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Chambres des représentants de Belgique
Séance du samedi 21 décembre 1850

(Annales parlementaires de Belgique, chambre des représentants, session 1850-1851)

(Présidence de M. Verhaegen.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

(page 367) M. Ansiau procède à l'appel nominal à une heure et demie.

La séance est ouverte.

M. de Perceval donne lecture du procès-verbal de la séance d'hier, dont la rédaction est approuvée.

Pièces adressées à la chambre

M. Ansiau fait connaître l'analyse des pièces suivantes adressées à la chambre :

« Le sieur Jean-François Nulens, sergent au 4ème régiment de ligne, prie la chambre de lui accorder la naturalisation, avec exemption du droit d'enregistrement. »

- Renvoi au ministre de la justice.


« Le conseil communal et plusieurs habitants d'Exel demandent que le bois soit substitué à la houille pour l'alimentation des boulangeries militaires et d'autres établissements du camp de Beverloo. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du budget de la guerre.


« Les secrétaires communaux du canton de Jodoigne demandent l'établissement d'une caisse de retraite en faveur des secrétaires communaux. »

M. Mercier. - Je crois devoir recommander cette pétition à l'attention toute particulière de la commission des pétitions. Il n'est pas de fonctionnaires plus dignes de la sollicitude du gouvernement et des chambres que les secrétaires communaux. Il n'en est pas qui rendent de plus grands services, surtout en raison de l'extrême modicité de leur traitement. Les secrétaires communaux du canton de Jodoigne demandent l'institution d'une caisse de retraite. Déjà cette institution existe dans la Flandre occidentale. Je prie la commission d'examiner s'il n'y aurait pas lieu d'engager le gouvernement à prendre l'initiative d'une caisse générale, à l'instar de celle qui existe pour les instituteurs communaux.

Je demande en même temps à la commission de vouloir bien faire un prompt rapport sur cette pétition.

M. Moncheur. - J'appuie les observations de l'honorable M. Mercier. Je crois que l'institution d'une caisse de retraite serait d'une haute utilité pour les secrétaires communaux, dont le zèle d'ailleurs serait d'autant plus grand qu'ils verraient leur avenir plus assuré.

M. Ansiau. - Par deux messages, le sénat fait connaître l'adoption des projets de loi qui confèrent la grande naturalisation aux sieurs E.-L. de Beauffort et A. Ryss.

- Pris pour information.

Projet de loi fixant le contingent de l’armée pour l’année 1851

Dépôt

M. le ministre de la guerre (M. Brialmont) présente le projet de loi relatif à la fixation du contingent de l'armée pour l'année 1851.

- La chambre donne acte à M. le ministre de la guerre de la présentation de ce projet de loi, dont elle ordonne l'impression et la distribution.

Ordre des travaux de la chambre

M. Osy. - Je demande le renvoi de ce projet de loi à la section centrale chargée de l'examen du budget de la guerre.

Je profite de cette occasion pour demander à la chambre et au gouvernement de décider si nous voterons le budget de la guerre avant les vacances.

M. de Perceval ; - Cela dépendra de la durée de la discussion sur le budget des travaux publics.

M. Osy. - Il serait utile, je le reconnais, dans l'intérêt du pays, que le budget de la guerre fût voté immédiatement après le projet de loi sur la monnaie d'or. Mais il conviendrait de prendre une décision, pour que tous nos collègues puissent être présents à la discussion, et pour le sénat, qui, ayant épuisé son ordre du jour, pourrait s'ajourner, s'il n'était prévenu.

M. le président. - Ce sera la première fois que nous entrerons dans la voie normale, tracée par la loi de comptabilité, en votant tous les budgets avant le nouvel an. Je ne doute nullement que tous nos collègues ne soient d'avis de voter le budget de la guerre avant les vacances. Ce budget reste à l'ordre du jour.

M. de Theux. - La chambre pourra décider lundi la question soulevée par M. Osy.

M. Thiéfry. - Messieurs, j'ignore quand nous nous occuperons du budget de la guerre. Mais un nouveau règlement doit être mis en vigueur dans l'infanterie à dater du 1er janvier. Je demande à la chambre la permission de faire à M. le ministre de la guerre quelques observations sur ce règlement.

- Un membre. - Attendez la discussion du budget de la guerre.

M. Thiéfry. - Il s'agit d'un règlement qui appelle toute votre attention. Il doit être mis en vigueur au 1er janvier, et les observations que j'ai à présenter sont d'une nature telle qu'elles pourraient engager M. le ministre de la guerre à en suspendre la mise à exécution.

M. Delfosse. - Vous pourrez présenter ces observations à l'occasion de la loi de contingent.

M. Thiéfry. - Je demande à les faire maintenant uniquement parce que M. le ministre de la guerre est présent.

M. le président. - La chambre paraît décidée à aborder son ordre du jour.

Nous reprenons la discussion du budget des travaux publics.

Projet de loi portant le budget du ministère des travaux publics de l’exercice 1851

Discussion du tableau des crédits

Chapitre II. Ponts et chaussées. Bâtiments civils, etc.

Section III. Services des canaux et rivières, des bacs et bateaux de passage
Article 19

« Art. 19. Service de la Dendre. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charges ordinaires : fr. 10,534 56.

« Charges extraordinaires : fr. 58,000. »

M. Delescluse. - Messieurs, à l'époque de la discussion du budget des travaux publics pour l'année courante, j'ai appelé l'attention de la chambre et du gouvernement sur l'état d'abandon trop longtemps prolongé où on a laissé la rivière la Dendre.

C'est une voie de communication qui peut devenir très importante et qui serait productive aussi pour le trésor au moyen de dépenses relativement minimes.

M. le ministre des travaux publics, l'honorable M. Rolin, a reconnu alors que mes plaintes étaient fondées. Voici ses propres paroles : « Aujourd'hui plus que jamais, il devient nécessaire d'améliorer le cours de la Dendre, car le chemin de fer de Jurbise lui a amené des transports considérables qu'il serait déplorable de ne pouvoir utiliser dans l'intérêt des populations riveraines de cette rivière. Mais pour le moment le gouvernement se trouve dans l'impossibilité complète d'y faire droit. Ce n'est qu'au moyen d'un crédit spécial que les travaux peuvent être exécutés. Le trésor n'est pas dans une situation assez prospère pour solliciter ce crédit. »

On pourrait croire, messieurs, que ces travaux demandent des sommes considérables.

Il en serait ainsi, si l'on suivait le projet d'ingénieurs très capables, sans doute, mais qui ont habituellement le tort de faire des projets trop grandioses.

D'après le travail des frères Vanderelst, une somme de 1,500,000 francs suffirait pour canaliser la rivière depuis Ath jusqu'à Alost. D'après le travail de M. Wellens, ingénieur de l'Etat, cette somme s'élèverait à 2 millions.

Ces sommes sont minimes en comparaison des avantages que le pays pourrait retirer des travaux dont il s'agit, travaux qui sont suffisants pour satisfaire à tous les besoins du commerce.

On objecte, messieurs, l'état du trésor. Mais il y a une compagnie qui a demandé la concession d'un chemin de fer le long de la vallée de la Dendre ; cette compagnie doit être maintenant complètement déchue de sa concession ; elle a versé comme cautionnement, dans le trésor de l'Etat, une somme de deux millions de francs. Cette somme est plus que suffisante pour l'exécution complète des travaux que la rivière réclame. Si on trouve trop sévère la confiscation absolue du cautionnement, il est possible que rien n'empêcherait l'Etat d'accorder à la compagnie déchue une part des produits que la rivière canalisée ne manquerait pas de donner.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, l'ouverture du canal de Jemmapes à Alost serait sans doute un ouvrage d'utilité incontestable pour les charbonnages du couchant de Mons. A cet égard, le département a été saisi, au mois de novembre dernier, d'une proposition du concessionnaire primitif, qui demande que le gouvernement consacre pendant cinq ans une somme annuelle de 200,000 francs pour l'exécution de ce canal latéral, plus l'application au même travail du cautionnement de deux millions, mais il est évident qu'à cet égard, il peut exister des difficultés très graves, car si le gouvernement a le droit incontestable de confisquer dès à présent le million du chemin de fer, il existe un deuxième million à l'égard duquel la question n'est pas à beaucoup près aussi simple.

Un autre projet, messieurs, qui tend à substituer au chemin de fer de le Dendre une canalisation, a été déposé par M. l'ingénieur.....

Ce canal coûterait 6,400,000 fr., et la canalisation de la Dendre coûterait 3 millions, de telle sorte que la dépense totale serait de 9,400,000 fr.

L'ingénieur … demande également l'application du cautionnement de deux millions, plus l'abandon de la section d'Alost à Termonde. Cela ne constituerait pas, dit-il, un sacrifice pour l'Etat, puisque les produits de cette partie de la rivière ne compensent pas les travaux d'entretien. Je reconnais que ces projets méritent l'examen sérieux du gouvernement, et j'y consacrerai toute mon attention.

- L'article est adopté.

Articles 20 et 21

« Art. 20. Service du Rupel. Travaux d'entretien et d'amélioration.

« Charges ordinaires : fr. 8,000.

« Charges extraordinaires : fr. 39,000. »

- Adopté.


(page 368) « Art. 21. Service de la Dyle et du Demer. Entretien et travaux à faire pour obvier aux inondations de la Dyle et du Demer.

« Charges ordinaires : fr. 13,000.

« Charge extraordinaire : fr. 100.000. »

- Adopté.

Article 22

« Art. 22. Senne. Entretien d'ouvrages d'art, loyer d'une maison éclusière à Vilvorde : fR. 2,250. »

M. Thiéfry. - Messieurs, à des époques malheureusement trop rapprochées, la vallée de la Senne a été entièrement inondée, quelquefois avec une rapidité effrayante qui occasionne les plus grands malheurs. A l'heure où je parle, les eaux sont encore sorties de leur lit.

Une somme d'environ 50,000 fr. a été portée au budget de 1848 pour travaux destinés à y obvier ; elle a été employée à la construction d'un déversoir supplémentaire, près du moulin de Weerde.

En 1849, aucun fonds n'a été demandé par le gouvernement, dans le but, a-t-il dit, d'attendre que l'on puisse reconnaître l'influence de cette amélioration. Son inefficacité s'est bien vite révélée ; mais cette réduction n'a eu réellement lieu que pour diminuer le chiffre du budget, et ce sont là des économies déplorables.

Pour 1851, une somme de 2,250 fr. est pétitionnée pour l'entretien des ouvrages d'art établis sur le cours de la rivière ; il ne s'agit pas encore de travaux à exécuter pour éviter les inondations ; la deuxième section a été défavorable à cette allocation ; elle n'a pas songé que c'est l'Etat lui-même qui a augmenté les chances de ces désastres. La construction du canal de Charleroy, celle du chemin de fer et de diverses routes, forment autant de barrages artificiels qui rétrécissent la vallée de la Senne, et occasionnent des sinistres qui se reproduisent tous les dix ans. Il est donc du devoir de l'Etat de réparer le mal qu'il a fait, et d'empêcher le renouvellement de ces inondations, en quelque sorte, périodiques.

En 1839, une commission a été nommée pour s'occuper de cette importante question ; le conseil des ponts et chaussées a fait des propositions à cette époque :

Un nouveau travail a, je pense, été entrepris depuis peu, et si mes renseignements sont exacts, la somme à employer n'est pas considérable en raison de l'utilité.

Je prie instamment M. le ministre d'examiner le plus tôt possible tout ce qui est relatif à cette affaire et de proposer les mesures à employer pour préserver toute une province de pertes considérables.

M. Prévinaire. - Messieurs, je joins mes instances à celles de l'honorable M. Thiéfry. Je crois que le gouvernement reconnaîtra qu'il ne peut se soustraire à la responsabilité résultant des travaux qui ont été exécutés dans la vallée de la Senne et qui ont modifié en grande partie les conditions naturelles de cette vallée.

Je saisis cette occasion pour prier M. le ministre des travaux publics de vouloir bien examiner les conditions dans lesquelles se trouvent toutes nos rivières non flottables et non navigables.

C'est en vertu d'un arrêté royal du 10 septembre 1830 que l'administration de nos rivières non flottables appartient aux autorités provinciales. La question de la Senne dont l'honorable M. Thiéfry vient d'entretenir la chambre ne serait pas nécessairement tranchée, lorsque le gouvernement aura fait exécuter des travaux, pour faciliter l'évacuation des eaux : il restera encore la question du maintien de la Senne dans un bon état d'entretien.

Cette question est de la compétence de l'autorité provinciale ; mais jusqu'à présent, cette autorité n'a pas pris les mesures nécessaires pour que ce but soit atteint. Il y a des endroits dans la rivière où le rétrécissement est tel qu'un homme, quelque peu agile, la franchirait d'un bord à l'autre.

Il ne suffit pas, je le répète, d'exécuter des travaux qui permettent à la rivière de faire écouler ses eaux plus facilement vers le Rupel ; il faut encore qu'on pourvoie à ce que la rivière ait partout une largeur convenable et égale. Sous le gouvernement autrichien, des mesures avaient été prises à cet effet : on avait donné à la rivière une largeur convenable et déterminée : les anciens placards du Brabant portaient à 40 pieds la largeur de la Senne, au plafond des eaux.

Je demande à M. le ministre des travaux publics s'il ne jugerait pas à propos de faire déterminer par une loi certaines circonstances qui sont abandonnées aujourd'hui à l'arbitraire de l'autorité provinciale. Les rivières ne sont pas d'un intérêt exclusivement provincial ; elles sont aussi d'un intérêt général, surtout lorsqu'elles s'étendent sur certaines provinces.

Il est une autre question sur laquelle j'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics ; c'est la question des usines qui sont établies sur les rivières.

En vertu de l'arrêté royal que je viens de rappeler, les autorisations relatives à l'établissement d'usines sont accordées par l'autorité provinciale ; elles le sont, après une instruction, faite par les employés de l'administration des ponts et chaussées qui appartiennent au service provincial.

Les restrictions auxquelles l'administration provinciale subordonne ces autorisations me paraissent présenter un caractère illégal. Les autorisations accordées pour l'érection d'usines ne me paraissent pas pouvoir être subordonnées à des conditions qui compromettraient leur existence dans l'avenir.

Bien qu'une concession de coup d'eau ait lieu gratuitement il n'en est pas moins vrai que c’est en vue de faire utiliser une force naturelle à laquelle on renoncerait, si la concession perdait son caractère de permanence.

Il n'y a pas, je le reconnais, entre ces concessions et celles des mines, une analogie complète ; mais je ne les en considère pas moins pour irrévocables, ni susceptibles de modifications dans leur essence.

L'administration publique a le droit de pourvoir à ce que les concessionnaires n'opposent aucune entrave à l'écoulement des eaux ; sous ce rapport, les concessionnaires ne sauraient se refuser à exécuter les ouvrages nécessaires pour fournir les orifices nécessaires à la rivière, afin que, dans les cas de crue, la rivière récupère aussi complètement que possible ses conditions naturelles.

