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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 9 avril 1856

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1855-1856)

(Présidence de M. Delehaye.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1055) M. Maertens procède à l'appel nominal à 2 heures et un quart et donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier ; la rédaction eu est approuvée ; il présente l'analyse des pétitions adressées à la Chambre.

Pièces adressées à la chambre

« Le sieur Lejeasne, combattant de 1830, demande que le projet' de loi relatif à la pension d'officiers de volontaires lui soit rendu applicable ou qu'on lui accorde sa réintégration dans l'armée. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi.


« Les membres du conseil communal et des habitants d'Ecaussinnes-Lalaing prient la Chambre d'accorder au sieur Tarte la concession d'un chemin de fer de Braine-le-Comte à Courtrai par Enghien, Renaix et Avelghem. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la concession de plusieurs lignes de chemin de fer.


« Des commissaires de police dans l'arrondissement judiciaire de Termonde demandent un traitement pour les fonctions d'officier du ministère public qu'ils remplissent près des tribunaux de simple police. »

- Renvoi à la section centrale chargée d'examiner le budget de la justice.


« M. le ministre de la justice transmet, avec les pièces de l'instruction, deux demandes de naturalisation. »

- Renvoi à la commission des naturalisations.

Ordre des travaux de la Chambre

M. le président. - Parmi les objets à l'ordre du jour figure le budget des dotations. La Chambre ne peut statuer sur cet objet sans avoir arrêté son propre budget.

Le rapporteur de la commission de comptabilité est M. Dumortier qui est absent. Je demanderai à la Chambre s'il ne convient pas que la commission de comptabilité nomme un autre rapporteur ou que la section à laquelle appartient M. Dumortier soit invitée à le remplacer. (Adhésion.)

S'il n'y a pas d'opposition, la section à laquelle appartient M. Dumortier sera invitée à nommer un autre membre de la commission de comptabilité.

Vous avez voté hier le projet de loi relatif à la cession du chemin de fer de Lierre à Contich. Il vous reste à prendre une résolution relativement aux pétitions qui se rattachent à cet objet.

La section centrale a proposé, indépendamment du dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet, le renvoi à M. le ministre des travaux publics.

- Les conclusions sont adoptées.

Projet de loi relatif à la surveillance des fabriques de sucre indigène

Rapport de la section centrale

M. Deliége. - J'ai l'honneur de déposer le rapport de la section centrale qui a examiné le projet de loi sur la surveillance des fabriques de sucre indigène.

- La Chambre ordonne l'impression et la distribution de ce rapport et le met à la suite des objets à l'ordre du jour.

Projet de loi accordant des crédits supplémentaires au budget du ministère de la justice

Dépôt

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Le Roi m'a chargé de présenter a la Chambre un projet de loi tendant à allouer au département de la justice des crédits supplémentaires s'élevant à 78,000 francs.

- Il est donné acte à M. le ministre de la présentation de ce projet de loi. La Chambre en ordonne l'impression et la distribution, et le renvoie à l'examen des sections.

Ordre des travaux de la Chambre

M. Lelièvre (pour une motion d’ordre). - Au nombre des objets qui figurent, à l'ordre du jour, se trouve le projet de loi concernant des modifications au Code pénal militaire. Je pense qu'il serait préférable d'ajourner la discussion de ce projet à la prochaine session, époque à laquelle je désire qu'on présente nn travail complet concernant le Code militaire et l'instruction criminelle en cette matière.

Il est évident que le projet n'apporte pas des améliorations réelles à l'ordre de choses en vigueur.

Il laisse subsister toute la procédure criminelle si vicieuse en cette matière, il ne touche en rien aux pouvoirs exorbitants des auditeurs militaires, qui sont tout à la fois juges d'instruction, officiers du ministère public et greffiers, et qui assistent à la délibération des conseils de guerre en l'absence des accusés.

D'un autre côté on livre à la juridiction militaire des individus qui relèvent aujourd'hui de la juridiction civile ; or, on ne conçoit semblable disposition que lorsque la justice militaire aura été organisée sur un pied conforme à nos institutions libérales.

On maintient la peine du cachot au pain et à l'eau, contrairement aux principes de progrès admis généralement en matière pénale.

Enfin, le projet dont nous nous occupons est vicieux en divers autres points. A mon avis, il ne peut faire l'objet d'une loi spéciale. J'estime en conséquence qu'il est préférable d'attendre un travail complet de révision, concernant le Code pénal militaire et l'instruction criminelle en cette matière, et j'engage instamment M. le ministre à s'occuper immédiatement de cet objet important.

Le gouvernement français vient de nous donner à cet égard un exemple qu'il importe de suivre, si nous ne voulons rester en arrière, relativement à ce progrès réclamé depuis longtemps.

M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Je suis d'autant plus disposé à me rallier à la proposition de l'honorable M. Lelièvre, que je me trouvais dans l'obligation de proposer au,projet de loi un amendement qui était de nature à en changer en quelque sorte toute l'économie.

Lorsque l'honorable M. de Man a proposé de mettre ce projet de loi à l'ordre du jour, je ne me trouvais pas présent. Sans cela j'aurais eu l'honneur de soumettre cette observation à la Chambre et il est probable qu'elle n'eût pas insisté pour mettre à l'ordre du jour un projet de loi auquel le ministre de la guerre ne pouvait se rallier qu'en partie.

- La proposition de M. Lelièvre est mise aux voix et adoptée.


M. de Steenhault (pour une motion d’ordre). - Messieurs, vous avez renvoyé, dans la séance du 16 ou du 17 février une pétition relative aux péages sur le canal de Charleroi à MM. les ministres des finances et des travaux publics avec demande d'explication. Jusqu'ici nous n'avons pas reçu ces explications.

Cet objet devant trouver place dans la discussion du budget des travaux publics, je demande à MM. les ministres s'ils comptent nous donner les explications dont il s'agit avant la discussion de ce budget.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, des explications seront données très prochainement, je pense, sur la pétition à laquelle l'honorable membre vient de faire allusion.

M. Faignart. - Messieurs, j'insiste pour que les explications qui nous ont été promises par MM. les ministres des finances et des travaux publics soient données avant la discussion du budget de ce dernier département. Je pense que le moment ne saurait être mieux choisi pour discuter au moins s'il y a lieu de continuer ou de révoquer une disposition qui froisse de nombreux intérêts. Beaucoup de pétitions ont été adressées à la Chambre pour réclamer justice en ce qui concerne le péage du canal de Charleroi. J'insiste, je le répète, pour que les explications promises soient fournies avant la discussion du budget des travaux publics.

M. Delfosse (pour une motion d’ordre). - Messieurs, les explications de M. le ministre de l'intérieur relatives à la pétition des professeurs du conservatoire de musique de Liège ont été distribuées il y a quelques jours. Je demande que la Chambre veuille mettre cet objet à l'ordre du jour de vendredi.

- Cette proposition est adoptée.


M. Vandenpeereboom (pour une motion d’ordre). - Messieurs, l'honorable ministre des finances vient de présenter un projet de loi de crédits supplémentaires ; nous aurons le temps d'examiner convenablement ce projet ; mais depuis huit ans que je suis à la Chambre, j'ai vu, chaque année dans les derniers jours de la session, demander un grand nombre de crédits supplémentaires, de crédits complémentaires, de crédits de toute nature. Si le gouvernement a encore des projets de ce genre à nous soumettre, je le prié de vouloir bien les déposer dans un bref délai, afin que nous puissions les examiner et les discuter en connaissance de cause.

