? Je crois que, de la manière dont s'en est servie la secsion centrale, il n'est pas employé dans le sens propre. Il faut nécessairement, à côté de ce mot, une définition. La section centrale l'a compris elle-même ; elle nous a donné une définition de ce mot, et elle a demandé à M. le ministre de l'intérieur s'il adoptait cette définition.

Elle a dit : Qu'entend-on par assujettis ? Les notaires, par exemple, les dépositaires d'actes publics, sont-ils compris dans cette expression ? Nécessairement d'après le sens propre du mot, les notaires et les dépositaires d'actes publics sont compris dans ce mot, car ils sont assujettis à la loi et on peut les mettre en contravention lorsqu'ils se servent de dénominations anciennes. M. le ministre a répondu qu'ils ne devaient pas y être compris, de manière que les notaires, qui sont formellement assujettis à la loi ne sont pas des assujettis. Voilà un premier inconvénient que je trouve à la rédaction de la section centrale.

Ensuite, messieurs, qu'entend-on par « lieux fermés » ? Il faut encore ici une définition ; il ne faut pas s'en rapporter au sens légal du mot, car la section centrale a entendu, M. le ministre a entendu, nous entendons tous, que pour rechercher les contraventions en matière de poids et mesures, les employés des accises ne pourront pas entrer dans tous les lieux fermés, fouiller de fond en comble le domicile d'un citoyen. Je crois qu'il s'agit uniquement des lieux où l'on fait des transactions, où l'on fait des perceptions à charge des particuliers.

Eh bien, messieurs, la première partie de mon amendement rend toute difficulté sur ce point impossible. Je crois, par conséquent, que cette partie de mon amendement rend l'idée de la section centrale, de M. le ministre de l'intérieur ainsi que de la Chambre.

Quant à la deuxième partie, je crois, messieurs, qu'il vaut mieux adopter la rédaction de la section centrale. Le principe est posé dans la première partie. Il est bien entendu qu'on ne pourra pas entrer dans des lieux autres que ceux où l'on fait des transactions ou des perceptions à charge des particuliers.

Je crois donc qu'on peut dire comme le dit la section centrale ;

« Toutefois, les commis des accises et les vérificateurs ne peuvent s'introduire dans les lieux dont l'accès n'est pas libre au public, si ce n'est en présence soit du juge de paix, soit de son suppléant, soit du commissaire de police, soit d'un membre de l'administration communale, et le procès-verbal sera, le cas échéant, signé par celui en présence duquel il aura été fait.

« Les visites ne peuvent avoir lieu avant le lever ou après le coucher du soleil. »

Ainsi, messieurs, je modifie le premier paragraphe de mon amendement ; au lieu de ; « liux où se font habituellement des transactions », je propose de dire : « lieux où se font habituellement soit des perceptions à charge des particuliers, soit des transactions qui donnent lieu à l'emploi de poids et mesures. »

Quant au deuxième paragraphe, je me rallie à la rédaction de la section centrale.

M. Mascart. - Messieurs, l'honorable ministre de l'intérieur nous a fait espérer hier que l’article 15 ne recevrait pas dans son application l'extension que la section centrale entend lui donner à la page 10 de son rapport. Les visites, nous a-t-on dit, ne se feront que là où les transactions s'opèrent.

Messieurs, tout cultivateur, grand ou petit, vend chez lui une partie des denrées qu'il produit, depuis les céréales jusqu'au lait battu. Si la mesure proposée était adoptée et si on s'avisait d'en poursuivre sérieusement l'exécution, les fabricants de balances, de poids et de mesures auraient fort à faire pendant longtemps. Je leur promets une très longue période de prospérité, car il n'y a pas un cultivateur proprement dit sur mille qui ait en sa possession toutes les pièces qui lui seront nécessaires pour les transactions qui ont lieu chaque jour.

Ils devront avoir une grande balance pour les céréales, une petite pour le beurre, des mesures de capacité différentes pour les céréales encore et pour le lait. Ils devront se pourvoir de tout et tout faire vérifier chaque année au chef-lieu de la recette des contributions, souvent à plusieurs lieues de chez eux.

Un malheureux ouvrier qui n'a qu'une ou deux vaches, pour quelques kilog. de beurre et quelques litres de lait battu qu'il vend à son voisin, sera obligé, sous peine d'être poursuivi, car la section centrale est sans pitié, de faire une dépense considérable.

Votre loi ne sera pas exécutée, ou, si elle l’est, vous ferez un grand (page 1034) nombre de mécontents. Vos 27 vérificateurs ne suffiront pas, et dans un temps très court vous aurez à en créer d'autres pour opérer la vérification de tous les objets qui leur seront présentés.

Un mot encore, messieurs. Le même article 15 contient une innovation en matière de visite domiciliaire. Jusqu'ici c'était le bourgmestre, le premier magistrat de la commune ou l'échevin délégué qu'on requérait, qui avaient seuls qualité.

Il y avait là, contre les vexations, une garantie pour les citoyens qui disparaît complètement.

A l'avenir il suffira qu'un conseiller communal, n'importe lequel, accompagne les employés des accises pour que ceux-ci pénètrent dans nos fermes, qu'on assimile à des boutiques, à des cabarets.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - C'est une erreur.

M. Mascart. - Alors je n'ai rien à ajouter.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Messieurs, je suis d'accord, au fond, avec l'honorable M. Deliége quant à l'amendement qu'il a proposé à l'article 15. Néanmoins, je pense qu'il y a moyen d'être plus clair encore, et comme la clarté est chose très désirable en pareille matière, nous allons tâcher de poursuivre ce but.

Messieurs, il y a deux questions à examiner ; il y a des garanties à donner à deux points de vue différents. D'abord où se feront les visites ? et quand se feront-elles ? Ce dernier point ne me semble pas prévu d'une manière suffisante par l'amendement de l'honorable M. Deliége.

Où se feront les visites ? Il est entendu que les visites ne pourront pas se faire au domicile proprement dit des citoyens ; elles ne pourront se faire que dans les lieux où se font habituellement les transactions. Mais les lieux où se font les transactions sont ouverts au public ou ne lui sont pas ouverts. Il importe de bien distinguer ces deux cas. Il faudra une disposition spéciale pour leslieux où s'opèrent les transactions et qui tout ouverts au public, et il en faudra une autre pour les lieux où se font les transactions, mais qui ne sont pas ouverts au public.

Maintenant, quant à la question de savoir quand peuvent se faire ces visites, il me semble que l’honorable M. Deliége n'a pas prévu ce cas dans son amendement.

Vous l'avez prévu pour le deuxième cas, pour le cas où il s'agit de visiter les lieux non accessibles au public. Là où l'assistance des officiers de police judiciaire est nécessaire pour opérer la visite, la visite ne peut avoir lieu qu'entre le lever et le coucher du soleil.

