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Chambres des représentants de Belgique
Séance du vendredi 29 juin 1849

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1848-1849)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 1723) M. A. Vandenpeereboom procède à l'appel nominal à midi et un quart.

- La séance est ouverte.

M. T'Kint de Naeyer donne lecture du procès-verbal de la dernière séance; la rédaction en est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. A. Vandenpeereboom présente l'analyse des pièces adressées à la chambre.

« Le sieur Carton de Villerot, lieutenant-colonel pensionné, demande une récompense pour les services qu'il a rendus à la cause de l'indépendance nationale. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Les élèves de l'université de Liège prient la chambre de maintenir le jury central d'examen. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur l'enseignement supérieur.


Par dépêche du 27 juin, M. le ministre de l'intérieur transmet à la chambre 110 exemplaires d'un mémoire de M. l'ingénieur des mines Bidaut, sur un projet ayant pour but de fertiliser une partie des bruyères de la Campine, au moyen des eaux de l'Escaut. »

- Distribution aux membres de la chambre et dépôt à la bibliothèque.


M. Delehaye demande un congé pour affaires administratives.

- Accordé.


MM. Debourdeaud'huy et Tremouroux demandent un congé pour motif de santé.

- Accordé.

Projet de loi qui modifie la loi du 27 septembre 1835, sur l'enseignement supérieur

Discussion générale

Titre III. Des grades des jurys d'examen et des droits qui sont attachés aux grades

Chapitre I. Des grades et des jurys d'examen
Article 46

M. le président. - La discussion a été close hier sur l'article 46 et les amendements qui s'y rapportent.

Ces amendements sont au nombre de trois :

M. Moncheur demande qu'on ajoute l'économie politique aux matières de l'examen de docteur en philosophie et lettres.

La section centrale propose d'ajouter à ces matières le droit constitutionnel belge.

M. Devaux demande que le droit constitutionnel belge n'y soit pas compris.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me suis rallié à la proposition de la section centrale qui comprenait le droit constitutionnel belge; mais en me ralliant, d'ailleurs, à tout l'article, j'avais déclaré aussi que j'attendais les explications de la section centrale. Voilà comment il faut entendre ce qui s'est passé hier.

- L'amendement de M. Moncheur est mis aux voix et n'est pas adopté.

L'amendement de la section centrale est mis aux voix et n'est pas adopté, après une double épreuve ; ce qui équivaut à l'adoption de l'amendement de M. Devaux.

- L'ensemble de l'article 46 est adopté.

Article 47

« Art. 47 (projet du gouvernement). L'article 47 est remplacé par ce qui suit :

« L’examen pour la candidature en sciences naturelles est de deux sortes :

« le récipiendaire se destine à la médecine, l'examen comprend :

« La chimie inorganique ou organique; la physique expérimentale, les éléments de botanique et la physiologie des plantes, les éléments de zoologie.

« Si le récipiendaire se destine à l'étude des sciences naturelles, l'examen comprend :

« la minéralogie; la botanique et la physiologie des plantes; la zoologie, la physique expérimentale ; la chimie organique et inorganique.

« L'examen pour la candidature en sciences physiques et mathématiques comprend :

« La géométrie analytique complète; la géométrie descriptive ; le calcul différentiel et le calcul intégral jusqu'aux quadratures inclusivement; la physique expérimentale; la haute algèbre; la statique élémentaire; la chimie inorganique; la minéralogie.

« Nul n'est admis à l'examen de candidat en sciences s'il n'a subi devant le jury de philosophie, une épreuve préparatoire sur la philosophie (logique, anthropologie et philosophie morale).

« Art. 47 (projet de la section centrale). L'article 47 est remplacé par ce qui suit :

« L'examen pour la candidature en sciences naturelles comprend :

« Les éléments de chimie inorganique et organique; la physique expérimentale, les éléments de botanique et la physiologie des plantes, les éléments de zoologie et de minéralogie.

« L'examen pour la candidature en sciences physiques et mathématiques comprend :

« La géométrie analytique complète; la géométrie descriptive; le calcul différentiel et le calcul intégral jusqu'aux quadratures inclusivement; la physique expérimentale; la haute algèbre; la statique élémentaire ; la chimie inorganique; la minéralogie.

« Nul n'est admis à l'examen de candidat en sciences s'il n'a subi, devant le jury de philosophie, une épreuve préparatoire sur la philosophie (logique, anthropologie et philosophie morale). »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me rallie à la rédaction de la section centrale, sauf qu'à l'avant-dernier paragraphe au lieu de : la chimie inorganique ; la minéralogie, je propose de dire : les éléments de chimie inorganique ; les éléments de minéralogie.

M. Delfosse. - Je crois pouvoir, au nom de la section centrale, me rallier à cette modification.

- L'article 47 du projet de la section centrale, ainsi modifié, est mis aux voix et adopté.

Article 48

« Art. 48 (projet du gouvernement). L'article 48 est remplacé par le suivant :

« L'examen pour le doctorat en sciences comprend :

« 1° Un examen approfondi sur la chimie organique si le récipiendaire se destine aux sciences physiologiques, et sur la chimie inorganique s'il se destine aux sciences géologiques.

« 2° Un examen approfondi sur l'une des trois catégories suivantes, à son choix :

« L'anatomie et la physiologie comparées;

« L'anatomie et la physiologie végétales et la géographie physique; La minéralogie et la géologie;

« 3° L'astronomie physique.

« Les récipiendaires subissent un examen ordinaire sur les deux branches du n° 2 qui ne font point l'objet de l'examen approfondi.

« Le diplôme mentionne les matières qui ont fait l'objet de l'examen approfondi. Le récipiendaire peut, s'il le désire, subir un examen approfondi sur les deux branches de la chimie, il en est fait mention dans le diplôme.

« Art. 48 (projet de la section centrale). L’article 48 est remplacé par le suivant :

« L'examen pour le doctorat en sciences naturelles comprend :

« 1° Un examen approfondi sur la chimie organique, si le récipiendaire se destine aux sciences physiologiques, et sur la chimie inorganique, s'il se destine aux sciences géologiques.

« 2° Un examen approfondi sur l'une des trois catégories suivantes, à son choix :

« L'anatomie et la physiologie comparées;

« L'anatomie et la physiologie végétales et la géographie des plantes ;

« La minéralogie et la géologie ;

« 3° L'astronomie physique.

« 4° Le droit constitutionnel belge.

« Les récipiendaires subissent un examen ordinaire sur les deux branches du n° 2 qui ne font point l'objet de l'examen approfondi.

« Le diplôme mentionne les matières qui ont fait l'objet de l'examen approfondi. Le récipiendaire peut, s'il le désire, subir un examen approfondi sur les deux branches de la chimie ; il en est fait mention dans le diplôme. »

M. Delfosse, rapporteur. - Il n'est plus question du droit constitutionnel belge. La chambre n'en ayant pas voulu pour le doctorat en philosophie ne doit en vouloir ni pour le doctorat en sciences, ni pour le doctorat en médecine.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'adopte la substitution des mots : « la géographie des plantes » aux mots : « la géographie physique », et je propose d'ajouter après ces mots : « les familles naturelles ».

M. Delfosse. - Je me rallie à cette modification.

- L'article ainsi modifié est adopté.

Article 49

(page 1724) « Art. 49. L’article 49 est remplacé par et qui suit :

« L'examen pour le grade de docteur en sciences physiques et mathématiques comprend :

« 1° Un examen approfondi sur l'analyse et la mécanique analytique ;

« 2° Un examen approfondi sur l’une des catégories suivantes, au choix du récipiendaire ;

« La physique mathématique;

« La mécanique céleste; l'astronomie physique; le calcul des probabilités; la chimie organique et inorganique.

« 3° La géologie.

« Les récipiendaires subissent un examen ordinaire sur les deux branches du n°2, qui ne font point l'objet de l'examen approfondi.

Voici la rédaction proposée par la section centrale :

« Art. 49. L’article 49 est remplacé par ce qui suit :

« L'examen pour le grade de docteur en sciences physiques et mathématiques comprend :

« 1° Un examen approfondi sur l'analyse et la mécanique analytique;

« 2° Un examen approfondi sur l'une des catégories suivantes, au choix du récipiendaire :

« La physique mathématique ;

« La mécanique céleste;

« L'astronomie physique ;

« Le calcul des probabilités.

« 3° Le droit constitutionnel belge.

« Les récipiendaires subissent un examen ordinaire sur les catégories du n° 2, qui ne font point l'objet de l'examen approfondi.

« Le diplôme mentionne les matières qui ont fait l'objet de l'examen approfondi.

M. le président. - D'après la résolution prise par la chambre, il faut retrancher de la rédaction de la section centrale, les mots : « le droit constitutionnel belge ».

M. Delfosse, rapporteur. - Oui, M. le président.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me rallie à l'article de la section centrale; seulement je propose de retrancher après le mot « l'astronomie », le mot « physique ». On dirait simplement : l'astronomie, qui comprendrait ainsi l'astronomie physique et l'astronomie mathématique.

M. Delfosse, rapporteur. - Au lieu des mots : « sur les catégories du n°2, qui ne font point, etc., » il faut dire :« sur les matières du n° 2, qui ne font point, etc. » Le mot « matières » doit aussi être substitué au mot « catégories », dans le premier paragraphe du n° 2.

- L'article, ainsi modifiée, est adopté.

Article 50

« Art. 50. L'article 50 est remplacé par le suivant :

« Les examens en médecine et en chirurgie comprennent :

« 1° Celui de candidat.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« L'anatomie humaine (générale et descriptive) ; les démonstrations anatomiques ; la physiologie humaine et la physiologie comparée dans ses rapports avec la première; les éléments d'anatomie comparée; la pharmacologie y compris les éléments de pharmacie.

« 2° Le premier examen pour le doctorat.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« La pathologie générale ;

« La thérapeutique générale, y compris la pharmaco-dynamique ; la pathologie et la thérapeutique spéciale des maladies internes ; l'anatomie pathologique.

« 3°Le deuxième examen de doctorat. Il a lieu sur les matières suivantes :

« La pathologie chirurgicale ; la théorie des accouchements; la pratique des accouchements et des opérations chirurgicales; l'hygiène publique et privée et la médecine légale. »

La section centrale propose un paragraphe 4°, ainsi conçu :

« 4° Le troisième examen de doctorat.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« La clinique interne, la clinique externe, la pratique des accouchements et des opérations chirurgicales. »

La section centrale avait, en outre, proposé d'ajouter le droit constitutionnel belge au nombre des matières du deuxième examen de doctorat. Par suite du vote que la chambre a émis tout à l'heure, cet amendement vient à disparaître.

M. le président. - Le gouvernement se rallie-t-il au paragraphe 4 du projet de la section centrale?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, quant à la création du troisième examen, je m'y rallie; mais j'ai reçu quelques objections contre l'introduction de la clinique interne et de la clinique externe comme objet du troisième examen. L'on craint que cette innovation ne prolonge, outre mesure, l'examen.

L'on objecte qu'il y aurait inégalité dans les examens suivant qu'ils se feraient dans des hôpitaux où il y aurait peu de malades, ou dans des hôpitaux où il y en aurait un grand nombre. Dans les hôpitaux où il n'y a que peu de malades, les sujets étant peu nombreux, les élèves auront moins de peine à répondre que ceux qui seront interrogés dans un hôpital plus nombreux.

Prenons, par exemple, l'hôpital de Louvain et ceux de Bruxelles : l'élève qui doit subir l'examen dans le premier aura pu se préparer plus facilement ; il connaîtra mieux le genre de maladies sur lesquelles il aura à répondre.

On objecte aussi la difficulté pour l'élève d'improviser en quelque sorte des démonstrations. En outre, si ces exercices venaient à se répéter fréquemment, il y aurait pour le malade lui-même une grande gêne et d'assez graves inconvénients.

Je ne conteste pas, du reste, l'utilité de la mesure, si elle pouvait s'exécuter sans les inconvénients que j'ai signalés.

M. Delfosse, rapporteur. - Messieurs, la section centrale s'est décidée à comprendre la clinique interne et la clinique externe au nombre des matières de l'examen du doctorat en médecine, à la suite d'une délibération prise en quelque sorte à l'unanimité par l'Académie de médecine. Ce corps savant a été d'avis, après une discussion approfondie, qu'il est utile, nécessaire même, que celui qui se destine à la médecine subisse un examen sur la clinique interne et sur la clinique externe. L'Académie de médecine a été d'avis que l'on ne peut sans inhumanité livrer les malades à un médecin qui n'aurait pas prouvé, par un examen pratique, qu'il est en état d'apprécier la nature d'une maladie et le traitement qu'il convient d'y appliquer.

Messieurs, il ne s'agit pas d'obliger l'élève à traiter le malade pendant tout le cours de la maladie ; il s'agit seulement de demander à l'élève, au lit du malade, quel est son avis sur la nature de la maladie et sur le traitement à suivre. On peut, dans un examen de deux ou quatre heures, se faire une idée du degré de connaissances pratiques qu'un élève aura retirées de ses études.

M. le ministre de l'intérieur a signalé des inconvénients; mais si ces inconvénients étaient réels, on pourrait aussi s'en prévaloir contre les leçons de clinique. Remarquez, messieurs, que les élèves en médecine accompagnent le professeur au lit du malade; que là, le professeur les interroge sur la nature de la maladie et sur le traitement qu'elle comporte. Toutes les objections faites contre l'examen de clinique interne et externe sont applicables aux leçons de clinique. Dans l'un et dans l'autre cas, le malade sert à l'instruction des élèves.

En France on ne peut devenir docteur en médecine, ni même officier de santé qu'en passant un examen sur la clinique interne et externe. Cet examen est exigé par la loi de ventôse an IX. En France, on n'a pas reculé devant les prétendus inconvénients que M. le ministre de l'intérieur vient d'indiquer, probablement d'après les renseignements qui lui auront été donnés par quelques hommes spéciaux. M. le ministre de l'intérieur et moi nous ne sommes guère compétents sur ces matières. J'invoque l'avis à peu près unanime de l'Académie de médecine et l'exemple de la France. Quelles sont les autorités que M. le ministre de l'intérieur invoque pour contrebalancer l'avis de l'Académie de médecine et l'usage constant suivi en France?

Il est impossible d'admettre à l'exercice de l'art médical celui qui n'a pas prouvé, par un examen pratique, qu'il est en état de comprendre les symptômes d'une maladie et d'appliquer les remèdes convenables.

On m'objectera que le récipiendaire doit fournir la preuve qu'il a suivi les cours de clinique avec succès. Mais vous savez, messieurs, avec quelle facilité se donnent les certificats. Je puis citer mon propre exemple. J’ai obtenu, au sortir de l'université, un certificat constatant que je savais le hollandais. Je n'en savais pas un mot.

Il y a quelque chose qui vaut mieux que les certificats; c'est l'examen au lit de malade. Ce n'est que par cet examen que l'on peut s'assurer de la capacité du médecin. Notre devoir est de ne négliger aucune précaution lorsqu'il s'agit de la santé et de la vie de nos concitoyens.

Mon opinion isolée ne serait pas d'un grand poids dans la balance. Mais l'avis de l'Académie de médecine, conforme à l'usage constamment suivi en France, doit être décisif pour la chambre.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je n'ai pas le moins du monde la prétention d'être plus compétent en ces matières que l'honorable M. Delfosse, organe de l'Académie de médecine. Mais des objections toutes pratiques m'ont été suggérées par des hommes pratiques, par des professeurs.