Les autres années, nous votions dans les derniers jours de la session, et très à la hâte, plus de millions que nous n'en avions voté pendant tout le reste de l'année. Je désire éviter aujourd'hui cet inconvénient.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Messieurs, l'attention de tous les chefs de départements a été appelée sur l'objet dont vient de parler l’honorable membre. Si des crédits supplémentaires sont nécessaire, ils seront demandés en temps utile pour que la Chambre puisse en faire l’examen avec maturité.

Rapports sur des pétitions

M. de Ruddere de Te Lokeren, rapporteur. - Par pétition datée du 26 février 1856, plusieurs administrations communales des arrondissements d'Arlon et de Virton proposent un nouveau mode de poursuites pour la rentrée des deniers des communes et subsidiairement elles demandent que les comptables des communes soient autorisés (page 1056) à envoyer aux redevables le dernier avertissement et la sommation contrainte.

Les pétitionnaires portent à la connaissance de la Chambre que le mode actuel de poursuite est contraire aux intérêts des communes ; ils demandent de vouloir établir un règlement à l'instar de celui qui a été fait pour la poursuite en matière de contributions directes, car le mode actuel de poursuite est trop onéreux.

Ils citent en exemple que pour obtenir le payement du prix de vente d'un double stère de bois s'élevant à fr. 8,50, les frais se montent à 93 fr. 55 c, tandis que si les poursuites avaient lieu comme en matière de contributions directes, les frais ne s'élèveraient qu'à fr. 17,74, différence en moins de fr. 75-81.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre de la justice.

M. Vandenpeereboom. - Messieurs, je crois qu'on pourrait également renvoyer la pétition à M. le ministre de l'intérieur. Il s'agit du recouvrement de recettes communales et cet objet rentre dans les attributions de M. le ministre de l'intérieur.

- Les conclusions de la commission ainsi que la proposition de M. Vandenpeereboom sont adoptées.


M. de Ruddere de Te Lokeren, rapporteur. - Par pétition sans date, plusieurs gardes champêtres dans l'arrondissement de Turnhout demandent une augmentation de traitement.

Plusieurs pétitions de ce genre ont déjà été adressées à la Chambre qui a adopté l'ordre du jour.

Votre commission a l'honneur de vous proposer les mêmes conclusions : l'ordre du jour.

- Adopté.


M. de Ruddere de Te Lokeren, rapporteur. - Par pétition datée dé Bruxelles le 10 février 1856, plusieurs industriels à Bruxelles demandent l'abolition de la surtaxe à laquelle se trouvent assujettis les charbons du Centre qui empruntent le canal de Charleroi à Bruxelles, à partir de Seneffe.

Même demande des habitants de Malines.

Les pétitionnaires se plaignent de ce qu'ils doivent payer pour transporter les produits du Centre sur le canal de Charleroi à Bruxelles une taxe artificielle de 80 centres ; quoique embarqués à Seneffe, ils doivent payer le droit de navigation à partir de Charleroi ; ils acquittent le péage pour un parcours de six lieues qu'ils n'ont pas effectué, tandis que sur les routes pavées, canaux et chemins de fer on ne paye que les distances qu’on parcourt ; ils prient la Chambre de soumettre au droit commun le canal de Charleroi et les consommateurs qui en décident.

Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des finances.

- Adopté.


M. de Ruddere de Te Lokeren, rapporteur. - Par pétition datée de Termonde, le 18 février 1856, les Consomma-- leurs et industriels à Termonde demandent l'abolition de la surtaxe à laquelle se trouvent assujettis les charbons de terre qui empruntent le caual de Charleroi à partir de Seneffe.

Les pétitionnaires portent à la connaissance de la Chambre qu'ils doivent payer pour le charbon qui emprunte le canal de Charleroi à partir de Seneffe un droit de péage comme s'il avait été expédié de Charleroi pour un parcours de quinze lieues, alors qu'il n'est que de neuf lieues ; qu'ils payent deux francs par tonne, au lieu de 1 fr. 20 c. par distance franchie, ce qui fait une surtaxe de 80 centimes ; ils prient la Chambre de mettre un terme à cet état de choses qui les place en dehors de la loi commune. Votre commission a l'honneur de vous proposer le renvoi à M. le ministre des finances.

M. Magherman, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 23 février 1856, le sieur Tallois demande une indemnité pour les dommages qu'il a éprouvés par suite de l'inexécution d'un arrêté royal du 23 mai 1838, relatif à l'établissement de la station du Midi à Bruxelles.

Le sieur Tallois se plaint de ce que l'inexécution d'une convention entre le gouvernement, les hospices de Bruxelles et le sieur Basse pour l'établissement de la station du Midi, lui a porté un tort considérable, Le pétitionnaire avait acquis les deux tiers du terrain que les hospices avaient à vendre rue de la Fontaine, pour y construire des maisons, dans la prévision qu'aux termes de la susdite convention, cette rue aurait été prolongée au-delà de la station. Cette convention n'ayant pas reçu son exécution, il en est résulté que les propriétés bâties du pétitionnaire se sont trouvées dans une situation de dépréciation qui ne lui a pas permis de satisfaire aux charges qu'il avait contractées pour faire ces constructions.

Il se plaint également de l'inobservance de la part du juge de paix qui, au vœu de la loi du 15 août 1854, a été appelé à assister à la vente de ces immeubles par expropriation forcée, de certaines dispositions da ladite loi.

Il réclame une indemnité, tant du chef de l'inexécution de la convention prémentionnée, qu'à raison de la conduite du susdit juge de paix.

Votre commission des pétitions estime, messieurs, que les tribunaux seuls sont compétents pour statuer sur ces matières.

En conséquence, elle propose l'ordre du jour.

- Adopté.


M. Magherman, rapporteur. - Par pétition datée de Bruxelles, le 25 février 1856, la veuve du lieutenant de gendarmerie Vanden Bossche demande une augmentation de pension.

Votre commission des pétitions ne doute pas, messieurs, que la pension de la veuve Vanden Bossche n'ait été liquidée conformément aux lois sur la matière. Néanmoins par égard pour la veuve d'un ancien militaire qui a pris une part active aux combats de notre révolution de 1830 dans lesquels il a été blessé, elle vous propose le renvoi à M. le ministre de la guerre afin que ce haut fonctionnaire examine avec bienveillance s'il y a moyen d'apporter quelque amélioration à la situation de cette veuve qui a une charge de famille de huit enfants.

- Adopté.


M. Magherman, rapporteur. - Par pétition datée de Namur, le 17 décembre 1855, les sieurs Colin, Mathot et autres membres de l'association typographique de Namur, demandent une part dans la répartition du subside de 100,000 fr., proposé en faveur de l'industrie typographique.

Votre, commission des pétitions estime, messieur, que les ouvriers typographes de Namur, comme ceux de la capitale, et comme tous ceux du royaume qui se trouvent lésés dans leurs moyens d'existence par suite du traité avec la France, ont droit à la sollicitude du gouvernement.

En conséquence elle propose l'envoi de leur pétition à M. le ministre de l'intérieur.