Mais là doit se borner, je pense, l'intervention de l'administration après l'obtention d'une concession de coup d'eau.

En vain alléguerait-on les modifications que peuvent subir les rivières, celles-ci étant sans importance si l'entretien des rivières est convenablement surveillé, c'est-à-dire si l'on pourvoit au maintien des largeur et profondeur déterminées par des bornes de repère.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - L'honorable M. Thiéfry a signalé à mon attention les dangers éventuels auxquels est exposée la vallée de la Senne par suite du non écoulement des eaux. Je réponds à l'honorable membre que l'Etat s'occupe des ouvrages qui ont pour effet de remédier aux désastres de ces inondations, mais il est à remarquer que la Senne étant une rivière non navigable ni flottable, l'exécution des travaux n'incombait pas en principe à l'Etat ; mais en considération des dangers éventuels auxquels l'exécution du canal de Charleroy et l'ouverture du chemin de fer pouvaient exposer la vallée de la Senne, l'Etat a bien voulu se charger de certains des ouvrages et d'une partie des dépenses.

Une enquête a été instituée en 1839, et à cette enquête ont pris part plusieurs membres du collège échevinal de Bruxelles, des membres de l'autorité provinciale et quelques ingénieurs. A la suite de cette enquête on avait arrêté les ouvrages à faire par l'Etat, ils se montaient à la somme d'environ 126,000 fr., je pense.

Eh bien, l'Etat a dépensé jusqu'à près de 269,000 francs.

Il ne reste plus à faire qu'un seul ouvrage, c'est le pont qui est sur la Senne, à Molenbeek, et qui doit coûter environ 35,000 fr. Mais il paraît, d'après les renseignements qui m'ont été fournis, que cet ouvrage doit se combiner avec un autre ouvrage qui est à la charge de la ville, c'est l'élargissement du débouché de la petite Senne, de manière à s'en tenir à l'enquête qui a été faite, la part qui incombait à l'Etat a été considérablement augmentée, c'est-à-dire qu'au lieu de 126,000 fr. il a été dépensé environ 269,000 fr.

Du reste, en ce moment-ci le gouvernement s'occupe encore des moyens qui seront juges les plus propres à remédier aux désastres que les inondations pourraient causer à l'avenir.

Quant aux observations de l'honorable M. Prévinaire, je dois lui faire remarquer qu'elles concernent plutôt l'autorité provinciale que le département des travaux publics. Il est certain que c'est l'autorité provinciale plutôt que le département des travaux publics qui prend des décisions à cet égard. Néanmoins, je pourrai tenir compte des observations présentées par l'honorable membre.

M. Prévinaire. - M. le ministre des travaux publics ne paraît pas m'avoir compris. J'ai dit, en ce qui concerne la Senne, qu'il ne suffisait pas d'exécuter des travaux qui permissent d'évacuer les eaux plus facilement ; qu'il fallait que la rivière fût dans un état convenable d'entretien. J'ai reconnu que l'entretien des rivières était du ressort des autorités provinciales, j'ai même cité l'arrêté du 10 septembre 1830, en vertu duquel les autorités provinciales sont chargées de cet entretien.

Mais j'ai dit en même temps que cet entretien était très mal fait et j'ai prié M. le ministre de vouloir bien examiner si l'Etat ne pouvait pas intervenir pour assurer un entretien meilleur ; si, tout en laissant aux autorités provinciales le droit de pourvoir à l'entretien des rivières, on ne pourrait pas, au moyen d'une loi, déterminer certaines circonstances dont les autorités provinciales devraient assurer le maintien. C'est ainsi que, sous le gouvernement autrichien, la Senne avait une largeur légale.

Il s'agit ici d'une question très grave, très intéressante pour les industriels qui obtiennent une concession de coup d'eau. Mettant cette concession à profit, ils élèvent des usines importantes ; admettra-t-on qu'il puisse dépendre de l'administration des ponts et chaussées de changer, sous prétexte de nivellement, les conditions essentielles d'un établissement important ?

Admettra-t-on, par exemple, que, se fondant sur un travail de nivellement, on vienne demander une modification de retenue à une usine dont l'existence remonterait à deux cents ans ?

Je prie M. le ministre de vouloir examiner s'il est nécessaire à l'intérêt général que des conditions soient posées aux concessionnaires, et si ces conditions doivent être d'une nature aussi essentiellement compromettante pour eux.

S'il en était ainsi, je doute que l'on continuât à utiliser les coups d'eau, ce qui serait autant de perdu pour l'intérêt général. Quant aux usines anciennes, les exigences de l'administration pourraient bien provoquer des procès qui, outre la déconsidération qui s'attache toujours à des tentatives illégales, entraîneraient peut-être des procès onéreux pour l'Etat, car les tribunaux auraient à examiner si la réduction ou la (page 369) modification d'une concession de coup d'eau ne constitue pas une expropriation pour cause d'utilité publique.

J'espère que M. le ministre voudra bien examiner cette question.

M. Rodenbach. - J'ai demandé la parole pour dire en partie ce qu'ont dit les honorables préopinants relativement à la Senne.

J'ai parlé dans le même sens lors de la discussion du budget de l'intérieur. Depuis 50 ou 60 ans, depuis le gouvernement autrichien, on a très peu fait pour les petites rivières ; on a laissé commettre d'immenses dégâts.

Quoique cela ne dépende pas du ministre des travaux publics, il renvoie aux autorités provinciales, il devrait au moins prendre des mesures pour que l'autorité provinciale ne laisse pas ruiner les riverains ; tous les deux ou trois ans il y a des inondations ; il y en a même sur le parcours de la Lys où beaucoup de personnes ont été ruinées.

Je sais qu'on a à s'occuper de grands travaux, chemins de fer et autres ; mais on ne doit pas pour cela négliger les petites rivières. Les conseils provinciaux prétendent que les règlements sont vicieux ; qu'on donne des ordres pour les réviser. Je le répète, nous avons constamment des inondations. Au mois d'août dernier nous en avions déjà.

M. Dechamps. - Puisqu'il est question d'inondations, je demanderai à M. le ministre des travaux publics s'il a arrêté un projet définitif pour prévenir les inondations de la vallée de la Sambre.

M. le ministre sait que les dernières inondations du mois d'août ont été plus déplorables, plus désastreuses que celles de la Senne. Ici la question qui se présente pour la Senne n'existe pas ; les frais sont exclusivement à la charge de l'Etat.

Je demanderai donc à M. le ministre des travaux publics quelques renseignements pour savoir où en sont les études qui doivent avoir pour résultat de prévenir le retour de ces désastreuses inondations.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - A la suite des inondations de la vallée de la Sambre, j'ai chargé un fonctionnaire supérieur du corps des ponts et chaussées d'examiner ce qu'il pouvait y avoir à faire pour en prévenir le retour. D'après le rapport de cet inspecteur général, il paraît que l'ouvrage le plus pressant est l'élargissement du déversoir qui existe à Namur. Un projet a été préparé par l'ingénieur en chef de la province de Namur, dans le but de faire passer les eaux de la Sambre par les fossés des fortifications de Namur. Le travail est à peu près achevé. Cependant, je n'en ai pas encore reçu le détail complet.

M. Pirmez. - Je ne comprends pas comment la dérivation de la Sambre à Namur pourrait avoir beaucoup d'influence sur les localités où cette rivière a exercé les plus grands ravages, à Charleroy et dans les environs. C'est là, sans aucune comparaison, que les dégâts ont été les plus considérables et c'est sur ce point surtout que M. le ministre doit faire étudier la question.

M. Moncheur. - Il est probable que des travaux doivent être faits sur plusieurs points de la Sambre pour éviter des désastres semblables à ceux qu'on a éprouvés en août dernier et il est évident, ainsi que l'a dit l'honorable préopinant, que les travaux qu'on fera à Namur n'auront pas d'influence sur ce qui se passera, par exemple, à Châtelineau. Mais, il n'est pas, en tous cas, de point où les travaux soient aussi nécessaires que celui qui a été signalé par M. l'ingénieur en chef à M. le ministre des travaux publics, c'est-à-dire à Namur où est l'embouchure de la rivière dans la Meuse, et où par conséquent la rivière a reçu tous ses affluents. En effet, il y a un resserrement tel dans la traverse de Namur qu'il est impossible que les eaux se dégorgent par l'ouverture qui leur est offerte.

Il est un moyen très simple de faire dériver l'excédant des eaux, c'est de les faire passer par les fossés des fortifications de la ville. Ce moyen est facile et peu coûteux.

Les inondations du mois d'août ont prouvé la nécessité et même l'urgence de son emploi.

M. de Theux. - Je demande de pouvoir appeler l'attention de MM. les ministres des travaux publics et de la guerre sur la nécessité d'une mesure de police qui ne coûtera rien au trésor public. (Parlez ! parlez !)

Je voudrais que les deux départements s'entendent pour que le passage des eaux du Demer pût se faire librement par Diest. Souvent les écluses ne sont pas ouvertes et toute la vallée en amont est inondée ; ce qui, quand les moissons ne sont pas rentrées, cause une perte énormissime.

Il suffira, j'en suis convaincu, d'avoir appelé sur ce point l'attention de MM. les ministres pour qu'ils s'entendent et donnent de commun accord des instructions pour éviter, à l'avenir, les dégâts dont on a eu à souffrir.

- L'article 22 est adopté.

Articles 23 et 24

« Art. 23. Canaux de Gand à Ostende. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 26,179.

« Charge extraordinaire : fr. 24,616 67. »

- Adopté.


« Art. 24. Service du canal de Mons à Condé. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 10,000.

« Charge extraordinaire : fr. 18,284. »

- Adopté.

Article 25

« Art. 25. Service du canal de la Campine. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 50,100.

« Charge extraordinaire : fr. 8,000. »

M. Loos. - J'ai demandé la parole sur l'article qui concerne le canal de la Campine,

Déjà, dans une séance précédente, mon honorable ami M. Osy avait appelé l'attention de l'honorable ministre des travaux publics sur la situation où se trouvent les capitaux engagés jusqu'à présent dans la construction du canal de la Campine.

Moi-même, à diverses époques, j'ai appelé l'attention du gouvernement sur cette situation déplorable que je ne puis appeler autrement qu'une mauvaise gestion des deniers de l'Etat. En effet, 13 millions sont ici engagés, et ils sont complètement improductifs ; car, ainsi que vous avez pu le voir dans le budget des voies et moyens, le canal de la Campine ne produit qu'une recette de 20 mille francs, tandis que les frais d'entretien figurent au budget des travaux publics pour 30 mille francs, et l'année dernière, ils ont dé assé 70 mille francs. Ainsi la faible recette qu'on obtient est plus qu'absorbée par les dépenses d'entretien.

Je crois qu'il est temps d'en finir avec cette situation.

A un père de famille qui gérerait ainsi le patrimoine de ses enfants on nommerait un curateur.

Quand avec 5 millions vous pouvez rendre productifs les 13 millions engages dans l'opération, je ne puis comprendre que le gouvernement soit resté jusqu'à ce jour inactif devant une pareille situation.

L'année dernière et l'année précédente, je fis observer que, si le gouvernement, dans la situation où se trouvent nos finances, ne pouvait consentir à faire un emprunt, il pourrait du moins offrir l'achèvement du canal par voie de concession. Le ministre qui avait alors le portefeuille dont est aujourd'hui chargé l'honorable M. Van Hoorebeke, promit d'examiner la question et sembla partager mon avis. Le temps a passé, et l'on n'a pas fait appel aux concessionnaires.

Aujourd'hui, je vois que dans la discussion qui a eu lieu dans la section centrale à ce sujet, M. le ministre a répondu qu'il serait onéreux d'engager la partie faite du canal pour le faire achever par voie de concession. Il envisage cela comme une opération fâcheuse pour l'Etat. Je ne puis me rendre compte de cette opinion de l'honorable ministre ; car si les parties achevées ne rapportent rien aujourd'hui et qu'au moyen de l'achèvement de la partie qui reste à faire, il soit possible de faire produire 300,000 fr. annuellement, il est évident que le gouvernement fera une bonne affaire en engageant ce qui est fait pour faire achever ce qui reste à faire par voie de concession.

Si, par suite de l'abandon des péages sur tout le canal, les concessionnaires font de plus grandes recettes, l'Etat sera d'autant plus vite appelé à jouir du canal.

M. le ministre a dit à la section centrale qu'il prévoyait que les péages de la partie du canal à construire pourraient rapporter 80,000 francs, et que la dépense s'élèverait à 4 millions.

Les concessionnaires se trouveraient donc engagés dans des intérêts de 200 mille francs, à raison de 5 p. c. Comment voulez-vous qu'avec une recette de 80 mille francs, qu'on leur abandonnerait, l'Etat puisse jouir de tout le canal ?

L'Etat serait obligé, au contraire, de suppléer tous les ans au moins jusqu'à concurrence des intérêts, et il faudrait bien y ajouter, s'il voulait se réserver la reprise du canal, le payement d'une prime à celui qui aurait construit.

Pour ma part, je n'ai donc pas compris les explications qui ont été données à la section centrale par M. le ministre des travaux publics, et je serais heureux d'apprendre par quel moyen plus économique que celui que j'ai indiqué, on parviendra à rendre productifs les 13 millions qui ont été engagés dans cette opération.

Pour moi je crois, ainsi que je l'ai déjà dit, il y a deux ans, que si le gouvernement ne veut pas emprunter pour achever le canal, le moyen le plus efficace serait d'abandonner cet achèvement à une compagnie, aux conditions qui paraîtraient les plus avantageuses pour l'Etat.

Messieurs, qu'on ne perde pas de vue, qu'en dehors de l'intérêt de l'Etat, il y a ici engagé l'intérêt de l'industrie de la province de Liège, de la province de Namur, de la province de Luxembourg ; et, en définitive, l'intérêt de la Campine, en faveur de laquelle le canal a été créé. Je crois qu'en présence de tous ces intérêts, il est déplorable de voir se perpétuer un état de choses aussi fâcheux.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Je suis d'accord sur presque tous les points avec l'honorable préopinant. Je reconnais avec lui qu'il est extrêmement regrettable qu'on n'ait pu jusqu'à présent achever le canal de jonction de la Meuse à l'Escaut. Je conviens que l'achèvement du canal de la Campine intéresse non seulement les provinces que vient de citer l'honorable membre, les provinces de Liège, de Limbourg, de Namur et d'Anvers, non seulement l'agriculture, mais encore directement le trésor.

Cependant, messieurs, il est à remarquer que l'achèvement de ce canal est soumis à une question financière et que la chambre seule est appelée à la résoudre.

L'honorable M. Loos demande si je repousse l'intervention de tiers, l'intervention des bailleurs du fonds. En aucune façon, ils peuvent prendre acte de la déclaration que je fais en ce moment. Si ces bailleurs de fonds font des propositions acceptables, le gouvernement les examinera avec toute la bienveillance que comporte cet important travail.