L'Académie de médecine a perdu de vue la disposition existante qui n'est pas abandonnée et qui oblige les élèves à prouver par des certificats qu'ils ont fréquenté avec assiduité et avec succès des cours de clinique interne et de clinique externe pendant deux ans. Voilà comment l'élève peut acquérir les connaissances et l'expérience nécessaires. Il ne pourrait certes en justifier dans un examen d'une heure au lit du malade. Si vous donniez à l'examen une durée de deux heures, vous mettez le malade à la torture, en présence d'un élève nécessairement très ému et de deux facultés réunies.

On dit que les certificats se donnent avec complaisance. Je conçois qu'un certificat de maître à élève peut se donner avec une certaine facilité. Mais cette complaisance est impossible pour un fait qui a un grand nombre de témoins, comme la fréquentation de cours pendant deux ans. Il est bien difficile que le professeur donne à l'un de ses élèves un certificat de complaisance, alors que l'élève n'aurait pas fréquenté le cours et qu'un grand nombre de témoins pourrait constater son absence.

Ne perdons pas de vue que ce n'est qu'en fréquentant assidûment le cours de clinique que l'élève aura acquis les connaissances nécessaires. Ce n'est pas parce qu'un élève aura été interrogé une heure sur la nature (page 1725) d'une maladie au lit du malade qu'il aura prouvé qu'il est apte à exercer la médecine. L'important, c'est qu'il ait suivi les cours de clinique pendant deux ans, sauf à renforcer s'il y a lieu les mesures administratives pour s'assurer de la fréquentation des cours.

L'Académie de médecine a été mue par d'excellentes raisons, je le reconnais; mais il y en a d’autres pour retrancher cette prescription qui n'existe pas dans la loi actuelle. La loi se contente de la fréquentation assidue pendant deux ans. Je le répète, le but que s'est proposé l'Académie de médecine pourra être atteint en renforçant les mesures propres à assurer la fréquentation des cours de clinique.

M. Delfosse, rapporteur. - M. le ministre de l'intérieur suppose que l'Académie de médecine, en se prononçant pour les examens de clinique, a perdu de vue la disposition de la loi de 1835 qui exige des certificats. C'est une erreur. La discussion a porté sur ce point. On s'est demandé si, outre l'examen pratique, on maintiendrait les certificats, et on a décidé qu'ils seraient maintenus.

M. le ministre de l'intérieur nous dit toujours qu'il y a des inconvénients. Mais, je répète que, s'il y a des inconvénients pour les examens, ils existent aussi pour les leçons de clinique. Les élèves qui suivent ces leçons sont admis à expérimenter sur le malade.

S'il y a des inconvénients, comment ne s'en est-on pas aperçu en France ? Depuis l'an IX, on ne reçoit pas de médecin en France, sans qu'il ait subi un examen sur la clinique interne et sur la clinique externe.

Je puis invoquer, en outre, l'exemple du gouvernement belge : on n'admet aucun médecin dans l'armée belge sans lui avoir fait subir un examen sur la clinique interne et sur la clinique externe. Le gouvernement fait très bien d'avoir de la sollicitude pour la santé du soldat. Mais nous ne devons pas en avoir une moins grande pour la santé de ceux de nos concitoyens qui n'appartiennent pas à l'armée.

- L'amendement de la section centrale, relatif à la clinique interne et à la clinique externe, est mis aux voix et adopté.

L'article de la section centrale, moins les mots « le droit constitutionnel belge », est mis aux voix et adopté.

Article 51

« Art. 51 (projet du gouvernement). L'article 51 est remplacé par ce qui suit ;

« Les examens en droit comprennent :

« 1° Celui de candidat.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« L'économie politique; l'encyclopédie, l'histoire et les institutes du droit romain (examen mis en rapport avec un cours d'un an) ;

« Le droit civil élémentaire (examen mis en rapport avec un cours d'un an);

« Le droit naturel ou la philosophie du droit.

« 2° Le premier examen de docteur.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« Le droit public ;

« L'histoire politique moderne;

« Le droit criminel;

« Les pandectes (examen mis en rapport avec un cours d'un an);

« 3° Le deuxième examen de docteur.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« Le droit civil (examen mis en rapport avec un cours de trois ans);

« La procédure civile.

« A la fin de chaque année académique, le gouvernement, sur l'avis des jurys, détermine la partie des pandectes sur laquelle doit porter l'examen de l'année suivante.

« Le candidat en droit peut obtenir le titre de docteur en sciences publiques et administratives en subissant un examen sur l'histoire politique moderne, le droit public et le droit administratif.

« Le docteur en droit peut obtenir le même titre en subissant un examen oral sur le droit administratif seulement,

« Art. 51 (projet de la section centrale). L'article 51 est remplacé par ce qui suit :

« Les examens en droit comprennent :

« 1° Celui de candidat.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« L'histoire et les institutes du droit romain (examen mis en rapport avec un cours d'un an) ;

« L'encyclopédie du droit, l'introduction historique au cours du droit civil, l'exposé des principes généraux du Code civil;

« Le droit naturel ou la philosophie du droit;

« L'histoire politique moderne.

« 2° Le premier examen de docteur.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« Le droit public;

« Le droit civil (examen mis en rapport avec un cours d'un an) ;

« Le droit criminel ;

« Les pandectes (examen mis en rapport avec un cours d'un an).

« 3° Le deuxième examen de docteur.

« Il a lieu sur les matières suivantes :

« Le droit civil (examen mis en rapport avec un cours de deux ans) ;

« La procédure civile;

« L'économie politique;

« Le droit commercial.

« A la fin de chaque année académique, le gouvernement, sur l'avis des jurys, détermine la partie des pandectes sur laquelle doit porter l’examen l'année suivante.

« Le candidat en droit peut obtenir le titre de docteur en sciences politiques et administratives en subissant un examen sur l'histoire politique moderne, le droit public et le droit administratif.

« Le docteur en droit peut obtenir le même titre en subissant un examen oral sur le droit administratif seulement. »

M. Delfosse. - Il y a une erreur dans l'avant-dernier paragraphe que j'ai indiqué hier, en répondant à M. Moncheur. Au lieu de : « matière politique moderne. » Il faut lire : « économie politique. »

M. Devaux. - Le projet du gouvernement; dans l'énumération des matières pour la candidature du droit, ajoutait après l'encyclopédie du droit et le droit civil élémentaire (l'examen mis en rapport avec un cours d'un an). Je crois qu'il serait utile de mettre la même parenthèse après la rédaction de la section centrale : « L'encyclopédie du droit, l'introduction historique au cours du droit civil, l'exposé des principes généraux du Code civil, » parce que le cours de droit civil élémentaire se fait actuellement en deux ou trois ans ou par deux professeurs en un an, ce qui revient à un cours de deux ans. Cela se pratique ainsi dans une ou plusieurs de nos universités, et ne doit plus continuer. Il faut désormais que le cours de droit du docteur en droit soit terminé en trois ans.

M. Delfosse. - L'article 3 du projet indique qu'il ne s'agit que d'un cours annuel ; la disposition serait, dans tous les cas, ainsi entendue.

- L'article 51 de la section centrale, avec le changement proposé par M. Devaux, est mis aux voix et adopté.

Article 52

« Art. 52. A l'art. 52 est ajouté un second paragraphe ainsi conçu :

« Les jurys, dans les examens en général et particulièrement dans ceux d'histoire, éviteront de poser des questions sur ce qui est d'intérêt secondaire. »

- La section centrale en propose la suppression.

M. le ministre s'y rallie.

Elle est adoptée.

Article 53

« Art. 53 (de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie). L'article 53 est remplacé par le suivant :

« L'examen par écrit précède l'examen oral.

« Autant que possible, il a lieu à la fois entre tous les récipiendaires qui doivent être examinés sur les mêmes matières.

« Il est accordé pour cet examen trois heures au moins et six heures au plus.

« Il y aura au moins un jour franc entre l'examen écrit et l'examen oral. Les élèves sont examinés oralement suivant l'ordre de priorité déterminé par un tirage au sort. »

- Adopté.

Article 55

« Art. 55 (de la section centrale, auquel le gouvernement se rallie). L'article 55 est remplacé par le suivant :

« La durée de l'examen oral est réglée comme suit :

« Examen d'élève universitaire, une heure pour chaque récipiendaire;

« Examen préparatoire à celui de candidat en pharmacie, une heure;

« Candidature en philosophie : pour le récipiendaire se destinant à l'étude du droit, une heure et demie; pour le récipiendaire aspirant au doctorat dans la même faculté, deux heures ;

« Doctorat en philosophie, deux heures ;

« Epreuve préparatoire pour la candidature en sciences, une demi-heure ;

« Candidature en sciences naturelles, une heure ;

« Candidature en sciences physiques et mathématiques, deux heures ;

« Doctoral en sciences naturelles, deux heures;

« Doctorat en sciences physiques et mathématiques, deux heures;

« Candidature en médecine, une heure, non compris l'épreuve pratique;

« Premier examen de docteur en médecine, une heure et demie ;

« Second examen, deux heures ;

« Troisième examen, deux heures au moins et quatre heures au plus ;

« Candidature en droit, une heure;

« Premier examen de docteur en droit, une heure ;

« Second examen, une heure;

« Examen du docteur en sciences politiques et administratives:

« Pour les candidats en droit, une heure;

« Pour les docteurs en droit, une demi-heure;

« Examen de candidat notaire, une heure;

« Examen de candidat en pharmacie, une heure et demie;

« Examen de pharmacien (première partie), une heure et demie.

« Le jury peut se dispenser de procéder à l'examen oral, si l'examen écrit prouve suffisamment qu'il y a lieu de prononcer l'ajournement ou le rejet. »

M. de Theux. - J'ai une explication à demander à M. le ministre de l'intérieur ou au rapporteur. La rédaction de l'article 55 fait supposer que l'examen oral ne portera que sur un récipiendaire à la fois. L’ancienne loi permettait d’en examiner plusieurs et de prolonger l'examen en conséquence; la loi actuelle fixant la même durée à l'examen et ne parlant que d'un récipiendaire, je désire savoir si le jury ne pourra examiner qu'un seul récipiendaire à la fois.

M. Delfosse. - L'article 53, que nous avons voté, répond à la question de l'honorable préopinant. L'examen écrit peut porter à la fois sur tous les récipiendaires de la même catégorie.

(page 1726) M. de Theux. - Je parle de l'examen oral.

M. Delfosse. - Pour l'examen oral, c'est différent. On interroge chaque récipiendaire séparément.

Je dois ajouter que cet article suppose l'adoption d'un amendement que la section centrale propose en ce qui concerne les pharmaciens. M. le ministre de l'intérieur se rallie, je pense, à cet amendement. Le projet primitif n'imposait qu'un examen au pharmacien, le projet de la section centrale en impose deux : « Examen de candidat pharmacien, une heure et demie. »

« Examen de pharmacien (première partie), une heure et demie. »

Il y aura, eu outre, une épreuve préparatoire.

On pourrait toujours voter l'article, sauf à le modifier si la chambre n'adoptait pas la proposition de la section centrale en ce qui concerne les pharmaciens.

- L'article est adopté.

Article 56

« Art. 56. L'article 56 est remplacé par le suivant :

« Tout examen oral est public. Il est annoncé d'avance dans le Moniteur. »

La section centrale propose la suppression de cet article.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me rallie à la suppression.

M. Devaux. - Messieurs, d'après l'ancienne loi quand des changements avaient lieu dans l'ordre des examens, ils devaient être annoncés trois jours d'avance par le Moniteur. Il en résultait que quand les élèves inscrits se retiraient avant l'examen, le jury ne pouvait pas siéger; on ne pouvait changer l'ordre des séries qu'en l'annonçant trois jours à l'avance; le jury perdait son temps, et la durée de la session se prolongeait inutilement. Le gouvernement a demandé que dans ce cas on pût rapprocher les examens, sauf à annoncer le changement un jour d'avance dans le Moniteur. Je crois que cette disposition était bonne, et en la supprimant on maintient l'ancien article de la loi, qui entraînera des pertes de temps. Je ne vois aucun danger à adopter l'article du gouvernement.

M. Delfosse, rapporteur. - Il est, messieurs, plus que jamais nécessaire qu'il y ait trois jours d'intervalle entre l'insertion au Moniteur et l'examen; jusqu'à présent le jury d'examen a siégé à Bruxelles; d'après la nouvelle loi, il se transportera tantôt à Louvain, tantôt à Liège, tantôt à Gand. Si l'examen n'est annoncé qu'un jour d'avance, les intéressés n'en auront pas connaissance à temps; le Moniteur arrivera trop tard au lieu où le jury devra siéger. L'inconvénient auquel on a voulu remédier est très faible : on a voulu empêcher que le jury ne fût exposé à chômer un jour ou deux ; l'inconvénient qui résulte de l'absence de publicité est bien plus grand; il faut que les intéressés soient toujours prévenus à temps. C'est pour ce motif que la section centrale a maintenu la disposition de la loi de 1835.

M. Devaux. - Les intéressés ne sont pas prévenus par la voie du Moniteur ; ils sont prévenus à domicile.

M. Delfosse. - Je sais bien que les élèves sont convoqués, mais il faut que le public puisse assister aux examens et contrôler les opérations du jury. C'est dans ce sens que j'ai parlé des intéressés.

- L'article est supprimé.

Article 57

« Art. 57. A l'article 57 les mots : « il en est donné immédiatement lecture aux récipiendaires et au public » sont supprimés. »

La section centrale propose la suppression de cet article.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me rallie à la suppression.

- L'article est supprimé.

Article 58

« Art. 58. L'article 58 est remplacé par le suivant : La somme provenant des rétributions payes pour l'examen d'élève universitaire est répartie entre les membres du jury dans la proportion du nombre des élèves à l'examen desquels chacun d'eux a assisté. »

La section centrale propose la rédaction suivante :

« Art. 58. L'article 58 est remplacé par le suivant : La somme provenant des rétributions payées pour l'examen d'élève universitaire et pour l'examen préparatoire à celui de candidat en pharmacie, est répartie, entre les membres du jury, dans la proportion du nombre des élèves à l'examen desquels chacun d'eux a assisté. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me rallie à cette rédaction.

- L'article, rédigé comme le propose la section centrale, est adopté.

Article 59

« Art. 59. L'article. 59 est remplacé par le suivant :

« Chaque membre des autres jurys reçoit cinq francs par élève examiné, et vingt francs par jour de séjour ou de voyage, s'il y a lieu à déplacement, sauf réduction proportionnelle si les sommes payées par les récipiendaires ne suffisent point pour couvrir cette dépense. »

- Adopté.

Article 61

« Art. 61. A l'article 61, les mots : « sans distinction des lieux où les aspirants ont fait leurs études » sont surprimes.

M. Devaux. - Messieurs, l'article qui vient d'être adopté me paraît nécessiter une addition.

Nous venons de régler l'indemnité accordée aux membres des jurys. Dans ces jurys il est des fonctionnaires très importants; ce sont les présidents choisis en dehors de l'enseignement. Il est très utile que le gouvernement ait à cet égard une grande liberté ne choix, que ces choix puissent se porter sur des hommes considérés et respectables.