M. Lelièvre. - Je recommande la pétition à l'examen de M. le ministre de l'intérieur qui est prié de faire droit à la demande des pétitionnaires.

- Les conclusions de la commission sont mises aux voix et adoptées.


M. Magherman, rapporteur. - Par pétition datée de Rienne le 12 février 1856, les sieurs Bernard et Zabre proposent des économies dans les dépenses de l'enseignement primaire, afin d'améliorer la position des instituteurs.

La commission des pétitions propose l'envoi de cette pièce à M. le ministre de l’intérieur.

- Adopté.


M. Magherman, rapporteur. - Par pétition datée du 18 février 1856, le sieur Paty réclame l'intervention de la Chambre pour qu'il soit donné suite aux prétentions dont il a saisi la justice.

Le sieur Paty, mouleur en sable à Chatqueue, commune de Seraing, sollicite l'intervention de la Chambre pour lui faire obtenir justice d'une expropriation forcée exercée sur lui en vertu d'un jugement du tribunal de première instance de Liège passé en force de chose jugée.

Comme il n'appartient pas à la législature de s'immiscer dans les affaires judiciaires, votre commission des pétitions a l'honneur de proposer l'ordre du jour.

- Adopté.

Projet de loi, amendé par le sénat, sur la pension des officiers qui, en qualité de volontaires, ont pris part aux combats de la révolution

Discussion générale

M. Rodenbach. - Messieurs, les employés civils, décorés de la croix de Fer, et autres volontaires, ont adressé à la Chambre plusieurs pétitions, déposées, je pense, sur le bureau, à l'effet de jouir de la faveur accordée aux combattants de 1830 qui sont encore au service et qui, pour leur pension, peuvent faire valoir les dix années ; ils disent avec raison qu'ils ont combattu pour notre indépendance, comme ceux qui sont restés sous les drapeaux. Un grand nombre d'entre eux sont très mal rétribués ; on compte parmi eux beaucoup de douaniers ; il est même des volontaires combattants qui n'ont pas de place. J'avoue que je suis très sympathique à leur réclamation. Je désireraisi savoir si M. le ministre de la guerre est disposé à l'appuyer, du moins en partie ; je ne pense pas que le sacrifice qui résultera de ce chef pour le trésor public soit bien considérable. J'attendrai la réponse de M. le ministre de la guerre. Je souhaite vivement qu'elle soit favorable aux pétitionnaires qui, je le répète, ont fortement contribué à fonder notre nationalité.

M. le président. - Les pétitions relatives au projet de loi sont déposées sur le bureau.

M. Lelièvre. - L'amendement adopté par le Sénat est conforme à la pensée généreuse qui a dicté le projet de loi, il ne rencontrera que de la sympathie dans cette enceinte. Mais, comme l'honorable M. Rodenbach, je crois devoir appeler l'attention du gouvernement sur la position des fonctionnaires des différentes administrations qui sans être entrés dans l'armée, sans avoir été officiers, ont néanmoins rendu des services comme volontaires.

Ces fonctionnaires civils ne jouiront pas du bénéfice de la loi que nous allons voter.

Cependant, messieurs, l'équité exige que l'on prenne des dispositions en leur faveur, puisqu'ils ont également bien mérité du pays.

Si l'économie du projet de loi ne permet pas d'introduire un amendement en leur faveur, je prie le gouvernement et les chefs des départements ministériels autres que M. le ministre de la guerre, de vouloir arrêter des mesures analogues à celles énoncées au projet dont nous nous occupons.

Il n'est personne qui n'applaudisse à semblables dispositions ; du (page 1057) reste ce sera réaliser d'une manière complète la pensée bienveillante qui a inspiré le gouvernement dans la mesure qu'il vous propose.

M. de Renesse. - Messieurs, je ne puis pas partager l'opinion de l'honorable M. Rodenbach, d'accorder à certains fonctionnaires publics qui, pour la plupart, sont assez bien placés, la faculté de pouvoir compter dix années de service pour la liquidaiion de leur pension, pour la part prise aux combats de la révolution dans les quatre derniers, mois de 1830.

L'on se laisse trop facilement aller à voter des dépenses nouvelles pour le trésor public, et l'on ne prend pas assez en considération les charges qui doivent en résulter, par la suite, pour les contribuables.

Nous avons déjà, depuis quelques années, voté des dépenses considérables pour le département de la guerre, nous devons encore en voter d'autres pour les dépenses des fortifications d'Anvers. Je ne puis donc consentir à l'augmentation constante des charges du trésor public, car, si l'on continue de cette manière à voter des dépenses extraordinaires, nos ressources ordinaires n'y suffiront plus : il faudra recourir nécessairement aux bons du trésor,et déjà nous n'en avons que trop pour la mauvaise situation financière du pays ; à la fin de la session, il y en aura pour plus de 30,000,000 de francs.

M. Rogier. - Messieurs, le projet de loi qui nous occupe a pour but d'améliorer la situation des individus qui, à l'époque de la révolution, ntui rendu des services au pays et ont acquis des grades dans l'armée. Je ne suis pas opposé à ce qu'on récompense très généreusement les hommes qui ont rendu des services à l'époque de notre régénération politique ; mais pour que cette mesure soit acceptée par tout le monde, ne donne pas lieu à des plaintes, à des récriminations, il faudrait qu'elle s’appliquât à tous ceux qui ont rendu des services.

Je ne sais pas pourquoi on ferait une distinction tout exceptionnelle en faveur des patriotes qui ont pris du service dans l'armée, ont continué d y servir et y ont acquis successivement des grades plus ou moins élevés.

En 1830, beaucoup de Belges ont pris les armes ou ont rendu des services d'une autre manière : les uns sont rentrés chez eux, ont repris leur profession sans demander aucune récompense au pays.

Ceux-là ne sont certes pas les moins dignes d'intérêt ; ceux qui ont obtenu la croix de Fer touchent une modique pension s'ils sont dans une position de fortune peu aisée ; les autres ont, et c'est quelque chose, le souvenir des services qu'ils ont rendus, mais ils n'ont que cela. Viennent maintenant les volontaires qui sont entrés soit dans l'armée, soit dans les administrations civiles ; si, en vue de la liquidation de leurs pensions, on veut accorder une faveur à ceux qui sont entrés dans l’armée et ont continué d’y servir, je ne sais pas pourquoi on refuserait la même faveur à ceux qui sont entrés et ont continué de servir dans les administrations civiles.

Je citerai entre autres les douaniers ; il y a beaucoup de volontaires qui ne sont pas devenus officiers à cette époque où l'on devenait cependant facilement officier, qui ont servi comme sous-officiers ou comme simples soldats et sont ensuite entrés, dans la douane. Ceux-là sont exclus du bénéfice de la loi.

Si les militaires rendent lies services dans l'armée, les douaniers n'en rendent pas de moins grands ; leurs fonctions sont parfois plus pénibles et plus difficiles à remplir. Si vous voulez prendre une mesure de munificence équitable, il faut donc que cette mesure soit applicable à d'autres encore qu'aux anciens volontaires entrés dans l'armée.

Je n'étais pas à la Chambre lors de la première discussion du projet, mais je crois me souvenir qu'une proposition, qui avait pour but d'étendre la faveur de la loi aux volontaires qui ont pris service dans l'administration civile, avait été adoptée en principe par MM. les ministres.