- Un membre. - La disposition du troisième paragraphe est générale.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Elle n'est pas générale et elle ne peut pas l'être. Il y a une distinction à établir. Les visites doivent pouvoir se faire même avant ou après le coucher du soleii dans les lieux ouverts au public. Dans les cafés ou boutiques, par exemple, les transactions se font pendant toute la soirée, jusqu'à 10 ou 11 heures du soir. Dans ce cas il est impossible de restreindre le droit de visite en hiver entre le lever et le coucher du soleil.

Dans la pratique, les agents peuvent visiter les lieux publics aussi longtemps qu'ils sont ouverts au public.

En France, la loi se pratique de la même manière.

L'article 26 de l'ordonnaucc du 17 avril 1839 dit que les agents de l'administration des poids et mesures peuvent faire des visites dans les lieux de vente pendant tout le temps que ces lieux sont ouverts au public. Il faut donc reconnaître aux agents de l'administration le droit de faire des visites, dans les lieux publics, aussi longtemps que ces lieux sont ouverts au public.

C'est conforme à toutes les dispositions et à tous les usages dans la matière.

Quant aux lieux où se font les transactions mais qui ne sont pas ouverts au public, tels qu'arrière-boutiques, ateliers, etc., les visites ne peuveut être faites qu'entre le lever et le coucher du soleil.

C'est pour résumer toutes les observations et y faire droit, que j'ai rédigé un amendement ainsi conçu ;

« Les lieux où se font habituellement soit des transactions, soit des perceptions à charge des particuliers, pour lesquelles on emploie des poids ou des mesures, sont soumis à la visite des fonctionnaires, agents ou employés dénommés à l'article qui précède pendant tout le temps qu’ils sont ouverts au public.

Les commis des accises et les vérificateurs ne peuvent pénétrer dans les lieux affectés à la même destination et dont l'accès n'est pas ouvert au public, sans l'assistance soit du juge de paix, soit du commissaire de police, soit d’un membre de l'administration communale, et le procès-verbal sera, le cas échéant, signé par celui en présence de qui il aura été fait.

« Les visites prévues par le deuxième paragraphe ne peuvent avoir lieu ni avant le lever ni après le coucher du soleil. »

Je crois que la rédaction que je propose fait cesser toutes les difficultés et lève tous les doutes.

M. de Muelenaere. - Messieurs, je pense que l'amendement de l'honorable M. Deliége, modifié par M. le ministre de l'intérieur, a fait faire un très grand pas à la discussion, et que nous sommes à peu près sur le point de nous trouver d'accord. Il me semble que cet amendement répond complètement à la pensée de l’honorable M. Manilius et de l’honorable M. Coomans, et qu'ainsi les amendements proposés par ces honorables membres deviennent sans objet. Je crois d'ailleurs que tout le monde trouvera maintenant dans la loi toutes les garanties que l'on peut exiger contre les vexations qui pourraient être commises par des visites domiciliaires.

Toutefois, messieurs, il s'agit de bien comprendre le sens de la loi et de se mettre d'accord sur la signification et la portée des mots dont on s'est servi dans le deuxième paragraphe de cet article.

A la fin de la séance d'hier, l'honorable M. Verhaegen, répondant à M. le ministre de la justice, paraissait croire que l'une des garanties avait, à certain point de vue, été exagérée par M. le ministre de la justice, et que de ce chef il était tombé dans une grande erreur.

Je vous avoue que je ne puis pas partager l'avis de l'honorable M. Verhaegen. Si la loi devait être interprétée dans ce sens étroit, évidemment on enlèverait à l'intervention que l'on exige de la part de l'officier de police judiciaire, une partie au moins de son efficacité.

D'après l'honorable M. Verhaegen, un juge de paix, par exemple, requis par un commis des accises d'assister à une visite domiciliaire, dans un lieu dont l'accès n'est pas libre au public, devrait immédiatement obéir à cette injonction.

Ce qui le prouve, a dit l'honorable M. Verhaegen, c'est qu'un juge de paix ne pourrait pas refuser son intervention légalement requise lorsqu'il s'agirait de l'exécution d'une contrainte par corps.

Le cas n'est pas le même. Le juge de paix, sans manquer à son devoir, ne pourrait pas refuser de se rendre à la sommation qui lui serait faite de prêter son ministère, lorsqu'il s'agirait d'une contrainte par corps. La raison en est toute simple, c'est que celui qui ferait cette injonction au juge de paix, qui lui adresserait le réquisitoire, serait muni dans ce cas d'un acte de l'autorité publique ; c'est qu'il serait porteur d'un jugement qui ordonne que tel individu soit appréhendé au corps. Dès lors le juge de paix ne peut délibérer ; ce qu'il peut demander c'est que toutes les formalités prescrites par la loi soient rigoureusement remplies.

Mais ici de quoi s'agit-il ? Il s'agit de faire une visite dans un lieu dont l'accès n'est pas libre au public. Et pourquoi ? Pour une présomption quelconque de fraude ; pour une dénonciation, absurde peut-être, d'unes prétendue contravention à la loi sur les poids et mesures, contravention qui pourra ne pas avoir une ombre de vraisemblance.

Mais, dit l'honorable M. Verhaegen, lorsque cette réquisition est faite, c'est en vertu de la loi. Oui, c'est en vertu de la loi ; mais la loi ne dit nulle part que la visite doit avoir lieu dans tous les cas, qu'elle peut s'exercer arbitrairement sans qu'il y ait au moins des apparences réelles de fraude de la part de celui chez lequel on fait opérer la visite. Il me semble que dans ce cas vous devez trouver dans la loi une double garantie.

En premier lieu, la présence du juge de paix doit prémunir le patenté contre toute espèce de brutalité de la part des agents de l'administration. Mais il faut que l'intervention du juge de paix nous donne encore en cette matière une autre garantie beaucoup plus forte, beaucoup plus considérable dans l'intérêt du public. Le juge de paix, quand il recevra ce réquisitoire de la part du commis des accises, doit avoir le droit, en sa qualité de magistrat, sous sa responsabilité personnelle envers les chefs dont il dépend, sous l'application même, si l'on veut, de peines disciplinaires contre lui, s'il se rend coupable d'un déni de justice, il doit avoir le droit d'examiner si le commis des accises allègue des motifs plus ou moins fondés, si le commis des accises a des motifs valables en apparence, pour faire cette visite.