Il est, messieurs, une classe de citoyens qui conviendraient particulièrement à la présidence de plusieurs de ces jurys et que les professeurs comme nous-mêmes, verraient avec plaisir chargés de ces fonctions ; ce sont les magistrats. Mais par suite de la loi de 1845, les magistrats ne peuvent plus recevoir aucune indemnité autre que l'indemnité de déplacement.

Il suit de là, messieurs, que le gouvernement devrait se faire en quelque sorte scrupule d'offrir à des magistrats cette mission peu agréable et très fatigante.

Je crois que la rétribution est si peu de chose en elle-même, que la fonction est si utile, que la chambre devrait permettre aux magistrats d'accepter l'indemnité qui y est attachée. Si la chambre ne le faisait pas, le gouvernement peut-être n'oserait offrir ces fonctions qu'aux membres de la magistrature qui sont ses subordonnés, aux membres du parquet. (Interruption.)

Je sais qu'il y a dans la Constitution un article 103 qui dit que les magistrats ne peuvent accepter des fonctions salariées. Mais il ne s'agit pas ici de fonctions salariées; il s'agit d'une indemnité pour un mission toute temporaire, et je pense que ce n'est que depuis la loi de 1845 que les membres des cours et tribunaux qui siègent dans le jury ou dans d'autres commissions ne reçoivent pas d'indemnité.

Je demanderai donc qu'on en revienne à l'ancien état de choses pour l'application de cette loi et que les magistrats puissent recevoir l'indemnité des autres membres du jury. Vous conviendrez qu'il est peu de fonctionnaires qui par leurs habitudes, par l'impartialité dont ils se sont fait en quelque sorte une loi pour toute leur vie, soient plus aptes à présider certains jurys.

M. Dumortier. - L'observation que fail l'honorable M. Devaux est excessivement juste. Le principe, certainement il serait fort à désirer que l'on pût, dans chaque jury, introduire, à côté des professeurs des universités, un membre de la magistrature, qui, comme l'a dit l'honorable membre, par ses habitudes d'impartialité, pourrait rendre les plus grands services.

C'est ce qui s'est passé lors des premières formations des jurys d'examen. Lorsque la chambre des représentants et le sénat avaient dans leur prérogative la nomination des membres du jury d'examen, prérogative sur laquelle on s'est à tort, suivant moi, récrié, chacune des deux chambres a donné fréquemment ses voies à des membres de la cour de cassation et de la cour d'appel, qui, ainsi nommés par les chambres, pouvaient recevoir des indemnités.

Mais il n'est pas à ma connaissance que jamais un membre de ces cours ait été nommé par le gouvernement si ce n’est à titre gratuit. Car l'article 103 de la Constitution dit en termes expres qu'un juge ne peut accepter du gouvernement des fonctions salariées à moins qu'il ne les exerce gratuitement et sauf les cas d'incompatibilité déterminés par la loi.

La Constitution veut donc que lorsque c'est le gouvernement qui nomme, le juge exerce les fonctions gratuitement, et je ne pense pas que nous puissions dans cette circonstance nous écarter, ni directement ni indirectement d’un texte aussi formel de la Constitution.

Je le regrette; mais c'est la conséquence du principe de la nomination du jury d’examen par le gouvernement. Si l'on voulait laisser les magistrats dans les jurys, il fallait laisser aussi aux chambres le droit de nommer les membres du jury. Alors ce n’était pas le pouvoir qui nommait; c’était l'élément parlementaire, et les magistrats ne tombaient pas sous le coup de l'article 103 de la Constitution. Je pense que, dans la situation actuelle, nous ne pourrions sans violation formelle de lu Constitution, admettre l'amendement qui est proposé, et que je regrette vivement de ne pouvoir faire figurer dans la loi.

On dira peut-être ici qu'il ne s'agit pas d'un traitement, qu'il s'agit d'une indemnité. Je répondrai que l’indemnité qui dépasse les frais, qui dépasse les déboursés, est un traitement déguisé, et certes vous ne pouvez pas plus donner un traitement déguisé qu'un traitement réel aux membres de l'ordre judiciaire, sans violer la loi.

M. Devaux. - Messieurs, du moment que la question que j'ai soulevée doit entraîner une discussion sur un point constitutionnel cela compliquerait la discussion et retarderait trop nos débats que vous avez hâte de finir ; je retire mon observation.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - En pratique, il serait très regrettable qu'il y eût interdiction pour le gouvernement du désigner des magistrats ou même des membres des chambres pour présider les jurys d'examen.

Remarquez, messieurs, que nous multiplions le nombre des jurys et qu'il sera indispensable de chercher ailler que dans le corps professoral, des hommes capables de présider le jury. En outre, pour le jury des élèves universitaires, et pour le jury central. On ne prendra que des professeurs. Si vous éloignez les magistrats et les membres des chambres, vous restreignez singulièrement les choix du gouvernement.

Je n’ai jamais compris d'une manière aussi restreinte l’article de la Constitution. Ainsi, messieurs, je n’ai pas fait difficulté de désigner pour le jury central de Bruxelles des membres des chambres qui auraient pu recevoir des indemnités sans pour cela être sujets à réélection. Jamais on n’a soulevé pareille prétention à l’égard des membres de la chambre qui faisaient partie des jurys. On jamais n’a pas envisagé cette indemnité comme un salaire.

Messieurs, comme on soulève un scrupule constitutionnel, je ne conclurai pas avec un honorable membre qu’il faut retirer la proposition, mais je conclurai qu’il faut la renvoyer à la section centrale. Je pense (page 1727) qu'elle mérite d’être examinée, et j'engage la section centrale à vouloir bien l'examiner au point de vue des inconvénients pratiques qui surgiraient si l'on interdisait au gouvernement de choisir les présidents des jurys, ou les jurés, soit dans l'ordre judiciaire, soit dans les chambres.

M. Delfosse, rapporteur. - On paraît d'accord sur ce point, que les membres de la magistrature appelés aux fonctions de jurés pourraient recevoir des frais de déplacement et de séjour; l'honorable M. Dumortier reconnaît qu'il n'y aurait là rien d'inconstitutionnel, ni d'illégal.

Le gouvernement pourrait donc nommer des magistrats de Bruxelles membres d'un jury qui siégerait à Liège, à Louvain, ou à Gand, et ces magistrats seraient indemnisés de leurs frais de route et de séjour.

Du reste, si M. le ministre, de l'intérieur fait sienne la proposition de 'l'honorable M. Devaux, il va sans dire que la section centrale est prête à l'examiner.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je dois déclarer à la chambre que, de bonne foi, sans avoir la pensée de porter la moindre atteinte à la Constitution, je croirais être en droit de désigner, pour faire partie du jury, des membres de l'ordre judiciaire ou des chambres législatives.

- Le renvoi à la section centrale est mis aux voix et prononcé.

Chapitre II. Des inscriptions et des frais d'examen
Article 61

M. le président. - Nous en étions à l'article 61, qui est ainsi conçu :

« Art. 61. A l'article 61, les mots : « sans distinction des lieux où les aspirants ont fait leurs études » sont supprimés. »

- Cet article est adopté.

Article 62

M. le président. - M. le ministre se rallie-t-il à l'article 62 tel qu'il est rédigé par la section centrale?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Oui, M. le président.

M. le président. - Voici la rédaction de la section centrale :

« Art. 62. L'article 62 est remplacé par le suivant :

« Les frais des examens sont réglés comme suit :

« Pour l'examen d'élève universitaire, 20 fr.

« Pour l'examen préparatoire à celui de candidat en pharmacie, 20 fr.

« Pour la candidature en philosophie, 50 fr.

« Pour le doctorat en philosophie et lettres, 50 fr.

« Pour le grade de candidat en droit, 100 fr.

« Pour le premier examen du docteur en droit, 150 fr.

« Pour le second examen du docteur en droit, 150 fr.

« Pour l'examen de docteur en sciences politiques et administratives :

« Le candidat en droit paye 150 fr.

« Le docteur en droit paye 50 fr.

« Pour le grade de candidat en sciences y compris l'épreuve préparatoire, 50 fr.

« Pour le doctorat en sciences, 50 fr.

« Pour le grade de candidat en médecine, 80 fr.

« Pour le premier examen de docteur en médecine, 80 fr.

« Pour le second, 80 fr.

« Pour le troisième, 80 fr.

« Pour l'examen de candidat notaire, 100 fr.

« Pour l'examen de candidat en pharmacie, 50 fr.

« Pour l'examen de pharmacien, 50 fr.

M. Lelièvre a proposé l'amendement suivant :

« Pour le grade de candidat en droit, 80 francs, au lieu de 100 francs.

« Premier examen du doctorat en droit, 100 francs, au lieu de 150 francs.

« Deuxième examen du doctorat en droit, 100 francs, au lieu de 150 francs. »

M. Lelièvre. - Messieurs, mon amendement se justifie par lui-même. Les frais des examens, auxquels il est relatif, sont fixés à un taux qui me paraît exorbitant. D'après cet ordre de choses, les grades seraient désormais le privilège de la fortune, et l'on exclurait les jeunes gens capables, animés des meilleures dispositions pour l'étude, parce qu'ils en comprennent mieux la nécessité. Je ne puis admettre un système qui, en matière d'instruction, crée une véritable aristocratie d'argent et une inégalité que repoussent nos mœurs et notre Constitution démocratiques. C'est pour ce motif que je propose de réduire les fais en question.

De cette manière on fait disparaître la différence trop marquée que le projet établit entre les frais exigés pour les examens en droit et ceux relatifs aux examens en médecine, différence énorme que rien ne justifie.

M. Delfosse, rapporteur. - Je dois faire observer que les chiffres proposés pour les examens de candidat et de docteur en droit sont absolument les mêmes que ceux de la loi de 1835. On n'aggrave donc pas la position de ceux qui se destinent au barreau. D'après la loi de 1835, il y avait un seul examen de docteur, et cet examen coûtait 300 francs. On a divisé l'examen de docteur en deux et chacun de ces deux examens coûte 150 francs.

L'honorable M. Lelièvre craint que l'élévation de ce chiffre n'empêche beaucoup de jeunes gens de se livrer à l'étude du droit. Je ne vois pas que, jusqu'à présent, on ait manqué d'avocats. Je comprendrais l'amendement de M. Lelièvre si nous proposions d'aggraver la position des élèves en droit, mais cette position reste absolument la même que sous la loi de 1835.

Une proposition, qui avait quelque ressemblance avec celle de M. Lelièvre, a été soumise à la section centrale : on demandait que le prix des examens et des cours ne fût pas plus élevé pour le droit que pour la médecine ou les sciences. La section centrale a consigné dans son rapport les motifs pour lesquels elle n'a pas adopté cette proposition. L'étude de la médecine est en général plus longue et plus coûteuse que celle du droit.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, je dois ajouter une observation en faveur du chiffre actuel, c'est que sous le régime de la loi de 1835 l'élève était obligé de faire des dépenses de déplacement et de séjour, il devait venir trouver le jury de Bruxelles; sous le régime de la loi nouvelle, le jury viendra, en règle générale, trouver l'élève qui dès lors n'aura pas à supporter les frais d'un séjour plus ou moins prolongé dans la capitale.

Il faut aussi, messieurs, penser aux examinateurs. Les examinateurs ne seront payés qu'au prorata du montant des inscriptions d'examen : si vous réduisez trop le montant des inscriptions d'examen, évidemment vous allez encore réduire l'indemnité déjà très réduite des examinateurs. Il faut songer, messieurs, aux moyens d'obtenir des examinateurs libres ; le gouvernement peut bien forcer ses professeurs à se transformer en jurés, alors même qu'il en résulterait une charge pour eux; mais il ne peut pas agir de même envers les examinateurs libres, et il faut au moins que ceux-ci soient indemnisés de leurs frais de route et de séjour. Dans tous les cas j'insiste sur cette considération qu'il y a, dans le régime nouveau, une économie notable pour les élèves en ce qu'ils ne sont plus assujettis à des frais de déplacement.

M. Lelièvre. - Messieurs, les arguments déduits par les honorables préopinants ne me paraissent pas de nature à vous convaincre. Il est vrai que la loi de 1835 renferme déjà la disposition à laquelle je propose un amendement, mais certes ce n'est pas là un motif pour maintenir l'ordre de choses en question, alors qu'il consacre une injustice et forme contraste avec l'esprit de nos institutions.

La considération que M. le ministre de l'intérieur déduit d'une diminution de dépenses pour l'élève qui désormais ne devra plus se déplacer, ne me paraît pas bien sérieuse, puisqu'il est certain que cette réduction est trop insignifiante pour s'y arrêter ; et relativement aux dépenses que devront faire les professeurs, il n'y aura pas de ce chef une augmentation assez notable pour justifier le chiffre exorbitant énoncé en l'article que nous discutons et dont M. le ministre demande le maintien.

N'oublions pas qu'en adoptant le système du projet on écarte des professions libérales les jeunes gens capables et intelligents, mais sans fortune.

Les parents qui ne se trouvent pas dans une position brillante ne pourront destiner leurs enfants à la carrière du barreau.

Indépendamment des sommes à solder pour les cours, la disposition que je combats leur impose des charges très onéreuses. Or, messieurs, sous une Constitution telle que celle qui nous régit, il est impossible de sanctionner un tel état de choses qui frappe d'ostracisme les personnes peu aisées, et compromet tout leur avenir. Ce sont ces motifs qui m'engagent à persister dans mon amendement.

M. Delfosse, rapporteur. - Messieurs, l'honorable M. Lelièvre dit qu'il faut rendre les études du droit accessibles aux jeunes gens qui sont sans fortune.

Je lui ferai remarquer que des bourses ont été créées en faveur des jeunes gens de cette catégorie qui montrent d'heureuses dispositions.

Deux avantages sont accordés par le projet de loi aux élèves en droit. M. le ministre de l'intérieur en a signalé un : c'est que l'élève n'aura plus de frais de déplacement à supporter. Le second avantage consiste en ce que l'examen de docteur est divisé eu deux parties. L'élève rejeté perdait, sous la loi actuelle, la moitié des 300 francs qu'il fallait payer pour l'examen unique; il ne perdra, d'après le projet, que la moitié de 150 francs qu'il faut payer pour chacun des deux examens.

- Cet amendement, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 62 est ensuite mis aux voix et adopté.

Projet de loi instituant une caisse générale d’assurances sur la vie

Dépôt

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, le Roi nous a chargés, M. le ministre des finances et moi, de présenter à la chambre un projet de loi dont je vais donner lecture et qui porte institution d'une caisse générale d'assurances sur la vie. J'ignore si la chambre sera en mesure d'examiner ce projet dans le cours de cette session; ainsi qu'on peut en juger, il a beaucoup d'importance; il sera accompagné de documents assez volumineux. Cependant nous sommes prêts à les fournir à la chambre, si la chambre décide qu'elle s'occupera de ce projet dans le cours de la session actuelle.

Voici ce projet :

« Léopold Roi des Belges,

« A tous présents et à venir, salut!

« Sur la proposition de Nos ministres de l'intérieur et des finances et de l'avis de Notre Conseil des ministres,

« Nous avons arrêté et arrêtons :

« Article unique. Nos ministres de l'intérieur et des finances présenteront en Notre nom, aux chambres législatives, le projet de loi dont la teneur suit :

« Art. 1er. Il est créé, avec la garantie de l'Etat et sous la direction du gouvernement, une caisse générale d'assurances sur la vie.