Au moins, l'honorable M. de Perceval, qui avait mis en avant cette proposition, a remercié M. le ministre de l'adhésion qu'il avait paru donner à la proposition. Je vois les remerciements de l'honorable M. de Perceval consignés dans les Annales parlementaires, mais je ne vois pas que la mesure qu'il a proposée ait été adoptée.

J'engagerai donc l'honorable M. de Perceval à revenir sur sa proposition première, et quaut à moi je suis tout disposé à l'appuyer.

Du moment que le gouvernement revient sur les services de 1830, c'est qu'il a des motifs suffisants pour le faire. Mais ne comprendre dans cette mesure que les officiers, ce n'est pas une justice complète. Il faut de la justice pour tout le monde, pour les hommes de 1830 qui ont continué de servir le pays dans l'armée, comme pour ceux qui, plus modestement souvent, ont servi le pays dans d'autres administrations.

Je demande que pour ceux-là aussi il soit compté dix années de service supplémentaire pour la fixation du chiffre de leur pension comme pour les officiers de l'armée.

J’appuierai une proposition faite dans ce sens. Si une proposition n'est pas faite, j'en déposerai une.

M. Manilius. - Je viens appuyer la proposition de l'honorable M. de Perceval, parce que je pense, comme lui, qu'il n'est pas bon que l'on donne des récompenses toutes particulières à une catégorie de personnes.

Mais il y a encore un autre motif qui me fait adhérer à cette proposition : c'est que les dix années de service qui seront comptées aux fonctionnaires qui ont combattu pendant la révolution, ne doivent leur profiter que lorsqu'ils ne peuvent plus rendre de services. Or l'époque de la révolution est déjà loin de nous et vous savez que ceux qui occupent des fonctions non militaires peuvent les conserver jusqu'à l'âge de 60, de 62, de 65 ans et plus même. Pour les militaires, c'est différent. Par suite des dispositions prises par le département de la guerre, on met les officierss à la retraite à 55 ans. La même disposition n'existant pas pour les personnes auxquelles je fais allusion, le danger est moins grand et la dépense sera excessivement minime. Car lorsque des fonctionnaires civils se retirent à 65 ou 70 ans, il est rare, qu'ils n'aient pas la durée de service voulu pour avoir le maximum de la pension.

La mesure aura uniquement pour effet de mettre ceux qui sont entrés en fonctions dans un âge trop avancé, dans la même position que ceux qui y sont entrés jeunes. Eh bien, ceux qui ont combattu en 1830 ont déjà un grand nombre d'années de service.

Je crois donc que la proposition de l'honorable M. de Perceval, doit être accueillie par la Chambre. Elle n'offre pas les dangers que l'honorable M. de Renesse a cru y voir. Elle n'entraînera pas à une grande dépense, surtout si l'on compte le long espace de temps qui s'est passé avant qu'on ait pensé à compter ces dix années, par ceux qui ont combattu en 1830 et qui ont eu des fonctions immédiatement après la révolution, ont déjà 25 années de service. Ils ont de plus des années de campagne.

Je crois, messieurs, que lorsqu'on veut se montrer généreux pour des survices rendus, on ne doit pas le faire par exception et pour une seule catégorie de fonctionnaires, auxquels il convient suis doute de penser en premier lieu, puisqu'on les met les premiers à la retraite. Mais soyons justes aussi pour ceux qui ne sont mis que plus tard à la pension et donnons-leur la même position.

M. Vander Donckt. - Je partage complètement les sympathies des honorables préopinants pour les diverses catégories de personnes qui demandent à recevoir aussi une part au gâteau que la Chambre prépara à quelques-uns.

Il y a peu de jours, vous avez renvoyé à la commission des pétitions une requête émanant de simples volontaires qui, après 1830, n'ont obtenu aucun emploi, et sont rentrés dans leurs foyers et qui demandent une récompense pour les services qu'ils ont rendus à |a causa de l'émancipation.

Je crois qu'il serait bien d'admettre dans le projet toutes ces catégories. Mais j'y vois une petite difficulté. Je demande qui payera. En examinant la question, je trouve qu'une partie de la nation sera appelée à payer l'autre. Et pourquoi faire une exception ? Comme vous l'a très bien dit l'honorable M. de Renesse, pourquoi montrer une préférence pour ceux qui, après leurs services militaires, sont entrés dans les fonctions civiles ? Ce sont déjà des privilèges, ils ont été avantagés par cette position. Ceux au contraire qui sont rentrés dans leurs foyers n'ont rien eu ; ils ont dû chercher eux-mêmes les moyens de pourvoir à leur existence. Et ceux la, vous les excluez.

Je dis, messieurs, que si vous étendez le système, il faut l'étendre généralement et il faut dire à la partie de la nation qui n'a pas pris part a la révolution de 1830 : Vous payerez l'autre. Mais il est à craindre qu'en étendant ainsi la mesure, on ne finisse par arriver à un système absurde.

Quant à moi, je ne pourrais accueillir toutes ces réclamations que l'on nous adresse, et qui cependant trouvent, dans cette enceinte, d'honorables représentants pour les appuyer.

M. de Perceval. - Je vais avoir l'honneur de résumer dans un nouvel amendement les considérations que j'ai déjà fait valoir lors de la première discussion du projet de loi. Je ne reviendrai pas sur les arguments qui ont été présentés avec beaucoup de civisme par l'honorable M. Rogier. Cela ne pourrait que prolonger bien inutilement le débat. Du reste, pour des propositions de cette nature, on est, en principe, pour ou contre. Je ferai seulement observer à l'honorable M. de Renesse que lorsqu'il s'agit des patriotes qui se sont dévoués en 1830 pour fonder notre nationalité et nous donner les belles institutions dont nous sommes si fiers, nous ne devons pas lésiner.

Je demande donc que le bénéfice de la loi soit acquis à ceux qui ont quitté le service militaire pour entrer dans l'administration civile après les quatre derniers mois de 1830.

Je soutiens que s'il y a une exception à faire, elle devrait être faite plutôt en faveur des patriotes de 1830, qui, après les quatre premiers mois de l'année de notre révolution, ont volontairement quitté la carrière militaire pour entrer dans la carrière administrative.

L'amendement que j'ai l'honneur de déposer sur le bureau est conçu en ces termes :

« Par extension à l'article 35 de la loi du 24 mai 1838, il sera compté dix années de service aux citoyens qui, en qualité de volontaires, ont pris part aux combats de la révolution ou au service militaire dans les quatre derniers mois de 1830. »

Viendrait ensuite l'amendement de l'honorable M. d'Anethan, déjà adopté par le Sénat, et qui consiste à étendre le bénéfice de la loi aux décorés de la croix de Fer.

(page 1058) Comme conséquence de mon amendement à l'article premier, le mot « officiers », aux articles 2 et 3, est remplacé par le mot « citoyens ».

Messieurs, je termine par cette seule considération, c'est que les hommes qui ont combattu en 1830 pour créer l'ordre de choses sous lequel nous avons le bonheur de vivre depuis un quart de siècle, ont droit aux sympathies publiques, à la sollicitude de la Chambre et à la gratitude du pays.