(page 370) Mais j'ai dit à la section centrale que l'achèvement de cette section devait absorber un crédit d'environ 4 millions ; que cette section devait rapporter approximativement 80,000 francs, et qu'il était fort douteux qu'à moins d'abandonner les péages de tout le canal aux bailleurs de fonds qui se présenteraient, il était fort douteux qu'ils consentissent à exécuter la section.

Or, messieurs, si le gouvernement abandonnait pendant 10 ans, les 20,000 francs que produit aujourd'hui le canal, la participation de l'Etat équivaudrait, en réalité, à un subside de 200,000 francs.

On admettra bien certainement que le gouvernement doit rester maître des péages du canal, puisqu'il s'agit d'une voie internationale. Supposons que le gouvernement abandonne le produit de ses péages à la compagnie qui se présenterait. Eh bien, la compagnie pour une dépense de 4 millions percevrait pendant 10 ans une somme qu'on peut évaluer à environ 240,000 francs par an. Or si une compagnie nous offrait de semblables conditions, le gouvernement les examinerait avec reconnaissance, et alors on pourrait décider s'il convient d'achever ce canal par voie de concession. Mais si l'on désire que le gouvernement exécute lui-même et à ses frais la dernière section du canal, encore une fois, il faut que l'on tienne compte de la situation financière et qu'on mette le gouvernement en mesure de travailler.

M. de Theux. - Messieurs, je désire aussi que le canal de la Campine puisse être achevé jusqu'à Anvers, pour qu'il produise toute son utilité financière et commerciale.

Mais à côté de ce désir, je dois cependant faire observer à l'honorable ministre des travaux publics et aux honorables membres qui ont exprimé vivement le désir de voir achever ce canal, qu'il y a ici deux questions. Indépendamment de la question financière, il y a la question des irrigations et des défrichements.

Il est évident que si le gouvernement abandonnait à une société le canal tout entier, y compris la partie déjà construite, il pourrait surgir de grandes difficultés relativement aux irrigations et aux défrichements.

Je crois donc que la question est complexe ; s'il ne s'agissait que d'abandonner à l'industrie privée l'achèvement du canal, moyennant la jouissance des péages à lever sur la section qui reste à construire, la question serait assez simple, parce que cette section n'intéresse guère ni les irrigations ni les défrichements.

Mais s'il s'agissait d'abandonner à une compagnie le canal tout entier, je crois que ce serait compromettre gravement la question des irrigations et des défrichements.

M. Coomans. - Messieurs, je n'ai que deux mots à dire à l'appui des argument décisifs que vous venez d'entendre.

Il me semble que la chambre devrait être unanime pour fournir au gouvernement les moyens d'achever le canal de la Campine, et voici pourquoi :

L'Etat bien certainement a l'intention d'exécuter encore quelques grands ouvrages d'utilité publique. Dos projets antérieurs, non abandonnés, en font foi.

Or ces ouvrages sont inexécutables, moralement inexécutables, aussi longtemps que la loi du 10 février 1843, qui a décrété la construction du canal de la Campine, restera inexécutée.

Cela me paraît évident. Le gouvernement ne pourra pas décemment, équitablement venir demander des millions pour d'autres travaux nationaux aussi longtemps que cette loi restera une lettre morte. Il y va de l'honneur de la Belgique, il y va de sa dignité de remplir les engagements qu'elle a pris en 1843, en faveur de deux provinces si maltraitées par la nature.

Aujourd'hui, les 13 millions déjà verses dans le canal de la Campine sont presque improductifs.

L'honorable M. Loos vous l'a déjà démontré plusieurs fois et j'ai appuyé ses observations.

Il me semble donc que la chambre devrait exiger la solution de cette affaire avant qu'on ne s'occupe d'autres dépenses de même nature.

Quand le canal de la Campine cessera d'offrir une double impasse à Turnhout et à Herenthals, et quand la route de Turnhout à Tilbourg sera faite, les revenus du canal augmenteront sensiblement, et je pense avec d'honorables collègues que cette voie d'eau donnera au moins 5 p. c. des capitaux engagés, outre les grands bénéfices indirects que l'agriculture en retirera.

Je termine ces courtes remarques en déclarant qu'il me sera impossible de voter aucune dépense quelconque pour travaux publics avant que la loi du 10 février 1843 soit pleinement exécutée. Il y a là une considération de moralité et de justice qui frappera sans doute la chambre.

M. Loos. - Messieurs, je vois avec infiniment de regret les dispositions dans lesquelles se trouve M. le ministre des travaux publics. L'honorable prédécesseur de M. le ministre n'a pas non plus contesté l'utilité de l'achèvement du canal de la Campine. L'honorable M. Rolin déclarait, lui aussi, que c'étaient les premiers travaux qui seraient exécutés sous son administration, mais qu'il manquait de fonds pour achever le canal ; que si une compagnie se présentait, il l'accueillerait très volontiers. L'honorable ministre actuel, comme l'honorable M. Rolin, répète qu'il attend le messie, c'est-à-dire une compagnie qui fasse des propositions.

Messieurs, ce n'est pas de cette manière qu'il faut procéder. Si l'on veut sérieusement l'achèvement du canal de la Campine par voie de concession, M. le ministre sait comment on s'y prend en pareille circonstance. On appelle les concessionnaires ; on fait un cahier des charges, on fait connaître les conditions et l'on procède à une adjudication.

Mais attendre que des propositions soient faites quand on n'en demande pas, c'est ne pas désirer en recevoir. Comment voulez-vous que des concessionnaires viennent dire à M. le ministre : nous entendons exécuter le canal de la Campine dans telles ou telles conditions ? L'honorable M. de Theux vient de vous le dire, la manière dont s'achèvera ce canal ne doit pas être indifférente. Il s'agit ici de divers intérêts et notamment de l'intérêt des défrichements dans la Campine.

Il est donc essentiel, si le gouvernement entend sérieusement achever le canal, que l'honorable ministre des travaux publics rédige un cahier des charges et fasse connaître aux compagnies qui pourraient se former les conditions auxquelles il consentirait à concéder les travaux.

Pour ma part, messieurs, je crois que l'achèvement du canal de la Campine par voie de concession, doit être en pis-aller ; car je comprends, aussi qu'il serait bien plus avantageux au pays que le canal fin achevé par le gouvernement lui-même. De cette manière, le gouvernement resterait maître de la direction à donner aux travaux, il resterait maître des péages.

Il me semble, messieurs, que si le gouvernement faisait un appel à tous ceux qui ont des intérêts dans la Campine, qui sont intéressés à l'exécution des travaux, pour leur dire qu'il est prêt à exécuter les travaux, s'il obtient les fonds nécessaires, à raison de 5 p. c. au pair, le gouvernement ne peut pas espérer de faire exécuter les travaux à des conditions plus favorables ; il me semble que s'il faisait cet appel à ceux qui sont intéressés à l'exécution du canal, ils comprendraient que les sacrifices qu'ils s'imposeraient seraient amplement rachetés par les avantages qu'ils auraient à recueillir par la suite.

Voilà, messieurs, un moyen que j'indique à l'honorable ministre des travaux publics et je dois dire que si avant peu il n'était pas fait droit aux justes réclamations que je produis dans cette enceinte au sujet de ce canal, je soumettrais moi-même une proposition à la chambre dans le sens de celle que je viens d'indiquer.

M. Osy. - Messieurs, comme j'ai eu l'honneur de le dire dans la discussion générale, je conçois parfaitement que le gouvernement ne puisse pas, dans les circonstances actuelles, avancer 4 millions pour l'achèvement du canal de la Campine, quelque intéressant que soit cet ouvrage ; mais alors, messieurs, il faut faire appel aux compagnies. M. le ministre des travaux publics a dit que les capitalistes sont avertis, qu'ils peuvent faire des propositions. Ce n'est pas, messieurs, de cette manière qu'il faut s'y prendre lorsqu'on veut que des concessionnaires se présentent ; le gouvernement devrait faire un cahier des charges pour la concession du canal, non pas depuis Liège, mais depuis la Pierre-Bleue jusqu'à Anvers, et déclarer qu'il adjugera les travaux à la compagnie qui abandonnera les péages à l'Etat dans le plus bref délai.

Le canal ainsi réduit ne serait plus un ouvrage international, ce serait un ouvrage exclusivement belge dans lequel l'étranger n'aurait rien à voir. C'est là, messieurs, le seul moyen d'arriver à un résultat. Il faut que le gouvernement offre du positif aux capitalistes et alors il y aura des soumissionnaires ; on fera ensuite ce qu'on fait pour les emprunts, on adjugera le canal par voie de soumissions cachetées.

J'engage beaucoup M. le ministre des travaux publics à s'occuper de cet objet, d'autant plus que je crois savoir qu'il y a en ce moment des capitalistes qui seraient disposés à se charger des travaux.

M. de Theux. - Les honorables MM. Osy et Loos ont indiqué deux modes pour arriver à l'exécution du canal de la Campine ; j'avoue, messieurs, que si le gouvernement avait le choix, je préférerais le mode indiqué par l'honorable M. Loos qui consisterait à faire un emprunt en offrant aux prêteurs une garantie spéciale sur les revenus du canal. Je ne pense pas qu'il puisse être un seul instant douteux que le canal de la Campine, s'il était achevé jusqu'à Anvers, ne rapportât beaucoup au-delà de 200 mille francs, car l'utilité commerciale de ce canal est extrêmement considérable.

M. le ministre des travaux publics pourrait faire établir, par le corps des ponts et chaussées et par les chambres de commerce d'Anvers et de Liège, l'estimation des produits du canal et je pense que cette estimation démontrerait que le canal doit rapporter beaucoup au-delà de 200,000 fr., somme qui représente l'intérêt à 5 p. c. du capital nécessaire pour achever les travaux. Il est probable, d'ailleurs, qu'à une époque rapprochée le canal recevrait des embranchements. Ainsi, la province du Limbourg a sollicité un embranchement jusqu'à Hasselt, embranchement qui serait très peu coûteux puisqu'il n'y a pas de travaux d'art à exécuter. Or, cela améliorerait beaucoup la position d'une compagnie concessionnaire, et il vaudrait beaucoup mieux que la chose profitât au trésor qui a payé la majeure partie des frais du canal.

Ainsi, messieurs, je donnerais la préférence au mode proposé par l'honorable M. Loos, c'est-à-dire, un emprunt garanti spécialement par les produits du canal. Mais pour que cet emprunt puisse réussir, il faut que le gouvernement établisse par une enquête régulière quels seraient les produits probables du canal, achevé jusqu'à Anvers.

- L'article est adopté.

Articles 26 à 28

« Art. 26. Service du canal d'embranchement vers Turnhout. Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 9,650.

« Charge extraordinaire : fr. 3,000. »

- Adopté.


(page 371) « Art. 27. Service de la petite Nèthe canalisée. Sixième annuité à payer à la province d'Anvers : fr. 50,000.

« Entretien et travaux d'amélioration.

« Charge ordinaire : fr. 17,800.

« Charge extraordinaire : fr. 56,500. »

- Adopté.


« Art. 28. Service du Moervaert. Entretien et travaux de dévasement.

« Charge ordinaire : fr. 1,849.

« Charge extraordinaire : fr. 50,000. »

L'amendement suivant a été proposé à cet article :

« Les soussignés proposent de rédiger l'article 28 de la manière suivante :

« Service du Moervaert et du canal de Stekene.

« Art. 28. Litt. A. Entretien ordinaire du Moervaert, charge ordinaire et permanente : fr. 1,849.

« Litt. B. Travaux de dévasement du Moervaert et du canal de Stekene (première moitié), charge extraordinaire et temporaire : fr. 65,000.

« Total : fr. 66,849.

« (Signés), J. Cools., baron L. de T'Serclaes. C. de Meester. Ch. Vermeire. »

M. Cools. - Messieurs, je ferai d'abord remarquer que nous ne demandons que 15,000 francs en sus du chiffre du gouvernement. Nous proposons bien une augmentation de 30,000 francs, mais cette somme devant être répartie sur deux ans, la chambre ne s'engagerait que pour 15,000 fr.

Vous connaissez, messieurs, la question du canal de Stekene, et je puis des lors me dispenser d'entrer dans de longs développements, Vous savez qu'il y a là un canal complètement envasé et auquel personne ne veut mettre la main, parce qu'il y a doute sur le point de savoir par qui les travaux doivent être exécutés. Depuis très longtemps la chambre a eu à s'occuper tous les ans de réclamations formulées à cet égard.

Ce n'est pas nous qui, cette fois, prenons l'initiative d'une proposition nouvelle ; celle que nous faisons se rattache à une autre qui a été faite l'année dernière et que le gouvernement a accueillie.

L'année dernière, les représentants du district de Gand, et, entre autres, l'honorable M. T'Kint de Naeyer, ont fait remarquer que les travaux du canal de Schipdonck seraient incomplets, si on n'exécutait pas des travaux au canal de Moervaert ; qu'il y avait là des travaux inévitables à exécuter.

Eh bien, nous, à notre tour, nous ferons remarquer que le travail du canal de Moervaert serait tout aussi incomplet/si on n'exécutait par les travaux jusqu'à la limite du village de Stekene ; car, remarquez qu'il s'agit d'une seule et même voie navigable qui se distribue en deux parties, l'une qui est le canal de Moervaert, l'autre qui est le canal de Stekene.

Que les travaux soient indispensables, c'est un fait reconnu depuis longtemps et par le gouvernement lui-même.

Le gouvernement a voulu contribuer dans les dépenses. Il a offert à la commune de Stekene de lui accorder un subside, même assez notable, parce qu'il reconnaissait que les travaux ne pouvaient être différés.

Mais il est de fait qu'une proposition formulée dans ce sens ne pouvait pas être acceptée par la commune, parce qu'alors elle passait condamnation.

Que voulait le gouvernement ? C'est que les premiers frais fussent faits par la commune : le gouvernement ne serait venu qu'en aide ; mais alors la commune reconnaissait qu'elle était chargée des travaux, et que dans la suite elle devrait faire les dépenses nécessaires pour tenir le canal dans un bon état de conservation. C'est ce que la commune ne pouvait pas faire ; car, si l'on peut soutenir jusqu'à un certain point qu'il y du doute sur la question de savoir à qui incombe, en strict droit, la charge d'entretien de cette voie navigable, il faut reconnaître du moins que toutes les présomptions sont que la dépense est à charge de l'Etat, toutes les présomptions sont en faveur de la commune et contre l'Etat. C'est un canal abandonné auquel on n'a pas mis la main depuis nombre d'années. Les derniers travaux ont été faits par les étals de Flandre ; c'est en 1787 et en 1788 que ces travaux ont été exécutés par la province.

On pourrait prétendre dès lors, jusqu'à un certain point, que c'est la province qui doit se charger des travaux, et cependant si la contestation devait être portée sur ce terrain, la province ferait remarquer à l'instant que depuis l'époque que je viens de rappeler, c'est l'Etat qui perçoit les revenus du canal, le produit de la pêche. Voilà donc encore une présomption contre l'Etat.