S'il est convaincu au contraire que le commis des accises n'est déterminé que par des motifs de vengeance ou de rancune personnelle, que par le désir de tracasser peut-être un citoyen qui lui serait désagréable, le juge de paix doit avoir le droit de ne pas déférer à l'injonction qui lui est faite, sauf à faire connaître à l'autorité supérieure la cause de ce refus.

Il y a donc, je le répète, il doit y avoir, dans l'intérêt des citoyens et dans certaines limites, une sorte d'appréciation appartenant au juge de paix ou à l'officier de police judiciaire qui est requis d'accompagner le commis des accises, et s'il trouve que la réquisition n'est dictée que par des considérations de vexations et de tracasseries, il pourra refuser d'accompagner l'employé de l'administration.

C'est là qu'est la principale garantie que son intervention offre aux citoyens qui pourraient, dans certains cas, être soumis à des visites domiciliaires.

M. Frère-Orban. - Je crois que l'opinion que vient de soutenir l'honorable comte de Mueleuaere, quoique moins absolue que celle qu'a soutenue hier M. le ministre de la justice, n'est pas fondée en droit. Il y aurait de graves inconvénients à les laisser passer sans observation. Si elles étaient fondées, il en résulterait qu'en matière de douane ou d'accises, sauf les cas exceptionnels prévus par la loi, et dans tous les cas où la présence d'un fonctionnaire est requise pour procéder à une visite domiciliaire, l'action de l'administration, l'action de la loi serait subordonnée au bon plaisir, au bon vouloir, soit non seulement d'un juge de paix, ce qui présenterait certaines garanties, mais d'un commissaire de police, et même d'un membre d'une autorité communale quelconque.

Cela ne me paraît guère admissible. Je ne pense pas que jamais la loi ait été entendue ainsi. La loi de 1791, par exemple, sur les délits forestiers, investissait les (page 1035) gardes forestiers du droit de constater les contraventions, de poursuivre le corps du délit. Ils pouvaient être dans la nécessité de faire des visites domiciliaires.

La loi prescrivait en ce cas que le garde forestier se fît accompagner soit d'un commissaire de police, soit du maire ou d'un membre de l'administration locale.

Il est arrivé qu'interprétant la loi, comme vient de le faire l'honorable comte de Muelenaere et comme le faisait hier M. le ministre de la justice, ces fonctionnaires ont pensé qu'ils avaient le droit de juger s'il y avait lieu d'obtempérer à ces réquisitions, et il a été formellement décidé, si je ne me trompe, par le pouvoir exécutif que l'agent qualifié pour constater une contravention, agissant dans le cercle de ses attributions légales, ne pouvait pas être soumis à la décision du fonctionnaire qui devait l'assister.

La garantie des citoyens se trouve dans la présence du fonctionnaire désigné par la loi, et cela est si vrai que dans d'autres matières, lorsque la loi a voulu subordonner l'exercice de l'action des fonctionnaires à la décision d'un magistrat, elle l'a dit. C'est ainsi que dans la loi générale du 28 août 1822 sur la perception des droits de douanes, il est formellement exprimé pour un cas déterminé, que la visite domiciliaire ne peut avoir lieu dans des bâtiments ou enclos qu'avec l'assistance du juge de paix qui doit être requis par écrit et qui peut refuser son concours, dit expressément la loi, en motivant sa résolution.

Si donc on veut que la loi actuelle ait ce sens ; si l'on veut que le magistrat requis, que le fonctionnaire requis puisse refuser son concours, si l'on veut le constituer juge des motifs de l'action, il faut nécessairement l'exprimer dans la loi.

Si telle est l'intention du gouvcrnenviiit, il doit faire une proposition qui ne laisse aucun doute à cet égard.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Messieurs, il me paraît que l'honorable préopinant ainsi que l'honorable M. Verhaegen hier, confondent deux choses qu'il est essentiel de distinguer ; la visite domiciliaire qui se fait au point de vue de la police judiciaire proprement dite, c'est-à-dire répressive, et celle qui se fait au point de vue de la police administrative, c'est-à-dire préventive.

Dans l'espèce que nous discutions il ne s'agit que de la police administrative ou préventive. Le commis des accises qui viendra solliciter le juge de paix de l'accompagner dans une recherche domiciliaire, ne tiendra pas au juge de paix ce langage : « Je sais qu'il y a là une contravention, j'en ai la preuve. » Non ; il ne peut pas le dire, il ne le sait pas encore ; il ne demande en général la visite domiciliaire que se fondant simplement sur la suspicion d'une contravention.

Autre chose est, messieurs, la position du juge de paix daus les cas prévus par l'article 16 du Code d'instruction criminelle, par la loi sur le régime forestier et par quelques autres lois spéciales. Là, il y a délit ; le fait est certain. Seulement l'auteur n'est pas connu ou la preuve n'est pas complète.

Lorsque le garde champêtre ou le garde forestier viennent trouver le juge de paix ou le bourgmestre et lui demandent une visite domiciliaire, c'est qu'ils ont la certitude d'une infraction. Ils ont constaté l'existence d un délit rural ou forestier, et ils lui en montrent la preuve. Il y a plus, dans ce cas, ces agents sont pour ainsi dire d'avance convaincus que dans tel ou tel lieu ils découvriront le signe matériel du délit, le corps du délit.

C'est le corps du délit que l'on recherche ; soit que l'on ait vu des traces de pas qui se dirigeaient vers une maison, soit qu'on ait vu un tronc d'arbre fraîchement coupé devant une maison, soit pour d'autres circonstances. L'agent forestier ou le garde champêtre a la conviction que là, dans cette maison, gît la preuve du délit qu'il recherche, car pour lui le délit existe, il est constant.

Alors le juge de paix, sommé d'accompagner ce fonctionnaire, ne peut s'y refuser ; il intervient dès lors comme officier de police judiciaire recueillant la preuve d'un délit.

Maïs dans l'hypothèse qui nous occupe, il n'en est pas ainsi. Comme vient de le démontrer l'honorable comte de Muelenaere, mieux que je n'aurais pu le faire, il s'agit d’une pure présomption, d'une simple suspicion de fraude, et certainement daus ce cas il me paraît impossible d'investir un commis des accises, un agent des poids et mesures, du droit de commander l'action du magistrat ou du fonctionnaire supérieur et de l'entraîner dans dix ou quinze maisons pour y faire des visites domiciliaires.

Ce que j'ai eu l'honneur de vous dire, messieurs, est si vrai que chaque fois que l'on a voulu forcer un magistrat d'abdiquer son libre arbitre au profit d'un agent inférieur de la police, la loi l'a proclamé. Il s'agit d'une exception au principe de l'indépendance du magistrat. Quand on a dit que le juge de paix devrait nécessairement assister aux visites domiciliaires, on a fait une dérogation à ce principe fondamental. Lorsque naguère la loi sur le régime forestier a reproduit la disposition de son article 123, c'est parce qu'on a compris qu'ii fallait stipuler formellement une pareille obligation.