M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Messieurs, j'aurai l'honneur de faire remarquer à la Chambre que l'idée qui a présidé à la présentation du projet de loi dont nous nous occupons, a été simplement celle d'étendre jusqu'à dix années le terme d'une année qui avait été fixé par l'article 34 ou 35 de la loi de 1836, relative aux pensions militaires. Dans cette loi, qui a été longuement élaborée par la législature, il avait été reconnu, à bon droit probablement puisque la Chambre l’a décidé, qu'une faveur spéciale devait être accordée aux officiers qui avaient servi pendant les quatre derniers mois de 1830.

La situation de ces volontaires qui avaient possédé des grades élevés et qui ne pouvaient atteindre le terme ordinaire de la carrière tel qu'il est fixé par la loi des pensions, avait ému la Chambre à plusieurs reprises, et c'est de là qu'est venue la pensée d'améliorer cette position.

Le projet présenté, il est arrivé, messieurs, ce qui arrive toujours en pareille circonstance. Les prétendants se sont accrus tous les jours. Plusieurs membres de la Chambre, cédant à des dispositions bienveillantes, ont soumis des amendements.

Le gouvernement a cru devoir rester dans les bornes du projet primitif, parce que de ce projet seul il pouvait apprécier les bases et les conséquences. Le ministre de la guerre a eu l'honneur de soumettre à différentes reprises, tant à la Chambre qu'au Sénat, les considérations qui militent en faveur du maintien pur et simple du projet de loi, au point de vue financier surtout. Ces considérations ont pu être appréciées par vous.

Maintenant un nouvel amendement surgit. Le gouvernement vous ayant éclairés autant qu'il dépendait de lui sur la véritable situation des choses, ne croit pas devoir intervertir les rôles ; et après avoir conçu la pensée de donner suite aux idées généreuses qui pendant vingt-cinq ans se sont toujours résumées en démonstrations sans résultat, après avoir pris la résolution de traduire en fait ce qui ne s'était produit qu'en paroles, le gouvernement ne veut ni combattre l'amendement, ni sortir du cercle qu'il a dû se tracer. Il croit donc devoir attendre, avec déférence, ce que la Chambre jugera convenable de décider.

M. de Mérode, rapporteur. - Messieurs, la proposition partielle qu'on vous fait n'aura pas pour effet d'accorder une récompense à tous ceux qui peuvent y prétendre eu égard aux services qu'ils ont rendus dans le commencement de la révolution.

Après la révolution, beaucoup de combattants ont demandé des places du gouvernement. Un grand nombre en ont obtenu ; mais tous n'en ont pas obtenu, et je tiens une pétition de volontaires qui demandent, non sans raison, que si l'on étend la faveur du projet de loi aux personnes occupant des positions civiles, elle soit également accordée à tous les combattants de 1830 ayant suffisamment justifié de leurs droits.

Ayant été nommé rapporteur de la section centrale, je me suis trouvé en contact avec différentes personnes qui prétendaient participer à la proposition faite par M. le ministre de la guerre ; et si l'on ne se tient au haut de l'échelle de ces prétendants, vous êtes obligés de descendre jusqu'au dernier degré, car il n'y a pas de raison pour s'arrêter.

La proposition qui a été faite par M. le ministre de la guerre est sans doute motivée par ceci : c'est que les officiers ne peuvent pas servir au-delà de l'âge de 55 ans. Cette mesure a été prise dans l'intérêt de l'armée, dans l'intérêt de la défense du pays. J'ai pris des informations auprès d'hommes compétents, qui appartiennent encore à d'autres armées que la nôtre, ei j'ai acquis la conviction, qu'après 55 ans, la généralité des officiers ne peuvent plus continuer avantageusement leur service. Il n'en est pas de même des emplois civils, et remarquez, messieurs, que ceux qui veulent échanger un emploi militaire contre un emploi civil sont très nombreux.

Il y a par exemple cette circonstance que dans l'armée il existe des obstacles au mariage ; un officier ne peut se marier qu'avec une personne qui possède une fortune déterminée. C'est que le traitement des officiers est tel, qu'ils doivent l'absorber à peu près tout entier pour suffire à leurs propres besoins, et le gouvernement ne peut pas permettre qu'un officier ne satisfasse pas aux exigences du service en ce qui concerne leur uniforme et leur manière de vivre. Il y a là, messieurs, des raisons pour accorder les dix années proposées par M. le ministre de la guerre ; mais si l'on sort de cet ordre d'idées, il n'est plus possible de ne pas faire droit à ce que demande cette pétition-ci : c'est qu'une pension soit accordée à tous les volontaires combattants de la révolution. Tout intermédiaire entre cette proposition et celle de M. le ministre de la guerre ne ferait que consacrer une faveur qui ne serait pas motivée.

Ce que propose l'honorable M. de Perceval ne satisfait pas aux exigences d'une récompense nationale. Il faudrait comprendre dans la mesure tous ceux qui ont combattu pour la révolution et surtout ceux qui n'ont pas d'emploi. En effet ceux qui ont un emploi ont déjà obtenu une faveur, car chaque fois qu'une place est vacante, il y a 30, 40 ou 50 demandés ; ils ont donc obtenu une faveur, ils ont joui de leur traitement et ils jouissent encore d'une pension, voilà ce que disent ceux qui n'ont obtenu ni emploi ni pension. C'est le langage qui m'a été tenu par plusieurs d'entre eux et je vous avoue, messieurs, que je n'ai rien eu à répondre.

Je le répète, messieurs, si vous sortez du projet de M. le ministre de la guerre il faut étendre les bienfaits de la loi à tous les volontaires qui ont combattu pour la révolution.

M. de Perceval. - Messieurs, la position que vient de prendre l'honorable rapporteur m'étonne et m'afflige. Elle m’étonne parce que l'honorable comte de Mérode s'efforce de mettre en doute les services rendus par les volontaires de 1830. Elle m'afflige parce que, en sa qualité d'ancien membre du gouvernement provisoire, il doit se rappeler parfaitement ces services ; car, plus et mieux que personne, il a pu les constater. Nous traversions alors des moments très difficiles, et je vous le demande, je le demande à l'honorable comte lui-même, que serait devenu le gouvernement provisoire sans le dévouement absolu, énergique de ces hommes auxquels on veut maintenant refuser les bénéfices de la loi.

On devrait être unanime, au contraire, pour appliquer le bénéfice de cette loi à tous ceux qui pendant les quatre derniers mois de 1830 se sont sacrifiés, ont quitté leurs positions pour nous aider à conquérir notre indépendance et nos libertés.

Eh quoi ! la Chambre a été généreuse quand il s'est agi de quatorze officiers polonais ; elle a voté pour leur mise à la retraite plus de 41,000 francs.

Et maintenant qu'il s'agit des enfants du pays, de ceux qui ont versé leur sang pour créer l'ordre de choses actuel, de ceux qui nous ont donné une patrie, une nationalité, la liberté, l'on voudrait s'arrêter à une catégorie de braves et exclure une autre classe de citoyens qui a également des droits incontestables à notre sollicitude et à la reconnaissance nationale serait abandonnée ! Non, cela n'est pas admissible !

Il faut récompenser tous ceux qui ont combattu pendant les quatre premiers mois de notre glorieuse révolution. La justice le veut, l'équité l'exige et nous ne pouvons avoir deux poids et deux mesures.