Je dis qu'il peut y avoir du doute quant à la question de droit, mais la question ne peut pas être résolue contre la commune. Nous demandons, non pas que la question soit résolue contre l'Etat, mais du moins que la commune ne soit pas condamnée à jamais ; car, puisque des travaux sont reconnus indispensables, et puisqu'il faut les commencer, du moment que vous vous bornez à faire quelque chose pour le canal de Moervaert, sans y comprendre le canal de Stekene, vous décidez implicitement que le reste des travaux doit être fait par la commune.

Nous ne demandons pas, je le répète, que la question soit tranchée ; nous la réservons ; nous proposons seulement un subside extraordinaire, pour l'exécution des premiers travaux. Quant à la question dcs frais ordinaires d'entretien, qu'on entre, si l'on veut, en relation avec les communes : il y aura là des compensations à obtenir, j'en ai la conviction.

Messieurs, l'importance du canal de Stekene n'a plus besoin d'être démontrée. Les années précédentes, on vous a dit que ce canal met tout le nord du district de Saint-Nicolas en communication avec la ville de Gand ; que le nord du district de Saint-Nicolas n'a pas d'autre communication avec la ville de Gand que par ce canal.

On vous a cité le nombre des bateaux qui naviguent habituellement sur le canal, lorsque le canal est bien navigable, ce qui n'arrive pas toujours ; je ne me rappelle pas ce nombre. Mais pour vous faire voir quelle est l'importance de ce mouvement de navigation, je dirai qu'il y a quelques années, cinq communes, ayant ensemble une population de 25,000 habitants, se sont associées, pour faire exécuter une chaussée qui n'a d'autre but que d'arriver au canal de Stekene. Ce seul fait démontre toute l'importance du canal.

A la demande des honorables députés du district de Gand, le gouvernement qui n'avait pas l'idée de commencer les travaux, a bien voulu porter une somme au budget pour le Moervaert ; nous demandons si vous voulez exclure le district de Saint-Nicolas, nous demandons si vous ne voulez qu'exécuter la moitié de l'ouvrage.

Evidemment, quand il y a doute, et puisque la charge est beaucoup trop forte pour les communes, vous ne pouvez pas exiger que ce soient elles qui commencent les travaux ; il faut que l'Etat se montre un peu généreux.

Dans des cas analogues, alors qu'il y avait un travail utile à faire, jamais nous ne nous sommes laissé arrêter par la question de savoir si c'est la commune ou l'Etat qui devait en supporter la charge ; jamais nous n'avons chicané sur la question de droit. Je puis en fournir une preuve à l'instant même : nous venons d'allouer un crédit pour travaux à exécuter à la Senne. Il est bien évident qu'ici l'Etat se substitue aux riverains. La Senne n'est pas une rivière navigable et flottable, l'Etat n'est donc pas tenu de s'imposer cette dépense ; mais il a été reconnu qu'il y avait du bien à opérer, des travaux utiles à faire et nous avons voté un crédit dans ce but. Eh bien, nous demandons quelque chose de semblable pour les communes des Flandres ; je pense que vous ne serez pas moins généreux pour ces communes des Flandres que pour celles de Saint Josse-ten-Noode, Vilvorde, etc., qui sont dans les environs de Bruxelles.

- L'amendement est appuyé.

M. Manilius. - Messieurs, je ne viens pas combattre l'amendement de l'honorable M. Cools ; au contraire ; mais je croyais que le gouvernement, ayant l'intention de donner cent mille francs en deux ans, c'était assez ; cependant, s'il veut accueillir les 15,000 francs et même au-delà, je suis disposé à l'appuyer de mon vote, parce que je crois que cette allocation est utile et même nécessaire. Le canal dit Moervaert rend de grands services dans les deux districts de Gand et de Saint-Nicolas ; le canal de Stekene est un affluent du canal de Moervaert ; les travaux faits au Moervaert doivent être nécessairement exécutés au canal de Stekene.

Si donc M. le ministre des travaux publics ne s'oppose pas à l'amendement, je le voterai, afin qu'on mette enfin la main à l'œuvre.

Mais il ne suffit pas que nous votions les fonds pour faire des restaurations à des canaux ou des roules, il faut l'exécution.

Lorsque nous avons discuté la loi qui avait pour objet le creusement du canal de Schipdonck, nous avons voté en même temps une somme pour le redressement de l'Escaut, ainsi qu'une somme pour le creusement du canal de Moervaert.

Qu'arrive-t-il maintenant ? C'est qu'après quatre ans nous sommes assaillis de pétitions qui demandent le recreusement ou le curage qui avait été décrété déjà en 1846.

Alors, il y avait dans la somme votée pour le canal de Schipdonck, une partie destinée au curage du canal de Moervaert ; cette somme a été noyée dans le nouveau canal, elle a été absorbée par le creusement du canal de Schipdonck seul. Il n'y a pas eu de somme spécialement affectée par un article, mais il y a eu des additions, et ces additions nous ont fait voter les sommes pour le canal de Schipdonck, le redressement de l'Escaut, et le recreusement du Moervaert.

Maintenant je demande que cette somme soit réellement affectée au travaux du Moervaert dans la campagne de 1851, car ces travaux ont un coté très utile et sont de la plus grande urgence.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, si je repousse l'amendement de l'honorable M. Cools, ce n'est pas assurément par une pensée d'exclusion, mais par une considération que la chambre reconnaîtra, je pense.

Anciennement le canal de Stekene, que l'on peut considérer comme la continuation du canal de Moervaert, présentait un intérêt général pour le pays de Waes ; mais depuis le commencement de ce siècle, la partie comprise entre la ville de Hulst et le canal de Stekene, a été complètement envasée.

D'après une note que j'ai sous les yeux, les criques et anses maritimes ont été complètement supprimées, de manière que l'exécution de ce travail ne présente plus aujourd'hui qu'un intérêt purement local.

(page 372) Une longue négociation est intervenue entre le gouvernement et l’autorité provinciale. Le gouvernement avait offert à ces communes un subside de 10,000 fr., mais à la condition bien entendue que les communes qui doivent avant tout profiter du prolongement de ce canal de Moervaert, s'intéressent également à ce canal.

Jusqu'à présent, ces communes n'ont pris aucun engagement, et c'est cette considération unique qui a déterminé le gouvernement à prendre des mesures pour l'avenir.

L'honorable M. Manilius appuie l'allocation de 50,000 fr.

Cette fois, je rencontrerai une simple observation qu'il a faite qui repose sur une erreur.

L'honorable membre a prétendu que le gouvernement, dans l'évaluation du crédit destiné au creusement du canal de Deynze à Schipdonck, avait distrait une semblable somme, destinée au creusement du canal de Moervaert. C'est une erreur. Il est bien vrai que la dépense du canal de Moervaert a été comprise dans l'exposé des motifs du projet de loi, mais dans le libellé du crédit il n'en a pas été fait mention, je pense.

M. de T'Serclaes. - Je ne comprends pas comment la chambre pourrait hésiter à adopter l'amendement présenté par M. Cools et consorts, après les développements que son honorable auteur vient de lui donner.

M. le ministre des travaux publics élève une objection ; il dit que le motif pour lequel il ne se rallie pas à notre proposition, c'est que le canal de Stekene n'est pas d'intérêt général, mais exclusivement local. Le canal se continuait jadis jusqu'à Hulst, et mettait ainsi les deux parties séparées de l'Oost-Flandre en rapports directs ; aujourd'hui par-delà Stekene, le lit du canal est anéanti, et cette voie de communication a perdu toute importance.

Il est très vrai, messieurs, que la partie depuis Stekene jusqu'à la frontière de la Flandre zélandaise est complètement envasée ; c'est là un fait déplorable en lui-même, et qui a eu des conséquences très fâcheuses pour le développement de l'activité industrielle et commerciale de toute cette partie du pays. Au moyen de ce canal et du Moervaert, la ville de Hulst communiquait directement par eau avec la ville de Gand, mais cet envasement date déjà depuis plus de cinquante ans, et il ne diminue pas l'importance du canal pour le pays de Waes.

Afin d'établir que le canal de Stekene n'est pas d'un intérêt exclusivement local, il me suffit de vous rappeler, messieurs, le fait cité par l'honorable M. Cools que cinq communes ont fait des sacrifices très considérables pour mettre le canal en communication avec la ville de Saint-Nicolas. Voudrait-on maintenant que la commune de Stekene supporte seule les frais de recreusement ?

Troisièmement, pour démontrer que le canal intéresse une partie très importante du district, je dirai que sept grosses communes et vous savez ce que sont ces communes de nos Flandres, l'activité, l'industrie qui y régnent, leur grande population, les usines, les habitations nombreuses répandues sur leur territoire ; eh bien, sept de ces communes se sont réunies pour faire une démarche collective auprès du gouvernement et des chambres ; le conseil provincial de la Flandre orientale n'a pas cessé de joindre ses efforts à ceux des communes de l'arrondissement, il a plusieurs fois émis le vœu que cette charge qui incombe manifestement à l'Etat, fût enfin remplie par ce dernier. En 1850, à l'unanimité, si je ne me trompe, le même conseil provincial a encore chargé la députation permanente d'insister avec force près du ministère.

Vous connaissez l'activité prodigieuse qui règne à Saint-Nicolas et dans ses environs ; c'est un spectacle bien digne d'admiration de voir le génie industriel si développé dans une localité placée au milieu des terres, dans une position élevée, privée de toute communication naturelle avec la mer dont elle est si près, avec l'un des plus beaux fleuves du monde qui coule presque à ses portes, eh bien, privée de cette voie si facile et si peu coûteuse d'exporter ses nombreux produits, c'est en quelque sorte pour la mettre en communication avec les grandes voies navigables que l'on a fait de grands sacrifices.

Pour que ces sacrifices produisent des fruits, il faut que l'Etat remplisse son devoir, et mette en état de service un canal qui est sa propriété : il serait injuste d'imposer à une seule commune une charge de 30,000 francs après la part qu'elle a eue dans la construction des chaussées.

Il me semble que M. le ministre ne peut pas insister sur cette considération que le canal est d'intérêt local. Déjà dans les sessions précédentes cette question a été examinée avec soin. Il y a deux ans, l'honorable M. Vilain XIIII vous a démontré que le travail dont il s'agit aurait pour résultat de mettre le centre du pays de Waes en communication avec le Hainaut, Brabant, Anvers et Liège.

La somme que nous demandons de porter au budget, n'est que de 15,000 fr. c'est la moitié de la somme nécessaire pour le travail dont il s'agit ; celui que vous voulez exécuter, le curement du Moervaert, serait incomplet, si vous le faisiez jusqu'à son extrémité qui est le canal de Stekene.

J'espère que M. le ministre cédera au raisonnement si lumineux, si complet, que vient de présenter l'honorable M. Cools.

M. Cools. - Je demande à ajouter deux mots. J'ai toujours été convaincu que le gouvernement était mal renseigné, que, sans cela, il ne repousserait pas la demande que nous faisons. Je viens d'en acquérir la preuve, car M. le ministre remonte à 50 ans pour motiver son opposition. D'après lui, la situation ne serait plus la même qu'à cette époque, la dépense serait d'intérêt local, et ce serait à la commune de la faire.

La situation, sans doute, n'est plus la même, mais le travail à faire n'est pas moins d'intérêt général. On vous a donné la preuve que les localités environnantes sont intéressées à l'ouverture de cette communication. Faudrait-il demander également l'assistance de ces communes ? Non sans doute, personne ne pourrait y songer. Pourquoi donc Stekene seul devrait-il contribuer ? Est-ce parce que ce canal passe sur son territoire ? Mais je demanderai ce qu'on exige des communes riveraines du Moervaert. Je pense que le sacrifice n'est pas lourd.

Si j'ai demandé une deuxième fois la parole, c'est surtout pour faire connaître à la chambre cette circonstance qu'elle ignore, que la communs de Stekene, il y a quelques années, a déjà fait des dépenses considérables, qu'elle s'est imposée de grands sacrifices pour parvenir à faire décréter cette chaussée dont je vous entretenais tantôt.

Lorsqu'on lui a demandé son assistance, elle a fait observer que cette chaussée ne passait pas sur son territoire ; on lui a répondu : mais elle aboutit à votre canal. Alors elle s'est exécutée. Elle paye aujourd'hui des centimes additionnels pour cette chaussée ; et aujourd'hui on veut qu'indépendamment de cette charge qu'elle supporte déjà, elle commence par creuser un canal, uniquement parce que ce canal se trouve sur son territoire. Le gouvernement devrait se montrer plus généreux et consentir à ce que dans les travaux au Moervaert il soit convenu qu'on entend le Moervaert et ses affluents. C'est tout ce que nous demandons.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Si le gouvernement avait refusé toute espèce de subside, les observations de l'honorable membre seraient fondées ; le gouvernement a offert 10,000 fr., et c'est sur le refus des communes de participer à la dépense que le gouvernement a retiré son offre. En présence de ces faits, il est impossible d'admettre la proposition de l'honorable membre.

- L'amendement de M. Cools est mis aux voix ; il n'est pas adopté.

Le chiffre proposé par le gouvernement est adopté.

Articles 29 à 31

« Art. 29. Ouvrages établis pour améliorer le régime des eaux du sud de Bruges. Entretien et travaux d'amélioration : fr. 9,000. »

- Adopté.


« Art. 30. Canal de Deynze à Schipdonck. Entretien : fr. 4,000. »

- Adopté.


« Art. 31. Canal latéral à la Meuse, de Liège à Maestricht. Travaux d'entretien : fr. 30,000. »

- Adopté.

Article 32

« Art. 32. Réparation de dégâts éventuels : fr. 10,000. »

La section centrale a proposé la suppression de cet article. Le gouvernement s'est rallié à cette proposition.

- La suppression est adoptée.

Article 33 à 36

« Art. 33. Plantations : fr. 25,000. »

- Adopté.


« Art. 34. Frais d'études : fr. 7,000. »

- Adopté.


« Art. 35. Entretien des bacs et bateaux de passage et de leurs dépendances : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 36. Subside accordé à la direction du polder de Lillo, charge extraordinaire : fr. 2,000. »

- Adopté.

Section IV. Ports et côtes
Articles 37 à 40

« Art. 37. Entretien et travaux d'amélioration du port d'Ostende.

« Charge ordinaire : fr. 55,352 50.

« Charge extraordinaire : fr. 142,700. »

- Adopté.


« Art. 38. Entretien et travaux d'amélioration du port de Nieuport : fr. 18,000. »

- Adopté.


« Art.39. Entretien et travaux d'amélioration de la côte de Blankenberghe : fr. 78,000.

« Charge extraordinaire : fr. 16,000. »

- Adopté.


« Art. 40. Entretien des phares et fanaux : fr. 909.

« Charge extraordinaire : fr. 1,200. »

- Adopté.

Section V. Personnel des ponts et chaussées
Articles 41 à 43

« Art. 41. Traitement des ingénieurs et conducteurs des ponts et chaussées, frais de bureau et déplacements : fr. 522,500.

« Charge extraordinaire : fr. 30,066 65. »

- Adopté.