« Elle fonctionnera, à partir de la promulgation de la présente loi, comme caisse de retraite.

« Art. 2. Toute personne, âgée de dix-huit ans au moins, peut, par (page 1728) versement unique effectué chez un des receveurs des contributions directes, acquérir une rente viagère différée.

« L'acquisition doit précéder de dix ans au moins l'époque fixée pour l’entrée en jouissance de la rente.

« Art. 3. La femme mariée doit déposer l'autorisation de son mari pour faire, en son nom personnel, l'acquisition de rentes différées.

« En cas de refus de son mari, le juge de paix, les parties entendues ou appelées, peut autoriser la femme; il le peut également en cas d'absence ou d'éloignement du mari.

« L'autorisation est valable jusqu'à révocation notifiée au receveur chez lequel elle est déposée. Les rentes acquises dans l'intervalle sont propres à la femme qui seule a le droit de les toucher.

« Art. 4. Les rentes s'acquièrent conformément au tarif ci-joint, calculé d'après la mortalité actuelle à l'intérêt de 5 p. c.

« Art. 5. Le minimum de la première rente est fixé à 24 fr.; le maximum de rentes accumulées ne peut dépasser 1.200 fr.

« Ceux qui seraient parvenus à faire inscrire des rentes au-delà du maximum, ne toucheront pas l'excédant et n'auront aucun droit à la restitution des capitaux qu'ils auront versés.

« Art. 6. Toute somme de cinq francs et au-dessus est admise à la caisse. La partie des versements qui ne peut être convertie en rente est improductive d'intérêts jusqu'au moment où des versements ultérieurs permettent l'acquisition d'une rente.

« Art. 7. L'acquisition des rentes peut se faire, au choix de l'assuré, pour entrer en jouissance à 55, à 60 à ou 65 ans.

« Le même assuré peut acquérir des rentes pour des âges différents; mais toute acquisition détermine irrévocablement l'entrée en jouissance.

« Art. 8. Par dérogation à l'article précédent, toute personne assurée dont l'existence dépend uniquement de son travail, et qui, avant l'âge fixé par l'assurance, deviendrait, par la perte d'un membre ou d'un organe, par une infirmité accidentelle et permanente, non contractée au service militaire, incapable de pourvoir à sa subsistance, jouira immédiatement des rentes qu'il aura acquises depuis cinq ans au moins, et jusqu'à concurrence de 360 fr.

« La jouissance anticipée de la rente cessera si les conditions qui l'ont amenée viennent à disparaître.

« Art. 9. Les versements sont irrévocablement acquis à la caisse, à l'exception de ceux que la femme mariée a effectués et de ceux qui, conformément à l'article 6, ne sont pas convertis en rentes.

« Les premiers seront restitués à qui de droit sans accumulation d'intérêts; les seconds ne le seront qu'aux déposants, et seulement quand ils auront atteint l'âge auquel ils ne peuvent plus acquérir des rentes.

« Art. 10. La caisse ne contracte aucune obligation envers les familles des assurés. Toutefois, en cas d'indigence, elle pourvoit aux funérailles des assurés décédés postérieurement à l'entrée en jouissance de leur rente.

« Art. 11. Les rentes sont incessibles et insaisissables. Néanmoins, dans les cas prévus par les articles 203, 205 et 214 du Code civil, si les rentes accumulées dépassent 360 fr., elles peuvent être saisies jusqu'à concurrence d'un tiers, sans que la partie réservée puisse jamais être inférieure à cette somme.

« Art. 12. Toute personne est admise à verser des fonds et à prendre des livrets pour le compte et au nom de tiers ; mais les rentes ne seront payées qu'à ceux-là seuls au profit desquels elles sont inscrites.

« Art. 13. Les rentes sont payées mensuellement et par douzième, par les receveurs des contributions directes dans le ressort desquels les rentiers résident; elles ne sont payées qu'aux rentiers résidant dans le royaume.

« Art. 14. Il est remis à chaque assuré un livret dans lequel sont inscrits les versements qu'il faits, les rentes qu'il acquiert et les arrérages qu'il reçoit.

« Art. 15. Des arrêtés royaux détermineront la forme et la teneur des livrets, ainsi que le mode de constater l'âge, la résidence et l'existence des assurés.

« Art. 16. La caisse d'assurance est administrée et dirigée par une commission de cinq membres nommés par le Roi.

« Cette commission statue en dernier ressort sur les difficultés auxquelles peut donner lieu l'application des articles 8, 10 et 13.

« Art. 17. Toutes les recettes seront versées directement au trésor public.

« Il est remis mensuellement à la commission un compte des recettes et des dépenses.

« Art. 18. Toutes les recettes disponibles sont appliquées par le ministre des finances, la commission entendue, en achats d'inscriptions sur le grand-livre de la dette publique, au nom de la caisse.

« Aucune aliénation ne peut se faire sans une décision expresse de la commission.

« Art. 19. Les comptes de la casse sont arrêtés au 31 décembre de chaque année.

« La commission publie et soumet au contrôle de neuf commissaires délégués par les conseils provinciaux, le compte moral et financier de la caisse.

« Art. 20. Chaque conseil provincial délègue dans la session ordinaire un de ses membres, pour procéder à la vérification des comptes, avant l'expiration du premier trimestre de l'année suivante.

« Art. 21. Tous les actes, toutes les pièces nécessaires à l'exécution des dispositions de la présente loi sont délivrés gratis et exempts des droits de timbre et d'enregistrement.

« Disposition transitoire

« Art. 22. Pendant les cinq ans qui suivront la promulgation de la présente loi, l'acquisition des rentes ne devra précéder que de cinq ans l'époque fixée pour l'entrée en jouissance. »

« Donné à Bruxelles, le 29 juin 1849.

« Léopold.

« Par le Roi :

« Le ministre de l'intérieur, Ch. Rogier.

« Le ministre des finances, Frère-Orban.

Pièces adressées à la chambre

M. le président. - Je vais donner lecture d'une lettre qui est adressée à la chambre par M. le président de la cour des comptes :

« Bruxelles, le 29 juin 48496.

« A Monsieur le président de la chambre des représentants.

« Monsieur le président,

« Conformément à l'article 15 de la loi, règlement d'ordre du 9 avril 1831, j'ai l'honneur de porter à votre connaissance que M. Hubert, nommé directeur au département des finances, donne sa démission des fonctions de conseiller à la cour des comptes, ainsi que celât, résulte de la lettre ci-annexée.

« Je vous prie d'agréer, monsieur le président, l'hommage de ma haute et respectueuse considération.

« Le président de la cour des comptes,

« Th. Fallon. »

« Bruxelles, le 29 juin 1849. »

« A Monsieur le président de la chambre des représentants.

« Monsieur le président,

« Bruxelles, le 29 juin 1849.

« J'ai l'honneur de vous informer que, par arrêté en date du 25 juin courant, le Roi m'a appelé aux fonctions de directeur au ministère des finances ; ayant accepté ce mandat, je dois déposer celui de conseiller de la cour des comptes.

« En conséquence, je vous prie, M. le président, d'être auprès d'elle l'interprète de mes sentiments de gratitude pour le témoignage de confiance dont elle a bien voulu m'honorer et dont je conserverai toujours le souvenir, comme un des plus beaux titres que l'on puisse tenir des mandataires de la nation.

« Recevez, M. le président, l'hommage de mes sentiments respectueux,

« Hubert. »

- Pris pour notification.

M. le président. - La chambre juge-t-elle à propos de prendre des mesures pour pourvoir dans la session actuelle au remplacement de M. Hubert.

M. H. de Brouckere. - Je demande qu'aucune résolution ne soit prise aujourd'hui à cet égard. Attendons d'abord que des requêtes nous aient été adressées pour solliciter la place vacante ; et puis nous verrons s'il y a lieu de procéder à la nomination dans la session actuelle, ou s'il est convenable de la remettre à la session prochaine.

- La proposition de M. H. de Brouckere est adoptée.

Projet de loi accordant un crédit supplémentaire au budget du ministère des travaux publics, pour le conseil des mines

Rapport de la commission

M. Bruneau. - Messieurs, j'ai l'honneur de déposer sur le bureau le rapport de la commission qui a été chargée d'examiner le projet de loi portant demande d'un crédit supplémentaire de 14,100 francs au département des travaux publics pour le traitement des membres du conseil des mines.

- Ce rapport sera imprimé et distribué.

La chambre le met à l'ordre du jour.

Projet de loi qui modifie la loi du 27 septembre 1835, sur l'enseignement supérieur

Discussion générale

Titre III. Des grades des jurys d'examen et des droits qui sont attachés aux grades

Chapitre II. Des inscription et des frais d'examen
Article 63

M. le président. - Nous étions arrivés à l'article 63.

Voici l’article 63 du projet de loi de la section centrale auquel M. le ministre de l'intérieur se rallie :

« Art. 63. L'article 63 est remplacé par le suivant :

« Le récipiendaire qui n'a pas répondu d'une manière satisfaisante est refusé ou ajourné.

« Le récipiendaire ajourné ne peut plus se présenter à l'examen dans la même session, à moins qu'il n'y ait été autorisé lors de son ajournement.

« Le récipiendaire ajourné qui se représente paye, dans tous les cas, le quart des frais d'examen.

Le récipiendaire refusé ne peut plus se présenter dans la même session, et il est tenu de payer la moitié des frais d'examen. »

M. Coomans. - Messieurs, cet article m'inspire une réflexion dont (page 1729) je crois faire part à la chambre. Il porte, au paragraphe 2 : « Le récipiendaire ajourné ne peut plus se représenter dans la même session devant un jury quelconque. » Et au paragraphe : « Le récipiendaire refusé ne peut plus se représenter devant aucun jury dans la même session, et il est tenu de payer la moitié des frais d'examen. »

Ce dispositif semble être en opposition formelle avec un des arguments principaux qu'on a fait valoir en faveur de la pluralité des jurys. M. Je ministre de l'intérieur, entre autres, a dit que le jury central, institué pour les études libres, avait notamment pour but d'offrir certaines garanties aux élèves qui se croiraient mal jugés, de leur ouvrir une sorte, de cour d'appel.

J'avoue qu'à ce point de vue on peut défendre le fractionnement du jury (il serait difficile de le justifier sous d'autres rapports). Pourquoi donc défendre à l'élève qui aura été refusé par un jury universitaire, de se présenter immédiatement après devant le jury central, pour les études libres? La garantie disparaît, si vous ne lui laissez pas cette faculté.

Et puis il me semble que le délai assigné à l'élève pour subir un nouvel examen est bien long. L'élève peut n'avoir été ajourné ou refusé que parce qu'il ne connaissait pas une des matières du programme. Deux ou trois mois pourraient lui suffire pour combler la lacune, et pour satisfaire d'une manière convenable aux exigences de la loi.

Il me paraît que la pénalité financière attachée à l'ajournement ou au refus suffît, et dans ce cas, on pourrait rédiger l'article en ce sens : « Le récipiendaire qui n'a pas répondu d'une manière satisfaisante est refusé et il paye le quart des frais d'examen. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Lorsque j'ai dit que le jury central établi à Bruxelles pourrait recevoir les récipiendaires qui auraient échoué devant les autres jurys, je n'ai pas entendu dire que ces élèves refusés ou ajournés pourraient se présenter immédiatement devant le jury central. L'intervalle d'une session à l'autre n'est pas d'un an, mais de six mois. Il ne faut pas fournir à un élève la faculté de faire, sans s'arrêter, le tour des jurys; lui permettre, après avoir échoué devant Bruxelles et Louvain ou devant Gand et Liège, de venir se présenter au jury central de Bruxelles, ce serait lui accorder trop de facilité.

On doit supposer que l'élève, interrogé par ses propres professeurs, ne sera pas ajourné ou refusé sans raison. Indépendamment de la peine pécuniaire, il faut, au moyen d'un ajournement, le forcer de se livrer à de nouvelles études avant de se présenter à de nouveaux examinateurs. Le délai ne sera pas long, puisqu'il ne s'agit que d'une session à l'autre.

M. Delfosse, rapporteur. - La section centrale a fait disparaître du projet tout ce qui préjugerait le mode d'organisation du jury, elle a voulu laisser la question intacte.

L'honorable M. Coomans a lu le projet du gouvernement qui est abandonné, M. le ministre s'étant rallie à celui de la section centrale.

Je ferai remarquer à l'honorable membre qu'il est impossible d'autoriser un élève ajourné ou refusé à se présenter, dans la même session, devant un autre jury; ce serait constituer le deuxième jury en jury d'appel.

- L'article 63 de la section centrale est mis aux voix et adopté.

Chapitre III. Des droits attachés aux grades
Article 65

« Art. 65. A l'article 65, paragraphe premier, les mots: « ou d'accoucheur » sont remplacés par les mots: « d'accoucheur ou d'oculiste ».

« Les dispositions suivantes termineront le même article :

« Nul ne peut être nommé juge de paix, grenier ou commis-greffier près la cour de cassation, si, indépendamment des autres conditions requises, il n'a obtenu le grade de docteur en droit.

« Nul ne peut être nommé notaire, si, indépendamment des autres conditions requises, il n'a subi devant un jury de candidature en droit, un examen sur le droit civil élémentaire, et sur les lois organiques du notariat et les lois financières qui s'y rattachent (cours de notariat). »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il faut mettre cette disposition en rapport avec l'article 51. Au lieu de droit civil élémentaire, on a dit à l'article 51 : « introduction historique au cours du droit civil, exposé des principes généraux du Code civil »; cela était utile pour les jeunes gens qui se destinent au doctorat en droit; sans doute la connaissance des principes généraux ne sera pas inutile au candidat notaire, mais cela ne suffirait pas; il faut qu'il connaisse le texte des articles du Code; pourquoi, s'il suffit pour le candidat en droit de connaître les principes généraux du droit, cela ne suffirait pas au candidat notaire. D'un autre côté, ce serait trop que de l'obliger à connaître le droit civil approfondi ; il faut laisser quelque chose à l'appréciation du jury. Je propose de retrancher le mot « élémentaire ». Le jury sachant qu'il s'agit d'un notaire, l'examen pourra porter spécialement sur les matières que l'on sait être plus particulièrement nécessaires à sa profession.

M. Delfosse, rapporteur. - On a fait un changement pour la candidature en droit, mais ce n'est pas une raison pour devenir plus exigeant à l'égard du candidat notaire. Ou ne lui imposait par le projet que le droit civil élémentaire. Pourquoi exigerait-on maintenant la connaissance du droit civil approfondi?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Les observations que j'ai faites m'ont été suggérées par un professeur de l’université de Liège, qui m'a fait observer que les principes généraux de droit, très bons comme introduction à l'étude du droit pour l'avocat, seraient insuffisants pour le candidat-notaire.

D'un autre côté, vous ne pouvez astreindre l'aspirant au grade de candidat-notaire à répondre sur le droit civil approfondi. C'est un examen spécial que devra subir le candidat-notaire. Je crois qu'il faut laisser le quelque chose à l'appréciation du jury. Le candidat-notaire pourra compléter ses notions de droit civil par lui-même ou en suivant le cours de droit civil approfondi.

M. Deliége. - L'article 3 du projet de loi, relatif aux matières que comprend l'enseignement supérieur, contient :

« La science du notariat (lois organiques du notariat et lois financières qui s'y rattachent). »

Dans ce cours de la science du notariat, le professeur pourra être appelé à enseigner les parties du Code civil qui se rattachent au notariat. De manière que l'examen devrait porter sur la science du notariat; les lois organiques du notariat et les lois financières qui s'y rattachent. Voilà le moyen de mettre le paragraphe en discussion en rapport avec l'article 3.