Il faut donc que cette dérogation soit écrite dans la loi. Il faut qu'il soit constaté de par la loi que le juge de paix, sommé de faire une visite domiciliaire, est tenu d'obtempérer à cette réquisition.

Si vous ne l'inscrivez pas dans la loi nouvelle (et remarquez bien que c'est une loi nouvelle que nous faisons), je soutiens que le magistrat reste libre dans son action et conserve sa responsabilité. Or, je le demande, messieurs, est-il quelqu'un qui veuille inscrire dans la loi que nous discutons, qu'un juge de paix sera nécessairement et quand même contraint d'obéir à la sommation que lui fera un agent des poids et mesures d'aller dans une maison vérifier le soupçon s'il s'y trouve des mesures ou des poids irréguliers ? Si l'on veut aller jusque-là, il faut le dire dans la loi ; mais si vous ne l'énoncez pas, vous restez dans le droit commun, et le droit commun, selon moi, c'est la faculté pour le juge de paix de peser sous sa responsabilité les motifs sur lesquels on se base pour demander la visite domiciliaire.

Dans la loi qu'a citée tout à l'heure l'honorable M. Frère, ces principes sont consacrés, je veux parler de la loi générale du 26 août 1822. Là, messieurs, il s'agit d'une matière qui est, en définitive, bien plus importante que la loi sur les poids et mesures.

Eh bien, croyez-vous, messieurs, qu'on y ait écrit que le juge de paix devra obéissance quand même et toujours aux agents des douanes ? Non, messieurs, le juge de paix reste indépendant ; il peut s'opposer ; il peut refuser lorsqu'il lui paraîtra que la visite n'est pas justifiée. Le juge de paix reste maître de son intervention ; sa conscience, voilà sa loi.

Dans les dispositions antérieures qui ont réglé la matière, nous retrouvons le même principe.

Ainsi dans l'arrêté du 30 mars 1827, concernant la vérification des poids et mesures, il est aussi question de visites. On a prévu le cas, et le texte dispose : « que les officiers de police judiciaire sont autorisés à faire les visites... conjointement avec les vérificateurs, aussi souvent qu'il sera jugé nécessaire... »

Vous voyez, messieurs, que l'arrêté de 1827 a maintenu le libre arbitre et l'indépendance des magistrats supérieurs. Il n'a pas prescrit qu'ils dussent servilement et aveuglément plier à la moindre sommation d'un agent des poids et mesures. Ils peuvent faire des visites conjointement avec les préposés ; ils y sont autorisés, mais seulement chaque fois qu'ils le jugeront nécessaire ; autorisés à les faire, ils sont par cela même autorises à les décliner.

Je le déclare donc, messieurs, dans mon opinion, pour qu'on puisse imposer dès maintenant aux juges de paix ce rôle passif, ce rôle machinal, il faut que la loi le dise formellement, il faut qu'à côté de l'article qui parle des visites vous décrétiez que le juge de paix, le bourgmestre, le commissaire de police requis de faire une recherche seront tenus d'obéir à cette réquisition. Si vous ne le dites pas, ces magistrats restent libres dans leur sphère. Je crois que leur conserver cette liberté, c'est conserver également aux citoyens une grande garantie.

M. Frère-Orban. - Messieurs, je comprends difficilement que le gouvernement soutienne la thèse qui vient d'être défendue par l'honorable ministre de la justice et qui va beaucoup plus loin que celle de l'honorable M. de Muelenaere.

Le gouvernement soutient, en principe, que par cela seul que la loi exige, pour opérer une visite domiciliaire, la présence d'un juge de paix, d'un commissaire de police ou d'un bourgmestre, ceux-ci deviennent, les arbitres souverains de l'action du pouvoir exécutif.

C'est pousser loin, ce me semble, l'abandon des prérogatives du gouvernement.

J'entends que l'on prescrive des mesures pour empêcher que les citoyens ne soient pas injustement froissés par l’exécution des lois confiée au gouvernement ; mais à moins d’une dérogation expresse et formelle aux principes généraux qui règlent les attributions des pouvoirs, il faut que l’action du gouvernement reste indépendante, puisque la responsabilité de l’exécution lui incombe et qu’il ne saurait être responsable s’il n’était pas libre.

Si l'on veut garantir aux particuliers que les agents du pouvoir exécutif ne pourront pénétrer dans telle ou telle partie du domicile des citoyens, qu'on prescrive certaines mesures de précaution, et ce sera justice ; mais déclarer, en principe général, que l'action du gouvernement est subordonnée, dans tous les cas, à la volonté de l'agent le plus infime qui ne dépend pas même de lui, sur lequel il n'a aucune opèee d'action, c'est, à mon avis, la proposition la moins gouvernementale que j'aie jamais entendu produire.

M. le ministre de la justice a voulu faire une distinction en ce qui concerne le droit conféré aux gardes champêtres de requérir, pour la recherche des délits dans l'intérieur du domicile, la présence du juge de paix ou du bourgmestre ; il a dit que dans ce cas le garde champêtre ou le garde forestier a la conviction qu'il existe un délit et que cela suffit. Mais le vérificateur des poids et mesures aura également la conviction qu'il existe un délit, il aura la conviction qu'on a recelé dans tel ou tel lieu des poids ou des mesures qui ne se trouvent pas dans les conditions voulues par la loi.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - L'un a vu, l'autre n'a pas vu.

M. Frère-Orban. - L'autre pourra également avoir vu.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Il faut un procès-verbal qui constate le délit.

M. Frère-Orban. - Si le garde champêtre croit que le délit a été commis et que la preuve du délit, le corps du délit existe dans un lieu qui n'est pas accessible pour lui sans l'assistance du juge de paix ou du bourgmestre, il requerra le juge de paix ou le bourgmestre de l’accompagner, et celui-ci sera tenu de déférer à la demande de l’officier de police judiciaire, agissant légalement dans le cercle de ses attributions.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Il sera tenu de le suivre, parce que la loi l'a dit.

M. Frère-Orban. - (page 1036) J'en demande bien pardon à M. le ministre de la justice, mais la loi ne l'a pas dit. Je n'ai pas cru nécessaire, depuis hier, d'examiner la question comme l'a fait peut-être M. le ministre de la justice ; je ne croyais pas qu'elle se présenterait de nouveau. Je dis ce qui me semble rationnel en principe, abstraction faite de textes spéciaux. Il y a des lois qui, sans exprimer l'obligation pour l'agent requis d'obéir à la réquisition, exigent la présence d'un juge ou d'un membre de l'autorité locale pour procéder à une visite domiciliaire. Il en est ainsi pour les gardes forestiers, pour les gardes champêtres.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Il sera tenu d'obéir à la réquisition qui lui sera faite, dit la loi.