(page 373) « Art. 42. Traitement et indemnités du personnel subalterne des ponts et chaussées et des garde-ponts à bascule, pontonniers, éclusiers, etc. : fr. 346,501 14.

« Charge extraordinaire : fr. 18,245 31. »

- Adopté.


« Art. 43. Frais de jurys d'examen et voyages des élèves de l'école du génie civil : fr. 12,000. »

- Adopté.

Chapitre III. Mines

Articles 44 à 54

« Art. 44. Personnel du conseil des mines. Traitement : fr. 41,700. »

- Adopté.


« Art. 45. Personnel du conseil des mines. Frais de route : fr. 600. »

- Adopté.


« Art. 46. Personnel du conseil des mines. Matériel : fr. 2.000. »

- Adopté.


« Art. 47. Subsides aux caisses de prévoyance et récompenses aux personnes qui se distinguent par des actes de dévouement : fr. 45,000.

- Adopté.


« Art. 48. Impressions, achat de livres, de cartes et d'instruments, publication de documents statistiques, encouragements et subventions, essais d'expériences : fr. 7,000

- Adopté.


« Art. 49. Traitements et indemnités du personnel du corps des mines.

« Charge ordinaire : fr. 131,333 67.

« Charge extraordinaire : fr. 5,633 33. »

- Adopté.


« Art. 50. Jury d'examen et voyage des élèves de l'école des mines : fr. 6,000. »

- Adopté.


« Art. 51. Commission des procédés nouveaux. Frais de route et de séjour : fr. 600. »

- Adopté.


« Art. 52. Commission des procédés nouveaux. Matériel, achat de réactifs, d'appareils, etc. : fr. 1,400. »

- Adopté.


« Art. 53. Commission des annales des travaux publics. Frais de route et de séjour : fr. 1,100. »

- Adopté.


« Art. 54. Commission des annales des travaux publics. Publication du recueil, frais de bureau : fr. 3,900. »

- Adopté.

La chambre passe au chapitre IV.

Chapitre IV. Chemin de fer. Postes. Télégraphes

Première section. Chemins de fer
Discussion générale

M. Deliége. - Dans une séance précédente, l'honorable M. Osy a appelé l'attention du gouvernement sur la situation des stations d'Anvers et de Liège. J'adhère de tout cœur aux observations qu'il a présentées à ce sujet. Je crois que, dans un temps donné, lorsque l'état de nos finances le permettra on fera à ces stations les travaux qui sont utiles, qui sont nécessaires.

Mais il y a dans les environs de Liège une station très importante, située à la campagne, à Chênée, et qui n'a pas même un bâtiment, un hangar pour abriter les marchandises, qui souvent se trouvent exposées à toutes les intempéries des saisons.

M. de Theux. - Je demande la parole.

M. Deliége. - Ce n'est pas assurément pour contester mon assertion que l'honorable membre demande la parole ; car elle est de la plus rigoureuse exactitude : J'ai souvent eu l'occasion de constater par mes propres yeux l'état de délabrement de cette station. Plusieurs des prédécesseurs de l'honorable ministre des travaux publics s'en sont également assurés par eux-mêmes.

Il y a à cette station un autre inconvénient, c'est qu'elle est tellement étroite qu'il faut un personnel nombreux pour la manœuvre des wagons ; d'où il résulte un surcroit de dépenses et des chances d'accident ; car les chariots qui apportent des marchandises dans la station sont exposés à être renversés par les convois.

Enfin un dernier inconvénient qui, en cas d'accident, ajouterait beaucoup au danger, c'est que la station est à dix mètres au-dessus de la route, et l'on y arrive par une rampe extrêmement rapide.

On ne peut méconnaître que ce ne soit là pour une station aussi importante des inconvénients très graves auxquels il est urgent de porter remède.

Cet état de choses devait attirer l'attention des autorités locales. Aussi a-t-il été l'objet des plusieurs réclamations de la part du conseil communal de Chênée.

La plupart des membres du cabinet et notamment l’honorable M. Van Hoorebeke ont visité la station de Chênée. Avant lui, l’honorable M. Rolin l’avait également visitée. La nécessité de changer la station a été reconnue, et l'on a ordonné la confection de plans qui reposant au ministère des travaux publics. On est allé plus loin ; on a traité avec plusieurs propriétaires pour la cession des terrains nécessaires. Ces terrains ne sont pas d'une grande valeur ; la dépense sera peu considérable.

Je prie donc M. le ministre des travaux publics de vouloir bien dire si dans un court espace de temps il compte faire agrandir et achever cette station si importante pour le commerce des environs de Liège et comme affluent d'une grande partie du Luxembourg belge et du Luxembourg grand-ducal.

M. de Baillet-Latour. - Messieurs, ce n'est point un discours de clocher que je viens faire. Je n'ai, au sujet du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse, que des considérations d'intérêt général à vous soumettre.

Le chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse a déjà subi bien des vicissitudes.

Dès 1834, on reconnaissait la nécessité de favoriser par un chemin de fer la production de la houille dans le bassin de Charleroy, de la fonte et du fer dans un grand nombre d'établissements métallurgiques du Hainaut et de la province de Namur ; et d'assurer l'exportation de ces produits vers la Meuse française M. de Puydt fit des études à ce sujet et présenta un projet de chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse.

Deux commissions d'enquête, l'une du Hainaut, l'autre de la province de Namur, prirent, en septembre 1835, des conclusions favorables à l'avant-projet et à la demande de concession.

En 1836, un arrêté royal du 16 avril décrète l'utilité publique du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse.

En 1837, la concession est mise en adjudication, et le 12 avril M. de Puydt et Cie sont déclarés concessionnaires.

Ces concessionnaires cèdent leurs droits à une société anonyme en 1838. Celle-ci commence les travaux, mais bientôt ils sont abandonnés, et la société est dissoute en 1839.

En 1840, les premiers concessionnaires demandent la garantie d'un minimum d'intérêt du capital d'exécution.

Le 11 juin, MM Seron, Zoude et Puissant, membres de cette chambre, font de cette demande l'objet d'une proposition que la chambre prend en considération.

En 1842, le soin de faire de nouvelles études définitives est confié aux ingénieurs des ponts et chaussées.

Bientôt, après une nouvelle société de capitalistes belges et anglais se constitue dans le but de construire le chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse.

En mars 1845, les chambres votent la concession du chemin de fer. Nous allons entrer dans l'année 1851, et ce chemin de fer est à peine arrivé au tiers de sa construction. Pour que ce chemin de fer, dont l'utilité était reconnue dès 1834, décrété dès 1836, en soit encore à ce point, aurait-on reconnu qu'on s'est trompé alors, et que ses résultats doivent être peu avantageux ?

Nullement. Comme député de cette partie du pays, je puis vous dire que le chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse doit ouvrir aux produits des houilles du bassin de Charleroy de nouveaux débouchés vers la France ; qu'il doit permettre aux fers belges de lutter avantageusement sur notre marché intérieur contre les fers anglais, par cela seul qu'il aura réduit le prix de fabrication au moyen de la diminution des prix de transport des matières premières ; qu'il doit faciliter le transport des houilles vers nos ardoisières, et celui de nos ardoises vers le marché intérieur, qu'il doit favoriser l'exploitation de nos belles carrières de marbre, et de nos vastes forêts. Philippeville en particulier fut devenu, grâce à ce chemin de fer, le centre de toutes les opérations métallurgiques du pays ; car Philippeville est riche en gîtes de plomb, de zinc, de pyrites, en minerais de fer fort, très estime. Couvin aurait acquis une plus grande importance industrielle, et l'Etat qui, à ce que l'on m'assure, vient de se rendre adjudicataire des établissements de Couin, y trouverait lui-même un avantage réel. L'économie des transports est le premier élément de la fabrication, et pour la métallurgie une question d'existence. Déjà une partie de ces résultats sont obtenus par l'exécution incomplète de ce chemin de fer, mais Philippeville et Couvin sont exclus du bénéfice de cette exécution.

Si je me bornais à vous rappeler cela, vous m'accuseriez peut-être de parler pour ma localité. Mais ce n'est pas en député de Philippeville, c'est en député belge que je veux vous démontrer l'utilité du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse.

Je ne demande pas l'achèvement du chemin de fer de l'Entre-Sambre-el-Meuse, seulement parce que le chemin de fer doit ouvrir à nos produits houillers, à nos fontes, à nos fers, à tous les produits de notre sol si riche, des débouchés nouveaux qui leur permettront d'aller chercher leur marché naturel au cœur même de l'est de la France ; je le demande encore, et surtout, parce que ce chemin de fer doit être une des grandes artères de la circulation européenne, parce qu'il aura pour nos relations avec la France, l'Allemagne du Midi, la Suisse et l'Italie, une importance aussi grande que celle du chemin de fer de l'Est pour nos relations avec le Zollverein.

Le chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse doit relier l'Escaut au Rhin à Strasbourg, comme le chemin de fer de l'est a relié l'Escaut au (page 371) Rhin à Cologne. Anvers et Ostende pourraient ainsi devenir les entrepôts du Rhin français et de l'Est de la France, comme ils sont les entrepôts du Rhin allemand et de l'Allemagne centrale.

Mais il semble que les concessionnaires du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse refusent eux-mêmes de recueillir tous les bénéfices qu'il doit leur rapporter ; il semble que jusqu'ici l'Etat n'ait pas compris l'importance de cette grande ligne. Pour qu'elle soit complète, il ne manque plus que quelques kilomètres à construire, on ne les construit pas. On n'a pour ainsi dire qu'une porte à ouvrir, on s'obstine à la laisser fermée. On peut faire de ce chemin de fer une grande route du commerce européen, on s'obstine à le laisser à l'état d'impasse.

Ce chemin de fer, tel qu'il est, n'a qu'un intérêt de localité. Tel qu’il sera, si le gouvernement le veut, il aura un immense intérêt pour tout le pays.

Le chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse devait être achevé au 31 décembre 1850. En 1848, à cause de la crise politique et de la crise financière qui s'ensuivit, les chambres accordèrent un délai à la société pour l'achèvement des travaux. D'après la nouvelle convention du 16 juin 1848, la compagnie s'engageait à avoir terminé avant le 31 décembre 1851 le chemin de fer et tous ses embranchements, et à avoir exécuté au 31 mars 1850, la moitié de ce qui reste à faire entre Walcourt et Vireux.

Au mépris de cette convention, les travaux interrompus, en 1848, n'ont pas recommencé ; on n'a pas employé un seul ouvrier sur toute la ligne. La société a manqué à la première partie de ses engagements, il lui reste trop peu de temps d'ici au 31 décembre 1851, pour qu'il lui soit possible de remplir la seconde.

L'an dernier déjà, la société avait témoigné tout son mauvais vouloir ; elle avait manifesté l'intention de suspendre l'exploitation de la partie construite. Je me suis adressé alors à l'honorable prédécesseur de M. le ministre des travaux publics, je lui ai représenté le tort que cette interruption causerait à la province de Namur ; des députations d'industriels sont venues à Bruxelles et ont été reçues par M. Rolin, qui faisant droit à leurs réclamations et aux miennes, a déployé vis-à-vis de la société une heureuse fermeté. Grâce à cette fermeté et à quelques justes concessions, le service n'a pas été interrompu.

J'ai la conviction que M. le ministre des travaux publics est tout disposé à montrer tout autant de fermeté, mais le moment d'en faire preuve me semble arrivé déjà. Le gouvernement est en droit d'agir avec rigueur envers la société, car la société a déjà manqué à ses engagements ; attendre pour agir au 31 décembre 1851, c'est reculer encore le moment où nous serons en possession de notre chemin de fer.

Le gouvernement doit d'autant plus intervenir dans cette affaire qu'il y a un peu de sa faute si le chemin de fer n'est pas achevé. Voici comment. D'après la convention de 1845, la compagnie ne devait dépenser que 15 millions et demi pour achever son chemin de fer, qui devait être à simple voie. Les embranchements devaient être exploités par chevaux, les rails ne devaient peser que 18 kil par mètre, et tous les ponts devaient être construits en bois à l'américaine. C'est à ces conditions que la législature donna la concession. Si le gouvernement eût tenu à leur exécution, notre chemin de fer serait construit en entier.

Mais ces conditions n'ont pas été remplies ; la compagnie, certaine de la grande valeur de la ligne, a commencé à construire son chemin de fer à double voie, a acheté les terrains pour une double voie jusqu'à Vireux, a employé des rails de 34 kil. par mètre, a fait construire ses ponts en pierre de taille, etc. ; aussi les 15 millions et demi sont dépensés et au-delà, et le chemin de fer n'est arrivé qu'au tiers de son exécution.

Certainement un chemin de fer construit dans ces nouvelles conditions serait bien plus avantageux au pays ; mais pour cela il faudrait qu'il fût achevé. Or, pour l'achever il faut encore une somme de 9 millions environ, et M. le ministre, avant d'autoriser les travaux autres que ceux indiqués dans la convention, devait s'assurer que la société avait un capital suffisant pour terminer son chemin de fer dans ces nouvelles conditions. Il ne l'a pas fait, et si maintenant le gouvernement n'intervient pas d'une manière efficace, le chemin de fer de l’Entre-Sambre-et-Meuse ne sera jamais terminé. C'est donc aujourd'hui à M. le ministre des travaux publics à réparer un mal qui ne peut lui être reproché à lui personnellement.

La société n'est plus en droit d'exciper du manque d'argent pour excuser sa violation des clauses de la nouvelle concession, et la dédaigneuse indifférence avec laquelle elle se joue de ses engagements. Aujourd'hui la crise de 1848 est terminée, les circonstances sont favorables à de nouveaux appels de fonds, aucun prétexte ne peut être allégué pour excuser l'inaction de la société.

Le gouvernement, en présence d'un tel état de choses, doit agir énergiquement. La convention de 1848 ne l'a pas laissé désarmé. La société a déjà encouru la déchéance ; si le gouvernement ne veut pas agir avec une rigueur trop grande et la prononcer dès à présent, au moins il doit s'expliquer très nettement avec la société, et la convaincre qu'un nouveau délai ne lui sera pas accordé, et que la déchéance sera prononcée si elle n'exécute pas ses engagements.

Cela est d'autant plus urgent que, dans les premiers jours du mois prochain, une réunion d'actionnaires doit avoir lieu, et que la résolution du gouvernement, nettement formulée, influera nécessairement sur les décisions de cette assemblée.

Cette fermeté de la part de M. le ministre des travaux publics sera non seulement très utile aux intérêts industriels et commerciaux du pays, aux ouvriers auxquels elle fera rendre des travaux importants, mais encore à la société elle-même et aux actionnaires du chemin de fer.

Pourquoi ce chemin de fer produit-il de si faibles résultats, en effet ? Tout simplement parce qu'il n'exploite et ne dessert que quelques localités, parce qu'il manque de grands affluents qu'il est tenu de s'ouvrir, parce que surtout il est interrompu au lieu d'aller rejoindre en France les grandes voies de communication qui le relieraient au Rhin et à tous les départements de l'Est.