Je n'exclus pas le droit civil des connaissances exigées du candidat-notaire; au contraire, je demande que le professeur qui expliquera la science du notariat, donne une explication approfondie des articles du Code civil dont la connaissance est utile au notaire.

Je demande aussi que les principes généraux de droit civil fassent partie de l'examen, parce que, pour arriver à la connaissance de la science du notariat, l'élève devra être initié aux principes du droit civil.

M. Delfosse, rapporteur. - Je ne puis admettre avec M. le ministre de l'intérieur que l'élève qui aura subi l'examen prescrit par cet article doive passer un autre examen pour obtenir un certificat de capacité; la chambre des notaires pourrait donc déclarer incapable celui que le jury aurait jugé apte à remplir les fonctions de notaire; elle pourrait refuser un certificat de capacité à celui qui aurait subi devant le jury de candidature en droit un examen sur le droit civil, sur les lois organiques du notariat et sur les lois financières qui s'y rattachent! Cela est inadmissible. L'élève qui aura subi l'examen prescrit par le projet de loi aura donné des preuves suffisantes d'aptitude.

M. Orts. - Je demanderai une explication à M. le ministre de l'intérieur sur le paragraphe en discussion. Je lui demanderai si l'examen subi par l'aspirant au notariat et le diplôme qui en sera la conséquence abrogeront la disposition de la loi spéciale de ventôse an IX sur le notariat, qui exige la production d'un certificat de capacité, ou si, indépendamment de l'examen dont il s'agit ici, il faudra que l'aspirant au notariat se présente devant la chambre des notaires pour subir un examen, à l'effet d'obtenir un certificat de capacité. Dans le cas où ce dernier examen serait supprimé, l'examen dont nous nous occupons devrait porter sur la pratique du notariat. On pourrait en faire mention dans la loi, en ajoutant la rédaction des actes.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Dans mon opinion, les certificats seront maintenus au moins en partie. C'est un surcroît de précautions en faveur du public.

M. Deliége. - Je crois qu'il faut maintenir le certificat voulu par la loi sur le notariat; mais ce certificat ne porterait plus que sur la moralité du candidat-notaire. Aujourd'hui il porte sur la capacité et la moralité; la chambre des notaires n'aura plus à constater la capacité, cette mission est dévolue par le projet de loi au jury d'examen.

Quant à la pratique du notariat, à la confection des actes, le professeur de notariat devra s'en occuper dans son cours.

Au surplus le stage continuera à être requis pour être appelé aux fonctions de notaire.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Si le certificat aujourd'hui exigé n'était plus nécessaire, il faudrait le déclarer par la loi. Au reste puisque ce paragraphe donne lieu à discussion, j'en propose le renvoi à la section centrale.

M. Orts. - Je crois que c'est d'autant plus nécessaire que, si je suis bien informé, l'article aurait été compris autrement par le département de la justice qui admettrait un examen approfondi parallèlement à celui dont s'occupe le projet de loi.

M. Bruneau. - Je prierai la section centrale d'examiner en même temps s'il n'y aurait pas lieu à dispenser de l'examen devant le jury de la candidature en droit ceux qui ont subi l'examen de docteur en droit.

- Le paragraphe et les amendements y relatifs sont envoyés à l'examen de la section centrale.


« Nul ne peut exercer la profession de pharmacien, s'il n'a été reçu conformément aux dispositions de la présente loi.

« Nul ne peut se présenter à l'examen de pharmacien, s'il n'a obtenu le grade de candidat en pharmacie.

« Nul ne peut se présenter à l'examen de candidat en pharmacie, s'il n'a subi, devant le jury chargé d'accorder le grade d'élève universitaire, un examen sur les branches suivantes :

« Le français et le latin, l'arithmétique, l'algèbre jusqu'aux équations du second degré inclusivement, les éléments de la géométrie, les éléments de géographie moderne, les principaux faits de l'histoire universelle, l'histoire de la Belgique.

« L'examen de candidat en pharmacie comprend : les éléments de physique, la botanique descriptive et la physiologie végétale, la chimie organique et inorganique.

(page 1730) « Il a lieu devant le jury de la candidature en sciences naturelles.

« L'examen de pharmacien comprend : l'histoire des drogues et des médicaments, leurs altérations et leurs falsifications, les doses maxima auxquelles on peut les administrer, la pharmacie théorique et pratique.

« Il comprend, en outre, deux préparations pharmaceutiques, deux opérations chimiques et une opération toxicologique.

« Il a lieu devant un jury spécial désigné par le gouvernement.

« En se présentant pour le subir, le récipiendaire est tenu de justifier, par la production de certificats approuvés par une des commissions médicales provinciales, de deux années de stage officinal, à partir de l'époque à laquelle il a obtenu le grade de candidat en pharmacie.

« Le jury peut se dispenser de procéder aux épreuves sur les procédés chimiques, pharmaceutiques et toxicologiques, s'il juge, après la première partie de l'examen, qu'il y a lieu de prononcer l'ajournement ou le rejet du candidat.

« Le gouvernement peut accorder des diplômes aux étrangers munis d'un diplôme de pharmacien, sur l'avis favorable du jury d'examen chargé de la réception des pharmaciens.

« Les droits et les prérogatives du doctoral sont attachés au titre de pharmacien obtenu conformément aux dispositions de la présente loi.

« Les pharmaciens reçus conformément aux dispositions de la présente loi peuvent obtenir le grade de docteur en sciences naturelles, en subissant l'examen requis pour ce grade. Ils sont dispensés de tout autre examen préparatoire. »

M. Delfosse, rapporteur. - M. le ministre de l'intérieur se rallie à la rédaction de la section centrale, sauf un léger changement de rédaction. Au lieu de « la chimie organique et inorganique », on dirait : « la chimie inorganique et organique ».

M. le ministre propose en outre la suppression de l'avant-dernier paragraphe, ainsi conçu : « Les droits et les prérogatives du doctorat sont attachés au titre de pharmacien, obtenu conformément aux dispositions de la présente loi. »

Je crois pouvoir consentir à cette suppression. L'Académie de médecine avait demandé l'introduction de ce paragraphe pour que les pharmaciens qui auraient subi les examens prescrits par la loi, pussent être nommés professeurs de pharmacie aux universités. Il y a une disposition de la loi de 1835 qui exige pour ces fonctions le grade de docteur. Mais on a fait observer depuis que le gouvernement peut accorder des dispenses à ceux qui auraient donné des preuves de capacité, soit par leurs écrits, soit par les services qu’ils auraient rendus à la science.

M. Devaux. - Messieurs, quelque respectable que soit l'origine de l'amendement de la section centrale, car cet amendement part en quelque sorte de l’Académie de médecine, je ne puis l'adopter.

Il suit de la proposition de la section centrale que, pour être pharmacien dans la plus petite ville de Belgique, il faut avoir passé trois examens : non seulement un examen de candidat pharmacien, non seulement un examen de pharmacien, mais un examen sur le latin, sur le français, sur l'arithmétique, sur l'algèbre, sur la géométrie, sur la géographie moderne, sur l'histoire universelle et sur l'histoire de la Belgique.

Messieurs, je désire beaucoup la diffusion de la science ; mais remarquez que nous agissons ici par voie de contrainte. Il me semble que la carrière de pharmacien n'offre pas assez d'avenir pour soumettre celui qui veut l'embrasser à des épreuves aussi difficiles.

Je crois que le gouvernement exigeait assez ou à peu près assez, et que les élèves qui auront subi les examens qu'exige la section centrale n'iront pas s'établir comme pharmaciens dans nos petites villes, dans nos villages. Ceux qui seraient capables de subir de pareils examens préféreraient s'adonner à la médecine ou à la chirurgie et il y aurait fort à craindre que la profession ne fût désertée.

Je sais bien que, d'un autre côté, on craint qu'il y n'ait trop de pharmaciens, et cette crainte est surtout partagée par MM. les pharmaciens qui voudraient imposer des conditions encore plus difficiles à remplir. Ce serait contraire à tout l'esprit de la loi que nous allons voter. Si l'on trouve que le nombre des pharmaciens qui s'établissent dans les grandes villes amène une concurrence dangereuse pour la société, il faut demander que ce nombre soit limité par la loi. Dans les petites villes il n'y en a pas trop, et dans les campagnes il en manque. Les médecins y sont obligés de fournir eux-mêmes les médicaments.

Je demande donc que les examens de pharmaciens soient ramenés à des bornes plus modestes. Toutes les connaissances qui se rapportent directement ou indirectement à la pharmacie, je les admets volontiers ; mais je demande que l'élève qui sait le latin, le français et l'arithmétique, soit dispensé de connaître l'algèbre, la géométrie et l’histoire universelle.

M. Delfosse, rapporteur. - Messieurs, l'honorable préopinant paraît faire une distinction entre les pharmaciens des campagnes et ceux des villes. Je pense que les pharmaciens des campagnes doivent être tout aussi instruits que ceux des villes. Ils devraient même à la rigueur être plus instruits. Dans les villages il n'y a pas de concurrence. L'habitant d'une commune rurale n'a pas le choix entre plusieurs pharmaciens; tandis que l'habitant d'une ville peut s'adresser au plus capable.

L'honorable M. Devaux reconnaît avec nous que l'on doit obliger les pharmaciens des campagnes comme ceux des villes à la connaissance de la physique, de la botanique, de la chimie et d'autres sciences encore énumérées dans le projet. Mais croit-il que l'on peut se livrer utilement à l'étude de ces sciences si l’on n'a préalablement fait des études moyennes?

L'honorable M. Devaux adopte le projet du gouvernement. Il veut que le candidat pharmacien soit interrogé sur le latin et sur l'arithmétique, et il ne veut pas qu'on l'interroge sur l'algèbre et la géométrie. Il est cependant nécessaire que ceux qui se livrent à l'étude de la chimie, et surtout à celle de la physique, connaissent cette partie des mathématiques. Cela est nécessaire plus que jamais par suite des progrès que les-sciences ont faits.

La principale différence entre l'honorable M. Devaux et nous, c'est qu'il ne voudrait pas d'examen sur l'algèbre, la géométrie, la géographie et l'histoire. Je demande s'il est possible que celui qui se destine à la pharmacie et qui a dû faire des études moyennes pour connaître le latin et une partie des mathématiques, ignore la géographie et les principaux faits de l'histoire universelle, et de l'histoire de son pays.

Remarquez, messieurs, que nous n'exigeons pas de ce candidat, comme de ceux qui se destinent à la médecine, le grade d'élève universitaire ni celui de candidat en sciences naturelles. L'association des pharmaciens voulait quatre examens ; l'Académie de médecine a fait observer que si l'on poussait les exigences aussi loin, peu de personnes se livreraient à cette carrière; que l'on préférerait la médecine ou le droit. La section centrale et le gouvernement, se ralliant à l'opinion de l'Académie, ne demandent que trois examens, dont le premier ne comprendrait qu'une partie des matières exigées pour le grade d'élève universitaire, et les deux autres des matières qu'un pharmacien ne peut pas se dispenser de connaître.

L'honorable M. Devaux ne voudrait pas que l'examen portât sur l'algèbre et sur la géométrie. Je dis qu'il est impossible de se livrer avec fruit à l'étude d'une science telle que la physique, sans avoir une connaissance approfondie de cette partie des mathématiques.

Il y a encore d'autres matières sur lesquelles la section centrale fait porter les examens et qui ne se trouvaient pas dans le projet du gouvernement. L'Académie de médecine a pensé avec raison que si les examens ne portent pas sur ces matières, les malades courront grand risque d'être empoisonnés par le pharmacien. Il n'est pas question ici de l’histoire ni de la géographie; j'en ferai bon marché si vous voulez ; cependant celui qui a fait ses études moyennes ne peut ignorer la géographie et les principaux faits de l'histoire universelle. L'Académie de médecine, en demandant que le candidat pharmacien fût interrogé sur cette partie des connaissances humaines a voulu qu'il eût l'esprit cultivé.

Il faut bien convenir que celui qui n'a pas appliqué son intelligence à l'étude de l'histoire n'est pas aussi propre qu'un autre à l'étude des sciences. Si cela n'était pas vrai, pourquoi exigerait-on la connaissance de l'histoire du médecin et du docteur en sciences? Je félicite M. le ministre de l'intérieur de s'être rallié au projet de la section centrale.

M. le président. - M. Devaux propose-t-il un amendement?

M. Devaux. - Je propose la suppression de ces mots :

« L'algèbre jusqu'aux équations du second degré, les éléments de la géométrie, les éléments de la géographie moderne, les principaux faits de l'histoire universelle et l'histoire de la Belgique. »

Toutes ces sciences n'ont aucun rapport avec la pharmacie, et en les retranchant, vous n'empêcherez pas le pharmacien d'être dans son art un homme instruit. Remarquez, messieurs, que je laisse subsister sous tous les autres rapports tout ce qu'a exigé l'Académie de médecine, et que le pharmacien continue à être interrogé, dans un premier examen, sur les éléments de physique, la botanique descriptive et la physiologie végétale, la chimie organique et inorganique; et dans un deuxième examen, sur l'histoire des drogues et des médicaments, leurs altérations et leurs falsifications, les doses maximales auxquelles on peut les administrer, la pharmacie théorique et pratique. Il me semble que quand le candidat démontrera qu'il possède toutes ces sciences, il ne sera certainement pas un ignorant, et s'il empoisonne un malade, ce ne sera pas parce qu'il ignore l'histoire universelle, la géométrie, la géographie moderne; ce serait pour ne pas connaître les sciences spéciales à son art.

M. Lelièvre. - Je pense que la profession de pharmacien est assez importante pour qu'on exige des candidats les connaissances dont parle l'article dont nous nous occupons, et tel qu'il est amendé par la section centrale.

Il s'agit, messieurs, de rendre à la profession dont il s'agit la dignité et la considération qu'elle mérite, et dès lors il est essentiel de s'assurer que ceux qui la recherchent réunissent les connaissances qu'elle nécessite pour être exercée avec honneur.

Je ferai, du reste, remarquer qu'il est impossible d'admettre l'amendement de M. Devaux supprimant l'examen sur l'arithmétique, l'algèbre et les éléments de la géométrie, car l’honorable membre lui-même est forcé de maintenir l'examen sur les éléments de physique. Or, l'étude de la physique suppose nécessairement la connaissance de l'algèbre et de la géométrie.

D'un autre côté, puisque l'admission du pharmacien suppose des études sérieuses et approfondies, puisque le projet exigeant de lui des connaissances étendues a pour but de donner à cette profession le relief dont elle est digne, il est juste d'assurer à celui qui l'a conquise par son mérite, les droits et les prérogatives du doctorat énoncés au pénultième paragraphe de l'article 65. Maintenons donc cette disposition proposée par la section centrale. C'est la conséquence du régime introduit par le projet que réclament vivement le progrès de la science et les besoins de l'époque.

M. Delfosse, rapporteur. - L'honorable M. Devaux a dit qu'il est inutile au pharmacien de connaître les principaux faits de l'histoire (page 1731) universelle et l'histoire de la Belgique. Si cela est inutile an pharmacien, cela est également inutile au médecin, et cependant vous comprenez ces matières dans l'examen pour le grade d'élève universitaire, que les médecins doivent subir.