M. Frère-Orban. - L'article 16 du Code d'instruction criminelle le disait-il pour le garde champêtre ou le garde forestier ?

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - C'est pour cela qu'il a fallu faire la loi.

M. Frère-Orban. - Mais comment l’article 16 du Code d'instruction criminelle a-t-il été entendu et appliqué ?

Certains agents, ne pouvant exercer leurs fonctions qu'en présence d'un magistrat ou d'un bourgmestre, ce magistrat ou ce bourgmestre peut-il paralyser l'action légalement exercée en réfusant le service que la loi lui impose ? Il ne me paraît pas qu'il puisse en être ainsi.

Lorsque la loi a voulu restreindre l'action, elle l'a dit expressément.Cela est si vrai que la loi du 26 août 1822 fait une distinction ; il y a des cas fort graves où il suffit de la simple réquisition pour qu'un membre de l'administration communale soit tenu d'accompagner l'agent ; il est des cas plus graves pour lesquels il est formellement exprimé que le juge de paix sera requis par écrit ; que s'il croit devoir ne pas obtempérer à la réquisition, il donnera les motifs de son refus, à savoir qu'il n'existe pas pour lui de présomptions suffisantes pour autoriser une visite domiciliaire.

Si l'on veut donc, dans la loi actuelle, soumettre à des conditions spéciales le droit des vérificateurs, il faut l'exprimer ; mais si l'on s'en tient à la disposition générale qui est proposée, je crois que ni le juge de paix, ni le bourgmestre, ni le commissaire de police, ne pourront régulièrement empêcher une visite domiciliaire, en refusant d'y être présents. Si l'on pense qu'il ne suffit pas d'autoriser l'exercice des employés dans les lieux accessibles au public et où se l'ont les transactions, si l'on veut permettre de pénétrer dans le domicile et que la garantie ordinaire de la présence d'un magistrat paraisse insuffisante, il faut exprimer clairement dans la loi la condition à laquelle cette visite est subordonnée.

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - Messieurs, l'honorable M. Frère vient de dire qu'en vertu de l'article 16 du Code d'instruction criminelle, les juges de paix sont tenus quand même de se rendre aux réquisitions qui leur sont faites par des officiers de police judiciaire. Je ferai observer que ce n'est pas en vertu de l'article 16 du Code d'instruction criminelle que les juges de paix doivent cette espèce d'obéissance à leurs agents inférieurs ; c'est en vertu d'un décret du 5 nivôse an v. Aux termes de ce décret, un juge de paix requis de constater un délit forestier et de faire, dans ce but, une visite domiciliaire, ne peut se refuser à la réquisition.

Voilà la première dérogation au principe de la libre appréciation du magistrat ; vous avez récemment compris la nécessité de reproduire une semblable dérogation dans la loi sur le régime forestier. Voilà comme les diverses dérogations ont été traduites dans nos lois.

En l'absence de stipulations expresses, la loi nouvelle ne donnerait donc pas aux agents des poids et mesures le droit de faire céder les juges de paix auxquels ils s'adresseront.

En résumé, la question à trancher est celle de savoir s'il convient à la Chambre d'investir ces agents d'un pouvoir aussi considérable.

M. Rousselle. - Messieurs, la Chambre comprendra qu'il me serait impossible d'entrer dans la discussion des questions controversées qui viennent d'être traitées par M. le ministre de la justice et par l’honorable M. Frère-Orban ; il est cependant une observation sur laquelle j'appelle l'attention de la Chambre. Je suppose qu'un vérificateur des poids et mesures qui doit faire son inspection dans les communes de son ressort, se mette dans l'idée de visiter l'habitation domestique de tous les marchands qui se servent de poids et mesures pour s'assurer qu'ils ne conservent pas des poids et mesures illégaux, et qu'il requière le juge de paix ou autre fonctionnaire qualifié de l'accompagner, celui-ci sera-t-il tenu d'obtempérer à sa demande ?

A mon avis, cela serait inadmissible, et je pense que ni le juge de paix, ni le membre de l'administration communale, ni le commissaire de police ne devraient pas suivre le vérificateur qui leur aurait fait une pareille réquisition.

Je comprends très bien que lorsqu'un vérificateur des poids et mesures aura un soupçon grave d'une fraude par un marchand, il requière, après explication, soit un membre de l'administration communale, soit le juge de paix, soit le commissaire de police de l'accompagner, et que, dans ce cas, ce pourrait être un devoir pour ceux-ci d'obtempérer à la réquisition.

Mais si c'est là ce que la Chambre veut, je crois qu'il faut que cela soit très explicitement exprimé.

M. Manilius. - J'ai demandé la parole uniquement pour déclarer que j'ai confiance dans l'amendement proposé par M. le ministre de l’intérieur ; cette disposition obviera en grande partie aux inconvénients qui ont été signalés dans la discussion. Je fais cette déclaration avec d'autant plus d'empressement que, d'ici au second vote, nous aurons encore le temps de réfléchir et que l'on trouvera peut-être encore moyen d'améliorer la rédaction de l'article 15.

Par ces motifs, je relire la proposition que j'avais faite.

M. Deliége. - Je me rallie à la rédaction de M. le ministre de l'intérieur, qui est encore plus claire que la mienne ; seulement je pense qu'il y a lieu de faire une transposition dans les premières lignes du premier paragraphe et de dire ;

« Les lieux où se font habituellement soit des perceptions à charge des particuliers, soit des transactions, pour lesquelles, etc... »

M. Coomans. - Après les déclarations qui ont été faites, je dois également retirer mon amendement.

M. le président. - L'amendement de M. Coomans est retiré.

- La proposition de M. le ministre de l'intérieur, avec la transposition demandée par M. Deliége, est mise aux voix et adoptée.

Article 17

M. le président. - Il reste à voter un paragraphe de l'article 17 qui a été tenu en suspens, jusqu'au vote de l'article 3 qui avait été également réservé.

Ce dernier article ayant été voté, il y a lieu de se prononcer maintenant sur le n 2° du littera C de l'article 17. Ce numéro est ainsi conçu ;

« 2° Les contrevenants à l'article 3 de la présente loi. »

- Ce paragraphe est adopté.

Article 20

M. Moreau. - Par suite de la suppression de l'art, 5 il est nécessaire de modifier la rédaction de l'article 20 et d'y substituer les mots « de l'article 16 » à ceux « de l'article 17 ». Le premier paragraphe de cet article serait donc ainsi rédigé :

« Seront de plus saisis et confisqués et brisés, les instruments mentionnés dans les numéros 1 et 2 littera A de l'article 16.