Je prie donc M. le ministre de nous faire connaître quelles sont les intentions du gouvernement au sujet du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et Meuse, et s'il est disposé à prendre les mesures les plus énergiques, afin de forcer la société à remplir ses engagements.

Si la société s'y refuse, si elle aime mieux encourir la déchéance, il sera bien facile d'obtenir l'achèvement de cette ligne si importante de chemin de fer, soit par l'Etat, soit par une nouvelle société qui trouverait dans la partie déjà exécutée de grandes ressources pour entreprendre les travaux qui restent à faire.

Je sais et j'ai la conviction que plusieurs compagnies s'empresseraient de se rendre concessionnaires et s'engageraient volontiers à achever cette ligne dans un temps très rapproché.

Avant de terminer, je demanderai à M. le ministre une modification toute dans l'intérêt des voyageurs. Les convois mixtes de la société du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse qui parlent de Morialmé à 10 heures 30 minutes prennent des voyageurs. Mais par une rigueur que rien ne peut justifier, on force la société à faire descendre ces voyageurs à Mont-sur-Marchienne et tandis que le convoi parcourt en trois minutes la distance de Mont-sur-Marchienne à Marchienne où se trouve la station du chemin de fer de l'Etat, les malheureux voyageurs sont obligés de passer 20 minutes au moins, et par les temps les plus détestables, pour parcourir à pied cette même distance. Il serait juste et humain d'autoriser la société à conduire les voyageurs jusqu'au croisement du chemin de fer de l'Etat à Marchienne.

M. de Brouwer de Hogendorp. - Je crois que la chambre est fatiguée, peu disposée à entendre une discussion qui se prolongerait. Je renonce donc à engager une discussion sur le chapitre Chemin de fer. J'aurais beaucoup de choses à dire à M. le ministre des travaux publics, qui a répondu à ce que je n'ai pas dit, et qui n'a pas répondu à ce que j'ai dit. On a donné à mes comparaisons un tout autre sens que celui qu'elles avaient. Je me réserve cependant de pouvoir dire quelques mots sur l'article 55.

M. Moxhon. - Messieurs, d'honorables collègues ont déjà attiré l'attention de la chambre et particulièrement de M. le ministre des travaux publics sur les désastres dont la vallée de la Sambre a été victime. Je n'entends nullement revenir sur ces faits déplorables ; je prierai seulement M. le ministre de vouloir nous dire s'il croit que le chemin de fer de Bruxelles à Namur pourra bientôt être remis en activité dans tout son parcours, et si dans ce moment il ne lui est pas proposé de réparer les ponts en quinze jours avec une économie notable sur tout ce qui s'est fait précédemment. Puisque j'ai la parole, je prierai aussi M. le ministre de vouloir accorder toute sa sollicitude aux négociations entamées pour amener le plus tôt possible l'établissement d'un pont sur la Meuse à Andenne. L'ajournement prolongé de toute solution à cet égard laisse en souffrance les plus graves intérêts.

Je dois faire remarquer que la station du chemin de fer à Namur est restée jusqu'à ce jour un ignoble hangar ; il serait temps, ce me semble, de mettre la main à l'œuvre pour doter Namur d'une station définitive.

J'ai été charmé d'apprendre de M. le ministre, que l'élude d'une rigole de déversement du trop-plein des eaux du canal de la Sambre s'étudiait près de la ville de Namur. Mais si j'en crois l'espérance d'hommes spéciaux, c'est le système complet du régime des écluses qu'il faudrait étudier, pour établir un rapprochement complet avec les constructions qui ont eu lieu pour l'établissement du chemin de fer le long de cette rivière.

M. Moncheur. - Messieurs, je ne me suis pas fait inscrire pour revenir sur les reproches que j'ai articulés au début de la discussion générale contre le département des travaux publics, reproches d'inertie et d'absence complète de toute mesure prise spontanément par ce département pour pourvoir provisoirement au transport des marchandises et des personnes entre Namur et Charleroy, aussitôt après la rupture des ponts sur la Sambre.

Cependant, je pourrais vous faire remarquer, messieurs, que les paroles mêmes de l'honorable ministre des travaux publics n'ont fait que confirmer le fondement de ces reproches ; car il en résulte, que tout ce que son département a fait, à cet égard, s'est borné à accorder au propriétaire d'un char-à-banc, l'autorisation de transporter de Floreffe à Châtelineau les voyageurs qui osent se risquer à un semblable moyen qui est évidemment insuffisant et qui deviendrait nul si plus d'une quinzaine de voyageurs se présentaient pour s'en servir.

Voilà, messieurs, en définitive, tout le bagage (permettez-moi cette expression) du département des travaux publics, en fait de mesures prises par lui en cette grave circonstance et depuis cette date du 17 août, c'est-à-dire, plus de quatre mois, nous sommes livrés à ce provisoire vraiment intolérable. Mais laissons-là ce qui, j'espère, ne sera bientôt plus qu'un triste passé !

(page 375) D'après les contrats faits avec les constructeurs des nouveaux ponts sur h Sambre, ceux-ci devaient être achevés au 1er janvier prochain, c'est-à-dire dans quelques jours. Il est malheureusement certain que cela n'aura pas lieu ; mais l'industrie est, surtout en ce moment, très intéressée à connaître l'époque à laquelle le chemin de fer de Charleroy à Namur sera de nouveau livré à la circulation ; car bientôt sans doute les glaces vont intercepter la navigation de la Sambre, et il serait utile, au point de vue des approvisionnements, que les consommateurs et les industriels sachent à quoi s'en tenir. J'espère que M. le ministre des travaux publics tiendra la main à ce que les travaux s'achèvent le plus tôt possible.

Messieurs, j'avais demandé la parole pour attirer de nouveau l'attention de l'honorable ministre des travaux publics sur une question à laquelle il n'a pas répondu. Cette question est d'une grande importance. C'est celle du transport direct des marchandises, tant sur les chemins de fer de l'Etat, que sur les chemins de fer concédés.

Messieurs, le système du gouvernement est celui-ci : Les marchandises déposées à une station du chemin de fer de l'Etat pour une autre station du chemin de fer de l'Etat, doivent être transportées par le chemin de fer, n'importe quels pourront être les détours que les marchandises seront obligées de faire avant d'arriver à leur destination, et elles seront transportées au prix du tarif pour tout ce parcours, pour tous ces détours.

Or, je vous ai déjà donné un exemple de l'application de ce principe, je vais vous en donner un autre.

Si je dépose, par exemple, des marchandises à la station de Floreffe pour la station de Liège, ces marchandises doivent parcourir tout le chemin de fer de l'Etat sur les lignes de Bruxelles, Malines, Louvain et Liège. C'est à-dire que ces marchandises parcourent les chemins de fer de l'Etat sur un espace de 60 lieues, au lieu de 14 lieues qui sépare la station de Floreffe de celle de Liège, stations qui sont aujourd'hui reliées par le chemin fer de concédé de Namur à Liège.

Vous comprenez, messieurs, que ce principe ne pourra être maintenu, parce qu'il est contraire à toute idée commerciale, à toute idée saine d'économie politique et qu'au point de vue des intérêts industriels, il est impossible de le justifier.

Ce système a pour but, je le comprends, dé retirer quelques profils de plus du chemin de fer de l'Etat et l'on m'objectera que lorsqu'on doit désirer de faire produire par le chemin de fer tout ce qu'il peut donner, on ne peut lui enlever ce bénéfice.

Mais, messieurs, est-il certain que le système contraire à celui du gouvernement, c'est-à-dire celui d'une connexion complète de tous les chemins de fer belges, quant au transport des marchandises, amènerait une perte pour l'Etat ? Je ne le pense pas. Mais cela fût-il même certain, je dis qu'il sera impossible au gouvernement de maintenir son principe actuel, parce qu'il est contraire à la nature même des choses.

Comme je l'ai dit dans la discussion générale, ce n'est pas à un système aussi étroit qu'il faut demander des produits au chemin de fer ; c'est à une bonne tarification et à une économie bien entendue dans l'exploitation.

Je dis qu'il n'est pas du tout certain que le système que j'ai préconisé amènerait une perte pour le trésor, parce que les chemins de fer concédés vivifieraient les chemins de fer de l'Etat, comme les chemins de fer de l'Etat vivifieraient les chemins de fer des compagnies. Les uns déverseraient leurs marchandises aux autres.

Ainsi, dans le cas que j'ai proposé, il est évident que si les industriels, de Charleroy, par exemple, peuvent adresser leurs marchandises directement de Charleroy à Liège, par le chemin de fer de l'Etat et par le chemin de fer concédé, ils se livreront à ces transports, tandis que s'ils ne peuvent faire cheminer leurs marchandises que jusqu'à la station du chemin de fer de l'Etat à Namur, où ils seront ensuite astreints à de nouveaux frais et à de nouveaux transbordements, ils s'en abstiendront et choisiront un autre moyen.

Je dis donc que la prospérité des chemins de fer de l'Etat, comme la prospérité des chemins de fer concédés, est intéressée à ce qu'on adopte le système que je préconise, en opposition avec celui du gouvernement.

Messieurs, les paroles de l'honorable ministre des travaux publics ont confirmé un troisième point sur lequel j'avais attiré son attention, c'est la nécessité de la construction d'un pont sur la Meuse à Andennes. Je me permettrai seulement de lui faire observer qu'une somme de 85,000 francs n'est certes pas considérable lorsqu'il s'agit d'un ouvrage aussi considérable que celui-là. Je suis étonné, je l'avoue, que ce chiffre ait paru élevé à M. le ministre des travaux publics et l'ai engagé à demander des études nouvelles avant pour but de substituer au projet de construction du pont en pierres, un autre projet d'une construction en charpente. Une construction en pierres est évidemment supérieure, sous tous les rapports, à une construction en charpente, et l'intérêt bien entendu de l'Etat exige que l'on choisisse le premier projet.

M. H. de Baillet. - Messieurs, je me permettrai de rappeler à l'honorable ministre des travaux publics la demande que lui a faite mon honorable ami M. Osy, si nous pouvons avoir l'espoir qu'on mettra bientôt la main à l'œuvre pour la construction des stations d'Anvers et de Liège.

Je prierai l'honorable ministre des travaux publics de répondre à cette demande.

Je n'insisterai pus davantage sur la nécessité de commencer sans retard ces travaux après douze ans d'attente. Je ne demanderai pas non plus une création de bons du trésor pour ces constructions ; mais je prierai l'honorable ministre des travaux publics de faire au moins cette déclaration, qu'il regarde ces travaux comme bien urgents, et qu'il emploiera les premières ressources qui seront à la disposition du gouvernement pour les exécuter.

M. de Theux. - Messieurs, la société concessionnaire du chemin de fer du Limbourg, et du chemin de fer de Jurbise à Tournay, a mis beaucoup de célérité à l'exécution de ses travaux, et, sous ce rapport, je n'ai qu'à la féliciter.

Mais, malheureusement, messieurs, il n'en est pas de même en ce qui concerne l'achèvement des stations dans la province de Limbourg. Ainsi, par exemple, à la station de Hasselt, station extrême, il n'existe aucun lieu pour abriter les locomotives et tout le matériel d'exploitation, et il n'existe qu'une misérable baraque pour abriter les voyageurs. A la station de Saint-Trond, il n'existe également qu'une misérable baraque.

Depuis plusieurs années, la société est en possession de tous les terrains nécessaires, cependant je ne vois pas qu'on mette la main à l'œuvre pour la construction des bâtiments nécessaires à l'exploitation.

Or, l'exploitation se faisant aux frais de l'Etat, et le bénéfice devant être partagé entre l'Etat et la société ; il en résulte que c'est la société qui profite de tout le retard apporté à la construction des bâtiments et que l'Etat en éprouve un préjudice considérable. C'est ainsi que les locomotives, étant arrivées à Hasselt par le dernier convoi, doivent retourner à Saint-Trond pour s'abriter.

Vous comprenez, messieurs, combien cela est préjudiciable à l'Etat. Depuis plusieurs années cette situation se prolonge, et je pense que le gouvernement ne peut plus tarder à exiger de la société l'accomplissement des devoirs que lui impose le cahier des charges. Dans la province, chacun s'étonne de voir l'état d'abandon complet de la station de Hasselt, et l'état non moins fâcheux de la station de Saint-Trond.

M. Mercier. - J'ai entendu avec plaisir l'honorable ministre des travaux publics annoncer l'intention de se mettre en rapport plus direct qu'on ne l'a fait jusqu'à présent avec les chefs de service du chemin de fer dans l'intérêt d'une bonne administration. Lors la discussion du budget des travaux publics de cette année, des débats assez longs se sont engagés sur l'organisation de l'administration générale du chemin de fer de l'Etat ; j'ai fait ressortir les inconvénients graves que présentait une double administration centrale, l'une au ministère même, l'autre en dehors du ministère, et il a été démontré que deux administrations ainsi superposées ne pouvaient que faire naître des retards dans l'expédition des affaires, des conflits déplorables et occasionner un surcroît de dépenses ; depuis lors des arrêtés d'organisation sont intervenus ; une inspection générale a été décrétée, un conseil d'administration a été formé ; mais la double administration centrale subsiste encore ; dans la discussion dont j'ai parlé, il était facile de s'apercevoir que l'honorable prédécesseur de M. le ministre actuel n'avait pas une entière conviction des avantages du système qu'il projetait en ce qui concerne le maintien de deux administrations centrales, et il est à croire que son opinion à cet égard s'est de plus en plus ébranlée, puisqu'il n'a pas nommé de titulaire à la place de directeur de l'administration centrale en dehors du ministère.

Quant à M. le ministre actuel, il semble tout à fait favorable au principe de la fusion des deux administrations pour les parties où elle sera reconnue possible, et c'est à cette disposition que j'applaudis. Mais une fois que cette organisation aura été opérée, il sera de toute nécessité que le chef de l'administration du chemin de fer au département des travaux publics ne soit plus distrait des attributions inhérentes à son emploi, pour être envoyé en mission ou en inspection, sur le chemin de fer ou ailleurs ; il ne peut y avoir d'exception à cette règle que dans des circonstances rares et extraordinaires ; en effet, les affaires languissent nécessairement, quand un chef d'administration est absent. M. le ministre ayant témoigné qu'il est favorable à ce système d'administration, je ne m'étendrai pas davantage sur ce point.

Après ces observations, je demanderai à M. le ministre s'il est permis d'espérer qu'un accueil favorable sera fait prochainement par le gouvernement à une demande qui lui a été adressée par l'administration de la société concessionnaire du chemin de fer de Manage à Wavre ; cette société demande à pouvoir, au moyen de son cautionnement et des fonds qu'elle a à sa disposition, construire une section de ce chemin de fer, section qui augmenterait la garantie du gouvernement. Pour l'achèvement de cette voie de grandes industries, de nombreuses populations privées de chemin de fer attachent le plus haut prix à une solution favorable et l'attendent de la justice du gouvernement.