Ce n'est ni une question de nombre ni une question d'argent qui doit arrêter la Chambre. Soyez conséquents, et puisque vous avez voté tout récemment une dotation au sujet de laquelle tout le monde n'était pas d'accord, soyons maintenant d'une opinion unanime pour achever notre œuvre, et dotons aussi quelque peu les citoyens patriotes, les pères de la patrie auxquels nous devous le bienfait d'être une nation indépendante et libre.

M. de Mérode. - Je suis au regret que l'honorable M. de Perceval ait fait semblant de ne pas me comprendre.

J'ai dit que si l'on sortait de la proposition de M. le ministre de la guerre, il fallait nécessairement aller au-delà de ce que propose M. de Perceval, sous peine d'être souverainement injuste. J'ai dit que si vous étendez la mesure aux employés civils, vous devez, à plus forte raison, faire quelque chose pour ceux qui, après avoir rendu des services en 1830, n'ont obtenu ni emploi ni pension.

Eh bien, vous ne proposez rien de semblable ; vous restez arbitrairement à moitié chemin, au quart du chemin. C'est ce que je ne veux pas. Je voudrais voter d'abord la proposition du ministre ; nous verrions ensuite s'il y a lieu d'aller plus loin, et en ce cas je voudrais une proposition complète, une proposition qui tînt compte de tous les droits.

Voilà, messieurs, mon opinion, et je m'embarrasse fort peu du défaut de patriotisme que M. de Perceval me reproche. Je suis aussi ancien patriote que l'honorable membre. J'ai eu mon frère blessé à Berchrm en combattant pour l'indépendance du pays. M. de Perceval peut donc parler de mon patriotisme sans que ses reproches me touchent, mais il ferait beaucoup mieux de ne pas torturer mes explications.

M. Deliége. - Messieurs, nous sommes tous animés de sentiments de sympathie à l'égard de ceux qui ont combattu pour notre révolution ; je conçois qu'on puisse proposer à la Chambre des pensions civiques en leur faveur ; mais en les proposant, n'oublions pas que nous devons les faire payer par le peuple qui souffre en ce moment, qui a des contributions à payer, contributions que nous augmentons tous les jours. En huit années de temps, nous avons voté le droit sur les successions, nous avons augmenté le droit sur le tabac, le droit sur les distilleries, le droit sur les bières ; il y a quelques jours à peine, nous avons encore augmenté le droit sur les sucres, et demain nous aurons à couvrir un déficit de 30 millions dans le trésor. Voilà la situation où nous nous trouvons.

Oh ! oui, nous avons fait une glorieuse révolution ; mais qui dit qu'un jour, si nous suivons la ligne de conduite dans laquelle nous sommes engagés nous ne mettions notre nationalité en péril à cause de nos embarras financiers ?

On vient de parler des Polonais, mais leur situation était très différente ; qu'avons-nous fait à l'égard des Polonais ?

Ils sont arrivés en Belgique au moment du péril, au moment où beaucoup d'officiers belges étaient retenus en Hollande, au moment où ils pouvaient rendre de grands services pour la défense du territoire ; c'étaient de braves officiers, fort instruits, plusieurs d'entre eux avaient étudié pendant beaucoup d'années à l'école militaire établie en Pologne.

Eh bien, qu'avons-nous fait ? Nous avons brisé leur épée, nous leur avons dit : « Allez vous-en, vous êtes hors de la loi ; la loi assure à chaque officier son grade, et vous perdrez votre grade. »

Une situation pareille est bien différente de la situation des honorables (page 1059) citoyens pour qui l'on propose une augmentation de pension ; on perd tout à fait de vue le principe du projet de loi.

Les officiers qui sont dans les rangs de l'armée et qui ont obtenu des grades lors de la révolution, on les renvoie à l'âge de 55 ans ?, pourquoi ? Parce qu'ils n'ont point passé par l'école, parce qu'ils n'ont pas fait une étude approfondie de l'art militaire. Ceux-là, évidemment, comme l'a dit M. le ministre de la guerre, sont dans une situation qui doit être prise en considération. Quant aux autres, n'oublions pas qu'il y a dans l'industrie, dans le commerce et dans d'autres carrières encore, de braves gens qui travaillent jusqu'à l'âge de 70 à 80 ans ; à ceux-là on n'accorde pas de pension ; ils rendent cependant aussi des services.

Je crois que, vu la situation actuelle des finances de l'Etat, vous ne pouvez pas frapper constamment sur le trésor public et en faire sortir l'argent que vous empruntez.

M. de Renesse. - Très bien !

M. Lelièvre. - L'amendement de M. de Perceval me paraît fondé sur des motifs sérieux. En effet, je ne vois pas pourquoi on ferait une distinction entre les officiers et les fonctionnaires civils qui ont rendu les mêmes services. Nous nous occupons d'une loi de pension à laquelle ont droit les fonctionnaires civils non moins que les militaires. Eh bien, je le demande, y a-t-il une différence de position qui justifie des dispositions différentes, quant à la pension ?

Les volontaires qui ne sont entrés ni dans l'armée, ni dans l'administration civile n'ont pas droit à la pension. Il ne s'agit donc pas d'introduire des dispositions favorables en ce qui concerne le règlement de leur pension ; mais relativement aux fonctionnaires civils, la question est entièrement différente.

Ces individus ont rendu les mêmes services que nous voulons rémunérer. Dès lors la justice exige qu'ils soient traités sur le même pied, quant aux conditions de la pension. Il y a identité de services rendus, il doit y avoir identité de position.

En ce qui concerne l'hypothèse dont s'occupe l'honorable comte de Mérode, elle n'a aucun rapport au débat actuel.

En effet, des individus qui n'ont pas droit à la pension ne peuvent se plaindre de ne pas être compris dans une mesure qui doit rester étrangère à tous ceux qui ne sont pas devenus fonctionnaires publics, civils ou militaires. Les volontaires qui ne se trouvent pas dans cette catégorie n'ont pas la position favorable énoncée à l'amendement de notre honorable collègue.

J'estime donc que le projet, pour être équitable et juste envers tous, doit sanctionner la disposition proposée.

M. Rogier. - Messieurs, en prenant tout à l'heure la parole en faveur d'une certaine catégorie de fonctionnaires, je n'ai pas fait de grandes phrases à l'adresse des hommes de la révolution ; j'ai invoqué tout simplement un principe de justice et d'équité ; je n'ai pas plus fait de grandes phrases en faveur des combattants de la révolution qu'en faveur du trésor qu'on nous représente comme fortement ébranlé si l'on adoptait la proposition.

Nous nous bornons à défendre un principe de justice ; nous n'avons pas pris l'initiative du projet de loi ; c'est le gouvernement qui est venu proposer à la Chambre de compter dix années de service supplémentaires aux volontaires de 1830 qui ont pris du service dans l'armée ; nous demandons que cette faveur soit étendue aux volontaires qui ont pris du service dans l'administration civile. Qu'y a-t-il de plus juste que cette assimilation ?

J'ai dit qu'il y a une classe de volontaires qui sont les plus dignes peut-être d'intérêt. Ce sont ceux qui, après avoir pris part aux combats de la révolution, sont rentrés chez eux et n'ont rien demandé ; mais ils ne se trouvent pas dans la catégorie de ceux que la loi a pour but de rémunérer. Cette loi ne s'applique qu'aux fonctionnaires de l'ordre militaire ; à côté de ceux-ci il y a des fonctionnaires de l'ordre civil qu'on peut et qu'on doit leur assimiler ; il y a des volontaires qui, dans les premiers mois de la révolution, ont servi comme officiers, sous-officiers ou soldats, et qui depuis sont entrés dans l'administration civile et notamment dans le service de la douane, service tout aussi fatigant, aussi pénible, aussi périlleux que peut l'être le service militaire. Pourquoi les uns seraient-ils exclus d'une faveur qu'on accorde aux autres ? Pourquoi seraient-ils traités autrement ?