- Ces changements sont adoptés.

Article nouveau

M. le président. - Nous avons maintenant un amendement proposé par M. le ministre de la justice, qui forme un article nouveau et qui viendrait après l'article 19.

L'amendement est ainsi conçu ;

« En ce qui concerne la condamnation aux frais prononcée au profit de l'Etat, la durée de la contrainte sera déterminée par le jugement oii l'arrêt, sans qu'elle puisse être au-dessous de huit jours ni excéder un mois. Néanmoins les condamnés qui justifieront de leur insolvabilité, suivant le mode prescrit par les lois ordinaires de la procédure criminelle, seront mis en liberté, après avoir subi sept jours de contrainte, quand les frais n'excéderont pas 25 francs. »

La section centrale a admis cet article et a proposé d'y ajouter le paragraphe suivant ;

« La contrainte par corps n'est exercée ni maintenue contre les condamnés qui auront atteint leur soixante et dixième année. »

M. Delfosse. - Sous le ministère précédent, on a soulevé la question de savoir si un ministre qui n'est pas membre de la Chambre peut présenter des amendements ; une commission a été nommée pour examiner cette question, elle n'a pas encore fait son rapport ; mon intention n'est pas de repousser les amendements de M. le ministre de la justice par une fin de non-recevoir, mais il est bien entendu que les prérogatives de la Chambre sont entièrement réservées. ;

M. le ministre de la justice (M. Nothomb). - J'ai suivi les précédents.

M. Delfosse. - Cela est vrai, mais on ne les avait laissé poser, que sous la réserve que je viens de renouveler.

- L'article 20 nouveau ainsi amendé est mis aux voix et adopté.

Articles 22 et 23

M. le président. - Nous passons à l'amendement proposé par M. Van Overloop consistant à rédiger comme suit l'article 23 :

« Les contraventions aux arrêtés pris en vertu du paragraphe premier de l'article 22, seront punies d'après le littera C de l'article 17. »

La section centrale a pensé que cette rédaction laisserait sans sanction les arrêtés contenant des dispositions nécessaires pour assurer l'application complète et régulière de la loi, arrêtés qui sont autres que ceux qui sont mentionnés dans le paragraphe premier de l'article 22.

Pour combler cette lacune, elle propose de transférer une partie du paragraphe 2 dans le premier, et de rédiger ainsi l'article 22 ;

« Des arrêtés royaux décréteront toutes les dispositions nécessaires pour assurer l'application régulière et complète de la loi ; ils régleront la forme et la composition des poids et des mesures, et détermineront les conditions que doivent remplir ces instruments, de même que les instruments de pesage.

« Le service de la vérification et celui de la surveillance en matière de poids et mesures, le mode de constater les contraventions, etc. »

Moyennant ce changement à l'article 22, la section centrale adopte l'amendement de M. Van Overloop.

- La nouvelle rédaction de l'article 22 csl mise aux voix et adoptée.

L'article 23, tel qu'il a été amendé par M. Van Overloop, est ensuite mis aux voix et adopté.

Article 25

« Art. 25. Les tribunaux de simple police connaîtront de toutes les contraventions à la présente loi et aux arrêtés pris pour son exécution. »

M. le président. - A cet article M. le ministre de la justice a proposé un deuxième paragraphe ainsi conçu :

(page 1037) « Toutefois, la disposition du paragraphe 2 de l'article 2 de la loi du 1er mai 1849, relative aux circonstances atténuantes, n'est pas applicable aux contraventions prévues par la présente loi. »

- Cet amendement est mis aux voix et adopté ainsi que l'article amendé.

M. le président. - Nous voilà arrivés au terme de la loi.

M. Moreau, rapporteur. - La Chambre avait renvoyé à la section centrale une pétition du sieur Daumeries, maître brasseur à Loupoigne, par laquelle il présente des observations sur des mesures à prendre concernant le jaugeage des tonneaux et futailles qu'emploi ent les brasseurs.

La section centrale a conclu à ce que cette pétition fût déposée sur le bureau pendant la discussion du projet de loi, ce qui a eu lieu, et ensuite à ce qu'elle fût renvoyée à M. le ministre de l'intérieur ; je demande que la Chambre veuille bien statuer sur cette deuxième partie des conclusions de la section centrale.

- Ces conclusions sont adoptées.

Second vote des articles

M. le président. - A quel jour la Chambre veut elle fixer le second vote ?

- Plusieurs voix. - A mardi !

- D'autres voix. - A lundi !

M. Deliége. - Le premier objet à l'ordre du jour après les poids et mesures est le projet de loi relatif à la police des irrigations, dont je suis rapporteur. Un devoir à remplir qu'il m'est impossible de remettre, ne me permettant pas d'assister à la séance de lundi, je prie la Chambre de renvoyer à mardi la discussion de ce projet de loi.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Si nous ne fixons pas à lundi le second vote du projet de loi sur les poids et mesures, nous devrons commencer la discussion du projet de loi sur les irrigations. On ne pourra pas la terminer en une séance. Nous devrons sans utilité scinder cette discussion qui est très importante.

M. Orts. - J'engage la Chambre à fixer le second vote du projet de loi sur les poids et mesures au moins à mardi. Certains amendements ont provoqué des observations sérieuses ; plusieurs ont été improvisés, qui pourraient introduire dans la loi des principes dont on ne prévoit pas toutes les conséquences et sur lesquels il importe d'avoir le temps de réfléchir. La discussion qui vient d'avoir lieu prouve que nous sommes en présence d'un danger de cette espèce.

Il n'y a pas urgence, car le Sénat n'est pas assemblé. Si on veut fixer le second vote à un jour plus éloigné que mardi, je ne m'y oppose pas.

M. de Theux. - Si on trouve quelque inconvénient à fixer à lundi le second vote du projet de loi sur les poids et mesures, mieux vaudrait le renvoyer après le premier vote du projet de loi sur les irrigations.

Rien n'empêcherait d'ouvrir aujourd'hui la discussion générale sur le projet de loi relatif aux irrigations ; la Chambre déciderait ensuite à quel jour elle la continuerait.

- La Chambre consultée fixe le second vote du projet de loi sur les poids et mesures, après le premier vote du projet de loi concernant les irrigations.

La Chambre décide qu'elle va passer immédiatement à la discussion du projet de loi sur les irrigations.

Projet de loi sur la police des irrigations

Discussion générale

M. le président. - Nous sommes en présence de deux projets ; celui du gouvernement et celui de la section centrale ; le gouvernement se rallie-t-il à ce dernier ?

M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Oui, M. le président.