M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Messieurs, les observations présentées par l'honorable préopinant se rattachent à une question qui a un caractère de gravité incontestable. Il y a quelques années, l'on critiquait avec vivacité l'organisation du département des travaux publics. On prétendait qu'il existait, en dehors de l'administration centrale, quatre grandes administrations parfaitement indépendantes, placées chacune sous l'autorité d'un fonctionnaire ayant un rang très élevé, et constituant, pour ainsi dire, un sous-ministère sans responsabilité.

Mon honorable prédécesseur avait parfaitement compris les vices de cet état de choses, et, en organisant le corps des ponts et chaussées, il y a remédié. Ainsi il a constitué au département la direction générale des ponts et chaussées et, en dehors de ce service une inspection bien entendue.

Quant au chemin de fer, il y avait peut-être plus de difficultés parce (page 376) que la question, il faut bien le dire, se compliquait de noms propres. Je crois, messieurs, que dans cette question il faut se mettre au-dessus des noms propres. On peut considérer l'administration du chemin de fer a priori d'une manière absolue, abstraite, et se demander ce qui convient le mieux dans l'intérêt du service. Or on peut comprendre dans l'ensemble des actes qui constituent l'administration du chemin de fer, deux services distincts, un service qui donne l'impulsion, un service qui administre sous la direction du chef du département et un service qui exécute, qui reçoit l'impulsion, qui ne doit pas non plus être dépourvu d'initiative, mais qui ne donne pas d'ordres.

Ainsi apprécié, ce deuxième service, le service d'exécution embrasse à son tour des services parfaitement distincts : le service des routes et travaux d'art, le service de la locomotion et le service commercial, le service des transports qui est tout à fait spécial. Il est évident qu'avec l'organisation actuellement existante, il peut y avoir moins de responsabilité pour les chefs de service, que le ministre lui-même peut être moins éclairé, qu'il peut y avoir plus de lenteurs, qu'il peut y avoir des intermédiaires et des rouages tout à fait inutiles.

C'est à faire disparaître cela que doit consister la tâche, tâche extrêmement difficile du chef du département.

Je n'ai pas pu, messieurs, dans le peu de temps que j'ai passé aux affaires me rendre un compte parfaitement exact des conséquences d'une semblable organisation ; mais je demande à la chambre de me laisser toute liberté à cet égard, toute ma liberté d'action ; je demande à pouvoir, en vue de cette organisation, opérer les transferts qui me paraîtront indispensables au bien du service, et avant que l'honorable M. Mercier eût appelé mon attention sur ce point, j'avais rédigé un amendement que je proposerai à la chambre de placer dans la colonne d'observations. Il est bien entendu que je me renfermerai dans les limites des allocations du budget ; j'ajouterai même que je prévois des simplifications et, par conséquent, des économies.

Mon amendement est ainsi conçu :

« Les crédits qui figurent au chapitre Ier, Administration centrale ; au chapitre IV, Chemin de fer. Postes. Télégraphes, pourront être réunis et transférés de l'un des articles à l'autre, selon les besoins du service. »

Je demande que la chambre adopte cette proposition qui laissera au ministre toute sa plénitude d'action dans l'organisation de l'administration du chemin de fer.

Messieurs, les honorables préopinants ont signalé à mon attention divers objets que je vais rencontrer d'une manière extrêmement brève.

L'honorable M. Deliége, et, après lui, d'autres orateurs ont appelé mon attention sur l'état déplorable où se trouvent un grand nombre de stations. Messieurs, cet état fâcheux n'est que trop réel ; il résulte d'un tableau que j'ai sous les yeux que, pour achever les diverses stations d'une manière convenable, il faudrait une somme de plusieurs millions.

Il est évident que dans ce moment-ci nous pouvons d'autant moins penser à faire une pareille dépense qu'il y a un certain nombre de stations inachevées, stations qu'il faudrait compléter avant tout.

Il y a, du reste, sur le crédit de 5 millions, une certaine somme disponible. Ainsi, je pense, qu'à l'égard de la station de Chênée qui figure au premier rang de celles qui ont besoin d'un hangar pour abriter les marchandises, il y aura moyen de faire, dans le courant de l'année prochaine, les travaux les plus indispensables.

L'honorable M. de Baillet-Latour a rappelé au gouvernement les engagements qui ont été pris à son égard, en ce qui concerne le chemin de fer concédé d'Entre-Sambre-et-Meuse. La compagnie concessionnaire de ce chemin de fer a dépensé, pour l'exécution de la section qui a été achevée, tout le capital de 14 millions qui devait suffire à l'exécution de toutes les sections.

Le délai dans lequel la compagnie concessionnaire doit exécuter chacune des sections, n'est pas déterminé : c'est seulement en 1851 que la compagnie devra avoir achevé l'ensemble de la ligne. Le gouvernement n'est pas resté en défaut d'avertissements ; c'est ainsi qu'en 1849 et en 1850, le gouvernement a de nouveau recommandé à la compagnie l'exécution des engagements qu'elle a pris à l'égard de l'Etat.

Il faut cependant être juste et reconnaître que la compagnie concessionnaire ayant dépensé tout le capital fourni par des bailleurs de fonds étrangers, pour l'exécution de la section achevée, il lui devient très difficile d'activer et même de reprendre les travaux en ce moment.

A cet égard, il faut que l'honorable membre se rende bien compte de la situation où se trouve le gouvernement. La section de Marchienne-au-Pont à Walcourt n'est pas productive ; elle ne le sera que quand la ligne entière sera achevée. Je demande ce que dans pareille situation, le gouvernement peut faire. Il ne peut que recommander à la compagnie concessionnaire l'exécution des engagements qu'elle a contractés, sauf à aviser ultérieurement.

Quant au chemin de fer de Manage à Mons, la compagnie concessionnaire a demandé une modification à la concession : elle désirerait aller jusqu'à Nivelles, au lieu d'aller jusqu'à Wavre.

Messieurs, cette affaire fait en ce moment l'objet de mon examen. Des négociations sont engagées, et, je dois le dire, une difficulté grave se présente ; il faudra que cette difficulté soit levée, avant que le gouvernement prenne une résolution.

L'honorable M. Moncheur désirerait que le gouvernement, à l'égard des compagnies, adoptât le principe de la plus courte distance, c'est-à-dire que le gouvernement abandonnât ses transports et les livrât aux compagnies.

Evidemment le gouvernement ne peut pas consentir à une semblable transaction. Lorsque la chambre a voté les diverses lois de concession, il a été bien entendu que les compagnies ne pourraient pas avoir les transports réservés au chemin de fer de l'Etat, en d'autres termes, que les lignes concédées étaient des affluents et non pas une rectification du chemin de fer de l'Etat. Du reste, si on posait ce précédent, il en résulterait un dommage considérable pour l'Etat.

C'est ainsi que tous les transports de l'Allemagne vers la frontière française, au lieu d'aller par Bruxelles à Quiévrain, prendraient le chemin de fer concédé de Liège à Namur, puis iraient de Namur à Charleroy, de Charleroy à Erquelines, et d'Erquelines jusqu'au point de destination ; en sorte qu'au lieu de faire un parcours de 135 kilomètres sur le chemin de fer de l'Etat, ces transports n'y feraient qu'un parcours de … kilomètres.

Du reste, veut-on avoir la preuve évidente que la chambre n'a pas voulu adopter le principe de la plus courte distance, lorsqu'elle a voté les lois de concession, c'est qu'on a stipulé qu'il y aurait des stations distinctes. Ainsi, pour le chemin de fer de Namur à Liège, la station de Namur était autre que la station du chemin de fer de l'Etat. Il a fallu qu'une loi intervînt pour décréter la fusion des deux stations. Si la chambre, en votant la concession du chemin de fer de Namur à Liège, avait voulu sanctionner le principe de la plus courte distance, la chambre n'aurait pas décrété l'établissement de deux stations.

Quant aux stations du chemin de fer concédé du Limbourg, les travaux à exécuter par la compagnie concessionnaire du chemin de fer de Jurbise à Tournay sont assez considérables ; ils s'élèvent à une somme très forte. La convention annexée à l'arrêté royal qui accorde la concession, porte à l'article 10 une disposition qui, selon moi, est fort explicite.

C'est sur l'interprétation de cette disposition que le doute peut surgir ; le gouvernement, quant à lui, ne partage pas ce doute ; mais cependant, avant de prendre une résolution définitive, il importe qu'il soit parfaitement éclairé sur les conséquences légales de la mesure qu'il s'agit de prendre.

M. de La Coste. - Messieurs, la chambre étant fatiguée, je n'abuserai pas de ses moments. J'avais l'intention de traiter à un point de vue général la question des lignes concédées dont l'exécution a été empêchée par les circonstances, de telle sorte que la déchéance a été prononcée ; mais je sens la nécessité d'être court.

Il y a quelque temps déjà, un député du Luxembourg, à l'occasion d'un autre budget, a adressé, quant à la ligne du Luxembourg, une interpellation à M. le ministre des affaires étrangères, et M. le ministre lui a donné des espérances.

L'honorable M. Moncheur a également parlé de la ligne de Louvain à la Sambre. M. le ministre des travaux publics a répondu que l'exécution de cette ligne ne serait possible que moyennant la garantie d'un minimum d'intérêt.

M. le ministre vient encore de prononcer quelques paroles au sujet de cette ligne ; mais comme il s'est tourné vers l'autre côté de la chambre, je n'ai pu les saisir, je les retrouverai au Moniteur.

Quant à moi, messieurs, je pense que cette question est une question générale ; elle ne doit point être traitée au point de vue de Louvain, au point de vue de Namur, ni au point de vue du Luxembourg ; elle doit être traitée à un point de vue général.

Quelle est, quelle doit être la position de l'Etat vis-à-vis des lignes dont il s'agit ? L'Etat est devenu propriétaire de tous les travaux effectués. A ce titre il entre dans tous les avantages et dans toutes les charges d'un propriétaire. Mais, j'en conviens, il serait très dangereux de dire qu'il entre également dans les obligations de la société à laquelle il succède, quant à l'achèvement de la voie. Personne n'oserait soutenir cette assertion, qui serait infiniment dangereuse, puisque l'industrie privée pourrait ainsi entraîner le gouvernement dans des opérations qui ne lui conviendraient aucunement.

Mais cependant, messieurs, dans les concessions dont j'ai l'honneur d'entretenir la chambre, il y a eu certaines considérations d'intérêt public et d'équité, qui ont fait adopter au gouvernement et à la chambre les lignes concédées, et notamment la ligne de Louvain à la Sambre, et celle du Luxembourg. Cette dernière avait pour ainsi dire été rachetée à cause des difficultés, de l'impossibilité même, qui était censée s'opposer à son exécution. On avait accordé à la province de Luxembourg un dédommagement. Néanmoins, dès que l'Etat a vu la possibilité de l'exécuter, par voie de concession, il en a saisi et la chambre en a également saisi avec empressement l'occasion. La ligne de Louvain à la Sambre était une compensation qui avait été vivement réclamée. L'honorable ministre des affaires étrangères se souviendra, je pense, en son ancienne qualité de ministre des travaux publics, des nombreuses réclamations qui avaient été faites à cet égard. Comme il y a dans la chambre plusieurs membres qui n'y siégeaient pas à cette époque, je pense qu'ils seront charmés de prendre note de ceci :

Il existe une sorte de promesse législative, quant à l'exécution d'un embranchement de la voie ferrée de l'Est vers Namur. Il y avait en outre de l'équité et un intérêt commercial à' rétablir les anciennes relations entre Namur et Louvain, que le chemin de fer de (page 377) l’Etat avait pour ainsi dire dévorées, en attirant à lui celles qui existaient autrefois dans cette direction.

Telles ont été les principales considérations qui ont fait non seulement autoriser, mais encourager la construction de cette ligne par voie de concession, qui l'ont fait appuyer par le gouvernement et adopter par les chambres.

Messieurs, ces considérations subsistent : la question de savoir quelle doit être l'attitude du gouvernement vis-à-vis des lignes concédées, est une question générale partout où il en est ainsi, et je voudrais que le gouvernement, partant de ce principe, traitât aussi la question à un point de vue général.

Je me bornerai, quant à présent, à recommander ces observations à l'attention de M. le ministre des travaux publics, aux sentiments de haute équité que nous avons été heureux de l'entendre exprimer hier.

Je lui demanderai seulement de bien vouloir appliquer les mêmes règles, d'apporter la même sollicitude en s'occupant du chemin de fer de Louvain à la Sambre, qui du reste ne concerne pas uniquement Louvain, car les riverains de la Sambre, Charleroy, Namur sont également intéressés à cette question ; je lui demande, dis-je, seulement de témoigner le même intérêt à l'exécution de cette voie, d'y appliquer les mêmes principes qu'à l'égard du chemin de fer du Luxembourg ; alors je serai tranquille pour l'avenir de cette ligne.

M. de Baillet-Latour. - La chambre paraît pressée. Cependant je réclame de dire encore quelques mots.

Je pense que M. le ministre des travaux publics n'a pas été exactement renseigné. La section de Morialmé qui est terminée est la plus productive, il est vrai, mais elle ne peut rapporter de bénéfices que lorsque le chemin de fer aura été terminé. Si la compagnie a dépensé le capital de 14 millions pour une partie seulement de son chemin de fer, il est évident que c'est au détriment des intérêts industriels du pays et notamment du bassin de Charleroy qui aurait beaucoup gagné à avoir un chemin terminé, eût-il été construit d'une manière moins dispendieuse.

Je suis certain que nos collègues de Charleroy m'appuieront sur cette question qui intéresse si vivement leur arrondissement.

Quant à se borner à engager la compagnie à remplir les clauses de la convention, cela n'aura pas grand résultat, car il est évident qu'elle n'a pas l'intention de continuer les travaux ; ce qui le prouve, c'est que l'on a fait vendre toutes les billes et tous les rails qui avaient été rassemblés pour continuer les travaux avant d'avoir renoncé à le faire. Je le répète, M. le ministre a été, je le crains, renseigné par quelqu'un qui porte trop de sympathie à la société du chemin de fer de l'Entre-Sambre-et-Meuse.

M. Mercier. - Je remercie M. le ministre de la promesse qu'il a bien voulu faire de porter son attention sur la demande des concessionnaires du chemin de fer de Manage à Wavre ; mais je suis obligé de rectifier une erreur qui s'est glissée dans sa réponse. Les concessionnaires de ce chemin ne demandent pas à être dégagés de l'obligation de construire la voie entière jusqu'à Wavre, ils entendent au contraire s'y soumettre, et la remplir au moment opportun ; bien plus, ils offrent comme garantie de son accomplissement non seulement leur cautionnement actuel, mais en outre une somme plus considérable encore qui serait employée à la construction d'une première section.