On dit que dans l'armée il y a cette circonstance particulière, que les officiers doivent être mis à la pension à l'âge de 55 ans. Eh bien, dans l'administration civile, que se passe-t-il ? A l'âge de 55 ans, ou bien le fonctionnaire civil est encore en état de servir, et dès lors il ne demandera pas sa pension ; il attendra qu'il ait atteint le nombre d'années de service exigées par la loi ; ou il n'est plus en état d'en rendre, comme cela peut très bien arriver dans le service de la douane ; et, dans ce cas, je demande à M. le ministre des finances s'il n'est pas d'une stricte équité d'appliquer aux employés de cette catégorie la même mesure qu'aux fonctionnaires de l'armée.

J'en dirai autant d'autres combattants de 1830 entrés dans le service du chemin de fer ; ce service est aussi actif, aussi fatigant et parfois aussi périlleux que celui de l'armée ; où sont dès lors les raisons d'un traitement moins favorable ?

J'ajoute en faveur des fonctionnaires de l'ordre civil que leur traitement, en vue de leur pension, est soumis à la retenue d'un p. c. que ne subissent pas les fonctionnaires militaires.

Messieurs, je serais désolé de paraître venir ici, au nom d'un patriotisme de mauvais aloi, tirer à boulets rouges sur le trésor public ; je ne suis pas plus soucieux qu'un honorable préopinant dée aire des brèches au trésor.

Ce n'est pas nous, je le répèle, qui avons proposé la loi ; mais, la loi une fois proposée, je pense que l'équité exige que nous traitions de la même manière les citoyens qui ont fait acte de courage et de dévouement en 1830, qui sont entrés dans l'administration civile, qui y ont rendu et y rendent encore des services ; que nous les traitions, dis-je, de la même manière que les volontaires qui sont entrés dans l'armée. Si la loi n'a pas ce caractère, elle consacrera une injustice, et non seulement le but louable, je Je reconnais, qu'on a voulu atteindre, sera manqué : mais l'impression que cette loi produira dans l'opinion ne peut être que mauvaise.

Je persiste donc à demander l'adoption, sauf rédaction, de l'amendement des honorables M. Thiéfry et de Perceval.

Voici, en un mot, notre pensée : « Il sera compté également 10 années de services aux volontaires qui remplissant les conditions exprimées à l'article premier, sont entrés dans l'administration civile. »

Cette disposition profitera aux fonctionnaires civils qui ne peuvent plus rendre de services et qui cependant n'ont pas encore atteint l'âge requis par la loi pour la liquidation de la pension. Les officiers sont mis à la retraite, à l'âge de 55 ans, parce qu'ils sont présumés ne pouvoir plus rendre de services ; de leur côté, la plupart des volontaires de 1830, qui sont entrés dans le service de la douane ou du chemin de fer, n'ont plus, à l'âge de 55 ans, la force nécessaire pour continuer à remplir leurs fonctions ; mais ils n'ont pas, dans l'état actuel de la législation, l'âge voulu pour l'obtention de la pension ; eh bien, nous demandons que vous les placiez dans la même position que les militaire, qui sont présumés ne plus pouvoir rendre de service à l'âge de 55 ans.

Si les fonctionnaires civils, arrivés à 55 ans, ont encore assez de force pour servir, ils ne réclameront pas la pension. Ils ne demandent pas mieux que de jouir de la totalité de leur traitement jusqu'à l'époque légale de leur mise à la pension. Il n'y a donc pas de danger à ce qu'on fasse abus de la loi. Mais il y aurait un grand inconvénient à ce que certains fonctionnaires qui, après avoir servi pendant 25 ans, seraient obligés d'abandonner leur service, ne fussent pas traités aussi favorablement que les autres.

J'insiste pour que la mesure soit équitablement appliquée, pour qu'elle ne consacre pas de privilège.

M. Delfosse. - Avant de me prononcer sur l'amendement, je voudrais savoir quelle en est la portée et quelles en seraient les conséquences. Je voudrais savoir surtout si nous ne devrions pas, pour être justes, ajouter d'autres extensions à celle qui nous est proposée. Il y a du danger à adopter de tels amendements sans un examen réfléchi.

Je demande donc le renvoi à la section centrale. S'il n'était pas adopté, je devrais m'abstenir.

M. Osy. - Pour ma part, je ne m'oppose pas au renvoi de l'amendement de M. de Perceval à la section centrale. J'avais même demandé la parole pour faire cette proposition.

Il faut cependant bien considérer que le projet de loi est présenté par le gouvernement, mais par suite de réclamations instantes et réitérées. Par plusieurs pétitions, on a provoqué le gouvernement à présenter le projet de loi. Le premier projet a été adopté à l'unanimité par la Chambre. Le Sénat y a ajouté une autre catégorie, et la section centrale vons propose d'adopter cet amendement. Mais vous voyez où nous allons. Plus nous discuterons la loi, plus elle s'élargira ; plus le trésor souffrira.

La proposition de l’honorable M. de Perceval me paraît tout ce qu'il y a de plus injuste. On parle de donner aux anciens volontaires qui ont obtenu des emplois civils dix ans de plus qu'aux autres fonctionnaires. Mais considérez que c'est déjà une très grande faveur pour les anciens volontaires d'avoir obtenu des places si facilement.

Le comité vous demande une récompense civile pour tous les volontaires qui ont pris les armes dans les quatre derniers mois de 1830. Il y en a beaucoup qui ne sont ni fonctionnaires civils, ni militaires. Il faudrait également leur accorder des pensions. Il y en a 250 dans cette catégorie.

Vous voyez que si vous adoptez l'amendement de M. de Perceval, il reviendra au Sénat. La loi s'élargira. Je crois que le plus prudent est de nous arrêter. Les volontaires qui ont obtenu des emplois civils sont récompensés comme les autres, peut-être mieux que les militaires, puisqu'ils restent plus longtemps au service que les militaires.

Je crois que nous devons nous arrêter à l'amendement du Sénat.

Nous donnons dix ans de grade pour la pension aux anciens officiers et aux fonctionnaires civils. Il faut nous arrêter là.

M. le ministre des finances (M. Mercier). - Si l'amendement est maintenu, j'appuie la motion qu'on a faite de le renvoyer à l'examen de la section centrale. Cela me paraît indispensable. Ou ne peut improviser un amendement de cette importance.

Je ferai remarquer que c'est à tort qu'on prétend que le projet de loi n'a rien fait pour les fonctionnaires civils qui ont combattu en 1830. L'article 2 concerne les officiers de la même catégorie que ceux dont il est question à l'article premier et qui sont entrés dans l'administration civile.

Vous savez, messieurs, que la loi sur les pensions civiles ne permet pas de compter aux fonctionnaires les années de campagne. Or, (page 1060) l’article 2 leur attribue le bénéfice de ces années, et même une année de plus leur est comptée, sur ma proposition, pour les combats de 1830.