M. le président. - La discussion s'ouvre donc sur le projet de la section centrale.

M. de Muelenaere (pour une motion d’ordre). - La motion d'ordre que je crois devoir présenter dès l'ouverture de la discussion aura, je pense, pour effet, d'abréger nos débats.

Il y a deux jours, nous avons reçu un mémoire de la part d'un certain nombre de propriétaires dans la Campine. Les auteurs de ce mémoire se plaignent avec amertume de ce que, selon eux, le projet de loi actuel porte une atteinte grave à leurs propriétés. S'il était vrai que ce projet de loi viole les droits que les auteurs de ce mémoire prétendent posséder en vertu de conventions librement consenties par le gouvernement, je pense qu'aucun de nous n'y donnerait son assentiment.

Le projet, il est vrai, a été qualifié de loi de police sur les irrigations dans la Campine ; mais d'abord, il est évident pour tout le monde que ce projet n'est pas une simple loi de police ; il a une portée beaucoup plus grande ; il touche à des intérêts d'une haute gravité. Mais une loi de police, d'ailleurs, pas plus que toute autre loi, bien qu'elle puisse réglementer jusqu'à un certain point l'usage de la propriété, ne peut pas cependant enlever à un citoyen ni sa propriété ni un droit inhérent à cette propriété. Dès lors, messieurs, vous comprenez de quelle importance il est de se mettre bien d'accord sur cette question.

Pour ma part, j'ai cherché à m'éclairer ; j'ai cherché à me former une opinion sur le fondement des plaintes de ces propriétaires ; mais je dois avouer que, jusqu'à présent, je n'ai pas réussi. Je n'ai pas trouvé dans le rapport de la section centrale les éclaircissements nécessaires à cet égard ; et cela est d'autant moins étrange que lorsque le rapport de la section centrale a été déposé sur le bureau, lors même qu'il a été distribué aux membres de la Chambre, nous n'avions pas encore le mémoire dont il s'agit, de manière que le rapport n'a pu naturellement rencontrer les considérations exposées dans ce document.

Je ne sais pas, messieurs, si les pétitionnaires sont fondés dans leurs prétentions. Mais j'ai des doutes, des scrupules ; je voudrais, pour les dissiper, pouvoir m'éclairer, par l'inspection des pièces qu'invoquent les pétitionnaires.

Dans ce but, je prie M. le ministre de l'intérieur de vouloir bien déposer sur le bureau la première ou l'une des premières conventions qui ont été passées avec des propriétaires de la Campine.

Je dis la première ou l'une des premières, parce qu'il résulte du mémoire même que les conditions qui d'abord avaient été admises parle gouvernement ont été modifiées dans les conventions postérieures. De sorte que, pour pouvoir bien apprécier les prétentions des auteurs du mémoire, nous devrions avoir les premières conventions, celles, par exemple, qui ont été passées avec les communes de Eelen et de Neeroeteren.

Lorsque nous aurons ces conventions sous les yeux, nous pourrons y voir à quoi le gouvernement s'est obligé et quels sont les droits que les pétitionnaires peuvent revendiquer avec justice. Car, si d'une part, je suis d'avis qu'il faut religieusement respecter les droits acquis, je suis d'avis qu'on ne peut pas enlever aux tiers des droits qu'ils ont légitimement acquis, et surtout, comme ils le prétendent, à tilre onéreux envers le gouvernement. D'autre part, je ne voudrais pas non plus que des prétentions injustes, des prétentions exorbitantes ou mal fondées, pussent arrêter l'action du pouvoir exéculif dans une mesure qui me semble aussi d'intérêt général.

Je voudrais donc, messieurs, être parfaitement éclairé sur les droits des propriétaires réclamants de la Campine. Nous ne pouvons l'être, me semble-t-il, que par l'étude consciencieuse des pièces mêmes.

Un membre de cette Chambre m'a dit qu'il n'y avait pas eu de convention, bien que les pétitionnaires semblent y faire allusion.

D'après cet honorable collègue, il n'y aurait eu que de simples cahiers des charges. Mais en supposant qu'il en fût réellement ainsi, cela ne changerait rien au fond de la question. Il est hors de doute qu'un cahier des charges crée également pour toutes les parties des obligations et des droits respectifs ; je crois même qu'en général, et avec raison, les cahiers des chargées sont interprétés par les tribunaux d'une manière plus sévère pour le gouvernement que les autres actes synallagmatiques. Je dis que c'est à juste titre que les tribunaux sont enclins à juger ainsi, car dans les actes bilatéraux il y a intervention des deux parties, et chacune d'elles a pu stipuler dans son propre intérêt ; tandis que les cahiers des charges étant exclusivement rédigés par le gouvernement, celui-ci doit avoir soin que ses droits soient complètement saufs.

Il est donc naturel qu'on soit disposé à interpréter les cahiers des charges avec une certaine sévérité pour le gouvernement.

Il résulte encore du mémoire qu'il y a des procès actuellement en instance. Nous devons donc, par une rédaction claire, nette, précise de la loi, empêcher que le gouvernement ne puisse être entraîné dans d'autres actions de ce genre ; car l'expérience nous apprend que des procès de cette espèce, toujours désagréables pour les parties, finissent encore par devenir très onéreux pour les contribuables et pour le trésor public.

C'est donc dans ce but, messieurs, que je prie M. le ministre de l'intérieur de vouloir bien, pendant la discussion, déposer sur le bureau les conventions qui ont été conclues avec les communes d'Eelen et de Nceroeteren. Je crois que nous y trouverons ce qu'il nous faut pour pouvoir nous fixer sur la question soulevée par les auteurs du mémoire auquel je viens de faire allusion.

M. le ministre de l'intérieur (M. de Decker). - Je ne vois aucun inconvénient à satisfaire à la demande de l'honorable M. de Muelenaere et à déposer sur le bureau les conventions on plutôt les actes de vente auxquels il a fait allusion ; car à cette époque il n'y avait pas encore de conventions régulières comme on en a fait depuis. Et cela se comprend ; le système des irrigations ne date pas de loin ; c'était quelque chose de nouveau ; on n'avait pour se guider aucun précédent administratif ; de sorte qu'il a fallu tâtonner dans le principe, et c'est ainsi que s'explique la différence des deux ou trois régimes sous lesquels ces défrichements ont été placés.

Ainsi, primitivement, il y avait simplement acte de vente des terrains qui étaient préparés pour l'irrigation par l'administration.

Plus tard on a continué de préparer adminisirativement ces terrains, pour les irrigations et l'on a fait des actes de concession.

Enfin, l'on s'est borné à faire des Conventions avec des particuliers pour les terrains qui étaient susceptibles d'irrigations, mais pour lesquels il n'y avait encore aucune préparation faite par l'administration.