(page 379) M. Dechamps. - J'engage M. le ministre des travaux publics à presser la négociation pour lever la difficulté qui semble arrêter la solution à intervenir. La chambre sait que les concessionnaires ne demandent rien au trésor ; ils demandent seulement à pouvoir utiliser leur cautionnement qu'ils proposent d'employer à la construction d'une section qui mettrait les carrières très riches d'Arquennes et de Feluy en contact avec les chemins de fer de l'Etat, qui trouverait là une source de recettes nouvelles. Cette section tirerait Nivelles de l'isolement dans lequel cette ville se trouve. Elle alimenterait le travail dans les usines de Charleroy. Je ne comprends pas pourquoi le gouvernement ne prend pas une décision prompte et favorable.

Je voudrais maintenant répondre deux mots à ce qu'a dit M. le ministre des travaux publics quant au parcours direct par les lignes concédées. Je n'ai pas présent à la mémoire ce qui s'est passé lors de la concession de ces lignes, mais je crois que M. le ministre est dans l'erreur.

Quand on a discuté les projets de concessions de chemin de fer, en 1845, j'ai soutenu, il est vrai, que ces lignes seraient d'utiles affluents pour le chemin de fer de l'Etat et qu'elles ne feraient à celui-ci aucune concurrence dangereuse. Mais c'est uniquement un fait et non un principe que je voulais constater. Je prétendais que les voyageurs et les marchandises de transit, les transports à grande distance, étaient de très peu d'importance, eu égard au mouvement intérieur que ces nouvelles lignes allaient créer. On m'objectait que ces lignes allaient enlever à plusieurs sections de notre railway des transports acquis ; je l'ai contesté ; j'ai soutenu que les transports de la ligne du Midi, par exemple, vers la ligne de l'Est et vers celle de l'Ouest vers Courtray, étaient presque nuls, et que, par conséquent, les chemins de fer de Tournay à Jurbise, et de Namur à Liège, etc., n'enlèveraient pas ce qui n'existe pas, qu'ils apporteraient à l'Etat cent fois plus qu'ils n'enlèveraient.

Voilà, je crois, l'opinion que j'ai défendue. Le chemin de fer de Manage à Mons a déversé sur nos lignes 130,000 tonnes de houille en 1849 ; il n’en enlèvera jamais 10,000. Je ne comprends pas que l'on puisse forcer l'industrie à prendre le chemin le plus long, qu'on puisse leur interdire l'accès des lignes concédées. D'après ce principe, l'Etat pourrait, à coup de tarifs, tuer les compagnies par une guerre injuste et inqualifiable. Les chemins concédés font partie du réseau national ; l'Etat doit les considérer comme des associés et non comme des ennemis.

(page 377) M. le ministre des travaux publics (M. Van Hoorebeke). - Quand on a discuté la concession du chemin de fer de Mons à Manage, il a été convenu qu'elle ne ferait jamais tort à la ligne de l'Etat, qu'il ne s'agissait nullement de raccourcissement.

Voici la position que l'on ferait à l'Etat si le système que je combats était admis. Si des marchandises venant de Namur étaient remises en destination pour la France, arrivés à Manage nous devrions détacher nos machines avec notre personnel, remettre les marchandises que nous aurions prises à Namur et revenir à vide avec notre personnel et nos machines à Mons. Encore une fois, si ce système pouvait prévaloir, les compagnies concessionnaires absorberaient une partie du transport.

On peut réduire les distances réelles, de manière à concilier les intérêts du commerce et de l'industrie et les intérêts de l'Etat.

Je demande si, en présence de ces deux intérêts, nous pouvons faire prévaloir l'intérêt de la compagnie sur celui de l'Etat. Evidemment non.

- La discussion est close.

Article 55

« Art. 55. Traitements, indemnités.

« Charge ordinaire : fr. 1,042,626.

« Charge extraordinaire : fr. 72,613. »

M. de Brouwer de Hogendorp. - Je me bornerai à faire deux observations. La première porte sur les frais du personnel préposé à l'entretien de la voie et des stations. Dans la discussion générale j'ai fait la critique du personnel trop nombreux de ce service, j'ai dit que ce personnel pourrait être réduit considérablement, qu'on pourrait supprimer plusieurs chefs et sous-chefs de service et réduire le nombre des employés subalternes, qu'on pourrait également renoncer à employer des architectes. Et pour répondre à ce qu'a dit à cet égard M. le ministre, je dirai que cette réduction pourrait très bien se faire, sans, pour cela, devoir recourir au mode d'adjudication des travaux d'entretien de la voie, mode que je suis cependant loin de trouver aussi mauvais que l'a trouvé M. le ministre. A l'appui de ce que j'ai dit alors des dépenses trop grandes qu'occasionne ce service, je dirai maintenant, et je soumets mes chiffres à la méditation de l'honorable M. Van Hoorebeke, que pendant le premier semestre 1850 le plus grand chemin de fer anglais, et M. le ministre ne peut pas repousser cette comparaison ; car non seulement le trafic est plus considérable que sur notre railway, les convois y sont plus fréquents et plus lourds, les causes de dégradation y sont par conséquent plus grandes ; mais sur une étendue de 475 milles il y a 170 stations ; je dis que le service de l'entretien, du London and North-Western, dans un pays où les employés sont payés bien plus largement que chez nous, n'a coûté en frais de personnel, que 443 fr. 75 cent. par lieue exploitée, ce qui pour l'année entière fait 887 fr. 50 cent. Or, le chiffre demandé pour le même service au budget est de 193,439 fr. ; la dépense par lieue de route exploitée, pour traitements d'ingénieurs, architectes, etc., est donc de 1,730 fr. 22 cent, ou 832 fr. 72 cent, de plus, par lieue exploitée, qu'en Angleterre.

La deuxième observation que je ferai porte sur les frais de réparations aux locomotives et tenders.

D'après M. Belpaire, les réparations aux locomotives et tenders ont coûté en 1844, 1 fr. 34 c, par lieue parcourue. Je ne sais pas ce que ces réparations coûtent aujourd'hui ; les éléments me manquent pour en faire le calcul ; mais je dois croire qu'il n'y a pas de diminution sur ce point, puisque les dépenses générales, par lieue de parcours, au lieu de diminuer sont devenues plus considérables : de 11 fr. 60 c. en 1844, elles se sont élevées à 12 fr. 22 cent, en 1848. Les réparations des locomotives et tenders coûtent donc en Belgique 1 fr. 34 cent. En Angleterre sur le Great-Western elles ont coûté, en 1850, 84 centimes ; sur les diverses sections du grande réseau que j'ai cité plusieurs fois dans cette discussion, ces réparations ont coûté 71 centimes, 68 centimes et 50 centimes ; sur le Great-Northern elles n'ont coûté que 28 centimes par lieue de parcours ; mais je ne veux pas prendre ce dernier chiffre comme type, puisque le matériel sur cette voie c'est de construction trop récente. Quant à la comparaison des dépenses sur les lignes que j'ai nommées d'abord, M. le ministre ne la repoussera pas ; en effet si une partie des réparations aux locomotives se trouve en rapport de proportionnalité avec le travail dynamique effectué, la comparaison est tout à fait à l'avantage de notre matériel : nos locomotives ne marchent pas à. beaucoup près avec cette rapidité avec laquelle marchent les locomotives du Great-Western, et elles ne traînent pas un poids aussi considérable. Voici les éléments qui vous permettront de juger du travail dynamique qu'elles font : la moyenne du poids des convois de voyageurs a été en 1850 de 67 tonneaux ; celui des convois de marchandises de 284 tonneaux ; le nombre des lieues parcourues pendant les six premiers mois de l'année a été de 457,438, le nombre des voyageurs transportés à une lieue a été de 11,417,381 et le nombre des tonnes-lieues de marchandises, le bétail non compris, de 3,790,390. Quant à l'autre ligne que je comparée notre chemin de fer, le nombre de lieues parcourues en six mois par les locomotives y a été de 1,430,289, dont 2 cinquièmes avec des convois de marchandises, et les convois y sont plus forts que sur notre chemin de fer, puisque, pour les convois de voyageurs ils se composent de 11.5 voitures et pour les marchandises de 31.7.

Nos locomotives devraient donc nous coûter moins pour réparations que celles de ces lignes anglaises. Or, si je prends comme terme de comparaison les 84 centimes payés par le Great-Western, je trouve que nous avons payé 50 centimes de plus par lieue de parcours ou 255,000 francs de plus sur les 511,000 lieues parcourues en 1844 que la compagnie anglaise. Si je prends le chiffre de 71 centimes, qui est le prix le plus élevé payé par l'autre ligne, je trouve que nous avons payé, pour ce seul objet, 321,930 francs de trop. Je n'en dirai pas davantage.

- L'article 55 est adopté.

Articles 56 à 66

Art. 56. Primes des fonctionnaires et employés des diverses branches de service : fr. 140,000. »

- Adopté.


« Art. 57. Service général. Direction : fr. 16,400. »

- Adopté.


« Art. 58. Entretien, surveillance et police de la route : fr. 1,120,000. »

- Adopté.


« Art. 59. Locomotion et entretien du matériel : fr. 1,431,130. »

- Adopté.


« Art. 60. Litt. A. Transports et perception : fr. 615,600

« Litt. B. Prime pour économie de coke et régularité des convois : fr. 30,000. »

- Adopté.


« Art. 61.Imprimés, papiers, fournitures de bureau, etc. : fr. 118,744. »

- Adopté.


« Art. 62. Entretien et amélioration des routes, stations, bâtiments et dépendances.

« Charge ordinaire : fr. 262,000.

« Charge extraordinaire : fr. 127,000. »

- Adopté.


« Art. 63. Renouvellement des billes et des fers de la voie.

« Charge ordinaire : fr. 500,000.

« Charge extraordinaire : fr. 304,000. »

- Adopté.


« Art. 64. Approvisionnements. Combustibles. Objets de consommation, objets nécessaires pour l'entretien du matériel, redevances aux compagnies, etc. : fr. 2,014,000. »

- Adopté.


« Art. 65. Renouvellement du matériel : fr. 100,000.

« Charge extraordinaire : fr. 200,000. »

- Adopté.


(page 378) « Art. 66. Camionnage, pertes et avaries, loyers et menues dépenses : fr. 220,000. »

- Adopté.

Section II. Postes
Discussion générale

La chambre passe à la section 2, Postes.

M. Rodenbach. - Aux termes de la loi sur la réforme postale, lorsque le produit net de la taxe des lettres s'élèvera à deux millions, on adoptera la taxe uniforme à dix centimes. Déjà le produit brut s'élève à 2,800,000 fr. Je ne me dissimule pas que les dépenses sont considérables. J'espère que M. le ministre s'attachera à les réduire, et que cette mesure, jointe à l'accroissement incessant des produits, permettra au gouvernement de doter le pays de la réforme postale dans toute son étendue, c'est-à-dire de la taxe uniforme à 10 c.

M. David. - J'appelle l'attention de M. le ministre des travaux publics sur la nécessité de n'admettre dans le service des postes que des employés qui donnent des garanties de moralité.

J'indiquerai à M. le ministre un moyen de prévenir un genre de fraude bien facile. Il y en Belgique 3,500,000 personnes qui ne connaissent pas noire législation postale. L'usage des pèse-lettres n'est pas encore répandu. Aussi rien n'est plus facile à un facteur que d'ajouter indûment une surtaxe, comme s'il y avait eu affranchissement insuffisant en timbres-postes. Je demanderai si, afin de prévenir cette fraude, on ne pourrait pas indiquer la surtaxe au moyen d'un timbre appliqué dans le bureau de poste.

- La discussion est close.

Articles 67 à 69

« Art. 67. Personnel.

« Charge ordinaire : fr. 1,138,350.

« Charge extraordinaire : fr. 20,000. »

- Adopté.


« Art. 68. Matériel : fr. 463,500. »

- Adopté.


« Art. 69. Frais de construction et d'entretien des voitures destinées au service des postes sur le chemin de fer : fr. 20,000.

« Charge extraordinaire : fr. 20,000. »

- Adopté.

Section III. Télégraphes
Articles 70 et 71

« Art. 70. Traitements et salaires du personnel : fr. 44,000. »

- Adopté.


« Art. 71. Entretien : fr. 9,000. »

- Adopté.

Section IV. Régie
Articles 72 et 73

« Art. 72. Personnel : fr. 36,500. »

- Adopté.


« Art. 73. Matériel : fr. 3,500. »

- Adopté.

Chapitre V. Pensions

Article 74

« Art. 74. Pensions : fr. 7,000. »

- Adopté.

Chapitre VI. Secours

Article 75

« Secours à des employés, veuves ou familles d'employés qui n'ont pas de droits à la pension : fr. 5,000. »

- Adopté.

Chapitre VII. Dépenses imprévues

Article 76

« Art. 76. Dépenses imprévues non libellées au budget : fr. 18,000. »

- Adopté.

Vote des articles et sur l'ensemble du projet

La chambre passe au vote sur le texte du budget.

« Art. 1er. Le budget du ministère des travaux publics est fixé, pour l'année 1851, à la somme de 16,171,863 fr. 94 c, conformément au tableau ci-annexé. »

- Adopté.


« Art. 2. § 1er. (proposé par la section centrale auquel le gouvernement se rallie.) Des traitements ou indemnités ne peuvent être alloués aux fonctionnaires ressortissant au département des travaux publics sur les crédits spéciaux alloués pour des travaux de reconstruction. »

« § 2 (proposé par M. le ministre des travaux publics.) Les crédits qui figurent au chapitre premier, Administration centrale, au chapitre IV, Chemin de fer, postes, télégraphes, pourront être réunis et transférés de l'un des articles à l'autre, selon les besoins du service, »

M. de Theux. - Je suppose que, dans la disposition proposée par M. le ministre, il ne s'agit que du personnel.

M. Delehaye. - Evidemment. C'est le complément de l'article 2 proposé par la section centrale, et qui est relatif aux traitements et indemnités.

- L'article 2 est adopté.


- Il est procédé au vote par appel nominal sur l'ensemble du budget.

Il est adopté par 63 voix contre 1, celle de M. de Mérode (Félix).

Ont voté l'adoption : MM. Landeloos, Lange, le Bailly de Tilleghem, Lebeau, Le Hon, Lesoinne, Malou, Manilius, Mercier, Moncheur, Moreau, Moxhon, Orts, Pirmez, Rodenbach, Roussel (Adolphe), Rousselle (Charles), Tesch, Thiéfry, T'Kint de Naeyer, Van Cleemputte, Vanden Branden de Reeth, Vandenpeereboom (Alphonse), Vandenpeereboom (Ernest), Van Hoorebeke, Van Iseghem, Van Renynghe, Vilain XIIII, Ansiau, Anspach, Bruneau, Cans, Cools, Coomans, Dautrebande, David, de Baillet (Hyacinthe), de Baillet-Latour, de Breyne, de Brouwer de Hogendorp, Debroux, de Chimay, Dedecker, de La Coste, Delescluse, Delfosse, Deliége, de Mérode-Westerloo, de Perceval, De Pouhon, Dequesne, de Renesse, Destriveaux, de Theux, de Wouters, d'Hoffschmidt, Dolez, Dumon (Auguste), Dumortier, Frère-Orban, Jacques, Jouret et Verhaegen,

- La séance est levée à 4 heures et demie.