Il a donc été tenu compte des services rendus par les employés civils qui ont servi comme officiers.

Il est impossible qu'on délibère mûrement sur un amendement dont on ne connaît pas la portée ; on ne peut apprécier quelles en seraient les conséquences financières.

Comme l'a fait remarquer l'honorable M. Osy, il arrivera, si l'on persiste à présenter des amendements, que ceux, mêmes à l'égard desquels il n'existe aucune contestation, ne jouiront pas encore cette année des avantages qui sont déjà votés en leur faveur par les deux Chambres ; nous ne pourrons probablement voter la loi, ainsi compliquée, avant la fin de la session.

D'un autre côté, des objections d'une nature sérieuse ont été présentées. Je connais des volontaires qui sont rentrés chez eux après les combats de la révolution, et dont la position est loin d'être aisée. J'en connais qui sont rentrés dans leurs foyers après avoir servi pendant quelques années seulement. Ils n'ont pu avoir de pension ni comme soldats, ni comme sous-officiers ; que fera-t-on à leur égard ?

Pour agir avec une justice complète envers les personnes qui ont pris part aux combats de 1830, ou qui ont posé pendant cette période des actes de courage et de dévouement bien constatés, il faudrait nécessairement une loi spéciale ; en effet, du moment qu'on sort du cadre dans lequel le gouvernement a cru devoir se renfermer, on est entraîné à rendre la mesure générale ; les distinctions ne reposent plus que sur des subtilités.

En tous cas, j'insiste pour le renvoi de l'amendement à la section centrale.

M. le ministre de la guerre (M. Greindl). - Je voulais dire à peu près ce que vient de dire mon honorable collègue.

Je voulais dire que le principe de l'amendement étant accepté, cet amendement devrait être soumis à une nouvelle étude, et qu'il n'est pas probable qu'il soit possible de donner avant la fin de la session les renseignements nécessaires.

Ce serait donc renvoyer à une époque indéterminée la récompense qu'on voulait accorder aux anciens volontaires.

Il serait peut-être plus utile de faire de l'amendement une proposition spéciale, et d'en renvoyer l'examen à une session ultérieure.

M. de Perceval. - Je suis loin de combattre le renvoi à la section centrale proposé parl'honorable M. Delfosse. Je l'appuie, au contraire.

Je crois, avec M. le ministre des finances, que mon amendement renverse le mécanisme du projet de loi actuel, qu'il y introduit de notables modifications, et qu'il y a lieu d'en connaître, je le veux bien, les conséquences financières. Ce travail, auquel la section centrale devra se livrer, ne saurait amener une grande perte de temps ; il peut se faire dans un bref délai, car les départements ministériels doivent en renfermer les éléments constitutifs. Ainsi, la conséqueuce de ce renvoi ne saurait entraîner l'ajournement de la loi à la prochaine session. Elle pourra très facilement être discutée et votée dans le courant de la session actuelle. Nous ne sommes pas à la veille de nous séparer. La Chambre restera très probablement réunie jusqu'au 15 mai. D'ici là, j'ai la ferme conviction que la législature aura posé l'acte de patriotisme que nous réclamons de l'esprit de justice distributive qui ne doit jamais cesser de l'animer et de la guider dans sa conduite.

Maintenant, en réponse aux observations de l'honorable M. Osy, je dois faire remarquer que la loi que nous allons voter d'une manière définitive est une loi de pension. Cette seule considération fait tomber toutes ses critiques.

La rédaction de mon amendement a été l'objet de quelques observations. Je crois y faire droit en me servant des termes suivants :

Je divise l'article premier du projet de loi en deux paragraphes. Le premier serait rédigé comme il l'est au projet, le second paragraphe serait conçu comme suit :

« Il sera également compté dix années de services aux volontaires qui, remplissant les mêmes conditions, sont entrés dans l'administration civile. »

Ce texte est clair et fait disparaître tous les doutes.

M. de Mérode. - Je veux faire une dernière observation, c'est que le projet sera forcément ajourné, si on ne l'adopte pas tel qu'il nous a été renvoyé par le Sénat, parce que si votre proposition passe, le projet devra être renvoyé au Sénat où un amendement nouveau ne manquera pas de surgir ; il sera impossible de l'éviter ; d'amendement en amendement on ira jusqu'au dernier degré de l'échelle et vous aurez ajourné l'avantage que M. le ministre de la guerre a voulu procurer aux officiers qui, mis à la retraite à l'âge de 55 ans, n'ont pu obtenir qu'une minime pension.

Remarquez que les employés civils ont la liberté de leur personne et ne sont pas, comme les militaires obligés de demander d'autorisation pour se marier.

M. Rodenbach. - Les douaniers ne peuvent pas non plus se marier sans autorisation.

M. de Mérode. - Nous ne parlons pas des douaniers.

M. de Perceval. - Mais si ! mais si !

M. de Mérode. - S'ils sont compris dans l'amendement, il est d'autres volontaires qui n'ont pas été douaniers et qui ont tout autant de droit à solliciter une faveur du gouvernement que ceux qui ont obtenu un emploi civil quelconque. Sauf les douaniers, tous les employés civils peuvent se marier ; si vous voulez faire quelque chose de raisonnable, adoptez le projet tel qu'il vous est revenu du Sénat ; vou -adopterez ensuite tel projet que vous voudrez ; de cette manière vous ne nuirez pas aux officiers dans l'intérêt desquels le projet de loi a été présenté. Si vous n'agissez pas ainsi, votre loi sera comme un volant qui va constamment d'une raquette à l'autre et vous arriverez à un ajournement indéfini.

M. Lelièvre. - Je crains que le renvoi de l'amendement à la section centrale n'ait pour conséquence de faire renvoyer le projet à une prochaine session. En effet, l'examen peut amener des retards qui ne permettent pas à la Chambre d'émettre un vote définitif. Je pense que nous ferions sagement de voter le projet tel qu'il a été amendé par le Sénat. M. de Perceval pourrait déposer immédiatement un projet de loi spécial énonçant la disposition de son amendement, et je serais heureux de lui donner mon assentiment.

M. Manilius. - Nous ne devons avoir aucune inquiétude quant à l'ajournement qui pourrait résulter du renvoi de l'amendement de M. de Perceval à la section centrale, car la loi dont nous nous occupons ne touche que des personnes qui déjà ont été mises à la pension. S'il s'agissait de l'appliquer à des pensions à liquider dans quinze jours ou un mois, je comprendrais qu'on trouvât des inconvénients à ce que son vote fût retardé ; mais elle doit recevoir une application rétroactive ; quand même elle ne serait adoptée qu'à la session prochaine, cela importe peu ; le grand nombre de personnes qui doivent jouir de la munificence qu'elle a pour objet sont pensionnées ; que la loi soit adoptée maintenant ou au mois de novembre prochain, c'est la même chose ; ces personnes sont assurées d'avoir ce qu'on est dès à présent d'avis de leur accorder ; mais en procédant ainsi, la Chambre ne s'exposera pas. à manquer d'équité envers des citoyens qui ont le même droit que ceux qui ont été compris dans le premier vote. Je me rallie à la proposition de M. Delfosse, sans préjuger si l'ajournement sera plus ou moins long, car la section centrale pourra nous faire un prompt rapport.

- Le renvoi à la section centrale est mis aux voix et adopté.

La séance est levée à quatre heures.