Voilà les trois régimes sous lesquels les propriétés irriguées ont vécu jusqu'à présent.

Les réclamations de propriétaires dout parle l'honorable préopinant et qui paraissent l'avoir ému, ne sont pas nouvelles. Elles se sont déjà produites à l'occasion du règlement du 13 mai 1854.

(page 1038) Ces réclamations ou prétentions ont été à différentes reprises portées devant les tribunaux. Des questions de cette nature ne me paraissent pouvoir être utilement discutées ici ; il convient d'en laisser la décision aux tribunaux.

Le projet de loi que nous, allons discuter laisse du reste ces questions complètement sauves et intactes. Il est évident que pour le passé la loi nouvelle n'exercera pas d'influence, en ce sens que les droits des propriétaires seront, comme ils le sont aujourd'hui, réglés par les conventions faites entre eux et le gouvernement.

Pour l'avenir, la condition des propriétaires deviendra meilleure. Car le régime intérieur de leurs irrigations est rendu plus libre qu'il ne l'était jusqu'à ce jour et l'intervention de l'Etat est beaucoup plus limitée.

Le propriétaire n'aura donc pas à se plaindre de la loi nouvelle ; ce serait plutôt le gouvernement qui aurait à présenter des objections. Mais il ne le fera pas, parce que si l'intérêt public exige que certaines précautions soient prises pour la conduite de l'ensemble des travaux d'irrigation, le gouvernement reconnaît aussi la nécessité de respecter la propriété et de lui accorder toute la liberté possible quant an régime intérieur des irrigations.

M. de Theux. - Messieurs, les explications données par M. le ministre de l'intérieur me paraissent complètes.

La section centrale n'a eu l'intention de porter atteinte à aucun droit ; elle n'aurait pu le faire ; elle ne pouvait créer des droits contre le gouvernement, elle ne pouvait non plus en ôter aux particuliers. C'est ua principe de droit public qui n'a pas besoin d'être discuté.

La valeur des actes posés par le gouvernement doit nécessairement être appréciée par les tribunaux. Lorsque l'arrêté du 13 mai a été porté, certains propriétaires ont voulu continuer à faire eux-mêmes la manœuvre des écluses.

L'affaire a été portée devant les tribunaux. Je pense que devant le tribunal de justice de paix, le propriétaire qui avait été cité par l'administration des ponts et chaussées a gagné son procès, il l'a perdu en appel devant le tribunal de première instance. Je ne sais pas à quoi en est aujourd'hui cette affaire.

Mais je pense qu'il ne peu rester aucun doute que cette question reste pleine et entière dans l'appréciation des tribunaux.

Quelles sont les conséquences qui pourront résulter de la loi au profit ou à la charge des propriétaires ? C'est ce que les tribunaux auront à apprécier. Les actes dont il s'agit donnent-ils lieu à une demande d'indemnité ? C'est encore ce que les tribunaux apprécieront. Tous les irrigateurs ont été de cet avis, que la loi ne pouvait pas porter atteinte à des droits acquis.

Mais aussi dans la réunion où l'on a adopté la pétition qui a été adressée à la Chambre, on a été généralement d'accord que ces questions ne pouvaient pas être résolues par la Chambre elle-même ; qu'elles restaient du ressort des tribunaux. Voilà dans quel sens la section centrale a jugé, et c'est aussi dans ce sens que les irrigateurs se sont prononcés dans la réunion que je viens de rappeler.

M. Julliot. - Messieurs, quand il s'est agi des irrigations des bruyères en Campine, le gouvernement et les communes, comme l'a dit M. le ministre de l'intérieur, ont contracté sur des bases différentes.

Dans les premiers contrats, le gouvernement et les communes ont été nécessairement faciles. Il s'agissait d'éveiller l'attention publique et de vendre le plus possible. On a donc accordé aux premiers acquéreurs des avantages exceptionnels qui sont établis par des actes de vente et autres ayant engagé la responsabilité du gouvernement.

La loi qui nous occupe propose de passer le niveau sur toutes les situations si diverses. Ce seront donc principalement les premiers acquéreurs qui auront tout à y perdre et rien à y gagner.

On nous a promis le dépôt des premiers actes de vente. Ce n'est que lorsque nous aurons connaissance de ces actes que la Chambre pourra se fixer sur la question de savoir s'il est utile d'inscrire une réserve dans la loi pour sauvegarder les droits de ces propriétaires. En attendant, nous ne déciderons rien ; mais il sera facile à démontrer, en présence des contrats, que des réserees sont nécessaires pour sauvegarder dans son intégrité le droit de propriété.

M. Deliége, rapporteur. - Messieurs, la question qui nous occupe n'a pas échappé à l'attention de la section centrale, comme l'a supposé l'honorable comte de Muelenaere. Elle était trop grave pour cela. Ellet a été traitée assez longuement et il est dit dans le rapport :

« La section centrale n'a du reste entendu enlever aucun droit•acquis, ni trancher aucune question relative à ces droits ; la loi ne peut avoir d'effet rétroactif. Ce principe de droit et d'équité ne sera jamais méconnu dans une chambre belge ».

La question des droits acquis n'a donc pas échappé à la section, centrale, mais elle n'a pas cru pouvoir insérer en tête d'une loi spéciale le principe général de droit que la loi n'a pas d'effet rétroactif et qu'ainsi elle ne peut enlever des droils acquis.

Si une telle insertion avait lieu, on se demanderait avec raison pour qui elle n'existe pas dans diverses lois antérieures. On se demanderait en justice si ce principe est applicable à certaines lois seulement et s’il ne l’est pas à d’autres lois que nous avons votées. Nous pouvions d’autant moins en parler dans la loi en présence des prétentions que l’on dit exorbitantes, que je n’ai pas examinées et que la Chambre n’examinera pas parce qu’elles sont portées devant les tribunaux. On a intenté plusieurs procès au gouvernement.

D'abord un batelier a prétendu que le gouvernement devait maintenir l'eau à tel étiage et le gouvernement a été dans cette affaire condamné en première instance.

La question est portée en appel.

Il y a un second procès ; des défricheurs prétendent que le gouvernement doit leur donner de l'eau autant qu'ils en ont besoin, et, ces besoins, ils entendent les fixer eux-mêmes.

Pouvions nous donner raison à l'une ou l'autre de ces prétentions, en faisant pour cette loi ce que nous n'avons pas fait pour d'autres ? Nous ne le pouvions pas.

Du reste je ne m'oppose nullement à la motion de l'honorable M. de Muelenaere, je crois que M. le minstre de l’intérieur fera bien en soumettant à la Chambre les divers contrats qui ont été faits.

- La séance est levée à trois heures et un quart.