Je soutiens que la connaissance de l'histoire est nécessaire non seulement aux médecins et aux pharmaciens, mais à toutes les classes de la société, surtout à celles qui exercent des professions libérales. Je soutiens que l'étude de l'histoire développe l'intelligence et qu'elle rend l'homme plus apte aux devoirs qu'il est appelé à remplir dans la société.

L'honorable M. Lelièvre vient de prouver qu'il n'est pas possible d'étudier la physique sans connaître l'algèbre et la géométrie; c'est ce que j'avais dit. La chambre ne peut pas se rallier à l'amendement de M. Devaux, surtout en ce qui concerne ces deux sciences.

L'honorable M. Lelièvre a paru regretter que j'aie consenti, d'accord avec la majorité de la section centrale, à la suppression de l'avant-dernier paragraphe demandée par M. le ministre de l'intérieur. Ce paragraphe conférait aux pharmaciens les droits et les prérogatives du doctorat. Le but de ce paragraphe était de rendre les pharmaciens aides à devenir professeurs d'université; c'est qui avait engagé l'Académie de médecine à introduire ce paragraphe dans le projet. Mais comme je l'ai dit, tantôt, le gouvernement ayant le droit d'accorder des dispenses, les pharmaciens qui feront preuve d'un talent distingué pourront être nommés professeurs.

M. Orts. - Messieurs, j'appuie l'amendement de l'honorable M. Devaux. Je crois que la section centrale se fait une trop haute idée de la position spéciale des pharmaciens. Elle les place dans le domaine des connaissances beaucoup plus haut qu'elle n'a placé les notaires. Car la section centrale, qui exige du pharmacien un examen sur les éléments de la géographie, de l’histoire universelle, de l'histoire de la Belgique, sur l'algèbre jusqu'aux équations du second degré, sur les éléments de géométrie, n'exige ni l'histoire, ni la géographie du candidat-notaire; il doit seulement subir un examen sur les connaissances pratiques de sa profession. Or, il est incontestable que le notaire est placé dans une position où l'on a droit d'exiger de lui des garanties de sciences bien plus complètes que d'un simple pharmacien. Voilà pour la première partie de l'amendement.

Quant à la suppression de l'algèbre jusqu'aux équations du second degré, et des éléments de la géométrie, l'honorable M. Lelièvre l'a combattue en disant que puisqu'on exige du candidat en pharmacie un examen sur les éléments de physique, il est indispensable que ce candidat connaisse l'algèbre jusqu'aux équations du second degré, et les éléments de la géométrie. Je réponds à l'honorable M. Lelièvre que, s'il a étudié la physique, ce que je ne sais pas, ses souvenirs doivent te tromper complètement. L'algèbre jusqu'aux équations du second degré et les éléments de géomètre peuvent être utiles pour celui qui fait une étude complète de la physique; mais ces connaissances sont complètement inutiles pour les éléments de la physique.

M. de Theux. - Messieurs, il est évident qu'on verse ici dans un extrême; en exigeant des connaissances aussi multipliées des pharmaciens, vous courez risque de voir réduire le nombre des pharmaciens, au lieu que, depuis longtemps on désire en voir le nombre augmenter.

Ce qu'on demande aujourd'hui pour la pharmacie peut amener le même résultat que celui dont nous avons été témoins pour la médecine. On a exigé pour la médecine des connaissances telles qu'aujourd'hui dans les campagnes, il y a manque de médecins. C'est un fait qui est reconnu depuis longtemps, et l'on sera obligé d'aviser à des mesures pour amener les médecins à aller s'établir dans les nombreuses localités de la campagne où il en manque aujourd'hui, au grand détriment des populations.

Il y a donc lieu d'adopter l'amendement de l'honorable M. Devaux.

M. Lelièvre. - Le langage que vient de tenir l'honorable M. Orts m'autorise à croire qu'il ne s'est guère occupé de physique. Mais tous les hommes de la science savent qu'il est impossible d'étudier la physique sans être versé dans les mathématiques et notamment ans connaître l'algèbre et même les éléments de la géométrie. Cela est si vrai que dans les athénées et collèges la physique fait partie du cours des mathématiques supérieures.

Impossible même, sans cette connaissance, de consulter avec fruit un ouvrage de physique qui fourmille de formules algébriques. En conséquence, il est évident qu'il faut maintenir l'algèbre et la géométrie au nombre des matières sur lesquelles doit porter l'examen préalable au grade de candidat en pharmacie.

Je répondrai maintenant un mot à l'honorable M. Delfosse. Il est à remarquer que l'article 13 de la loi de 1835 autorise bien le gouvernement à conférer le titre de professeur aux hommes distingués qui ont mérité cette faveur par des motifs spéciaux; mais, messieurs, c'est là une disposition exceptionnelle qui ne peut être appliquée que dans de rares hypothèses.

Quant à moi, je veux que tous les pharmaciens qui, en subissant l'examen sérieux que le projet exige d'eux, mériteront leur rang et leur titre, jouissent des prérogatives du doctorat, et par conséquent puissent être promus aux fonctions de professeurs. Ce n'est pas par exception que cet honneur doit leur être déféré, le titre de leur nomination suffit, puisqu'ils ne peuvent l'obtenir qu'en faisant preuve d'une aptitude et de connaissances variées qu'il est juste de récompenser. Je persiste donc à demander le maintien du paragraphe en discussion, il n'a été proposé par la section centrale qu'après mûre délibération.

M. Veydt. - Messieurs, je viens appuyer le maintien de l'article proposé par la section centrale, même avec le paragraphe portant que « les droits et les prérogatives du doctorat sont attachés au titre de pharmacien, obtenu conformément aux dispositions de la loi, » auquel j'ai vu avec regret que l'honorable rapporteur de la section centrale était disposé à renoncer.

C'est à la suite d'instances du corps des pharmaciens, dont les délégués ont, je crois, fait connaître les vœux à la section centrale, et qui nous ont été révélés par diverses pétitions, qu'on est arrivé à relever les études qui seront désormais requises pour obtenir le diplôme de pharmacien. Les hommes compétents et qui ont à cœur le progrès de ces études, qui sont une garantie précieuse pour toute la société, désiraient même aller plus loin que le projet formulé par la section centrale, sur l'avis de l'Académie de médecine. Suivant moi, il faut que la chambre se montre disposée à seconder cet élan, cette tendance vers un enseignement plus complet, plus en harmonie avec les progrès faits dans d'autres branches scientifiques.

Quels sont les retranchements que l'honorable M. Devaux a en vue? D'une part les éléments de géographie moderne, les principaux faits de l'histoire universelle, l'histoire de la Belgique; d'autre part, les éléments de la géométrie et de l'algèbre. Pour ce qui est de l'histoire et de la géographie, il ne faudra pas un grand effort au candidat pour être en état de répondre, et quoique ces connaissances ne soient pas indispensables à la profession qu'il veut exercer, il serait fâcheux qu'il les ignorât, parce qu'il n'aurait pas été stimulé à s'en instruire. Quant aux éléments de géométrie et d'algèbre, je suis entièrement de l'avis de l'honorable M. Lelièvre : ces connaissances sont indispensables au pharmacien.

Vous exigez qu'il connaisse la physique; mais on ne peut lire un livre de physique, même élémentaire, sans être arrêté aux premières pages, si on n'a pas des notions d'algèbre et de géométrie. Et c'est à la connaissance de la physique et de la chimie que sont dues tant de découvertes utiles, dont les résultats contribuent, chaque jour, aux progrès de l'industrie et des arts. Il n'est pas de corps scientifique qui, sous ce rapport, ait rendu plus de services que les pharmaciens, que je confonds ici avec les chimistes, et qui est appelé à en rendre plus encore, quand vous aurez ajouté aux connaissances requises jusqu'à présent.

C'est dans ce même but de stimuler à faire des études plus complètes, que je verrais avec plaisir que ceux qui sont arrivés honorablement au but pussent réclamer les droits et les prérogatives du doctorat, quand même ce ne ferait pas pour occuper une chaire à une université. Je déposerai, en conséquence, une proposition tendant au maintien de l'avant-dernier paragraphe de l'article en discussion.

M. Delfosse, rapporteur. - L'honorable M. Veydt, avec lequel je suis d'accord sur presque tous les points, a été mal informé puisqu'il a cru que la section centrale s'était mise en rapport avec le corps des pharmaciens. La section centrale ne s'est mise en rapport ni avec le corps des pharmaciens, ni avec le corps des médecins, ni avec le corps des notaires, ni avec le corps des avocats.

Mais la section centrale a pris communication des pétitions qui ont été adressées à la chambre, ainsi que des délibérations de l’Académie de médecine; et ce n'est qu'après avoir mûrement réfléchi, qu'elle a cru pouvoir s'arrêter au projet soumis à la chambre.

On est dans l'erreur, lorsqu'on croit que ce projet pousse les exigences très loin. On n'exige de l'aspirant pharmacien qu'une partie de ce qui est exigé pour le grade d'élève universitaire.

De toutes les matières que nous comprenons dans les trois examens auxquels les candidats pharmaciens seront soumis, il n'y eu a que deux qu'on puisse à la rigueur retrancher. Toutes les autres sont absolument nécessaires. Le français, on ne peut pas s'en passer; le latin, c'est de toute nécessité pour le pharmacien ; l'arithmétique, l'algèbre cl la géométrie, on a démontré qu'il était impossible d'étudier utilement la physique sans la connaissance préalable de ces branches des mathématiques.

On ne pourrait donc retrancher que les cléments de la géographie et les principaux faits de l'histoire universelle et de l'histoire de la Belgique. Croit-on que celui qui aura fait les études requises de l'aspirant pharmacien, n'aura aucune connaissance de la géographie, de l'histoire universelle et de l’histoire de la Belgique ?

Messieurs, on est encore revenu sur le paragraphe dont M. le ministre de l'intérieur propose la suppression. La section centrale avait cru devoir insérer ce paragraphe, sur l'avis de l’Académie de médecine. Cependant, il y avait quelques raisons pour ne pas accorder aux pharmaciens les prérogatives du doctorat. On n'exige d'eux ni le grade d'élève universitaire, ni le grade de candidat en sciences naturelles.

D'un autre côté, le seul but pour lequel on réclamait cette prérogative, c'était de rendre possible leur nomination aux fonctions de professeur à l'université. L'honorable M. Lelièvre objecte que si le paragraphe est supprimé il faudra une dispense et que le gouvernement ne pourra l'accorder qu'a ceux qui se seraient distingués; l'honorable M. Lelièvre croit-il que le gouvernement devrait accorder une place de professeur à l'université à un pharmacien qui n'aurait pas fait preuve de grandes connaissances alors même qu'il serait docteur? Les places de professeurs de l'université doivent être réservées aux hommes qui occupent une place éminente dans la science.

Si le pharmacien désire être nommé professeur sans dispense, il peut obtenir le grade de docteur en sciences naturelles; il peut l'obtenir sans se soumettre aux épreuves préparatoires, il lui suffit de passer le dernier examen pour ce grade.

(page 1732) M. Devaux. - L'honorable M. Delfosse vient de traiter comme rien les principaux faits de l'histoire universelle; il traite cela comme une bagatelle ; les principaux faits de l’histoire depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, ce qui comprend l’histoire ancienne, l'histoire du moyen âge et l'histoire moderne ; il y a là de quoi occuper l'élève pendant bien du temps.

Le pharmacien doit connaître l'algèbre et la géométrie ; la chambre n'a pas besoin de se préoccuper de la question de savoir jusqu'à quel point il faut connaître la géométrie pour étudier la physique expérimentale. Du moment qu'on peut l'interroger sur la physique, il est inutile de le faire interroger sur les mathématiques; s'il connaît la physique et qu'il le prouve par son examen, il prouve par cela même qu'il possède les connaissances préalables nécessaires à l’étude de cette science.

M. Ch. de Brouckere. - Messieurs, je ne dirai que quelques mots sur une question de fait ; l'honorable préopinant soutient que si l'on a besoin de connaître les mathématiques pour étudier la physique, nous ne devons pas nous en occuper, parce que si on répond sur la physique, tout est dit. Ace compte, vous pouvez simplifier la loi. Demandez un examen sur la partie la plus élevée des sciences mathématiques pour l'obtention du doctorat, et cela suffira; car tout s'enchaîne dans les sciences exactes, et l'élève aura dû étudier et savoir tout ce qui fait partie des examens avant d'aborder la mécanique céleste.

Mais si l'on doit nécessairement savoir et les éléments de la géométrie et l'algèbre, pour ouvrir un livre de physique, il ne s'ensuit pas qu'on ne pourrait réussir à passer un examen sur la physique sans savoir ni l'algèbre, ni la géométrie ; parce que l'examinateur se borne à adresser deux ou trois questions de physique et que si le candidat a eu le bonheur d'être interrogé sur quelques questions qui ne demandent la connaissance d'aucune science préparatoire; il pourra réussir. Non seulement on ne peut pas étudier la physique sans connaître les mathématiques élémentaires, mais on ne peut pas étudier la chimie, qui est presque une science exclusive des mathématiques, on ne peut pas étudier la cristallographie, qui tient le milieu entre la chimie et la minéralogie, sans connaître la géométrie.

- La discussion est close.

M. le président. - Je vais mettre aux voix le retranchement de « l'algèbre jusqu'aux équations du second degré inclusivement, les éléments de géométrie. »

- Plusieurs membres. - L'appel nominal !

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je veux demander si la chambre entend procéder à l'avenir par appel nominal sur des questions d'un ordre tout à fait secondaire, quand elle a voté par assis et levé sur des articles importants.

- Un membre. - C'est un droit !

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je ne conteste pas te droit, mais il ne faut pas faire abus d'un droit en votant par appel nominal sur des points ou des virgules.

M. le président. - Aux termes du règlement, l'appel nominal étant demandé par plus de 5 membres, je dois y faire procéder.

M. Devaux. - Pour ne pas condamner la chambre à cinq appels nominaux qu'on veut lui faire subir, j'abandonne la partie de mon amendement qui concerne l'algèbre et les éléments de géométrie. Je le maintiens pour le texte, et je demande pardon à la chambre de l'avoir entraînée dans une discussion qu'on veut faire aboutir à une perte de temps considérable par des appels nominaux dont je ne comprends pas les motifs et que je ne pouvais prévoir.

- La suppression des éléments de géographie moderne et des principaux faits de l'histoire universelle est adoptée.

La suppression de l'histoire de la Belgique n'est pas adoptée.

L'avant-dernier paragraphe du projet de la section centrale ainsi conçu: « Les droits et les prérogatives du doctorat sont attachés au titre de pharmacien, obtenu conformément aux disposition de la présente loi » est mis aux voix; il n'est pas adopté.

- La chambre décide qu'avant de passer aux dispositions transitoires elle s'occupera des premiers articles du projet de loi.

Titre I. De l'enseignement supérieur aux frais de l'Etat

Chapitre I. Des universités
Article 3

« Art. 3 (projet de la section centrale auquel le gouvernement se rallie) :

« L'article 3 est remplacé par le suivant :

« L'enseignement supérieur comprend :

« Dans la faculté de philosophie et lettres :

« La littérature orientale ;

« L'anthropologie, la logique et la philosophie morale;

« La métaphysique;

« La littérature grecque ;

« La littérature latine;

« L'esthétique;

« La littérature française ;

« La littérature flamande ;

« Les antiquités romaines ;

« L'archéologie ;

« L’histoire politique de l'antiquité;

« L'histoire politique du moyen âge;

« L'histoire politique de la Belgique;

« L’histoire de la philosophie ancienne et moderne ;

« L’histoire politique moderne ;

« L'économie politique ;

« Les antiquités grecques ;

« L'histoire de la littérature ancienne. »

M. Orts. -— Je demanderai s'il ne serait pas plus logique, vu la décision prise par la chambre, de renvoyer l'économie politique à la faculté de droit, la seule qui comprenne cette science comme matière d'examen.

Je ferai également remarquer que ce transfert serait motivé par une autre considération : c'est que d'ici à longtemps on ne trouvera guère pour l'enseignement de l'économie politique que des personnes appartenant à la faculté de droit.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - L'économie politique a toujours fait partie de la faculté de philosophie et lettres. Il peut arriver que le professeur d'économie politique soit appelé à donner un cours d'histoire politique qui rentre dans la faculté de philosophie et lettres. De ce que l'économie politique n'est pas exigée du docteur en philosophie et lettres, il ne s'ensuit pas que celui qui se destine à la carrière de l'enseignement et qui recherche le grade de docteur en philosophie et lettres, ne désire pas suivre, pour son instruction particulière, le cours d'économie politique.

En général les jeunes gens qui se destinent à la carrière de l'enseignement seront ces jeunes gens studieux qui suivront les cours où ils croiront pouvoir puiser des connaissances utiles, alors qu'elles ne seraient pas comprises dans l'examen final.

Je crois donc qu'il faut maintenir l'économie politique où elle s'est toujours trouvée, c'est-à-dire à la faculté de philosophie.

- La première partie de l'article 3 est adoptée.

La chambre passe à la deuxième partie de l’article, ainsi conçue :

« Dans la faculté des sciences mathématiques, physiques et naturelles :

« La haute algèbre et la géométrie analytique ;

« La géométrie descriptive avec ses applications à la perspective aux ombres, à la coupe des pierres et à la charpente ;

« Le calcul différentiel et intégral ;

« La théorie des probabilités et l'arithmétique sociale ;

« La mécanique analytique et les éléments de mécanique céleste ;

« La théorie des machines y compris le calcul de leur effet et les applications à l'industrie ;

« L'astronomie physique;

« La physique expérimentale ;

« La physique industrielle :

« Les éléments de physique mathématique ;

« La chimie inorganique et organique ;

« La chimie appliquée ;

« La minéralogie ;

« La géologie y compris la géographie physique ;

« La botanique y compris l'anatomie, la physiologie et la géographie des plantes ;

« La zoologie ;

« L'anatomie et la physiologie comparées. »

M. Delfosse, rapporteur. - Je crois qu'il est dans l'intention de M. le ministre de l'intérieur de faire quelque changement à cet article. Au lieu de « les éléments de mécanique céleste », il faudrait dire « la mécanique céleste », puisque à l’article relatif aux matières d'examen nous avons décidé que le candidat en sciences devrait passer son examen sur la mécanique céleste. Par la même raison, au lieu de « les éléments de physique », il faudrait dire « la physique mathématique ». Et après les mots « géographie des plantes », ajouter les mots : « les familles naturelles ».

Enfin je crois qu'il entre dans les intentions de M. le ministre de l'intérieur, de supprimer le mot « physique » après le mot « astronomie ». Il faut qu'on enseigne l'astronomie physique et l'astronomie mathématique; l'une et l'autre tout partie des examens.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai, en effet, à proposer quelques changements qui résultent du règlement des matières d'examen et d'autres renseignements qui me sont parvenus depuis la rédaction du projet de loi.

D'abord, pour mettre cette partie en rapport avec le programme des universités, au lieu de : « le calcul différentiel et intégral » il faut dire; « l'analyse (calcul différentiel et intégral). »

Au lieu de dire :« la mécanique analytique et les éléments de mécanique céleste, » il faut: « la mécanique analytique et la mécanique céleste. »

Au lieu de : « l'astronomie physique, » il faut dire simplement : « l'astronomie. »

Au lieu de : « les éléments de physique mathématique, » il faut: « la physique mathématiques »

Enfin, il faut ajouter : « les familles naturelles. »

- Le paragraphe, modifié comme le proposent M. le rapporteur et M. le ministre de l’intérieur, est adopté.

« Dans la facilité de droit :

« L'encyclopédie du droit ; l'histoire et les institutes du droit romain ;

« La philosophie du droit;

« Les pandectes ;

« Le droit public interne et externe ;

« Le droit administratif ;

« Les éléments du droit civil moderne (exposé des principes généraux) ;

« Le droit civil moderne;

(page 1733) « Le droit criminel, y compris le droit militaire; La procédure civile, l'organisation et les attributions judiciaires ;

« Le droit commercial;

« La science du notariat;

« (Lois organiques du notariat et lois financières qui s'y rattachent.) »

M. Deliége. - Il me semble que cette partie de l'article : « La science du notariat (lois organiques du notarial et lois financières qui s'y rattachent) devrait être aussi renvoyée à la section centrale pour savoir si, dans la science du notariat, on comprendra l'explication approfondie des articles du Code civil qui s'y rattachent.

- Le renvoi de cette partie du paragraphe à la section centrale est adopté.

Les autres dispositions du paragraphe sont adoptées.

« Dans la faculté de médecine :

« L'encyclopédie et l'histoire de la médecine ;

« L'anatomie humaine (générale et descriptive) ;

« L'anatomie pathologique;

« La physiologie humaine et la physiologie comparée dans ses rapports avec la première;

« L'hygiène publique et privée;

« La pathologie générale;

« La thérapeutique générale, y compris la pharmacodynamique;

« La pharmacologie et les éléments de pharmacie ;

« La pharmacie théorique et pratique;

« La pathologie et la thérapeutique spéciale des maladies internes;

« La clinique interne;

« La pathologie chirurgicale ;

« La médecine opératoire;

« La clinique externe ;

« Le cours théorique et pratique des accouchements;

« La médecine légale. »

- Adopté.

Article 5

« Art. 5. L'article 5 est remplacé par la rédaction suivante :

« Les cours sont annuels, semestriels et trimestriels.

« Ils comprennent quatre ou cinq heures de leçons par semaine.

« Toutefois le nombre de leçons prescrit pour un cours semestriel peut être réparti sur toute l'année. Le nombre de leçons prescrit pour un cours trimestriel peut être réparti sur un semestre ou sur toute l'année.

« Pour les écoles spéciales annexées aux facultés des sciences et pour les écoles normales, la durée des cours est déterminée par le gouvernement.

« Il en est de même des cours qui, à l'article 3 de la présente loi, ne sont indiqués ni comme annuels, ni comme semestriels, ni comme trimestriels. Ces cours sont inférieurs en durée aux cours trimestriels, et le gouvernement peut les adjoindre à un autre cours.

« Le gouvernement, après avoir pris l'avis de la faculté, peut réunir deux cours trimestriels en un cours semestriel et deux cours semestriels en un cours annuel, ou diviser un cours annuel en deux cours semestriels et un cours semestriel en deux cours trimestriels.

« Les programmes des cours sont soumis à l'approbation du gouvernement. »

La section centrale propose d'ajouter au paragraphe premier : « de telle sorte que les élèves n'aient pas plus de quatre heures de leçons par jour. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je me rallie à la rédaction de la section centrale. Elle propose un amendement qui a pour but de limiter le nombre d'heures que l'élève devra consacrer à l'audition des leçons. Elle a fixé 4 heures comme maximum. On pense que ce maximum est encore trop élevé; que trois heures de leçons obligatoires suffisent pour absorber l'attention de l'élève.

J'ai fait l'application du nombre de trois heures au nombre de cours qui doivent être suivis,, et j'ai trouvé qu'avec trois heures, l'élève pourrait suivre convenablement tous les cours qui lui sont imposés. Seulement il ne faudrait pas comprendre dans ces trois heures les leçons de clinique et les exercices pratiques : au moyen de cette exception, je pense que nous pourrions réduire le nombre de quatre heures à trois.

Messieurs, nous faisons une loi surtout dans l'intérêt des études, dans l'intérêt des élèves. La plupart d’entre nous ont suivi les universités, et nous savons ce qu'était la quatrième et la cinquième heure de leçon. L'élève est en quelque sorte épuisé; c'est une leçon perdue pour lui. Je crois qu'avec trois heurts de leçons attentivement suivies et les études solitaires qui doivent suivre, il fera plus de progrès qu'avec des leçons trop prolongées.

Je pense donc que nous pouvons descendre à trois heures, en ajoutant : « non compris la clinique et les exercices pratiques. »

M. Delfosse, rapporteur. - Nous sommes d'accord avec M. le ministre de l'intérieur. Si nous avons fixé à quatre heures le maximum des heures de leçon, c'est que nous avons cru que dans certains cas, très rares à la vérité, il pourrait être utile d'atteindre ce chiffre. Mais dans notre opinion, comme dans celle de M. le ministre de l'intérieur, il faut, autant que possible, réduire à trois heures les leçons de chaque jour.

Si d'un côté M. le ministre de l'intérieur réduit le maximum de quatre heures à trois, il ajoute, d'un autre côte, ce qui n'était pas dans le projet de la section centrale : « non compris la clinique et les exercices pratiques. » Il n’y a donc pour ainsi dire pas de différence entre le dernier projet de M. le ministre et l’amendement de la section centrale.

Nous sommes d'accord au fond, Mais M. le ministre de l'intérieur m'avait communiqué une nouvelle réduction, la voici :

« Les cours sont annuels, semestriels ou trimestriels; ils comprennent 4 ou 3 heures de leçons par semaine, de telle sorte que les élèves n'aient pas plus de 3 heures de leçons par jour, non compris les cliniques et les exercices pratiques. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je crois qu'il faut dire : « La durée des cours est déterminée par le gouvernement de telle sorte que les élèves n'aient pas plus de 3 heures de leçons par jour, non compris les cliniques et les exercices pratiques. »

M. Delfosse. - J'ai fait connaître la rédaction qui m'avait été communiquée par M. le ministre de l'intérieur. M. le ministre en propose une autre, c'est à la chambre à décider.

- La rédaction proposée par M. le ministre de l'intérieur est mise aux voix et adoptée.

Chapitre V. Des autorités académiques
Article 17

« Art. 17. A l'article 17 est ajouté le paragraphe suivant :

« Dans tous les cas, le recteur est nommé pour trois ans, sauf révocation. »

- Adopté.

Chapitre V. Des étudiants
Articles 19 à 21

M. le président. - M. le ministre se rallie-t-il à la rédaction proposée par la section centrale à l'article 19 ?

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - J'ai communiqué un autre article à la section centrale.

M. Delfosse, rapporteur. - La section centrale n'a pas examiné cet article. Je vais le faire connaître à la chambre. Voici comment il est conçu :

« Art. 19. L'étudiant porté au rôle prend une inscription générale qui lui donne le droit de fréquenter tous les cours relatifs aux matières de l'examen qu'il a l'intention de subir.

« Il paye, pour cette inscription, 250 francs par an, pour la faculté de droit, et 200 francs pour les autres facultés.

« Le gouvernement, sur l'avis conforme de la faculté, peut autoriser l'inscription isolée à certains cours. Pour ce cas, il fixe le taux des rétributions.

M. le ministre propose ensuite un article 20 et une nouvelle rédaction de l'article 21. Ces propositions sont ainsi conçues :

« Art. 20. L'étudiant qui a payé une inscription annuelle peut suivre gratuitement, les années suivantes, les cours à la fréquentation desquels cette inscription lui donnait droit. »

« Art. 21. Le produit des inscriptions est partagé entre tous les professeurs et agrégés qui ont donné les cours, d'après les bases à déterminer par le gouvernement,

Le gouvernement fixe, s'il y a lieu, les rétributions à payer pour les leçons de manipulation et d'opération. Ces rétributions sont perçues au profit de ceux qui ont donné ces cours. »

Plusieurs membres. - Le renvoi à la section centrale !

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, la section centrale n'a pas eu le temps d'examiner les articles dont l'honorable rapporteur vient de donner lecture et qui constituent un nouveau système. Je ne doute pas qu’au moyen des explications, qui seront données par la section centrale, la chambre n'adopte ce système, qui est une imitation de ce qui se pratique dans les établissements libres.

- Le renvoi à la section centrale est mis aux voix et prononcé.

Chapitre V. De la surveillance et de l'administration des universités de l'Etat
Article 25

M. le président. - La section centrale propose un article 25 ainsi conçu :

« Art. 25. L'article 25 est remplacé par la disposition suivante : Il y a pour les deux universités de l'Etat un commissaire du gouvernement sous le titre d'inspecteur des universités de l’État.

« Ce fonctionnaire est nommé par le Roi et jouit d'un traitement de 6,000 francs.

« Il réside à Bruxelles. »

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Messieurs, cette proposition, ainsi que cela résulte d'ailleurs d'un passage de l'exposé des motifs, cette proposition a été faite par la commission qui a bien voulu donner ses conseils au gouvernement pour la rédaction du projet de loi. Le gouvernement n'a pas cru pouvoir se rallier à la suppression de l'administrateur-inspecteur attaché à chacune des universités et au remplacement de ces deux administrateurs par un seul fonctionnaire résidant à Bruxelles.

Au point de vue de l'économie, le gouvernement n'a pas vu d'avantage dans cette proposition. Il faudrait créer deux fonctions nouvelles pour tous les soins journaliers qu'exige l’administration des universités, l'administration du matériel, la surveillance des dépenses qu’il occasionne. Il faudrait au moins une économie qui remplirait cette partie des attributions confiées aujourd’hui à l’administrateur-inspecteur ; le traitement de ce nouveau fonctionnaire devra être de 2,000 à 3,000 fr., ce qui ferait 6,000 fr. pour les deux universités.

D’après l’étendue des attributions des administrateurs-inspecteurs, je crois qu’il y aurait plus d’inconvénients que d’avantages à supprimer ces fonctions au point de vue administratif. Pour moi, au moins, l’expérience n’a pas encore parlé assez haut pour démontrer l’opportunité (page 1734) de cette suppression. Si, plus tard, je reconnaissais qu'il fût plus utile d'avoir pour les deux universités un seul inspecteur, résidant à Bruxelles, au lieu des deux administrateurs-inspecteurs actuels, je pourrais proposer même une modification sous ce rapport; mais dans l'état actuel des choses, je craindrais d'entraîner une sorte de désorganisation dans l'administration, en supprimant le haut fonctionnaire attaché à chacune des deux universités.

M. Delfosse, rapporteur. - Messieurs, comme M. le ministre de l'intérieur vient de le dire, la commission qui avait été chargée d'aborder le projet de loi avait proposé la suppression des administrateurs-inspecteurs des deux universités de l'Etat, qui eussent été remplacés par un inspecteur unique pour les deux universités, résidant à Bruxelles, et s'occupant, sous la surveillance de M. le ministre de l'intérieur, des questions relatives à l'enseignement.

Cette résolution, prise par la commission, a laissé des traces dans l'exposé des motifs. M. le ministre de l'intérieur justifie dans cet exposé la résolution qu'il a prise d'assigner aux fonctions de recteurs une durée de trois années, en disant que ce changement à la durée des fonctions de recteur devient surtout désirable en présence des modifications qu'on introduit dans le chapitre VII de ce titre aux articles 25, 26 et 27. D'après l'exposé des motifs il devait donc y avoir dans le projet de loi trois articles qui ne s'y trouvent pas. Ces articles se trouvent encore indiqués en tête du projet de loi. Le premier article porte :

« La loi du 27 septembre 1835, concernant l'enseignement supérieur, est modifiée de la manière indiquée ci-après dans les articles 3... etc., 25, 26, 27..., etc.

Ainsi, d'après l'exposé des motifs, et d'après le commencement de l'article premier du projet de loi, on annonce l'intention de modifier les articles 25, 26 et 27 de la loi de 1835, et ces modifications consistaient en ce qu'au lieu de deux administrateurs-inspecteurs, il n'y aurait plus qu'un seul inspecteur, résidant à Bruxelles.

Je regrette que M. le ministre de l'intérieur n'ait pas cru devoir se rallier à la proposition de la section centrale, proposition qui était celle de la commission que M. le ministre avait chargée d'élaborer le projet de loi.

Le principal motif qui a engagé la section centrale à adopter cette proposition, n'est pas une question d'économie ; c'est une question de bonne administration.

L’expérience a prouvé qu'il peut y avoir des conflits entre le recteur et l’administrateur-inspecteur des universités de l'Etat. Il est très difficile de préciser d'une manière nette la ligne de démarcation qui sépare les attributions du recteur de celles de l’administrateur-inspecteur. De là des conflits que la proposition de la section centrale ferait disparaître.

Il y aurait, en outre, une raison d'économie ; mais cela, comme je le disais tantôt, n'est que secondaire. Chaque inspecteur-administrateur jouit d'un traitement de 6,000 fr. Je ne sais ce qui se passe à Gand ; mais à Liège, l'administrateur jouit d'un traitement supplémentaire de 2,000 fr. il a donc en tout 8,000 fr. ; il occupe en outre une partie assez considérable des bâtiments de l'université.

M. le ministre de l'intérieur ne donne qu'un motif pour repousser la proposition de la section centrale; il dit que si on supprimait les inspecteurs-administrateurs, il faudrait dans chaque université un économe pour le matériel.

Je répondrai à M. le ministre de l'intérieur que cet employé existe déjà en quelque sorte. L'administrateur a un commis sous ses ordres; ce commis touche annuellement de 1,200 à 1,500 fr. Le conseil académique a, en outre, un secrétaire, qui reçoit une indemnité sur le produit des rétributions des élèves. On pourrait confier les fonctions de secrétaire du conseil académique et celles d'économe à un seul employé, qui toucherait, à titre de traitement, les sommes que récrivent actuellement le secrétaire du conseil académique et le commis de l'inspecteur-administrateur.

Si M. le ministre de l'intérieur entrait dans la voie que j'indique, on économiserait entièrement le traitement de l'un des deux administrateurs.

M. le ministre de l'intérieur dit que ce changement pourrait désorganiser l'administration.

Je ne vois pas en quoi on désorganiserait l'administration. Vous avez d'abord le recteur qui sera désormais nommé pour trois ans, et qui doit vous inspirer une entière confiance. Vous avez ensuite, pour les diverses collections, des fonctionnaires qui doivent aussi tous inspirer quelque confiance. Ainsi pour la bibliothèque, vous avec un bibliothécaire ayant rang de professeur. Pour les autres collections, vous avez des conservateurs, des hommes spéciaux.

L'Etat était chargé autrefois des travaux d'entretien et de réparation aux bâtiments de l'université. Depuis la loi de 1835, cette dépense est à la charge de la ville. C'est l'administration communale qui doit veiller à ce que ces dépenses se fassent convenablement et sans exagération.

Je ne vois pas réellement en quoi l'administration serait désorganisée par l'adoption du projet de la section centrale.

L'administrateur-inspecteur d'une université doit être un homme d'une haute intelligence, en état d'apprécier la marche des professeurs, d'avoir un avis sur les questions les plus difficiles de l’enseignement supérieur ; il occupe une position élevée. Un tel fonctionnaire ne peut guère descendre aux petits détails d'administration, dont M. le ministre de l'intérieur paraît surtout se préoccuper ; je pense que tout irait mieux si ces détails étaient confiés à un employé d'un ordre moins élevé, placé sous la surveillance du recteur et soumis, en outre, au contrôle de l’inspecteur résidant à Bruxelles, qui devrait faire quatre tournées pur an pour s'assurer de l'exécution des règlements ; au besoin, ces visites pourraient être plus fréquentes.

Un grand avantage de la mesure proposée par la section centrale, c'est que cet inspecteur, lorsqu'il ne serait pas en tournée, pourrait seconder utilement M. le ministre de l'intérieur dans les travaux relatifs à l'enseignement.

Voilà, messieurs, les raisons qui ont engagé la section centrale à adhérer aux vues de la commission qui a élaboré le projet de loi, et à rétablir dans le projet les trois articles qui s'y trouvaient primitivement, comme on le voit par l'exposé des motifs et par l'article premier du projet de loi.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Il s'agit ici d'une question d'administration qui concerne plus particulièrement le gouvernement. Si l'expérience venait à me démontrer que l'existence d'un seul administrateur-inspecteur est préférable à l’existence de deux, le changement pourrait se faire ultérieurement par une proposition spéciale. Je demande qu'on laisse au gouvernement le soin de faire l'expérience entière. Je reconnais l'utilité de faire représenter les universités à Bruxelles, et le projet de loi y a pourvu. L'honorable rapporteur a perdu de vue la disposition nouvelle de l'article 28 qui crée un conseil supérieur de renseignement, qui se réunira tous les ans sous la présidence du ministre.

De la manière dont on vient de parler de l'administrateur central des universités, ce serait un personnage à rétribuer autrement que par un traitement de 6 mille francs. Si vous voulez avoir un savant, un homme de haute capacité, le traitement de 6 mille francs ne suffira pas; et loin de faire une économie, vous aurez augmenté la dépense, car l'administrateur-inspecteur, détaché de l'université, ne pourra pas être remplacé par le commis qui l'aide en ce moment dans ses fonctions. Si vous ne voulez pas qu'on fasse abus des dépenses pour le matériel, il faudra nommer un autre fonctionnaire pour les surveiller. Vous dépensez des sommes considérables pour les bibliothèques, les jardins, pour les collections, le chauffage; vous ne pouvez pas soustraire ces dépenses à un contrôle sévère; un employé inférieur n'aurait pas assez d'autorité sur ceux qui consomment ou achètent, pour que les finances de l’Etat soient suffisamment sauvegardées. Si vous déplacez l'administrateur-inspecteur, il faut, dans l'intérêt de l'économie, le remplacer par un fonctionnaire assez important pour être respecté.

Le recteur, à qui on peut remettre une partie des attributions de l'administrateur-inspecteur, la partie scientifique, ne pourrait pas s'occuper de celle qui concerne le matériel; le recteur est un professeur; les professeurs ne sont pas chargés de veiller à l'économie; ils sont plutôt intéressés à faire certaines dépenses pour les bibliothèques, les collections, ils sont naturellement portes à les enrichir; si vous n'avez pas à côté d'eux un comptables sévère, je crains qu'on ne soit entraîné dans des dépenses plus considérables qu'aujourd’hui.

Cependant je ne rejette pas d'une manière absolue le principe de la proposition, je demande qu'on laisse au gouvernement le temps d'examiner. Il s'agit, je le répète, d'une question d'administration. Les universités de l'État seront-elles mieux conduites avec un administrateur central qu'avec deux? C'est là une question indépendante de la loi qui nous occupe et qui peut se résoudre par une proposition spéciale à l'occasion du vote du budget.

M. Dumortier. - Je pense que le changement qu'on propose, au lieu d’amener une économie, augmenterait la dépense qu'occasionnent les inspecteurs-administrateurs des universités. Aujourd'hui, il y a près de chaque université un inspecteur-administrateur au traitement de 6,000 fr., on voudrait les supprimer et les remplacer par un administrateur central résidant à Bruxelles; il faudrait lui accorder des frais de voyage considérables qui n'existent pas aujourd'hui. D'un autre côté des deux administrateurs-inspecteurs actuels, il faudrait mettre l'un au traitement d'attente ; ensuite vous devriez avoir un fonctionnaire quelconque pour remplir les fonctions de ces administrateurs ; toutes ces dépenses additionnées dépasseraient certainement celles qui se font aujourd'hui. Ce n'est pas tout ; il est à remarquer qu'un administrateur-inspecteur en permanence est indispensable dans les universités; il peut y avoir des collisions entre les élèves et les professeurs; quand l'inspecteur sera à Bruxelles, qui pourra rétablir la paix ?

Cela arrive encore assez souvent. Ce n'est pas l'inspecteur résidant à Bruxelles qui pourra rétablir la paix. Ce serait faire acte de mauvaise administration que de ne pas maintenir, comme le demande le gouvernement, ce qui a été établi à cet égard par l'ancienne loi.

M. Delfosse. - On n'a pas répondu à la principale raison que j'ai fait valoir en faveur de la substitution d'un inspecteur central aux deux administrateurs-inspecteurs des universités de l'Etat. J'ai dit qu'il y a parfois des conflits entre le recteur et l'inspecteur-administrateur ; on n'a rien répondu à cela. Il y aurait encore un autre avantage, dont je n'avais pas parlé, à remplacer les deux administrateurs-inspecteurs par un inspecteur central; on établirait par là plus d'unité dans l’enseignement supérieur; il est désirable que cette unité existe; il est désirable que le gouvernement ne se mette pas à Gaud en opposition avec les actes qu'il pose à Liège et vice versa.

(page 1735) M. le ministre de l'intérieur dit que j'ai perdu de vue l’article 28 portant qu'il y aura tous les ans à Bruxelles une réunion de professeurs sous sa présidence. C'est M. le ministre qui perd cet article de vue en combattant notre proposition; car cet article porte aussi que les professeurs réunis délibéreront sous la présidence du ministre, de concert avec l’inspecteur-administrateur, ce qui suppose qu'il n'y en aura plus qu'un seul pour les deux universités.

On prétend qu'il n'y aura pas d'économie, parce qu'il faudra confier le contrôle des dépenses à un employé, dont le traitement devra être de plusieurs milliers de francs; mais n'ai-je pas dit que le secrétaire du conseil académique et le commis de l'inspecteur-administrateur pourraient être remplacés par un seul employé qui ne coûterait pas plus que les deux autres n'ont coûté jusqu'ici, et qui seront chargés, sous la surveillance du recteur, de tout ce qui concerne le matériel? Si cet employé est honnête, si on le choisit bien, il rendra dans cette partie plus de services que l'administrateur-inspecteur qui, dans la position élevée qu'il occupe, ne peut guère, comme je l'ai dit, descendre aux petits détails d'administration. Quant aux frais de tournées de l'inspecteur, ils ne seraient pas aussi considérables que M. Dumortier le croit, et ils seraient amplement compensés par la valeur locative des bâtiments que l'inspecteur-administrateur occupe au moins à Liège.

On dit encore que l'administrateur est utile pour faire cesser les conflits qui s'élèvent entre les professeurs et les élèves; je crois au contraire que sa présence est de nature à faire naître plus de conflits qu'elle n'en prévient. L'inspecteur central pourrait d'ailleurs se rendre sur les lieux chaque fois qu'un conflit ayant quelque gravité l'exigerait.

La section centrale, messieurs, vous a soumis sa proposition, parce qu'elle y a vu des avantages réels au point de vue administratif et au point de vue de l'économie.

M. le ministre croit que la section centrale empiète par là sur le domaine administratif. S'il en était ainsi, pourquoi a-t-on mis dans la loi qu'il y aurait deux administrateurs-inspecteurs. Si c'était un acte d'administration, on aurait laissé au gouvernement le soin de déterminer le nombre des inspecteurs.

M. le ministre de l'intérieur (M. Rogier). - Je demanderai à l'article 28 la suppression des mots : « de concert avec l'administrateur-inspecteur ». Cette rédaction appartient au projet de la commission qui avait proposé de substituer un seul inspecteur aux deux administrateurs-inspecteurs. Par inadvertance on n'a pas retranché ces mots dans le projet de loi. J'en ai fait l'aveu, mais il ne faudrait pas en tirer parti contre moi.

Le conseil supérieur établi par l'article 28 remplit en grande partie la mission qu'on veut attribuer à l’inspecteur. Il sera chargé d'assurer les programmes et la marche des études l'unité que M. Delfosse prétend ne pas toujours exister. J'ignore sur quels faits cet honorable membre base cette opinion, que des décisions contradictoires seraient prises relativement à l'une et à l'autre université. Un seul fonctionnaire, ayant le titre de directeur, est chargé de les administrer toutes deux.

Il serait bien extraordinaire qu'il prît des décisions contradictoires pour l'une et pour l'autre. Si une pareille anomalie existait de la part d'un fonctionnaire sous le titre de directeur, clic pourrait exister de la part d'un fonctionnaire sous le titre d'inspecteur. Ce fonctionnaire pourrait également prendre des décisions contradictoires. On pourrait le supposer de la part d'un directeur comme de la part d'un inspecteur.

J'insiste sur cette circonstance que, loin d'introduire une économie, la création d'un seul inspecteur serait une source de dépenses nouvelles. La section centrale veut bien supposer qu'avec 6,000 fr. on trouvera un inspecteur capable et voulant accepter. C'est une supposition gratuite. L'inspecteur administrateur de chaque université jouit d'un traitement de 6,000 fr. Mais trouvera-t-on un homme capable qui consentira à venir s'installer à Bruxelles pour le traitement de 6,000 fr.?

L'administrateur-inspecteur de l'université jouit, en outre, en même temps du logement; il a une indemnité comme directeur d'une école spéciale; il a donc au-delà de 6,000 fr. Avec tous ces avantages réunis, l'administrateur-inspecteur jouit réellement d'un traitement de 9 à 10,000 fr.

Lorsque nous aurons fait les lois sur l'enseignement moyen et l'enseignement primaire, si vous attachez un inspecteur à chacun de ces enseignements, on verra s'il ne convient pas de nommer aussi un seul inspecteur pour l'enseignement supérieur et de former de ces trois inspecteurs un conseil supérieur.

Je ne me prononce pas pour le rejet absolu de la proposition de la section centrale, je demande seulement à y réfléchir.

- L'article 25 est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

Le rejet de cet article entraîne la suppression des articles 26 et 27.

Chapitre VIII. Dispositions générale
Article 28

« Art. 28 L'article 28 est remplacé par et qui suit :

« Le gouvernement est chargé de la surveillance et de la direction des universités de l'Etat.

« Une fois, au moins, chaque année le ministre réunit huit professeurs (un par faculté) pour délibérer sous sa présidence de concert avec l’inspecteur-administrateur et avec les autres personnes qu'il croit utile de leur adjoindre, sur les améliorations à introduire dans l’enseignement supérieur.

- Cet article est adopté avec la suppression des mots : « avec l'inspecteur-administrateur ».

Article 30

« Art. 30. L’article 30 est remplacé par ce qui suit :

« Il est fait, tous les trois ans, aux chambres, dans la première quinzaine de leur rentrée, un rapport de la situation des universités de l'Etat.

« Un état détaillé de l'emploi des subsides est joint à ce rapport. »

- Adopté.

La séance est levée à 4 heures et demie.